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DE
L'ÉCOLE 119
FRANÇAISE
DE
Laurent DUBOIS
INSCRIPTIONS GRECQUES DIALECTALES DE SICILE
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COLLECTION
DE
L'ÉCOLE 119
FRANÇAISE
DE
Laurent DUBOIS
INSCRIPTIONS GRECQUES DIALECTALES DE SICILE
CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DU VOCABULAIRE GREC COLONIAL
ÉCOLE FRANÇAISE DE ROME PALAIS FARNESE 1989
ROME
© - École française de Rome - 1989 ISSN 0223-5099 ISBN 2-7283-0185-9
Diffusion en France : DIFFUSION DE BOCCARD 11, RUE DEMÉDICIS 75006 PARIS
Diffusion en Italie : «L'ERMA» DI BRETSCHNEIDER VIA CASSIODORO, 19 00193 ROMA
SCUOLA TIPOGRAFICA S. PIO X - VIA ETRUSCHI, 7-9 - ROMA
AVANT-PROPOS
Dans notre pays, c'est à l'école linguistique d'Antoine Meillet et de Joseph Vendryes que l'on doit un intérêt renouvelé pour les dialectes du grec ancien et leurs monuments épigraphiques. Ces deux noms sont cités en 1927 par Emile Bourguet, au début de son étude méritoire sur le dialecte laconien. Dans la même lignée se situent Pierre Chantraine et Michel Lejeune, qui ont su nous transmettre ce souci de ne pas privi légier les textes littéraires et d'exploiter au mieux les ressources de l'épigraphie. Les découvertes des dernières décennies ont rendu plus que jamais nécessaire la constitution de recueils d'épigraphie dialectale. Certes, on souhaiterait disposer déjà d'une refonte du beau recueil d'Eduard Schwyzer (1923), ou mieux encore, d'une nouvelle édition des volumes de la série dirigée par F. Bechtel et H. Collitz, en partie plus que centenai re (1883-1915). En attendant, il semble que des entreprises limitées, moins ambitieuses, puissent être utiles aux dialectologues et aux li nguistes. C'est pourquoi j'ai commencé il y a quelques années, dans le cadre conjoint de l'Université de Paris X-Nanterre (Centre de recher ches helléniques J. Defradas) et de l'Ecole pratique des Hautes Etudes (IVe section), d'examiner une série d'inscriptions dialectales de Grande Grèce et de Sicile. Avec un petit groupe d'auditeurs, qui étaient en même temps des collaborateurs, j'ai été amené en particulier à réunir un bon nombre de documents de Sicile. Laurent Dubois, tout de suite après avoir achevé son travail sur le dialecte arcadien, couronné par un recueil dialectal complet pour cette région, s'est lui-même attaché à l'île de Kôkalos et à sa documentation très variée. Il apporte ici aux dialectologues un choix de textes, où sont rassemblées de nombreuses données éparses, dans un cadre géographique et historique commode. J'ai donc plaisir à présenter cette Syllogé de Sicile, que je crois destinée à rendre de grands services et à montrer l'exemple pour des recueils similaires. Olivier Masson
REMARQUE PRÉLIMINAIRE
L'idée de ce livre a longuement mûri au séminaire d'Olivier Masson à l'Ecole pratique des Hautes Etudes où beaucoup d'inscriptions de ce recueil ont été minutieusement examinées. Suivant depuis seize ans le cours du mardi après-midi, j'ai appris à avoir de la langue et de l'onomastique grecques une conception plus globale. En traquant les termes et les noms rares de Sélinonte à Chypre, et d'Olbia à Cyrène, aussi bien sur des timbres d'amphores ou des monnaies que dans des épigrammes tardives, Olivier Masson n'a cessé d'apprendre à ses audi teurs à ne négliger aucune source, si bref soit le renseignement fourni, pour accroître notre connaissance du grec d'une région. Ce livre, qui est entièrement inspiré par cet enseignement, se veut une contribution à l'étude du vocabulaire grec de Sicile à partir des seules sources épigraphiques. Cette syllogé dialectale n'aurait sûrement jamais vu le jour si, dans le même savant je n'avais trouvé, pour rassembler les textes, un initia teurpatient aux arcanes d'une bibliographie archéologique très éparp illée et parfois confidentielle, un maître attentif pour me signaler des erreurs et me mettre en garde contre des hypothèses insuffisamment étayées, et enfin un réviseur scrupuleux qui a su extirper du manuscrit des fautes nombreuses et des développements superflus. Il m'est enfin très agréable de remercier Monsieur Charles Pietri d'avoir accepté cet ouvrage dans la Collection de l'École française de Rome qui, depuis une génération, a joué un si grand rôle dans les pro grès de l'archéologie sicilienne.
INTRODUCTION
Grâce aux efforts constants des archéologues la masse des inscrip tionsgrecques de Sicile s'est considérablement accrue depuis la publi cation des IG XIV, n° 1-559, par G. Kaibel en 1892. Presque un siècle après ce grand corpus il était opportun de réunir à nouveau les plus importantes et les plus anciennes inscriptions qui furent rédigées par des descendants des vieux colons grecs de la grande île. Cet ouvrage n'est en aucune façon un corpus exhaustif : en sont par exemple exclues aussi bien les inscriptions hellénistiques en koinè que les longues et répétitives inscriptions financières de Tauroménion dont ne sont cités que quelques termes remarquables. Ne figurent pas non plus ici les inscriptions dont la publication n'a été que provisoire ou celles dont la lecture même est incertaine. Il s'agit donc d'une syllogé dialectale qui regroupe les vestiges épigraphiques les plus significat ifs et les plus anciens de la langue grecque de Sicile, du graffite céra mique au décret public, des légendes monétaires les plus typiques aux tablettes de malédiction. Comme l'épigraphie civique est extrêmement mal représentée en Sicile même, il était nécessaire d'inclure dans ce recueil les décrets émanant de cités siciliennes apparus dans les grands sanctuaires inte rnationaux comme Delphes, Olympie, Cos ou Magnésie du Méandre, documents de première importance puisque, du moins pour la période hellénistique, ils nous permettent de nous faire une idée des institu tions, de l'importance historique et de la langue de la cité qui rend le décret. Chaque inscription est présentée avec un bref lemme archéologi que, sa bibliographie essentielle et, pour les textes les plus anciens, un fac-similé, dans la mesure où il est possible d'en établir un. Le com mentaire qui suit la présentation du texte porte avant tout sur les pro blèmes d'écriture et les questions de vocabulaire. Je ne fais des remar quesdialectologiques que lorsqu'elles sont nécessaires à l'intelligence
XII
INSCRIPTIONS GRECQUES DIALECTALES DE SICILE
du texte, et j'ai préféré regrouper les remarques grammaticales en un appendice final (Index VIII). Chaque fois que cela était indispensable à la présentation du dos sier épigraphique, j'ai fait figurer au début de chaque section une brève notice historique qui comportent les dates essentielles du destin sou vent tragique des grandes cités de l'Occident grec. Le volume est divisé en cinq chapitres dont les quatre premiers sont consacrés à chacune des grandes souches colonisatrices, eubéenne, mégarienne, corinthienne et rhodienne. Le cinquième est moins unitaire car s'y trouvent rassemblées les inscriptions dialectales de l'i ntérieur et du Nord de la Sicile qui émanent de cités dont la fondation ou l'hellénisation, soit du fait du silence des sources, soit de l'ambiguïté de ces dernières, ne peut avec sûreté être attribuée à l'une des quatre grandes ethnies colonisatrices.
PRÉSENTATION DES INSCRIPTIONS
Signes épigraphiques Le système adopté est celui du SEG dans lequel est distinguée la correction de la faute du graveur de la résolution d'une abréviation. -
[...]: (.) : {.} : (.) :
restitution de lettres aujourd'hui perdues. correction moderne. suppression d'une lettre gravée par erreur. résolution d'une abréviation ou ajout d'une lettre qui facilite l'identification d'un mot (n implosif non noté, seconde de deux géminées).
Alphabets Les ductus remarquables sont signalés dans le lemme de chaque inscription. Quand il s'agit de caractériser l'alphabet d'un graveur sont ici sui vies les habitudes des spécialistes de l'épigraphie archaïque comme L. H. Jeffery dans ses Local Scripts of Archaic Greece (1961) ou M. Guarducci, sans son manuel, Epigrafia Greca I (1967) : toutes les deux ont, avec beaucoup d'autres, adopté les «couleurs» distinctives de la carte des alphabets dressée au siècle dernier par A. Kirchhoff dans ses Stu dien zur Geschichte des griechischen Alphabets14 (1863-1887) [1973] : - l'alphabet «rouge» ou occidental a été employé en Eubée, en Béotie, en Thëssalie, en Arcadie, en Elide, en Laconie, mais surtout en Italie du Sud et ensuite en Etrurie : X note L· et M/ note kh. - l'alphabet «bleu» est celui de Mégare et de Corinthe, mais sur tout celui que les Athéniens ont emprunté à l'Ionie, à la fin du Ve siè cle : Χ note kh et M/ note ps.
XIV
INSCRIPTIONS GRECQUES DIALECTALES DE SICILE Bibliographie des inscriptions
Pour les inscriptions dont la bibliographie ancienne est très abon dante, j'ai pris le parti de ne pas citer Y editio princeps, mais l'un des grands recuils comme les IG XIV ou les Iscrizioni greche lapidarie del Museo di Palermo de M. T. Manni Piraino, ouvrages dans lesquels figu retoute la bibliographie antérieure. Ces inscriptions sont donc citées sans l'abréviation «Pubi. :» et sans lemme génétique.
Accentuation des noms indigènes Les noms qui ne sont ni grecs, ni latins écrits en grec, ne sont pas accentués. En revanche, les noms indigènes munis d'un suffixe grec portent l'accent attendu pour ce suffixe.
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I -
LES COLONIES EUBÉENNES
Le corpus des inscriptions siciliennes en dialecte ionien est particu lièrement mince. Ceci est en rapport direct avec l'histoire des populat ions des cités chalcidiennes de la côte orientale de la Sicile. Leur pros périté et leur indépendance politique s'achèvent au début du Ve siècle quand elles sont victimes de la politique militaire expansioniste d'Hippocrate de Gela et de ses successeurs Gélon et Hiéron qui imposèrent leur autorité par de vastes déplacements de populations. A la fin du siècle enfin, Naxos, Léontinoi et Catane qui avaient pris le parti d'Athè nes pendant l'expédition de Sicile subissent la terrible vengeance de Denys l'Ancien. Zancle-Messène, quant à elle, est détruite en 396 par les Carthaginois. La vieille souche ethnique des Chalcidiens a donc été absorbée, voire supprimée, par les populations doriennes qui étaient politiquement prépondérantes1. Si les légendes monétaires de ces cités sont bien connues et nous donnent quelques indications intéressantes sur leur alphabet, seul le site d'Himère a jusqu'ici fourni quelques très brèves inscriptions. En outre, comme les nécropoles des cités ioniennes sont beaucoup plus mal connues que celles des cités doriennes nous n'avons que peu de graffites ioniens pour nous renseigner sur l'onomastique chalcidienne coloniale. Les seuls «textes» émanant d'une cité ionienne de Sicile sont appa rusà Olympie où les Grecs de l'Ouest allaient tout à fait naturellement consacrer les dépouilles de leurs victoires.
NAXOS
N'était le petit graffite publié récemment, n° 1, notre connaissance de l'écriture naxienne se réduirait à ce que nous apprennent les légen-
1 On trouvera une excellente mise au point sur l'identité et l'histoire des cités chalci diennes dans l'article de G. Vallet in, Gli Eubei in Occidente, 1979, p. 83-143.
4
LES COLONIES EUBÉENNES
des monétaires de la cité2 : l'alphabet rouge importé d'Eubée, avec un xi de forme X dans l'ethnique NAXION3, cède la place vers 430 à un alphabet de type oriental avec lequel l'ethnique est écrit ΝΑΞΙΟΝ4. 1 - Pied d'une kylix attique à vernis noir de la fin du Ve siècle découvert près de l'extrémité orientale du mur 1 près de la colline de Larenghi; inscription graffite sous le pied; Ve ex. Pubi. : M. C. Lentini, Bollettino Beni culturali e ambientali, Regione Sicilia, 3 (1982) p. 181-182, fig. 8. Cf. C. Gallavotti, Boll. d. Class. 6 (1985) p. 35-36 : autre lecture peu probable du nom.
Τιτταβό : φίλη
Outre le signe de ponctuation, on remarque que le lambda est ici de forme récente et non plus chalcidienne V . Le seul ionisme est Yêta final de φίλη. Le nom de femme Τιτταβώ doit être indigène : son radical se retrouve dans la variante Τιτταλος de Τιττελος attestée à Démétrias de Thessalie, cf. O. Masson, BCH 1972, p. 386 (Σύμμαχος Τιτταλου Σικε λός). Pour ce qui est de la désinence -ώ, et non -ώι comme partout ai lleurs dans les cités doriennes de Sicile, on ne peut décider entre un authentique ionisme et un trait indigène.
2 L'inscription publiée par M. Guarducci, MEFRA 1985, p. 7-34, est de lecture et d'in trop délicates pour être reprise ici. 3 Un fragment de coupe ionienne d'importation de la fin du VIIe siècle comporte la séquence MI "Y A : cf. P. Pelagatti, Boll. d'Arte 1964, p. 154, fig. 13-14; ceci est repris par F. Cordano, Opus 3 (1984) fase. 2, p. 299, n° 32. 4 Sur ces monnaies voir l'ouvrage fondamental de H. A. Cahn, Die Münzen der sizilischen Stadt Naxos, Bâle 1944. Pour l'alphabet, voir L. H. Jeffery, LSAG, p. 241 ; sur la dif fusion de l'alphabet eubéen, voir M. Burzachechi, in Gli Eubei in Occidente 1979, p. 209220. terprétation
ZANCLE-MESSÈNE Pour m'en tenir à l'Occident grec, je signale que l'adjectif φίλα/η apposé à un nom de femme se retrouve sur un didrachme de Métapont e du Ve siècle, cf. O. Masson, RevArch 1985, p. 38-39. Aussi bien le graffite de Naxos que celui de la monnaie de Métaponte sont des inscrip tions de caractère amoureux.
ZANCLE-MESSÈNE En dehors des monnaies, les seules inscriptions assignables à la vieille colonie chalcidienne de Zancle, qui reçut le nom de Messene vers 488, sont apparues à Olympie5. 2 - La même dédicace de butin sur une jambière et un bouclier en bronze d'Olympie; l'inscription du bouclier est intacte; V = λ; 500494. Pubi. : Kunze-Schleif, Olympiabericht II, 1938, p. 69-70, fig. 43, pi. 41-42 (Gabrici, Atti Ace. Palermo, 9 (1948) p. 253; SEG XI, 1205); pour le bouclier, Kunze-Schleif, Olympiabericht V, 1956, p. 37, fig. 18, pi. 22 (LSAG n° 6, p. 247 et 243-244, pi. 49; Lazzarini, Formule, n° 961). Cf. G. Vallet, Rhégion et Zancle, 1958, p. 335. Fac-similé de l'inscription sur la jambière.
Δανκλαΐοι 'Ρεγίνον II s'agit d'une dédicace de butin exprimée sous sa forme minimale : nom du peuple vainqueur au nominatif + nom des vaincus au génitif ablatif; voir M. L. Lazzarini, Formule n° 956-964, pour d'autres exemp les. 5 Je ne reprends pas ici l'inscription I.v.Ol. 25, qui est rédigée en alphabet et dialecte eubéens car rien n'autorise une attribution à la Sicile.
6
LES COLONIES EUBÉENNES
L'ethnique Δανκλαιοι a la même initiale que le toponyme tel qu'il apparaît sur les monnaies frappées entre 525 et 494/3 : Δάνκλε6. La di fférence entre la forme épichorique et la forme Ζάγκλη attestée dans les textes littéraires (par ex. Thucydide VI, 4, 5-6) est toujours inexpli quée7. Ces deux dédicaces s'insèrent assez mal dans ce que nous savons des relations entre les deux cités du Détroit : G. Vallet attribue ces ins criptions à l'époque où, vers 494, Anaxilas de Rhégion était l'ennemi de Skythès, ancien tyran de Cos devenu vassal d'Hippocrate de Gela, Héro dote VI, 23. Mais ces dédicaces pourraient aussi être plus anciennes et faire allusion à une victoire au sujet de laquelle nos sources sont muett es. 3 - Fragment supérieur droit d'une plaque de bronze découverte à Olympie; 15,5 χ 12,5 cm; boustrophédon; au musée d'Olympie, n°328; 500-494. Pubi.: A. Kirchhoff, Arch. Zeit. 36 (1878) p. 141, n° 182, tab. 18,5 (fac-similé de R. Weil); Dittenberger-Purgold, I.v.Ol. 24 (Hoffmann, GD III, n° 7, p. 10; Bechtel, SGDI, III/2, 5275; LSAG n° 5, p. 247, 243 et 410, pi. 49). Cf. G. Vallet, Rhégion et Zancle 1958, p. 335, en note.
286.
6 Cf. L. H. Jeffery, LSAG, n° 4, p. 247 et 243, ainsi que Kraay-Hirmer, n° 48-49, p. 285-
7 Opinion de Schwyzer, GG I p. 331; voir cependant le hypothèses de G. Vallet, o.e. p. 102, n. 1, et de Chantraine, DELG, p. 396.
ZANCLE-MESSENE ι 2 3 4 s 6 7 8 9 ιο
[
]ΙΠΕΔΟΝ Ο Ν γαν τάς [ [ δικα]ζόμενος νικεθε έ [ [ πο]λεμιος βλεθεναι [ [ Δά]νκλεν κ[α]ί τον δα[ [ — τοΐ]ς συνμά[χ][ο]ις ΗΟΣ [
] ] ] ] ]
Notes critiques - Les lettres en pointillé du fac-similé des I.v.Ol. sont en trait plein sur le fac-similé publié par Kirchhoff. - L. 1-2 : ά]πέδον[τ]ο? Ditt., ηελόντον Jeff. - L. 3 : βια]ζόμενος Jeff. - L. 4 : νικηθέη Hoffm., νικεθε(ί)ε Kirch. Jeff. - L. 5-6 : depuis Kirchhoff on estime que la dernière lettre est plutôt un lambda chalcidien qu'un upsilon. L. 7-8 : τον δα[μον Vali., τον Δα[νκλαϊον al. - L. 10 : ΗΟΣ = att. ους Kirch. Hoffm. Seule la présence quasi certaine du nom de Zancle, 1. 7, incite à classer ici ce texte : il pourrait s'agir d'une convention passée entre Zancle et une cité voisine. Les formes en apparence doriennes γαν 1. 2 et peut-être δα[μον 1. 8, sont surprenantes : seraient-ce des éléismes?
4 - Dédicaces des Messéniens de Sicile à Olympie après une victoi re sur les Locriens d'Italie; 488-485. 5180.
a) Inscription sinistroverse sur une jambière de bronze; inv. Β
Pubi. : Kunze, Olympiabericht Vili, 1967, p. 103-105, fac-sim. 34, p. 99, pi. 48, 2 (M. L. Lazzarini, Formule, n° 962b).
Διί [Όλ]υνπίο(ι) Μεσσενιοι Λοκ[ρον]
LES COLONIES EUBÉENNES b) Inscription dextroverse sur le couvre-joue d'un casque corin thien de la fin de l'époque archaïque; inv. Β 499. Pubi. : Kunze, Olympiabericht p. 104-105, fac-sim. 35, 2, pi. 40,2 (M. L. Lazzarini, Formule n° 962a).
[Διί Ό]λυνπίο(ι) Μεσσενι[οι Λοκρον] Comme la jambière sur laquelle est gravée la première dédicace ressemble étrangement à celle sur laquelle les Rhégins ont aussi gravé la dédicace Διί 'Ρεγΐνοι Λοκρον ibid. p. 102 (= Formule n° 959b), il est vraisemblable de supposer une alliance victorieuse des Rhégins et des Messéniens. Les deux dédicaces sont datées par Kunze des années comprises entre la refondation de Zancle en Messene par Anaxilas de Rhégion en 488 et le transfert du pouvoir des Deinoménides, alliés des Locriens, de Gela à Syracuse vers 485 8. On remarque que dans ces dédicaces, comme dans les suivantes, l'adoption d'un nouveau nom dû à l'arrivée de colons originaires de la Messénie, n'a pas supprimé la composante ionienne qui se manifeste aussi bien dans l'alphabet et le dialecte de ces textes que dans les légen des ME22ENION des monnaies frappées à partir de 488 9. 5 - Dédicaces faites à Olympie après une victoire sur les habitants de Mylai; 488-485.
8 Pour cette période troublée, voir G. Vallet, Rhégion et Zancle, 1958, p. 344-354. 9 Ibid. p. 356, n. 1, avec un renvoi à la publication de Robinson, «Rhégion, ZankleMessana and the Samians» JHS 66 (1946) p. 13-20. Pour les circonstances politiques du milieu du Ve siècle qui ont fait apparaître la forme dorienne Μεσσανίον de l'ethnique dans les légendes monétaires, voir G. Vallet, o.e. p. 378.
HIMÈRE
9
Deux inscriptions identiques et de la même main : a) sur un casque de la fin de l'époque archaïque, inv. Β 4165; b) sur un couvre-joue de casque corinthien, inv. Β 4882. Pubi. : Kunze, Olympiabericht Vili, 1967, p. 105-106, a) pi. 41-42, 1, b) pi. 42, 2, fac-sim. 35, 3 (M. L. Lazzarini, Formule, n° 963). a) Μεσσενιοι Μυλαίον
b) Μεσσενιοι Μυλαί[ον] Comme la bourgade de Μύλαι (act. Milazzo) est une très ancienne fondation de Zancle (de la fin du VIIIe siècle) qui faisait partie du terri toire zancléen dont c'était un avant-poste sur la côte Nord, il est très difficile de préciser les conditions politiques qui ont entraîné un conflit entre Zancle-Messène et Mylai qui ne semble pas avoir eu le statut de polis puisqu'elle n'a pas battu monnaie10. Kunze admet que Mylai a constitué pour quelques temps une position de repli pour les Samiens, maîtres de Zancle de 493 à 488, après qu'ils eurent été chassés par Anaxilas : ils auraient alors transformé cette ancienne base zancléenne en cité en s'appelant les Μυλαΐοι jusqu'à ce qu'ils soient défaits par la jeune cité nouvellement rebaptisée et repeuplée.
HIMERE
Les inscriptions d'Himère constituent un très petit corpus d'inter prétation paléographique et dialectologique assez complexe11. Quelques
10 Voir G. Vallet, ibid. p. 81-85. 11 L'ensemble des inscriptions d'Himère a été publié par M. T. Manni Piraino dans deux publications : Kokalos 20 (1974) p. 265-271, et Himera II t. 2, Rome 1976, p. 667-701 (ici 302 numéros dont la très grande majorité n'est en fait constituée que d'une seule lettre).
10
LES COLONIES EUBÉENNES
événements de son histoire - qui s'arrête en 409 avec la destruction car thaginoise12 - méritent d'être rappelés. La cité a été fondée en 648 par des oecistes venus de la colonie chalcidienne de Zancle auxquels s'étaient joints des fugitifs de Syracuse 13. En 480, après la défaite de ses alliés carthaginois, la cité passe sous la domination de Théron d'Agrigente qui, en 476, fait massacrer ses citoyens par son fils Thrasydaios et qui la repeuple d'émigrants venus de nombreuses régions14. Ces pro fondes secousses démographiques expliquent assez naturellement que les inscriptions présentent une imbrication d'éléments ioniens (alpha bet archaïque et dialecte eubéens) et d'éléments typiquement doriens comme le maintien en l'état du â. Alphabet. Malgré une chronologie incertaine on suppose avec assez de vraisemblance une mutation du type alphabétique vers 475 15 : le signe -f- semble noter ks au VIe siècle, mais kh au Ve; le signe M/ sem ble noter kh avant cette date, mais ps postérieurement 16. Le signe de l'aspiration apparaît dans la légende HIMERAION d'un didrachme frappé en 482-472 17, disparaît après cette date18, mais réap paraît sur un tétradrachme frappé en 410 19, avec la forme f- et non plus H qui note, depuis au moins l'année 472, le ê sur les didrachmes à légende IMERAION ΣΟΤΗΡ (cf. n° 13).
12 Diodore XI 49,4 et XIII 59,4-62,5; cf. G. Vallet, Rhégion et Zancle, 1958, p. 363-365. 13 Thucydide VI, 5, 1 ; cf. J. Bérard, Colonisation p. 240-244; G. Vallet, o.e. p. 85-90. 14 Diodore XI 48,6-8 et 49,3. Parmi ces imigrants se trouvait l'olympionique Έργοτέλης fils de Φιλάνωρ originaire de Cnossos, connu par Pindare, Ol. XII et Pausanias, VI 4, 11, et désormais par l'inscription sur bronze d'Olympie publiée par Kunze, OlBer 5, 1956, p. 153-156 (= LSAG n° 19, p. 248, pi. 49 = Ebert, Siegerepigramme n° 20 = Hansen, CEG 393); l'épigramme dont il ne subsiste que la partie gauche est rédigée dans un alpha bet « bleu » oriental comportant un oméga qui n'apparaît pas à Himère avant 450 : je ne reprends donc pas ici ce texte poétique dont ni la langue ni l'alphabet ne sont sûrement himéréens. 15 Cf. M. T. Manni Piraino, Himera I, Rome 1970, p. 351-356. Le digamma chalcidien de forme C apparaît notamment dans une série de marques de maçons des années 480470 : voir LSAG n° 18, p. 248 et 246 et IGLMP, n° 16, pi. X. 16 Dans la légende ΠΕΛΟΜ^ d'un tétradrachme de 460-450 ; cf. Kraay-Hirmer n° 67, p. 287, pi. 21. 17 Ibid. n° 65, pi. 20. 18 Ibid. n° 66, pi. 20 (légende citée infra). 19 Ibid. n°71, pi. 22.
HIMÈRE
11
6 - Un nom sur une lamelle de plomb; 9,5 χ 4,8 cm; h.l. 1,42,2 cm; 550-500. Pubi. : M. T. Manni Piraino, Kokalos 20 (1974) p. 270-271, tab. XLIII, fig. 4 {Himera II, Rome 1976, n° 238, p. 696, tab. CXV, 9).
Σίξας
Si l'inscription date bien du VIe siècle, la seule lecture admissible est Σίξας, forme du participe aoriste du verbe σίζω «siffler» employé ici comme anthroponyme20. On notera la rareté de cet aoriste : subj. έπισίξτ|, Aristophane, Guêpes 704; σίξα, Théocrite VI, 29, est une conjecture de Ruhnken étayée désormais par notre anthroponyme. 7 - Un nom sur un fragment d'anse de 7,8 cm; écriture sinistroverse; 550-500. Pubi. : M. T. Manni Piraino, Himera II, Rome 1976, n° 179, p. 691, tab. CXI, 3, fac-sim. fig. 35.
[Πρ]ατυίδεο II doit s'agir du génitif ionien d'un dérivé d'un nom Πράτυς, ΗΡΝ p. 38721. De la terminaison -ίδεο(*-ίδηο (*-ίδαο, on rapprochera les formes chalcidiennes Έμμενίδευ de Rhégion, Landi n°31, et Λυκκίδεο d'Olympie, I.v.Ol. 271 (= DGE 795). 8 - Dédicace. Distique d'inspiration poétique gravé après cuisson sous un pied de soutien en céramique noire attique découvert dans le temple D; diam. 13,2 cm; h.l. 5-15 mm; V = λ, -f = ξ; VIe siècle.
20 Cf. O. Masson, RPh 1982, p. 13-17. 21 II ne faudrait pas exclure *Κράτυς ou *Πλάτυς.
12
LES COLONIES EUBÉENNES
Pubi. : M. T. Manni Piraino, Kokalos 20 (1974) p. 266, n° 2, pi. XLII (Hansen, CEG n° 392).
V.
Ο
Ζενος έριγδούποιο κόρει γλαυκόπι Άθένει θρίπυλος εύξάμενος τένδ' άνέθεκε θεάι. L. 1. Le premier hémistiche se retrouve tel quel dans l'Hymne à Héra XII, 322. La forme κορει qui n'est pas homérique possède un voca lisme radical attesté en Eubée23. Chez Homère le datif de l'épiclèse est γλαυκώπιδι : ici, la forme γλαυκώπι, avec son -i abrégé en hiatus au temps faible, pourrait être influencé par le second hémistiche homéri que γλαυκώπις Άθήνη. L. 2, θρίπυλος : les lettres RI ont été ajoutées sous la ligne; il doit s'agir d'une variante sporadique du nom Τρίφυλος avec une notation inverse des aspirées24 : voir M. Lejeune, Phonétique, p. 59-60 (crét. καυχός< χαλκός)25. Τένδ': peut-être κύλικα; cf. M. Lazzarini, Formule, n° 778. 9 - Graf fite sur un fragment 3,2 x 5,8 cm; h.l. 1 cm; 500-475.
de
paroi
de
coupe
achrome;
22 Cet hémistiche est en partie restitué dans un texte attique, cf. Hansen, CEG n° 285, Addenda p. 261. 23 Cf. Bechtel, GD III, p. 74. 24 Deux hypothèses insoutenables chez Hansen. 25 Pour des exemples attiques, voir Threatte, p. 464-469.
HIMÈRE
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Pubi.: M. T. Manni Piraino, Himera II, Rome 1976, n° 15, p. 678, tab. CXV, 6, fac-sim. fig. 34. Λύκο Outre le lambda chalcidien, on remarque l'omicron anguleux doté d'une sorte de haste : ceci est surtout fréquent dans les textes sur plomb. Λύκος est un sobriquet banal : un exemple à Métaponte, Landi, n° 147 (Ve). 10 - Graffite sur un fragment de skyphos; 3,5 χ 4 cm; h.l. 4-5 mm; 500-475. Pubi: M. T. Manni Piraino, Himera II, Rome 1976, n° 40, p. 680, tab. CXI, 15.
Χαρίνο
Le chi «rouge» est remarquable à l'initiale du génitif de l'hypocoristique Χαρΐνος. 11 - Lamelle de plomb repliée dans le sens de la longueur; 8,5 χ 5 cm; h.l. 3-6 mm; alphabet «bleu» sans distinction des voyelles; 475-450. Pubi. : face a, M. T. Piraino, REA 1969, p. 301-304, et 1970, p. 385; faces a et b, 1st. di archeol. dell'Università di Palermo, Studi e Materiali, Quaderno Imerese, Rome 1972, p. 107-109; Himera II, Rome 1976, n° 45, p. 681, tab. CX VI, 1. Εύοπίδας ηιάλε Διεύχες : Λ/λοχαγος Δαΐτις.
^ . r'Ο Π Ι Δ a {>Ί I ^ ^ £ ^ V^ Ε /· Λ ο^ /χ ^ Ο { ' Τ 15
Trois mots sont sûrement des anthroponymes : Εύωπίδας, Διεύχης et Δαΐτις. Les deux premiers sont déjà connus; le troisième est soit un
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LES COLONIES EUBÉENNES
nouvel hypocoristique en -ις des noms en Δαιτο-, HPN p. 114, soit un nom d'agent fossile en -τι correspondant à δαίτης, -δαίτας, Δαίτωρ26. Le second mot de la ligne 2 est, soit le substantif λοχαγός «chef d'escadron», soit le sobriquet Λοχαγός, déjà connu, HPN p. 515. Le verbe ηιάλε = ίάλη, aoriste passif de ίάλλω «envoyer» se retrou ve dans un décret laconien de Délos, ID 87 (ca 400) : ηιάλε τα τέλε27. L'éditrice propose de voir dans cette inscription une lettre de recommandation mais on ne dispose pas de bons parallèles28. Il pourrait aussi s'agir d'un message militaire : «On a envoyé Euôpidas, Dieuchès; chef d'escadron : Daitis».
12 - Un nom sur une base de calcaire inscrite; h.l. 15 mm; ca 450. Pubi: M. T. Manni Piraino, Himera I, Rome 1970, p. 347 sq., fig. 17, tab. LXXIX; IGLMP, n° 17, p. 41-4, pi. X. Εύκλεί[δάς/δης] Ce nom est aussi celui de l'un des trois oecistes d'Himère selon Thucydide VI 5, 1 : Ευκλείδης, Σΐμος, Σάκων. 13 - Petite balle de bronze de 2 cm de diamètre; inscription dextroverse sur toute la circonférence; h.l. 4,6 mm; ca 415. Pubi. M. T. Manni Piraino, Kokalos 20 (1974) n° 4, p. 267-269. Cf. G. Martorana, Kokalos 22-23 (1976-1977) p. 299-300 : culte de Zeus.
Διός Σοτήρος La nature de l'objet n'est pas évidente : gland de fronde ou simple offrande? On se bornera à constater l'absence de distinction entre les 26 Le rapport avec le datif δαιτί imaginé par Bechtel, HPN p. 113, est peu probable. 27 Texte repris par M. Guarducci, Epigrafia Greca I, p. 284. 28 La face b me paraît beaucoup trop mutilée pour qu'il en soit fait état ici.
TEXTES EUBÉENS
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voyelles vélaires. L'épiclèse Σωτήρ, qui se retrouve sur une monnaie citée dans l'introduction de cette section, est difficile à justifier tant nos sources sont muettes sur cette période de l'histoire d'Himére. 14 - Anthroponymes sur des tessons. a) Pubi.: M. T. Manni Piraino, Himera II, Rome 1976, n° 203, p. 693, tab. CXI, 1 ; ca 450. [Η]εκαταίο ε[μί] Le nom fréquent 'Εκαταίος est bâti sur le radical du nom de la déesse Εκάτη dont le culte est attesté à Sélinonte, n° 55. b) Ibid. n° 147, p. 688, tab. CXI, 2; ca 400. Ήρακλείδα Le génitif dorien est notable : en 7, la terminaison est -ίδεο.
TEXTES EUBEENS
Sont reprises ci-après des inscriptions rédigées en dialecte ionien qui sont apparues sur des sites qui ne correspondent pas à des cités grecques identifiables. 15 - Fragments opisthographes d'une loi sur l'homicide découv ertsfors des fouilles d'une cité siculo-grecque au Monte San Mauro, près de Caltagirone, à 32 km au Nord-Est de Gela; h.l. : 7-10 mm; boustrophédon; au musée de Syracuse n° 30839; VIe siècle29. Pubi. : Orsi-Comparetti, MonAnt 20 (1910) 830-846; Arangio RuizOlivieri 1925, p. 171-185 (SEG IV, 64); F. Cordano, Decima Miscellanea greca e romana, Rome 1986, p. 33-60, avec photographies, pi. I-X.
29 Je n'ose pas attribuer cette inscription à Léontinoi, la plus proche cité chalcidienne, car la présence d'un lambda de forme Λ sur les plus anciennes monnaies de la cité constitue une réelle difficulté : voir les remarques de Miss Jeffery, LSAG p. 242 (graveur originaire de Gela).
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LES COLONIES EUBÉENNES
Cf. G. Vallet, Rhégion et Zancle, 1958, p. 319 : contenu juridique; LSAG, n°2, p. 247 et 242; F. Cordano, «Leggi e legislatori calcidesi», in Sesta Miscellanea greca e romana, Rome 1978, p. 89-98 : rapports avec les sources littéraires.
itX^iX^
fr. 1 [_ _ ] (po νε[ ] [-" ] μενφε [ ] [— ] ται τες ΕΙ [ ] ] τετροκιο [ ] 5 [-] : ίαν δε [ ] Γ τ]αυτα ho [ ] ]τε[ ]
fr. s [
]ΥΠΣ:δύ/το τάλαγ[τα [ ]ΕΡΑέναι Ιιόστις ά[ν [ Ηέρα]κλείδα [---]' [ [- —]ΙΟΣ
]
]
Sont ici repris les deux fragments les moins lacunaires. Le frag ment 5 est l'extrémité supérieure droite de la plaque de bronze. La ponctuation est notée par deux points superposés; on remarque l'emploi du qoppa et du signe de l'aspiration de forme B; le sigma est arrondi; le ductus du mu à quatre ou cinq branches est particulièr ement archaïque. Le digamma, employé en fonction de glide dans δυρο 5, 1-2, a une valeur consonantique qui se retrouve dans les fragments c et ; (SEG). Le seul intérêt dialectologique de cette inscription si mutilée est de faire clairement apparaître la conjonction hypothétique typiquement eubéenne ίάν = att. έάν : elle figure en effet dans la loi monétaire d'Erétrie Vanderpool-Wallace, Hesperia 33 (1964) p. 381-391, dans la
TEXTES EUBÉENS
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formule iàv με τείσει fr. 1, 1. 3 et fr. 3, 1. 230. Comme la contraction de -ει- en -ï- est inconnue en ionien occidental archaïque, on est obligé de considérer que le / est authentique. Or, l'examen attentif de deux autres inscriptions ioniennes d'Occident vient confirmer cette interpré tation.L'équivalent de att. εί apparaît sous la forme ί dans deux textes de Cumes du Ve siècle : Landi n° 16 ού θέμις έντοΰθα κεΐσθαι i με τον βεβαχχευμένον31, η° 22 και ϊ τις .... διαλέγετ{τ}αι32. Comme on sait que des habitants de Cumes ont participé à la fondation de Zancle33, il est très probable que nous sommes ici en présence d'une intéressante is oglosse eubéenne34. Depuis longtemps ce texte, où apparaissent le radical de φόνος ou de φονεύς, celui du verbe μέμφομαι, et des indications chiffrées en talents, a été mis en relation avec la législation pénale de Charondas de Catane : le lecteur trouvera dans l'article de F. Cordano une étude de tous les textes anciens (en particulier Aristote, Pol. 1297b) qui mention nent les législateurs d'Occident. 16 - Graf fite sur le fond d'une kylix à vernis noir découverte à Santo Onofrio au Sud de Barcellona; Ve in. Pubi.: M. T. Manni Piraino, Kokalos, 22-23 (1976-1977) p. 280, tab. XVI. Lü ΤΙ
Ηεμετέρε
30 Réorganisation du texte de IG XII 9, 1273-1274; un commentaire récent est donné par F. Cairns, ZPE 54 (1984) p. 145. 31 = DGE 792 = Duhoux n° 50. Scherer, p. 259, estime qu'il y a ici une erase de κείσθαι εί ce qui est peu probable. 32 = DGE 792a = LSAG p. 240, n° 16; voir la planche X du livre d'A. Landi. 33 Thucydide VI, 4, 5-6. 34 Formellement iav correspond au latin jam : le yod initial s'est maintenu du fait même de la présence de ί = att. εί. Sur ces particules modales en -αν (άν, καν, δαν, νάν, -ταν), voir L. Dubois, RDA I, 1986, p. 227-232.
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LES COLONIES EUBÉENNES
Ce nom de femme est la variante ionienne du nom arcadien Άμετέρα attesté à Megalopolis, IG V 2, 536 (IIe). Ce nom s'explique par un emploi de l'adjectif possessif comme anthroponyme, voir Bechtel, HPN p. 512. 17 - Deux dédicaces sur deux plats du musée de Palerme; autre foisdans la collection Campolo de Terranova-Géla; on estime que les inscriptions sont authentiques mais que la décoration médiane des plats pourrait être le fait d'un faussaire du siècle dernier; diam. a 16 cm, b 16,8 cm; inscription graffite sur le bord; h.l. 6 mm; ca 500. Pubi. : Roehl, IGA n° 619-620 {IG XIV, 595-596; Hoffmann, GD III, p. 8, n° 11-12; SGDI III/2, 5279-5280; Roehl 1907, p. 78, n° 15-16; DGE 793; B. Pace, Arte e civiltà III, 1945, p. 528-529, fig. 147; LSAG n° 20-21, p. 248 et 247); P. Orlandini, RIASA 15 (1968) p. 48-52, fig. 32-33 (M. L. Lazzarini, Formule n° 752). Cf. Fick, GGA 1883, p. 127-128 : nom du dédicataire; M. Guarducci, Kokalos 10-11 (1964-1965) p. 649 : authenticité; G. Manganaro, PdP 1965, p. 171-174 : nom du dédicataire.
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a Ηιπ(π)οδρόμες τόδε δορον Πεδίοι
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b 'ApqôXèq τόδε δορον Πεδίοι
Gravées sur des objets semblables, avec des formulaires identiques, ces deux dédicaces sont rédigées dans le même dialecte ionien et écrites avec un alphabet de type chalcidien ( Ρ = λ).
TEXTES EUBÉENS
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Le nom Ίπποδρόμη est le féminin de 'Ιππόδρομος. On trouvera dans l'ouvrage de M. L. Lazzarini, Formule p. 102-103, d'autres exemples de la^désignation de l'offrande par δώρον. La lecture du nom de la dedicante de b a été contestée : mais la transcription Apq\3À£Ç, la plus ancienne, me paraît préférable aussi bien à Άρ(ι)φύλες (Jeff.) qu'à Άρφύλες (Ori.). Considérer le troisième signe comme un qoppa barré archaïque, à haste verticale abrégée (LSAG p. 33-34), permet de retrouver le féminin du diminutif Άρκύλος attesté - est-ce un hasard? - à Styra en Eubée, HPN p. 580. Le problème le plus délicat a trait à l'identification du théonyme. Je serais enclin à suivre l'opinion ancienne de Fick pour qui Πεδίοι est ici le datif d'un nom héroïque Πέδιος ou Πεδίος qui serait l'équivalent abrégé du nom du héros sicilien Πεδιακράτης. Diodore, IV, 23, nous apprend en effet que, pendant son voyage dans l'Ouest, Héraclès avait vaincu cinq chefs sicanes dont un certain Πεδιακράτης, héros qui jouis saitencore d'un culte en Sicile à l'époque de Diodore, et auquel selon l'historien Xénagoras, FGH Π, Β 240, fr. 21, les Siciliens faisaient des offrandes en cas de famine. Ces données légendaires et cultuelles ont été confirmées par la découverte à Syracuse d'une petite arula d'épo que romaine35 sur laquelle, selon la lecture de G. Manganaro, serait ins crit Πεδιακράτ[ει] ήρωι. En dépit de l'aspect quelque peu insolite du premier membre Πεδία- (pour Πεδίο- attendu et présent chez Xénagor as), cette hypothèse paraît beaucoup plus satisfaisante que celle de M. Guarducci et de G. Manganaro pour qui Πεδιοΐ serait le datif du théonyme féminin Πεδιώ «divinità della pianura ubertosa»36. Reste enfin le difficile problème de l'attribution. On déduit logique ment que l'objet provient de la région de Gela de sa présence dans une ancienne collection locale. La conjonction d'un alphabet chalcidien et du dialecte ionien a un excellent parallèle dans l'inscription judiciaire sur plomb de San Mauro, ici n° 15. Il serait donc assez tentant de consi dérer que ces plats proviennent de la région Nord-Ouest de Gela, de cette zone du centre Ouest de l'île où ont été nombreuses les influences ioniennes sur les régions rhodiennes.
35 Cf. G. V. Gentili, NotScav 1951, p. 286 {Bull 1953, n°283); de bonnes photographies dans l'article cité de G. Manganaro. 36 Pour G. Manganaro, Πεδιακράτης est un nom théophore dont le premier membre serait justement le théonyme Πεδιώ.
II -
LES COLONIES MEGARIENNES
MÉGARA HYBLAEA
Autant les fouilles de Mégara Hyblaea ont enrichi nos connaissanc es sur la céramique archaïque occidentale et sur l'urbanisme colonial, autant la moisson d'inscriptions est maigre et décevante1. Les textes dont plusieurs inédits ont été rassemblés en 1975 par M. T. Manni Piraino2 qui, en 1979, a publié la dédicace 25. Ici, j'ai délibérément laissé de côté les textes trop courts, les textes tardifs et enfin ceux dont le carac tèregrec est contesté3. L'indigence de ce matériel épigraphique surprendra d'autant moins qui est familier avec les inscriptions archaïques que la cité n'a réellement vécu que 250 ans : fondée dans le troisième quart du VIIIe siècle par des Mégariens qui ont été accueillis par le roi sicule 'Ύβλων, dont la ville se serait appelée Ύβλα4, la colonie fut florissante jusqu'à sa destruction et à l'éviction de ses habitants par Gélon en 483/2 5; refondée par Timoléon en 339/8, elle fut définitivement détruite par Marcellus en 21 16. L'alphabet de Mégara est peu typé et ne conserve plus la moindre particularité de celui de la métropole (\Λ pour b, V pour r, Β pour é) :
1 On trouve un excellent aperçu des résultats des fouilles et un résumé de l'histoire de la cité dans la brochure intitulée Mégara Hyblaea 3, Guide des fouilles, Ecole Française de Rome, 1983, rédigée par G. Vallet-F. Villard-P. Auberson. 2Kokalos 21 (1975) p. 137-153. 3 Dans la numérotation de MP, n° 2 εροισι θεοί discuté par C. Gallavotti, Helikon 1 516 (1975-1876) p. 89-90; n° 3 ερατο proche donc de celle du mu précédent : ceci est d'autant plus incompréhensible que l'auteur reconnaît lui-même qu'aucun bêta de ce type n'est attesté à Mégara. A. Heubeck, Gioita 48 (1970) p. 67-71, croit aussi à une faute du graveur en considérant que l'épenthèse est de date post-mycénienne mais de beaucoup antérieure aux inscriptions archaïques. Son article est une réponse à Me Devi«, Gioita 45 (1967) p. 161-163 et 46 (1968) p. 254-258, qui est imait que seuls le thessalien et l'achaien de Sybaris ont conservé la prononciation étymo logique : * mrtós > skr mrtah, gr. -μροτος. Ce me paraît être la meilleure solution.
MÉGARA HYBLAEA
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en Perrhébie25, Κλεόμροτος à Sybaris26, έ]μροτοΐσι = έ](μ) μροτοϊσι à Naxos27. L'aspiration de ηιατρο s'expliquerait selon Bicknell par l'influence de celle de ίαρεύς, tant est importante la place des prêtres dans le culte d'Asclépios (?). Il doit tout simplement s'agir d'un banal phénomène d'hypercorrection28 dans une région où l'aspiration était fortement articulée et régulièrement notée. Le patronyme connu Μανδροκλής, ici au génitif dorien à hyphérèse, possède au premier membre le radical du théonyme micrasiatique Μάνδρος que l'on rencontre fréquemment en Ionie29 d'où pourrait être originaire notre médecin. 23 - Epitaphe sur la partie supérieure d'un cippe en forme de chapiteau de 37 cm de haut; h.l. : 36-40 mm; au musée de Syracuse; VIe ex. Pubi.: A.Salinas, NotScav 1880, p. 39; P. Orsi, MonAnt 1 (18901892) 786-787, n° 1, tab. IV, 2; IG XIV 590 (SGDI 3043; LSAG, n° 26, p. 270, pi. 52); M. T. Manni Piraino, Kokalos 21 (1975) p. 145-146, n° 9, pi. XXXI, 4 (SEG XXVI, 1088).
|CA A | V^O^fl AA t
Καλ(λ)ιστέος : ειμί
«Je suis (la tombe) de Kallisteus» C'est par erreur que la seconde lettre triangulaire a été barrée. Le tau, qui semble avoir d'abord été oublié, a été ensuite partiellement inséré entre le sigma et Y epsilon™ . La non notation de la géminée est normale à cette époque.
25 26 27 28 29 30
Woodward, JHS 1913, p. 316, n° 7 (Ve). Landi n° 252. CEG 402 (VIIe siècle). Pour des exemples de ce phénomène en attique, voir Threatte, p. 495-497. Voir Bechtel, HPN p. 293-294, et L. Robert Bull. 1958, n° 85, p. 201. D'où Καλισ(τ)εος chez Miss Jeffery.
LES COLONIES MÉGARIENNES
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Le nom Καλλιστεύς, vraisemblablement ici au génitif dialectal en -έος31, est un hypocoristique des noms en Κάλλιστο-32 du type de Άριστεύς33. 24 - Epitaphe sur un grand cippe brisé en haut à droite; h. 110 χ larg. 47 χ ép. 30,5; h.l. : 35 mm; à Γ Antiquarium ; ca 500. Pubi.: M. Guarducci, Kokalos 10-11 (1964-1965) p. 479, pi. XXIX, 17; Ep. Greca I, p. 317, n° 8, fig. 155; M. T. Manni Piraino, Kokalos 21 (1975) p. 147-148, n° 11, pi. XXXII, 2 (Gallavotti, Helikon, 1977, p. 1 ΠΙ 12; SEG XXVI, 1090). Cf. M. T. Manni Piraino, ibid. p. 134 : attestation du signe )K.
fT A Αν Ι θ}%
Καλ(λ)ιόψ[ιός]
«Je suis (la tombe) de Kalliopsis». La lettre à cheval sur la brisure est le psi de forme )K attesté égale ment à Himère. Malgré l'absence d'autres composés en -οψις, la proposition de Gallavotti de restituer le génitif d'un nom Καλλίοψις «Beauregard» paraît séduisante. 25 - Dédicace métrique soignée sur une base de stèle votive; larg. 66 χ h. 15 x prof. 50; h.l. : 15-20 mm; Ve in. Pubi. : M. T. Manni Piraino, Kokalos 25 (1979) p. 256-258, pi. XIV (SEG XXIX, 925). ©1/vTVA Θ 6 Φιντύλος : Ιιουγρίτο τάν στάλαν τάνδ' άνέθεκε «Phintulos, le fils d'Eugritos, a consacré cette stèle»
31 Cf. Sicca 1924, p. 93. 32 HPN p. 233. 33 Type étudié par J. L. Perpillou, Les substantifs grecs en -εύς, 1973, p. 171-187.
MÉGARA HYBLAEA
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Le nom du dédicant Φιντύλος est attesté sur la balle de fronde d'Assoros, IG XIV, 2407, n° 14. Le radical dialectal Φιντ- (Φιλτ- est fréquent en Sicile et en Grande Grèce dans Φίντων, Φιντίας, Φίντις34. Ιιουγρίτο est la erase attendue de ho Εύγρίτο35. La forme Εύγριτος est une variante locale du nom banal Εύκριτος attesté à Sélinonte au VIIe siècle, n°7236. On notera l'allongement métrique dans le second nom qui est un crétique. 26 - Epitaphe sur une stèle qui a été sciée à droite et réutilisée dans un mur hellénistique; h.l. : 2-3 cm; in situ; Ve in. Pubi.: M. T. Manni Piraino, Kokalos 21 (1975), n° 15, p. 150, pi. XXXIII, 2 (SEG XXVI, 1094).
fc 0 V Ι Ο
Ob £ { A/V^ AT Ο
θεσαλδ τόδε σαμα το [ hmö
« Ceci est le monument de Thessalos, le fils de
]
»
La seule lettre remarquable est le sigma fait de deux demi-cercles. La graphie θεσαλός avec un seul sigma se retrouve à Athènes à la même époque, IG F 1042. Bechtel fait de l'anthroponyme Θεσσαλός un nom de héros37, mais considère que le nom béotien Φετταλός est l'ethnique employé comme anthroponyme38 : on ne peut trancher. 27 - Epitaphe métrique soigneusement gravée sur une stèle; h. 24,5 χ larg. 27,5 x prof. 12,5 cm; h.l.: 1-3 cm; au musée de Syracuse, n°7735; Ve in.
34 Ce dernier chez Pindare, Ol. VI, 22 ; voir l'Index I. 35 Ούδάμο = ό Εύδάμό à Abou Simbel, Bernand-Masson, REG 1957, n° 1, 1. 5, p. 5 et 8; τούφυλίδα = το Εύφυλίδα à Camiros, M. Guarducci, Ep. Greca I, p. 331-332, n°4. 36 L'inverse est attesté à Sélinonte dans Άκροικόι η° 34. 37 HPN, p. 38-39. 38 HPN, p. 544.
32
LES COLONIES MÉGARIENNES
Pubi. : P. Orsi, MonAnt 1 (1890-1892) 787, n°2, pi. 4, 1 (SGDI 5241; DGE 164; Peek, GVI 66; LSAG, p. 270, n° 28; M. Guarducci, Ep. Greca I, p. 315, n°6, fig. 153); M. T. Manni Piraino, Kokalos 21 (1975) n° 12, p. 148 (SEG XXVI, 1091). Cf. O. Masson, Sileno 7 (1981) p. 12-14 : nom de la défunte.
$ 0 CIA© V CAT ft ° ί Ε ' ^ J
Τας Ηαγία θυγατρός είμι
fC A fi R Ο C O/V Ο
Καπρογόνο
«Je suis (la stèle) de Kaprogonon, la fille de Hagias». Comme Καπρογόνο ne peut être que le nom de la défunte, sur le même plan que θυγατρός, on doit considérer que l'on est en présence d'un nom de femme neutre Καπρόγονον dans lequel O. Masson voit un sobriquet tiré d'un nom de plante *καπρόγονον bâti comme σελινόγοvov. Le patronyme Ηαγίας correspond à l'attique Ήγίας, ΗΡΝ p. 188; l'aspiration apparaît aussi dans le nom de la même famille Ηαγις, attes té à Tarente, Landi n° 194, 1. 12. 28 - Texte sur bronze d'Olympie relatif à des bannis et concernant Mégara et Sélinonte. Huit fragments dont le dernier, h, découvert en 1894, a pu être^ ajouté dans les Nachträge des I.v.OL, col. 797. La plaque devait être assez grande : le fragment / est long de 33 cm, a haut de 19 cm et h de 17 cm; écriture boustrophédon; h.l. : 8-10 mm; au musée d'Olympie; VIe ex. Pubi. : Dittenberger, I.v.OL 22 + col. 797 (Roehl 1907, n°7; Schwyzer, DGE 165g; D. Asheri, ASNP, 1979, 2, p. 479-497). Cf. Dunbabin, The Western Greeks, 1948, p. 417; Bérard, Colonisat ion2, p. 245; LSAG n° 36, p. 277 et 271 : date basse, 483; G. Manganaro, ArchClass 17 (1965) p. 196-197: décret démocratique de Mégara; Gra ham, Colony and Mother City, 1971, p. 112-113 : ca 500; Vallet- Villard Auberson, Mégara Hyblaea, Le quartier de l'agora archaïque, 1976, p. 422-423; J. Seibert, Die politischen Flüchtlinge und Verbannten in der griechischen Geschichte, II, 1979, p. 550.
MEGARA HYBLAEA
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Grâce au boustrophédon on est sûr que b est un fragment de la part iedroite et que / doit être placé dans l'angle inférieur droit. Le frag ment h semble contenir une partie du bord supérieur de la plaque. Dittenberger et Roehl placent ce fragment entre a et b : comme les lettres me paraissent plus grandes je serais enclin à y voir un fragment de la partie gauche. Je ne transcris que ce qui paraît certain. h 1 hópKia, 3 Σελινόε[ντι, 5 εστε, 6 αίσιμνά[τας, 9 έκ τας γ