L' ASIE MINEURE AU IV e SIEeLE (412-323 a.c.)
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L' ASIE MINEURE AU IV e SIEeLE (412-323 a.c.)
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L' ASIE MINEURE AU IV e SIECLE (412-323 a.c.) Pouvoirs et jeux politiques Pierre DEBORD
Diffusion DE BOCCARD 11 rue de Medicis 75006 PARIS -- Bordeaux 1999-
AUSONIUS Maison de I' Archcologie Universite Michel de Montaigne - Bordeaux III F - 33405 Talence Cedex
Directeur des Publications: Alain BRESSON Secretaire des Publications: Nathalie TRAN Graphisme de Couverture : Nathalie TRAN © AUSONIUS 1999 ISSN: 1283-2200 ISBN: 2-910023-15-X Imprimc: Graficas Calima, S. A. Avda. Candina sin 390 I I Santander - Cantabria - Espana
INTRODUCTION
Ecrire I'histoire de I' Asie Mineure au lye siecle pouvait apparaitre comme une tache impossible. C'est pourtant l'ambition que s'etait assignee W. Judeich, il y a maintenant un peu plus de cent ans (1892) sous Ie titre ambigu de Kleinasiatische Studien mais avec un soustitre plus explicite: Untersuchungen zur griechisch-persischen Geschichte des IV. Jahrhunderts. Le redacteur de cet ouvrage, au bout de quelques annees de recherches, est plus que tout autre conscient du caractere quelque peu desespere d' une telle entreprise: a I' exception d' Athenes - et on sait combien subsistent de zones d' ombre - toute approche evenementielle continue de quelque cite grecque que ce soit, meme a partir de I'epoque c1assique, reste a I'etat d'un puzzle dont iJ manquerait la majorite des pieces. Une histoire regionale est aussi aleatoire dans la mesure ou l'information est disparate et discontinue; ceJa est d'autant plus vrai pour une region consideree comme marginale par les auteurs grecs contemporains. En realite ces derniers, ou pJut6t ceux dont Jes oeuvres sont conservees, ont un point de vue generalement athenocentrique et ne s'interessent a I' Anatolie que dans la mesure ou les cites de la Grece balkanique sont concernees, Les cadres chronologiques de cet essai sont Ie reflet de I' etat de nos sources. La date de 412 s'imposait a I'evidence ; apres le desastre de SiciJe, Jes feux de I'actualite, percue essentieJJemenl a travers Thucydide, se deplacent vers Ie secteur insulaire et cotier de I' Asie Mineure. Les evenernents qui ont lieu a ce moment conditionnent de facon decisive I'histoire ulterieure de Ja region au moins jusqu'a la Paix du Roi. Le choix de la date terminaJe etait plus delicat. IJ s'agissait de marquer une coupure significative et trois dates etaient susceptibJes d' etre proposees : 334, 323, 280. Dans une volonte de conserver la plus grande coherence possibJe a I' ensembJe, Ja conquete macedonienne pouvait paraitre marquer une rupture suffisamment nette. Un examen depourvu de tout presuppose de I'ensernble de Ja documentation disponibJe montrera que, dans ses effets acourt terme, la campagne menee par AJexandre n' a nuJJement entraine une rupture brutale avec Je passe, tant dans I' organisation generale de J'administration de I' Asie Mineure que pour Ie comportement des cites. De plus, dans Je cadre d'une etude visant a privilegier l'analyse des evolutions sur la duree, il eut ete difficile de se priver des informations ala fois abondantes et precises que I' on possede pour la periode 334-323. La date de 280 presentait une alternative seduisante dans la mesure ou c'est seulement a ce moment que sont fixes les cadres presque definitifs du monde helleni stique. Jl y avait eependant deux ecueils : la coherence etait moindre et I' ampleur de la tache encore accrue. Cela dit, a l'interieur de la sequence retenue (412-323), l'information reste tres inegale. Nous sommes bien renseignes pour toute la periode ou Athenes et Sparte interviennent en opposition ou en accord avec Ies satrapes du Grand Roi. Tl est clair que Ja Paix du Roi de 386 marque une rupture et Ie debut d'un "blanc" dans nos sources litteraires qui n'est cornpense que tres partiellement par l'augmentation du nombre des documents epigraphiques. Pour cette periode I'information reste cependant importante pour Jes lies. La revolte des satrapes marque un regain dinteret pour I' Asie Mineure qui va se poursuivre
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jusqu'au milieu du lye siecle. A ce moment, et a l'exception de quelques regions comme la Carie, limpression est celle d' un grand vide qui ne cesse veritablement qu' avec la campagne de Parrnenion et surtout bien sur l' anabase d' Alexandre. Grace a ce nouveau coup d' eclairage il est loisible de saisir les evolutions tres importantes qui se sont produites depuis la fin du yc siecle, Comme on peut deja Ie percevoir, il est particulierement difficile de se tenir au presuppose de depart de cet ouvrage qui consiste, dans toute la me sure du possible, a se placer du point de vue de ceux qui vivent en Anatolie : Grecs, Perses et aussi tous ces peuples qui ont cree sur place les conditions de civilisations aux caracteristiques certes voisines mais neanmoins originales (Lydiens, Mysiens, Cariens, Lyciens, Phrygiens, Paphlagoniens, etc.). Il va sans dire que cette tripartition est elle-meme singulierement reductrice puisque les inf1uences croisees, les "melanges" font que les lignes de partage sont a la fois floues et surtout variables dans le temps. Une serie de chapitres resolument chronologiques constitue en quelque sorte le centre du travail. La nature merne de linformation a cependant rendu necessaires des mises au point regionales dont Ie "pretexte" a ete la liste des peuples revoltes lors de la Grande revolte des satrapes que nous a transmise Diodore ou encore le periple d' Alexandre narre par Arrien. Le plan initial prevoyait d'encadrer cette etude par deux ensembles symetriques, run decrivant les origines et le fonctionnement des satrapies, l'autre sinteressant aux cites ou groupes de cites (et aux entites similaires). Seulle premier volet sera aborde ici, la suite etant reservee a une etude ulterieure. En ce qui concerne le systerne satrapique, toute tentative pour en preciser la nature et le contenu s'rnscrit necessairernent dans la longue duree, II etait done impossible de prendre en consideration uniquement les donnees posterieures a 412. Le processus de constitution, les evolutions, scissions, etc. qui se produisent a partir des origines induisent les options strategiques retenues par le Grand Roi pour le lye siecle. Pour simplifier, disons que Xenophon doit etre eclaire par Herodote, L' ambition affichee n' est pas d' ecrire une histoire institutionnelle figee des satrapies de l'Empire perse et de leurs composantes mais bien de montrer les variations dans l' espace et dans le temps en analysant les modes d' attribution et de fonctionnement (par exemple le passage d'un type de rapports fonde sur Ie respect de valeurs aristocratiques "archaiques" a une organisation plus bureaucratique et "rnoderne"). A partir de la, il est necessaire de sinterroger sur la pertinence de definitions generales telles qu' elles sont definies a l' echelle de l' Empire appliquees a l' Anatolie, en ne perdant toutefois pas de vue deux parametres importants : le fait que l' auteur n' est en rien specialiste du monde iranien et aussi le risque qu'il y aurait a surinterpreter des sources tres majoritairement grecques. Le choix de l'aire geographique merite aussi quelque explication. Nous avons choisi de privilegier la peninsule anatolienne, en n'ignorant pas que I'information relative aux regions interieures et orientales est particulierernent discontinue. Les affrontements de la "guerre en Ionie" comme I'indique deja la denomination retenue interessent en priorite la facade occidentale de l' Anatolie et les Detroits. D' autre part I'hellenisrne, et l'hellenisation, au ye et au debut du lye siecle, dispensateurs de decrets et de rnonnaies, concernent pour I' essen tiel une frange cotiere, II faut attendre la campagne de Cyrus puis les expeditions des generaux spartiates pour "decouvrir" les regions interieures de la part occidentale. C' est
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egalement alors que les zones orientales retiennent l' attention des historiens grecs. Cela ne veut pas dire pour autant que les Atheniens de cette epoque ignoraient tout des peuples nongrecs. Souvent leur perspective est mythographique I mais manifeste parfois plus de precision ou une connaissance plus intime : pour Aristophane 2, les Cariens sont un peuple qui habite les hauteurs et cette caracteristique est confirrnee par I' archeologie. Lorsque I' on avance dans le lye siecle, le territoire sur lequel existent des informations ne cesse de gagner en etendue vers I'est, bien qu'il subsiste de grandes disparites. En revanche, il etait impossible de traiter de l' Anatolie sans integrer aussi dans cette etude les grandes i'les egeennes qui la bordent, de Tenedos it Rhodes. Une prise en consideration trop rapide des donnees ethno-linguistiques tend it accrediter T'idee que la mer Egee est le principal trait d'union des peuples grecs dans le cadre de liens ouest-est. Cela traduit en partie I'image vehiculee par beaucoup des modernes d'une Grece d'Europe predominante it tous les points de vue. La geographic politique contemporaine conduit it accentuer les differences entre domaines insulaire et continental. D. M. Lewis 3 a brillamment mis en parallele le traite de Lausanne de 1920 et la Paix du Roi dont les clauses respectives comportent des similitudes frappantes. Plusieurs objections meritent cependant examen. Les iles cotieres, merne les plus grandes (celles qui ont par consequent un potentiel agricole non negligeable), se caracterisent en general par un relief accentue. Elles ont done cherche a se procurer un dornaine continental sur les terres alluviales des plaines t1uviales ou cotieres ". Com me on le verra plus loin, la Paix du Roi a entraine quelques turbulences mais I'histoire continue a peser 5 et la "restitution" des perees reste au moment de l' anabase d' Alexandre un objectif prioritaire. Toutes les grandes lies cotieres sans exception developpent ou implantent leur agglomeration principale sur le site favorable Ie plus proche du continent, soit qu'il sagisse d'un etablissement ancien (et dans ce cas l'agglorneration s'est imposee plus ou moins facilement a ses rivales potentielles qu'il y ait eu ou non synrecisrne : Mitylene, Chios 6) soit, de facon encore plus significative, dans le cadre de la creation d'un nouveau centre urbain principal apres synrecisme (Rhodes 7, Cos 8). II s' agit bien sur d' etre pres du continent mais cela n' explique pas tout. La raison principale est que l' ensemble geographique considere se structure autour d'une veritable epine dorsale nord-sud. Cette situation est tres ancienne : a Lesbos, on constate un changement de localisation des sites it partir du Bronze final. La voie maritime 'lui sinue entre les iles et le continent est un des axes de circulation les plus
Les Mysiens d'Eschyle, piece dont seul le titre nous cst parvenu. Aristophanc, Oiseaux, 292 sq. , Lewis 1977, 156-157. " Appcndice 2 : les perees. 5 Cf. Atarnee, Anaia, etc. 6 Chios est unc etape importante du commerce vers Ie Pont: Ps-Demosthene 35.52-4; sur son port, cf. Str. 14.1.35. Pour Arist., Pol., 4.4.21, elIe est remarquablc par Ie nombre de ses emporoi. "I En 338 Lycurgue, dans Ie Contre Leocrate, IS, evoque "des marchands pareourant Ie monde pour leurs affaires" (ef. Bresson 1993, 366-370). Demand 1990, 90-91, schematise quelquc peu Ie point de vue de ses devancicrs (en liant syncceisme, deplaccment du site et politi que mercantiliste de la familIe des Diagorides) pour mieux le combattre au nom des theses primitivistes de Hasebroek et proposer des causes enticremcnt politiqucs. R Le synrecisme de Cos a comme premiere consequence la creation d'une ville et d'un port remarquable. A partir de la, rcvenus prives et fortunes personnclles augmentent et font de Cos une rivalc des premieres parmi les cites: Diod. 15.76.2 (ef. Sherwin-While 1978,67-(8). I
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importants des I' epoque de la colonisation et ensuite comme route de commerce 9, elle joue aussi un role politique indeniable, Nous aurons plusieurs occasions de noter de multiples phenomenes qui unissent les deux rives de cet axe paralien : "union monetaire" 10, contagion institutionnelle II, interaction politique et militaire (revolte des satrapes, guerre des allies, etc. dans une aire geographique qui va de Rhodes a Byzance 12. L' evolution des points de vue sur le continent est un peu de me me nature. On a souvent mis en avant l' evolution des littoraux pour expliquer certains changements de sites. Mais ce facteur ne suffit pas a expliquer taus Ies phenomenes. Ce sont bien deux logiques qui sopposent (au se succedent), Nous aurons de nombreuses occasions de constater que la geopolitique achernenide est concue tres naturellement a partir de I'origine du pouvoir : Ie centre, c' est-a-dire le plateau iranien. Les Perses sont par nature des terriens. Les capitales regionales sont par consequent dans une situation identique par rapport aux entites dominees. Sardes, Daskyleion, Magnesie, Tarse ne sont pas au bard de la mer, Mazaka et Kelainai franchement a I'interieur des terres. Cette hierarchic des sites nest d'ailleurs pas specifiquement perse. On a pu noter par exemple en Lycie l'evolution de "couples" d'agglornerations : Apollonia-Aperlai, Phellos-Antiphellos a l'interieur desquels la preseance sinverse avec l' acculturation hellenique. C' est dans ce meme ordre didees que doit etre percu le deplacement de leur "capitale" a Halicarnasse par les Hekatomnides. Les motifs dans ces cas sont differents (evolution presque mecaniste d'un cote, volonte politique de l'autre), mais ils reposent sur la meme integration a doses de plus en plus contraignantes du poids de la mer. On peut ainsi mettre en avant la flotte de Mausole, mais peut-etre de facon encore plus significative la volonte de Perikles de Limyra 13 de se doter d'un contingent naval d'une certaine ampleur. Le bref panorama bibliographique qui suit na dautre ambition que de montrer les etapes qui ont conduit a la mise en oeuvre de la problematique contemporaine. Nous avons retenu ici les etudes qui nous ont paru avoir conserve un interet au qui ant represente en leur temps une etape nouvelle par rapport aux travaux anterieurs. Comme toujours, le progres scientifique n'est pas lineaire : la fin du XIXe siecle voit la parution a un rythme assez rapide d'oeuvres restees importantes. La bibliographie des travaux sur l'Empire perse commence 9 Arricn, An., 2.1.2 cxpliquc comment le cap Sigrion sert de lieu de refuge pour les navires marchands qui viennent de Chios, du [cap] Geraistos, du leap] Malee, au sud-est de l'ile. Nous avons la I'indieation des axes prineipaux du commerce Icsbicn: la Grece centrale et Athcncs, Chios et la Mediterranee orientale. Le fonctionnemcnt economiquc de eet axe paralien se percoit bien par exernple lorsque les Rhodiens sen prenncnt aux Byzantins qui veulent taxer Ie passage du Bosphore. 10 Monnayage LYN, cf, appendiee 3 ; on prendra aussi en compte Ie pactc monetairc qui unit Mytilcnc et Phocee date traditionnellement du debut du IV'S. (Tod, 112), des annees 440-410 pour Heisserer 1984, 115-132 (dou SEG, 34, 1984,849), le decret reproduit un amendement introduit vers 426; cf. Labarre 1996,364 sq. (tcxte et traduction). On pensera enfin i! I'adoption dans les premieres decades du IV's. de letalon rhodien pour l'argent par la quasi totalite des cites et autres entitcs politiques de la partie occidentale de l' Anatolie, phenorncnc discret mais aux consequences de fond, cconorniques et politiques, de premiere importance. Mildenberg ]998, 280 n. 34 fait observer que eet espacc monetaire et done sans do ute cconomique concernait aussi Thasos (cf. lc trcsor de Pixodaros). II Debord ]984. 12 Le phenomene se poursuit bien plus lard: Robert & Robert 1983, 30 font remarquer que dans J'mscription flavienne d' Ephese dormant une liste de cites par conventus (Habicht 1975, 65) Samos et Chios sont rattachees au conventus de Milet alors que dans l'Ile de Lesbos, Mytilenicns et Kalleniens sont integres dans celui de Pcrgamc. J] Polyen 5.42.
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veritablement avec P. Krumbholz, De Asiae Minoris Satrap is Persicis, Leipzig, 1883 (a consulter avec le C.-r. de T. Noldeke, GGA, 8, 1884, p. 290-300) ; du meme, De descriptione regni Achemenidarum, Eisenach, 1891. Comme il a ete note plus haut, et pour la region qui nous occupe, la synthese de W. Judeich, Kleinasiatische Studien, Marburg, 1892, n'a pas ete veritablement rcrnplacee et reste, malgre un inevitable vieillissement, I'ouvrage de reference pour tous ceux qui abordent les problernes traites dans cet ouvrage ; cf. aussi A. Buchholz, Quaestiones de Persarum satrapis satrapiisque, Leipzig, 1894. 11 faut ensuite attendre les annees 1920 pour que se manifeste un interet renouvele a l'egard de ces questions avec I'importante notice de R. Lehmann-Haupt, RE, s. v. "Satrap", 1921 ; le chapitre Xll, "Satrapen und Satrapien in Kleinasien" de la Griechische Geschichte de K. J. Beloch, lIP 2, 1923 reste indispensable; on consultera avec beaucoup de profit E. Meyer, Geschichte des Altcrtums, V, 1913 [1958] (jusqu'en 355) et du merne Die Grenren der hellenistischen Staaten in Kleinasien, Zurich, 1925; O. Leuze, "Die Satrapieneinteilung in Syrien und im Zweitsromlande von 520-330", Schriften der Konigsberger gelehrten Gesellschaft, Xl, Geistesgewiss. Klasse 4, J935, p. 157-476. En ce qui concerne les histoires generales de l'Empire achernenide, A. T. Olmstead, A History of the Persian Empire, Chicago, 1948 (1970) est I'ouvrage classique mais ponctuellement depasse et sou vent trop sommaire. Plusieurs livres recents ont, avec des fortunes diverses (j'entends par la ce qui concerne specifiquement l'Asie Mineure achernenide), tente de couvrir Ie meme champ de recherche: R. N. Frye, The Heritage of Persia, Londres 1962; du meme, The History of Ancient Iran, Munich, 1984; J. M. Cook, The Persian Empire, Londres, 1983 ; cf. en dernier lieu la Cambridge History of Iran (ed, 1. Gershevitch), vol. 2, 1983, chapitres rediges principalement par J. M. Cook et A. R. Burn ; R. Schmitt, "Achaernenid dynasty" dans Encyclopaedia Iranica (E. Yarshater Cd.). La parution du livre tres personnel de D. M. Lewis, Sparta and Persia, Leyde, 1977, est sans aucun doute a I'origine d'un nouvel interet pour les choses de l'Asie Mineure. Son originalite par rapport a des travaux anterieurs d'hellenistes sur des sujets comparables est qu'il s'efforce d'integrcr au mieux les donnees fournies par les documents perses. Une place a part doit etre faite a la Ph. D. de M. N. Weiskopf, Achaemenid Systems of Governing in Anatolia, Berkeley, 1982. Ce travail est a ce jour l'etude la plus detaillee sur nombre de questions etudiees ici, une these au sens plein du terme. 11 y sera souvent fait reference dans la mesure ou il est malheureusement peu accessible. II convient de souligner toutefois qu'il y a quelque chose d'un peu irritant a la "distribution de prix" a I' egard des predecesseurs, tendance assez frequente chez certains membres de la jeune ecole historique americaine, la polemique etant d'autant plus inutile lorsqu'on s'en prend a des ouvrages datant du siecle passe. Ce meme auteur a restreint son propos a un episode precis dans Ie livre qu'Il en a tire: The So Called "Great Satrap's Revolt", Historia Einzelschr., 63, 1989, 112 p. Un resume commode de ses idees: "Asia Minor" dans Encyc. Iranica. Retenons enfin I'essai de Chr. Tuplin, "Achaernenid Administration" dans Coinage and Administration in the Athenian and Persian Empires (1. Carradice ed.), BAR lnt. S. 343,1987, p. 109-166 et la nouvelle edition de la Cambridge Ancient History (CAH) V.2, The Fifth Century B.C. (D. M. Lewis, J. Boardman, J. K. Davies, M. Ostwald) 1992; VJ.2, The Fourth Century B.C. (D. M. Lewis, J. Boardman, S. Hornblower, M. Ostwald) 1994. Les points de vue adoptes par
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J. M. Balcer "The Ancient Persian Satrapies and Satraps in Western Anatolia",AM/26, 1993, 81-90, paraissent souvent contestables. Le dernier ouvrage general dont j'ai pu prendre connaissance est la grosse synthese publiee par P. Briant, Histoire de I'Empire perse de Cyrus a Alexandre, 1996 (1247 p.). Mon manuscrit etait deja redige pour I'essentiellorsque cet ouvrage a pam, et il n' est done pas integre - ou discute - autant que j' aurais pu Ie souhaiter. 11 doit etre clair que nous sommes ici en presence d'une ceuvre destinee a devenir un indispensable outil de reference, a consulter avec Ie complement bibliographique fourni par le "Bulletin d'histoire achemenide 1" pam dans Topoi supp!. 1, 1997. n convient aussi d'aborder de front la question des sources 14. En ce qui concerne les sources litteraires, celles dont nous disposons sont souvent lacunaires : elles ne s'interessent que periodiquement aux evenements de I' Asie Mineure, et en tout cas presque exclusivement lorsque les grandes cites du monde grec europeen sont concernees. Parfois suspectes, elles sont dans quelques cas a coup sur fautives (Diodore, Justin, etc.), du fait de I' auteur lui-merne ou de ses copistes. Cela dit, il ne saurait etre considere comme de bonne methode d'ecarter des ternoignages parce quils ne COIncident pas avec un schema preetabli retenu par l'erudit moderne. 11 est aise de constater que beaucoup se sont essayes, dans un passe recent, a revisiter les sources, proposant ici des corrections plus ou moins violentes et refusant la telle version au profit de telle autre. Dans un premier temps au moins, il nous parait indispensable d'adopter Ie point de vue exactement inverse, c' est-a-dire de prendre en compte la totalite des document disponibles : ils ne sont deja pas si nombreux. La consequence de ce parti pris doit etre acceptee jusqu' au bout: il sera parfois impossible de proposer une solution susceptible de recevoir I'assentiment de tous. L'histoire de la grande revolte des satrapes fournit une excellente illustration de notre propos. II y aura done des cas ou il nous faudra conclure sur un non liquet, en se contentant d' analyser Ies sources et les propositions subsequentes des modernes. Les chapitres relatifs a I'implantation de I'Empire perse en ASG Mineure sont soustendus par de nombreux passages des Histoires d'Herodote 15, dont la fiabilite de I'information a ete souvent mise en doute 16. Sur nombre de points Ie proces du "pere de I'Histoire" qui avait debute avec Thucydide doit faire I'objet de revisions dans la mesure ou on ne saurait attendre de cet auteur une objectivite parfaitement anachronique. Stricto sensu, cest exclusivement Ie livre VIII de Thucydide qui prend en compte la periode 412-411. La plupart des auteurs s'accordent pour souligner les incoherences, ou plus exactement Ie caractere inacheve, de cette partie d'une oeuvre qui reste cependant la justification principaIe de la date de 412 adoptee dans Ie present ouvrage pour Ie debut theorique de la presentation chronologique 17. De plus, on a pu observer que la curiosite de Thucydide concernant Ie monde perse trouvait vite ses limites 18.
14 Drews 1973 ; d. l'introduction de Balcer 1995 et aussi Tuplin 1996, 132-177 (place de la Perse dans la littcrature athenienne). 15 Marg 1962 ; Fornara 1971 ; Gould 1989. 16 E.g. Armayor 1978. 17 Outre les etudes ciassiqucs de De1ebecquc 1965 ct 1967, ct. en general Connor 1985 et Ie commentaire tres riche de Andrewes dans Gomme et al. 1981. On retiendra aussi Hornblower 1987 et 1991 ; cf. Westlake 1989. 1H Andrewes 1961.
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Son continuateur Xenophon 19, longtemps decrie, est aujourdhui a la mode; il serait sans doute vain de tenter de donner une bibliographie a jour des travaux sur cet auteur, merne en se limitant aux ceuvres, ou parties d' oeuvres, qui concernent directement l' Asie Mineure. La Cyropedie 20 est redigee par un theoricien politique et doit etre utili see en tant que telle ; en d'autres termes on ne saurait comme J. M. Cook 21 lui refuser toute pertinence mais il convient de la lire en miroir avec la situation administrative et politique du lye siecle bien plutot qu'avec celle du vr siecle. II doit etre constate que l'idee d'une "decadence" de l'Empire perse provient pour partie de cet ouvrage et de celui de Ctesias, Les Helleniques ne prennent en compte la situation de l' Asie et des iles que dans la mesure ou Athenes et surtout Sparte sont irnpliquees 22. Les divergences constatees avec l' auteur anonyme des Helleniques d' Oxyrrhynchos 23 ont suscite une Iitterature tres abondante en particulier a propos de la campagne d' Agesilas qui aboutit a la bataille de Sardes 24. Beaucoup ont souligne les grandes qualites de cet auteur - comparees a la "mediocrite" affirrnee de Xenophon - et rnontre la naissance d'une tradition differente qui explique certains developpements de Diodore 25. L'Anabase en revanche est une mine d'informations sur des regions jusqu'alors meconnues ou negligees par les auteurs grecs. C' est done le dilettante plus que l'historien qui retient l' attention de nombre de modernes 26. Assez tot dans le lye siecle, en fait des 394, moment a partir duquelles Helleniques de Xenophon se desinteressent quasi cornpletement de l' Asie Mineure, Diodore devient notre principal fil conducteur. Cela pose evidemment le problernes des sources et de la methode de cet auteur 27. Les ceuvres d' Ephore 28 et Theopompe 29 ne nous sont parvenues que sous forme de citations fragmentaires. La contribution de Ctesias de Cnide 30 dont on pourrait attendre beaucoup en raison de sa position ala cour perse se revele assez decevante et doit etre utilisee avec precaution. II est alors indispensable de prendre en compte des sources indirectes : auteurs de "vies" dont la fiabilite historique n' est pas la preoccupation majeure (Plutarque 31, Cornelius Nepos 32), abreges mal faits d' eeuvres anterieures (Justin a partir de Trogue Pompee) 33, morceaux choisis thematiques de "stratagemes" militaires ou fiscaux CEnee le Tacticien 34, Poly en 35, Ps.-Aristote 36) avec dans ces recueils de constants problernes de Anderson 1974b; Breitenbach 1967; Hirsch 1981 et 1985; Dillery 1989 et 1995. Markley 1968 ; Carlier 1978 ; Hirsch 1985 ; Due 1989 ; Tatum 1989 ; Gera 1993 ; Tuplin 1994. 21 Cook 1983. 22 Sordi 1950-51; Henry 1967; Krenz 1989; Riedinger 1991; 1993,518-523. 23 Grenfell & Hunt 1908 ; Busolt 1908 ; Bartoletti 1959 ; Bruce 1967 ; Breitenbach 1970 ; McKechnie & Kern 1988 ; Chambers 1°93. 24 Infra, cf. en dernier lieu Dillery 1995. 2S E.g. Westlake 1983, 249. 26 Erbsc 1966; Geysell974; Perlman 1977-79; Manfredi 1986; Lendle 1995; Briant ed, 1996. 27 Drews 1962 ; Gray 1980 ; Andrewes 1985 ; Westlake 1987 ; Hamilton 1989. 28 Barber 1935 ; Andrewcs J 985. 29 Von Fritz 1941 ; Bruce 1970 ; Lane Fox 1986 ; Flower 1994. 10 Bigwood 1964; Brown 1978b ; Sancisi 1987 ; Auberger 1991 et en dcrnier lieu Schmitt dans Encyc. Iran. s.v. 441-446. 31 Hood 1967; Podlecki 1973; Buckler 1977; Frost 1980; Moysey 1992. 12 La vie de Datames est la source principale de la carriere de cc pcrsonnage. Moysey 1992. 33 Heckel & Yardley 1997. 34 Whitehead 1990. 35 Krenz & Wheeler 1994. 16 Dans I' Economique II ; cf. Yan Groningen 1933 ; Cracco Ruggini 1966-1967 ; Thillet 1969. 19
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chronologie absolue, voire relative. Parmi les auteurs "techniques" une attention toute particuliere a ete portee aux geographes et aux auteurs que l'on peut leur assirniler, du Ps.Skylax 37 a Strabon. Les orateurs attiques sont enfin un ultime recours. Leur centre dinteret est aillcurs, les references a I' actualite trap allusives, et surtout ils nous presentent un point de vue tres deforme parce que partisan. Le cas d'Isocrate est a cet egard tres revelateur du risque d'erreurs de perspective qu'il sagisse de la situation institutionnelle et de l'action politi que des satrapes-dynastes de Carie ou de la place de la Lyeie dans l'Empire ". L'epopce d' Alexandre entraine chez les auteurs grecs un regain d'jnteret pour les regions qu'il traverse et les peuples qu'il sou met. Nous disposons alors de I' Histoire d'Alexandre d'Arrien 39. C'est done l'occasion a ce moment de faire Ie point sur I' organisation et le degre d' evolution culturelle et politique des differentes comrnunautes. On prendra garde cependant davoir toujours a l'esprit qu'il sagit la d'une contribution au "mythe d' Alexandre" en ce sens que Iorsqu' Arrien compile son eeuvre Ie destin ultime du Macedonien est connu de tous, alors qu'on peut facilernent montrer que la lecture de son action par ses contemporains des cites grecques occidentales de l' Anatolie etait tout autre 40. Les autres sources relatives a la periode doivent etre manices avec autant de prudence 41. 11 est clair que les progres les plus significatifs sont maintenant dus ad' autres types de documents dont la decouverte modifie parfois sensiblement les contours de notre information. On pense dabord a l'epigraphie. Pour ne citer que quelques exernples, la Trilingue de Xanthos 42 a permis des avancees importantes dans le domaine linguistique et historique mais a imrncdiatement souleve d'irnportants problemes chronologiques; les inscriptions de Sekkoy renouvellent notre connaissance du koinon des Cariens et de la geographic historique de la region controlee par Mausole mais leur signification concrete reste desesperernent obscure. La publication systematique de corpus 43 rend plus aise I' acces a une documentation jusqu'alors fort dispersee. L'utilisation des inscriptions cuneiforrnes, rnerne si elle ne concerne que marginalement nos regions, fournit quelques precieux eclairagcs 44 dans la mesure OU elle permet dechapper a un point de vue par trop hcllcnocentrique. La numismatique a ete egalement, dans ces dernieres annees, une source de renouvcllement grace notamment a l' edition acceleree des collections des musees 45, de collections privces et a des etudes qui sont venues corriger les points de vue restes tres longtemps non discutes de savants dont I' activite se situe a la fin du XIXe OU au debut du
FGrRisl, IV A, 1, 1998,4-28 (Skylax de Karyanda, it distinguer du Ps.-Skylax). Baynes 1955 ; BUchner 1958 ; Bringmann 1965 ; Cargill 1981 ; Petit 1988. ,9 Bosworth 1980a : Brunt 1962 et 1986. 40 Cf. appendiee 5. 41 Sur Quinte Curcc, Atkinson 1980; Plutarque, Hamilton 1969. 42 Metzger etal. 1979; Badian 1977. 43 lnschriften von Kleinasien ; Tituli Asiae Minoris. 44 Lewis 1977 ; 1980. 45 Cf les nombreux volumes de la Sylloge Nummorum Graecarum (particulierement SNG von Aulock ; Copenhagen ; Levante ; France 2 .. France 3, etc.). lS
INTRODUCTION
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xx- siecle 46. Ce domaine est peut-etre cependant celui ou il reste encore Ie plus adecouvrir-". Je me suis efforce dans les pages qui suivent de tenir compte du monnayage emis aussi bien par Ies cites que par lautorite satrapale, de montrer les disparites regionales qui existent et de mettre en exergue les cas privilegies de la Carie, de la Lycie et de la Cilicie. Pour cette derniere, il est evident que sans la numismatique nous ne saurions a peu pres rien de son histoire sinon par quelques bribes de textes litteraires, La publication, ici comme ailleurs 48, de tresors monetaires permct Ie renouvellement de bien des questions 49 qui depassent largement Ie domaine des monnaies et meme celui de I' economie, Je voudrais conclure en soulignant que cet ouvrage est Ie fruit d'un travail de longue haleine, souvent mis sur Ie metier, souvent interrompu. Puissent ceux qui m' ont aide de leurs critiques et soutenu de leurs encouragements trouvcr ici I' expression de toute rna gratitude. Je remercie tout particulierement A. Salomon pour la saisic des planches, des index et la revision du texte; N. Tran et S. Vincent pour la mise en page; A. Bugat, O. Henry et J.-F. Pichonneau pour la realisation des cartes.
Six, Babelon, Imhoof Blumer, Head. Cf. notre table ronde Or perse et histoire grecque ct dans Ie mernc esprit avec unc tonalite plus "cilicienne" celie qui s'cst tenue a Istanbul au printemps 1997 et dontles actcs ne sont pas encore publics, II est tenu compte des principaux resultats, signalc» par 1c nom des auteurs suivi de la mention (Istanbul). 48 Parmi bien d'autres exemples Ie tresor lycien dit "de Tissaphernc" : Hurter 1979. 49 Cf. Iapport exceptionnel du trcsor Levante 1994, pourtant simplement "apercu" a I'occasion dunc vente. 46
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" PREMIERE PARTIE
MISE EN PLACE ET ORGANISATION DES SATRAPIES PERSES EN ASIE MINEURE OCCIDENTALE
CHAPITREI
EMPIRE PERSE ET SATRAPIE
1. L'EMPIRE PERSE, SA PERCEPTION PAR LES MODERNES, QUELQUES JALONS Traiter de l'interieur l'histoire de l'Asie Mineure au lye S., merne si I' on restreint pour l'essentiel le champ de vision a la partie occidentale et cotiere, suppose une connaissance approfondie de I'organisation de l'entite qui domine le plus souvent ces regions, c'est-a-dire l'Empire perse et ses subdivisions satrapiques. A travers l'eclairage regional, c'est aussi toute la conception de I'organisation de l'empire qui est en cause. Bien des positions a priori ont cours selon les preoccupations scientifiques et la formation de base des savants concernes (specialistes du monde classique, orientalistes). En effet, grace aux sources grecques, c'est l'une des regions excentriques de l'Empire perse qui nous cst la mieux connue, mais les specialistes de l'Iran ont sou vent regrette que I'interet des hellenistes pour les problemes orientaux aboutisse a une vision par trop hellenocentriste de la monarchie achernenide 1. Ce travers, reel, est d'ailleurs du en grande partie aux auteurs antiques qui, dans beaucoup de cas, ne touchent a l'histoire perse que dans la mesure ou il y a antagonisme actif avec les grandes cites de Grece d'Europe. Cela explique les "silences" sur des evenements dont la portee devait s'averer determinante par la suite mais n'est pas contradictoire avec Ie fait que plusieurs d'entre eux avaient une bonne connaissance des realites perses (ainsi Herodote, Xenophon, Ctesias ou encore Ie Ps.-Aristote, auteur de l'Economique II) par contact direct avec elles, voire par I'acces it des archives. Ce phenornene a encore ete accentue par le "filtre" qu'a interpose la posterite pour des oeuvres s'interessant specifiquernent aux questions orientales et qui n'ont pas ete jugees dignes d'etre recopiees et nous sont parvenues sous forme de citations ou rnerne sont connues seulement par leurs titres. Chez les modernes, la conception d'un monde "oriental" univoque trouve ses racines dans les lieux communs que colportent les auteurs grecs depuis Eschyle, surtout Xenophon (dans la Cyropediei 2, Ctesias, etc. et toute une litterature polernique (Platon, Isocrate et ses disciples) qui a sa plus belle expression dans la fameuse assertion du corpus hippocratique, Airs, eaux, lieux 16 3 : "Pour ces raisons Iabsence de saisons marquees], il me semble que les Asiatiques sont faibles et cela aussi acause de leurs lois. L'Asie est dans sa grande majorite sous tutelle royale",
Sancisi-Weerdenburg 1987 b, 117-131. Cf. aussi Cartledge 1987, 184 sq. Spccialemcnt xsn., Cyr., 8.8. Cf. Balcer 1995, 19-24. 3 Dont 1a formulation sierait mieux apparemmcnt it un auteur du debut du IV' que du v-s. (merne si la paternite d'Hippocrate pour cettc ccuvre est generalernent acceptee). Cf. Calame 1986,75-99. 1
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D'oii un melange de condescendance et de fascination, qui se retrouve encore sans veritable critique chez un certain nombre d'historiens anglais du XIX" et du debut du xx- s. et qui repose sur une vision confusionniste commode d'un "Orient" immuable de l'Antiquite a l'epoque coloniale contemporaine 4. La deuxierne dimension sous-jacente, que I'on pourrait qualifier d'attirance pour l'exotisrne, s'exprime parfois de facon superficielle par un cote "mille et une nuits" 5, mais elle peut deboucher aussi sur des tentatives plus recentes pour marquer plus nettement la part qui revient a chacun et par consequent, tracer une sorte de frontiere (mouvante) entre Occident et Orient 6. On observera cependant que crest une vision deja reductrice que de ramener Ie debat a ces deux entites sans tenir compte des realites "autochtones", En effet tenter d'ecrire l'histoire de la region consideree crest certes entrer dans l'histoire de l'Empire perse, mais il faut souligner qu'on ne saurait tout expliquer par la presence et (l'affronternent) de deux imperialisrnes necessairement concurrents: les mondes de l'Anatolie occidentale ont leur specificite et leur dynamique historique propre, d'ou la necessite d'etudes regionales voire micro-regionales, qui ne peuvent guere se concevoir que sur la longue duree, L'exemple d'Arbinas suffira a expliciter le propos 7. Le dynaste avait fait rediger pour sa propre gloire des textes vantant ses exploits en lycien, rnais aussi des poemes en grec. L'auteur de I'un d'eux est le devin Symmachos de Pellana, crest probablement lui aussi qui a suggere la consultation de l'orac1e de Delphes ; l'autre poerne mentionne un pedotribe, dont le nom ne nous est pas parvenu. Comme Ie souligne L. Robert 8, Ie pedotribe, qui apporte la gymnastique rationnelle et medicale, doit etre percu comme un agent de l'hellenisation, au meme titre que les differents artistes ou poetes ayant exerce leur activite en Lycie. Cependant, tout cela n'ernpeche nullement Arbinas de vanter ses aptitudes au tir a l'arc et a l'equitation, qualites eminernment perses 9 comme il sied pour quelqu'un qui est dote d'un nom perse 10 et dont on doit penser que, comme la plupart des notables locaux, il avait fait un sejour a la "Porte" du satrape. Entin il nc faut pas davantage oublier la troisierne dimension que nous rappelle fort opportunement P. Leveque 11: " .. £1up&l VVEl] qui parait une restitution sure. Cette tyrannie nous replace dans un milieu evidemment micrasiatique [... J nous lisons dans cette inscription l'ideologie d'un dynaste asiatique, d'un 'tyran' dont les exploits guerriers, suivis de la necessaire expression de sa reconnaissance a l'egard des 4 Cf. par ex. Ramsay 1895,36-37 qui eonc1ut: 'The oriental never seeks for, or wishes, individual liberty : he prefers to be governed". Comme le note Sancisi 1987b, 130, cette vision des choses (parfaitement explicable it l'cpoque precitee) a la vie dure puisqu'cllc sous-tend encore largcment la synthcsc rccente de Cook 1983. On eonsultera utilement aussi la preface de Baleer ]995. 5 Saneisi 1987b. 117. 6 Cf. par ex. Asheri ]983, qui cite en exergue unc maxime de A. Breton (qu'il eonvient certes de ne pas lire au premier degre) : "La Grece est une grande crrcur, La Perse : il faut retourner it la Pcrsc". Cf. aussi l'irnportant essai de Starr 1976, 39-99 (aspects politiques et cconorniques) ; 1977, 49-116 (culture et art; planches) ; specialernent 1976,48-54 sur les auteurs grecs : cf., p. 64, l'analyse du role de Conan, infra p. 251 et n. 147. 7 Bousquet 1975, 138-148. H Robert 1975, 328-330, sp, n. 76 ; Robert 1976, 661. Y;'vlises en lumiere par Robert 1975, 328-330; 1976, 6; voir aussi la lecture "iranisantc" que fait Herrensehmidt 1985,125-134, du pocme d'Arbinas. Cf. les nuances apportees par Bousquet 1992,181 qui soulignc cependant qu'it sagit d'un "dynaste eleve it I'iranienne" alors que Sava11i 1988, 103-110 met en avant Ie caractere profondement gree. 10 Schmitt 1982a, 378-379 ; 1982 b, 20-2] ; Bryce 1986, 161 sq. 11 est Ie fils du Lyeien Gcrgis. 11 Leveque 1985,135 (commentairc it Herrcnschmidt 1985), supra n. 9.
EMPIRE PERSE ET SATRAPIE
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dieux, justifient Ie pouvoir, qu'il conforte au surplus par une acculturation a la grecque...", On ne saurait done comprendre l'evolution politique et culturelle de la Lycie sans integrer ces trois parametres 12. Une anecdote relative a I'anabase d' Alexandre nous permet d' apercevoir Ie terme de cette evolution. C' est grace aux conseils de Pharnouchos que ['urmee peut franchir sans encombre les Portes Persiques 13. Pharnouchos a ete deporte la quelques annees plus tot. II est qualifie de "Lycien" et on precise que son pere etait Iycien mais sa mere perse. Le statut anterieur du personnage et celui de sa famille ne sont evidemment pas connus. En revanche le fait qu' Alexandre lui ait confie ulterieurement un commandement 14 parait plaider pour une origine aristocratique. II est "bilingue", c'est-adire qu'il parle Ie grec et Ie perse (Arrien Ie distingue comme interprete). A travers cet exemple ce sont bien les trois niveaux evoques ci-dessus que l' on peut retrouver. Chaque fois que cela sera possible, parce que les sources ne sont pas trop indigentes et aussi parce que la region presente des traits ethno-culturels accuses (Lycie, Carie, Paphlagonie, Cilicie) nous essaierons de donner un eclairage dont on doit deja noter que par sa nature il ne peut s'integrer strictement dans une sequence chronologique trap precise, cela bien sur parce que les sources sont pour ces zones encore plus discontinues que pour les regions ou sont impliques plus massivement des Grecs. II ne saurait etre question en quelques lignes d'exposer toutes les facettes de l'historiographie de l'Empire achernenide. Pour aller a l'essentiel, on doit repousser egalement deux visions trap tranchees : l'une qui denie a l'Empire la moindre unite et presque meme son existence, tant sont grandes les disparites regionales et peu apparente l'influence perse 15, I'autre qui fait des Achernenides un maillon d'une histoire - plus ou moins mythique - des grands empires orientaux concus comme des entites fonctionnant en un systeme que I'on pourrait qualifier caricaturalement de "centralisrne despotique", Entendons bien: il ne s'agit pas de traiter ici la question de l'integration de I'histoire de l'Orient, des origines aux rois hellenistiques, dans I'histoire generale de I'Antiquite. Globalemeni I'histoire de l'Empire achernenide est une page de l'histoire de l'Orient, ce n'est pas la frange grecque qu'il controle qui pourrait convaincre du contraire. De rneme, nous serons amenes aconstater que la conquetc macedonienne n'a pas entraine immediatement de bouleversements tant pour le fonctionnement administratif que pour les principales caracteristiques des rapports sociaux. Les theories de G. Droysen 16 ne sont done pas recevables pour l'essentiel, Mais il est aussi par trap simplificateur de considerer l'Otient, des origines aux Seleucides, comme une entite immuable et monolithe, au risque de retomber dans les travers signales precedemment. C'est l'impression que l'on peut retirer d'une lecture rapide de certaines pages de H. Kreissig 17.
Infra p. 186-188. Diod. 17.68.5; Quinte Curce 5.4.4; 10.11 ; Plut.,Alex., 37.1. Sckunda 1991,100. 14 Arrien, An., 4.3.7. 15 Cf. la mise au point de Briant 1982, 1-1 I. 16 Droysen 1877 ; on se reportera a l'analyse lucide qu'en faisaitA. Bouche-Leclercq dans son introduction a la traduction francaise de 1883. Voir Bravo 1968. Cf. aussi Briant 1982,291-293. 17 Kreissig 1978. Cf. les nuances qu'apporte (en partie aussi a ses travaux anterieurs, ainsi 1982, 211) Briant 1987 par ex. p. 13 : (parlant des rapports du pouvoir central avec les pays conquis) "un tel systcmc theoriqucrnent immuable - a developpc au cours de l'histoire une seric de contradictions". 12
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II Y aurait aussi un grand risque a surexploiter les informations fournies par les documents generes par le pouvoir central et ou, tant du point de vue ideologique que pratique, l'affaire importante parait etre la representation des peuples soumis et le fait qu'ils s'acquittent du tribut ; d'oii I'image, supportee par un certain nombre d'auteurs grecs, d'un Empire perse conquerant, aux aspirations de domination universelle, qui contrastait evidernment beaucoup avec la realite du IVe S. Tout comme pour Sparte dans sa Lakedaimonion politeia, Xenophon decrit dans la Cyropedie la construction d'un Empire ideal, celui du temps de Cyrus l'Ancien, qu'il oppose a la degenerescence de celui qu'il cotoie 18. Beaucoup de modernes ont epouse ce point de vue d'une "decadence" de l'Empire perse 19 sans toujours apprecier la part du contexte politique et ideologique propre au monde grec qui pousse Isocrate, Demosthene et d'autres a exprimer des opinions que I'on doit considerer comme fondamentalement polemiques 20. Le sujet a ete repris de facon ample par M. N. Weiskopf qui propose une these radicalement difterente : il refuse, it juste titre, de considerer l'Empire perse comme I' "homme malade" de la region et souligne le caractere coherent du systerne de gouvernement. II rejette aussi une histoire faite de listes satrapales et tout autant l'autre tendance qui consiste a isoler des "provinces" nettement definies avec des frontieres comparables acelles de provinces modernes. Tout cela parait une tres saine reaction face ala position de ses devanciers. En revanche, on peut etre plus reserve sur la suite de ses critiques, en particulier son refus de considerer comme significatif le vocabulaire politicoadministratif employe par les sources litteraires grecques pour qualifier les fonctions des officiers perses. NOllS verrons plus loin par de multiples exemples que si les flottements entre les auteurs, et rnerne dans l'ceuvre d'un meme auteur, ne sent pas rares, les mots ne sont pas utilises au hasard et que, souvent, ils decalquent etroiternent une realite perse. II convient certes d'etre tout a fait d'accord avec lui pour restituer sa soup/esse - c'est Ia une idee fondamentale - a ]'organisation perse et on pourrait ajouter que cela est du a de probables emprunts aux systemes locaux preexistants d'Etats constitues anterieurernent 21. Mais IR Il est clair qu'il ne convient pas de prendre 11 la lcllre tout ce que Xenophon dccrit comme etant la situation de la Persc et de l'Empire sous Cyrus, mais il ne faut pas pour autant rejeter comme inutilisable ce traite comme Ie font de Iacon trop systematique Cook 1983, e.g. 21 ou Weiskopf 1982, 73, etc. Rappelons en effet que Xenophon est un ternoin oculaire de la realite perse du rournant du v- et du rvs s. Sancisi-Weerdenburg 1987b, 119J 28 reexamine le dernier chapitre en forme d'epiloguc (8.8) de la Cyropedie. Elle est tentee, apres Hirsch 1985, de eonc1ure que Xenophon n'est pas l'auteur de cette partie de l'ceuvre. J'avouc ne pas etre pleinement convaincu. Il est certes assez evident qu'il s'agit d'un "raj out" (H. Saneisi penche pour le lY' siecle - et, il eonvicnt d'ajouter, avant Alexandre) ; mais pourquoi pas de Xenophon lui-merne en reponse aux critiques faites 11 son ouvrage, 11 un moment ou la vision ideale de la Perse qui y etait affirrnee ne eorrespondait ni 11 la realite de l'epoque, ni aux themes vehicules par la plupart des auteurs" C'est que Ie but initial de la Cyropedie pouvait avoir ete mal compris : il ne s'agissait pas de depeindre un Empire reel, mais, scion Ie mode constant des traites utopiques, de transposer ailleurs (sans pour autant que tous lesfaits doivent etre consideres eomme fantaisistes) un recit 11 these, la recherche d'un mode de gouverncmcnt ideal mais ni plus ni moins theorique que celui decrit dans les Lois de Platon. 19 Cf. la reflcxion pertinente de Sancisi-Weerdenhurg 1987a, 33-45 (specialement consacre 11 Ctesias) et aussi Briant 1989, 33-47 qui conc1ut, 11 juste titre, sur lc refus de l'explication simpliste selon laquelle la chute de l'Empire perse serait due 11 sa "decadence". Une honne illustration du developpement economique qui caracterise la region au IVe s. pourrait etre fournie par lcs monnaies, cf. Mildenberg J 998. 20 Isocrate, Paneg., 150-153; Phil., 101-104; d'ou Hignett 1963,91,93-94 etc. (position consideree comme exemplaire par Weiskopf 1982, 2 et n. 2). 21 Cf. par exemple la Lydie des Mermnades. Radet 1893, 173, proposait l'hypothese de l'existence d'un gouvernement regional 11 Daskyleion 11 I'cpoque de la domination Iydienne ; le seuI Clement de "preuve" etait Ie nom
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remarquons que la position de M. N. Weiskopf est tout aussi systematique que celie de ses devanciers au point qu'il est amene non seulement a refuser toutes les visions globales de l'Empire qui lui paraissent erronees (y compris celles d'Herodote et de Xenophon) mais aussi les faits qui n'entrent pas dans sa propre vision du Monde perse (cf. infra pour les fonctions de Cyrus, pour Tiribaze, etc.).
2. LA SATRAPIE : DEFINITION Avant d'analyser la nature et la composition des ressorts satrapiques, il parait necessaire de proposer quelques observations dont il sera possible par l'experience de juger de la pertinence. En premier lieu, il serait illusoire de considerer l'Empire perse comme un ensemble immobile; entre le VIC s. et le IV e s., d'inevitables mutations 22 et adaptations se sont produites y cornpris, sans aucun doute, dans la conception que l'on pouvait avoir des satrapies. En d'autres terrnes, l'Empire achemenide a une histoire ; ses composantes correspondent a un etat de conquete, de domination, en fonction d'une configuration geographique, d'une situation strategique avec apparemment une capacite affirrnee de s'adapter avec une certaine souplesse aux realites ouaux besoins plus conjoncturels : c'est ce que montre l'exemple de la Cilicie, entire quasi autonome sous le Syennesis auquel on demande simplement de s'acquitter du phoros. Mais les necessites de la guerre (Chypre, Egypte) amenent a reconsiderer la situation en imposant un controle plus direct (Tiribaze, Pharnabaze puis Datames) sur la province. On objectera que les "empires orientaux" autoritaires se caracterisent justement par l'absence de tout mouvement jusqu'a leur decomposition. A titre de comparaison, pourrait-on soutenir serieusernent que le Bas-Empire romain constitue un tout immuable de 284 a 395? II est assez couramment admis que des l'origine l'Empire avait ete divise en satrapies mais on a releve depuis longtemps que, si le terme XsaerapaVil apparait des I'epoque de du pere de Gyges (Hdt, 1.8) d'ou les doutes de Talamo 1979, 84-85. Les fouilles en cours de T. Bakir dernontrcnt l'existence d'une irnportante strate Iydienne dans les sondages qui ont etc effectues (cf. l'exposc commode des resultats dans Bakir 1995, 269-281). Ccla conforte done considerablernent Ie point de vue de G. Radet. 22 Dans les cites grecques, de facon sans doute trop schematique, on peut discerner le passage du thesmos au nomos et entin la laicisation de la loi au IVe s. Une evolution comparable parait reperable dans l'Empire acherncnide. Les textcs officiels conserves fondent la lcgalite des acres royaux sur la religion qui legitime I'accession au tronc et l'exercice du pouvoir. Mais lc concepl d'une loi irrevocable, y compris par Ie Roi qui l'a prornulguee, sc developpe assez lOt (cf. Daniel, 6 ; 9 ; 13 ; 16). Hdt. 3.80-82, dccrit Ic debat instirutionnel qui aurait cu lieu apres l'assassinat du Mage, aboutissant it la prise du pouvoir par Darius; on pensera en particulier au § 82 in fine ou Darius admet que, pour contrebalancer lcs pouvoirs royaux dans la nouvelle conception de la royaute qu'il propose, il convient de conserver les patrioi nomoi. Certes, la plupart des modernes ont, fort justement, mis en doute l'historicitc de cetle JOUle oratoire, mais il bien probable qu'ellc traduit en revanche assez bien I'ambiancc de discussions qui agitaient le palais (cf. Xen., Cyr., 1.3.18) ; Ie terme de l'cvolution parait ctre un rcnforcemcnt du role de l'administration el du nombre de ses rouages. Sur ces questions, mais ne tenant pas suffisamment compte it mon sens de la chronologie, Bucchi 1978, 11-93. P. Briant (par lettre) dans Ie meme scns que Schmitt 1983,417, insisterait plutot sur la toute puissance du Roi dans ce do maine it partir de Hdt. 3.31 et Plut., Artax., 23.5. Dans les deux cas iI s'agit pour les rois d'epouscr leurs sceurs respcctivcs. Ces mariagcs royaux au caractere extraordinaire rappellent lcs unions des tyrans grecs qui sont pour ces derniers l'occasion de se distinguer du commun des mortels. Encore faut-il noter que, scion Herodotc, Ie Roi consulte les juges pour savoir s'il eontrevient it la loi. Ces derniers repondent, en bons courtisans, qu'une loi lui perrnet de faire selon son bon plaisir alors que lui-mente en doute manifestement. Platon, Lettre 7, 332b, retient de Darius qu'il a ete "l'exemple du bon legislateur et du bon roi, car, grace 'lUX lois qu'il a donnees, il a conserve it ce jour l'Ernpire persc". Cf. en dernier lieu Briant 1996, 982-3.
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Darius dans l'inscription de Bisutun 23, d'ailleurs en relation avec un territoire determine, les sources litteraires grecques attendent le lye siecle pour employer le terme cHX'tp&nll~ 24 designant celui qui a la charge d'une satrapie. En effet Herodote, qui emploie indistinctement nomos, arche, satrapeia pour designer le ressort de gouvernement, appelle constamment son responsable hyparque ; Thucydide le denomme strate gas mais, dans ce cas, il convient de se souvenir que l'Athenien vit dans une cite OU cette fonction recouvre une realite qui est de facto bien plus large que l'acception originelle du terme. C'est seulement chez Xenophon que satrapes trouve son emploi habituel ; encore faut-il constater quelque flottement chez eet auteur puisque les hyparques de la famille de Zenis en Bolide 25 sont aussi (abusivement) appeles satrapes et leur ressort territorial, satrapie. Arrien est loin d'etre toujours precis 26, ainsi Arsites est-il qualifie d'hyparque de Phrygie hellespontique (il s'agit evidernment de la satrapie de Daskyleion), de meme pour Mithrobouzanes, satrape de Cappadoce. Faut-il penser que tous les satrapes sont titulaires d'un commandement provincial precis ou bien qu'il peut s'agir plus largement d'un titre qui ne prejuge pas de la fonction du titulaire? La question merite d'etre posee it partir de Diodore 14.24.1 ou, it propos d'Ariaios, est employee la formule a Kupou cf(X'tp&nll~ n::mYllEVO~ £nt 'til~ ~YEJ.wvia~. II ressort du texte, et du contexte, qu' Ariaios est considere comme le commandant en second de l'expedition 27. Malheureusernent, on ne peut guere fonder le raisonnement sur les assertions de Diodore dans la mesure ou l'on doit constater qu'il y a beaucoup d'imprecision dans le vocabulaire de cet auteur qui, par ailleurs, semble considerer qu'un satrape ne saurait etre autre chose que Perse 28. Plutot que de satrapies, M. N. Weiskopf prefere parler de spheres d'injiuence. Pourquoi pas. Mais on joue un peu sur les mots car la plupart de ces "spheres" se definissent sans problerne comme des satrapies, merne s'il peut y avoir quelques cas particuliers : la Lycie n'a jamais constitue une satrapie it part entiere, mais elle est malgre tout une entite bien individualisee. La satrapie est par consequent le module normal, mais sans doute pas le seul, qui puisse exister. Partout ou cela etait necessaire les Perses ont compose avec l'ordre local par reconnaissance de princes-clients, par exemple en Paphlagonie, en Cilicie, it Chypre. II y a done toute une gamme de situations possibles. L'Empire perse n'a pas cherche it developper l'application d'un schema preetabli, identique pour toutes les regions. II a ete presque toujours tenu compte de ce qui existait 29, ainsi pour la tres probable reconduction des "provinces" du royaume lydien 30. De meme, on a laisse subsister Etats-temples, ethne, koina, aussi bien que cites grecques, et l'on s'est contente de chapeauter toute cette rnosaique par un systerne administratif perse d'autant plus dense que l'on se trouvait dans une region DB III 13-14 ; 55-56; cf. Kent 1953,181. Lehmann-Haupt 1921, 82-85; Andrewes, in Gomme et al. 1981, 13-16; Schmitt 1976, 373-390; Weiskopf 1982, 6 sq.; Tuplin 1987b, 114; Petit 1990.13-97; Briant 1996,75-78,917 sq. La premiere apparition datee du tcrmc en Asie Mineure est a chercher dans l'inscription lycienne 7L, 40 (vers 400) ; il se trouve deja dans les tablettes des fortifications de Persepolis (PF7; 679-681). Cf. Briant 1996,481. 25 Sur Zenis et Mania, Xen., Hell., 3.1.10-15. 26 Bosworth 1980, II 1-112. 27 Rappelons par exemple que chez Xcn., An., 1.8.5, cette rneme fonction de "lieutenant" de Cyrus est definie par le terme \Jnapxo~. 28 Weiskopf 1982, 9-12. 29 Cf. 1es exemples rcunis pour l'cnsernble de l'Empire par Tuplin 1987 b, III. 30 Sur la relative autonomie de la Lydie apres la conquete, Brown 1978,65 n. 6. 23 24
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que l'on s'efforcait de tenir en main pour des raisons strategiques ou economiques. La etait implante un reseau de phrouria, de grands dornaines, de colons (par exemple dansl'ouest de la Mysie, la Lydie, les environs de Daskyleion, de Kelainai-Kolossai, etc.). C'etait un moyen de doter la noblesse perse de revenus mais aussi de tenir les axes de circulation et les points strategiques, tout en captant les fruits des terres fertiles. Inversernent, le controle de certaines zones montagneuses ou excentriques n'est pas juge prioritaire : Lycaonie, Pisidie, Mysie centrale, territoires cotiers du nord-est de l'Asie Mineure sont seulement dornines de facon partielle ou temporaire, ce qui n'exclut pas l'existence de rapports qui ne sont pas seulement conflictuels (e.g. le recrutement de mercenaires). Selon M. N. Weiskopf, il ne serait pas possible d'etablir une hierarchic entre les ditferentes categories de personnes qu'il definit a l'interieur de la satrapie : satrape, noble avec domaine, "officier special", chef politi que des communautes grecques ou assirniles, chef tribal, dynaste, commandant de garnison. 11 y a Ia un point de vue quelque peu paradoxa!. En revanche il insiste ajuste titre sur l'importance des individus ou plutot de leur place dans une hierarchic parallele dont Ies parametres seraient la naissance (on notera en particulier combien importante etait l'appartenance a une famille issue des "Sept", ceux qui avaient renverse Ie Mage), les relations avec la cour, des actes qui avaient pu etre directement apprecies par Ie Roi. On ajoutera a cette liste les liens d'hospitalite 31. Toutes choses qui ne pouvaient se definir en termes administratifs mais qui expliquent en grande partie les comportements du Roi a l'egard de ses officiers et reciproquement. Qu'est-ce qu'une satrapie? L'histoire sur la longue duree de l'Empire achernenide montre qu'il ne s'agit pas d'une entite immuable. Ses limites varient scIon un grand nombre de parametres dont l'importance n'est pas identique selon les lieu x et les epoques : "poids" du titulaire, role determine dans Ie cadre d'une strategic generale, conditions geographiques et ethniques, etc. Mais merne lorsque Ie secteur a ete assigne ou confirrne par Ie Roi, ce dernier laisse se developper (parfois merne il encourage) les rivalites ou, si l'on prefere, l'emulation entre les satrapes. Le satrape est incite a acquerir des territoires, mais cela se fait parfois au detriment du voisin (pensons par exemple a la pomme de discorde que represente l'Eolide pour les satrapes de Daskyleion et de Sardes). Autre fait capital, la conception meme de la satrapie a evolue. Primitivement elle est de meme nature, sinon de meme module, que la dorea. Nous entendons par la que son octroi resultait d'un lien personnel (et l'approfondissait) entre Ie souverain et le recipiendaire. Ce dernier appartenait a la famille ou a I'entourage immediat du Roi ; il etait nomme a cause du renom de sa parente et des services personnels rendus au souverain. La consequence logique etait que dans certains cas (e.g. Daskyleion) la satrapie pouvait devenir hereditaire. Certes, a partir du v- s. les motifs de designation des satrapes n'ont pas fondamentalement change, mais on est passe a une forme plus "moderne" de gestion de l'Empire, avec plusieurs consequences importantes : le personnel peut changer en meme temps que les orientations de la politique du Roi ; la satrapie se definirait plus volontiers comme une province, Ie Roi se reservant la liberte d'en modifier Ies contours et merne la liste. Dans les cas de tres vastes ressorts (Cyrus, 31 Weiskopf ]982. 38-40 ; sur les rapports de proxenic et d'evergesic dans l'Empire (au bien entendu leur interpretatio graeca dans les sources grccques), ef. Gauthier 1985, 20-21. Ce qui est vrai pour lc Roi vaut plus encore pour les satrapes (cf. Cyrus et Lysandre, Pharnabaze, au plus exaetement son fils, ct Agesilas. etc.).
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Tissapherne) Ie satrape est arnene a deleguer au moins temporairement une partie de ses pouvoirs ades hyparques, qu'ils en aient ou non le titre 32. Des satrapies hereditaires continuent a exister et il s'en cree de nouvelles entre les mains de dynasties autochtones. Dans ces cas, comment percevoir Ie mode de succession sinon par une sorte d'agrement qui peut amener Ie Roi a trancher a posteriori ou eventuellement a privilegier telle branche de la famille au detriment de l'autre (Ariobarzane, Artabaze).ll faut sans aucun doute concevoir un processus comparable a celui que decrit Xenophon pour la designation des hyparques de Troade : Mania, bien qu'elle soit une femme, est agreee en quelque sorte a l'essai ; aussi significative est la reponse faite aMidias, gendre et assassin de cette derniere, qui demandait a etre maitre de la contree com me l'avait ete Mania. Pharnabaze lui repondit "qu'il pouvait garder tout cela jusqu'a ce que lui-rneme, Pharnabaze, vint s'emparer de sa personne avec ses presents" 33. Les pouvoirs ordinaires de quelques satrapes sont dans certaines circonstances (guerre exterieure, reprise en main d'une region) augrnentes de pouvoirs militaires et administratifs speciaux, qui ne se confondent pas avec les limites du ressort satrapal proprement dit. Dans Ie cas de Cyrus, Xenophon precise qu'il avait ete designe comme karanos 34 mais on ne sait pas si ce titre, dont c'est la seule occurrence, etait porte par tous ceux qui ont exerce une autorite comparable.· La presence d'un karanos etablit un element supplernentaire de hierarchie que Ie pouvoirs central met en place pour accroitre I'efficacite d'un dispositif politico-militaire, mais qui peut etre aussi generateur de conftits avec les officiers deja en place localement (Tissapherne-Cyrus ; cf. aussi la position de Pharnabaze exprimee lors de son entrevue avec Agesilas), Ce serait une vision singulierement reductrice de considerer qu'il s'agit d'une fonction exclusivement militaire 35. L'exercice de ce commandement amene son titulaire a beneficier de droits ordinairement regaliens : disposition des garnisons royales, droit d'utiliser le tribut (tout ou partie pour la region consideree") pour la guerre, frappe de la monnaie 36. On observera que Cyrus, bien que virtuellement chef des arrnees se reunissant a Kastolou Pedion, n'a jamais dirige personnellement de campagne irnportante, du moins jusqu'a sa tentative de prise de pouvoir supreme. L'interet de sa fonction etait evidemrnent ailleurs. Celle-ci, que I'on peut assez bien cerner lorsqu'elle est exercee par Cyrus, a des precedents (Megabaze, Oroites peut-etre, Otanes, Tissapherne en 4 J 1) aussi bien que des suites (Tissapherne, Strouthas, Mentor peutetre, Memnon acoup sur apres la chute d' Halicarnasse, Pharnabaze le Jeune) 37. L'etat de nos sources nous prive sans doute de plusieurs autre cas. Reste a donner une definition du satrape. Th. Petit, cherchant a dernontrer qu'il n'existait pas de satrapies d'Ionie et de Carie 38, enonce en cinq points ce qu'il considere comme les caracteres communs a tous les satrapes : 32 Jacobs 1994 aboutit a des conclusions similaires, bien qu' it man sens un peu trap systematiques. Infra p. 169 sq. sp. n. 25. 33 xs».. Hell., 3.1.15, trad. Hatzfeld CUP. 34 Xen., Hell., 1.4.3 ; cf. An., 1.1.2. Haebler 1982, 81-90 ; Petit 1983,35-45, fait venir lc tcrrne karanos du vieux-pcrsc "kara, arrnee ; cf. aussi Bivar 1961, 123 n. 5; en dernier lieu Tcsten 1991,173 sq. 35 Hirsch 1981. 36 Infra p. 38 (garnisons) ; 41 (tribut) ; 50 (monnaie). 37 On pourrait ajouter Tithrausthcs en 395, il n'a certes pas exerce la charge de satrape mais il peut disposer de sornrnes considerables pour la guerre. En plus des trente talents qu' il verse pour eloigner Agesilas de la Lydie, il rernel deux cent vingt talents a Conan (Hell. Ox., 14.3) qu'il prcleve sur Y'ousia de Tissapherne. 3~ Petit 1988,307-322. Ces points serant etudies a leur place dans lcs ehapitres suivants.
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a) Ils sont toujours de sexe masculin ; b) Les satrapes dont le statut est assure sont tous des Perses ; c) Ils sont dans la dependance directe du Roi ; d) La satrapie est pat sa taille la premiere subdivision administrative de l'Empire ; e) Le satrape est "celui qui ala garde de ce qui est perse, des interets perses, de l'ordre perse a I'etranger" : Th. Petit reprend a son compte la traduction que propose Cl. Herrenschmidt 39 du terme xi~ar:;apava(en vieux-perse ; iranien, xi~aerapava). Reprenons successivement ces differents elements. Le point a est aisernent verifiable; les seules exceptions attestees (les Hekatomnides et dans une certaine mesure Mania en Bolide) sont celles dont Th. Petit veut montrer qu'il ne s'agit pas d'un pouvoir de type satrapal. En ce qui concerne le point b, et comme on etait en droit de s'y attendre, cette definition est exacte dans la tres grande majorite des cas. Mais il y a des exceptions connues 40 qu'il convient d'analyser pour celles qui concement l'Asie Mineure : Orontes est repute etre bactrien ; Cornelius Nepos parle de Datames com me natione Care et cela a conduit certains modernes a contester qu'i I ait ete satrape 41. Comment alors situer dans ce panorama la Cilicie, la Paphlagonie, la Carie des Hekatomnides? Th. Petit elirnine la difficulte en affirmant qu'aucun de ces ensembles ne constitue une satrapie. 11 semble qu'il convienne de poser le probleme autrement, c' est-a-dire de s'interroger sur la facon dont Ie Roi concevait les rapports avec ceux qui detenaient les pouvoirs regionaux. On rappellera en premier lieu Xenophon, Cyropedie, 7.42: "Cyrus neut jamais a envoyer un Perse comme satrape des Ciliciens ni des Chypriotes mais les rois successifs du pays lui donnaient satisfaction; il percevait simplement le tribut et, chaque fois qu'il avait besoin d'une expedition illes requerait". Comparons Diodore 15.8.2-3 ou les conditions posees par Tiribaze a Evagoras sont de payer le tribut au taux annuel fixe et d'obeir comme un esclave a son maitre (rcOln 'to npoorcetrouevov 00puylac; ECHlV 0XUPQlT<XlOV XWplOV. Malgre Meyer (cite par Bruce 1967, 140), on se demandera si la similitude de nom avec la Lcontos korne d'Athenec 2A3a est seulement fortuite. Ramsay distingue les deux. II situe Leontonkcphalai it Prymnessos (1935, 132) it proximitc, au sud-est, de la moderne Afyon (d. aussi Ramsay 1890, 139) et Leontoskcme pres d'Afyon sans plus de precision (ibid., 143). Malgre son caracterc vague, "pres d'Afyon", c'est la position que nous rcticndrons. Elle pcrmet de rendre compte de facon satisfaisante de la mesavcnture de Themistocle. A propos d' Afyon, il convient de noter la presence d'unc stele "grcco-pcrse" it Altintas (Ie toponyme signifie "pierre dor" et on peut constater qu'en d'autres endroits il est associe it des vestiges antiques). La stele, Pfuhl & Mobius 1977 n" 75 : Dentzer 1982 : von Gall 1989, 145, a etc divcrsemcnt datee (debut ou fin du VC s.). C'est dans cette meme region, ct it coup sur sur la Route royale, qu'il convient de situer Keramon Agora (en effet ce "marche des potiers" ne prend lout son scns qucn liaison avec une route ou un carrcfour de routes). Pour Sekunda 1991, 129, la localite pourrait avoir precede Temcnouthyrai (Usak). II me parait plus vraisemblablc de la placer aux alentours de Ia moderne Afyon. 78
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traverse la Phrygie pour atteindre l'Halys. C'etait l'hypothese de W. M. Ramsay 85 et celie que je reprends a mon compte. - Soit un trace qui, apartir de Sardes, suit dabord Ie Kogarnos, atteint Kolossai puis Kelainai avant de remonter vers Leontokephale. Tel est Ie point de vue de P. Briant et de V. Manfredi 86. II convient de reprendre la question en terme de distance kilometrique en partant du texte d'Herodote (5.49) : "Dans la traversee de la Lydie et de la Phrygie il y a une suite de vingt stathmoi, quatre-vingt-quatorze parasanges et demi. En sortant de la Phrygie, on trouve Ie fleuve Halys". II ressort de ce texte qu'Herodote enregistrait vingt etapes de Sardes a I'Halys et qu'on ne saurait concevoir comme peu realiste un systeme de mesure dont il donne Ie detail jusqu' au demi-parasange. Sur Ie systerne de calcul deux positions ont ete retenues par les modcrnes : ou bien on suit Herodote (5.53) qui ecrit que "la route royale est mesuree exactement en parasanges", au bien, pour evacuer Ies difficultes engendrees par des mesures trop precises, on attribue au parasange une valeur variable Me aux difficultes du terrain et done a la rapidite de circulation. Certes, on observera que, du point de vue des utilisateurs, la duree du voyage etait necessairement calculee en journees puisquil fallait attribuer a chacun des rations journalieres dont Ie nombre etait defini a I'avance. Cela nimplique en aucune facon quil u'existait pas par ailleurs un mode de calcul en distance, par exernple pour lestimation des corvees dues au titre de I'entretien de la voie. Ce point de vue est confirrne par un autre passage d' Herodote (6.42) : "Le gouverneur de Sardes, Artaphernes ... mesura leur territoire (les Ioniens) en parasanges - les Perses appellent ainsi une longueur de trente stades - et, dapres cette rnesure, fixa les tributs que devait payer chaque cite". Com me on Ie voit la mesure en parasanges sert aussi acalculer I'assiette du tribut. Quelle est alors la valeur du parasange? Herodote lui attribue a plusieurs reprises (5.53; 6.42) une longueur de trente stades ; et I'on retrouvc Ie rnerne calcul implicite dans un passage repute interpole de I' Anabase (2.2.6) 87. Si I' on admet que le stade equivaut a cent quatre-vingt cinq metres (en observant que les mesures variaient d'une comrnunaute a I'autre), nous obtenons une equation: un parasange = 5,5 kilometres. Par consequent, la distance de Sardes a l'Halys (frontiere de la Cappadoce : Herodote 1.6), atteindrait environ cinq cent vingt-cinq kilometres. A titre de comparaison Ie kilornetragc de la route moderne fait apparaitre un total proche de cinq cent cinquante kilometres. Or le trace n'a pas du varier de facon importante si I' on admet que I' on a utilise la route la plus directe vers l'Halys. S. Yerasimos 88, dans les notes qui accornpagnent Ie recit du cinquierne voyage de JeanBaptiste Tavernier au XYIIC s., souligne que Ie cheminement de la caravane dans le secteur envisage ici emprunte tantot Ie trace de la route moderne, tantot celui de la voie ferree,
S5 Ramsay 1895,571, opte pour la haute vallee de l'Hcrmos alors que la route par Ie Kogamos seraitla plus frequentee it I' cpoque hellcnistiquc, Ce point de vue est accepte par Tuplin 1999. S6 Briant 1973,49 sq. ; 1991,68 ; Manfredi 1986,25-40. Remarquons cependant que M. lui-rnerne est oblige d'admettre, p. 32, qu'cntrc les deux villcs de Kclainai et de Kolossai Xenophon compte trois etapcs pour Cyrus alors que Xerxes scion Herodoie naurait fait que deux etapes cgales avce une rupture it Anava (au bord du lac Sanaos?). ~7 Yair lc eommentaire de Masqueray, CUF, SO n. I. RS J.-B. Tavernier, Les six voyages en Turquie et en Perse, parus pour la premiere tois en 1676 (1981, introduction et notes de St. Yerasimos),
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A titre de contre-epreuve, Xenophon, dans I'Anabase (1.2.7), traite de la partie du periple de Cyrus qui mene de Kolossai a Kelainai. La distance est estimee par l'auteur a vingt parasanges 89. Or le trace de la route moderne, qui ne peut guere etre different de ee qu'il etait dans l'Antiquite, atteint environ cent kilometres 90 et suggere une valeur moyenne de un parasange = cinq kilometres. On est done bien au dela du compte en faisant passer la Route royale decrite par Herodote par Kelainai et Kolossai, ce qui allonge la distance pareourue d'environ cent quarante kilometres, pour atteindre un total proche de six cent quatre-vingt dix kilometres. Bien entendu cela ne signifie pas qu'il ri'existe pas une route royale qui relie Kelainai-Kolossai au centre de l'Empire. II est au contraire evident que ces voies permettent datteindre les capitalcs satrapiques et les points de colonisation. Certes l'information n'est pas tres abondante, mais on peut par exemple identifier une route qui, traversant la Mysie hellespontique, se dirige vcrs l'Hellespont et, de la, vers la Thrace 9\ ; son point de convergence avec l'artere principale ne doit pas etre eloigne de la Cite de Midas. Un autre itineraire se deduit de l'histoire rapportee par Plutarque, Themistocle, 30. L'Athenien, en route pour la cote OU il a ete investi d'une mission officielle, est averti par un songe que lui inspire la Grande Mere du danger imminent dil ala presence de sicaires pisidiens apostes par le "satrape" de Haute-Phrygie, Epixyes. II evite d'emprunter la route qui traverse le bourg de Leontokephale. Son escorte surprend les assassins; en consequence il se rend a Magnesie pour accomplir Ie vrcu fait a la Mere des dieux. Cette anecdote confirme qu'une route relie, c'est du domaine de l'cvidence, la (Grande) Phrygie et Ie centre de I'Empire, puis, cheminant pres du Meandre, qu'elle se prolonge jusqu'a Magnesie et probablement a Milet 92. Cela n'exclut pas pour autant qu'existe une liaison directe entre Sardes et Kolossai 93. Convient-il de conserver le concept de "route rnilitaire" qui est ne d'une traduction probablement trop litterale de via militaris qui apparait chez Quinte Curcc (5.8.5)? H. Bardon 94 traduit par "route strategique", ce que sont a l'evidence les "voies royales", Selon Herodote dans le passage precite, la voie royale emprunte son trace parce que les regions traversees sont a la fois peuplees et bien tenues en main. Ces deux caracteristiques cadrent mal avec la route sud (Lycaonie, Cilicie) qui va devenir la plus importante apartir de l'epoque hellenistique. L'analyse du cheminement de Cyrus le Jeune montre qu'il ne suit pas SY xs», .4.n., 1.2.7. oo Cr. Manfredi 30-31. 91 On combinera sur ee point les travaux de Sekunda 1988,186, et de Robert 1980,257-299. Le premier rcmet en situation Ie dossier epigraphiquc Welles 1934, n° 18-20, ou lc domaine concede a 1a reine Laodiee a Pannukorne est dclimitc par rapport a Yancienne route "surplombant autrefois Pannukome qui a ete labourcc par lcs cultivatcurs voisins qui se Ia sont appropricc". line peut s'agir 1a que de la route perse (dont nous remarquons une fois encore qu'ellc ne suit pas Ie fond de la vallec). Sekunda propose de situer ee domaine dans la region de la modcrne Musakca, done pres de 1a cote et a l'ouest de Cyzique (i1 est borde par lcs tcrritoires de celte derniere cite et de Zeleia), A partir du territoire de Cyzique, la route doit suivrc a peu pres le trace moderne (avec une branche vcrs Dasky1cion). Robert fournit le maillon suivant en reflechissant sur l'ultimc itincrairc d'Alcibiadc, assassine sur l'ordre de Pharnabaze alors qu'il sc rend aupres du Roi. Lc rccxamen des sources (essentiellement Athenee 13.574 c-f ; Arist., Hist. .4.n., 6.29) permet a Robert de situer Melissa, lc lieu de sa fin, tout pres de 1a cite de Midas. 11 me parait vraisemhiable que nous sommcs la presqu' au point de jonction avec la route Sardes-Suse precitee. 92 Hipponax 43. Diehl. 93 Cf. Hdt. 7.26-30. Radct ! 893,323-324; Ramsay 1895, 160. 94 CUP, ad lac. 11 s'agit de Ia route qui, a partir d'Ecbatanc, sc dirige vcrs l'Est, Briant 1984,67, 1a compare a l'axe Sardes-Suse. Les autres routes eonnues sont enumerees par Tuplin 1987, 110 n. 6; on evoquera les routes royales situccs implicitement en Lyeie par Ie Ps.-Aristote (supra note 80).
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une "route" au sens strict du terme 95.11 me parait impossible de determiner Ie trace d'une route militaire quelles que soient d' ailleurs Ies etapes 96. Cela est vrai pour Ie parcours d' est en ouest de Xerxes 97 et dans le sens inverse pour Cyrus Ie Jeune. A partir de Sardes I'itineraire de ce dernier decrit un tres curieux crochet par Kolossai, Kelainai, Peltai et Keramon Agora (ou il rejoint tres probablement la voie royale). Pour W. M. Ramsay 98, "this strange detour has always been a puzzle". V. Manfredi 99, est lui aussi amene, en fonction du trace qu'il propose pour la Route royale, a admettre que la marche vel'S Ie nord-est en direction de Peltai a comme consequence de faire "perdre" a Cyrus environ une semaine. La seule explication coherente est que cette partie du trajet a pour objet de lever des troupes et eventuellement des subsides dans deux regions de forte colonisation; pour chacune des agglomerations concemees, Xenophon repete rroALC; OlKOU/-lEVll, "ville peuplee" (1.2.6; 7; 10) 100. Apres avoir chernine quelque temps sur la voie royale, Cyrus oblique vcrs Ie sud-est, il atteint les limites de la Phrygie a Iconion et entre en Lycaonie. Xenophon precise alors (1.2.19) que l'armee est autorisee a piller puisqu'on se trouve en territoire ennemi. Nous semmes bien loin de la definition d'une route controlee. En arrivant a proxirnite des Portes de Cilicie, il retrouve une route carrossable, mais la encore il apparait que cette route (1.2.21) est tenue par les Ciliciens et par consequent "inaccessible it une .arrnee pour peu qu'elle rencontrat de resistance". Ce n'est pas la une definition qui sied a une via militaris. 11 s'agit d'un cheminement de campagne qui bien entendu emprunte des routes (rnais certainement pas une route) en fonction d'irnperatifs conjoncturels. La constitution et Ie deplacement denorrnes arrnees creent des contraintes particulieres avec la necessite de passer par des regions peuplees susceptibles de fournir, en partie au moins, la solution aux besoins irnmediats (achat, requisition, pillage). Le reseau des routes royales ou controlees, quel que soit Ie qualificatif retenu, rneme sil est plus ramifie qu' on ne Ie dit parfois, ne saurait rendre compte de toute la circulation des biens et des personnes. II devait necessairement exister des "routes naturelles". Nous entendons par la celles dont I'existence est imrnernoriale et conditionnee essentiellement par la geographic, avec d'inevitables mutations liees it des accidents historiques rnais sur lesquelles ni Ie pouvoir central ni merne Ie pouvoir satrapique n'ont de prise. En l'etat de notre information, il est Ie plus souvent impossible de decider si, ou quand, I'une ou I'autre de ces routes traditionnelles a pu devenir route royalc (cf. I'exemple de la grande route nord-sud qui relie le golfe de Cilicie it Sinope 101 dont au moins la traversee des partes de Cilicie fait l'objet d'une vigilante attention). 95 Lcs modernes fiuctuent passablement lorsqu'il s'agit de decrirc Ie systcme des routes qui permct de traverser l'Anatolic d'est en ouest avant la periode hellenistique. Malgrc Calder 1925,7-11, la "route meridionale" n'cst pas la voic royale. 96 Cf. e.g. Ramsay 1920, 89-107 ; Briant 1973,50-5 I. 97 Hdt. 7.26-30; Manfredi 1986, 31-32 decrit lc parcours de Xerxes par Kristalla, Kelainai, Anava, Kolossai, Kidrara, Kollatehoi, Sardes, en soulignant qu'un certain nombre de ecs etupes ne sont pas localisees. En dernier lieu, MUUer 1994 ; French 1998. 9H Ramsay 1890. 41. 99 Manfredi 1986. 38. '00 Sur cc concept, cf. Geysels 1974, 29-38 ct aussi Brule 1995, 12-13. '0' Str. 12.2.10 indique que primitivement (avant qu'clle ne flit achernincc par Ephcse), locre de Sinope porta it cc nom en dcpit du fait qu'clle etait exploitee en Grande-Cappadoce, parce qu'clle etait exportee par ee port. Sur I"'isthme" anatolien et la route nord-sud: Hdt. 1.72; 2.34; Hell. Ox., 17.4; Quinte Curee 3.1.12-13 ; Str. 12.1.1; Pline, HN, 6.7. Bing 1985, 121-122, propose eomme alternative une route qui permettait de relier la Cappadoce a Issos, en partieulier pour l' exportation des chevaux.
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Les routes royales sont done le vecteur du dispositif administratif, politique, militaire de l'empire perse. Elles sont concues en fonction dirnperatifs strategiques - c'est le cas par exemple de la route qui aboutit aAbydos - mais aussi pour relier les centres de la presence perse. Dans les regions bien controlees de I' Asie Mineure occidentale, il n'y a pas lieu de douter que les distances aient ete calculees en mesure de longueur et cela irnplique, si l' on accorde quelque credibilite au texte d'Herodote, de determiner un trace direct pour la route dans son trajet Ie plus occidental. Les itineraires choisis par Xerxes et Cyrus le Jeune relevent d'un autre type de problematique : ils sont lies a des difficultes conjoncturelles (particulierernent dans le deuxierne cas) mais aussi a des irnperatifs fondamentaux qui sont la constitution et I'intendance de I' armee, La creation d'un vaste empire, dote d'un tel reseau de voies de communication devait avoir rapidement un effet sur I' econornie. Le pouvoir central etait par definition consommateur mais il en allait de meme pour les centres regionaux aussi bien que pour les aristocraties locales (quelle qu'en soit l'origine ethnique). Les objets de luxe que I'on trouve prioritairement dans les tombes ne sont que la face apparente d' echanges et de circulation de biens de consommation que seules des fouilles menees serieusement en quelques points privilegies permettent de caracteriser. Prenons I'exernple de Gordion, dautant plus significatif que cette ancienne capitale phrygienne se trouve au point de jonction de l' axe Sardes-Suse et de la route qui rnene a Daskyleion et Abydos et de la en Europe 102. L' etude des amphores grecques fournit un "marqueur" tres eclairant 103 : entre 535 et 480 elles proviennent essentiellement de Chios et Lesbos, mais aussi de Samos-Milet ; de 475 a 425 on observe une baisse des importations avec, en particulier, la disparition de Lesbos. A la fin V" s. et dans la premiere moitie du IV e s., les amphores de Grece du Nord predorninent et apparait un groupe fabrique dans le Sud-Est de I'Egee (Cos, Rhodes, Cnide, Samos). Chios est encore presente mais en moindre quantite. Dans la seconde moitie du rv- s., le nord de I'Egee est en position de force avec en particulier Ie materiel de Thasos. Comme on Ie voit, et pour s'en tenir a la periode qui nous occupe dans cet ouvrage, ce qui a ete enonce plus haut concernant l' existence de plusieurs axes vitaux en Anatolie occidentale parait confirrne. lls ont fonctionne simultanement et il est possible que tel d' entre eux ait supplante Ies autres a tel moment pour des raisons a la fois strategiques et econorniques. Merne si Herodote privilegie I'axe median (ce qui pourrait correspondre ala realite de son temps) il apparait que la branche nord-ouest a ete au moins aussi importante dans la periode qui couvre la fin du V" et le IV" s.
3.3. Les forteresses royales
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Cette question fournit l'exemple meme des difficultes qu'il y a a confronter les ecrits a dimension theoricienne de Xenophon, en I'occurrence Cyrop., 8.6 et Ee., 4.5-11, avec ce que lion peut apercevoir de la realite a travers l'ensemble d'une documentation extremernent dispersee et tres liee a la conjoncture. II s'agit de tester Ie bien fonde des affirmations Voigt et al. ed, 1997 ; Sams & Voigt 1998, 681-701 ; ef. Briant 1997, 22-24. Lawall 1997, 21-23; Sams & Voigt 1998,687. !1J4 L'ensernble du dossier est repris en un catalogue tres documcnte par Tuplin 1987a, 167-248 ; ef. Tuplin 1987b, 132 et deja Briant 1982 (index passim) ; Lewis 1977, 53 et n. 21 ; Hornblower 1982, 147 sq. ; Cook 1983, 83 juge lcs passages xcnophontiqucs allcgues irop theoriques pour ctrc utilisables. Cf. en dernier lieu Briant 1996, 352-354. !02
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concernant I'interventionnisme du Roi dans les affaires des provinces: les garnisons appointees par Ie Roi, dont I'existence ne saurait etre niee, constituent-elles la clef de voute militaire, mais aussi politique, du controle des provinces? Dans la Cyropedie, 8.6.1, les choses sont, it premiere lecture, claires. Le roi (Cyrus) envoie des satrapes aux ethne vaincus ; mais il se reserve Ie controle direct des commandants des akrai et aussi des chiliarques qui assurent la garde de la ch/ira. Cela expressernent pour ne pas laisser trop de pouvoir aux satrapes qui pourraient en user pour se rebeller. Plus loin (§ 9), il rencherit : "Les gardiens des akrai relevent du Roi et les chiliarques des gardiens sont designes par Ie Roi et sont inscrits sur ses etats". Dans I'Economique, il indique que Ie Roi fixe les nombres des corps de troupe appointes (misthophoroi) et qu'il entretient en outre des gardiens dans les citadelles, dont Ie pouvoir civil doit pourvoir aux besoins materiels. Phrourarques, chiliarques, satrapes sont tenus de presenter leurs troupes it I'inspection royale (Ie Roi en per sonne ou son representant). Le phrourarque est en charge du militaire, I'''archonte'' du civil; en cas de mauvais fonctionnement du systeme chacun d'eux est tenu de porter l'affaire devant Ie Roi. Partout ou il y a un satrape, ce dernier a juridiction it la fois sur Ie civil et sur Ie militaire. Ces deux textes ne sont pas aussi facilement conciliables que I'affirme Chr. Tuplin 105 et pas seulement it cause de I'impression de flou qui s'impose it propos des denominations des differentes categories de troupes territoriales, II y a en effet une question plus importante : quelle disposition Ie satrape peut-il avoir des moyens militaires? Pour ce qui est des zones rurales, s'il n'y existe aucune mention de la chiliarchie dans des documents datant de l'epoque de la domination achernenide, elle apparait en revanche dans un document epigraphique de Sardes de la fin du lye s. 106. II n'y a d'ailleurs pas it s'etonner de cette absence dans des sources ecrites qui, dans Ie secteur concerne, ne peuvent etre que grecques, or nous sommes dans la chora roy ale done, par definition, dans les zones situees hors des cites et encore tres peu touchees par l'hellenisrne. Notons cependant la presence d'Alexandros (un Grec) comme phrourarque des choria d'E-olide 107. La difficulte proven ant du vocabulaire ne doit pas etre exageree : selon la terminologie de Xenophon, Alexandros devrait etre appele chiliarque et non phrourarque, mais on sait que I'exactitude de Polyen en ce domaine n'est pas absolue. En revanche, I'existence de garnisons royales dans certaines villes est bien attestee 108. L'exemple Ie plus significatif pour eclairer notre propos parait etre celui de Sardes it I'epoque de Cyrus Ie Jeune 109. Orontas a ete donne par son pere it Cyrus comme subordonne (rappelons que Cyrus avait les pouvoirs d'un karanosi, il recoit Ie commandement de la garnison de l'acropole de Sardes, garnison dont l'existence est souvent Tuplin 19R7a, 174-175. Sardis, 7.1.1. Lcs cditcurs, Buckler & Robinson 1912, 11-82, aprcs avoir date cc document de 306, ebranles par 1cs critiques, reculent sur cc point dans le volume des inscriptions de Sardes. Depuis lors, bien des propositions ont ete fuites pour des dates basses: cf. e.g. Atkinson 1972. 45-75. Tout concourt (onomastique, toponym ie, organisation fiscale et militairc, monnaie) a montrer que cette inscription dans son etat actuel est la copic d'un original qui! eonvient indubitablement de rcdater de la fin du IV e S., cf. Debord 1982, 244-251. lO7 Polycn 6.10: ef. Briant 1982, 190: il est tres peu vraisemblable qu'Alexandros ait ete un harmoste spaniate, comme Ie soutient Parke 1930, 68. 109 Milet en 334 : Arrien, An., 1.18.4. ]09 Xen., An., 1.6.6: pour des analyses divergentes, d. Andrewes 1971,207-216: Bommelaer 1981, 122 et n. 32: "la relation du proces d'Orontes prouverait meme que Cyrus dut reconqucrir Sardes sur eet otticier mandate par Arraxerxes". Weiskopf 1982, 47, met ee differcnd sur lc compte de dissensions pcrsonncllcs, mais tout son raisonnerncnt est faussc par Ie fait qu'il denic toute realite a la Ionction de satrape de Cyrus. Briant 1996, 353 ]OJ
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attestee dans les sources. Sur I'ordre d'Artaxerxes, il fait la guerre a Cyrus et obeit en cela de facon naturelle au Roi. Defait, il se rend une premiere fois puis par la suite passe en Mysie dans la partie qui n'etait pas controlee par les Perses et harcele les forces loyalistes. Orontas se soumet une seconde fois a Cyrus avant de le trahir a nouveau au cours de son anabase, ce qui lui vaut d'etre execute. Cette histoire montre bien la difficulte potentielle des rapports entre les chefs de garnison et les satrapes, en particulier lorsque ces derniers sont investis de commandements militaires. 11 parait donc hors de doute que les plus importantes des garnisons sont controlees, c' est-a-dire appointees, par Ie Roi 110. Cela s'explique d'autant mieux que ces acropoles servent de point de concentration du tribut 111. En contrepoint, il serait irrealiste d'affirmer que les satrapes n'ont pas d'activite militaire qui leur soit propre ; ils recrutent des mercenaires qui peuvent meme apparaitre comme un danger pour Ie pouvoir central 112 et ils sont arnenes a installer des garnisons en differents points pour des raisons de politique personnelle. Telle est bien la situation des garnisons successives d'Antandros ou encore de Tissapherne a Mi let en 411 113. On pensera aussi aux soldats mercenaires de Mausole. Le Ps.-Aristote 114 rapporte egalement que I'hyparque Kondalos entretenait une garnison (a Xanthos?). Le recit indique explicitement que la solde est versee par lui aux officiers. II convient done de distinguer 115les garnisons qui tiennent l'akra d'un certain nombre de centres urbains importants ou strategiques, que ces poleis soient grecques ou non (Sardes aussi bien que Milet), et les contingents qui se rencontrent dans la chora sous les ordres du chiliarque et qui cornprennent, mais pas exclusivement 116, des garnisons dans les phrouria 117. P. Briant 118 propose a partir de la une image assez plausible du quadrillage militaire de la chora avec une place forte principale qui fait office de gazophylakie et de considcrc ce cas comme trop particulier pour etre exemplaire. Au moment de la conquete par Alexandre, Mithrenes, commandant de la citadelle de Sardcs (Arrien, An., 1.7-18.2), assume la merne fonction qu'Orontas. II se rend au devant d'Alexandrc en compagnie des notables de la ville de Sardes pour lui livrer la ville, les tresors, les citadelles ; en echange, il est accueilli avec Ics honneurs dus a son rang dans l'entourage royal, avant de recevoir un nouveau commandement (d. Bervc 1926, n° 524 ; Briant 1985, 168; 1993, 15). Sur 1es defenses de Sardes, cf. Greenwalt 1995,127-8. 110 cr. l'analyse de Hornblower 1982, 148-149, et sa conclusion: "Major garrison-commands ... were surely crown appointments". III Diod. 17.21.7: "Alexandre ... s'crnpara de la cite de Sardes et de ses acropoles et, micux encore, des tresors qui s'y trouvaicnt", 112 Pharnabaze recrute des mercenaircs en grand nombre, Diod. 13.51 ; ses subordonnes font de merne (Mania) ; sur ceux de Cyrus, cf. Roy 1967,287-323 ; instruit par de multiples precedents, Ochos exige des satrapes cotiers qu'ils debandenr leurs compagnies (cf. cepcndant infra p. 393). "3 Antandros, garnisons suceessives de Tissapherne et Pharnabaze, The. 8.108 ; Diod. 13.41.4. Milet, The. 8.109. Dans un certain nombre de cas les choses sont moins nettes, cf. 1asos, The. 8.29. 114 Ps.-Arist., Ee., 2, 1348a 25-28. 115 Tuplin 1987a, 175. 116 Infra p. 239. l17 L'uti1isation de l'archeologie pour mieux definir la presence militaire perse reste assez aleatoirc. Les sites des phrouria, lorsqu'ils ont ete apercus par lcs voyagcurs-epigraphistes, n'ont gucre suscite d'interet, De surcroit, a quelques exceptions pres - certains sites cariens par exemplc quieonque a un peu l'experience du terrain sait qu'il est impossible de proposer une date, meme de facon approximative, pour de tels vestiges sans que soient mcnes au moins des sondages. Sur les tcmoignages archeologiqucs, Tuplin 1987a, 198 sq. A noter que ees phrouria paraissent lies etroitcmcnt a l'agriculture. II scrait possible d'alleguer un certain nombre d'exemplcs de pressoirs a huile (cortes difficiles a dater) associes a de tels edifices. Cf. Paton & Myres 1896, 188-271. llR Briant 1982,210-211. Sur un tel reseau de choria en Lydie et leur mise en relation avec les komai, cf. Xcn., Hell., 1.2.5 ; infra p. 170 n. 29. -v ,
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capitale de district; toute cette organisation etant aussi en liaison avec la collecte et eventuellement la conservation sur place du phoros. On accordera a Chr. Tuplin que Xenophon a eu essentiellement sous les yeux Ie fonctionnement de la Lydie ou l'on peut retrouver tous les elements qui nourrissent sa reconstruction theorique : akra de Sardes, chiliarchie et colonisation militaire, concentration des troupes a Kastolou Pedion, Dans quelle mesure cette description vaut-elle pour tout l'Empire? La question reste ouverte. II y a manifestement des nuances regionales dues aux conditions d'exercice de I'autorite (et, entre autres, a la densite de la presence militaire "perse"), mais aussi a l'histoire locale. II n'en demeure pas moins que des regions com me la Grande-Phrygie, la Cappadoce 119 au moins, devaient avoir un mode de controle tres comparable acelui de la Lydie.
3.4. Repartition et disposition du phoros II n'y a pas lieu de revenir ici sur le fonctionnement du systeme fiscal perse en tant que tel 120. Nous observerons simplement qu'il est sans aucun doute beaucoup plus complexe et multiforme qu'il n'est parfois affirme, avec un grand nombre de taxes ou requisitions diverses 121. Bornons nous a rappeler que l'interlocuteur du Roi est Ie satrape, ce qui suppose evidemment que Ie montant est fixe par satrapie (Herodote), Le Roi est fonde a exiger le versement d'une somme immuable, au satrape ensuite de s'efforcer de trouver les fonds correspondants (cf. par exemple la situation de Tissapherne et de Pharnabaze aussi bien que de Mausole) 122. Le satrape se tourne a son tour vers l'echelon inferieur des "hyparques" (quels qu'en soient I'origine ethnique ou le statut juridique), comme Mania en Bolide ou Kondalos en Lycie 123. II y a done une imposition par ethnos ; c'est ainsi qu'il convient de comprendre le "don" de Magnesie fait a Thernistocle. Celle-ci "vaut" cinquante talents; il ne s'agit nullement d'une quelconque estimation de la valeur venale de la ville. Themistocle n'est pas proprietaire de Magnesie, de la Magnesie pour etre plus exact 124. II est habilite a y percevoir les impots et, en contrepartie, doit reverser cinquante talents au Roi (et plus vraisemblablement au satrape). A l'interieur de ces unites regionales, il a dfi y avoir une grande diversite de situations selon le mode de domination: Iiberte probable laissee aux dynastes tributaires de repartir leurs propres rentrees fiscales mais fixation d'un montant immuable pour les communautes organisees preexistantes. Le systeme semble etre plus sophistique a partir de Darius, au moins pour les zones plus directement controlees ou l'on peut esperer un rendement "optimise" de I'impot-phoros qui n'exclut pas d'autres impots ou 119 Strabon enumere un grand nombre de places fortes, beaueoup sont ruinees a son epoque, en Cappadoce proprement ditc et en Cappadoce ponti que. Cf. Reinach 1890, 259 sq. La Cappadoce est un reservoir de forces perses encore sous Ie regne d'Alexandre (infra p. 465) et mernc au deja (Diod. 18.16.2). 120 Nous renvoyons a l'etude ires detaillee de Tuplin 1987b, 136-] 58 et aux deux articles dc Deseat 1985, 97-112; 1989,77-93. En dernier lieu Briant 1996, 398 sq. 121 Tuplin ]987b, 146; Descat ] 989,81-83 ; 1997. 122 Infra p. 121 (Tissapherne) ; p. 139 (Mausole). Dans le meme ordre didees Idrieus est cerise verser de fortes sommes au Roi (Isocratc, Phil., 104). 123 Xen., Hell., 3.1.] 2 (Mania) : "Unc fois qu'clle Iut devenue maitresse du pays, elle ne versait pas moins les impots (phoroi) que son mari". Ps.-Arist., te., 2.1348a (§ l4a-14d) pour Kondalos. Cf. aussi en general ibid.. 1345b: Ie terme employe pour le versement nest pas alors <papos comme en 1348a mais 1<xyT] (cf. Hesychius : 1<XyT]' ~«GtA.1KTj offip£a). Sur unc probable distinction entre les deux termes, Descat 1989, 82 (tage en nature et pharos en meta] precieux puis en monnaies). 124 Cf. Hdt. 3.90.
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prestations en nature ou en corvees. A propos de cette organisation, on pense bien sur au celebre passage d'Herodote ]25 au, en merne temps qu'il avait precede a une remise en ordre politico-judiciaire ]26, le satrape de Sardes, Artaphemes, "mesura le territoire des cites en parasanges ... et d'apres cette rnesure, fixa les tributs que devait payer chaque cite, tributs qui depuis lors sont restes constamment et jusqu'a mon epoque inchanges, tels que les a fixes Artaphernes ; il les fixa a peu pres au tau x anterieur, C'etaient la des mesures pacifiques...". II faut en deduire que dans la satrapie de Sardes au mains ]27 fut operee une sorte de cadastration qui servit de base a l'estimation du pharos, au en tout cas a son amodiation puisque, seJon Herodote, on ne modifia pas beaucoup Ies taux anciens. Cet impot est repercute sur les individus composant la communaute 12R. Une estimation comparable eut apparemment lieu aussi pour la chora et les komai. C'est ce que demontre l'inscription de Sardes replacee a sa date de redaction proche de 306 avant notre ere ]29. Deux niveaux de perception y apparaissent : lcs lots ou kleroi, imposes trois chrysoi et demi ; les villages, qui doivent entre cinquante et cinquante sept chrysoi. Rappelons que le texte indique que les versernents sont operes ala chiliarchie. Tout cela suppose une veritable "grille" de perception avec des archives, par consequent le personnel ad hac a tous les niveaux. Ce systerne ne vaut probablement, soulignons-Ie a nouveau, que pour les satrapies ou les Perses et leur administration sont suffisamment implantes pour pouvoir controler I' ensemble du pays par un reseau de phrouria et de representants dans les villes. Ce qui permet de proposer le schema suivant : SATRAPIE
t HYPARCHlE
•
CIT~ (ou entite equivalente)
CH[L1ARCHIE
KOME
KLEROS
QUOTE-PART INDIVIDUELLE
_ _I
125 Hdt. 6.42; it rapprocher de Diod. 10.25.4 ou la restauration des lois s'accompagne de 1a fixation des tributs selon les capacites de paiement: HXKTOUS (POPOUS KmCx ouva,Lllv ErrETa~EV ; cf. aussi Theopompe, FGrHist, lIS, F 113 (Athcnce 4.145a). Cr. Evans 1976,344-348 ; Briant 1996,978. 126 Infra p. 117. m Worrlc [988,465 n. 205 admet qu'il y a pu y avoir maintien it I'cpoque hcllcnistique du systerne de cadastration existant it lepoque precedentc. Si cera sapplique it Latmos, la future Heraclee, nous sommes en presence d'un fait particulierement interessant dans un secteur relevant du pouvoir des Hekatomnides : nous constaterions ainsi une nouvelle fois une application stricto du fonetionnement imperial "normal". 12X On rappellcra deux cxemplcs : it Labraunda un decret des P1atascis pris pour un Coeen iLabraunda. III, 2,42, 1. 14-17) : ECxV O£ TIS Errtlyp(X(p~ O)]Ylvll[Ta]t nAa[T]aaEu[a]Lv [~aa]LAtK~ ~ rroAmK~, Airovu Kal TOllS EyyOVODS EA[E]u8E[p]ODS Kal aTEAEtS d[vm TOV ad x]povov, TCx Of BaatAIK[CxI TEAll TCCAEtV. Cf., sur lcs restitutions de ce passage et la bibliographie de l'inscription, Varinlioglu et al. [990, 67 et n. 18. au encore dans Ie secteur de la future Stratonicee, IK, 22.1-Stratonikeia, 1982,5021. 2lsq. HDV OOUAWV aTE[Aij dvm Kal rrtXvTmlv rrA~,u tpopw~ BaatAIKwv, qu'il convient d'interpreter comme une exemption de toutes les taxes et charges, excepte le pharos basilikos. 129 Sardis, 7.1, I; cf. Deseat 1985; Tuplin 1987b, est fort gene dans son argumentation dans la mesure ou il maintient la date bassc proposee generalement pour cc document.
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En une VISIOn sans doute trop reductrice, la plupart des commentateurs admettent que, une fois la perception du pharos effectuee dans les provinces, le montant en etait alars achemine vers le centre de l'Empire ; le Roi seul pouvait en disposer a sa guise. Cependant plusieurs indices, par exemple I'existence de gazophylakies des l'epoque perse, font penser qu'une partie au moins du pharos ctait conservee sur place a la disposition d'autorites mandatees. C'est en tout cas ce que dit Herodote 3.90 a propos du phoros de Cilicie : cinq cents talents d'argent dont cent quarante sont consommes sur place pour la cavalerie garnisaire et c' est probablement en ce sens que I'on doit interpreter un passage de l'Ecanamique II 130 relatif a la concentration au bard de la Route royale de ce qui ensuite permet de faire vivre Ie systerne, Le cas Ie plus explicite parait etre celui de Cyrus pour la periode 407-405 : - En 407 131, lars de sa premiere rencontre avec Lysandre, Cyrus indique qu'il a recu cinq cents talents du Roi pour la guerre. Si cela ne suffit pas, il ajoutera ses idia en plus de ce que son pere lui a donne (E
lOR
LES SATRAPIES DE CAPPADOCE ET DE PHRYGlE MARITIME
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Pharnakes Artabaze
Phamabazc
Pharnakes I
Anobarzane
Pharnabaze
--I Muhndate
Aparne
Parapita
Artabaze seem de Mentor
fils
Mithridate
Anobarzanc de KIOS
i
Pharnabaze
Barsinc
Apame
Artorus
Memnon
Ptolemee
Eumene
Mithrrdatc de Kios
Anobarzane Arsames Kophen
Alexandre
Les proposttions de ce savant ont ete assez largement acceptees 113 lorsque Ie problerne n'a pas ete purement et simplement esquive, dans ce qui a pu apparaitre comme une question desesperee, Notons d'abord que les hypotheses elaborees ne peuvent etre considerees cam me entierement satisfaisantes et qu'un certain nombre de points meritent un reexarnen : l ) K. J. Beloch se debarrasse un peu vite de l'encombrant passage de Diodore (15.90.3) ou Ariobarzane, le satrape de Phrygie, recupere la basileia de Mithridate a la mort de ce demier (l'explication foumie est la confusion des deux Ariobarzane). 2) Comment la branche de Kios a-t-elle pu s'emparer aussi rapidement de la Cappadoce pontique si elle n' avait pas des liens anciens avec cette region? 114 Essayons de rassembler et d'ordonner les differents renseignements disponibles : a) Un Ariobarzane apparait d'abord en 406/405 115 11 est important de constater que les faits rapportes (rapatriement d'une ambassade athenienne) 116 se pas sent a Kios et dans sa region. Cette derniere est alors manifestement sous la responsabilite de cet Ariobarzane, II] Cf. par ex. la note de Sherman, edtteur pour la call. Loeb du hvre 15 de Drodore, qUI rcunit cornmodement a propos de 15.90.2 (202 n 1) l'cnscrnble des temoignages sur Ie difficile dossier MrthndateAriobarzane. On ne peut cepcndant accepter son interpretauon (diffcrente de Beloch, sans que eel a sort mdiquc) de la basileia comme etant Ie royaumc du Pont. 114 Infra p. 101. 115 Xcn., Hell., 1.4.7 Weiskopf 1989, 28 pcnsc quil sagu du futur satrape. ll f Infra p. 228.
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b) Les textes anciens n'indiquent jamais explicitement s'il y a un lien de parente entre Pharnabaze et Ariobarzane. On ne dispose en effet que de renseignements flous, ainsi Xenophon, Hell., 4.1.40: 'De; 0' f.v Tn TOU CPapva~&sou anoOTwic,x an00TEp&V aOEAqJOe; T~V apx~v qJuy&oa f.noi110E TOV Tile; l1apanime; u\.6v... 117. Ainsi forrnule, Ie texte est ambigu. K. J. Beloch hesite entre les deux solutions possibles pour la construction de la phrase: adelphos pouvant designer un frere de Pharnabaze ou un frere du fils de Parapita, done un fils de Pharnabaze. Dans le stemma qui lui sert de conclusion, il adopte la premiere solution. M. N. Weiskopf 118 suggere de facon convaincante, meme s'il ne peut apporter de preuve decisive, qu'Ariobarzane est un fils, le fils aine, de Pharnabaze. Malheureusement les personnages ne sont pas nommes a l'exception de la mere du jeune homme exile. De rneme la date de I'''absence'' de Pharnabaze n'est pas precisee, mais il parait assez vraisemblable de situer ces faits au moment de son rappel aupres du Roi 119 c) Pharnabaze est accompagne par un ou plusieurs freres lors de la negociation du troisieme traite de 411 avec les Spartiates 120. M. N. Weiskopf suppose 121 par reference au pere du "fondateur" de la dynastie satrapale de Daskyleion qu'il s'agit d'une appellation generique "les fils de Pharnakes", Merne si l'on accepte avec prudence le point de vue de M. N. Weiskopf, il convient de nc pas oublier celui de K. J. Beloch qui voit dans ce passage un argument en faveur de I'idee que Pharnabaze ct Ariobarzane sont freres 122. d) Une autre source confirme indirectement la parente d'Ariobarzane et de Pharnabaze : lorsque Artabaze, fils de Pharnabazc et d'Apame (elle-meme fille d'Artaxerxes, cf. h), se rend it Alexandre 123, il est accornpagne de plusieurs de ses enfants dont un Ariobarzane. 11 a un autre fils du nom de Pharnabaze 124. e) Remarquons aussi que la plupart des modernes considerent que la satrapie de Daskyleion avait depuis l'epoque de Pharnakes un caractere hereditairc 125. II est donc tout a fait logique que Pharnabaze ait obtenu que son fils aine lui succede, d'autant que ce dernier entretenait de bonnes relations avec les Spartiates et en particulier Antalkidas. f) En effet, Xenophon 126 nous apprend qu' Ariobarzane est depuis longtemps l'hote d'Antalkidas. II va favoriser les entrepriscs de ce dernier lorsqu'il est designe comme satrape. 117 "Plus tard, profitant de l'abscncc de Pharnabaze, son frere en depossedant de son pouvoir lou commandement"] Ie fils de Parapna, l'avait exrle" ; trad. Hatzfcld, CUF. 118 Weiskopf 19H2, 120-9 (1989, 31), qui s'appuic entre autres sur le recit de Plutarque, Age's ,13, rapporlant les memes evcnements et OU Ie jeune hornme est dit avou etc chasse par scs freres. Sekunda 1988 ct Corsten 19H5 (voir note 132) ehaeun de leur cote, avec des soluuons differcntes, rcfusent les hens de parente proposes tradmonncllcmcnt pour Pharnabaze et Anobarzane 119 Infra p 263 Une toute autre interpretation pour Sekunda 1988, 178, scion lcquel le fils de Parapita est un fils illegitime (il parait difficile de tradmre archie par home comme Ie fait S) On san que Pharnabaze avau un frere batard, Bagaios, qUI commandc sa cavalene (Hell, 3 413) Le nom de deux des fils de Pharnabazc, Oxythres et Dibrktos, est connu par Polyen 7.33.2 (freres cadets d'Artabazc prohablement) Un oncle de Pharnabaze (Susanuthres) . Cornchus Nepos, file, 103. 120 The. H.5H I , infra p. 214 121 Weiskopf 19H9, 27 n 35 122 Beloch 1923, 147. m Amen, An., 3.23.7; ce fall avait etc souhgne par Noldlckc 1884, 295 sq. (e.r de l'ouvrage de Krumbholz, lHH3) , ef. Bosworth 1980a, 325 , Weiskopf 1982, 122 et n. 64. 124 Infra p 458 125 Supra p. 93. 126 xe»., Hell, 5 1.28
LES SATRAPIES DE CAPPADOCE ET DE PHRYGIE MARITIME
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g) Cornelius Nepos 127 definit Ariobarzane comme praefectus Lydiae et Ioniae totiusque Phrvgiae dans un contexte anterieur aux evenernents qu'il rapporte, approximativement dans les annees 380-375. La plupart des modernes ant rejete cette assertion comme fantaisiste. Ne pourrait-elle eventuellement recouvrir une strategic englobant les satrapies de l'Asie Mineure occidentale dont nous avons deja releve plusieurs exemples? h) En 366, Ariobarzane est considere comme rebelle par Ie pouvoir central; il est decide - mais peut-etre pas des les premieres operations - de Ie remplacer par son dernifrere (au neveu) Artabaze, le petit-fils du Roi 128. i) Nous savons cgalcment qu'Ariobarzane est livre par traitrise au Roi par son pro pre fils Mithridate 129, par ailleurs assassin de Datarnes (infra), et Harpocration est Ie seul a indiquer qu'il fut crucifie. Voila les donnees a peu pres assurees, rnerne s'il subsiste un doute sur Ie degre de parente (supra b, c) entre Pharnabaze et Ariobarzane. Le reste est beaucoup plus sujet a caution: j) Le point de depart est Ie texte de Diodore 15.90.3 : 'ApLO~apsaVTje; 0 Tile; et>puYlae; O'aTpaITTje; oe; Kat M L8plOaTou T£A.£UT~CmVTOe; Tile; tourou ~acnA.£lae; K£KUpL£UKWe; ~v ... que l'on doit traduire "Ariobarzane, Ie satrape de Phrygie, qui devint aussi a la mort de Mithridate Ie maitre de sa principaute" 130. Beloch rejette cette assertion (qui n'entre pas dans son schema general) mais on pensera avec Weiskopf 131 qu'il n'est pas possi ble de se debarrasser sans discussion de ce passage. Le satrape de Phrygie (cette titulature simplifiee n'est pas pour autant inexacte) devient Ie maitre de la basileia de Mithridate a la mort de ce dernier. Ce terme ne saurait s'appliquer au ressort d'une satrapie, pas plus celie de Phrygie hellespontique, ou I'on ne voit aucune raison d'introduire Mithridate dans la liste des satrapes 132, que celIe de Cappadoce qui a en effet un titulaire du nom de Mithridate en 40] AOO. k) Pour proceder logiquernent, il importe tout d'abord de definir ce qu'est la basileia. Sur ce point au moins il semble que I'on puisse arriver a des conclusions solides. II est clair que Ie terme de basileia a un double sens. D'une part, et il est possible d'alleguer bien des paralleles pour differcnts satrapes aussi bien que pour Arbinas (Erbbina) en Lycie 133, il s'agit d'un palais, d'une demeure fortifiee, dont dependent des domaines, des villages. D'autre part, la coherence interne de Diodore met hors de doute que la basileia est le point de depart de la puissance de la famille de Kios 134 et dans ce cas, par extension, Ie terme doit etre compris au sens de principaute. Au passage ]5.90.3 repondent en effet 16.90.2 au il est Cornchus Nepos, Dat • 2 5 Polyen 7 26 , infra p 104 129 Xen , Cyrop , R R 4, Anst , Pol, 51312'1; Valero Maxunc 9.11, ext. 12, indiquent seulernent la livrarson au ROI du perc par lc fils, Harpocrauon, s.v. 'APIO~rxp1;6.v'1~, est le seul it mentionncr sa mise it mort. "0 La traducuon de Vial, CUF, est pour Ie moms rapide et mcriteran d'etre exphquee par une note: "Anobarzane le satrapc de Phrygic qui avart pns possession de ce royaume [faut-il cornprcndrc 1'1 Phrygie eomme Bnant 1996,677 (ef. 1051)'71 iJ la mort de Mithndatc..", Weiskopf 1982, 12R, n'est pas 10m de proposer une solution idcnnquc, qu'rl tente d'cxpliquer par l'mversion des noms des deux personnages (mfra) 131 Weiskopf 19R2,I2R U2 Weiskopf suggere que les noms d'Anobarzane et de vluhndate ont pu etre mvcrscs mars nos sources et la vraiscmblancc font penser que c'est Artabaze qut a dircctcmcnt succcdc it Anobarzane. m Phamabaze, Xen., Hell., 4 1.15-16 (ef. Hell Ox, 17.3) , Weiskopf, p. 50 et sur lc termc en general, supra p 46, pour Arbmas, cf. l'mscnptton grecque de TL, 44, infra p 187. 134 En ce qUI concerne la cite de KIOS, lcnscrnble des testtmonia et unc csquissc histonquc sont fourrus par Corsten 19R5, 3-71 (specialcmcnt 23-30 pour la penodc qUI nous occupe). Elle appartient iJ la Ligue de Delos et 127
12S
lOa
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indique qu'Ariobarzane meurt en 337/6 apres avoir "regne" vingt six ans (done depuis 363/ 2) et que Mithridate (II) 135 lui succeda dans la basileia pour trente cinq ans et 20.1 I 1.4 (en 302) ou Mithridate, tue it Kios apres avoir gouverne cette cite et Myrleia 136, est rernplace par Mithidrate (III) qui herite de la dynasteia et agrandit son domaine pour devenir roi de la Cappadoce Pontique et de Paphlagonie pour trente six ans. On suit done aisement Ie processus de formation et de consolidation d'une principaute it partir de la basileia de Kios qui s'''arrondit'' meme au point de devenir un royaume qui comprend aussi la Paphlagonie et la Cappadoce Ponti que 137. QueJle definition juridique donner it cette basileia? La clef de cette enigrne parait etre foumie par Xenophon et Skylax 138. Chez ces deux auteurs la region de Kios est decrite comme mysienne et cela pourrait bien refleter non pas une vague reference au peuplement primitif de la region mais plutot I'organisation administrative du secteur 139. Si cette lecture est la bonne, la basileia releve de la satrapie de Sardes. Or, tres souvent, Ie cceur du pays mysien echappe it I'autorite des Perses 140 ; c'est la raison pour laqueJle a pu se constituer it cet endroit encore plus eloigne de Sardes une veritable principaute, distincte de la satrapie de Daskyleion, mais dont les titulaires sont necessairernent arnenes it composer avec cette derniere, Revenons it Diodore 15.90.3 et it l'identite de Mithridate. Trois solutions au moins sont envisageablcs :
apparait dans un certain nombre de hstes entre 454/3 et 418/7 (1000 dr.) Dans I'inscnpuon IK, 29-KIOS, 2 (Tod, 149), que l'on date gcncralemcnt de 360 ou d'une an nee de peu posteneurc, elle presente routes les caractensuques d'une CIte autonome avec ses msutuuons, ses magrstrats . Cette rmpression est rcnforcec par Ie monnayage que Waddington ct al 1908, 311-314, dataicnt de la deuxieme moine du IV's. Le RIder 1963, 31 propose de modifier la chronologie relauve des errussions : d'abord une ermssion d'argent d'ctalon rhodicn (Waddington et al. 1908, pI. XLIX 27 ~ Lc Rider 1963, pI. XIX, 1), vers 350-345 ; puis des stateres d'or de poids atuque en 345/330 et enhn des hcmi-drachmes ct des 1/4 de dr de poids perse. Parmi les monnaies de bronze seule la monnaie n° 14 p. 314, pl 99, 35' PI. III, 12 (anepigraphe, 11 la difference des bronzes de lcpoquc d'Alexandre), dort etre considcrce comme une mamfestauon de la tutelle pcrse au IV'S : avers, tete de "satrape" barhu 11 drone, avec uare mars sans diademe / revers, grappe de raisin et couronne forrnce de deux epis de ble Apres d'autrcs, Le RIder, p. 40, s'mtcrroge sur le dcgrc de hbcrtc de KJOS en souhgnant que lcs frappes d'argent restent limuees aux pcutes drvtsions [mars retenons qu'il y a tout de merne la frappe d'or]. La premiere impression est qu'il a du y avoir des periodcs d'mdependancc et d'autre ou un controlc plus ou moms strict s'cxcrce sur la cite. Pour lever la contradiction apparente entre Diodore et lcs autres sources, rl y a peut-etre une ebauche de solution Sl l'on se rappelle la nature nutialc de Ia basilcia, qUI n'implique nullement que la cite de KIOS en art fait partie au depart. Le texte de Xenophon a) et un dec ret athemcn (infra p 228) semblent imphquer que, 11 la fin du Vv x., Kios jOUiSSaIt dunc part d' autononue , la basileia correspond 11 la nche plaine qui se trouve 11 l'mteneur, sur l'Izruk Golu (Askama LImen, dont Strahon note que ses eaux etarent poissonneuses ; sur ee type d'obscrvanons, cf supra p. 46). La VIlle ellememc a donc du avoir des rapports fiuctuants avec lc pouvoir perse et plus precisemcnt avec la dynastic de "Kios". Selon Plut , Phoc., 18, Alexandre offre 11 Phocion les revenus de KIOS Cf. Dehord 1998,141. 135 Dont Diodorc rapporte aillcurs (19.40.2) qU'11 descendait de I'un des "Sept" ; cc qut est le cas, rappelons-le, des Pharnacides. 116 Myrleia est une colome de Colophon, cf. Plinc, HN, 5.143 ; ElJenne de Byzancc, s.v. Ellc pale un tnhul d'un demi-talent 11 Athencs en 433/2, IG, 13, 279, II 18, sous l'appcllation BpUAA£HXVo. (ef. Mentt et al. 1939, s. v) Ellc est refondee par la dynastic buhymenne sous lc nom d'Aparnee. Cf. Debord 1998, 146. 137 Sur l'acccssion de ce personnage d'abord lie 11 Antigone, cf aUSSI Appren, Muhr., 9. 138 Supra p. 75. 139 C'est la conclusion que nous retenons pour les § 96 et 98 du Ps.-Skylax. 14() Hell. Ox,16.1.
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1) Mithridate est le satrape de Cappadoce de 401/400 141. C'est la solution retenue par ceux qui n'etablissent pas les correlations mises en evidence ci-dessus entre les divers passages de Diodare. Ce dernier souligne qu'Ariobarzane est le satrape de Phrygie mais ne donne aucun titre particulier a Mithridate; on comprendrait assez mal que le satrape ait sa basileia a Kios, c' est-a-dire en dehors de sa satrapie. II n'est nullement impossible en revanche qu'il y ait un lien de parente entre Mithridate, les satrapes de Cappadoce, et les Pharnakides (cf. infra Ie stemma propose) et cela expliquerait a la fois Ie fait que Mithridate, le fils d'Ariobarzane, ait ete delegue aupres de Datames qui avait succede a Mithridate en Cappadoce 142 et aussi la facilite avec laquelle les descendants de la branche de Kios ant pu s'emparcr de la region, com me s'ils y possedaient deja des jalons 143. 2) Mithridate est le fils d'Ariobarzane. Telle est la solution de M. N. Weiskopf 144 mais elle implique d'inverser les noms des deux protagonistes. II en infere que Mithridate a pu succeder de facon mornentanee a son pere dans la charge de la satrapie de Daskyleion, ce dont il n'y a aucune preuve et meme dont la vraisemblance historique est contestable. 3) La dynastie de Kios est une entire distincte 145, telle est l'opinion de Th. Carsten apres Ed. Meyer 146 apres avoir reuni les testimonia concernant cette cite, resume ses propositions par Ie stemma suivant :
Muhndate I
Anobarzane I (Ie satrape, mort en 363/2)
Anobarzane II 363/2
Mnhndate II qur hvre son pere en 363/2 maitre de Kros en 337-302
Mithndatc III
ocr du Pont it partir de 302)
141 Xen., Anah . 7 8.25 On ne saurait negligcr ce passage considere par certains comme un ajout indu it l'Anahase. Rcmarquons que Pharnabaze est designe lit comme en charge de la Bithymc (ce renscignement cst incornplet mars pas faux; Ie passage a sa coherence puisque l'auteur donne la lrste non des satrapes mars des autontes qui contr6lcnt lcs heux de passage des DIX M1IIe). 142 Infra p 107 141 Drod. 20 111.4 expcdic ceue question en une phrase: "Mithndate hcntant de la pnncipautc ajouta bcaucoup de sujcts, 11 regna en Cappadoee et en Paphlagoruc pendant trente SIX ans". Les auteurs modernes, Sl cnnques par ailleurs it l'egard du rccn de Diodore, ne se posent guere la qucsuon de savoir comment et it qucl titre Mithndate a pu mcttre la mam sur la region ponto-paphlagorucnne. 144 Werskopf 1982, 430. 145 Pour Sekunda 1988, 180-1S1, la fanullc de KJOS (Anobarzane et ses descendants) n'a pas de hen de parente avec Pharnabaze Selon lui J1 s'agit d'une branche cadette de la fanulle de Mrthndate, Ie satrapc de Cappadocc 146 Corsten 1985, 30
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La solution presentee par Th. Corsten a l'avantage de ne pas obliger it manipuler Ie texte de Diodore IS.90.3, mais on peut lui objecter divers arguments de poids inegal. Tout d'abord Ie fait de faire apparaitre un troisicrne Mithridate en plus du satrape de Cappadoce et du fils d'Ariobarzane ; d'autre part, Th. Corsten ne tient pas vraiment compte de Xenophon, Hell., 104.7, oii il apparait que Ie responsable de la region est (un) Ariobarzane ; enfin et surtout son fils Mithridate II aurait une vie it eclipses, mais qui dure fort longtemps 147. Le point de depart est interessant, mais il faut tenter de tenir compte de tous les textes et done aller jusqu'au bout du raisonnement. Dans ce cas, Ariobarzane mentionne par Xenophon a) est distinct du satrape et l'ancetre de cette lignee de la dorea de Kios ; il a un fils nomrne Mithridate qui lui succede it une date indeterminee et qui est encore present en 364, d. 1) ; le satrape Ariobarzane profite de la mort de ce dernier pour accaparer la basileia. Notons en passant que la phrase de Diodore se comprend mieux encore si it l'origine cette basileia ne releve pas de la satrapie de Daskyleion (supra). Mais lui-merne disparait rapidement puisqu'un autre Ariobarzane (fils du precedent Mithridate") en dispose it partir de 363/362. On obtient alors l'arbre genealogique suivant : ~-~-----
Pharnakes
Phamaba:e
Ariobarrane
Anobarzane Ide KIOSI Mrthndate acuf en 406/5 satrape de Cappadoce en 40 I/O
Parapita
Apamc
fils
Artabaze
Mirhndate [de Kios] encore vivant en 365/4
Anobarzane II de KJOS 363/2-337/6 Muhridate
Mithridate 337/6-302/l - - - - - - - - - -
Repetons que tout cela reste tres hypothetique mais que l'avantage de cette solution apparemment cornpliquee est de tenir compte des differents elements du puzzle tels qu'ils nous ont ete conserves. Diodore dispose manifesternent de deux sources distinctes, d'une part les elements d'une ou plusieurs histoires generales et d'autre part une chronique officielle de la dynastic cappadocienne. 11 a rnanifestement quelque mal it combiner I'ensemble des donnees; it sa decharge, l'abondance des homonymes (quelles que soient les solutions retenues) et la difficulte de maniement des chroniques ou toute erreur ou mauvais calcul se repercute, voire se multiplie lorsque lion remonte dans le temps.
147
Supra p. 100.
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I) II reste un dernier document a confronter au reste du dossier; Justin 14R resume l'histoire d'Heraclee pontique. A partir de 365 il nous montre le "senat" faire appel a Timothee, a Epaminondas, rnais en vain 149 ; les aristocrates s'adressent alors a Clearchos pour mater leurs opposants. Ce dernier s'etait mis au service des Perses apres avoir ete expulse de sa cite ; il feint de s'entendre avee Mithridate, que Justin decrit comme l'ennemi principal de la cite mais en fait il trompe tout le monde puisque dans un premier temps il capture Mithridate, qu'il libere contre une forte rancon ; il s'installe ensuite au pouvoir a Heraclee et maltraite les aristocrates. Qui est le Perse ici mentionne? La reponse est evidemment lice a la solution proposee pour Diodore 15.90.3. Pour nous il ne peut s'agir que du Mithridate issu de la branche de Kios (voir le stemma ci-dessus), on ne voit pas en effet a quel titre Mithridate de Cappadoce pourrait entretenir des rapports mauvais - mais constants - avec Heraclee ponti que. m) Pour en terminer avec Mithridate, le fils d'Ariobarzane satrape de Phrygie, il faut rappeler qu'il poursuit une carriere de "traitre" deja fort bien entamee. II se revolte contre le grand Roi, de facon fictive selon nos sources 150, pille les villages, s'empare du montant du tribut, abat les forteresses et ayant ainsi manifcste la sincerite de sa rebellion, il propose une alliance a Datames. Cc dernier tombe dans un guet-apens et meurt de la main de Mithridate. Le seul renseignement posterieur (?) que nous possedions est fourni par Polyen ou nous Ie voyons fuir devant des poursuivants a travers la Paphlagonie 151. Cet episode appelle quelques rernarques : le lieu du soulevement se situe obligatoirement dans la partie orientale de la satrapie de Daskyleion, au voisinage des territoires controles par Datarnes ; s'il s'agissait de la basileia de Kios (en poussant a son terme l'hypothese de M. N. Weiskopf) nous serions en presence d'une nouvelle difficulte puisque ces evenements se placent en 359/ 358 selon toute probabilite et qu'il y aurait la contradiction avec Diodore 16.90.2. Que retenir de tout ce qui precede? Ariobarzane est le frere cadet ou plutot Ie fils aine de Pharnabaze auquel il succede, II est deja en "rebellion" depuis quelques annees contre Ie pouvoir central lorsqu'il s'cmpare de la principaute de Kios, a une date indeterrninee mais qui ne peut s'inscrire qu'entre 364 et 363. II n'y a pas identite entre Ariobarzane de 15.90.3, mort tres probablement des 363/362, cf. i), done avant la date que Diodore assigne a la grande revolte des satrapcs, et son homonyme de 16.90.2 qui "regne" dans la basileia jusqu'en 337/336 152. II Y a done bien deux Ariobarzane (au moins ...), mais aussi deux Mithridate (sans cornpter cclui de Cappadoce). Ces homonymies expliquent pourquoi cet ccheveau d'informations est aussi difficile a rnanier, comme l'est plus generalement tout ce qui concerne cet episode.
14X 149
ISO
Justin 16.4. Sur la crcdibihtc de ce "raccourci", infra p 300. Cornelius Nepos, Dat., 10-11 , Polyen 7 29 I Pour Weiskopf 1982. 51 il s'ugit du fils d' Anobarzane, Ie
satrape. lSI 152
Polyen 7.29 2 A moms d'admcttrc cornme Ie fait Beloch 1923 (supra p 97) qu'il Y a eu confusion chez Diodorc
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Artabaze succede a Ariobarzane a une date inconnue, probablement au plus tard en 363/362 153, et il est contraint de s'enfuir a la cour de Macedoine en 352. L'etendue de son ressort est assez difficile a preciser, en particulier pour ce qui concerne sa partie orientale. Des son retour, il peut compter sur les res sources de la Paphlagonie et il semble avoir retabli assez rapidement son autorite sur la Bithynie 154, en revanche une partie des cites grecques de la cote paraissent avoir echappe au controle, Il est remplace par Arsites, sans qu'on sache si cette succession a ete directe ou non puisqu'on n'a de trace de ce dernier que vers 340, lorsqu'il envoie de I'aide aux Perinthiens contre Philippe 155. Pausanias lui donne Ie titre de 0<X1panTje; 1ile; EqJ' 'EAATj0nov1Cp 0 Trcuber 1887, 102 ; Metzger et al. 1979, 34 sq dou Savalli 1988 : "Periodc dindepcndancc lycienne aussi bien d' Athencs que de la Persc - de 440 a 380 c.". Bernard 1964, 195-212 sp. 209 rapproche une jarnbicre qui apparait deux fois sur le sarcophage de Payawa avec une stele grcco-pcrsc de la region de Daskyleion. Cela denote une influence certainc sur lcs rnrcurs et lcs usages. Lcs Perses etaienr assez "Habiles pour accorder une large autonomic aux hobereaux indigenes". Bernard cite alors Ie Pan., 161 dIsocratc dont il souligne le caracterc exagere Ice ncst pas unc cxagerntion mais unc conrrcvcritc] puisquc "Certaines cites durent recevoir ccpendant des gouvcrneurs pcrses qui paraisscnt avoir fait souchc dans leur fief, sassimilant au milieu indigene et scmancipant de lautorite centrale". 241 Isocrate, Paneg., 161 (vcrs 380). 242 TL, 44 b 26, khssadrapahi trmmili, "satrapc de Lycie", malheurcusement lc contexte n'est pas intelligible ct on ne sait s'il s'agit de Tissapherne [solution la plus probable] ou, 11 la rigueur, d'un des dynastes de Xanthos ; 11 titre de comparaison, cf. Pixodaros Tniimisii khssathrapawata dans la trilinguc de Xanthos ; ef. Childs 1981. 67 n. 72. 239
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Tissapherne (mais rappclons encore que la documentation manque pour les epoques anterieures) I'''interventionnisme perse" est manifeste 243, non seulement - ce seraitIa un fait relativement banal - dans Ie domaine de la politique mais aussi dans un contexte religieux qui nous fait penctrer plus au crcur de la realite lycienne. II ne s'agit pas, apparernment, d'imposer des themes perses. Ces derniers existent dans les representations figurees qui sont un autre bon ternoin des comportements 244. Le satrape Tissapherne parait plutot avoir joue Ie role de catalyseur de I'infiuence carienne 245. Le fonetionnement de I'administration locale et regionale ne peut etre apercu que dans ses grandes !ignes dans la mesure ou le dialecte lycien est encore tres incompletement decrypte. Pendant la majeure partie du ye s., la Lycie parait etre placee sous l'autorite d'un seul "hyparque" (en I'occurrence Kuprlli et ses successeurs irnmediats), qui exerce son autorite it partir de sa capitale, Xanthos, et dont il delegue une part aux cadets et aux fils du Kals?[ika genos, sous forme de commandements et de morceaux de sa basileia, dans Ie bassin de Xanthos et meme au dela 246. Y a-t-il des le yc s. deux regions qui ne nous sont sensibles alors que par l'existence de deux systernes ponderaux distincts 247 et qui sont concretisees au lye S. par I'existence de deux archontes dans la Trilingue de Xanthos 245'1 Le problerne reste insoluble pour l'instant et la situation ne parait pas si simple car il y a bien d'autres dynastes qui tiennent des vilies, voire des regions, sans qu'on puisse etablir une hierarchie, si elle existe. A ceux la s'ajoutent des personnages de toutes origines (Perses, Grecs, etc.) qui recoivent des commandements mais aussi des apanages qui peuvent devenir hereditaires, A partir de la fin du vc s., apparait la formule khctawata 249 accompagnee du nom du dynaste. Celle-ci permet la datation et indique aussi a quelle autorite est soumise la ville. A noter que cela nc designe pas forccment un eommandement subalterne puisqu'clle est aussi associee au nom d'Autophradates 250. Ce dernier parait avoir etabli des hyparques qui gouvernent la part occidentale de la Lycie en son nom (Artembares it Telmessos et dans la haute vallee du Xanthe, Payawa dans la partie basse et it Xanthos-ville). 243 Cf. lc "Pilier inscrit", Ie monnayage ; sur l'importance de la presence perse des 480. Bryce 1990.531 ; Zahlc 1991 ct infra p. 310 et notes. 2+4 Cf. par cxernplc la scene d'audience du sarcophagc de Payawa it Xanthos, mise en serie par Borchhardt 1980, 7-12 (et lcs reserves de Akurgal 1980, 13 sq., a propos de la face est du Monument des Harpyes) ; Jacobs 1987,71-73; Briant 1996, 520-521. Un autre debar est ne autour des monnaics it tete "satrapale", Pour Cahn 1975, 84-91, la tiarc est un attribut satrapal, il identific de ce fait les "portraits" comme ccux des satrapes cl non des princes locaux, La position de Zahle 1976 est au contraire dc postuler qu'il s'agit lit des portraits idcalises des dynastcs locaux. Le critcre du pouvoir sarrapal ctant Ie diademe. Zahle 1982, 103. Sur cc debar, cf. encore Harrison 1982a, 83 sq.; Petit 1988,320-322; Moysey 1989, 134-136. 245 Cf. l'introduction supposee du cultc du Basileus Kaunios, ainsi Laroche 1980, 6 (rnais d. supra p. 68). 246 Unc indication est fournie en ce sens par la 1.8 de l'inscription grecque du Pilier inscrit, OU Khcrci (Gergis pour Bousquet 1975 ; 1(92) "donne it scs prochcs part de son dornaine royal" (trad. Bousquet p. 139). Nous prefererions traduire basileia par un terme plus vague (ef. supra p. 99 sq.). 247 11 sc peut ccpendant qu'il s'agissc lit d'un "accident historiquc", cr. infra p. 307. 24~ Cr. les conclusions de Borchhardt 1978, 183-191 et infra p. 405. 249 Hcubeck 1979. 25() Selon Childs 1981, 76, la Lycie serait un moment passcc sous Ic controle de Strouthas, satrape d'lonic, Cela parait logiquc, si l'on adrnet une reconstitution du premier nome hcrodotccn it son profit. Mais rien ne permet de trancher en ce sens. II n'y a it ce jour aucune mention de Strouthas en Lyeie (pas plus qu'en Carie) alors que Ics temoignages concernant Autophradates existent meme s'ils sont indatablcs. Pour Childs 1c sarcophage de Payawa sur lcqucl figure le nom d'Autophradatcs (TL, 40) doit etre date de 370-360 sur des criteres stylistiques (Bryce 1986, 47 propose pour sa part 370-350). Manifestcmcnt Childs est tcntc de situcr l'intcrvention d'Autophradates dans Ie cadre de la rcvolte des satrapes.
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Pour essayer d'aller plus au fond des choses, il faut comparer deux points de vue qui s'opposent ou, en tout cas, presentent de fortes differences. Selon O. Morkholm et 1. Zahle 251 on ne peut conclure du rapprochement sur une monnaie d'un nom de dynaste de celui d'une cite que cette derniere est sous le controle direct du premier. Ils pen sent plutot ii une sorte de feodalisme ou de grands proprietaires fonciers et chefs de guerre, organises en clans, possedent vraisemblablement des domaines dans plusieurs parties de la Lycie et peuvent soit frapper leurs monnaies dans des emissions privces, soit plutot emettre un monnayage dans la cite voisine avec laquelle ils ant des liens economiques. T. R. Bryce 252 presente une autre vision des choses . il y aurait des dynastes lyciens et un tissu administratif plus integre, ce qui suppose un controle plus avere de I'autorite centrale. Pour lui en definitive la Lycie se presente sous la forme d'un microcosme entretenant le me me type de rapport avec le satrape que ce dernier avec le pouvoir central. II en resulte un systerne hierarchise dans lequel Xanthos - son dynaste - a un role d'interrnediaire entre Ie satrape et des dynastes locaux qui ont avec lui des liens familiaux [et/ou] des relations de dependance attestes entre autres par Ie monnayage. Je pencherais pour ma part en ce sens en soulignant Ie parallele tout a fait eclairant a operer avec Zenis et Mania, dynastes du second niveau 253 de la satrapie de DaskyJeion. Le premier debute a Dardanos mais son autorite s'etend a toute la Troade dont il est nomme hyparque. Sa femme Mania lui succede et sou met ii son pouvoir - done celui du satrape, done celui du Roi - plusieurs villes. Leur fille epouse Midias qui, lui, tient personnellement Skepsis d'oii il est originaire. La famille de Kuprlli et de Gergis peut leur etre legitimement comparee, le fait exceptionnel en Lycie restant I'extraordinaire abondance de monnayages ernis aux YC_Iye S. Ce phenomene cessera brutalement avec l'arrivee des Hekatomnides. En bref, jusqu'a sa saisie par ces derniers, l'impression que donne la Lycie est celie d'une certaine flexibilite selon que Ie controle du pouvoir central est plus au mains direct sur la region. Tout parait reposer sur une bonne dose d'ambiguite, qui n'est pas levee tant que les apparences sont sauves... et que Ie pharos rentre et il est interessant de souligner que, loin d'etre un cas particulier, la Lycie devrait etre prise comme l'un des exemples du mode de fonctionnement de l'Empire perse. Apres l'''intermede'' represente par Perikles au moment de la revoltc des satrapes, la Lycie est prise en main par les Hekatomnides et n'apparait plus que com me une entire complementaire de la Carie 254. Elle est en effet administree par Kondalos 255, un hyparque de Mausole. Dans la triJingue de Xanthos, les versions lycienne et grecque designent Pixodaros eomme satrape de Lycie, alors que le tcxtc ararneen le quaJifie de satrape de Carie et Lycie. Nous avons note plus haut qu'il s'agissait sans doute Iii de la version de l'administration impcriale. En outre, l'un des intcrcts de ce document est de decrire les principaux rouages du mode de gouvernement de la region: deux archontes, etablis probablement sur chacun des
Morkholm & Zahle 1972, 112. Bryce 1983,41. m Infra p. 173. 254 Sur ces evenernents, cf. infra p. 356. m Ps.-Arist., Fe., 2.1348 a (13 a). 251 252
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deux secteurs qui cornposent la Lycie, l'un autour de Xanthos, l'autre de Limyra 256 (on pense tout naturellement aux hyparques dont il a ete question plus haut) ; un epimelete de Xanthos, pour lequel on ne saurait preciser s'il s'agit d'un administrateur civil - c'est ce a quai fait penser a priori ce titre - au d'un gouverneur en charge de la garnison 257.
4. LA SATRAPTE DE MYSIE 258 Son existence est liee a celui qui a peut-etre ete son unique titulaire : Orontes 259. Personnage singulier que cct Orontes, d'origine bactrienne comme nous l'apprend la "Chronique de Pergame" 260, mais membre de la haute noblesse perse puisque selon Strabon 261 le dernier dynaste d'Armenie a l'epoque d'Antiochos TTl s'appelait Orontes et que ce dernier etait descendant d'Hydarnes, l'un des "Sept". Cela explique qu'il ait ete choisi comme gendre par Artaxerxes Mncmon et qu'il soit Ie chef naturel des revoltes en 361. Cette origine et la longevite de fa dynastie sont en quelque sorte soulignees par les grandes inscriptions royales de Cornmagene ou Aroandes-Orontes est salue comme l'ancetre de la farnille regnante locale 262. D'abord satrape d'Armenie 263, il est designe pour commander les forces royales a Chypre contre Evagoras conjointement avec Tiribaze, satrape de Lydie. Tl accuse ce dernier aupres du Roi et capte ainsi un moment Ie commandement unique de l'operation. Tiribaze est rappele et juge mais il reussit a se disculper au cours du proces, Orontes est alors disgracie et probablement prive de sa satrapie. II reapparait quelque quinze ans plus tard dans Ie recit de Diodore comme satrape de Mysie, mais rien ne pennet de preciser la date de sa nomination. Un vif deb at s'est etabli entre les erudits rnodernes, bon nombre d'entre eux doutant de I'existence d'une satrapie qui devait forcernent etre retranchee de la zone de commandement d' Autophradates, jusque la fidele au Roi. Des solutions contradictoires ont ete retenues et M. J. Osborne donne un bon etat de la question. On a suppose une erreur de Diodore ou de ses copistes : pour les uns, la confusion est d'ordre chronologique, Orontes aurait recu la satrapie de Mysie apres la revolte 264 ; pour d'autres
256 Telle est la conclusion scduisante de Borchhardt 1978, 183-191 (cf. Dupont-Sommer 1979, 176) qui met en correlation la trilingue dc Xanthos et sa decouverte a Lirnvra d'une tombe-tumulus amenagcc pour un Carien (infra p. 4(5). 257 Metzger et al. 1979,37. 2SS L'article cssentiel est celui de Osborne 1975,291-309; ef. Osborne 1971,297-321; 1973,515-551 ; 198152-54; 1982,61-80 (avec reeuei1 des testimonia); 1983. 2") Sur Ie nom, ef. Grenet 1983, 373-4. 260 Texte infra p. 350 n. 363. II est Ie fils d'Artasouras. 261 Str. 11.14.15. 262 Aroandes fils d'Artasouras ct gendre de Mnemon qui figure dans Ics inscriptions de Commagcne nc peut qu'etre identique avec Orontes ; ef. Reinach 1890, 364-367. 263 L'etait-il deja au moment de l'anabase de Cyrus ou bien rccoit-il ee gouvcrnerr.cnt en recompense de son courage it Cunaxa, lcs textes ne permettent pas de trancher (Xen., An., 3.5.17, ineiterait a peneher pour la premiere solution) ; ef. Osborne 1973, 518. Trogue-Pornpee lui donne cc titre au moment dc la revolte des satrapes (Prol., ]0), d'ou sans doute la position de Hornblower 1982, 177 dont l'analyse des evenements de 362/1 est par ailleurs tres "classique" mais qui propose l'idee qu'en realite Orontes n'a jamais etc dechargc de la satrapie d'Arrnenic, cf. la vive reaction de Osborne 1982, 67 sq. 264 Nous verrons infra que c'cst mettrc Ie texte de Diodore en contradiction avec Iui-memc ct qu'il y a de serieuses objections it unc tclle hypothese.
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I'erreur porterait sur Ie nom 265 de la satrapie ; pour d'autres enfin, sur le titre, Orontes ne serait en fait qu'un hyparque 266 place apres 380, supreme humiliation, sous les ordres de son ennemi jure, Tiribaze. Une fois encore, il n'y a pas lieu de corriger violemment un texte ancien. La Mysie est une vaste region qui s'etend de la cote et du mont Ida a l'ouest jusqu'au mont Dindymos a l'est, de I'Hermos au sud jusqu'a la haute et moyenne vallee du Makestos et de ses affluents au nord 267. Ce serait une serieuse erreur de perspective que de reduire ce territoire a un role de zone refuge, en justifiant cette assertion par Ie relief tres accidente de sa partie interieure articulo sur l'epine dorsale que constitue le Temnos et culminant dans l'Olympe de Mysie. 11 est exact que cette zone, riche en hommes solides montagnards et rudes combattants, a souvent cchappe au controle de l'administration achemenide. En revanche, les vallees peripheriques et la partie occidentale font clairement partie du dispositif militaire et economique perse 268. De plus, les circonstances paraissent favorables a la creation d'une telle entire autour de la Mysie pergamenienne. L'Ionie, lorsqu'elle forme un gouvernement separe, trouve naturellement son centre d'equilibre a Magnesie du Meandre, sa "capitale". Une partition de la region en deux entites (Lydie, lonie) ne se justifiant plus apres la creation de la satrapie de Carie, Magnesie se trouve alors cornpletement excentree, Autre facteur, la possession de la zone qui borde le golfe d'Adramyttion entraine depuis des decennies la rivalite des satrapes de Sardes et de Daskyleion. II est tentant de penser que le pouvoir central a voulu mettre fin a cette situation en mettant en place un "ecran" entre les deux satrapies dont l'antagonisme etait inscrit dans la configuration geographique. Le succes de cette tentative ne fut pas a la hauteur des esperances. On peut merne penser que la participation d' Autophradates a la revolte a, au moins en partie, pour origine le depit de voir son loyalisme recompense par la diminution de sa sphere de commandement lors de la tentative de repression d'Ariobarzane. II n'est pas possible de definir avec exactitude la dimension spatiale du ressort dOrontes, en particulier en ce qui concerne ses limites orientales. Par contre, il est assure que son centre politique etait Pergame 269, sur laquelle Ie satrape parait avoir exerce une pression particuliere, incluant des deplacements de population 270, et elle a df etre son lieu de residence ordinaire. La comparaison s'impose done avec Halicarnasse. II est a noter que les Perses n'ont jamais choisi com me centre administratif principal une cite cotiere, ainsi Sardes, Daskyleion (retenues d'abord parce qu'elles sont d'anciennes "capitales" lydiennes), mais aussi Magnesie, Mylasa. Ce type de choix est logique si I'on tient compte de deux 265 Osborne 1975, 299-302, montrc l'impossibilite quil y a 11 faire d'Orontes Ie satrape de Daskyleion (Droysen 1877 ; Babelon 1893) ou de Sardes. 266 Cettc solution s'appuic sur l'idce de la "degradation" d'Oronres aprcs la rehabilitation de Tiribaze ; Osborne 1975, 296 sq. fait justcment un sort 11 cette opinion (suivi en cela par Hornblower 1982, 177 n. 58, qui pcnchc pour l'hypothese qu'Orontes n'ajamais cesse d'etre satrape d'Arrncnic). La sanction infligee il Orontes sert pourtant de point de depart it toute la thcoric de Weiskopf 1982 sur la revolte des satrapes (ef. aussi Weiskopf 1989, 69-91). Ce dernicr reprend sur ce point les theses de Judeich 1892,222 n. 2, suivi par exemple par Olmstead 1931, 415. 2(,7 Debord 1985,345-347,11 propos du corpus 7AM, Y, 1 de KeiJ & Herrmann 1981 et d'autres publications posterieures concernant la meme region. Weiskopf 1989 en sous-estime rnanifestemcntl'importance etla divcrsitc. 26R Cf. infra p. 238 sq. la description xenophontique de la region de Pcrgame. 269 Weiskopf 1982 dccrit justcmcnt Ia satrapie comrne larchetype du royaume de Pergamc. On notera que la synthcsc de Hansen 1947, si utile par ailleurs, esi trop concise sur les origines de cette principaute au IV'S. no GCIS, 264.
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elements d'importance inegale selon les epoques. L'Empire perse est un empire continental dont il ne faut jamais oublier que la perception de la geographie politique se fait de I'interieur, A eel a s'ajoute, plus tard, la volonte de ne pas etre I'otage de la pression maritime exercee par les Grecs. Le principal element d'appreciation du do maine d'Orontes est son monnayage 271. Nous touchons la un point qui est loin d'etre completernent elucide. H. A. Troxell 272 a precede a un examen minutieux des monnaies alleguees. Ses conclusions paraissent devoir emporter l'adhesion en l'etat de la documentation. Elle degage deux groupes de monnaies provenant d'ateliers distincts, en fonction des revers: -- Le premier venant d'Adramyttion, avec au revers un cheval aile (comme sur les monnaies de Lampsaque, cf. ci-dessous). 11 s'agit d'une serie de tetroboles (ou derni-sicles) d'argent de poids tres variable (2,20 a 3,13 g), a l'avers une Athena portant un casque attique 273 ; au revers un protome de cheval aile et la legendc OPONTA ; de deux series de bronzes de poids varies (0,60 a 1,82 g) avec le me me revers - legende OPONT ou OPONTA - rnais a l'avers soit Zeus laure, soit une tete satrapale 274. Ce Zeus laure trouve un parallele immediat dans Ie monnayage de bronze d'Adramyttion (Iegende ALlPAMY) 275. 11 convient done de retirer a Lampsaque lirnputation de l'ensemble de ces pieces contrairement a ce qu'ecrivait E. Babelon 276. -~ Le second est attribuable aKisthene, On a depuis longtemps identifie une monnaie de bronze avec al'avers une tete satrapale, sans legende ; au revers un cavalier perse au galop (comme sur les monnaies de Tissapherne, mais le rendu de la course du cheval est plus proche des dernieres series de Sardes) et la lcgende KIL8A 277. II n'est pas absolument assure que cette emission, qui parait etre une emission civique, doive etre donnee a Orontes. On peut cependant la rapprocher de deux autres series de bronzes avec a l'avers une tete satrapale, au revers un sanglier aile, accornpagne dans un cas de la legende OPONTA, dans ]'autre K ou KIL 278. Tres logiquement H. A. Troxell en conclut qu'il convient de donner la mernc origine aux tetroboles (ou demi-sicles : poids 2,41 g a 2,79 g) d'argent bien connus qui portent a l'avers un hoplite grec agenouille a gauche 279 ; au revers un sanglier aile a
Babclon 1893, LXXIII sq.; 1910, 107 sq.; Hornblower 1982,178 sq.; Kraay 1976,1'1. 54, 922, 925. Troxell 1981,27-37; ef. aussi Weiskopf 1982, 388-394. m Troxell 1981, 1'1. 4 n" 1 ; Traite, II, 1'1. 88.15 (PI. II, 10). 274 Troxell 1981. 1'1. 4 n" 2 ct 3; tmue. II, 1'1. 88.17 (PI. II, 11) et 14; SNG von Aulock 1822 (PI. II. 12). m Troxell 1981, 33 et 1'1. 4 A, apres Fritze 1910, 10-12. Cahn 1989, 99 n. 6, propose d'auribuer it Adramyttion une seric de monnaics de Tissaphcrnc, it cause de la presence d'une Athena avec ce meme casque attique. 27(, Babelon 1910, col. 107-110. 277 Traite, II, 1'1. 88.21 = Troxell 1981, 1'1. 4 n" 5 (PI. II, 9). m Troxell 1981, 3Dct 1'1. 4 n" 6, 7a. 7b; la derniere de ces monnaies etait ineditc. m Babelon 1893, LXXIV, lig. 34 ; traue. 11,1'1. 88.22 (PI. II, 8) ; Head, BMC Ionia 326, n° 17; Hirsch. 1'1. 77, 1465; Troxell 1981,1'1. 4,4; Cahn 1989,1'1. 1, 16. A propos dc la position du pcltastc, Babelon rappelle l'obscrvation de Waddington 1867, 19: "11 (Chabrias) avait appris it ses soldats lorsque I'ennemi allait charger, it meure un genou en terre et it tenir leurs lances en arret, en se eouvrant du bouclier appuye contre l'autre genou" (Diod. 15.32.5). Dans ce cas, il est probable que l'cmission monetaire a ete faite pour retribuer ceux-Ia memes qui sont illustrcs sur lcs monnaies, mais il faut aussi considerer qu'il s'agit de l'affirmation que c'cst grace aux peltastes grecs qu'Orontes est en situation de rernportcr la victoire. Faut-il y voir une reference direete it Chabrias it travers sa statue de l'agora d'Athenes? Telle est l'opinion de Burnett & Edmonson 1961, 89 sq. et n. 45, mais cf. contra 271
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droite avec la legende OPONTA. Generalement cette monnaie a etc attribuee a Clazornenes 280. II est en revanche tres peu probable qu'Orontes soit represente sur une celebre sene de monnaies d'or de Lampsaque 281 considerees comme I'une des "preuves" de son aspiration ala royaute 282. On ne doit done pas retenir l'argument de ressemblance entre cette monnaie et une hekte de Phocee 283 OU la seule lettre gravee (ou apparente) est un A avec laquelle il faut beaucoup jongler pour retrouver la legende [OPONT]A! Comme le note M. J. Osborne 284, I'existence d'une "cote mysienne" ne souleve aucune difficulte : elle s'inscrit dans une longue tradition. II cite en effet un passage de Diodore 285 relatif a l'expedition navale que Xerxes mene vers la Grece et oii figurent les cites de Lycie, Carie, Troade et Hellespont. Il convient d'ajouter de facon plus significative encore le Ps.-Skylax 98 : "A partir d'Antandros et du pays des Indei, Ie 'bas' formait autrefois la chora de Mysie sous ce nom jusqu'a Teuthrania, cest aujourd'hui la Lydie". La satrapie ainsi definie permet de comprendre pourquoi des affrontements se sont produits entre Orontes et Autophradates, l'un des episodes etant localise pres de Kyme avant 362/1 et non apres comme Ie supposerait la version traditionnelle de ces evenernents 286. Elle prend la suite de la satrapie d'Ionie et doit etre percue ainsi par les Grecs puisque Rhoisakes est qualifie un peu plus tard de satrape d'Ionie et Lydie, ce qui, malgre M. N. Weiskopf, ne saurait se concevoir si a un moment anterieur il n'y avait pas eu deux entites distinctes 287. La duree d'existence de ce gouvemement est difficile a preciser. Sa creation est posterieure au milieu des annees 360 288 et selon I'opinion traditionnelle elle disparait avec Orontes apres le milieu du lye s., mais peut -etre des 361 si l'on accepte le point de vue de M. Osborne 289. II n'est pas exclu cependant, si l'on retient plutot avec R. A. Moysey une date basse pour Ie decretIG, IF, 207, qu'un fils homonyme du premier satrape ait pu lui succeder-w. La satrapie n' existe plus en tout cas a l'epoque de Spithridates 291.
Westermark 1965,7-14 (non vidi) cite par Moysey 1989,124 sq. n. 49. Le fait que ee theme apparaisse sur d'autres monnayages, en partieulier sur cclui du Syenncsis a Tarse, ef. e.g. Weiser 1989, pl. XIX, 18 et 19, ne permet pas pour autant de conclure qu'il s'agit d'un theme banal et done sans signification particulierc, 280 Babelon 1910, col. 63. 281 Babelon 1893, LXXII; 1910, 109-1](); Baldwin 1924, pl. 2, 15-17; Gulbenkian 689 = PI. 11,15; Troxell 1981, pl. 4, B. Cettc derniere refuse l'attribution de ce monnayage a Orontes, suivie par Weiskopf 1982, 390-392; Moysey 1986,28; 1989, 122-123 (il penehe pour une emission eivique). Cf. infra p. 154; 345. 282 Supra p. 60. 2S3 Cctte hekte de Phocee est eonnue depuis fort longternps, d. Babelon 1910, 118 ct pl. 88, 24 ; Kraay & Hirmer, pl. 200 n" 718. Bodenstedt 1981, Ph. [0 I (Pl.T, 10) continue d'attribuer a Orontes eette monnaie de facture assez mediocre et mal centrce ; cette hypothese est a juste titre fortement remise en question (Troxell 1981 : Moysey 1989, etc.). Cf. supra p. 61 n. 238. 284 Osborne 1975, 306 sq. 285 Diod. 10.1.2. 286 Poly en 7.14.2; infra p. 344 et 352. 287 Dans le meme sen. que nous, Osborne 1981, 70 n. 239. 288 Osborne 1975, 308, d'apres Xen., Ages., 2.26 ; contra, Weiskopf 1982. 289 Osborne 1973, 547 sq. 290 Infra p. 352. 291 Infra p. 154
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SATRAPIE DE LYDIE
Cette derniere est, de facon tres curieuse, totalement absente de nos sources apres la premiere revolte des satrapes puisque c'est a Tithraustes (infra) qu'echoit la mission de s'opposer a Artabaze Iorsque ce dernier entre en rebellion. Nous n'avons quelque information, si l'on suit Diodore, qu'a partir de 350/49. A ce moment, Rhoisakes, qui participe avec le Roi a une expedition en Egypte, est donne comme titulaire d'une satrapie d'Ionie et de Lydie 292. Nous apprenons Ia qu'il appartenait a I'une des plus illustres families perses puisqu'il descendait de I'un des "Sept". En fait, il y a confusion chez Diodore entre deux expeditions egyptiennes d'Ochos, l'une en 35 1, I'autre en 344 293 . C'est seulernent en 344 que Rhoisakes est atteste comme satrape de Sardes, mais rien n'empeche qu'il l'ait ete des Ie milieu du lye S. 294. Present egalernent dans l'armee royale apres avoir change de camp, Mentor prend une part decisive a la victoire. Entre autre recompense il recoit Ie titre de satrape Tile; KaTCx T~V 'Ao iov napaAiae; en meme temps que celui d'corroxpuroip 0Tpa1T)Y6:; 295. Si l'on abaisse de sept ans la chronologie, Ie texte de Diodore devient coherent, en particulier, par reference a l'histoire de la capture d'Hermias d'Atarnee qui convient mieu en 342 qu'en 349/348 296 . Remarquons aussi que cette action cadre bien avec l'aire geographique qui lui a ete assignee 297. 11 est done tentant de penser qu'a ete reconstituee pour Mentor une fonction double, du type de celie qui avait ete confiee quelques annees plus tot a Strouthas 298. Comme eel a avait ete Ie cas de ce dernier, il s'agit peut-etre la d'une mission de courte duree ou bien Mentor est mort en cours de mandat puisqu'il disparait cornpletement de nos sources. A un moment qu'il est impossible de preciser (pour K. J. Beloch, vers 340), Spithridates devient satrape de Lydie et d'lonie 299. 11 est assez probable qu'il s'agit du fils et non du frere du precedent satrape, On comprendrait mal que Rhoisakes, destitue de son gouvernement ait pu jouer un role important a la bataille du Granique 300. Celui qui est designe la comme etant Ie frere de Spithridates pourrait eire le fils cadet du satrape homonyme de 344.
Diod. 16.47.2. Cf. par ex. Beloch 1923, 284-287 (d. 136) ; Lewis 1977, 23 n. 131, etc. 294 Cf. Hanfmann 1983, 256. 295 Diod. 16.52; des lc dcveloppcment rapportc it 350/49 (16.50.7), Mentor est qualific dc tv roi; mxpc.x8c.xA,c.xH10l; f.lEp£CH ,ii; ,Ao ir«; Tiy£f.l(~)V f.lEYlCHO;. Cette mention a manifestement gene heaucoup de modernes. Ni Mentor ni Memnon ne sont introduits dans Ies listes satrapales de l'Asie Mineure occidentale par Beloch 1923 ; Berve 1926,251 conclut que Memnon etait plutot un hyparque qu'un satrape, ce qui en contradiction avec le textc de Diodore mais surtout avee la fonction de commandant en chef qu'il exerce. De mernc Weiskopf 1982 denie toute signification concrete a ce passage de Diodore et qualifie Memnon de "lesser officer, local noble". 296 Infra p. 419. S'il est neccssairc de "descendre" de sept annees la chronologie absolue de Diodorc, il est en revanche possihle d'en conserver Ie deroulernent sans retouchc majeure. 297 A propos du merne episode Str. 13.1.57, indique que Memnon (et non Mentor) "servait" (uTCllpnwv) les Perses et qu'il etait stratege. Celte contamination est excusable si l'on songc qu'a quelques annees d'intervalle les deux freres ont cxercc des fonctions similaires. 298 Supra p. 129. 299 Arrien, An., 1.12.8; 16.3 (satrape de Lydie); Diod. 17.19.4; 20.2 (appele dans les deux passages Spithrobates, satrape d'Ionie). 300 Rhoisakes idcntifie la comme Ie frcre du satrape Spithridates atteint Ie cimier du casque d'Alcxandre avant d'ctrc tuc. 292 293
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En ce qui concerne le monnayage ernis par (ou au nom de) Spithridaies, il convient de suivre pour l'essentiel les conclusions de E. Babelon 301. S'il parait evident que les monnaies qui portent la legendc II1I ou ImePI doivent etre attribuees au satrape et non au subordonne de Pharnabaze 302, en revanche Ie lieu d'ernission fait probleme. On propose generalement Lampsaque et Kyrne 303 a cause de la presence au revers soit de Pegase (PI. II, 17-18) soit du protorne de cheval (PI. II, 16, 19-20), mais cette attribution a ete discutee principalement parce que Lampsaque se trouve hors du ressort satrapique de Spithridates 304. II faudrait done, comme Ie note Babelon, admettre que ce dernier exercait un commandement karanique, ce qui est vraisemblable etant donne son statut, mais dont nous navons par ailleurs aucune preuve: Arrien nindique pas qui commande en chef chez les Perses au Granique. Ce monnayage, relativement abondant, est bien connu et a ete souvent etudie, Observons qu'il utilise aussi bien I' argent que le bronze. Nous avons vu plus haut qu'il y avait deux types de revers, il a en revanche ete moins mis en valeur qu'il y avait deux types d' avers. Traite, II, n° 69 et 71 305 presentent un rendu assez particulier de la tiare, tres plissee et dont les paragnatides recouvrent largement les joues 306, alors que sur Traite, 11, n° 70 307 la tiare est beaucoup plus "classique" et les paragnatides libres. Ce qui suit est plus problematique dans la mesure ou Ie satrape n' est pas nornrne. Le tres celebre statere d' or de Lampsaque qui a servi pour une part de base aux theories de Babelon sur la revolte d'Orontes une fois "enleve" ace dernier 308, la reattribution a Spithridates parait possible 309 en particulier par comparaison avec lc second type davers decrit ci-dessus 310. II est aussi tout a fait legitime de penser a Spithridates pour des bronzes civiques de Kebren, Les avers se rapprochent des deux types precedernment evoques 311 et forment un me me ensemble, chronologiquement res serre, avec une monnaie au "satrape imberbe" que nous identifions a Alexandre (infra), presentant en particulier des revers caracteristiques, occupes enticrernent par un monogram me forme des lettres K et E. Quelles sont, pendant la campagne d'Alexandre, les fonctions de Mernnon? Jusqu'au Granique, il a un "commandernent" 312 et il obtient par exemple de Darius des troupes mercenaires pour tenter de s'emparer de Cyzique 313 pendant la campagne de Parrnenion, Babelon 1910, 125-128. Cf. les doutcs dc Cahn 1989, 101 pour des raisons stylistiques, ][)3 Recemment encore Cahn, lac. cit. \04 E.g. Six 1888, 114 n. 56 ; Droysen 1908, 100. Les revers d' Adramyttion sont quasi identiques it ceux de Lampsaque comme le fait observer Troxell it propos du monnayagc d'Orontcs (supra). Le rapprochement rcstc done tentant : comparcr 1c revers de II, 15 et ceux de II 17-18. S'i1 ny a pas identite de provenance, il y a au moins copie consciente. On pourrait done suggcrcr aussi bien 1'une que I'uutrc commc lieu demission, lOS PI. 89,1 ct 3 (PI. 11,18-19). 3D!, cr. la representation de Darius sur la rnosaique de Pompei. 107 PI. 89, 2 (PI. II, 17). 30R Troxell 1981,27,37 et supra p. 64. ]u'! Comme Ie pcnscni Cahn 1989, 101 et Weiser 1989, 295 sq. 310 Comparer PI. II, 15 et 17. Rien lit d'assurc, on pourrait penser aussi it Ariobarzane ou Artabaze, uniquement sur des critcrcs de vraisemb1ance dans la mesure ou aucun des deux satrapes n' a "signe" de monnaies. 111 Premiere version: Traite. 11, n° 68, pI. 88, 28 (pI. II, 14) ; n'' 2335, pl. 164, 25; deuxiernc version Traite, II, n° 2335, pl. 164,24; vente Pegan 23 fevrier 1991 n" 40, PI. II, 13). m Arrien, An., 1.12.9. II me parait Ires rcductcur de Ie considercr comme un simple chef de mercenaires, cf. McKoy 1989. m Diod. 17,7.2 (cf. infra p. 423), 301
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LES SATRAPIES DE SARDES ET D'IONIE ET LEUR POSTERITE
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mais au debut de l' anabase d' Alexandre il n'est qu'un ofticier parmi d'autres et son avis ne prevaut guere 314. 11 faut attendre le siege d'Halicarnasse pour qu'il receive un commandement de premiere importance 315 comparable a ceux de Tissapherne et de Cyrus le Jeune. A sa mort, Autophradates 316 et Pharnabaze 317 lui succedent a la tete de la flotte.
6. LA SATRAPIE DE HAUTE-PHRYGIE 318 Le nom de cette satrapie est rendu diversement chez les auteurs grecs, rnais la formulation la plus correcte seIon les concepts perses est aV0l8EV puy(a~' 'Hpo8oTO~ Cette assertion est cuneuse On n' a pas d' autre mention de cette localite On pourrait penscr a Blaunda, supra p 95 n. 102. 196 197
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- Un service signale : Phylakos de Samos participe efficacement a la bataille de Salamine et se voit attribuer un grand domaine en recompense 207. On pense encore a Lykon 208 qui recoit villes et terres pour prix de son abandon du camp de Pissouthnes, ou aux cas precitcs de Mentor et Memnon. - II convient de traiter a part la donation des revenus de Gryneion a Alcibiade par Pharnabaze 209 dont la mention parait resulter d'une erreur de Cornelius Nepos, ou d'une invention malveillante de sa source par reference a Thernistocle. Quelques autres cas sont mieux connus tels ceux des Gongylides ou des Dernaratides, ct ce n' est pas a un type de concession different qu' appartient la dorea de Thernistocle, Du point de vue du pouvoir central il n'y a qu'un seul mode de rapports possible: Ies cites sont sujettes tout comme l'cst la cham. On aurait done tort disoler ces dynastes grecs de leurs homologues, "autochtones" ou "perses", auxquels sont attribuees villes ou cites. Ces Grecs, du moins ceux qui sont installes anciennement comme c'est Ie cas des families mentionnees ci-dessus, se comportent exactement de la meme facon que Ies autres dynastes. Ils agissent scion leur prapre interet mais globalement sont fideles au Roi a qui ils doivent leur position. C' est par consequent etablir une distinction arbitraire que de les opposer aux nobles locaux ou iraniens 210 en une vision trap hellenocentriste, dont nous avons souligne au debut de ce chapitre les persistances jusqua aujourd'hui et qui aboutit a des lectures a contresens d'un certain nombre de textes comme on peut le demontrer pour Ies Demaratides et les Gongylides, Exile de Sparte, Ie rai Demarate se refugie aupres du Grand Roi en 491. 11 recoit de ce dernier les villes de Teuthrania et d'Halisarna 211 et fonde une dynastie qui dure jusqu' a la fin de l' Empire perse. II est Iui-merne encore vivant lorsque Themistocle passe aux Perses 212. Nous retrouvons la trace de ses descendants a I'epoque de la rebellion de Cyrus, en effet Proklcs, maitre de Teuthrania, I'accornpagne dans son anabase 213. On peut penser quil fait ensuite rapidement sa soumission a Artaxerxes puisqu'il est encore en possession de cette cite et d'Halisarna en 399 au moment du retour de Xenophon avec lc reste des DixMille, et que cela n' a pu se faire qu' avec l' assentiment du nouveau maitre de l' Asie Mineure occidentale, Tissapherne. Le destin des Gongylides est parallele a celui des Dernaratides, Gongylos d'Eretrie est l'homme de confiance de Pausanias a Byzance 214. S'etant refugie aupres du Roi, il recoit Gambrcion, Palaigambreion, Myrina, Gryneion 2lS. Sa femme (ou plus exactement sa veuve) parait dominer Pergame 216 alors que ses deux fils (Gongylos II et
Hdt 8 85 3 , la locahsauon n' est pas precrsee, Ctesras, 688, F 15 53 (52) 209 Cornelius Nepos, Ale, 9 2 210 Cf Ie commcntairc de Robert & Robert 1983. 116 et n 154 (il propos de l'cpisode dAsidates dans l'Anabase) . "Lcs trOIS elements de la populanon apparaisscnt done dans lc tableau dynastes grces dans les villcs, seigneurs perses dans les domaines fortifies et garrusons iraruennes. Les maitres grecs et perses se prllent Ies uns les autres et lamvee des Dix-Mille fourrut un renfort aux premiers". cf Robert 1973.483 n 20 Lcs eomportements sont assurernent moms mamcheens. 211 Hdt 6.70. 212 Plut., Them.. 29.8. m Xen., An., 2.1.3. 214 The. 1.1286; Dlod. 11.44.3 215 Xen., Hell, 3 1 6 216 Xcn . An.. 7 8 8 207
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Gorgion) se sont partages l'heritage paternel i'". C'cst probablement a tort que les editeurs des ATL 218 s'interrogent sur la continuite de la possession de Myrina et de Gryneion par Gongylos en observant que les deux cites ont paye le phoros 3 la Ligue de Delos, car on se demandera si 3 certains moments il n'est pas envisageable qu'un double pharos ait pu etre acquitte 3 Athenes et aux Perses 219. Nous retrouverons bientot des manifestations de cette attitude arnbigue. II est tres probable que les deux families ont entretenu des liens etroits qui se traduisent par des unions matrimoniales: une inscription de Delos 220 concerne un Dernarate, fils de Gorgion et ami de Lysimaque. Merne chose peut-etre avec Thcrnistocle, dont Hellas, femme de Gongylos, pourrait etre la fille 221. Leurs domaines sont tres irnbriques 222. Xenophon jette un eclairage interessant, mais qui parait avoir ete sou vent interprete fautivement, sur la situation de ces families au tournant du yc et du lye s. Ecartons d' ernblee, comme l' ont fait nombre de nos devanciers 223, l'hypothese ruineuse d' E. Babelon 224 selon laqueJle Pergame aurait ete tenue par les Dernaratides puisquil res sort de An., 7.8.8 que cette cite est dominee par Hellas, femme de Gongylos Ier et mere de Gongylos II. Elle reside 13 et c'est elle qui suggere 3 Xenophon I'action contre Asidates, Son attitude est donc resolument favorable aux entreprises des Grecs. Un peu plus tard, elle dcconseille 3 ses fils de se meler aux operations et cela n' est logique 225 que si ces derniers sont tcntes de se ranger du cote d' Asidates, bien tardivement d' ailleurs, en fait lorsque l' affaire parait tourner au desavantage de Xenophon 226. La conquete de la region par Thibron fournit I'occasion 3 Xenophon de dresser un tableau des attitudes des differentes comrnunautes de la region: "II se rendit maitre des cites de Pergame, celle-ci de son plein gre, et de Teuthrania et d' Halisarna que tenaient Eurysthenes et Prokles ... se soumirent aussi Gorgion et Gongylos ... maitres de Gambrion et de Palaigambrion pour l'un, de Myrina et Gryneion pour I'autre. II y cut aussi celles qui etaient sans defense et que Thibron prit de force. Quant a Larisa dite l'cgyptienne ... il en entreprit le siege." 227. II faut lire le texte comme progressant crescendo en quatre paliers et I' ordre retenu n' est evidernment pas du tout indifferent: I) Pergame accueille Thibron de son plein gre (et cela est coherent avec I' attitude anterieure d'Hellas). Xcn .. Hell. foe ell m Menu et al. 1950. 200~202 219 Dcscat 1991, 37 a partir d'Isocratc, Pancg .120. 220 Syll 3, 381 ,cr Durrbach, Choix, 21 ~23 221 Scion Babclon 1910,92; aprcs SIX 1890. 192 n 27 Cf. carte 5 p 237 223 Par cxcrnplc Hansen J 947.9 . deja Fntze 1906.48 n. 1, lannbuan aux GongylIdes Babelon 1910.80; LeWIS 1977.54. accepte trap rapidement les points de vue de Babelon (histoire, monnaic) 22' Xen ,An.• 7.8 8 et 8.17. 226 Infra p. 239 227 Xen , Hell. 3 1 6-7: Kcd nOAEl; n,;py<xJ.l0V J.lEV £KOU('j(XV npoC5';A<X~£ Kril T£u8prlvlriv Kril '!\A1C5riPVriV, (bv E{lp11C58';vT]; ~E Kril npoKA.ii; ~PXov . np0C5ExrJ1PTlC5riV OE rrlHip wl Topvitov wl fO/yUAO; .... EXOV1E; 0 J.lEV fU,U~PLOV K<Xl n<x/,(l[yriJ.l~plOV, 6 OE vluptvov Kril Fpuvr iov ...'Hv OE uC58£v£1; oiior«; Kril KC"!x KPUW; 6 (·)I~pwv EAu,u~-IriV£ ,\uprauv IE J.l~V ~~v Aiyun~I(j.v WAOlllllcVTlV EnOAlOpKEl 217
ex;
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2) Les possessions des Gongylides et des Dernaratides se soumettent mais apparemment apres qu'une negociation ait eu lieu (a noter que Ia construction de la phrase isole Ies Gongylides et Pergame, au point damener E. Babelon a I'erreur signalee plus haut). 3) Les cites mal defendues sont ernportees dassaut. 4) Larisa I'egyptienne 22S, bien fortifiee et tenue par une garnison, resiste aux tentatives de Thibron, ce qui provoque Ie rappel de ce dernier, En fait la seule cite a avoir opte d' enthousiasrne pour Thibron est Pergame 229. Nous sommes mal renseignes sur la situation posterieure. Les Perses retablissent leurs positions anciennes et le plus plausible est que les deux dynasties ont pu a nouveau restaurer, au prix d'un de ces revirernents dont ellcs etaient farnilieres, leur pouvoir ancestral. Les deux families paraissent en effet avoir survecu ala tourmente comme Ie montre l'inscription de Delos precitee et rnieux encore un passage de Sextus Empiricus 230 qui nous informe que Ie tyran d' Atarnee, Herrnias, fait epouser rune de ses parentes (et fille d' Aristote) par un certain Prokles. Ce type d'union ne s'expliquc guere que dans Ie cadre d'une politique dalliances entre families de dynastes voisins. Les monnayages mcriteraient un complet reexarnen. E. Babelon 231 avait cru pouvoir isoler un groupe de monnaies d'Eurysthenes a Pergame. C'est en fait un lot disparate qui comprenait une hekte delectrum et des diobolcs d'argent. Ecartons demblee I' hetke (n° 43) qu'jl convient de redonner a Mitylene et dont Ie satrape de I'avers est probablement Pharnabaze 232. Restent les monnaies d' argent (1,5 g en moyenne) qui pres en tent a I' avers un Apollon laurc a droite, au revers une tete de "satrape barbu" a droite dans un carre creux avec legendc Illil'F ou Ilfil'TA 233. II ne peut s'agir d'Eurysthenes. La plupart des numismates situent ces monnaies dans la deuxierne moitic du ve s. (et plutot vers sa fin) 234. S'rl convient de rcconnaitre 121 un "portrait", sagit-il du satrape (Pharnabaze?) ou du dynaste local, en I' occurrence Gongylos Ier? Sur un bel cxcmplairc, public dans un article posthume de O. Morkholrn, le "Perse" est representc avec la tiare et Ie diaderne 235 ce qui inviterait a choisir plutot la premiere solution. Restcnt les autrcs monnaies des Gongylides (Gorgion et Gongylos II) 236 qui font problerne. En ce qui concerne les Dernaratides, E. Babelon identifie un groupe de monnaies de Proklcs [er a Teuthrania mais cette attribution est tres discutable 237. II sagit presque a coup sur de monnaies civiques avec la legende TEY au revers associee a un "satrape imberbe" (peut-etre Alexandre) n~. Infra p 194 Tuplin 1993, 49, souticnt que les dynastcs grees apportcnt une "voluntary adhesion" 3 Thrbron On arrnerart savorr ee qUI se passe 3 Pergame qUI sera plus tard la "capitale" dOrontes. DO Sextus Empmcus I 25R 231 Trait,', II, col R5 sq Cf Bodenstedt 1976, pI. I n" 9 et supra p 64 (PI. II, 3) m Bodenstcdt 1976, pI. I n° 11 ct 12, SNC VOI1 Aulock 1347 (PI. II, 4) ; Babclon, pi 88.8 (PI. II, 6) 214 SIX I R90. 194: 1894, 31 R, les place 3 la fin du v's (eomme lcs monnaics de Teuthrama scion Babelon) , Wroth IRn, XXVIII-XXIX, pcnchc pour la pen ode 420AOO , von Fritze 1906,47 sq., pour Ie nuheu du Vv s. Sur ccs monnares ef. aussi Harnson 19R2 a, 70 sq et note 54 Morkholm 19R4, I RI sq et pI. 27 n° I (PI. II,S). 236 Babelon 1910, 93-98 , Head 1910, 528 Cf par excmplc The Nunusmatic Aucuon Ltd, Ancient COll1S, Dec. I 19R5, n" 120, avo Apollon laurc 3 droitc , rev protome de taureau 3 drone, legendc fOPf[I I. PI. II, 7 = Traue. II, pI 88 9: cf. col 93-96, attnbue 13 3 Garnbrcron Babelon 1910, R3-86 ns Infra p 48 I 229
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Revenons pour conclure au cas de Thernistocle 239: les modernes ont ernis des hypotheses contradictoires sur ce que I' Athenien recoit effectivement du Roi. Rappelons qu'il sagit de Magnesie au "revenu" de cinquante talents 240, Myonte et Lampsaque 241 auxquelles s' ajoutent probablement Palaiskepsis et Perkote 242. Observons que les domaines concedes ne sont pas contigus et eela ne se conceit que sil s'agit de I'octroi des revenus et non d'un don de territoire. Thernistocle reside a Magnesie (du Meandre) et son comportement ne differe en rien de celui de ses homologues iraniens 243. Cela vaut aussi bien en matiere de religion 244 que pour l'emission de monnaies 245, encore qu'en ce domaine on doive plutot le percevoir comme un precurseur, Le Roi ordonne a Thernistocle de porter un costume perse (comme cela avait ete demande aussi a Demarate) et pour tinancer cette depense - et dans une certaine mesure cette concession - il recoit Gambreion 246. En fait, Themistocle est l'....,
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Carte 8 : La Phrygie hellespontiquc et la Mysic. N
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Sangarios (et non la Bithynie) 131 puis fait route vers I'Interieur, penetre en Phrygie mais ne peut sernparer de Miletouteichos 132 et par lcs rives du lac Daskylitis gagne Ie territoire de Daskyleion 133. Xenophon nous fournit alors une description complaisante de la richesse des domaines de Pharnabaze pilles par les Spartiates. Le partage du butin qui suit la prise du camp du satrape entraine la defection de Spithridates. Cet episode indique bien que les rapports n'etaient pas faciles entre Grecs et Perses rneme lorsqu'ils etaient allies. Par I'entremise d'Apollophanes de Cyzique - les notables (commercants ou proprietaires fonciers?) de cette region ont tout interet au retour de la paix entre Sparte et Ie satrape de Daskyleion ~ Agesilas et Pharnabaze pas sent une convention ala suite de laquelle les Lacedemoniens, apres avoir expedie leur butin par Cyzique se retirent du pays de Pharnabaze. Ce dernier est selon Xenophon 134 en situation d'expectative : il se "rebellera" si le Roi envoie en Asie Mineure un autre strategos et place une fois encore Pharnabaze sous ses ordres. Agesilas s'installe dans la plaine de Thebe et plus precisement autour du sanctuaire d'Arternis Astyrene. II se trouve sur Ie territoire de la satrapie de Lydie (nous avons la la preuve que la region avait de nouveau echappe a Pharnabaze 135) et prepare l'expedition du printemps suivant. Xenophon lui attribue comme objectif d'aller "le plus a n(Xp(Xe(xA(xHi8to~,
Dugas 1910,86, cf. Remach 1888,93 Hell Ox, 17.3 Milctoutcichos = Mrlctoupohs qui figure dans la hste du tnbut atuque 1G, 13, 100 (dale probable 410/4(9) ; cf. en derruer heu, Schwertheim 1983, specialement 105 ; Robert 1980, 89 n. 572. On IUl aunbue un monnayage des Ie debut du IVe S. BMC Mysia. P 91 n" 3 sq , .'INC; von Aulock 7412 , Cop 246 sq , Tubingen 2315-2319 Bien que les sites de Mrletouteichos et de Daskyleion (nole suivantc) scient dcsorrnais connus avec quelque secunte, 11 subsistc dans la marche d'Agcsilas un certam nombre dmcerutudes Le Sparuate sun le Rhyndakos pour aueindrc le lac Daskylius. Pour rester le plus pres possible du tcxtc de l'Anonymc d'Oxyrrhynchos 11 faut penser que, passe a proxumtc du lac d'Apollonia, Agcsilas a gagne les nves du lae Daskylius en suivant l'crmssarre qui Ie joint au Rhyndakos (cf la earte 8) Le passage des Hell Ox, 173, est done a rajoutcr au dossier que ieunu Robert 1980, 89-98, el qui traite de la navrgabihtc du Rhyndakos jusqu'au lac d'Apollorna et merne jusqu'a Milctoupohs Comment conciher aUSSl ecla avec Str 12.8 10, qUImcntionne trots lacs Daskyhtis (lc mcme que Ie lac Marsyas ou encore Aphruus, ld 13 1 9), Apollomaus, Milctopohus (on ne voit pas bien a quOl ce dermer peul correspondre. S'il a jamais existe, Ie trorsieme lac devait etre de beaucoup plus pcute taillc et se suucr dans la zone de marecage au nord-est de Kavakln : cr. Bruce 1967, 146-147. m 11 convicnt bien entendu de disunguer la capitale de la satrapic de Daskylcion EV Ilpozovtid, qui pale huit cents dr de phoros a Athencs (Mentl et at. 1939, 479-480). Les temoignages hueraires sur la premiere sont cvrdernrncnt nombreux (cf tbul; 480): Hdt 3120; 126; 633.3; The 1.1291, xe», Hell., 4 1.15-16 Elle est suuee au sud-est du lac Daskylius sur lcquel cf. Hccatcc, Ftlrllist; 1, F217 cue par SIr 123.22 'OOPU<J<Jl1s (l)S) p{wv . arro Oumos EK "trjs A1llVlls "trjs lIlX<JK1lAlclOOC; ES 'P{lVOlXKOV i'<J~aAAEl L'Odrysscs est done le Karadcre (sur sa carle E Schwerthcim propose de facon erronee Ie Nitufer) , cf. encore Hell. Ox, 17 3 ; Plut., Luc., 9.16. En cc qUI concerne les sources archeologiqucs. les fouilles de Daskyleion, qui ont hvrc des vestiges assez impressionnants du "palms de Pharnabazc" (cf. par ex la photo donnee par Akurgal 1961, pI. 115), n'ont pas ete vcntablemcnt pubhces, cf Akurgal 1956, 20-24; Cook 1961c, 34~35 Environ trois cents bulles furcnt rmscs au jour , un pctrt nombre a ete public par Balkan 1959, 123~ 130 , ,1propose de voir la un ensemble date par la mention de Xerxes des annees 481 ~480 (a completer par Kaptan 1990, 15-27 , 1996, 259~271) ccpendant Mclhnk 1955.235, suggere que la ccramiquc associcc don etre ramcnec aux alenlours de 400 Ma« la sene des bulles est-elle homogcne'' On ne pourra, peut-etre, rcpondre a cette quesuon que par une elude exhaustive du materiel Sur les Iouilles recentes et leurs resultats, Bakir 1995, 269~281. Rappelons cnfin la concentrauon des steles "greco-perses" autour du lac Daskyhus. Parmi les travaux les plus rccents, Dupont-Sommer 1966, 44~58, Bernard 1969, 17~28, Dentzer 1982; Altheim-Suchl et at 1983.90; Cremer 1984, 87-99; Altheim-Suehl & Cremer 1985, 1~13 On se dcrnandcra d'ou provient Ja stele du Musee de Bergama publiee par Radl 1983, 55-68 (11 penche pour Sardes, mals est~ce bien assure?). Vne tombe satrapale ('I), Bernard 1969, 17~28 134 Xen., Hell., 4 137; supra p. 45 II seraJt sans doute excessd' de you la, avec Seager 1977, 182~4, la volonle du rol de Sparte de creer une "zone de satrapes rebelles" 135 Supra p 96 n 109 III
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l'interieur possible" (aVCDTcX1Cll) 136 alors que l'autcur des Helleniques d'Oxyrrhynchos cst plus precis - et plus credible - 137 en proposant la Cappadoce. II est clair qu'Agesilas rnene une action methodique et realiste, qui l'arnene a ravager successivement en prenant un important butin la Lydie, la Phrygie Hellespontique, la Cappadoce m. Il espere manifestemcnt faire pIier ainsi lc pouvoir central et l'entreticn de son arrnee est assure sur Ie terrain. On sait qu'il est rappele en Europe, "vaincu par trente mille archers perses" 139 et ne pourra donner suite a son projet: lc Roi a done trouve la parade au defi qui lui etait ainsi lance. Agesilas ne se desinteressait pas pour autant des operations sur mer puisque, devant la menace representee par la floue de Conon 140 et de Pharnabaze, il avait dernande aux cites alliees un effort de construction navale sans precedent. Les cites et les particuliers promettent cent vingt trieres ncuves. L'escadre placee sous le commandement de Pisandre (quatre-vingt-cinq ou quatrc-vingt-dix navires) se porte en direction dc Rhodes ou Conon a soutenu une revolution dernocratique 141. Il semble que dans un premier temps la prise de distance par rapport a Spartc ait ete le fait des Diagorides, cette famille aristocratique qui tenait le haut du pave a Rhodes depuis de nombrcuses annees 142. Ce revirement entraine l' execution de Dorieus par les Spartiates mais, des I' ete 395, les Diagorides et plusieurs de leurs partisans sont massacres, Ies survivants exiles 143. Conon a quitte provisoirement l'Ile pendant cet episode sanglant pour ne pas y etre implique de facon trop visible. II y avait sans doute une autre raison, encore plus imperative, a ce depart: il fallait assurer la solde des equipages. Conon se rend done a Caunos et, de la, il penetre a I'interieur des terres 144 pour rencontrer Tithraustes et Pharnabaze. Tithraustes tire deux cent vingt talents des biens de Tissapherne 145, mais cette somme n'est pas suffisante et Canon doit se rendre aupres du Roi 146 pour obtenir davantage. Les navires de Conan se trouvent a Loryma en Chersonnese 147 ; Peisandros relache a Cnide puis se dirige vers Physkos. L'affrontement des IJ6 Xen., Hell., 4141 , la traduction proposee par Hatzfeld (Haute-Asre) est madequate Cornelius Nepos, Ages.4 I, lui prete comme objccnf la Perse 137 /-Jell Ox, 17 104. Malgrc une grosse erreur topogruphrque qUI montre combien ctaicnt mediocrcs lcs connaissances que lcs Grecs avaient de la gcographie des regions Internes de lAsre Mineure (supra p. 83) decnte ultcneurement encore comme un isthmc, mars qUI reprenaient sans doute scrvilerncnt une conception persc de la geographic de ces regions us On ne survra done pas Judcich lorsqu'il cruet des doutes sur lcs capacitcs de stratcgc d'Agesilas. 139 /-Jell. Ox, 17 3 140 Barbien 1955 141 Plu!., Age's, 15, Paus 676, Dlod. 14.796. Cf Westlake 1983a, 333-344 , DaVId 1984,272. 142 Supra p 212 et 244. 143 La source pour eette affaire est Hell. Ox, 102-3, cf. Bruce 1961, 167-170, 1967, 98-102 , DaVId 1984, 272-273 ; Bresson 1993 L'autcur des Helleniques mdique exphcitement que lc regime rcnversc par lcs dernocratcs etait cclui des Diagondcs 144 On pensera a la region de Kelamai-Kolossar 145 /-Jell Ox, 141-3 140 Diod 14 81.4-6 ; cf. aussi Cornelius Nepos, Conon, 3 , Paus. 3 9.2 147 Xen , Hell., 43.10-12; Drod 14834 Conon fourrut a Starr 1976, 64, un excellent excmple d'une percepuon hcllcnocentriste de l'histoire achcmcrudc Alors que Conon est a l'ev.dcnce un anural perse, au moms jusqu'en 394, un certain nombre de modernes inversent les roles, amsi Bean 1971, pour qUI Ie controle naval sparuatc "ended for good by the Atheman naval victory under Conon" (p. 71), "The Athenian admiral Conon WIth Persians now on hIS SIde puts an end to Spartan control" (p 139). Mars n'est-tl pas outrancrer de consrderer avec Starr (loc. cit.) que la bataillc de Crude a ouvert une penodc de donunanon manumc sans partage pour la Pcrsc, qUI n'a etc remise en cause par aucun ctat grcc, rnerne Athenes. jusqu'a l'epoque d'Alexandrc (on pensera entre autres 11 l'episodc du siege d'Assos et au reph pen gloneux de la nolle de Mausolc)?
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deux fiottes se conclut par la fuite des allies ]48 et la mort du navarque spartiate. Conon capture cinquante des quatre-vingt-dix navires et une partie des equipages enfuis a terre. Le reste de la fiotte vaincue se refugie a Cnide 149. Forts de ce succes, les vainqueurs rallient a eux Cos, Nisyros et Telos 150. Les defections se prop agent comme une veritable trainee de poudre : Chios expulse sa garnison, Mytilene 151, Ephese, Erythrees changent de camp. Deux tendances se manifestent, certaines cites entendent reprendre leur Iiberte, d'autres s'attachent a Conon qui jouit manifestement d'une grande popularite dans la region 152. Apres Ie retour triomphal a Athenes, les choses deviennent plus complexes que ne l'indique C. G. Starr. Conon est tres largement honore, a la difference de ce qui se passe pour Pharnabaze pour lequel on ne peut guere alleguer que les monnaies de Mytilene 153. Il Ya deja la en germe les divergences qui vont apparaitre chez les officiers perses quant a l'appreciation du role de Conon (par exemple Tiribaze et Pharnabaze), Si l'on se tourne du cote spartiate, on constate que, malgre la debacle, Derkylidas a pu sauver un certain nombre de positions en particulier la place fortifiee d'Abydos, mais aussi Sestos, de l'autre cote de l'Hellespont, Son discours ]54 montre cependant que les Lacedernoniens ne peuvent plus compter que sur un petit nombre de points d'appui (Aigai, Temnos et quelques autres non identifies) qui echappent encore ala reprise en main par les Perses. Faut-il conclure avec Plutarque a la versatilite des Ioniens, prets a faire mille bassesses pour se concilier le vainqueur du moment ou bien penser qu'ils ont voulu croire aux promesses de Conon et de Pharnabaze 155 en une quete obstinee et pathetique de leur autonomie? En fait cette attitude manifestait une grande coherence, merne si ponctuellement, a travers les accidents de l'histoire, elle passait par des revirements frequents. Il n' est pas contradictoire qu'elle puisse paraitre relever de I'utopie et s'accompagner d'une certaine dose de fatalisme. Il est clair en tout cas que la presence des harmostes lacedemoniens etait mal 148 Xen , Hell., 43.12, Diod. 14.837. Cf. Westlake 1979, 34. A noter qu'il y a des contmgents iomens dans l'arrnee d'Agesilas a Coronee 149 Xen.,Hell.,43.10-13;Dlod.14.83.4-7. 150 Xen., Hell., 4.8.1-3; Diod, 1484.3-4 et de facon plus vague Paus 6316. Cf Barbieri 1955, 153 sq.; Funke 1980b, 120 sq ; Lanzrllotta 1981, 273-276. 151 Elle est la seule des cites de Lesbos a echapper au controle lacedemonien en 389 (Xen , Hell., 4 8.2829) C'est trcs probablement Pharnabaze qu'il convient de reconnaitre au revers d'une hekte de Myulenc avec a I'avers Athena coiffee du casque attiquc. Cf. Bodenstcdt 1981, 10-11 et 250, em 71 qUI reeensc treizc cxemplaires dont Tratte, II, n" 43 (Perses n" 373) attnbue a tort par E. Babelon it Eurysthcncs de Pergame. Remarquons que Ie "couple" qUI figure sur les monnaies peut tres bien illustrer l'assocranon de Pharnabaze et de Conon (PI. II, 3) Le fart que les autres cites restent dans la mouvance sparuate mdique assez combien ctaient grandes les nvalites dans l'ile. 152 Paus. 6.3.16, mdiquc que les Sanuens ont eleve des statues succcssivement a Alcibiade, Lysandre, Conan ct Timothee ; ee merne Conon avart une statue it Ephese ; Erythrees lUI avau enge une statue de bronze (dore sans doute) cornme Jc demande un decret de proxerue passe en son honncur, IK, l-Erythrar, 6 (= Syll.'; 126), par un gouverncment redevenu democrauque Cf. plus generalcmcnt Dernosthene, Leptine, 71. 153 Il est it noter que Xen., Hell., 4 8.2 affirrne que les cites "dcccrnaicnt des eloges it Pharnabaze", mars a la difference de ce qUI se passe pour Conon aueun monument, aueun temoignage ncst passe a la postcnte. On se rappellera cependant que nos sources grecques n'ont peut-ctre pas voulu insister sur ees votes pns pour un satrape perse. De surcroit, ees decrets, ces statues - s'ils ont cxiste - n'ont pas df) survivrc aux penpcnes de l'histoire ulteneure 154 Xen , Hell, 4 84-5. Derkylidas est-il alors harmoste d' Abydos? Le texte de Xenophon est ambigu. II parle eertes des autres harmostes mars la presence de Derkylidas parait presque fortune II avart ete envoye par Agesrlas (4.3.1-3) pour une rmssron ponetuelle. 155 Xen . Hell, 4 8 1-2
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supportee et que I'adhesion des cites etait liee a la promesse que les Perses "ne fortifieraient pas leurs citadelles et qu'ils respecteraient leur autonomic".
2. LA VICTOlRE DE LA DIPLOMATlE PERSE : 394-387 La mort de Tissapherne puis la bataille de Cnide et la reprise en main de la cote asiatique qui en resulte ont comme corollaire une peri ode de vacance du pouvoir satrapique en Asie Mineure occidentale. Le chiliarque Tithraustes avait etc charge d'une mission ponctuelle et se retire une fois sa tache accomplie. II laisse it Sardes Ariaios et Passiphernes avec des attributions presentees comme purement militaires 156 et leur ayant remis environ sept cents talents. Mais, a partir de 392, les Spartiates vont trouver a Sardes un nouvel interlocuteur en la personne de Tiribaze 157. Ce dernier a recu un commandement important, du type de celui dont avaient beneficie Cyrus puis Tissapherne 158, et on deduit generalernent d'un passage de Cornelius Nepos qu'il etait egalement satrape de Sardes (Lydie, Ionie, Carie) 159. Pendant que Pharnabaze et Conon s'efforcent de porter des coups decisifs aSparte, il apparait tres vite que Tiribaze preconise une toute autre politique. En 392, il accueille avec sympathie Antalkidas 160 qui vient it la tete d'une ambassade Iacedernonienne proposer la paix au Roi. Le prix it payer est que Sparte ne lui disputera pas la possession des cites asiatiques, cn contrepartie, celles des iles et du Monde grec conserveront ou recouvreront leur autonomic. Un tel programme ne pouvait que recevoir l'aval du satrape. Cependant, it la nouvelle que les Spartiates avaient depute Antalkidas aupres de Tiribaze, les Atheniens et leurs allies du moment (Beotiens, Corinthiens, Argiens) lui envoient aussi des ambassadeurs et cette entrevue va se transformer presqu'accidentellement en une conference internationale. Cette premiere tentative va echouer et a partir de la les versions divergent. Pour Xenophon 161 ce sont Ies interets des cites de la Grece d'Europe (Athenes, Thebes, Argos) qui ont motive le
Hell. Ox., 14.3. Supra p. 128 et nilS lOb Xen . Hell., 4.8.12 , Died. 14.85.4 , cf LCWIS 1977, 145, n. 63 159 Cornehus Nepos, Conon, 5 3 qui Sardibus prcerat. 160 Xen .. Hell, 4 812-15, cf Martm 1944. 13-30 (spccia'ement l7-20), 1949. 126 sq, qL11 confronte les sources anciennes en tentant de refuter les conclusions du memorre de Wilcken 1941 II part du presuppose que tout accord formel avec lc ROl nc peut avoir d'histoncitc dans la mesure ou ce derrner ne saurait trarter quiconque sur un pled d'egahtc et par consequent sccllcr une paix. Cela l'amene it mer I'existencc de la pal x de Kalhas (449) et d'Epilykos (423), cf. Martm 1963, 232 Pour rcvcrnr it la negociation de 392, Martin a raison, contre Wilcken, de soutcnir que l'accord entre Amalkidas ct Tmbaze ne peut etre mterprctc commc une pal X entre Sparte et la Perse. Mar» II semble bien que c'cst cmrer dans un debat stenle que de cherchcr it enfermer les rapports diplomanqucs antiques dans des cadres trop modcrrnstcs Les contacts sont frequents comme le montre lc nombrc des ambassades. On ne peut mer que certaines au moms ont ete survies d'effets concrets. que l'on ne saurait reduire it une sounussron pure et sunplc des cues grecques (cf. par exemple l'arnbassade de 408 et l'idcc d'un "traitc de BOlOUOS" qu'cn life LeWIS, supra) Martm propose de Iacon assez convaincante de placer Ie contact de Sardes - dont J1 ne souligne pas assez Ie caractere Impromptu - connu par Xenophon, avant la reunion sans suite de Sparte (Plulocore, Andocidc). Ryder 1965, 27-33 et 165-169 oil J1 expose sa preference pour une chronologie I) Sardes 2) Sparte, avec Treves 1937.113 sq et Accame 1951,5-20. contre une succession 1) Sparte 2) Sardes avec Judcich 1926, 141 sq et Momighano 1936a, 98 sq. Sur Antalkidas, Hofstetter 1978,15-16 it la bibhographie duquel J1 conviendra d'ajoutcr Buckler 1977, 139-145 ; Devoto 1986, 191-202 • Jehne 1991, 265-271 ; 1992, 99-116. 161 Xen., Hell., 4.8 IS 156
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refus ; pour Philochore 162, l'opposition des Atheniens vient de la situation faite aux Hellenes residant en Asie. II est certes probable que cet argument a cu son poids, en particulier au cours des discussions qui se placent it Yekklesia apres les conferences de Sardes et de Sparte, mais la suite des evenernents montre que les preoccupations atheniennes etaient prioritairement ailleurs 163. Tiribaze indique de que I cote il penche 164 en dormant sccreternent de l'argent it Antalkidas et en arretant Conon it Sardes en 391 165. Cepcndant il eprouve Ie bcsoin de se justifier aupres du Roi (ou ce dernier Ie rappelle) et Artaxerxes montre que, pour le moment, il n'envisage pas de modifier Ie cap de sa politique. Cet episode est neanrnoins l'occasion d'un profond remaniement de I'organigramme des responsables perses en Asie Mineure occidentale. Tandis qu'il retient Tiribaze en Haute-Asie, il delegue Strouthas, explicitement indique comme favorable aux Atheniens, £1Clf.l£AT\O"Of.l£VoC; 10W Ka1Cx 8&Aanav 166. Ce dernier cumule des fonctions administratives et militaires puisque nous savons par ailleurs que Strouthas etait satrape d'lonie 167. II faut penser que nous sommes it nouveau en presence de deux satrapies, avec la probable reorganisation d'unc satrapie d'Ionie autour de Magnesie, C'est ce que dernontrc la campagne de Thibron dans la vallee du Meandre, qui prend pour point de depart une fois encore Ephese et cn s'appuyant sur Priene, Leukophrys et Philochorc ap. Didymos, In Dem irc-n.«, 328, F 149). Sur ce point on ne peut etrc d'accord avec Martin 1949, 133 sq. Cf deja les ncgocrauons d'Alcibrade ct de Trssapherne avec les cnvoyes athcmens (supra p. 212) ou Ie point d'achoppemcnt n'cst pas les cites d'Asre mais la hbre circulauon de la Ilotte perse en Egee Ce n'cst pas le Menexene de Platon (245 a-c) qUI peut convamcrc du contrarre Nous y rcncontrons un flonlege de cliches (et quelques corurcvcntcs) sur l'atutudc d'Athenes a l'egard des Pcrses dcpuis leurs premiers rapports Dans ccs condrtions II est dtfficile de lUI fane con fiance lorsqu'il sc fan l'ccho de Ia volonte du ROI de romprc avec Ics Athcmens par l'exigence de l'abandon des Grees d'AsIC, exigence que selon Platen Ies Atheniens nc pouvaient accepter (et que, d'aprcs lUI, ils refuserent seuls entre tous) On Satl d'autre part que, malgre les conversations de Sardes, le ROI n'a pas immediatement rompu avec les Atheruens. Le revircmem royal est bien en rclauon avec les cites asiatiques mats II se produit trois ans plus tard (infra p. 278) Or lc Menexene pourrait dater d'un ou deux ans apres la paix (ef. Ryder 1965,42 et notes) Le silence d'Andocidc, Sur la Paix, ne saurait servir d'avantage d'argumenl. Andocide avau ete designe pour etre l'un des plcmpotenuaires athcmens a la reunion de Sparte L'ambassade prefcrc cependant ne pas s'cngager sans lavis de Yekklesia. qUI refuse lcs clauses de l'accord Ce discours cst un plaidoycr pro domo de l'orateur. On a remarque depuis longtemps que les cites d'AsIC ne sont pas mcnuonnecs et le role du ROI simplerncnt evoque. Andocide a ChOISI d'argumentcr umquement sur les rapports avec Sparte ct lcs avantagcs de la parx malgre les sacrifices qu'elle Impose a Athenes 164 Xen, Hell, 48.16; DlOd. 14.85.4 II ne semble pas, malgre Weiskopf 1992, ss, qu'on PIJISSC considerer la polrnque de Tmbazc comrne la suite de celie de Tissaphcrnc. L'arrestation de Conon n'mdique en aucun cas que Tmbaze au voulu eviter d'entrcr en confht avec Pharnahaze. 165 David 1984, 276 n. 30, penche pour I'automne 392. 166 Xen .Hell , 4 8 17 ; Diod. 1499 II cmploie le tenne CHP-
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l'Hellespont mais refuse de s'engager it Heraclee 158, Agesilas se rend aupres de Mausole 159 puis en Egypte. Malgre les succes - apparemment ponctuels - des generaux grecs.Artabaze reussit a se maintenir sur la cote grace aux mercenaires de Mentor et Memnon de Rhodes, ses beaux-freres 160. La reussite des Atheniens apparait comme tres fragile puisqu'en 365/4 la construction d'une flotte en Beotie, a I'instigation d'Epaminondas 161 et sans doute grace al'or perse, permet aux Thebains d'intervenir l' annee suivante en Egee orientale et dans les Detroits. C'est la un fait nouveau, d'autant que cela s'accompagne d'un appel ala defection de l'alliance athenienne 162 de Byzance, Chios, Rhodes (plus Keos) 163. Pour Chios et Rhodes, on a pu douter des effets 164 de cette tentative de "debauchage". En tout cas aucune action violente n'est rnentionnee dans les textes litteraires mais I' epigraphic apporte une confirmation decisive 165. Les Cnidiens ont pris un decret de proxenie pour Epaminondas ce qui suggere que ce dernier a du faire escale it Cnide dans son periple de Chi os aRhodes 166 et confirme que tout cela se
ISS Justin 16.4; contraircment a cc qu'ecnt Buckler 1980, 168, Justm indrque que Tunothee refuse de s'immisccr dans les affaires d'Heraclee (infra p. 3(0) apres que tres vraisemblablemcnt on lui all envoye une ambassade ; merne scenano pour Epammondas, dont II encore moms plausible qU'11 sort aile jusqu'a Heraclee, '59 Ccla peut se deduire de Xen., Ages., 2.27. La posrtion de Mausole reste toujours aussi ambigue. 160 C'est la premiere fois qu'apparaissent ces personnages appeles a jouer un grand role par la sutte. C'est aussi apparemment la prcrmere Iois qu'un Perse de SI haut rang contracte une alliance matnmornale avec une farm lie grecque. En ce sens les Grecs se comportent cornme l'ont fait avant eux des anstocrates d'autres regions et cela confirme bien qU'11 pOUVaIt Y aVOIr dans les cites (cf. plus haut a Samos) des facuons qui ne marufcstarent aucune hosuhte de prmcipe ala dom matron perse. 161 Cf. Roesch 1984,45-60. L'existence de cettc flotte a ere autrefois mee, cf. Cawkwell 1972, 270- I pour lequel les Thebams se sont appuyes esscntiellement sur les flottes des allies (Rhodes, ChIOS, Byzance) , Diod. 15.79.1, insiste fortcment sur la constructron de cent tneres et des arsenaux correspondants Cela n'cxelut nullement que des navires supplementaires aient pu ctre Iourrus par les alhes, encore que la parncipation active des Chiotcs et des Rhodiens sort 10m d'etre assuree (infra n. 164). AllUSIOn a cette flotte ephemcre. Plut., Philopoemen, 14.2-3. La monnare ACGC 369, cf. p. 114 n I qUI porte Ie nom d'Epammondas et une rase au dessus de l'amphore tradrtionnelle doit etre prabablement mise en relation avec ces cvenerncnts, Hornblower 1982, 200 n. 137; Hepworth 1986,39 (et pI. 3, 5) VO\rsupra p. 275. 162 DlOd. 15.79.1. 163 La secession pUIS la repnse de Keos, que ne menuonne aucune source httcraire, est rapportec par IG, IF, 111 = Tod, 142. Cf. Buckler 1980, 173. 164 Hornblower 1982, 126, pense que Rhodes n'a pas effecuvernent qurtte l'alliance athcrncnne et qu'il en va de meme pour ChlOS. II s'appuie sur Diod 16.7 3: Xicov Kat 'P08(UlV Kat K(pmv, En 8£ Busav1(Ulv arrocnav1Ulv, hste des cites "rcvoltees" a l'epoque de la guerre socialc Son tnterprctation du tcxte est par trap selective, a moms de donner a E1l un sens fort qU'11 n'a pas ICI (cf. 16.21.1 ou Ie merne mot parait bien sigruficr "et aussi" et etre place Ia pour rampre la monotonic de l'aceumulation des noms). Que Iaire alors de Cos dont H. adrnet, sans doute a juste litre, qu'elle n'a jamais appartenu a la confederation (supra n. 51)? 165 Blume! 1994, 157 (363 a.c.), d. Buckler 1998, 192-205 (364 a.c.) 166 La decouverte de ee texte, a Tekir, a relancc Ie debat ISSU de la posiuon pnse par Bean & Cook 1952, 202-212 (SUlVlS par exemple sur ce POlDt par Robert & Robert, Bull. ep 1954, 228 (p 168)' Ie site ancien de Crude serait Datca et la Ville aurait ete transplantee au IY' s. a la pointe de la Knidta Cette hypothese avart ere contestee par Demand 1989, 224-237 (ef. aussr Blumel, IK, -l l-Knrdos, p 1-2) 11 parait assez clair que Ie debat est pose de facon erronee. Datca et Tekir sont egalement Crude et I'on aurau tort dunagmer obhgatoirement une structure centralisee de modele atheruen C' est seuJement a I' epoquc hellerusnque que l' agglomeration de la pointe de la perunsule sest affirmee en liaison avec lacnvrte du "couloir paralien" (cf. l'rntroducuon), mais cela ne srgrufie nullement que Ics autrcs bourgs ont pour autant disparu ou meme pcnchtc Bresson 1999 soulient quil convient de revemr au point de vue de Bcan & Cook, ccst-a-drre au transfert du centre polrtique de Cmde de Dat~a vers Teklr dans!a deux Ierne mOltle du IY' s Pour B., Ie TnoplOn sc trouvalt a Tekir
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fait avec l'asscntiment des Perses, Il semble que J. Buckler ]67 force quclque peu Ie sens du decret en Ie considerant comme la preuve d'un lien politique tisse entre Cnide et la Beotie et de la demonstration des ambitions navales d'Eparninondas en Egee. La formule £GnAouv ... KCXt £KnAouv est tres banale. La comparaison faite avec Athenodoros (decret de Kios) et Iphiades (decret de Cnide) ninvite pas ade telles conclusions dans la mesure ou il n'y a pas de raison objective de supposer que ces deux chefs de guerre disposaient d'une flotte significative] 68. De meme la collation de la proxenie n' est certes pas a cette epoque un honneur vide de sens 169, mais c'est attribuer a la cite de Cnide une capacitc de decision dont elle n' avait guere de chance de pouvoir beneficier. Le decret est bien un acte politique mais qui sinscrit sans aucun doute dans un contexte ou les decisions sont prises a Halicarnasse ou meme a Suse, Il apparait done que Chios et Rhodes ont pour le moins pris leur distance avec Athencs, mais cela ne suppose pas ipso facto qu'il y avait eu quelque engagement militaire. Le cas de Byzance est different 170. Il sinscrit dans un ensemble de donnees complexes et a premiere vue contradictoires qui concernent les Detroits et la Propontide, Le discours Contre Polycles montre les gens de Byzance, de Chalcedoine et de Cyzique se livrant a des operations de piraterie sur les navires marchands circulant dans les parages. Les gens de Proconnesos (allies d' Athenes) sont menaces par Cyzique. Nous savons d' autre part que vers ce moment Alexandre de Pheres a envoye des navires vers l'Hellespont 171 ct Samos. La reaction d'Athenes est d'autant plus vive que la route vitale des Dctroits menace d'etre coupce. Une flotte est envoyee sous Ie commandernent de Timothee, Toronee ct Potidee sont reprises, Cyzique qui subissait un siege de la flotte d'Epaminondas, debloquce 172. C'est peutctrc a cette campagne qu'il convient de rattaeher la detaite des Byzantins face a Tirnothee que C. Nepos mentionne sans en permettre la datation precise 173. En tout cas si cet episode est bien reel, il ne detourne pas durablement les Byzantins de l'allianee de Thebes ou ils sont representes par des synedres quelques annees plus tard 174, entre 355 et 351, done bien apres
Buckler 1999, 196-204 Cependant lphiades drsposait d' autres argumems qUI pouvaient procurer unc gene, ou une aide, considerable aux Cnidicns (infra). 169 Comme Ie note L Robert, I'a-t-II jamais ete? 170 Ps-Demosrhcnc, C Polycles, 6 ; cf. Sealey 1956, 197 Un Byzannn est honore par un decret de la hgue thebaine UG, VII, 2048) , Roesch va sans doute trop 10m dans la precision lorsqu'il imagine que cc personnage pOUITaIt etre un architectc naval Lcs raisons prccrses sont inconnucs mars pourrarent etre aussi bien pohtiques que techniques, en liaison directe avec la construction de la flotte Les navires d'Epaminondas Byzancc, cf Isocratc, rn«. 53. 171 Polyen 6.2.1 172 DlOd. 15 g16 (364/3), Cornclrus Nepos, TlYI1, I 3, cf. Hasluck 1910, Glotz 1949, 170 Le statut et la situation de Cyzrque 11 partir de 387 nc sont pas clairs. 11 s'agu certes d'une lie, mars rchcc au conuncnt par des pouts (Str. 12.g.II). On ne sart a quel moment ccs dcrmcrs out etc construits. L'attaque d'Epammondas se justrfie Sl la crte Cyziquc? Pour est alors dans la mouvance d'Anobarzane A quel moment suuer l'mtervenuon de Timothcc Buckler 1990, 168, cf aussl256 sq., elle a lieu avant l'arnvcc de la flotte d'Epammondas (en 365, Weiskopf 1989, 52 penche pour 364) II s'agissait offictcllcmcnt d'aider Anobarzane et en reallte de se procurer du buun pour payer la troupe. SI pour rester plus pres du texte l'on place cct episode au moment de la presence d'Epammondas l'action d'mtirmdauon de Tunothee se deroule stnctcment sur mer et par consequent J1 n'y a pas plus ICI qu'a Heraclee (con Ira Buckler) de rupture des instructions donnees au stratcgc au moment de son depart d'Athenes In Cornchus Nepos, Jim, I 2. 174 Tad. 160, I 11 ct 20-24 167
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la guerre des allies dont ils sont un des principaux protagonistes 175. De merne on a tente de rapprocher Ie siege de Chalcedoine par un adversaire inconnu a I' occasion duquel cette derniere recoit une aide encombrante de Cyzique 176. L'exemple de Cyzique montre que les cites grecques sont engagees dans des conftits qui les depassent avec un cortege de revirements plus ou moins spontanes. Ellcs servent d'enjeu aux luttes fratricides d'Ariobarzane et Artabaze. Tel est Ie cas des villes de Troade et plus particulierement de Larnpsaque. Demosthene fait allusion aces evenernents qui content la vie a Philiskos d'Abydos 177. On ne peut, a travers cet auteur 17R, se faire une idee exacte de l'ampleur des operations: s'agit-il d'un soulevernent (manque puisque les assassins de Philiskos se refugient a Lesbos) ou d'une vengeance privee consecutive aux exactions du chef de mercenaires? En tout cas cela s'insere dans une operation de reprise en main des villes de Ia cote: "11 profitait de la puissance d'Ariobarzane pour conquerir les villes grecques". La date est egalement imprecise, elle se situe en tout cas entre 375 179, date probable du decret honorifique d'Athenes pour Ariobarzane et secondairement pour les Abydiens Philiskos et Agauos 180, ct 363/362 date de la mort d'Ariobarzane 181. C'est aussi dans cette epoque troublee qu'il convient de placer I'episode dIphiades, "tyran d' Abydos". Les bribes d'information que nous possedons ont ete parfois surinterpretees par les modernes. D' apres Aristote 182, Iphiades est le chef d'une des hetairies qui se disputent le pouvoir d Abydos. A l'evidence il appartient a un courant anti-athenien qui arrive aux affaires grace aux difficultes (ou a la chute) d'Ariobarzane, On peut certes le qualifier de tyran comme le laisse entendre le Stagirite, il parait bien plus probable que Ia double conjonction de la situation et du controle de I' armee lui donne un levier dont il a su jouer. Sa Iamille est l'une des plus en vue, sinon la principale, des familles aristocratiques d' Abydos. On en connait des representants des le vc s. 183, plusieurs monetaires, dont un Iphiades, au rv- s. 184 L' action d' Iphiades depasse Ie cadre de sa cite pour conccrner l' ensemble de la zone hellespontique. II participc a la saisie de Sestos 185 et s'ernpare de Parion 186. Reste a interpreter le decret honorifiquc que les Cnidiens prennent en son honneur 187. II me semble que la clef se trouve dans le tcxte de Dernosthene, c. Aristocrates 176-177 : il y est question de Charidemos qui reclarne a tous tele et dekatai ct se comporte comme si la contree lui
175 Pour Buckler, Epammondas s'est bien rcndu it Byzance et y a etc recu avec sympathie sans pour autant cmporter la decision de la cite d'cntrcr cn rebellion ouverte centre Athenes 176 Enee 12 11 177 Sur Phihskos d'Abydos, cf Hofstetter 1978, 1 et259 sq (brbhograpluc) 178 Demosthene, C /vnstocr , 141 170 Mals cf supra p n8. 180 Demosthene, loc Cit, 141 et 202. lSI Suprap 104 182 Anst, Pol,S. 1106a 31 18, WIlhelm 1911, XIV; Robert 1967b, 23-25 On fcra observer que dans l' inscnpuon IG, P, 28, pcu apres le miheu du vv s , plusieurs membres de la farmllc sent honores par un dccret de proxcnic, ce qUI demontre que malgrc le parti-pns de Demosthene, c. /vristot:r , 158, les dingeants d' Abydos nont pas ete systcmatrquernent defavorablcs a Athenes, merne Sl c' est la suuanon la plus frequente. 184 Tratte, II, n'' 2463 ISS Demosthene, c. Artstocr , 158. 18(, Enec 28 6 187 SyIP, 187
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appartenait, exigeant que ses percepteurs aient la haute main sur les impots. II sagit a I' evidence de controler entre autres Ie lucratif produit de la circulation maritime dans les Detroits. Dans un tel contexte, des puissances de premier plan comme Athenes peuvent penser intervenir militairement, les autres tentent d' aplanir la difficulte par d' autres moyens, par exemple en octroy ant des privileges sign ales ace personnage repute important. II est en effet tres plausible que Chari demos navait fait rien dautre que de reproduire une pratique deja ancienne, en particulier par Iphiades avec comme centre operationnel Abydos, ce que la consultation d'une carte permet aisement de comprendre. Heraclee pontique ISS fournit un autre exemple de ces luttes intestines ou les factions n'hesitent pas a faire appel a I'intervention de forces exterieures pour asseoir leur hegemonic. Notre source principale est l'abrege de Trogue Pompee par Justin 189. Selon cet auteur 190, alors que les autres cites paient tribut a Athenes, les seuls Heracleotes refusent et se declarent allies des Perses. Cela entraine une expedition sous Lamachos, qui ravage la chora mais dont une tempete detruit les vaisseaux. II est done contraint de rejoindre Chalcedoine par la voie terrestre. Au debut du lye S. une crise latente oppose la faction populaire aux riches (les premiers revendiquent, d'apres Justin, I'abolition des dettes et Ie partage des terres). II est fait appel par Ie conseil d'abord a Tirnothee puis a Epaminondas. II est clair que Ie fecit manque de coherence. Ce ne peut etre que Ie parti des dernocrates qui tente vainement d'attirer Timothee (ce dernier n'est manifestement interesse que par la zone des Detroits) et probablement un groupe antagoniste qui essuie Ie merne echec aupres d'Eparninondas. On notera la meme opposition de motifs si I'on fait intervenir des facteurs exterieurs, La faction hostile aux Perses se tourne naturellement vers Timothee ; une partie au moins de I'aristocratie peut au contraire souhaiter leur tutelle pour mettre a bas Ie parti adverse. L'appel a Clearchos peut tout aussi bien s'interpreter en ce sens. La reforrne institutionnelle dont il est question chez Enee 191 se place peu avant ce moment, au cours d'un de ces episodes de pouvoir democratique, ou en tout cas de gouvernement plus ouvert, auquel fait allusion Aristote 192. Les aristocrates s'adressent done a Clearchos 193 qu'ils avaient exile et qui s'etait mis avec ses mercenaires au service de Mithridate 194. Clearchos floue ses differents partenaires : Mithridate qu'il capture et relache contre une forte rancon, les aristocrates qu'il malmene apres avoir ete appele par eux. En 364, il installe un pouvoir tyrannique qui va durer douze ans jusqu'a son assassinat. Polyen 2.30.1-3 nous decrit quelques etapes de la consolidation de son pouvoir. n fortifie I' acropole puis fait arreter les membres du conseil des Trois cents (done les plus influents des notables). II entrcprend Ie siege d' Astakos qui est pour lui Ie moyen de faire perir nombre de citoyens. II s' agit la it I'evidence des griefs habituels contre la cautele et la cruaute des tyrans. On sait qu'il accroit Ie territoire d'Heraclee jusqu'a Kieros au sud, Tieion it l'est, et jusqu'a Astakos (sans Hoepfner 1966 ,Ashen 1972 ; Franke 1966. 130 sq . Burstein J 976 . Saprykin 1982, 127-149 Justin 16.4. 190 Justm 16.3.9 (424/3) . cf. Thc. 4 75.2. 191 Enee 11.10 bis-Ll , 192 Anst., Pol., 5 1304b 31 sq. 193 Souda, s v. KA,£cxPXos; Enee 125; Jusun 16.4-8, Diod 1581.5. 194 Pour Weiskopf 1982, 430, J1 ne fait pas de doute que Ie Mrthndate menuonne ICI est Ie fils d'Anobarzane ; cene hypothese est discutee supra p. 103, mars Ie contexte general reste it preciscr Enee souligne Ie grand danger qu'rl y a it tntrodurre dans une cite un pam trop puissant de mcrcenarres 188 189
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pouvoir s'en emparer) en direction de la Propontide 195. Dans Ie domaine des relations exterieures, il se comporte en vassal loyal du Grand Roi, auquel il delegue nombre d'ambassadcs mais cela ne I'ernpeche pas dentretenir de bons rapports avec Athenes. Rappelons qu'il avait donne a son fils Ie nom de Timothee dont il etait I'arni et a cause duquel Athenes lui confera Ie droit de cite 196. II est repute etre le fondateur d'une bibliotheque et se presente lui-rneme comme Ie fils de Zeus 197. On en retiendra I'idee que par bien de traits il prefigure I' attitude des rois hellenistiques. Apres sa mort, la tyrannie ne disparait pas pour autant puisqu'il est rernplace par son frere Satyros (353/2 a 346/5), tout cela probablement avec I'assentiment des Perses qui ont laisse a nouveau se developper ce type de regime dans les cite grecques. Les deux fils de Clearchos, Tirnothee (346/5-33817), destinataire de la Lettre VII d'Isocrate, puis Denys, lui succedent. Ce dernier epouse la femme divorcee de Cratere, Amastris 198 et prend le titre de roi en 305 peu de temps avant sa mort 199. II profite des vicissitudes des temps pour agrandir son dornaine, beneficiant de la vacance du pouvoir dans la partie nord de I' Anatolie apres la victoire d' Alexandre au Granique, puis il reussit a se maintenir malgre l'appel de ses adversaire aAlexandre dabord puis a Perdiccas. Heraclee est une fondation milesienne 200. Elle possede vers l'est cinq colonies de Milet, Tieion, Sesames, Kromna, Kytoron, Mastya, comptoirs plutot que cites. La reine Amastris fonde sous son propre nom une cite nouvelle par le syneecisme de quatre Iocalites : Sesames, Kytoron, Kromna, Tieion 201.
195
37 sq.
Memnon d'Heraclcc (apud Photius, Bibl., 224), FGrHist, 434, FI, 1-5. Cf. De Sainte Croix 1972,
Dernosthene, c. Leptine, 84. Plut., F d'Alexandre, 2.5.338c. 19R Fille d'Oxyarhres, Ie frere de Darius (Ill). Cela pour montrer une fois encore les liens matrimoniaux qui pouvaient se tisser au IV's. entre les aristoeratics locale et persc, Cf. infra p. 488. 199 Magie 1950, 308 sq. 200 C'cst ce qu'affirme Str. 12.3.4, eontraircment 11 une tradition [locale"] qui fait venir Ics colons de Megare et de Beotie, cf. Magie 1950, 1191 n. 23 ; Asheri 1972, 12-17. Lasserre CUF 157 rctient la fondation milesienne eomme n'ctant pas 11 ecarter, Cf. aussi Ehrhardt 1983. 201 Str. 12.3.10 qui indique de surcroit que Kytoron etait autrefois un emporion des Sinopeens et que Tieion se scparc rapidemcnt des trois autres. Cf. Debord 1998. 196
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CHAPlTRE VIlI
"LA GRANDE REYOLTE DES SATRAPES"
II s'agit Ia d'un episode controverse et qui comporte bien des zones d'ornbre malgre le reexarnen drastique auquel se sont livres M. 1. Osborne 1 et surtout M. Weiskopf:": problerne exemplaire de l'utilisation des sources et de leur difficulte. Le seul recit coherent et global des faits est celui de Diodore 3 ; mais il apparaii tres vite al'analyse que ces deux qualificatifs sont eux-memes inadequats. Dans un souci de mise en scene dramatique (unite de temps, unite d'action), Diodore a reuni des faits qui en realite se deroulent sur beaucoup plus d'une annee et qui sont probablement moins lies entre eux que l'auteur ne l'affirme 4. La revolte des (ou de) satrapes est traitee de facon encore plus schematique par Justin resumant TroguePompee s. n apporte des informations nouvelles, mais partiellement contradictoires avec celles de Diodore, et il conviendra de se rappeler que Ie recit de cet auteur, lorsqu'on peut Ie comparer a d'autres sources, se revelo souvent assez fautif. A cote dc cela, quelques eclairages nous sont fournis par Polyen 6 et le Ps.-Aristote de l'Eco/1omique, n. Ces deux auteurs ont en commun de s'interesser it des stratagernes militaires ou fiscaux, classes par personnages celebres mais sans que jarnais le contexte chronologique ne soit precise et qui apparaissent, parfois meme, dans une complete internporalite. nest done dangereux, en l'absence de tout point d'ancrage, de tenter de restituer ces faits precis dans un cadre plus general et it une date determinee. La suite montrera la difficulte d'une telle entreprise. Entin, occupant une place a part dans ce tableau, Dernosthene et Cornelius Nepos. Dans plusieurs de ses rcuvres, le premier fait reference it la situation des annees 365-360. II Y a la une information de premier ordre dont il faut obligatoirement tenir compte, mcme si le plus souvent il ne s'agit que d'allusions a une situation supposee connue des Atheniens 7. Le second est precieux par sa "Vie de Datarnes" 8, expose seduisant mais necessairement hagiographique qu'il faudra tenter de concilier avec Diodore 9. Notons que c'est sans doute par les progres de la numismatique qu'il est possible de sortir de certaines impasses. Des avancees importantes ont eu lieu depuis les travaux Osborne 1971,297-321; 1973,515-551; 1975,291-309. Weiskopf 1989. ] Diod. 15.90 sq. 4 Weiskopf 1982, 338; 1989, J2. 5 Troguc-Pompec, Prol., 10: (Artaxerxes) in Cadusis victus, dejectores in Asiu purpuratos suos persecutus, primum Dotamen praejectum «Paphlagoniae>. Paphlagonon origo repetita ; deinde praefectum Hellesponti /sriobarranen, deinde in Syria praejectum Armeniae Oronten, omnibus victis, decesserit. filio successore Ocho. (; Stratagemes, attribues iI Orontcs, Autophradatcs, Mausole, etc. 7 Cf. par exemplc Demosthene, Sur les symmories, 31. R Sur les sources possibles de Cornelius Nepos, Thiel 1923,412 sq. ; cf. Moysey 1992, 158-\68. El:lN ou une forme abregee. 152 PI. IX, 15. legendc IOIIElN. Une piece du V's. porte une legende aramcennc enigmatique (Naster 1988, II). 153 A noter que les premieres series ont eomme type davers Hermes ct un belicr / au revers la divinite ailee (dernier quart du vs s.). 154 BMC Cilicia n° 23. p. 99. pI. xvrr, 4: SNG France 2 398 (PI. VIII, 15), qui pourrait dater de lepoque de Tiribaze (ccttc seric semble representee dans le trcsor CH 6.11). 155 BMC Cilicia p. 100 n° 24, pl. XVII, 5 ; Col. L. de Hirsch 1594; SNG France 2 399 (PI. VIII, 14) ; Gulbenkian 801 . Hcrakles au lion (revers). 156 La legende des monnaies de Mallos est generalement greeque : MAP ou MAA, mais ef. Traitc, II, n" 1396 = BMC Cilicia n" 17, p. 98 (pl. XVI, 13) avec Iegcndc bilingue grec-ararnecn ; Naster 1988, 10. 157 BMC Cilicia p. 100 n" 25. pl. XVII, 6 (rei-archer it lavers). ISS Kraay 1976,280 ; Casabonne 1996b passe en revue lensernble de la documentation figuree (monnaies, coroplastic, bas-relief) pour dcmontrcr la variete et la riehesse des representations cmpruntecs l' iconographie et it I'jdcologie pcrses. Pcut-etre cfn-i] ete utile de tenter une pcriodisation de ccs donnees. 159 Cf. la mise au point de Casabonne 1995 et ses corrections (Istanbul). IhIJ Naster 1988,7-8. 161 Babelon 1910,351-358 ct pl. CV-CVI.
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lui ces series debutaicnt vers 475 et duraient jusquc dans le courant du lye s. C. M. Kraay, en publiant Ie Celenderis Hoard en 1962 162 propose une modification complete de la chronologie absolue : il pense que Ie monnayage de Tarse apparait seulement en 425. II bouleverse aussi l'ordrc des series puisque les monnaies cavalier/peltaste absentes du tresor de Kelenderis (date des alentours de 4 10), seraient posterieures au passage de Cyrus en Cilicie et dateraient des environs de 390. II introduit ensuite quelques nuances dans ACGC en prenant en compte diverses considerations historiques. Cette revision drastique n'a pas ernporte I'adhesion sur tous les points 163. La question rnerite d'autant plus d'etre examinee que la datation proposec interfere avec la reconstruction historique evoquee ci-dessus, les monnaies fournissant en quelque sorte I'illustration de la situation politique de la Cilieie: - La premiere serie (troisierne quart du yo s.) porte it I'avers comme au revers la representation de Bellerophon monte sur Pegase, theme grec mais qui peut trouver des repondants locaux dans toute l' Asie Mineure meridionale. Cette serie est par ailleurs anepigraphe et a toutes chances d'etre civique 164. - Une deuxierne seric, vers 425-420, offre une illustration toute differente : it l'avers un cavalier que C. M. Kraay propose d'identifier au dynaste ; au revers l'archer bien connu, type perse par excellence, egalerncnt anepigraphe 165, croix ansee en tau dans le champ. - Les monnaies suivantcs, entre 420 et 410, se rencontrent dans le tresor de Kelenderis et elles ont com me caracteristique commune d'avoir la legende TRZ en arameen. Entre ces series il est possible de relever des types identiques d'avers au de revers. Le premier groupe (a) porte a I'avers un lion attaquant un taureau, autre theme perse, et on pense bien sur au relief de Perscpolis, Le revers figure un cpi de ble en diagonale dans un carte (qui n'est plus vraiment en creux) souligne par un grenetis qui se transforme sur un cote en un bourrelet plein 166. Le second (b) presente Ie me me avers mais avec au revers un guerrier perse porte-lance ayant devant lui dans le champ un epi de ble en position mediane dans un carre souligne par un grenetis 167. Troisieme groupe (c) merne revers que le precedent mais associe it un avers au est figure Melkart chevauchant un hippocampe aile 168. Le groupe (d) presente ce meme avers avec une representation stylisee de I'onde avec au revers un dieu au trident et un epi de ble 169. Enfin un dernier groupe (e) 170 associe l'hippocampe aile it Nergal, Kraay 1962, 1-15, sp. 9-J 1 (= teen 1255); 1976,281. SNG von Aulock place lensemble des series examinees ici entre 425 ct 400 ; de mcrnc pour Levante ; plus imprecise en ee qui conccrnc lcs dates mais proposant de revenir aux points de vues traditionnels, Harrison 1982a.450-458. 164 Kraay & Moorey 1981,7, n° 59 ; ACGC 1031 (PI. VII, 1). Merne theme sur une monnaie du debut du IV's. : Mildenberg 1973 (PI. VllI, 7). 1(,5 ACGC 1032 (PI. Vll, 2). SNG France 2213. '66 Statures : Kraay 1962, pI. II 10 (PI. VlI, 3) it 12 ; SNG von Aulock 5907 : Levante 54 : France 2 201202 ; la plupart des avers sont de mediocre facture, les coins paraissent uses; on note la presence de symbolcs sccondaircs (crabe, arbre, tortue). Tiers de staterc, Levante 55. 167 Kraay 1962, pI. II, 13 (PI. Vll, 4). 16K Kraay 1962, pI. II 15 (PI. VII, 5) ; SNG von Aulock 5909 ; France 2 199. 1(,') Kraay 1962, pI. II, 14 (PI. Vll, 6) ; SNG von Aulock 5908 ; Levunte 56. 171J SNG von Aulock 5910; Levante 58. Cela permet l'idcntification du revers de ACGC 1033 (PI. Vll, 8), gucrricr represente it la mode perse avec lance ct arc comme Nergal ; cf. aussi ibid. 1035 trcs proche de Jenkins 1973, 31 et pI. 1. 1. Cf. le devcloppement de ce dernier sur Nergal ct les possibles syncretismes tarsiotes. Nerga! est present sur deux monnaies, Mildenberg 1973 ; Jenkins 1973 : l'une (PI. VlI, 9) avec cavalier au trot it droitc (avers), Nergal sur un lion arc et lance, lcgendc "lRGL.TRZ (revers), Iautre oil Ie dieu est dote d'une double haehe (Casabonne 1995) au revers d'une monnaie du debut du IV's. qui rcprcsentc Bcllcrophon it I' avers (PI.VIll, 7). 162
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represente et nomme sur des monnaies comparables. Cette fort interessante serie appelle plusieurs observations. On est tout d'abord frappe par la grande diversite des sujets figures, mais aussi par Ie fait que tous nous ramenent it I"Orient", perse bien sur mais aussi mesopotamien ou phenicien. c. M. Kraay 171 fait observer que le theme Mclkart sur I'hippocampe (dont on doit noter par ailleurs qu'il constitue une contrepartie marine du Bellerophon/Pegase de la premiere serie) se retrouve it la meme epoque sur des monnaies de Tyr 172. II propose d'en induire que l'elernent unificateur entre les deux regions est la construction de la "flotte de Phenicie" dont Tissapherne agite plusieurs fois la menace en 411 dans le jeu diplomatique subtil qu'il joue face aux Atheniens et aux Spartiates 173. En fonction de ce classement qui parait globalement acceptable bien que la fourchette chronologique proposee paraisse un peu resserree 174, comment situer la serie "satrape" it cheval/peltaste grec, pour laquelle C. M. Kraay occulte les tres sensibles differences de style qui existent entre les groupes en choisissant de n'illustrer que celui qui est manifestement le plus recent 175 7 E. Babelon avait Merit tres correctement les sequences: - Groupe A 176 : cheval au galop (notons que le mouvement n'est pas sensiblement different de celui du Pegase aile de la premiere serie chronologique de Kraay) devant le cavalier une croix ansee ; Ie peltaste du revers est en general it droite, figure en diagonale dans un carte dont le creux est assez accuse dans certains exemplaires 177, derriere lui une croix ansee en tau. Le grenetis du cadre n'est pas toujours present et dans un cas au moins tres maladroitement realise 178, sur un cote il forme sou vent un trait continuo L'avers est mediocrernent frappe comme pour la serie lion et taureau 179. E. Babelon propose de dater ces monnaies "vers 475", ce qui est sans aucun doute trop tot. - Groupe B 180 : Ie personnage de l'avers est plus avarice sur le cheval, dont le mouvement reste identique it celui du premier groupe mais avec plus de relief. Un cas particulier, la monnaie Levante 60 ou le "satrape" tient it la main une fieur de lotus. Au revers, Ie peltaste est it droite en position mediane dans le carre, lequel est souligne par un grenetis plus net; l'epi de ble est presque toujours present comme symbole secondaire. E. Babelon les situe "vers 450" et l' on peut faire la meme observation que ci-dessus. 171 Kraay 1976,280 sq. ; dans Ie mernc sens E. Levante, commentaire it cettc merne monnaie ; doutes de Casabonne (Istanbul). 172 ACGC 1049 (PI. VII, 7). Mais il convient de noter que Melkart sur l'hippoeampe/ehouette sont Ics themes rccurrcnts des monnaies tyriennes, ef.1c tresor 35 de Elayi & Elayi 1993 ; s'il y a eu influence, elle ne peut se eoneevoir q lie dans Ic sens Tyr vers Tarse. 173 The. 8.46, etc. ; ef. supra p. 213. Contra Casahonne (Istanbul). 174 Levante propose par exemple une fourchette 425-400. J7S ACGC 1036 (PI. VIII, 3). m. Traire, II, n° 504-508, pI. CV, 1-5; SNG France 2 215, 218, 219, 220; von Aulock 5911 ; Cop. 258. 177 Ce revers doit etre rapprochc de SNG France 2 211-212, dont lavers trcs mediocre est derive de eelui de la monnaie 214 (= Traite, 11, pI. 105.6 = PI. VII, 10) : satrape it cheval it gauche; mouehe it droite dans Ic champ. Le traitemcnt du revers de eette monnaie est tres original. archer it droite, aux muscles ires saillants, astragalc derriere 1a tete. Le rapprochement avec Ie groupe A amenerait it placer eette serie resolumcnt dans lc v's. mais il est it noter que Levante 1994, 10 signale deux excmp1aires de la dcrniere monnaie decrite dans le "tresor de Nagidos" datable des annees 380. Le problerne reste done entier. 178 Traite, II, n" 506 (= BMC Cilicia p. 162 n° 3, pI. XXVIII, 6), pI. CY, 3 (PI. VII, 13). 179 Sauf Traite, II, n° 508 (= SNG France 2219), pI. CY,5 (PI. VII, 14) peut-etre Ie plus recent de la seric, it rapprocher de Levante 6D (PI. VII, IS) dans le groupe B. lRO Traite, II, n° 509-512, CY, 7-11 ; CY, 9 = maintenant SNG France 2 223 (PI. VIII, I) ; Levante 60 ; von Aulock 5912.
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- Groupe C 181 : lc cheval est legerement cabre, avec un entourage circulaire en trait plein sou vent apparent et un fort relief. Le peltaste occupe a gauche tout le champ avec lindication plus ou moins nette du sol; le bouclier porte un episerne apparent (gorgone?). La date de 400 et se poursuivant au dela est ccue fois tres plausible. En passant en revue les criteres stylistiques, il parait difficile d'admettre que toutes ces monnaics sont posterieures aux groupes (a)-(e) 182, en effet : le groupe A parait presenter un certain nornbre d'affinites avec le (a) par la mauvaise qualite des avers 183 et le traitement en diagonale du carre au revers. De merne pour le groupe B compare a (b)-(c)-(d) : merne traitement et meme disposition des revers avec l' epi de ble comme syrnbole secondaire. En revanche lc groupe C est clairement postcrieur a tous les autres. Cependant il est evident qu'il convient de proceder a un rapprochement stylistique avec la quatrieme serie des monnaies de Kelenderis 184 pour ce qui concerne en particulier les avers. Par consequent si l' on accepte a la fois la provenance du Celenderis Hoard 185 et sa datation aux alentours de 400, on est amene a considerer cornmc logique que les monnaies de Kelenderis scient les plus abondantes mais aussi les plus rccentes du tresor. Cela pourrait expliquer que Ies rnonnaies des groupes A, B, C en soient absentes, Outre l'absence dans le Celenderis Hoard, l'argumentation de C. M. Kraay pour repousser la date de la serie cavalier/peltaste vers 390 186 repose sur des criteres exterieurs qui ont ete forternent contestes par M. C. Harrison 187. En ce qui concerne la non presence de mercenaires grecs avant cette date on ajoutera aux arguments de Harrison le fait que la "reine" Epyaxa lors de son entrevue avec Cyrus ctait accornpagnee de Ciliciens et d'Aspendiens 188, or Herodote dans le catalogue de I'arrnee de Xerxes 189 indique que les Pamphyliens sont equipes a la grecque, Impliciternent, le "satrape" a la tiare de l'avers ne peut etre que persc pour C. M. Kraay qui suppose 190 que "soon after Cyrus replaced the local dynast with a Persian satrap who, like his predecessor appeard mounted on the obverse, but now wearing a tiara". Cependant I) rien n'indique que le Syennesis ait ctc destitue par Cyrus ou merne Artaxerxes, 2) l'equation "port de la tiare = Perse" relevc cornme le montre l'exernple lycien du postulat gratuit, d'autant que sur la monnaie ACGC 1033 Ie "dynaste" porte deja la tiare 191. Ccla naus amene a reconsiderer au moins particllernent I'hypothese de W. Weiser 192 pour lequcl la monnaie la plus "rnoderne" aurait ctc ernise par ou au nom de
I ~ 'CY, 12-14; CY, 13 = maintcnant SNG France 2 228 (PI. VIII, 2) ; von Aulock 5913 ; Cop. 259 ; Levantc 61. IS2 On comparera par exemple a la situation d' Aspendos ou deux series bien differcntcs paraissent avoir ete emiscs simultancrncnt. IS3 Kraay 1962, pI. II, 10-11 (comparer VII, 3 ct VII, 13). IS4 Kraay 1962, pI. II, 6 ; cf. aussi ACGC 1036 (PI. VIII, 3 a rapproeher de VIII, 4). lSI Kraay 1962 (= IGCH 1255); cf. Davesne 1989, 160-162. Isr, L'cvolution du traitcment du cavalier est de mcmc nature que celie constatcc sur les monnaies d' Aspendos (datees par E. Levante de c. 420-360) : SNG France 3 15-25. IS7 Harrison 1982a. 450-458. ISS Xcn., An" 1.2.12. lS9 Hdt. 7.91. 190 Kraay 1976,28. 191 [] s'agit Ia d'un theme perse connu dont Donbaz & Stolper 1997, 71 donncnt unc illustration dans Ie dernier quart du v- s. La parente est frappante en particulier entre le sceau n" 21 p. 204 etla monnaie de la PI. VII, 15. 192 Weiser 1989,280 ct pI. 19. 19. Avec quelques reserves, cf. supra p. 59 n. 223.
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Cyrus, qui est cerise avoir scjournc vingt jours a Tarse selon Diodore 193. On doit penser en tout cas qu' elle peut lui etre contemporaine au, plus probableme nt, associee a I; effort de guerre de Canon et de Pharnabaze (infra). La presence de nombreux exemplaires de ce type dans le tresor de Nagidos (CH 8, 91) renforce encore I'idee que ces monnaies ont ete frappees a partir de 400 au plus tot, mais a contrario, aucun exemplaire des autres series cavalier/peltaste n'y figure. Que faire alors de ces premieres series? Pour le groupe B se pose indiscutablerncnt le probleme de la relation avec Tissapherne. Nous avons note plus haut que ce dernicr avait emis au mains deux series de monnaies au satrape galopant a droite (Xanthos, Adramyttion [?] 194). Une simple coincidence parait d'autant moins probable qu'une monnaie du groupe B se trouve dans le tresor dit "de Tissapherne" d'ou provient la monnaie prccitee de Xanthos 195. L'hypothese la plus vraisemblable est que certaines de ces monnaies du groupe B ont ete emises au moment de la construction de la "flotte de Phenicie" ]% et que le satrape, dont on connait par ailleurs le gout pour la cavalerie, a repris Ie theme dans son gouvernement occidental. Les monnaics du groupe A sont a coup sur anterieures, La litterature grecque ne nous perrnet de reprendre veritablement contact avec la Cilicie que grace a la campagne de Cyrus et a la relation qui en est donnee dans l'Anabase de Xenophon. Le rebelle est rejoint a Kaystroupedion par Epyaxa femme du Syennesis 197. Ellc apporte avec elle une solde de quatre mois pour la troupe de Cyrus. D'lconion, derniere ville de Phrygie on passe en Lycaonie 198, consideree comme pays ennemi cr a ce titre livree au pillage. Cyrus renvoie Epyaxa par la route la plus courte, on peut envisager un passage a travers Ie Taurus puis au long du Kalykadnos. II penetre pour sa part en Cappadoce au il se rend it Dana, qui ne peut etre que Tyane ]99 Cela suppose qu'a ce moment la "Grande Cilicie" herodoteenne avait vecu, sans qu'on puisse preciser a que! moment l'amputation s'etait produite. La frontiere de la province est done marquee au nord par le Taurus et on y penetre par Ies celebres Partes de Cilicie que le Syennesis est cerise garder ; mais Cyrus ne rencontre pas de resistance. Le dynaste, pris en tenaille entre l'arrnee de Cyrus, le contingent de Menon qui a accornpagne Epyaxa et la fiotte de Tames (trente cinq bateaux et sept cents mercenaires), abandonne dans un premier temps Tarse, sa capitale 200. Le passage est interessant a plus d'un titre : Ie Syennesis a sa basileia a Tarse, nous avons a plusieurs Diod. 14.20.4. Supra p. 126-127 (PI. I, 13 et 14). 195 Hurter 1979,97-108. Sans aueun doutc influcncce par l'opinion de Kraay, elle propose une date de 395-390 pour la monnaie de Tarse du trcsor (p. 107 ; sa pI. 9 A) alors que la monnaic de Tissapherne daterait de 400395. Cela parait paradoxa/. 196 Doutes d'Harrison 1982a, 46-51; Capeeehi 1991,68-69 suivis par Briant 1996, 1010 sur Ie fail que la monnaie avec revers a la ehouette (PI. I,ll) soil a moure en relation avec Tissapherne et a fortiori avec la flottc de Phenicie. Ce nest pas a ceue scrie que nous pen sons. 197 Xcn., An., 1.2.12. Casabonne 1996, 111-115 suggcre qu'Epyaxa la "Cilicienne" tenait, a titre familial, lout ou partie de la Cilicie Trachce avec cornmc eapitale Oura (renvoi a Lemaire 1989). Cc scrait a ce titre qu'elle aura it rencontrc seule Cyrus bien avant lentree de ce dernier en Cilieie. 19H Supra p. 164. 199 Albright 1922,74 sq.; Cousin 1924,259, contra Williams 1996,284-314 qui considere que Tyane est trop septentrionale pour eIre Dana (mais larrncc de Cyrus avail fail d'autrcs detours) el qui en consequence propose de placer ce toponyme a Zeive pres de Porsuk. llJO Xen., An., 1.2.23-24. 193 194
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reprises evoque la signification de ce terme 20 I, et il n'y a rien Iii qui distingue le Cilicien de n'importe que1 haut dignitaire de l'Empire. Autre donnee, Xenophon oppose le comportement des habitants de Tarse, qui fuient avec le dynaste en un lieu Iortifie de la montagne, et celui des kapeloi qui esperent visiblement faire des affaires avec l'arrnee de Cyrus et restent done sur place comme le font les habitants de Soloi et Issos, La merne opposition que celle que nous avions pu observer a propos du monnayage se manifeste donc entre la capitale provinciale, tres impregnee de I'infiuence perse et ii I'attitude legaliste, et les cites cotieres plus ouvertes au monde grec que Cyrus representait, d'une certaine maniere, par son comportement et aussi la composition de son armee. Une explication complementaire nous est foumie plus loin par Xenophon : les troupes grecques qui accompagnent Epyaxa se sont Iivrees a Tarse au pillage et a diverses exactions. Un accord finit par etre coneIu entre Cyrus et Ie Syennesis 202. Ce dernier remet a Cyrus XP~J.HX1:a noAAa (la forme de ces richesses n'est pas precisee). Les cadeaux de Cyrus sont ceux que fait normalement le Roi : cheval avec un frein en or, divers bijoux et armes d'or, un vetement perse. En outre Cyrus promet de ne plus piller et de rendre, dans la mesure du possible, les esclaves captures. Ce recit assez anecdotique laisse l'impression d'une grande ambiguite. L'attitude du couple cilicien est pleine de duplicite, Selon Diodore 203, le Syennesis aurait foumi des troupes aCyrus avec a leur tete l'un de ses fils, alors qu'il depechait l'autre aupres du Roi pour l'avertir des intentions de son frere cadet. A cela correspond le comportement contradictoire de Cyrus qui n'a pas ouvertement devoile ses plans (il est cense d'abord lutter contre les Pisidiens revoltes selon Xenophon ou encore contre les tyrannoi de Cilicie d'apres Diodore), mais il traite Ie dynaste cilicien comme Ie Roi le ferait a l'egard d'un satrape. Une telle attitude ne pouvait plus guere tromper que les plus naifs des mercenaires grecs. Selon de nombreux auteurs 204 cette duplicite aurait perdu Ie dynaste et la Cilicie entrerait apartir du debut du lye s. dans une ere de controle etroit avec ii sa tete des satrapes perses. L' argument e silentio est irrecevable dans la mesure ou les mentions anterieures ii 401 sont en nombre trop peu important pour qu' on puisse conclure que la situation posterieure a400 est differente. A ce moment du debar sur le degre d'integration de la Cilicie dans l'Empire perse il convient enfin de mettre en eeuvre les documents epigraphiques ou figures. Nous pensons d'abord aux textes arameens comme l'inscription de Hierapolis-Kastabala, borne du territoire sacre de Kubala-Cybele (que les Grecs interpretent comme une Artemis) et dont A. DupontSommer date la gravure de la fin du ye ou du debut du lye S. 205. Nous trouvons Iii confirmation de deux faits: la langue officielle de la Cilicie (cf. aussi les rnonnaies de Tarse) est la langue de l'Empire, les cultures traditionnelles, en particulier la religion, ont ete sauvegardees. Deux autres textes arameens ont ete lus a l'autre extrernite de la Cilicie, ii Gi.ilnar-Meydancikkale 206. L'un est une simple funeraire tres rnutilee, l'autre - en aussi
201
202 203 204 201 206
Supra p. 46 et 99 (Kios). 1.2.27. Diad. 14.19.3; ef. aussi 6. A partir de Noldeke 1984,297-298. Dupont-Sommer 1961, 19-23 ; Dupont-Sommer & Robert 1964, 7-15. Cf. aussi Debord 1982, 142. IIs sont publics par Lemaire & Lozachmeur 1987,365-372.
xs». An.,
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mauvais etat de conservation - est un document officiel date par l'annee (seizierne au moins) de regne d'un roi perse (probablement un Artaxerxes) qui donne par rapprochement avec une chronique neobabylonienne 207 Ie nom du site: Kirsu/Kirsi, L'importance du lieu a l'cpoque perse est confirrnee par la presence de bas-reliefs dont la date ne peut etre precisee, mais qui s'apparentent a ceux de Persepolis : deux corteges d'hommes habilles a la perse convergent vers une entree dont chaque cote cst "garde" par un porte-lance. Il s'agit sans aucun doute du palais, de la basileia, d'un dignitaire perse (hyparque ou dynaste local persise"). En tout cas cela montre que la Cilicie Trachee etait bien tenue et integree dans Ie tissu perse ce qui suppose evidernment qu'il en etait de meme pour la Cilicie plane ou ont ete trouves trois reliefs "greco-perses" datant du lye S. 208. En ce qui concerne les operations du debut du lye S., le choix de Conon comme amiral ne va pas modifier la politi que navale du Grand Roi. Des 399, ordre est donne de construire a Chypre une flotte de cent trieres, Des que cinquante sont pretes, l'Athenien passe en Cilicie ou il commence la preparation de la guerre. Cette derniere region conserve son role de point de concentration et de ravitaillement de la flotte. Un peu plus avant dans la guerre, alors que les operations contre les Lacedemoniens sont deja engagees, Con on recoit un important renfort mais Diodore precise 209 que seulernent dix trieres viennent de Cilicie, alors que Ie roi de Sidon en arnene quatre-vingts de Phenicie. Cela ne semble pas plaider en faveur de l'hypothese presentee par E. Babelon 210, selon lequel une partie du monnayage emis par Pharnabaze en Cilicie I'aurait ete au moment ou il est associe a Conon. On penserait plutot au groupe C du monnayage de Tarse decrit ci-dessus. On doit sinterroger sur la signification du monnayage cilicien anterieur aux series ernises pour l'equipement des grandes flottes (qui portent Ie nom du karanos designe) et par consequent sur l'autorite ernettrice. c. M. Kraay attribuait aces monnaies une fonction strictement militaire et, poussant Ie raisonnernent a I'extrerne, concluait par exemple que I' epi de ble sou vent present sur les monnaies de Tarse symbolisait le sitonion des soldats, O. Casabonne 211 a beau jeu de montrer qu'une telle interpretation est abusive. Nous avons deja observe qu'il est particulierernent difficile de mettre en relation des evenements precis avec I' emission d'une serie de rnonnaics, Cela vaut ici encore, et d' autant plus que les symboles peuvent sinterprcter en des sens divergents voire meme opposes 212. Ainsi la monnaie SNG France 2 209 2 13 presentc a I'avers Ie Grand Roi transpercant un lion aux panes dressecs 214 et au revers Ie Grand Roi appuye sur une lance et tenant en main une croix ansee, O. Casabonne 215 souligne que ce symbole est souvent present sur les monnaies de
207 208
Weiscman 1956. cite par Lemaire & Lozachrneur, note precedente. Cf. it Silifkc, Borchhardt 1968, 160-211 : Kizkalcsi, Hcrmary 1984,292-296; Adana, Fleischer 1984,
85-104. Diod. 14.79.8. Babclon 1910.399-402. 211 Casahonne 1995, 162, apres Starr 1977, 92 n. 70. 212 Cf. plus loin it propos de certaines monnaies de Datames. m Fin v--dcbut tv- «: (PI.VIII, 6). 214 Ce theme est Ires frequent dans la glyptique, ef. Boardman & Searisbriek 1977, n" 88 pour la representation qui se rapproche le plus de cellc des monnaics. 215 Casabonne 1995, 163-164. 209 210
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Tarse, mais aussi parfois ailleurs en Cilicie, 11 en conclut que la croix ansee est un emblerne du pouvoir dynastique cilicien, et par consequent que la monnaie sus mention nee, serait un marqueur de la volonte du Grand Roi daffirmer son pouvoir sur la Cilicie. Cela est tres plausible merne si en Cilicic cc theme iconographique est rarement le symbole principal 216, contrairement a Chypre oil une croix similaire mais differentc predornine 217. La double Iegendc TEPII(KON) et TRZ (en arameen) pourrait confirmer que la monnaie a ete frappee aTarsc mais que l'autorite ernettrice ri'est pas la cite. II taut souligner qu' au debut du lye s. plusieurs nouvelles cites battent monnaie : Holmoi 218, Issos 219, Aphrodisias 220 (?). II a ete beaucoup question ces dernieres annees 221 des emissions de I' atelier d'Issos auquel sont attribuees, en plus des series identifiablcs par la legende, dautres que E. T. Newell 222 donnait a Myriandros. La contribution de J. C. Brindley emporte pour I'essentiel I'adhesion, avec peut-etre une Iegere correction pour le debut atteste des series: divinite au trident a queue de monstre marin/lion a droite 223 qu'il date de 405-400 alors que leur presence dans le tresor de Nagidos 224 plaiderait plutot pour la periode 400-380. Observons a ce propos que des exemplaires de plusieurs autres series dIssos sont presentes dans ce merne tresor : groupe 3 de Brindley, Baal/Hcrakles (date par ce dernier de 390-386) 2·25 ; groupe 4, frappe au nom de Tiribaze (infra); groupe 5, Apollon avec sur de nombreux exemplaires la Iegende In] et ADATOPIOY 226/Heraklcs avec comme symbole secondaire #; pour la date Brindley propose 380-370. Observons cependant qu'un des exemplaires est surfrappe sur une monnaie d'Evagoras Ier (411-374) 227 et que ce type figure dans IGCH 1259, generalernent date des environs de 380. 11 n'y a d'ailleurs aucun obstacle a supposer que Issos a pu ernettre cette serie purement civique 228 parallelernent aux monnaies frappees pour Tiribaze 229 ; groupe 6 Une fois aTarse I'll : SNG France 2207. J. Elayi (Istanbul) fait observer que la croix unsee ou plus cxactement Ie symbole similaire peut prendre des formes tres diverses, en tout cas differentes de I' ankh egyptien. Le symbolc cilicicn et lc syrnbolc chypriotc (avec ses deux variantcs) ne sont pas idcntiques. 2]S Athena/Apollon en pied, legende OAMITIKON. SNG France 2 120 (PI. VIII, 12) ; Casabonne (Istanbul) propose avec prudence lcs alentours de 380. de Callatay (Istanbul) retient pour cette breve emission une fourchette 380-373. Observons que ces monnaies sont absentes du tresor de Nagidos, mais ccla ne saurait ctrc considere comme une indication totalcmcnt significative dans la mesure OU la serie est peu abondante. 219 Sur lssos, Bing 1985,97-123. no Attribution d'un monnayage 11 Aphrodisias de Cilicic par Imhoof-Blumer 1908, 204 n" I (a propos de Traite, II, n" 1520 bis; er. aussi Head 1911, 717 sq.). Les stateres sont dates par Kraay, ACGC 1015, des environs de 380 a.c. Des subdivisions dans Troxell & Kagan 1989,280. l.'idcntification repose sur une argumentation assez 2](,
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tcnuc.
Bing 1984 ; Brindley 1993. Newell 1920. E.g. SNG France 2 421 (PI. VIII, 13). 224 Levante 1994. m Levanrc 1994, 9 signale qu' une monnaie apparue dans unc vente et portant I'inscription ILl confirme I'origine de ce groupe. 226 SNG Levante 173. Newell 1914, n° 72 propose dy voir une epiclese du dieu : mais cf. Masson 1992,69 : l' apparition du meme nom sur une monnaic de Soloi plaiderait plutot pour une signature d' artiste. Waggoner 1976. m Brindley 1993, 8. 229 Brindley 1993 observe fort justement que ceue scric qui rcprcsente a Iavers eomme au revers deux divinites en pied avec leurs diffcrcnts attributs sinscrit dans un ensemble homogene erni« par Side, Nagidos (e.g.
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Athena de trois-quarts face/jeune homme de profil date de 380-370 par Brindley 230, date plausible d'un point de vue stylistique et qui pourrait fournir un argument pour abaisser de quelques annees apres 380 la date denfouissement du trcsor de Nagidos. Ce tres intercssant tresor, par ailleurs quelque peu disparate (les monnaies athenicnnes et certaines tarsiotes paraissent plus anciennes que les autres), comporte 1) la serie Ahura Mazda/Baal (infra), 2) un ensemble homogene comme I'observait Brindley 231 illustrant a I'avers comme au revers deux divinites en pied avec leurs differents attributs. Tl parait y avoir la un programme comme pour la serie Ahura Mazda/Baal, indiquant des solidarites economiques et tres probablement aussi un cadre politique Iiant sous la tutelle du satrape les cites de Sidc 232 , Nagidos 233, Holmoi Issos 235, Mallos 236, Tarse 237.3) Cette serie parait etre suivie de peu par une autre au les divinites sont representees sous 1aforme d'une tete de profil (une au deux faces) 238. La plupart de ccs series figurent dans le tresor de Nagidos 239. Les annees 380 sont done caracterisees en Cilicie par I' abondance des frappes affichees comme civiques ou en tout cas a mettre en relation avec les cites 240 avant I' essor du monnayage qui affiche explicitement la responsabilite des officiers perses; ce qui n' ernpeche nullement la reference directe ou indirecte ala cite. Apres l'etablissemcnt de la Paix du Roi, les interets du gouvemement perse se toument anouveau vers Chypre 241. Tiribaze et Orontes sont charges de la mise en ceuvre de l'expedition. Selon Diodore 242, les preparatifs se font a Phocee et Kyme ; puis les generaux installent en Cilicie une arrnee de trois cent mille hommes comportant des cavaliers et trois
ACGC 1012 datee la, it tort, de c. 350, Aphrodite/Dionysos, lcgende NAnt.rKON SNG France 2 30 = PI. X, 11), Holrnoi, Issos, Tarse (e.g. von Aulock 5915), Mallos (Levantc 155; France 2 403 sq.) done datable des annees 3RO.
Cela confirrne res solidarites cconomiqucs, et sans aueun doute politiques, qui lient routcs ces cites. 230 Lc cboix des representations par un portrait et non plus en pied est commun it nombre d' autres cites, cf. Nagidos. 231 Brindley 1993, 9. 232 SNG von Aulock 4770 (Athena/Apollon au eorbeau)*' 2'3 SNG Levante I ; 7-10 (Aphrodite assise tenant une phiale, Eros dcbout it sa gauche/Dionysos avec grappe de raisin et thyrse). Les classcrncnts proposes font figurer d'abord une seric legendee "IAnt.EQ"I* (integralcment ou en abrcge) avant une autre consideree eomme nettemcnt plus tardive, Levante 11-14; France 2 29-41 [30 = PI. X, 111 (prineipalc difference, Eros eouronne Aphrodite, Ie rendu du costume est plus minuticux), lcgcnde NAnt.IKON". I.c tresor de Nagidos montre que les deux l'~gendes ont etc gravees simultancmem ou it peu d'intervalle (cf. France 2 3). 214 SNG Lcvantc 32; France 2 120 = PI. VIII, 12 (Athena Nicephore/Apollon it la phial e), OAMITlKO'\J*' 235 SNG Levante 173 (Heraklcs/Apollon a la phiale), II; d. aussi 174*, France 2 41R (BaaliHerakles). Cet avers est similairc aux revers de la serie de Tiribaze avee Ahura Mazda it l' avers. 236 SNG Levante 155 ; France 2 403-404 (Athena assisc, lance, bouclicr/Hermes ct Aphrodite), MAA*. m SNG Levante 64 ; France 2 237 (pI. VIII, 1l)-23R. Athena assisc similaire it celIe de Mallos/femme agenouillee aux ossclets, TEPLlKON* 2JR Cf. Soloi, e.g. Levante 43-45 ou le profil d' Athena rernplace I'umazone traditionnelle; Nagidos, Levante 2 ; France 2 5 tete d' Aphrodite/tete de Dionysos* ; Tarse, tete d' Aphroditet rj/Hcrakles terrassant Ie lion, Levante ()3 ; France 2 235 (= PI. VIII, !O)*' Ce meme theme de revers sur une monnaie de Mallos avee Kronos it l' avers, Levante 154 ; Issos, France 2 414*, Athena de trois-quarts face/tete juvenile. 239 Elles sont notces ici dun asterisque". 240 Infra pour les lcgendes en -IKON. 241 11 Y avait eu une premiere expedition des 391, menee par Autophradates et Hckatomnos ; mais cettc operation ne semble pas avoir ete mcncc it partir de la Cilicic (supra p. 25R). 242 Diod. 15.2.1-2.
en
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cents trieres. La Cilicie reste la base arriere des operations, c'est de Ia que Tiribaze se rend aupres du Roi, dont il obtient deux mille talents pour la guerre 243. Si l'on suit a la lettre Diodore, cela suppose que I'argent ernis localement eta it destine a l'approvisionnement en ble de la troupe et aussi au paiement des mercenaires. Le choix de la Cilicie s'expliquc par le fait que la Cilicie Pedias est une zone cerealiere et que par ailleurs les monnaies produites utili sent les infrastructures techniques preexistantes des cites ciliciennes. Si l'on en croit Isocrate 244, Ie roi de Salamine avait reussi a detacher la Cilicie du Grand Roi. II convient d'etre prudent face a ce ternoignage dans la me sure OU on a pu noter par ailleurs les erreurs ou les exagerations de cet auteur. A tout le moins la reconquete a ete rapide et complete. On sait la rivalite qui oppose les deux generaux perses, mais nous nous interesserons seulement ici a leur position en Cilicie. Seul Tiribaze ernet a son nom 245. Ce fait, ainsi que l'episode de la negociation avec Evagoras, indiquent qu'il avait alors Ie pas sur son collegue. II parait tout aussi clair que, contrairement a ce qui a ete souvent ecrit, il n'exerce aucune fonction de gouvernement regional (il y a encore tres probablement un Syennesis qui remplit cet office 246) et c'est en tant que responsable de la guerre a Chyprc qu'il cmet deux series de monnaies. La premiere presente au revers Ahura Mazda se couronnant et tenant une fleur de lotus 247; a l' avers 248 Baal avec aigle, legende arameenne TRIBZW 249. Les lieux d'ernission sont Soloi 250, Tarse 251, Issos 252, Mallos 253 par ordrc progressif de l'importance de la frappe. La seconde a comme point de depart la monnaie Traite, II, n° 578 254 : a l'avers, tete de satrape diademe (le diaderne est ici double), legende grecque TEIPIBAZOY ; au revers, tete d'Herakles frise, barbu avec pattes de lion nouees autour du cou, dans un grenetis circulairc. Cette monnaie est consideree par E. Babelon comme une imitation barbare (cf. aussi son faible poids, 9,85 g) mais il signale 255 une monnaic inedite tres scmblable de meilleur style.
243 Diod. 15.4.2. Le Rider 1997, 164 n" 40, suggcre qu'unc partie de ccttc somme aurait pu etre composee de sides ct de dariques ; cf. aussi 15.9.3 : Glos, bien pourvu en argent et en soldats. 244 Isoeratc, Paneg., 161 ; Evag., 62. 24, En dernier lieu Le Rider 1997, 152-153. 246 Bing 1998 complique beaucoup Ics choses en faisant de Camisarcs puis de Datames les sa/rapes de Cilieie. Par exemple p.46 n. 15 il suppose que des 391 Camisares a contrihue aux constructions navalcs qui preludent a lexpedition centre Evagoras. 247 A noter Ie choix fait dunc representation anthropornorphe, a la "grecque". 24S Tel est I' ordrc des faces que propose Le Rider. 249 11 s'agit de stateres ; sur unc monnaie divisionnaire apparait seulement la tete d' Ahura Mazda couronncc : SNG Levante 216 ; Traite, II, n" 577 (=France 2 234 donncc lit it Tarse [ineertaine]) ; von Aulock 5415; legende aramccnnc TRI. 250 Legendc 10; Traite, II, n" 581; SNG Lcvante 49 (PI. IX, 1). En parallclc avec des series eiviques (tete d'Athena/grappe de raisin ef. par ex. ACGC 1017; Levanle 45). 251 Legendc T ou TEP ; Traite, II, n" 582 ; SNe Levante 62; Levante Suppl. I 16. 252 Brindley 1993,4-5; Jegende l1LIKON; Traite. II, n" 579 (=SNG France 2 416); von Aulock 56015602; Levante 175. Lcgende I11Arm e.g. Levante 177 au revers inscription grccquc AMI sur la plupart des pieces (nom du rnonetaire"). 253 Legcndc MAP ou MAA; Traile, II, n" 580 (SNe France 2389-390) ; von Aulock 5712 sq. ; Levante 147 sq. L'irnportance relative de l'emission de Mallos est confirrnee par Ie tresor CH 8, 165 quil eonvient de dater des annees 380 : Casabonne (Istanbul) et non de "vers 330" avec lcs cditcurs, 2,4 Traite, II, p1.l07, 16 (= SNG France 2 232) (PI. IX, 2); ef. Cahn 1989, 104 et pI. I, 17. Cctte monnaie est attribuee it Issos par Weiser 1989, 290, it Tarse par Levantc. m Babelon 1910, 383 sq.
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On rapproche generalernent les monnaies ernises a Soloi 256, Mallos 257 et Nagidos 258, sans indication du nom du satrape, avec les types evoques ci-dessus mais avec quelques nuances dans Ia disposition de la tiare au Ie traitement de la barbe. Ces monnaies sont datees par C. M. Kraay des environs de 370, mais il ne fournit pas d'argument 259. II reste plus probable qu'elIes ont ete emises par Tiribaze 260. Les deux series ont en commun davoir plusieurs lieux demission. La premiere presente une complete unification des types; et cela vaut, bien que moins nettement, pour la seconde. II est aussi dernontre, et cest la une innovation, qu'il y a de la part du satrape une politi que monetaire reflechie et valable pour les cites qui sont Ie pivot de la constitution de la fIotte. Observant la quasi-identite des pieces de Soloi, Tarse et Mallos (alors que celles d'Issos presentent quelques caracteristiques differentes), G. Le Rider 261 suggere que toutes ont pu etre frappees aTarse. Quelle est la chronologie relative? L' absence du nom du satrape sur nombre d'exemplaires de la seconde emission est un (mince) argument en faveur de son anteriorite par rapport ala premiere, mais sa moindre homogeneite pourrait laisser supposer un plus grand etalement dans Ie temps. Pour lsocrate 262, I'affaire de Chypre dure six ans apres la Paix du Roi, ce qui nous arnenerait selon M. Weiskopf aux annees de campagne 38 I et 380, done aux annees civiles 38 I/380 er 380/379 263 . C'est simultanement qu'est menee la campagne contre l'Egypte 264, campagne malheureuse contre Akoris et Chabrias, dont les chefs sont Abrokomas, Tithraustes et Pharnabaze. Abrokomas est Ie satrape de Transeuphratene et c'est a partir du territoire qu'il controle qu'est organisee l'expedition, avec comme point de reunion, la ville d' Ake, Apparemment done rien a voir avec la CiIicie a laquelle on a dernande un considerable effort de guerre pour I' expedition de Chypre. Cela explique que la plupart des historiens et des numisrnates attribuent plutot I'important monnayage de Pharnabaze a la peri ode qui debute en 379, avec les preparatifs
256 Lcgende IOAIKON ou IOAEQN. Traitc, II. n" 563-566 (= SNG France 2 159-162: "monnayage satrapal vers 385 avo J.-c.") ; von Aulock 5682 sq. ; Levante 50. 257 Lcgende MAA ; Traite, II. n" 570 sq. ; SNG France 2 395-397; von Aulock 5716; cf. aussi Levante 153 (PI. IX. 3 anepigraphc) ; Weiser 1989, 290 (et sa pI. XX, 36) Y voit contre toute vraiscmblancc un Arcs. Mcrne type satrapal avec l'avers Aphrodite, von Aulock 57 I 7 ; L.evante 150 ; France 2 391 (PI. IX, 5) - 394. 25K A l'avers un Dionysos, qui justifie I'attribution par Weiser 1989, 290 a Nagidos de la monnaie Bank Leu 7 Auktion 1973, 260. style tres eomparable a celui de la monnaie de la PI. IX, 2 ; a noter en particulier le double diademe (PI. IX, 4 = Weiser pI. XX, 40). 259 Kraay 1976,284 sq. (n" 1018; 1027); d'ou probablemenl par exemple lindication vague de Lcvantc "later satraps" [par rapport Tiribaze I. 260 Tclle est aussi l'opinion de Weiser 1989, 290 sq. el implicitemenl de Levante (du moins en ce qui concerne la chronologie). La probabilite est encore renforccc par la presence dans Ic tresor de "Nagidos", Levantc 1994 (antcrieur it Pharnabaze mais cf. infra) de plusieurs monnaies du type l.evante 66 (PI. IX, 6) avec a l'avers une tete satrapale diademee (lcgendc TRZ en arameen) et au revers un "Persc" assis a droite. 261 Le Rider 1997, 157 (daprcs une idee comparable de Newell 1918, 86 it propos du monnayagc d' Alexandre). 262 Isocrate, Paneg ; 4.141 (voir aussi Evag., 64). 263 Weiskopf 1982, 144 sq. Les numismates reticnnent la fourchette 386-380 pour les monnaies de Tiribazc. 264 Isocrate, Paneg., 4.140. Mathieu, ad. loc., suggerait la date de 382 ; pour Weiskopf 1982, 166, il faudrait plutot penscr 385-383 (pour Moysey 1986, 15 : 386-383).
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d'une nouvelle expedition en Egypte 265. On sait que l'armee, dont la concentration finale a lieu a Ake apres plusieurs annees de preparation, rcunissait des forces considerables : vingt mille mercenaires avec lphicrate (douze mille scion Cornelius Nepos), deux cent mille barbares, deux cents triakontores et trois cents trieres. Plusieurs series peuvent etre individualisees 266 : - Un premier groupe 267 dont le volume parait assez modeste porte a l'avers Herakles de trois-quarts face revetu de la leonte, dans un grenetis circulaire, lcgcnde hlk 268; au revers, un guerrier barbu de profil, portant un casque attique intcrprete tan tot comme un "portrait" du satrape, tantot comme un Ares 269; legcnde TEPLlKON. Le theme de I'aversHerakles - nous rapproche de celui dont nous avons note la presence sur les monnaies attribuables a Tiribaze mais le traitement est plus "modernc" (trois-quarts face au lieu du profil) et cela renforce l'etablissement de la chronologie relative entre les deux series. Des monnaies de ce groupe figurent dans le tresor de Nagidos (CH 8, 91) datable, on le sait, des environs de 380. Ce fait confirrne I'hypothese de R. A. Moysey 270 pour lequel cette serie serait la premiere a faire figurer le guerrier casque au revers et amene a rejeter le classement de A. Lemaire 271 qui s' appuie sur la presence de la legende hlk qu'il pense devoir mettre en serie avec 1c troisierne groupe apres l' autre graphie klk. A partir de ces nouvelles donnees, trois solutions paraissent possibles. Soit cette frappe est anterieure a Pharnabaze 272 ; et il convient en effet de rappeler que I'ancien satrape de Daskyleion n'cst pas nomme sur les monnaies, qu' "Ares" est present sur d' autres series que les siennes. Soit il s' agit bien d'une emission de Pharnabaze pour la pcriode 386-383. Telle etait deja la conclusion de R. A. Moysey m. Mais cornme note plus haut il nous semble que la campagne conjointe d' Abrokomas, Tithraustes et Pharnabaze n' a pas concerne la Cilicie 274. Soit enfin la serie est de peu posterieure a 380. C' est cettc derniere solution que nous retiendrons a titre dhyporhese. II faut alors en mesurer lcs implications: tout dabord abaisser un peu au dcla d' autre part cela supposerait que dans une de 380 275 la date d' enfouissement de CH 8, 91 265 Diod. 15.29.3; 41; cr. par ex. Morkholm 1959, 184-201; Moysey 1986,7-61; :\aster 1989, 191201; Lc Rider 1997, 157. 266 En dcrnier lieu Le Rider 1997, 153. 267 Moysey 1986 seric 1, p. 30, reccnsc 7 cxcrnplaires connus, cr. sa pl. 2, 25 ; voir aussi SNG lion Aulock 5926 ; Levante Suppl. I ]7 (PI. IX, 7) ; France 2 240. Levante 75 prcscnte un exemplaire original OU "Ares" est remplace par un personnage imbcrbe qui pourrait bien etre une Athena (PI. IX, 8). Ccla est a rapprocher des observations de Kraay 1976, 176, a propos de son n 037 (PI. IX, 9). Pour ce dernier Ie personnage. represente parfois avec un casque laure, esr une allusion a la monnaic d'Athenes ; it en conclut que l'emission est faitc pour payer lcs mercenaires grecs. A rioter aussi qu'il n'y a aucunc mention de nom de la personne qui ernet. Sur cette serie, en dernier lieu de Callatay (Istanbul). 268 Naster 1988. 14-17. 2(,9 Cf. par ex. Kraay 1984, 8 : portrait idcalisc du satrape ; Naster 1989 193 relcvc diverses variantes dans le traitemcnt du casque. no Moyscy 1986, 14-15. 271 Lemaire 1989. 143. 172 Telle cstla conclusion de dc Callatay (Istanbul). 271 Suivi sur ce point par Casabonne (Istanbul). 274 De Callatay (Istanbul) rejelte pour des raisons numcriques la liaison entre cetre petite emission et la soldc des mercenaires pour l'Egyptc. 27S Hypothese cnvisagce par de Callatay (Istanbul). 276 Comme y invite aussi la presence dans ce trcsor de la plus rccente des series d'1ssos. C
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breve periode de transition Pharnabaze navait pas modifie profondernent la circulation monetaire. - Un deuxierne groupe, a l'avers Baaltars, Iegende ararneenne (Baal de Tarse) ; au revers "Ares", Ie nom de Pharnabaze est donne egalernent en arameen. II existe un grand nornbre de monnaies a ce type 277 qui doit etre attribue a Tarse a cause de la legende de I'avers. II faut en effet accepter les consequences d'une suggestion d' A. Lemaire 278 qui rappelle que Baal peut etrc un appellatif signifiant maitre, seigneur et que par consequent BLTRZ a toutes chances de designer Ie dieu principal de Ia cite de Tarse dans les caracteristiques duquel nombre d' etrangers ont pu reconnaitre celles de leur dieu majeur (on pensera au choix d' Alexandre de cette representation pour ses monnaies). - L'attribution du troisierne groupe 279 est plus problernatique. II n'est pas sur qu'il convienne de I'associer aTarse, du moins aTarse seule 280. L'avers est occupe par une copie de l'Arethuse syracusaine gravee par Kimon 281 ; meme revers que dans les series precedentes avec I'inscription bilingue hlk KIAIKION. R. A. Moysey 282 montre que des identites de eoins existent avec certaines monnaies de Datames. Les deux series ont done ete ernises successivement 283 mais sans solution de continuite. Ce groupe est quantitativement Ie plus important 284. - Un dernier groupe a etc emis a Nagidos, comme le prouve la legende NArIMKON de I'avers ou est representee une Aphrodite. C'est la le theme habituel des monnaies de cette cite mais eomme Ie fait observer C.M. Harrison 285 la deesse est ici "persisee" ; au revers le merne "Ares", legende au nom du satrape en ararneen et hlk ; il s'agit nurneriqucment d'une petite serie, Ajoutons eventuellement Kelendcris selon Ie sens que I'on attribue a la legende KEAEN~EPITIKON 286. Au terme de ee panorama sur la Cilicie a la fin du v- et au debut du lye s., il est clair que sans Ie monnayage (rnonnaies, contremarques, tresors) nous ne saurions pratiquement rien de I'histoire politique et institutionnelle de cette satrapie. En depit des limites imposees par ce type de source, il est loisible d'arriver a quelques conclusions generales. Tout dabord,
277 Moyscy 1986,30-34; SNG von /sulock: 5927-5933; Levante 71-74 (PI. IX, 10 = Levanie 72); Levante Suppl. I 17; France 2251-257, etc. ns Lemaire (Istanbul). 279 Davesne 1989, 166, metjustcment en doutc cettc attribution (cf. deja Ia prudence de Babelon 1910, 394-398) ; iI pense pour sa part qu'il faudrait peut-etre cIasser cette serie a Soloi. Obscrvons seulement qu'il existe plusicurs series qui peuvent etre frappecs simultancmcnt dans plusieurs cites et que la Iegende klk et/ou KIAIKION plaiderait plutot en favcur d'unc telle solution. 280 Deja Babelon 1910, commcntaire du n" 403; voir aussi Kraay 1976,223, avee lidee que seules les monnaies avec la Iegende Baal de Tarse sont assurernent de Tarse. 2S1 Moysey 1986, 34-40 ; Nastcr 1989, 196 sq. ; SNG Cop. 26 I-27 I ; von Aulock 59 I6-5925 (PI. IX, 11 = von Aulock 59 I 9) ; Levante 69-70 ; France 2 24 I -250, etc. m Infra p. 360. m Nastcr 1989 pense que ces series ont ete emises simultancment, eela parait historiqucmcnt assez peu probable si 1'on prend en compte l'figc, Ia carriere, Ie statut des deux personnes. 2S4 Sur Ic caractere exceptionnel du point de vue numerique des groupes 2 et 3 ct des trois emissions de Datames, de Callatay (Istanbul). 2S5 Harrison 1982,210; cf. aussi Casabonnc 1996 b, 126. 2R6 SNG von Aulock 5753 ; Traite, II, n" 599 = France 2 23 (PI. IX, 12) ; sur la monnaie de Kclenderis infra p. 341.
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la quantite de monnaies emises est considerable, bien plus importante par exemple que celle des Hekatomnides 287. La difference parait aussi resider dans le fait qu'il y a plusieurs autoriies emettrices : a I' evidence les cites elles-rnemes, le Syennesis a Tarse dans la deuxierne rnoitie du ye s. (sans qu' on puisse Ie demontrer) et dans Ie courant du lye s. avec Tiribaze l'apparition de generaux 288 en charge doperations militaires d'envergure necessitant la construction et l' armement de flottes puissantes ainsi que l' engagement de nombreux mercenaires. 11 est tout a fait plausible que ce type d' organisation dualiste a fonctionne des la fin du yc s. avec Tissapherne au moins. Une difference sensible : la composition du tresor monetaire IGCH 1255, dit "de Kelenderis" 289 date des environs de 410 et ou I' on note I'importance des monnaies de Chypre, d' Athenes 290 et - majoritairement - de Kelenderis (quelques monnaies de Tarse, Soloi, Mallos). Nous sornmes au debut des grandes emissions ciliciennes. L'expedition conjointe de Pharnabaze et de Conon a probablement pour consequence une augmentation du volume de ces emissions tarsiotes. 11 faut aussi souligner que la construction d'une flotte coute cher, sans meme qu'elle soit construite sur place : il ne s' agit pas seulement de solder des rnercenaires, d' autres aspects sont aussi onereux et concernent tout un territoire (ports et arriere-pays). Fourniture du bois, transport, agres, equipernents portuaires, ravitaillement etc. L'integralite de ces aspects ne pouvait etre couverte par la corvee. Ellc suppose des depenses tres importantes et inscrites dans la duree en amont de la mise aI' eau de la flotte. D'oii provient l'argent? Comme nous lavons vu plus haut, pour une part directement de la caisse centrale mais il parait tout aussi clair qu'une partie est tiree du prelevement tributaire. Tel est le cas a I'epoque du mandat de Pharnabaze, avec I' apparition des legendes hlk, klk ou KIAIKION, qui invitent apenser que I'on raisonne a I'echelle de la satrapie sans qu'il faille en inferer comme le fait C. M. Kraay 291 que Pharnabaze est satrape de Cilicie. Au mieux pourrait-on traduire "Phamabaze en Cilicie", Nous avons vu plus haut que des I'epoque de Tiribaze d'autres legendes avec un suffixe en -ikon etaient apparues : TEPIlKON, IOAIKON, IIIlKON, NArIL'lIKON (attestee aussi sous Pharnabaze et au dela), KEAENL'lEPlTIKON, OAMITIKON (difficiles adater avec certitude). C. M. Kraay 292 conclut apres dautres que le neutre singulier trahit l"'initiative d'un pouvoir exterieur" alors que le banal genitif pluriel sexplique par "lautorisation du gouvernernent de la cite" et cette hypothese scduisante a ete reprise par de nombrcux specialistes 293. Cette solution n' est pas acceptee par Ph. Gauthier 294 qui fait observer qu' a elle sculc la legende ne saurait constituer une preuve irrefutable alors que les series sont par ailleurs identiques (parfois merne avec des identites de coins). La monnaie SNG France 2
Dc Callatay (Istanbul). La presence de ccs dcrnicrs ncxclut nullcmcnt l'existence dune autoritc politique rcgionalc, mais on ne pcut que souligncr lc silence des sources. 2S9 Cf. Davesne )989. 291) En nornbrc important encore dans CH 8, 91. 29] Kraay 1976, 282. 292 Kraay 1976, 278 sq. 293 E.g. Levantc 1994, 8. Yoir aussi l'introduction a "lNG France 2 (on nc saurait ctrc aussi categorique pour I'opposition "civique" "satrapique" a partir des legendes). 294 Gauthier 1975, 166-167 suivant Babelon 1910, 852-855. 2R7
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209 porte la double legende TEPLI(KON) et TRZ en arameen. Faut-il en conclure que les deux legendes sont deux graphies d'une meme realite et qu'il n'y a la qu'un phenornene de mode 295? II parait cependant clair que dans certains cas on a tenu a marquer la difference sinon pourquoi a Kelendcris avoir decide d' ecrire in extenso I' encombrant KEAENL1EPITIKON296 au lieu de la formule habituelle KEA au KEAEN? Nous retiendrons done a titre dhypothese qu'a cote (voire simultanernent) des frappes civiques ont dfl exister des frappes issues de Ia perception du tribut (rappelons une fois encore que lc karanos etait habilite a en disposer) et qu'il s'agissait d'indiquer la provenance du metal qui servait a frapper ces monnaies, quelque soit par ailleurs Ie lieu de la frappe. Si l'on sefforce de faire la synthese des elements reunis ci-dessus concernant les peuples "revoltes" selon Diodore, il pourrait apparaitre comme un complet paradoxe de conclure qu'aucun de ces peuples n'echappe ala tutelle du pouvoir central. Comme nous l' avons observe il est pourtant avere qu' aucun ne peut etre considere comme rebelle en permanence, pas merne la Pisidie pourtant presentee au meme titre que la Mysie comme le meilleur exemple d'une telle situation. Certes les zones de montagne, pour I' Asie Mineure meridionale toutes les regions tauriques, avaient de particulieres facilites a se dispenser du versernent du phoros et des secteurs entiers ant du pendant de longues periodes echapper au controle des satrapes (la Cataonie d' Aspis 297, la Lycaonie, I'Isaurie 29R, une partie de la Pisidie, de la Cilicie Trachee) et representor des foyers dinsecurite, en particulier dans les periodes troubles de l'histoire de l'Empire, et done tout naturellement dans les annees 360, comme elle profiteront plus tard de toutes les occasions de s'affranchir de Ia tutelle du pouvoir central 299. Par consequent, on admettra volontiers avec M. Weiskopf qu'il s'agit la d'evenements a caractere essentiellement local. Cependant il est tout aussi assure que de tels desordres devaient etre encore accentues lorsqu'ils se greffaient sur des conflits de plus grande portee qui leur servaient de pretexte, II n'y a done rien d'anormal au fait que Diodore (au sa source) ait pu avoir la vision d'une conflagration generalisee merne si toutes les operations militaires ne se situaient pas au merne niveau et n'avaient pas Ie merne but. L'ordre suivi par Diodore pour lcs satrapes n'est pas indifferent. R.A. Moysey 300 pense qu'il est dfl aux liens etroits qui existent entre Ariobarzane et Mausole d'une part, et Ie monde grec de I'autre.
Cf. aussi la graphic IOAIKilN : SNG Levante 160; sur cctte question Casabonne (Istanbul). SNG France 2 77 (PI. VIII, 5) ; Gulbenkian 798. En observant d'ailleurs que eette (rare) monnaie est la seule it presenter au revers un carrc en ereux qui la differcncie netterncnt des autres emissions. 297 Cornelius Nepos, Dat., 4.1-5. Aspis qui s'emparc du montant de celui qui transite par la route royale. 29S Sur ees regions Diod. 18.22.1-4; Str. 12.6.2-3 et supra p. 164. 299 Briant 1976, 185-6. 300 Moysey 1975, 100, cf, 1986, 24 ; il y voit la preuve de l'hellenocentrisme de Diodorc ou de sa source. De fait, lcs deux satrapes ainsi privilcgies, Ariobarzane et Mausolc, sont ceux qui ont les contacts les plus etroits avec le monde gree et a contra rio l'ahsence de Datames, element essentiel de la rebellion semble aller en ce scns, tout comme la place modeste qui est attribucc it Tithraustes. Mais nous vcrrons plus loin que la situation personnelle des deux satrapes suftirait it expliqucr ce choix. 295
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Ariobarzane Fils ou here de Pharnabaze 301, il tient la satrapie de Daskyleion depuis les alentours de 387 302 . Sa "rebellion" est anterieure a 362/361, faut-il la mettre en relation avee la saisie de la basileia de Mithridate a la mort de ee dernier 303? Malgre M. Weiskopf 304, il semble qu'apres avoir ete mis en difficulte par Autophradates et Mausole il a rcussi a se maintenir dans une partie au moins de ses possessions (jusqu'en 363/3627). Mausole Satrape-dynaste de Carie 305 de 377 a 353, soit pratiquement durant un quart de siecle, son "regne" eonstitue l'un des temps forts de I'histoire de la Carie. Si I'arnbiguite de son titre ne fait guere problerne 306, sa position dans la "revolte" est beaueoup plus sujette a caution. La fin rapide de celle-ci n'altere probablement 307 en rien sa position qui, des avant 362, etait fondee sur l'attente et la prudence.
Orontes M. J. Osborne 308 parait avoir etabli que ce dernier est titulaire d'un commandement important dont le centre est la Mysie pergamenienne et qui s'etend sur une partie de la cote. Cette creation temoignerait d'un nouvel equilibre geopolitique de l'Asie Mineure occidentale apres la fondation de la satrapie de Carie qui enlevait toute pertinence a une satrapie centree a Magnesie de Meandre 309.
Autophradates Satrape de Sardes depuis qu'il a succede a Tiribaze, sa situation est comparable a celle de Mausole; tant par la tiedeur de son engagement dans la revolte que par lcs consequences pour lui de I'echec de la sedition. Nous verrons plus loin cependant qu'il ne subsiste aucune preuve de sa presence en Asie Mineure apres les cvenerncnts de 362/361. II va de soi qu'Artabaze dont le soulevernent est largement posterieur n'a pas a apparaitre ici. Diodore a choisi de parler de la revolte de Datames de facon separee, et cela reflete probablement une realite, merne s'il la situe dans Ie merne contexte chronologique.
.101 Judeich 1895.832 s.v. "Ariobarzancs': ; Beloeh 1923, 150-1 penche pour un frcre cadet de Pharnabazc, mais il n'est pas exclu qu'il s'agisse plutot d'un fils d'un autre manage, supra p. 98.
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Xen., Hell., 5.1.28.
11 subsiste une grosse difficulte dans l'interpretation de Diod. 15.90.2. Faut-il avec Beloeh 1923, 149150, refuser toute valeur it ce passage (de merne Weikopf 1989, II conclut it une crreur de Diodorc) ; si I'on decide de le maintcnir, la basileia en question est-elle la d/irea de Kios ou la satrapie de Pont-Cappadoce. Nous pencherions plutot, supra p. 99, pour la dorea de Kios, 304 Weiskopf 1982,381-385. 105 Hornblower 1982, spccialcmem 137-182. 306 Supra p. 137. 107 Infra p. 352. 308 Supra p. 149. 309 Supra p. 150. 303
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2. ESSAI DE RECONSTRUCTION DES EVENEMENTS C'est a W. Judeich, avec quelques retouches dues a K. J. Beloch 310, que l'on doit la version des evenernents qui est devenue la "vulgate" jusqu'a ces derniercs annees. Pour lui, nous sommes en presence d'un soulevernent generalise dont Orontes est le chef. Le point culminant en est l'annee 362/361 comme I'indique Diodore (que l'on suit le plus exactement possible). Les operations depassent largement Ie cadre de l'Asie Mineure : I'ambition d'Orontes est de supplanter Ie Roi 311 et il menc une action conjuguee avec le roi rebelle d'Egypte. Les forces convergent en Syrie-Phenicie 312 pour attaquer Ie Roi. Mais assez rapidement les rebelles, ou plus exactement certains d'entre eux (Orontes, Rheornitres), se rendent au Roi dans I'espoir d'obtenir non seulement leur pardon mais aussi une amelioration de leur situation personnellc. Seuls Ariobarzane et Datarnes disparaissent. Pour les autres, il y a un simple retour au statu quo ante, Artabaze ayant remplace Ariobarzane. Se produit alors une deuxierne revolte a laquelle partici pent non seulement Artabaze mais aussi Orontcs alors qu'Autophradates et Mausole restent loyaux au Roi. Ce schema, dont je ne donne ici que les tres grands traits, suscite beaucoup de reserves et doit etre corrige en bien des points apres les etudes de M. J. Osborne et M. Weiskopf. Les pages qui suivent ne pretendent pas resoudre tous les problemes et supprimer les pans d'obscurite, II sagit de propositions revisables et dont chacun pourra juger de la pertinence.
2.1. La "revolte" des satrapes occidentaux Si l'on met a part son opinion concernant la localisation et la nature de son cornrnandement, Ie principal apport des travaux de M. J. Osborne a ete sa critique des positions traditionnelles sur la duree du mandat d'Orontes en Asie Mineure occidentale et son role eventuel apres 360. La plupart des crudits (e.g. R.A. Moysey, S. Hornblower, M. Weiskopf) admettent a sa suite qu'Orontes n'est en aucune facon associe a la revolte d' Artabaze. Ce point doit eire considere comme acquis. Notons simplement ici qu'il a comme consequence de creer un vide d'une vingtaine d'annees pour la satrapie de Sardes 313. La remise en cause proposce par M. Weiskopf est beaucoup plus profonde. En voyant les choses sommairement on peut dire que pour lui il n'y a pas de revolte des satrapes, mais que certains d'entre eux ont du etre consideres comme rebelles par Ie pouvoir central. La plupart des faits sont expliques par les relations conflictuelles d'autorites voisines (e.g. Ariobarzane-Autophradates, Artabazc-Autophradates) ou merne a l'interieur d'une satrapie (Orontes-Autophradates). Mausole et Autophradates n'ont pas pris part a la revolte. Ariobarzane et Datarnes se sont declares bien avant 362/361 (probablement scparernent) et Ie premier est deja mort en 362 et rem place par Artabaze. Orontcs, hyparque d'Autophradates, n'est qu'un "lesser officer" mecontent de son sort 314, son action n'a de Judeich 1892, 193-225 ; Beloch 1923,254-7; Olmstead 1948,408-429; Meloni 1951,5-27, La paternite de ccuc idee, tres largement contestee aujourd'hui, revient a Babclon 1893, LXXIII, a propos du statere d'or de Lampsaque (supra p. 152). 312 cr. litineraire propose par Moysey 1975 sur la carte anncxcc a son ouvragc. m Infra p. 352. 314 Weiskopf 1982, 406 : "Opposition to Artaxerxcs does enter into consideration for both men' aims [Orontes et Rhcomitrcs] were confined to attaining stronger positions in the far west at the expense of highest officers" ; cf. aussi Weiskopf 1989, 69-91. 3111
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valeur que regionale voire rnerne locale. Pour Ie pouvoir perse, l'affaire importante c'est Ie soulevernent de l'Egypte 315. Les sources grecques ont tout ernbrouille 316 et n'ont guere de credibilite. Si nous reprenons les donnees, une premiere observation doit etre faite : il est impossible de fournir un recit detaille et precis des evenements qui ont jalonne la revolte ; tout au plus peut-on souligner que celle-ci a eu une certaine ampleur et qu'Orontes y a joue un role determinant 317. Ces deux conclusions doivent etre inferees de Demosthene, Sur les symmories 31, qui, lorsqu'il se propose de decrire un soulevernent important ayant entraine Ie recrutement de beaueoup de mercenaires, prend precisernent, encore en 354, l'exemple de la revolte d'Orontes 31S. Ce dernier a etabli ses bases arrieres, un camp retranche, dans Ie massif du Tmolos. Les operations se deroulent en partie en Lydie contre les generaux du Roi, aux alentours de Sardes 319, et contre Autophradates nornmement a Kyme 320. Pour mener abien son entreprise, Orontes a recrute dix mille mercenaires grecs et nous avons une double affirmation que ces derniers constituent la force materielle mais aussi ideologique du satrape. C'est ce qu'indiquent nettement : dabord le recit de Polyen, OU I'on voit comment il trompe Autophradates en equipant a la grecque une partie de ses troupes "barbares" et en lui faisant croire qu'il a recu un important renfort de mercenaires grecs 321 et peut-etre aussi Ie droit de l'emission monetaire de Kisthene pour Orontes avec Ie type inhabituel du peltaste accroupi 322. Une partie des operations s'est aussi deroulee en Troade 323, mais il faudrait 315 Weiskopf resume ainsi scs themes p. 405 : "Crucial to reconstruction of the satrap's revolt as a massive destabilization of the Achaemenid far west has been the assumption that there existed at least the plans for widespread cooperation (if not ajoint invasion of sectors cast of the Syrian desert) between the rebel satraps. led by Orontcs, and the king of rebel Egypt, Tachos. However, the thrust of my reconstruction so far as been that neither Autophradates nor Mausollos were disloyal, and that Orontes' activities seem confined to an outward extension of his base in Mysia... He tries to exploit fighting among the highest officers in Sparda and Dascylium and fighting within the house of Ariobarzanes as a means to enhance his own power". 116 Cf. p. 340 : "lsocrates' false perceptions were shared by Ephorus and restated by Diodorus". cr. deja les remarques de la p. 338 ou Weiskopf croit pouvoir dcceler les tares du recit de Diodore qui sont celles aussi d'Hcrodotc, Xcnophon, Ephore, Isocrate... les auteurs modernes cloucs au pilori sont en bonne compagnie! 317 Malgre Weiskopf 1982, 413 pour qui "since Orontes had been a lesser officcr., we may assume he drew his principal support from among lesser officers", Weiskopf ne tient pas compte du passage de Dernosthene, 318 "Quelques uns craignent il est vrai qu'avcc son or (Ie Roi) ne recrute force mercenaires. A tort sclon moi. Car sans doute lorsqu'il s'agit d'aller comballre soit contre l'Egypte soit contre Orontes ou d'autres barbares, beaucoup de Grees voudront bien s'cnrolcr it son service" (Trad. Croiset, CUF). Ce discours est date de 354, mais il nc fait plus de doute que son propos s'applique ala revolie des annccs 360 ct non it celie d'Artabaze (sur ce point, iI convient de suivrc Osborne 1973, 544-551 ct Weiskopf 1982, 416 et note 115) ; ccla rcnforcc l'idee que plusieurs annccs aprcs, cctte revolte etait encore presente a tous les esprits it Athenes. Qu'elle pouvait rnerne avoir valeur d'exernple, 119 Polyen 7.14.2: Orontes est retranche dans Ie Tm6Jos d'ou illance un raid contre Sardes ; il se procure ainsi un enorme butin. 120 Polyen 7.14.3 : ces afTrontements avec Auiophradatcs ne peuvent etre posterieurs a la revolte de 362/ 361 (infra) mais rien ne permel de preciser la chronologie relalive (el done absolue) des stratagernes relenus par Polyen (d. par ex. la me me situation pour Tissapherne, 7.18.1 et 2. Weiskopf 1982, 395-398 s'efforce de minimiser la nature etla portee de ces cvcnemcnts). 321 En 7.14.2 Orontes est dit avoir avec lui dix mille mercenaires equipes lourdement. Autophradates en a Ie me me nombre avec en plus de la cavalerie. Plus interessant, en 14.3, Orontes a ete coupe de ses allies par une manceuvre d"Autophradatcs mais il reussit a se degagcr en faisant croire qu'il a recu de nouveaux contingents de mercenaires ; pour cela, it equipe it la grccque un certain nombre de scs barbares. 322 Babelon 1923, p1. 88, n" 22 (supra p. 151 n. 279). 121 Infra p. 347.
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pouvoir preciser quand et dans que] contexte. Faut-il penser que c'est seulement au moment ou Autophradates retient Artabaze (infra) ou deja lorsque, quelques annees auparavant, ce dernier a ete designe pour succeder a Ariobarzane? Charidernos tient une partie seulement de la Troade, il profite de I'arrestation momentanee d' Artabaze pour tenter de se constituer une principaute autonome. Qu'en est-il de la zone cotiere pendant tout ou partie de la meme periode? On a longtemps cru pouvoir resoudre partiellement la question en attribuant a Lampsaque un monnayage assez abondant frappe aussi bien en or, en argent et en bronze et dont la caracteristique commune etait un revers au Pegase. Les monnaies d' or sont presque a coup sur emises reellernent a Lampsaque et s' inserent sans difficulte dans les series de cette cite mais elles sont anepigraphes. Ce sont pourtant ces dernieres qui ont servi de support a la these d' E. Babelon 324 deja esquissee avant lui 325 : la frappe de I' or est bien la preuve qu'Orontes aspirait a la royaute 326 et pas seulement, comme l'indique Diodore, a augmenter son ressort de commandement. E. Babelon avait ete assez largement suivi 327 dans cette hypothese aventureuse par nombre de savants avant la remise en cause radicale de H. A. Troxell qui reattribue a Adramyttion et Kisthene les monnaies d'argent et de bronze qui portent cette fois Ie nom d'Orontes (au revers pour Adramyttion un protorne de Pegase tres sembi able a celui de Lampsaque ; pour Kisthene un sanglier aile). II n'y a done plus de raison de reconnaitre Orontes dans la tete satrapale du monnayage d'or de Lampsaque v''. En poussant Ie raisonnement a son terme toutes Ies emissions connues sont frappees dans une region qui peut relever legitimernent dOrontes, il n'est en rien assure qu'il sagisse d'un monnayage insurrectionnel. Dans la mesure ou I' on tend a reduire Ie role et les ambitions d'Orontes dans la part occidentale de I' Anatolie 329, il parait un peu paradoxal de privilegier Ie Prologue 10 de Trogue-Pornpee 330 qui en saluant Orontes du titre de satrape d'Armenie indique qu'il a ete defait en Syrie par Ie Roi. Si en definitive on acceptait cette version, elle
324 Cf. Babelon 1910, 107-110, et plus rccemmcnt Baldwin 1924. Cf. encore les remarques critiques de Weiskopf 1982, 388-394 et notes 71-73. On ajoutcra au monnayage d'or, Ie statere de la vente de Monaco, avril 1985 n" 346, gravure diffcrentc par exemple, de l'exemplaire prescnte par Kraay & Hirmer 1966, pl. 202, ce qui implique qu'il y a eu plusieurs frappes et attcste l'importance de ces series (Gulbenkian 689 = PI. 11,15). 325 Essentiellement par J.-P. Six. 126 En rapprochant aussi a tort le tctradrachmc d' argent au revers duquel figure une lyre (peut-etrc cmis a Colophon, cf. supra p. 62) avec la legendc BALlA, nouvelle "preuve" de la pretention au titre royal. Babelon 1910, 114 et n. 1; Osborne 1973,517 n. 14, retient cette hypothese quoique avec une relative prudence; Moysey 1975, 114 sq., de Iacon beaueoup plus categorique, mais il semble l'avoir abandonnee dans Moysey 1989. 127 Cf. par exemple Bodenstedt 1976, 74 et pl. 2, 13-14, qui releve des resscmblanccs entre les series de Phocee et de Lampsaque ; mais sur les comparaisons de "portraits", cf. Harrison 1982a. m Troxell 1981, 27-37, refuse eette attribution, suivi par Moysey 1986,28 qui trouve la un argument pour minimiser Ie role d'Orontes dans la rcvolte et suppose que, s'il s'agissait bien de lui, il aurait fait figurer son nom sur les monnaies ; cf. aussi 1989, II, oii il ernet plusieurs hypotheses (Ariobarzane, un monnayage eivique), dautres sont possibles encore (supra p. 154). 129 Hornblower 1982, 178-9 et n. 69. Sur les indications de Kraay, Hornblower constate qu'au IV e s. Clazornenes, Teos, Lampsaque, peut-etre Ephese, Kios, Rhodes, ont ernis des series monetaires en or. C'est probablement l'indication d'un etat de crise : il s'agit en effet le plus sou vent d'un monnayage de necessite en pcriode diffieile (les cvenemcnts de 362 ou l'arrivee du corps expcditionnaire de Philippe [Pl. Weiskopf 1982, 391-392. 330 Cite supra n. 5. Le theme de la strategic du "rendez-vous" (en francais dans le texte) d'Orontes et des autres revoltcs avec Taches pour envahir la Perse, tel que Ie decrit Moysey 1975, 107-108 (cf. ses cartes) et qui s'appuie sur le seul Trogue Pornpcc, Prol., 10, parait relever de la politique fiction (cf. cependant Hornblower 1982, 180 et encore Moyscy 1986, 26-27).
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supposerait une conftagration generalc impliquant la quasi totalite dc I' Asie Mineurc. Observons qu' a ce jour nous n' avons, par ailleurs, dinformations sur des operations militaircs que pour Ie quart nord-ouest de la Peninsule si I'on met a part Datames (comme le fait Diodore) et alors que Trogue-Pornpee enregistre les defaites successives de Datames, Ariobarzane et en dernier lieu Orontes, Avec Orontes, nous avons vu que Diodore designe Ariobarzane et Autophradates comme les principaux chefs du mouvement. En ce qui concerne Ariobarzane, aucun doute possible sur sa rebellion mais M. Weiskopf remet en cause la date de celle-ci. Pour lui Ariobarzane est mort depuis longtemps au moment ou Diodore situe l'acrne de la revolte, c' est-a-dire en 362/361. Reexaminons les faits. Nous avons note precedemment que des 3661 365, Ariobarzane est considere comme rebelle par Ie pouvoir central qui envoie Autophradates et Mausole contre lui. Artabaze n'est pas mentionne dans les sources qui relatent les evenernents d'Assos et/ou Adramyttion mais il ressort d'autres ternoignages qu'il controle une partie de la Troade (au moins l'interieur) des 362 et peut-etre merne avant. M.Weiskopf en eonclut 331 qu' Ariobarzane a disparu de la scene et qu' Artabaze l'a rernplace. Aucune source antique ne permet d'etayer cette affirmation qui est en contradiction avec le recit de Diodore 3.12. Malgre cela, il est assez tentant de suivre au moins sur ce point cette hypothese. Comme nous l'avons note plus haut 333, l'exploitation systematique de nos informations concernant Ariobarzane, en particulier chez Diodore, amene a penser que ce dernier est mort au plus tard en 363/362. Faut-il penser qu'Artabaze lui a irnmediatement succede ou plutot qu'une peri ode dinterregne assez confuse s'ouvre a ce moment et prend fin avec la reddition generale des rebelles. Si I'on accepte notre grille d' analyse du recit de Diodore on remarque que c'est Ariobarzane qui est nomme en premier (logiquement puisqu'il est Ie premier a se rebeller) mais que tout aussitot (15.91.1) Diodore indique qu'Orontcs est designe comme Ie stratege de ceux qui se sont revoltes, II doit sans doute ce choix a ses qualites personnelles, ses talents militaires, sa naissance et ses liens matrimoniaux, mais cela s'cxplique mieux si Ariobarzane a disparu a cc moment. En bref, il y a done beau coup plus probablement succession de revoltes dont nous sommes loin de posseder toutes les donnees. Au depart, Artabaze ne controle qu'une partie, Ia moins importante en superficie, de la satrapie dont il est le titulaire reconnu. II doit faire face a la rebellion reclle ou feinte de Mithridate dans la partie orientale de la Mysie mais aussi a la trahison de Charidernos, Ce dernier est recrute par Memnon et Mentor pendant qu' Artabaze est arrete par
Dans son paragraphe sur la chute de la maison d'Arioharzane, p. 38 1 sq., Weiskopf expose son "intime conviction" de la disparition prccocc d'Ariobarzane. Son principal argument est l'ahsenee dans nos sources de toute collusion entre les deux satrapes ; mais aucun auteur, sinon par les quelques bribes que nous livre Polycn, ne donne la moindre indication sur des campagnes qui ant pourtant bien eu lieu. m Diad. IS.90.3. 333 Supra p. 100. Si 1'on admet la veracite de l'allcgation de Diod. 16.90, sur les origines de la dynastie ponti que et qui situe en 363 l'acquisition de Ja basileia de Kios par Ariobarzanc, il faut alors jouer de Diodore eontre lui-rncmc. Quel est l'Ariobarzane qui a fait eette acquisition a cette date') Manifestement, a moins que son recit nc soit totalemcnt incoherent, il y a confusion de deux personnes. Si Arioharzane (lc fils de Mithridate) a bien rccupere son bien familial en 363, il taut supposer qu' Ariobarzane (lc satrape de Daskyleion) est deja mort. Supra p. 304.
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Autophradates 335. M. Weiskopfw se debarrasse rapidement du temoignage de Dernosthene en imaginant un incident de frontiere entre Ies deux satrapcs, or ce n'est pas du tout ee que suggere Ie terme gree (JuAArI'Vl~. II est plus simple de penser qu'Artabaze se trouve a ce moment aupres d'Autophradates et que par consequent il ne controle pas encore sa satrapie. Tl y done bien aete de "rebellion" de la part d'Autophradates, et l'on peut penser qu'il s'agit la d'un gage donne par le satrape de Lydie a ses voisins qui sont deja en etat de revolte ouverte. Cela ne signifie pas forcement qu'il a en suite participe activement a leur entreprise. On peut penser qu'avec cette peripetie la situation etait au comble de la confusion et que Charidemos a juge le moment opportun pour se tailler une principaute en Troade. Tl s' empare facilement de Skepsis, Kebren et Ilion 337. Enee donne des details supplementaires sur la capture de cctte derniere cite 338 qui est alors dirigee par un gouverneur 339 fidele a Artabaze. Grace a un stratagerne, la ville est prise mais manque de passer aussitot aux mains d' Athenodoros, officier loyaliste bien connu par ailleurs, Charidemos est incapable dassurer Ie ravitaillement en ble de sa troupe (sur place ou par la mer) alors qu' Artabaze libere par Autophradates s'cn procure en abondance. Demosthene precise qu'il vient de HautePhrygie, Lydie et Paphlagonie (§ 157). Charidernos se retire par convention du territoire conquis et, s' embarquant aAbydos 340, gagne la Chersonnese. 11 ressort de ce recit que les cites de Troade sont ballottees entre les diverses obediences dans une guerre qui les depasse, Faut-il conclure pour autant qu' elles sont gravement atteintes par ces troubles? Le recit d'Enee montre plutot que les affrontements ont lieu entre rnercenaires et celui de Dernosthene (§ ISS) indique qu' elles n' ont pas Iorcernent souffert d' exactions. La position de Mausole est tres comparable a celie d'Autophradates. Malgre M. Weiskopf 341, il ne semble pas y avoir de doute sur sa participation aux evencments ou en tout cas sur l'exploitation qu'il pu faire de ccux-ci a son profit. 11 n'y a pas en effet de raison d'ecarter Ie temoignage de I'auteur de l'Economique, 11 342, bon connaisseur des choses de l'Asie : Mausole avait un moment cesse de payer le phoros au Roi et ce dernier Ie fait reclamer, D' autre part, pour obtenir des subsides des Mylasiens il a recours a un subterfuge leur faisant croire que Ie Roi marche sur leur cite et quil leur faut contribuer financierement a la construction de murailles. L'efficacite du straiageme montre que cette situation etait plausible, mcrne si concreternent les troupes royales n'ont nullement envahi la Carie.
m Dernosthene, c. Aristocr., 154. .no Weiskopf 1982, 428. 337 Ps.-Arist., }o'{'" 2.1351b; Polycn 3.14; Dcmosthcne. c. Aristocr., 154; Ence, Pol., 24. Ces cvcnemcnts sont gcneralcment dates de 360. Parke 1933, 125-132 ; Osborne 1971, 317 sq. ; Pritchett 1974, 85-89 ; ef. aussi Hornblower 1982, 179 qui pcnche pour 362. Charidernos est execute plus tard sur I' ordrc de Darius II (Diod. 17.30; Berve 1926 n" 823). Parmi les orticiers qui s'opposent it Charidernos, done loyaux it Artabaze, figure Athcnodoros d'imbros (eela n'cst pas eontradietoire avee Ie fait qu'il soit qualifie d'Athenicn par IK, 29-Kios, 2 ct Dcmosthenc, c. Aristocr., 12). Cf. Graham 1964, 167 sq.; Hofstetter 1978, s.v. m Enee 24.3-14. m C'cst lc scns qu'il eonvient de donner it apxcov (ainsi Whitehead 1990), et non celui de magistrat, cornrne le fait par exemp1e Bon dans l'cdition de la CUI". J40 Dcmosthcnc, loc. cit., 158-160 souligne qu'clle est une ennemie de toujours dAthcncs . .141 Weiskopf 1982, 233-234 par excmp1e, cf. aussi 1989,65-68; cf. en revanche Hornblower 1982, 179. 342 Ps.-Arist.. F.e., 2.l351b 19.
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Au terme de cette revue des satrapes revoltes, il apparait que Ie principal "reproche" que l'on peut adresser a Diodore est d'avoir place sur un meme plan des situations assez differentes, celIe d'Ariobarzane et Orontes d'un cote, celle d'Autophradates et Mausole de l'autre : rebellion active, "suivisme" dans le cadre d'evenernents qu'on ne peut controler ou mise a profit de la situation a des fins personnelles. De plus, Diodore ne s'interesse, dans ce scenario trace a grands traits, qu'aux personnages les plus en vue et par consequent neglige ce qui concerne les peuples ou les acteurs secondaires. Localernent, les situations ont pu se reveler assez confuses, la carence du pouvoir central ayant permis a certains de constituer ou d'accroitre des principautes qui deviennent quasi autonomes. Deux exemples parmi le plus nets: en Troade, Charidernos 343 gouverne a son profit la part interieure de la region alors qu'il est cerise agir au nom d'Artabaze ; en Lycie, le dynaste Perikles de Limyra arrondit son domaine au detriment de ses voisins de Telmessos 344. De facon plus generale comme le note Diodore ce fut pour beaucoup l'occasion de s'affranchir du versement du pharos 345.
2.2 La fin de la revolte en Anatolie occidentale Comment la rebellion prend-elle fin? Nous avons pu noter que I'apport des mercenaires grecs avait ete percu comme un clement determinant des succes initiaux d'Orontes, Demosthene, Sur les symmories, 31, montre que la demarche du Roi est identique et il est probable, qu'apres une lente mise en action, de tres importants contingents royaux se portent vers l'Asie Mineure occidentale, contournant par le nord la region tenue par Datames. La presence de la Paphlagonie parmi les territoires loyaux qui permettent a Artabaze de retablir sa position en Troade par l'approvisionnement qu'ils procurent (infra) peut etre un argument en ce sens. Face a cette pression la reponse des rebelles passait par la recherche de subsides et d'allies. II est probable que Rheomithres avait deja ete envoye aupres de Taches, Ie roi d'Egypte, le seul susceptible de foumir une aide substantielle dans la mesure ou les cites de la Grece d'Europe se montraient reticentes a aider ouvertement les satrapes 346. Apparemment les secours tarderent et Orontes se soumit au pouvoir central avec Supra n. 337. Cf. Hornblower 1982, 181 et infra p. 352. 345 Diod. 15.90.4 : "A cause de l'importancc de la revolte, Ie Roi perdit la moitie de ses revenus" ; Moysey 1975, 117 et n. 52. 346 Le seul document concret est fourni par l'cpigraphie : Syll.', 182 (= Tod, 145 ; Staatsvertrage/; 292). A propos de la diplomatic d'Orontes, cf. Moysey 1975. 107 et les reserves de Weiskopf (1982, 398-40l) sur Ie tcxtc precite. II faut dire en effet que la disparition de la pierre, dent l'inscription est connue seulement par deux copies anciennes, l'absence de toute la premiere partie laissent subsister bien des interrogations. II s'agit en fait de deux textes : l'un, en dialecte attique, qui concerne la Paix commune. Ie Roi, les satrapes, les Hellenes; l'autre, en dialecte dorien, qui traite apparemment d'une tout autre affaire. "Les" satrapes ont envoye un ernissaire aux Hellenes. Le document ayant ete lu it Argos. on a bcaucoup discutc pour savoir quel pouvait etre I'organisrne, la confederation designee par ce vocable. Momigliano 1934, 497. pense que cctte instance doit etre la Deuxicmc confederation athenienne et qu'Argos n'a pu y appartenir qu'en 371/370, il est suivi par Dusanic 1979, 336. Beaucoup d'auteurs penchent ccpendant plutot pour la revolte des satrapes, cf. par exemple Ryder 1965, 142-144. Sur ce texte cf. egalcmem la note additionnelle de Tod it la misc au point de Austin 1944, 100 (en particulier sur l'identification de la koine eirene dont il est question dans ce texte). Cf. lc texte, traduction et commentairc in Moysey 1975, 143-148 qui developpe I'analyse "classique" du document: l'ambassadcur est envoye par [napcll les satrapes cn 361 (pour se rnettre en accord avec Diodore) et plus precisement par Orontes, Les Grecs qui refusent de rampre unilateralemcnt la Paix commune juree avec Ie Roi, rendcnt une reponsc negative. Cargill 1981. 1 I-12. semble adhcrer it la datation de cette inscription autour de 362/361. 343 344
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l'espoir de voir cette volte-face rapide recornpensee 352. Diodore indique 353 qu'il esperait obtenir un vaste commandement comme prix de son ralliernent, une ClCX'tPCXrcElCX 'tf\~ rccxpcx8cxAcxClCllou TC(X0Yl~. Si I'on veut rester en coherence avec l'ensemble de la documentation il ne peut s'agir que de la satrapie de Daskyleion 354 a laquelle serait naturellement reunie son ancienne province de Mysie. La chose n'a rien d'invraisemblable si I'on songe qu'Ariobarzane a disparu et que I'installation d'Artabaze ne s'est faite probablement qu'apres un certain hiatus. Cet espoir s'est avere fallacieux : les plans de Suse pour Daskyleion etaient d'une toute autre nature. "II fait arreter ceux qui apportent l'argent collecte, livre beaucoup de cites et les soldats recrutes aux officiers envoyes par Ie Rei". Tout cela semble indiquer qu'il n'y a pas eu d'affrontement decisif et que, sauf dans quelques cas (Ariobarzane et un peu plus tard Datames), on est venu a composition. Lorsque Rheornitres revient en Asic Mineure et plus precisement a Lenke 355 avec cinq cent talents et cinquante navires de guerre, il se rend compte que la partie est deja jouee : les principaux chefs du mouvement se sont rendus au reconcilies avec Ie Roi, a mains qu'ils n'aient disparu. II choisit done la solution de la reddition apparemment negociee puisque sa famille ne souffre nul1ement de son action anterieure 356. Pour obtenir son pardon, il livre au Roi les chefs de ceux qui sont encore en etat de revolte. Diodore. ne precise malheureusement pas leur identite, leur nornbre, ni merne leur qualite : nobles perses, dynastes grecs au indigenes, representants des cites? Toutes ces categories etaient probablement representees et il serait sans doute assez inexact de ramener la rebellion a Ia seule initiative des satrapes, comme Ie fait R. A. Moysey 357. Pour revenir aces derniers, leur sort reste souvent pour nous matiere a discussion. L'une des principales raisons est que Diodore ne s'y est pas interesse et n'apporte pratiquement aucune information apres la revolte. II est certes tres probable qu'Ariobarzane disparait, livre au Roi par son fils Mithridate, lequel devait encore se signaler plus tard en assassinant par traitrise Datames. Etant donne la tournure que prenaient les evenernents, Mithridate a pu penser se concilier les faveurs du Roi en trahissant son pere qui fut, selon Harpocration, crucifie par la suite 358, et obtenir la satrapie. Mais tels n'etaient pas les desseins du Roi : Ie choix d'Artabaze est maintenu. Mithridate se refugio plus a l'est, c'est-adire en Bithynie 359 et de la entre en contact avec Datarnes (infra). Artabaze entreprend Ia pacification de sa satrapie. Le seul episode pour lequel nous ayons queIque certitude est la reprise en main de la Troade ou nous voyons Artabaze, Mentor et Memnon assieger Charidernos puis perrnettre ace dernier de quitter la region pour se rendre
352 Osborne 1973, 543, pose la question de savoir si Orontes, trcs vite "retourne", n'etait pas cn fait un agent provocateur ;il compare son role a celui de Mithridate aupres de Datarncs. II faut dire cependant que les moyens mis en ccuvrc ct lcs affrontcmcnts initiaux avec Autophradatcs ne plaident guerc en favcur de cette hypothese. m Diod. 15.91.4. 354 Diod. 15.1. m Rhcomitrcs est prcscntc comme un "local noble" dont la motivation serait une amelioration de son statut personnel, alors que Diod. 15.92.1, indique qu'il a etc envoye ,WV cmoCHucwv (par les revoltes). 356 Cf. pour sa carriere ultericurc, Weiskopf 1982, 547 n. 97 ; son fils Phrasaortes est nommc satrapc de Pcrsidc par Alexandre. m Moyscy 1975, 98. 358 Harpocration, s. v. "Ariobarzane" est le scul a mcntionner eelle fin tragiquc ; supra p. 99 n. 129. 359 Supra p. 103.
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en Thraee en passant par Abydos 360. Du texte de Dernosthene, il semble dccouler que lcs deux freres se sont tailles un domaine "a eux" grace a l'expulsion de Charidernos 361. A ce moment Artabaze est loin de tenir en totalitc sa satrapie : Dernosthene, Contre Aristocrates, 155, donne un apercu des ressources dont peut disposer Ie satrape pour conquerir son domaine, Haute-Phrygie (avm8Ev , 44) par Merkholm & Zahle 1972, 112. Childs 1981, 7fJ, en fait Ie gouverneur perse de la Lycie orientale alors qu' Artembares serait eelui de la Iycic occidentale. En cc scns Keen 1998, 153. Aucunc preuve ne peut etrc apportcc, Rappclons que la revolte des satrapes cst d'abord lc fait de notables perses, iI n'est done en rien assure que Mizrapata ait ete "loyaliste". Cf. Zahlc 1991 (rnonnaics a Tyrnncssos), mais Keen 1998, 164, affirmc qu'il nc peut sagir du mcrne personnagc (pere et fils"). II attribue les monnaies de Tyrnnessos a eelui qui figure dans l'inseription du Pilier (1L. 44). Borchhardt 1970,389, suggcre que Ie celebre hicron de Trysa, date des aJcntours de 380, serait la tombc de ce dynastc. 404 Xen., Hell., 1.3.13. 405 tt: 104, 3 (Limyra). Cf. Keen 1998, 1M. 406 Contra Keen 1998, 165. 407 Cf. Houwink ten Care 1965,13, "cruelly punished" ou encore Borchhardt 1967, 166, qui suggere qu'il a pu se refugier aupres du roi de Sidon (on sait en cffet cornbicn l'influence artistiquc de la Lycie a etc grande en particulier pour Ics sarcophages). Tout eela est pure hypothese (cf. Bryce 1980, 381 et surtout Worrle 1991). 40R Worrle 1991, partant entre autrcs du constat que dcs decisions prises par Periklcs sernblcnt perdurer assez longternps, par exemple it propos du koinon des Pcrnitai (sp. 224-234 = StX;, 41, 1991, 1380). 400 40[
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successivement 1. 5, ldrieus (Edryeuse), I. 7, Arternbares (Artturnpara), 1. 9, Alexandre (Alakssafitra), Ces faits, s'ils sont arranges scIon un ordre chronologique n'impliquent pas pour autant une date tardive pour Arternbares (la solution de "commodite" a ici encore consiste a imaginer deux Arternbares) : ldrieus a fort bien pu exercer la un cornman dement au nom de son frere Mausole comme cela a etc par exemple Ie cas a Latmos 409. Au terme de son developpernent, Keen 410 retient la sequence suivante : I) Trbbenimi et Perikles maitres conjoints de la part orientale de la Lycie. 2) Mort du premier nom me, constitution de son heroon par Ie second. 3) Mort d' Arbinas, Arternbares et Mithrapates sont designes comme responsables des deux moities de la Lycie. 4) Rupture de Perikles avec Ie pouvoir central avant I'ernbrasement general. II etcnd son influence jusqu'a la Milyade meridionale; il est attaque par Arternbares qui est dcfait apres des succes initiaux. 5) Perikles perd Telmessos. 6) Chasse de Lycie, Anembares bat monnaie aSide. Ce tableau a Ie mente de la clarte et de la coherence. II est eependant rien rnoins qu'assure qu'il corresponde a I'enchainement reel des faits. Comme toute tentative similaire il repose sur un certain nombre de postulats indemontrables, Le point trois suppose une organisation que I'on connait sous Pixodaras mais dont on n'a aucune preuve de I'existence anterieure. La position de Mithropates est inconnue. Le point six est egalement incertain. Comme on Ie voit les zones d'ornbre l'emportent largement sur les certitudes. La Lycie tornbe-t-elle rapidement sous la coupe des Hekatornnides? La question reste debattue. A. G. Keen 411 met en avant l'inscription TL, 61 pour attribuer a Autophradates la reconquete de la Lycie, OU il assumerait Ie titre de "roi' apres la disparition de Perik les, Cettc affirmation repose sur une base tenue, Elle s' appuie sur le fait que A. G. Keen donne au terme khiitawata un sens restrictif, ou plutot specifique (roi des Lyciens), qu'il ne semble pas toujours avoir 412. II adrnet que Mausole a mis tres tot la main sur la region. Pour S. Hornblower tl- une seule chose est sure: la region a change de rnaitres sous Pixodaros rnais cest sans doute etre trap critique envers les sources dans la mesure ou Ie Ps.-Aristote 414 indique que Kondalos 415, representant de Mausole percoit le phoros et diverses taxes dans cette zone. II n' est certes pas possible de determiner la date de la saisie de la region et Ie texte de Lucien 416, tel que corrige par W Judeich, indiquerait que Mausole controle une partie de la Lycie. On remarquera cepcndant que I'influence du satrape s'etend Infra p. 392. Keen 1991;. 166sq. 411 Keen 1998. 171. 412 Supra p. 11;7et n. 189. 413 Hornblower 1982, il suppuie sur I'inscription trilinguc de Xanthos, infra. 414 Ps.-Arisl., fe., 2.1348a. Hornblower 1982, 76, propose de reconnaitre Iii unc approximation pour Ie nom caricn attcstc par ail1curs Kov8I-llXA,a;. Sur Kondalos, cf. Zgusta 1964, § 676-1 ; Robert 1963, 148. 416 Lucien, Dial. des morts, 24.1 : Kell bd 1D ~aO'l/cEt
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de Datames Ie satrape de Cilicie ne serait coherent qua condition de considerer quavant lui les positions de Tiribaze et Pharnabaze avaient ete similaires, dans la mesure OU irs assument Ie rnerne role et beneficient des memes prerogatives (en particulier monetaires), D'autre part il faudrait supposer qu' a des personnages aussi considerablcs aurait succede un quasi inconnu dans une charge de tout premier plan. Tout cela reste bien improbable. II me semble plus realiste de penser qu'il aide Autophradates contre les "peuples revoltes" 427 avec peut-etre a la clef une "promotion" Ie placant a la tete de I' ensemble de la Cappadoce 428. La date n' est pas certaine; il pourrait sagir des evenements des alentours de 380 qui ont eu une certaine ampleur mais que les sources ne permettent pas de reconstituer. Quelques annees plus tard 429 il entreprend la pacification puis la conquete de la Paphlagonie ; en cela, il est pleinement en accord avec les principes de fonctionnement de I'Empire perse 430. Peut-etre est-ce aces campagnes qu'il convient de rattacher Ies episodes ou, selon Polyen, Datarnes sernpare des richesses d'un grand sanctuaire (il ne precise pas lequel : Comana, Zela") pour payer ses soldats. II annonce qu' il va battre monnaie a Amisos 431 et il prend Sinope 432 en simulant la preparation d' une expedition contre Sestos (les gens de Sinope avaient sans doute eu maille apartir avec les Sestiens qui profitaient de la situation de crise pour controler les Detroits) 433. Cornelius Nepos note que la campagne en Paphlagonie s' est faite dans un premier temps avec I' aide d' Ariobarzane et M. Weiskopf 434 parait avoir vu juste en relevant que les projets de Datames, en particulier en direction de Sestos, mis aexecution ou non, n' ont de sens que dans le cadre d'une collaboration etroite avec Ariobarzane et qu'il n'y avait rien la dont le Roi put prendre ombrage. Sa reputation est telle a Suse, quil est charge de preparer une expedition en Egypte avec Pharnabaze et Tithraustes 435. Pharnabaze ayant ete rappele aupres du Roi, Datarnes en dcvicnt Ie commandant en chef. La encore la chronologie est tres discutee, Tithraustes n' a pas participe a l'expedition de 374/373 ou seul Iphicrate est mentionne. 11 faut done penser qu'une nouvelle expedition est organisee apres I' echec de la premiere 436 et que Datames est Cornelius Nepos, Dat., 2.1. Diod. 15.91.2 ; supra p. 106. Rappclons que Bing 1998 en fait le satrape de Cilieie. 429 Cornelius Nepos, Dat., 2.2-3.4. La date est imprecise; Babclon avait d'abord pcnchc pour 375 (in Waddington et al. 1908,2(0), dautrcs ont propose de dcsccndrc eette affaire vers 372-369 el merne plus bas (e.g. Six 1895, 169). Jc crois qu"il faut admettre quil y a eu deux interventions a Sinopc.T'unc ou Datamcs scrnparc de la ville, l'autre, nettement plus tard, ou le Roi lui enjoint de sc retirer avant quil nait pu eonelure Ie siege (Polyen 7.21.5 et pcut-ctrc Enee 40.4) ; en bonne logique ee n' est pas a ee moment qu' il aurait pu battre monnaic sur place. La date la plus appropricc pour la premiere operation parait devoir ctrc situee entre environ 380 et environ 375. Bing 1998,47, mel en relation lintervention en Paphlagonie avec la constitution de la flottc centre 1'Egypte, i1 sagirait d'une manifestation de la mobilisation gencrale, 410 Supra p. 78 ; daccord sur ee point avec Weiskopf 1982, 203. 431 Polyen 7.21.1 ; la me me histoirc, Ps.-Arist., te., 2. l350b 16. Sur Ie monnayage frappe dans la region, ef. Babelon 1910, 416 sq. Les rapports anciens d' Amisos avec la Cappadoce, Str. 13.3.14. Cependant, eomme Ie remarque Moyscy 1986, 25-26, le recit du Ps.-Aristote nc correspond pas avec les trouvailles monetaircs (des emissions sont connues a Sinope mais pas a Amisos). 432 Polycn 7.21.2. Cr. tnee, Pol., 40.4. 431 Les mss portent Seston, il n'y a pas lieu de chercher une correction plus ou moins judieieuse eomme eela a ete fait parfois (Melber cd. Teubner 1970 : Sesamon ; ef. par ex. Harrison 1982a, 260). D' accord sur cc point avec Weiskopf 1982, 211 et n. 16 (mais d. une opinion differente 1989, 32 n. 51). 434 Weiskopf 1982, 210. 435 Cornelius Nepos, Dat., 3.5. 436 Weiskopf 1982, 205. penche pour une seule preparation, cc qui I' amene a minimiser le role de Datarncs et placer le retrait de ce dernier des 374. 427 42S
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alors associe a Pharnabaze mais ce dernier disparait des 372 437. Pendant les longs preparatifs de I' armee a Ake, Ie Roi charge Datames d' une mission contre Ie dynaste-brigand Aspis de Cataonie 438. Ce dernier jouit d'une autonomie de fait, mais ce qui preoccupe Ie Roi c'est qu' Aspis entrave I' acheminement du phoros de I' Asie Mineure centrale et orientale vers Ie centre de l'Empire. Apres une victoire eclair, Datames revient a Ake mais une faction de la cour qui lui est hostile a profite de son absence pour Ie discrediter aupres du Roi. Selon Cornelius Nepos, il entre alors en rebellion et s'installe dans Ie pays voisin de la Cappadoce et it passe un accord secret avec Ariobarzane 439. Est-ce a dire qu'il revient vers Ia Paphlagonie, ce qui expliquerait une deuxieme action contre Sinope 440 qui, cette fois, naboutit pas a la suite de l'intervention royale? La version de Cornelius Nepos presente une alternative par trop manicheenne entre rebellion et loyaute. En fait, les relations de Datames avec le pouvoir central ne se sont deteriorees que progressivement, une etape importante etant sans doute la demarche de Syssinas, son fils aine qui denonce au Roi les mauvaises intentions de son pere 441. Comment peut-on expliquer cette rupture? Le commandement contre l'Egypte est une responsabilite exceptionnelle, mais a haut risque. II existe une opinion politique de la Cour autour du Roi et il est clair que la personnalite contradictoire d' Artaxerxes II avive les luttes d'influence. 11 est caracteristique que tout echec militaire entraine une accusation de trahison aux consequences graves, surtout quand il s'agit des grandes affaires de l'Empire, entreprises preparees de longue date et aux multiples rebondissements (cf. Tissapherne puis Conon intervcnant dans les affaires grecques, Tiribaze et Orontes a Chypre). Ce systcme peut freiner les entreprises militaires et pousser a des compromis avec les arrnees cnnernics, c'est en partie de la que vient l'image peu fiattee dans les sources grecques de la politique perse. Facteur aggravant, la position de Datamcs est dautant plus fragile qu'il a eu une ascension sociale fulgurante et qu'il partage des responsabilites avec des Perses du plus haut rang, d' ou une cristallisation des oppositions. Parmi ces dernieres, on peut mettre en bonne place Pharnabaze qui a ses propres raisons peut-etre de sopposer a Datarnes dans la mesure ou ce dernier parait avoir partie liee avec Ariobarzane. On peut se demander en effet si Pharnabaze avail accepte de bon gre les conditions de sa succession a Daskyleion 442. 437 Cf. la discussion des faits par Hornblower 1982, 171-172. Sur la date probable de la mort de Pharnabaze ct Ie remplacerncnt d'iphicrate par Timothee, cf. Cawkwell 1963, 88 n. 23 ct 25. Une fourchette possible pour la designation de Datames contre l'Egyptc : 372-366. Hornblower penche pour la partie haute, il pensc que la date proposee par Momigliano 1966,405 sq. pour la rcvolte de Datames (374/373) est trop haute, p. 171 n. 8 infine. 4JS Cornelius Nepos, Dat., 4.1-5.11 taut noter ccpendant que Sckunda 1988b, 43, donne de bons arguments pour soutenir que le nom d' Aspis est persc ; il en tire la conclusion que ce dernier etait le satrape de la region et quil setait revolte. Bing 1998, 48 n. 20 : "Aspis, like Thuys of Paphlagonia, appears to be an administrator responsible of the flow of local revenues and produces to the Persian treasuries". 4J9 Cornelius Nepos, Dat., 5.6; cf. Sekunda 1988b, 47. Weiskopf 1982, 205-207 suivi par Briant 1996, 1018 pcnse qu'il est ncccssaire d'inverser I'ordre des factcurs. Ccla ne parait nullernent indispensable si l'on adrnct que les preparatifs de iexpedition vcrs l'Egyprc ont pris beaucoup de temps. 44() Polyen 7.21.5. La lettre royale dcvanr laquelle Datames se prosterne indique a la fois lcs preoccupations du Roi face aux cntrcpriscs du satrape ct le fait que cclui-ci ncst pas ouvcrtcrnent en rebellion ou considerc comme tel par Ic pouvoir central. S'il y a bien deux campagnes contre Sinope, on ne sait a laquelle sapplique Enee, Pol., 40.4. Pour Sckunda 1988b, 46-47, il Y a bien deux interventions a Sinope, mais I'une, infruetueusc, vcrs 384, on ne eornprend pas alors lintervcntion du Roi ; I'autre, reussic, en 368 (le monnayage de Datarncs aurait ete frappe a ce moment). 441 Cornelius Nepos, Dat., 7. Xen., fIell., 5.28.
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On attribue traditionnellemcnt a Datames un abondant monnayage qui se subdivise en trois groupes : 1) A l' avers I' Arethuse des monnaies de Pharnabaze ; au revers "Ares" avec des identitcs de coins avec cclles de l' ancien satrape de Daskyleion, mises en lumiere par R. A. Moysey 443. La premiere difference reside dans Ie nom de celui qui ernet : TRKMW selon la lecture de A. Lemaire (infra). A noter egalement l' absence de l'indication du lieu d'emission : klk (Cilicie), qui figurait precedemment sur nombre de monnaies de Pharnabaze. Cette serie est de loin la plus abondante 444 puisque R. A. Moysey denombre trois cent sept monnaies et, plus important encore, deux cent deux coins de revers differents (contre respcctivement cent vingt quatre et cent sept pour les pharnabazes aux memes types). 2) Un groupe 445 (cent trentc six monnaies, dont cent neuf revers differents) presente a l' avers Baal de Tarse, assis de trois-quarts face adroite. II tient un bouquet forme d'un epi et d'une grappe de raisin, Ie tout dans une enceinte herissee de tours, legende en arameen, Au revers, deux personnages se faisant face, I'un est le dieu Ana, I'autre (Ie satrape?) un personnage vetu d'un manteau ample. I1s sont separes par un thymiaterion, Ie tout dans un temple represente de facon styli see par un grenetis dans un carre surmonte d'un toit a acroteres. Moysey 446 apres consultation de A. Lemaire 447 suggere que la legende peut aussi bien etre lue Anu. En tout etat de cause la convention de representation est la nudite heroique grecque, qui soppose a tout ce que I'on sait de la tradition perse tant pour la representation artistique de ces derniers que pour leurs habitudes quotidiennes ; de merne Ie "satrape" est vctu ala grecque. S'il s'agit bien du dieu mesopotarnien, adore au moins depuis I'epoque sumerienne, on notera ici le telescopage de traditions quasi antagonistes, dont les cites ciliciennes assumaient Ics contradictions. J. D. Bing 448 doute de cette identification et propose de reconnaitre ici le dieu de Kanesh, Ana. L'objection qu'il se presente a lui-rneme (pour I'ecarter ensuite) concernant la survie de cultes anciens ne tient pas si I'on prend en compte le decret hellenistique de Hanisa-Kanesh reexamine par L. Robert 449 OU la deesse Astarte apparait en position preerninente. L. Robert souligne la presence d'un culte de Zeus Soter: "Je croirais qua Hanisa les noms seuls de Zeus Soter et d'Herakles sont grecs et qu'ils recouvrent de tres anciennes divinites". Le point de vue de .T. D. Bing est done tres seduisant, mais il va tout a fait a l'cncontre des conclusions de son article en ce sens que le choix par Datarnes d'un dieu de la part meridionale de la Cappadoce, de surcroit adore par les Leukosyriens, redonne tout sa validite au texte de Cornelius Nepos, tout en enlevant sa valeur "insurrectionnelle" ace monnayage 450. Datames a simplement privilegie un dieu qui lui avait ete precedemment favorable dans son gouvernement initial. Moysey 1986,7-61. Cf. lc tableau de Moysey 1986, 16; ses pages 41-52 (pI. 2, 16-21); SNG Cop. 274-294; von Aulock 5934 (PI. IX, 13)-5942 ; Levante 78-80 ; France 2 258-277, etc. 445 Moysey 1986, 53-58 (pI. 3, 37 ; 4, 40-50) ; SNG Cop. 299-302 ; von Aulock 5943-5950 ; l.evante 83-84 (PI. IX, 14) ; France 2 290-300, etc. ; Naster 1989, 149 propose de placer ehronologiquement ce groupe apres eclui ou est representee Arethusc. 446 Moysey 1989, 109 n. 4. 447 Cf. en dernier lieu Lemaire (Istanbul). 44g Bing 1998, 59-63 ; abondante bibliographic p. 61. 449 Robert 1963,457-523, non signale par Bing. 450 Y a-t-il eomme Ie pense Bing un jeu de mots avec Ie substantif grcc &va(~) sous lequci on pourrait retrouvcr Zeus'? 443
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3) Un dernier groupe dont I'avers ne se distingue guere que par divers accessoires qui se trouvent sous Ie siege de Baal. Au revers, un "satrape" assis de trois-quarts face a droite, qui verifie la rectitude d'une fleche ; devant lui, un arc et it la hauteur de sa tete la representation non anthropomorphe de Ahura Mazda sous la forme styli see d'un disque solaire dote dailes. Ce groupe est Ie moins abondant : soixante douze monnaies pour soixante revers 451 et probablement Ie plus recent. Au cours des dernieres annees ces monnaies ont ete l' objet de plusieurs etudes et il convient de faire Ie point de ce qui parait desormais assure et de ce qui reste objet de controverses. - Le premier probleme est celui de l'auteur de ce monnayage. Depuis E. Babelon 452, il etait admis presque sans reserve que Ie nom arameen TRDMW grave sur ces monnaies ne pouvait identifier que Datames. Or, C. M. Harrison 453 et A. Lemaire 454, reprenant en cela des hypotheses anciennes de Th. Noldeke et J.-P. Six, developpent des points de vue tres similaires : la decouverte de monnaies mieux frappees ou conservees permet daffirmer qu'on ne peut pas lire autre chose que TRKMW, cest-a-dire un nom qui ne peut pas etre l'equivalent de Datames, meme par metathese de "cornmodite dialectale" 455. Reste a identifier Ie personnage. Pour C. M. Harrison (qui. suit J.-P. Six) 456 il sagit d'un dynaste indigene (dans la lignee ou non du Syennesis). Rappelons que, pour sa part, M. Weiskopf 457 voit dans "Datarnes" un "local noble" place sous les ordres de Pharnabaze et de Tithrausthes, Mais le refus didentifier Datames et "Tarkurnuwa" 458 cree plus de problernes qu'il n'en resout, dans la mesure OU on aboutit au double paradoxe suivant : un personnage parfaitement connu et atteste, ayant ernis des monnaies ailleurs (a Sinope), charge comme Tiribaze et Pharnabaze d'une expedition vers l'Egypte necessitant des moyens materiels, et done financiers, particulierement importants qui n' aurait pas battu monnaie en Cilicie ; un complet inconnu, "noble local" qui - au moment ou l'on sait que Datames exercait son mandat e>? - aurait frappe un monnayage dans des quantites que l'on ne retrouvera qu'avec I' arrivee d' Alexandre. II est done evident que si I' on prend en compte les donnees historiques Ie responsable de I' emission ne peut etre autre que Datames, C' est apparemment en derniere analyse la solution que retient A. Lemaire. Pour lui, Datames aurait deux noms, l'un local et dont il sefforce de reperer les possibles etymologies, lautre perse 460 . 4,1 Moysey 1996, 58-61 (pl. 5, 51-59) ; SNG Cop. 295-298 ; von Au!ock 595l-5952 ; Levante ssss (PI. X, 2) ; SNG France 2 282-2g Q etc. 452 BabeJon 1910, 407-416. 453 Harrison 1992a, 321-336. Cr. Six 1884,114-117; Noldeke 1884,298. 454 Lemaire 1989,144-149; 1991, 203-205. 455 On observera par cxcmple que Orontobates est appele Rhoontopates sur certaines de ses monnaies (cf. de Hirsch I g87. 93-95 ; Naster 1959, n° 1543). Harrison, jouc aussi sur l'identite du nom Datarnes avec 1a lcgende t1ATAMA qui apparait sur les monnaics de Sinope ; mais notons quil en va de mernc pour OPONTAOrontes alors que dans l'inscription du Nemrud Dag on Ie nomme Aroandcs (de facon plus fidclc it l'original iranicn"). 456 Harrison 1982,321-336, dans Ie merne sens Le Rider 1997, 15g sq. 457 Weiskopf 1992, 205 sq. 4SH En dernier lieu Briant 1997, 59-61. 459 Moysey 1986, 12 (cf. ses pl. 1 et 2, respectivcment n° 2 et 16;4 ct 17) dernontre les identites de coins de revers des dernieres monnaics de Pharnabaze et des premieres de "Tarkurnuwa". 460 Lemaire 1989, 147-g; cf aussi Sekunda 1988, 35-53, sp. 35 sq.
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- La date, le lieu et les circonstances des emissions (les trois ehoses ne peuvent etre envisagees separernent) sont I' objet de vives diseussions. Le point de vue de V. Sekunda resume bien la position la plus raisonnable 456 : les frappes des monnaies de Pharnabaze et de Datarnes ont ete effectuees successivernent, et non pas simultanement comme on le pense generalement 457, pour constituer la force armee necessaire aux expeditions en Egypte 458 : une emission avant 373, lautre entre 372 et 368 (cette duree expliquerait I' abondance de la frappe). R. A. Moysey 459 articule les series respectives de Pharnabaze et de Datames autour de 373 mais il propose une autre interpretation historiquc -w. Entre 372 et 368, Datarnes ernet dans le cadre de la mission que lui a confiee le Roi, mais les deux dernieres series seraient emises par le satrape entre en etat de rebellion dans les annees 360. Essayons d' analyser les differents arguments: I) La grande abondance et la diversite des frappes (trois cent soixante et onze coins d' avers connus contre seulement cent quatre-vingt-cinq pour Pharnabaze ; en quantite de monnaies, 2,3 pour I) ne peut que suggerer une duree importante. On penchera done pour une "revolte" tardive, cest-a-dire vers 368 mais il faut aussi observer que rien n'indique que routes ces monnaies aient ete frappees seulement a Tarse, au moins pour les series a I' Arethuse 461. Pharnabaze et Datames (on a vu com bien leurs monnayages etaient indissociables, non pas en simultaneite mais en continuite) seraient les seuls dans la lignee des Perses emettant en Cilicie a avoir Tarse comme seul atelier (d. Tiribaze aussi bien que Mazaios... ou Balakros). 2) R. A. Moysey met aussi en avant le choix des themes qui illustrent les monnaies. 11 s'efforce dy voir - il faut bien le dire, de facon assez subjective - la revendication de la royaute. Deux exernples : le satrape assis verifiant la rectitude de sa fleche serait, par le caractere inhabituel de la scene, suspect de "pretentious grandioses". On mettra en relation la representation sur les monnaies de Soloi d'une Amazone sassurant de la tension de son arc 462. Soulignons que ce theme semble banal dans la glyptique et done dans I'iconographie perse. J. Boardman 463 publie une bague signee Athenades et provenant du sud de la Russie representant ce theme a la mode hellenique. De facon encore plus significative il apparait a lidentique sur un sceau scaraboide 464, ce qui exclut completement I'hypothese de I'affirmation d'une volonte insurrectionnelle, II est assez banal pour figurer encore sur les monnaies parthes de Mithridate II et III 465. Retenons en contrepoint I' Apollon des revers Sekunda 1988 b. 42. Bibliographie fournie par Moysey 1986, 7 n. I. Confirmation du fait par de Callatay (Istanbul) a partir des contremarques. 45R Par consequent Ie rapport de Datames avec les emissions monctaircs est exactement idcntique a celui de ses predecesseurs (Tiribaze et Pharnabazc), contra Bing 1998. 459 Moysey 1986, 23 sq. 460 Devcloppcc dans Moysey 1989, 110-116, suivi par Bing 1998,55-63. 161 Comme Ie souligne Davesne 1989, 164 ; supra p. 360. En revanche il parait difficile de suivre Naster 1989,199, lorsqu'il argumente pour auribuer a Soloi certaines frappes a partir de la presence de la grappe de raisin a gauche dans Ie champ du revers (e.g. SNG von Aulock 5941) ; a titre de comparaison cf. la grappe qui figure devant Baaltars sur les monnaies de Balakros, von Aulork 5963-5964; Levante 120-121 ; France 2 367-371 (PI. X, 13). 462 E.g. SNG Levante 38-41 (ibid. 40 = PI. IX, 15). 463 Boardman 1970, 220 et pI. 681 404 Ibid. 316 et fig. 294 p. 317 (PI. X, 1). Merne conclusion chez Casabonne 1997, 37. 465 cr. e.g. Franke & Hirmer 1966, pI. 212 et n" 5, 781-782. 456
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seleucides dont l' attitude n' est pas due a une rcncontre fortuite avec Ie theme perse 466. De merne on ne saurait discuter Ie fait que "the winged disc symbol calls to mind the king", mais R. A. Moysey rappclle lui-rneme que Ahura Mazda (a figure humaine cette fois) apparaissait deja sur des monnaies de Tiribaze ss". On ajoutera qu'une figure identique, non anthropomorphe, se rencontre aussi sur certaines monnaies de Mazaios 468, lequel n' est pas suspect d' etre un satrape rebelle. 3) Dernier argument, Ics poids des monnaics. R. A. Moysey releve 469 que les deux derniers groupes de Datarnes sont en moyenne beaucoup plus legers que les groupes precedents, en particulier ceux de Pharnabaze. II en tire argument pour supposer que Ie satrape revolte a pu acertains moments etre coupe de ses approvisionnements en metal, cette reduction ponderale etant un expedient pour pallier la penurie, Cependant certaines notations complementaires amenent a nuancer cela. La "decrue" moyenne avait commence des les frappes de Pharnabaze comme Ie montrent les tableaux de Moysey. II y a sans aucun do ute un certain nombre de monnaies "aberrantes" dans Ie groupe au satrape assis (certaines monnaies pesent entre 6,80 et 8,20 g). Mais il faut observer tout aussitot que plusieurs exernplaires pesent plus de II g ce qui n'est pas Ie cas pour Pharnabazc. On s' interrogera enfin sur les motifs eventuels de la frappe par Ie rebelle. Rien dans Ie recit de Cornelius Nepos, bien au contraire, nindique que Datarnes ait eu a faire face au paiement de nombreux mcrcenaires grecs. Lorsqu'il quitte Ake pour se rctirer en Cappadoce, illaissc les troupes a Mandrokles de Magnesie et ne part qu'avec "les siens" 470. Dans le combat contrc Autophradates, il ne dispose que de moins du vingtiemc des forces de son adversaire 471, c' est-a-dire, si I'on prend Nepos ala lettre, environ huit mille hommes. A aucun moment dans son epopee il n' est question de mercenaires, sa tactique consiste toujours en une guerilla qui s' appuie sur une meilleure utilisation du terrain. Les differentes sources font etat d' evenernents qui concernent tout le CITur de I' Anatolie, mais la chronologie absolue et parfois meme, relative, fait problerne. Une des actions pousse Datarncs au dela de l'Euphrate, ce qui ne signifie pas une penetration en profondeur en Mesopotamie 472 : la haute vallee du fleuve est proche des territoires controles par Ie rebelle ; il doit vite renoncer face a la puissance de l' armee royale. On ne voir pas comment il serait possible d'inferer de ce passage une ambition a tres large portee du satrape qui se replie des l'annonce de larrivee des troupes royales 473. Au moins deux expeditions successives sont menees contre lui par Autophradates et Artabaze. Pour Cornelius Nepos, ce sent d' abord les Pisidiens qui attaquent Datarnes (il place a ce moment la trahison de son 46(, 11 nest pas exclu pour autant que celui-ci ait etc initialcment cmprunt6 a Iart grec, cf. par cxemple l'urchcr de Cyziquc, Franke & Hirmer 1966, pI. 199 (de la premiere moitie du v c s.). 467 PI. IX, I. 468 PI. X, 9 et, ega1cment il Tarse, SNG von /vulock 5914 (PI. VIII, 8). 469 Moysey 1986,16ctI989,tab1cauxp.114-115. 470 Cornelius Nepos, Dat., 5.6. 471 Cornelius Nepos, Dat., 8.3. 472 Polycn 7.21.3. 473 Moysey 1986, e.g. 21 n. I, attribue il Datames lambition de supplanter 1c Roi, cc qui parait assez contradictoire avec l'originc carienne quil lui conserve; il y aurait, scion eet auteur, une revolte conccrtee ct de plus en plus generalisee des satrapcs, dont Datames serait le principal acteur.
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beau-pete Mithrobarzane) 474 puis Autophradates 475, sans plus de succes. Datarnes est alors assassine par Mithridate 476. Diodore passe sous silence I' action d' Autophradates, en revanche il associe le revirement de Mithrobarzane a I' expedition d' Artabaze 477 et place sa mort peu apres. Une seule chose parait assuree : le passage a l' ennemi de Mithrobarzane est incomprehensible si les agresseurs sont "les Pisidiens", il est indispensable que l'autoritc a laquelle il veut se rendre, soit Ie Roi ou son representant, en I' occurrence Artabaze 4n. Le reste est plus hypothetique. On peut penser que la premiere offensive est celle d' Autophradates entre 370 et 367 479 ; apres cette date ce dernier a d' autres preoccupations au nord-ouest de sa propre satrapie. L'attaque est rnenee par le sud 480 apres une concentration de troupes dont, fait exceptionnel, Cornelius Nepos donne le detail de la composition 481 : cent cinquante six mille hommes sans compter les troupes legeres : cent mille fantassins et vingt mille cavaliers Kardakes 482 et encore trois mille frondeurs parmi les "Perses", Puis vient la liste des regions qui fournissent des troupes. II est interessant de noter que des contingents proviennent de toute I' Asie Mineure et en particulier de la zone centrale et meridionale : huit mille Cappadociens, dix mille Arrneniens, cinq mille Lydiens, trois mille Aspendiens et Pisidiens, deux mille Captianiens 483 et autant de Ciliciens, enfin trois Cornelius Nepos, Dat., 6.1-6.3. Ibid., 7.1-8.6 (cf. aussi Polyen 7.21.6). 476 Ibid., lO-11. 477 Diad. 15.91.2-7. 47S Cf. l'analyse par Weiskopf 1982, 212 sq., de differents passages des auteurs anciens au ce type de situation apparait. Quatre sont places sous Ie nom de Datames : Diod. 15.91.2-7; Frontin, Strat., 2.7.9; Polyen 7.21.7; Cornelius Nepos, Dut., 6 (ef. Beloeh 1923, 153). Weiskopf 1982, 214 eonelut - pour les raisons invoquces ci-dessus - que la defection de Mithroharzane est liee a I' action d' Artahaze. Sekunda 1988b, 48 sq. percoit la difficulte quil y a a admettre que Mithrobarzane se soit rendu aux Pisidiens ; mais, privilegiant Ie recit de Cornelius Nepos par rapport aux autres sources, il choisit de conserver cet episode. Cependant to ute sa reconstruction, il en a bien conscience, est sujette a caution. Une egale prudence est de mise pour tous ceux qui tentent de debrouiller cct echevcau particulierement complexe. 47Y Weiskopf 1982, 216, est plus precis: il propose deux annccs de campagne en 369 et 368. La tcnuc du Congres de Suse en 367 ne saurait fournir d'element dapprcciation puisqua ccttc date il sagit d'une affaire (provisoirement) reglee, Pour Sekunda 1988b, 45, la revolte de Datarnes doit etre datee de 368 ; tel etait deja 1c point de vue de Judeich. 480 Pour une reconstruction diffcrcnte d. Bing 1998,74-76. 4Rl Cornelius Nepos, Dat., 8.2. Peut-etre convicnt-il de situer la campagne contre les Pisidiens (Polyen 7.27.1 ; Frontin 1.4.5 : aucun des deux auteurs nindique Ie sens de la marche d' Autophradates) dans le contexte de la pacification de toute la region meridionale de l'Asic Mincure, a moins quil ne sagissc plutot d'une campagne des annees 380 (supra p. 281). 482 La reference aux Kardakes ne cornportc iei aucun commentaire. Briant 1996, 340 propose une explication tout a fait plausible quant au mode de recruternent de ces contingents en rapprochant Ie textc de Str. 15.3.18 (levees par classe d'age etc.). II y a la un parallele qui ne saurait etrc cornplctcment fortuit avec la cryptie spartiate. lei cornrne la il est probable qu'il y a un telescopage entre des pratiques tres anciennes qui rclcvcnt des rites de passage et une reutilisation beaucoup plus rcccnte a des fins plus utilitaires. Sekunda 1988b y voit la main de Datames (sans aueune preuve comme le note Briant). S'il fallait nornmer un (au des) initiatcurs il paraitrait plus logique de penser au couple Cyrus-Lysandre. Ce sont ecs Kardakes que l'on convoque a Kastolos au dans les autres points de concentration de I'arrncc persc. II y a un lien institutionncl entre ces contingents et la colonisation: c'cst ce que parait montrer l'inscription relative a la komi' des Kardakes evoquec supra p. 195. 4H3 Une absence notable dans cette Iiste : celie des Lyciens. Remarquons ccpcndant que lc texte de Cornelius Nepos (par la faute de l'auteur etlou de scs copistes) n'est pas exempt derreurs et que 1) la possible mention de Termilai dans la source de Cornelius Nepos eut etc peu comprehensible pour cc dcrnier, 2) lc nom des Captianiens rcstc une enigrne. On sait par ailleurs quil est assez probable qu' Artembares secondait Autophradates dans cette expedition, sinon on ne comprendrait pas a quel titre ce personnage a pu cmcttrc un monnayage a Side (supra p. 353 n. 391). Cf. Sekunda 1988b, 49-50. En dcrnier lieu Keen 1998, 167. 474
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mille mercenaires grecs. II parait done y avoir un recrutement sur place, mais aussi la presence de corps en garnison loin de leur terre d'origine w', comparables a ceux que nous avons rencontres a travers le recit de Xenophon en Bolide 485. Datames echoue dans sa premiere tentative pour ernpecher Autophradates de penetrer dans la zone qu'il controle, mais ce dernier une fois engage par les Portes de Cilicie est incapable de conclure et doit faire retraite vers la Phrygie apres qu'une promesse de reconciliation ait ete faite 486. Artabaze, designe comme general du Roi 487, est amene a son tour a combattre Datames. On ne peut guere envisager pour cette campagne que la periode qui suit la pacification de la satrapie de Daskyleion, done au mieux apartir de 360 488 . Elle est comme Ie prolongement nature I de celle-ci dans la me sure ou Mithridate semble poursuivre aux !imites de la satrapie et eventuellement en Paphlagonie (?) 489 un combat d' arriere-garde comparable a la resistance d' Arnorges en Carie apres la disparition de Pissouthnes, Pendant Ies annees interrnediaires, il est assez clair que Datames n'est pas concerne directement par les affaires de I' Asic Mineure occidentale. Jl est occupe par l' affermissement de son pouvoir a l'rnterieur de sa propre satrapie, alms que sa situation vis a vis du Roi devait etre assez arnbigue 490. Malgre la trahison de Mithrobarzane, Artabaze se montre aussi incapable que son predecesseur Autophradates de reduire Ie rebelle. On ne sait ou se placent les operations. Si l'on retient partiellement la version proposee par Cornelius Nepos, 6.1, on peut penser aux confins de la Pisidie. Le fait que Datarnes ait surfrappe le monnayage de Side 491 a pu suggerer que Ie "revolte" s' etait aussi avance vers I' ouest. II a pu y avoir "reconquete" de Side par Datames et Jes monnaies du satrape rebelle seraient posterieures a celles dArtembares deja signalees 492 mais il sagit la d'une hypothese dans la me sure ou la surfrappe ne prouve en rien la saisie de la ville. En realite les monnaies emises au type d'''Arethuse'' ne peuvent l'avoir ete que par Ie general Ioyaliste. II convient done de penser I) soit que Datames agissait la dans le cadre de son mandat, 2) soit que la circulation monetaire couvrait une etendue plus vaste que celie supposee pour la satrapie de Cilicie et que 3) les deux hypotheses loin d' ctre exclusives pcuvent en realite se combiner. Le monnayage d' Artembares a Side pourrait alms sinterpreter comme un ternoignage de I'action de reconquetc d'une partie pcripheriquc du domaine de Datames,
4X4 Pour Sekunda 1988b, 49, (dans Ie meme sens Tuplin) il s'agit en fait de larrnee rassemblee aAke pour la campagne egypticnnc et dont Autophradatcs aurait pris lc eommandement ilia suite du retrait de Datames. La composition de larmee incitcrait plutor a penser qu' Autophradates a fait route par Ie sud a partir de sa satrapie et a travers la Pisidic, la Pamphylie, la Cilieie, pour faire jonetion avec tout ou partie des troupes d' Ake avant de penetrer par lc sud en Cappadocc. 485 Supra p. 238. 4R6 Cf. aussi Frontin 2.7.9; Polyen 7.21.6. 487 Diod. 15.91.2-6; il ny a pas a gloser sur ce titre puisque, quclle quait ete sa position par aillcurs, Artabaze est a ce moment en charge de l'urmee royale (sur ee terme ef. supra p. 26). 4SS A noter que pour Weiskopf 1982, 422, c est au cours de son voyage pour prendre possession de sa satrapie qu' Artabaze est amcnc a affronter Datames. 489 Polyen 7.29.2. 490 II faut accepter lc point de vue de Weiskopf, e.g. p. 424, selon lequel Datames ne doir pas ctrc associe aux evcnemcnts de Ia rcvolte dOrontes et merne d' Ariobarzane (mais notons qu' aucun auteur ~ mcrne Diodore ny fait allusion). Dans 1es annees 367-360 Datames ne parait pas avoir ete officiellernent en situation de rebellion. 491 SNG Berry II 1294-1295 ; d. Morkholm 1964,73. 492 Supra n. 391.
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Cornelius Nepos indique comment Mithridate, le fils d' Ariobarzane qui avait autrefois exerce un commandement sous Datarnes 493 et dont avons vu qu'il operait pour son propre compte en Bithynie ou it proximite, cssaie de revenir en grace aupres du Roi en echangeant celle-ci contre la vie de Datames 494 peu de temps avant la mort d' Artaxerxes a I'hiver 359/358. Une fois Datames disparu, ses descendants continuent it exercer leur pouvoir sur une partie de la region 495. CONCLUSION La "Grande revolte des satrapes" correspond bien a une realitc. Certes, la grandiose fresque de Diodore ne saurait etre prise au pied de la lettre. Tl n' est guere possible d'irnaginer que tous, satrapes, dynastes, nobles perses, cites ont concouru, de l'Hellespont a la Phenicie, en un vaste mouvement conccrte avec Ie roi d' Egypte pour destabiliser le Roi, voire rneme Ie renverser. Les preoccupations des satrapes sont d'une autre nature. Elles constituent en fait une addition de cas particuliers (Ariobarzane, Datames), 11 n'en reste pas moins que la plupart des satrapes de l' Asie Mineure occidentale ont ete impliques, it un moment ou aun autre et merne si ce netait que dubout des levres (Autophradates), dans une seric de mouvements qui se succedent ou se juxtaposent. Orontes tente d'unifier leurs efforts mais il est tres vite con scient de la vanite de son entreprise, qu'il contribue largement a saborder, La remise en question, meme mornentanee, du fonctionnement normal de l'administration achernenide permet it ceux qui agissent a l'echelle regionale (Mausole en Carie) ou locale (Lyciens, Pisidiens, etc.) de saffranchir de leurs obligations a l'egard du pouvoir central (pharos) ou de regler des questions de suprernatie en arrondissant leurs possessions anterieures (Mausole, Perikles), Les cites, ou plus vraisemblablement des factions a linterieur de celles-ci, participent au mouvement et toutes subissent plus ou moins les contrecoups des operations (sieges, exactions, contributions volontaires ou forcees). II ne faut peut-etre pas cependant noircir Ie tableau: nous verrons plus loin que Ie potentiel econornique et social des cites n' est pas trap gravement entarne si I' on quitte Ie niveau des cas particuliers pour celui de l'ensemble regional. Ce sont les evcnernents les plus importants qui se pas sent sur Ie littoral ionien depuis presque trente ans (si I' on excepte la "secousse" de 382/381 qu' on peut difficilement estimer). Et cest peut-etre dans ce contexte que l'on peut comprendre un texte epigraphiquc de Sardes d' origine perse, recopie en grec et edite et commente par L. Robert 496 et dont nous allons maintenant examiner le contenu.
4')3
C'est lui qui avait ete charge dc mener Aspis auprcs du Roi apres sa defaite. d. Cornelius Nepos, Dat.,
4.5. 494 495 49(.
iua, 10-1 I. Fogazza 1972. Rohert 1975, 306-330.
APPENDICE 4
L'INSCRIPTION DE SARDES MENTIONNANT DROAPHERNES
'E1ECOV 1Pl~KOVHX EvvEa 'Aptrx~EP~ECO ~aCHA.d)oV10e;10V av4
8
12
opuxV1a ~PO[J,(pEpVTle; vae. Bap(a)KEcoAUOlTle; u1IapXOe; BrxpnOa1ECO Ati, I? TIpo. 169 (= IK, 28-Iasos, I). 110 Judcich 1892,236 n. 3. III Infra n. 122. 112 Pedersen 1994,215-235. Sur les rapports avec Pricne et la "renaissance ionienne", Isagcr 1994. 99
100
L'AS1E M1NEURE AU IVe s. (412-323 a.c.)
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aisement defendable 113. Ensuite cette montee en puissance provoque la disparition de six poleis leleges 114 (a I'cxception de Syangela et Myndos qui restent en dehors du synrecisme) fondues en une seule: Halicarnasse. La date n'en est pas connue. Des solutions bien differentes ont ete retenues selon les parametres pris en compte, en particulier la simultaneite avec le choix comme capitale 115. Ce synrecisme na rien a voir avec celui effectue par Alexandre et connu par Pline 116. Pour les regions situees plus a l'interieur, et deja sous controlc hekatomnide, l'mformation devient un peu plus abondante grace aux inscriptions. Tout cornme Sinuri 117, Labraunda a livre un document 118 attestant une offrande faite par Hekatornnos, mais a Labraunda le programme des constructions monumentales commence avec Mausole 119 et se poursuit sous Idrieus. Merrie si nous sommes imparfaitement renseigncs pour les autres sites, il est assez probable que la situation est identique. Faut-il attribuer a Mausole lc deplacement et la "refondation" de Theangela 120. II y aurait bien d' autres sites ou des similitudes dans les techniques de construction paraissent impliquer I' action du satrape (Amyzon, Alinda, Alabanda...) 12l. Cela n' exclut pas pour autant que ces cites aient pu, quelque soit leur origine, etre integrees dans le koinon des Cariens. La tentation de dresser un tableau idyllique de la domination mausolienne doit etre temperee par la serie d' inscriptions relatives a des "complots" contre le satrape, trois decrets de Mylasa conserves sur la meme stele 122 et datant respectivement de 367/366, 3611360 et 355/354 par la reference aux annees de regne des souverains perses; il est egalement indique que Mausole exerce les fonctions de satrape 123. Du point de vue historique, le premier - de peu anterieur aux soubresauts de la revolte des satrapes - est sans conteste le plus interessant. Un certain Arlissis fils dOussollos a profite de sa position de depute du koinon carien aupres du Roi 124 pour comploter contre Mausole. Cela se traduit semble-t-il par une denonciation des maneeuvres de ce dernier, mais Artaxerxes ri'entre pas dans le jeu et fait mettre a mort Arlissis. Les deux autres textes sont relatifs a des attentats, I 'un contre la statue d'Hekatomnos, le second contre la personne de Mausole qui echappe a ses assaillants et ces derniers sont lynches par les partisans du satrape. Nous observons dans ces textcs a la fois toute la phraseologie officielle et obligee, surtout dans le premier 125 : reconnaissance du Vitruve 2.8.10 donne unc bonne idee de I'urbanismc de la cite tel que Mausole Ie dcveloppc. Str. 13.1.59. Sur la sujetion supposees des populations lelcges par rapport aux Caricns, cf. Philippe de Theangela, FGrHist, 741, F2 (Athenec 6.271b). liS Hornblower 1982, 78-79 propose 377/376, ou peu apres, en reponsc it la Deuxicrne confederation athenienne ; implicitement Ruzicka 1992, 35 retient une date similaire ; cf. aussi Moggi 1976, 266, 370-365. Bockish 1969, 144 opie pour 367/366 en sappuyant sur Ie monnayagc d'Halicarnassc; Demand 1990, 120, ne tranche pas entre Ics dates extremes. IIi> Varinlioglu et al. 1992, 162 contrairemcnt it ce qui est soutenu it la suite de Bean & Cook 1955, 115 et l44, par Moggi 1976, 263··271 ; Hornb1owerl982, 82 ; Demand 1990, 123. 117 Consecration dune table doffrandc par Hekatomnos. Sinuri, 1,76. II S Labraunda, Ill, 2, 27. 119 Crampa 1972, 6 sq. 120 Robert 1936a, 81-84; Bean 1971, 128-132. 121 Sur I'hellenisation en profondcur de la Carie it lepoque de Mausole, cf. Robert 1946, 506-523 sp. 515. 122 Tod, 138 (SyiP, 167) = IK, 34-Mylasa, 1-3. m Supra p. 137; cest la formule qui est la plus proche des terrncs de chanccllcric pcrses qui nous sont transmis Ie plus Iidelcment par lcs documents arameens (cf. la Trilingue de Xanthos). 124 Exactement, "ayanr ete envoyc par Ies Caricns", Cf. Robert & Robert 1983, 224. 125 l.oc. cit. ligncs 6-8 ct22-23. II]
114
MAUSOLE ET LA GlJERRE DES ALLIES
387
role d'evergete de la cite, non seulement de Mausole, mais aussi d'Hekatornnos et de leurs ancetrcs, comme pour affirmer Ie loyalisme a une veritable dynastie 126. Cela dit le troisieme decret montre clairement qu'un fort parti de la population soutient Mausole malgre la presence dindividus ou de factions hostiles. La poussee vers le nord en Ionie et peut etre en Lydie pose davantage de problernes, d'une part en ce qui regarde l'extension de ces progres et aussi quant a leur signification vis a vis des cites considerees, les rapports avec l'Empire et les voisins, en particulier Ie satrape de Sardes. Nous avons vu que Lucien indique que Mausole etait maitre d'une grande partie de !'Ionie et qu'il setait avarice jusqua Milet, ville carienne. On sait par Herodote 127 qu'il sagit la d'une revendication ancienne 128. Pas plus que Lucien, Polyen 129 ne permet de preciser si Milet a appartenu au domaine de Mausole : en effet, le complot visant a placer les partisans du satrape au pouvoir est decouvert et le representant de ce dernier doit s' echapper de la ville. Remarquons enfin que la logique de la geographic implique que Ie maitre de la Carie du nord se doit de "de boucher" a Latrnos et a Milet. Le recours au monnayage amene a considerer sur dautres bases la question de la presence precoce des Hekatomnides a Milet. Ces derniers ant emis une serie bien connue d'etalon rhodien 130, mais on connait aussi depuis longtemps une autre serie d'etalon rnilesien qui prend la suite des types frappes jusqu' a la fin du v- s. a Milet 131. II nous semble qu'il convient d'attribuer cette emission a I'atelier de Milet 132. Dans cette cite en effet, le monnayage ne commence veritablement a devenir important qu'a partir du milieu du IV e S., la date conventionnelle souvent adoptee, 353/352, est celle de I' annee de la mort de Mausole. Quelques rares monnaies d'argent sont pcut-etre anterieures a cette date (environs de 360) 133 ; mais it convient surtout de noter I'interet de la presence d'un monnayage de bronze qui, lui, pourrait remonter aux annees 375. Ph. Kinns note que la tete du lion de lavers (rosette au revers) n'est pas tournee vers larriere 134. Ce fait remarquable nous parait devoir etre rapproche des tetradrachrnes d'Hekatornnos 135, avec lion de profil regardant a droite devant lui. Par consequent on ne saurait retenir, comme cela a ete parfois le cas, l'''archa"isme'' de ces monnaies comme la preuve qu'il sagit d'une "imitation barbare", En dautres terrnes, labsence d'un monnayage civique de quelque envergure entre 390 et 350, A cornparer avec la situation dc Caunos, supra p. 385. Hdt. I. 146. m Cf. Laumonicr 1958, e.g., 539-540 ; 546. 129 Polyen 6.8. 110 Supra p. 144 et n. 230. 131 Cr. e.g. BMC Ionia pI. XXI, 4 ; sur la date relativement tardive de certaines de ces monnaics, Pfcilcr 1962-1963, 20-21 ; ce qui permettrait de comblcr un evcntuel biatus entre series civiques et series "satrapales" mais Konuk 1998,37, considere que les dates de Pfciler sent trop tardives. m Supra p. 142 sq., contra Konuk 1998, 38-40. 133 SNG von Aulock 2086, datee par I'editcur de 478-390 : mcme type de lion que 2354 ; ibid. 7932 sq., datecs entre 377-353 : lion avec tete vers larrierc, rosette. 134 Kinns 1989, 191 et n. 60 (cf. deja Kinns 1986a, 249) attire l'attention sur la monnaie Sternberg Sale 21, n" 2129. L'avers de eette monnaie se distingue du type qui deviendra usuel au revers des monnaies milesiennes a partir du milieu du lV's. : lion debout regard ant derriere lui, rosette dans Ie champ. C' est deja le type Ie plus frequent sur les bronzes avec monogramme M : cf. BMC Ionia XXI. 7. Pour sa part, Deppert-Lippitz 1980,54 et pI. 9 date ce materiel des annees 340. Des tetradrachmcs de Milet (Apollon de profil a gauche/lion a gauche regardant derriere lui, etoile) figurent dans Ie "trcsor de Pixodaros" (Hurter 1998, pI. 31.13-14). 135 SNG von Aulock 2354 (cf. supra p. 145). 126
127
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alors qu'il y a une tres nette acceleration par la suite, pourrait bien sexpliquer par le fait que Milet frappe a ee moment des series pour les Hekatornnides, en tout etat de cause peu abondantes, sous Hekatornnos d'abord puis Mausole, au debut de son gouvernement, en parallele avec des emissions de bronze destinees a la circulation locale. 11 est impossible de preciser si 1'interruption correspond a une perte du controle de la cite (au moment de la revolte des satrapes?) 136 ou a un changement de la politi que monetaire du satrape. En tout cas Milet est a coup sur dans la mouvance hekatornnide sous Idrieus 137. Si Mausole controle la majeure partie de l'Ionie (Lucien) au debut de son gouvernernent, y eompris peut-etre certaines positions insulaires 138, on doit en inferer qu'il est 1'instigateur de Ia reforme de la Ligue ionienne dont fait etat Diodore ]39 a la date de 373/ 372, reforme qui comporte logiquement un retour au Panionion pres de Mykale, 11 est a noter que le lieu de reunion avait ete precedemrnent transfere sur le territoire d' Ephese dont on sait qu'elle s'opposait aux entreprises du satrape. Cette derniere cite etait alors dirigee par une faction democratique dont le chef etait un certain Herophytos 140. Le point de litige parait avoir ete le controle de Pygela, petite cite situee au sud d'Ephese 141. Comme le montre la description de Strabon 142, Mykale et Pygela sont tres proches et appartiennent au merne ensemble geographique, il est done assez tentant de penser que tous ces evenernents conn us par bribes participent d'un meme mouvement de (re)prise en main de toute la region par Mausole, avec tous les renversements de situation que l' on doit Ie plus sou vent supposer, faute d' avoir la documentation necessaire, Ainsi, Ja litterature ne nous apprend rien sur Priene et ses rapports avec Mausole, mais Ie retour au Panionion implique que I'Hekatornnide ne pouvait pas se dcsinteresser de cette derniere, Pour Ie reste, Ies informations sont extrernernent fragmentaires ct, partant, sont objet de vives controverses 143. A la suite de H. von Gartringen, editeur des 1. Priene, on considere generalement que la refondation de Priene sur son nouveau site date du milieu du IV e s., done de l' epoque de la domination hekatornnide, Son argumentation repose pour partie sur 1. Priene, 4, ensemble de deux decrets pris pour un certain Apellis a plusieurs annees de 136 Kraay 1976, 275, propose une sequence qui serait sujetion puis indcpendance. On remarquera certes quIdrieus ne frappe pas de monnaic au type a la rosace ct quapres 350 Ie monnayage de Mild se developpe de facon significative; mais il nest pas exclu que la cite ait pu jouir, aprcs accord avec Mausolc, dunc autonomic comparable it celie d'Erythrees. 117 FD, lilA, 176 (Tad, 161 B); cf. infra p. 402, les rapports officiels au mains paraissent cxcellents. DS Supra p. 384. 119 Diad. 15049; supra p. 177. Lcs conclusions de Shipporcit 1998, 193-236, sont similaires aux notrcs. 140 Polyen lui donne 1c nom de Herophytos (7.23.2), Arrien, An., 1.17.9 sq. lc qualifie de "liberateur de la cite" (sa tombe sur I'agora est profanee par les partisans de l'oligarchie qui ant pactise avec Mcmnon). 141 Polyen, ibid. Pygcla est situee a proxirnitc de Marathesion (cE. Str. 14.1.20 ). Elle contribuc pour un talent puis un talent et demi it la ligue de Delos, cf. Meritt et al. 1939,543; Xen., Hell., 1.2.2 (en revolte en 410/ 4(9). Elle semble avoir connu une pcriode dc pleinc autonomie encore dans la premiere moine du IV' s : une serie de monnaics a etc datce du debut IV'S. par Regling 1922,46-53, lcgcnde tl1[~J Mm)(J0WA[A01)] de l'inscription Labraunda 28 est-il un fils du satrape (notons en passant quil s'agit (j;un nom perse) en tout cas Mausole parait avoir une posterite quenrcgistrc Syll.', 603 (Delphos) ou Pixodaros fils de Krates se definit comme descendant de Mausole fils d' Hckatomnos ; Hornblower 1982, 40 n. 28 ecarte ces temoignagcs pour rester fidclc a ce que dit Strabon. 12 Diod. 16.69.2. ; Plut., Ages., 13, rap porte la supplique du satrape Idrieus a propos dun certain Nicias. Ccla suppose qu'Idrieus exercait des fonctions officielles vraisemblahlement au nom dc son frere avant son accession a la charge satrapale puisque Agesilas meurt en 359 (36(),)). On penscra aussi a la prise de Latmos au nom de son frere, Polyen 7.23.2. I] Diod. 16.42.6-9. Hornblower 1982, 43, souligne les difficultcs qu'cngendre la chronologie assignee a cette expedition mettant en avant Isocratc, Phil., 103, OU cc dernier expose son espoir de la defection dIdrieus. Mais lon sait que les Hekatornnides ont toujours ete suspcctes de pratiqucr un double jcu. L'argumcnt nest done pas en soi decisif, Diodore insiste beaucoup sur la relation entre le debut du mandat dIdrieus ct l'cxpedition de Chypre, mais il situe dans le mernc mouvernent laction centre Sidon puis I'cxpcdition en Egypte. Faut-il rabaisscr la chronologie de I'cnsernble comme Ie faisait deja Bcloch 1923, 285-287 ; ef. Ruzicka 1992, 117 et 202 n. 59 ; Hornblower, CAH, VP, 9l et Konuk 1998 qui en tire argument pour confirmer I'attribution des monnaies roi archer/ satrape a cheval a lexpedition vers Chypre et la frappe a Evagoras II. Mais les evencrnents, et Ie monnayage de Sidon nentrent que rnalaiscment dans cette chronologie basse (infra p. 415 sq.). Le problcme reste done cntier. Unc solution alternative pouvant etre Ietalement dans lc temps des evenements susmentionncs. 14 Petit 1988, 316 sq. 1\ Coli. Froehner. 96 (Tralles) ; supra p. 136. 8 9
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Tout cela n' empeche nullement ldrieus et Ada d' etablir des contacts avec diverses cites de la Grece d'Europe et de eonforter leur image par I'erection de quelques monuments dans des circonstances qui nous echappent mais qui repondent a I' evidence a des objectifs de propagande. Les Milesiens 16, citoyens d'unc tres ancienne et illustre cornmunaute grecque, se font les promoteurs ou les intereesseurs de I'image du couple a Delphes. Image materielle puisque le bloc sur lequel est gravee I'inscription servait de base aux statues des dynastes, mais aussi "image" que l' on veut accrediter en faisant d' eux de simples particuliers a la greeque : ldrieus fils d' Hekatornnos, Ada fille d'Hekatomnos. Mais Ie seul rappel de cette filiation unique place les freres-epoux dans un cadre qui est bien etranger a la cite grecque classique 17. Com me le note M. N. Tod, le seulpteur est Satyros de Paros, I'un des auteurs du Mausolee IS. En revanche, il parait plus improbable qu'une analyse similaire puisse etre proposee pour un relief de Tegee 19 representant Ie couple entourant un Zeus Labraundeus polymaste avec le bipenne sur l'cpaulc droite et la lance dans la main gauche 20, avec cette simple mention: Zeus-Ada-Idrieus. WaywelI suggere que dans les deux cas (Delphes, Tegee) ldrieus etAda ont contribue financiercment a la reconstruction des temples d' Apollon et d' Athena Alea, C'est done la un moyen de manifester Ie philhellenisme de la dynastie, ce qui n' a rien de contradictoire avec la domination exercee sur un certain nombre de cites grecques insulaires ou cotieres, Dans le domaine insulaire, ldrieus consolide les positions acquises par son predecesseur a Rhodes, Cos et Chios 21. II serait eependant hatif de eonclure qu'il y a eu annexion pure et simple des trois rles. L'histoire du monnayage de ces trois cites ri'est pas completernent etablie mais il parait assure que certaines series ont ete frappees pendant cette periode. La presence de garnisons est synonyme d'un assujettissement plus marque mais non d'une integration ala satrapie. La participation de ces trois cites a Ia defense de Byzanee contre Philippe doit en effet etre consideree plutot comme le signe d' une certaine latitude d' action des cites (a condition naturellement qu' elle n' aille pas dans un sens contraire aux interets du satrape) que comme un engagement direct des Hekatomnides dans Ie conflit 22. En Carie et sur le continent, I' epoque d'Idrieus parait etre celle d'une conquete interieure. II est assure que sous Mausole bien des reticences ou des resistances se sont manifestees et que I'accroissernent de sa zone dinfluence ri'est pas alle sans conflits. Le
Tod, 161 B (Syll.'. 225' FD, 111.4, 176), cf. Marcadc 1953,93, pl. XVII, 1. Supra p. 139. IS Tod, 181, ef. Picard 1954, 75 sq. ; 870 sq. Sur le Mausolee et les elements de comparaison, et de difference, avec Ie temple d' Athena a Priene et ce1ui de Zeus ii Labraunda, Hoepfner 1966, sp. 113. IY Sur ce monument de Tegec, ef. Foucart 1910, 145 sq. ; Jonkces 1948, 31-33, qui propose de voir dans ce relief I'ceuvre d'un Carien ayant accompagne Scopas a Tegee au moment de l'crcction du temple d' Athena et apres lachevemcnt de son u uvre au Mausolce. La photo de cc relief (qui sc trouve au British Museum), ibid, p. 33. Unc meillcure reproduction est fournic par Borchhardt 1978, pl. 73, 8. Notons en passant que cc dcrnier (p. 190) n'indique pas la provenance de cette stele et que la legcndc qui est attribuee ii la photo: "Votivrelief... fur Zeus Labraundos von Mylasa" a amcne Dupont-Sommer 1979,176, ii ecrire qu'il s'agit d'un relief de Mylasa. En dcrnier lieu Waywell 1993,79-86 refuse toute correlation avec Scopas, il propose de voir dans ce monument la partie haute d'un decret. 20 La comparaison avec les monnaies rend probable quil sagit Iii d'une representation-interpretation de la statue cultuelle du dieu. Infra p.. 407 sq. 22 Infra p. 420. 16
17
350-334 : LES AGES OBSCURS
403
"regne" d'Idrieus bien que relativement court ne revelo pas, pour ce qui est connu ii ce jour, de telles tensions et il apparait qu'il a ete tres productif dans nombre de dornaines, en particulier celui des constructions. En 346, Isocrate 23 decrit le satrape comme l'homme le plus riche parmi les continentaux (done ici les habitants de I' Asie Mineure). C'est probablement grace a cela qu'il peut entreprendre ou achever des travaux importants, tant pour I'embellissernent de sanctuaires ou de sa capitale que pour la mise en eeuvre d'un programme de constructions a vocation militaire. Evoquons simplement ici la realisation architecturale imposante d' Amyzon "signee" par Idrieus 2S. On ne sait si ces travaux ont ete commences sous Mausole et seulement acheves sous son frere, La comparaison avec Labraunda 26, OU Ie frere cadet parait avoir developpe un programme complernentaire voire merne concurrent de celui de son aine, donne peut-etre un element de reponse a cette interrogation. On sait que Ies Hekatornnides ont aussi construit a Latmos 27. 11 existe des edifices comparables ii Theangela 28, Alinda (I'utilisation du granit interdit ici toute comparaison stylistique) 29, sans aucun doute aussi a Mylasa dont on sait peu de choses de son developpernent architectural dans la mesure ou les vestiges ont ete tres largement detruits soit par fa ville romaine, soit par la Milas moderne; cf. aussi l'amenagement des substructions du site de Sinuri 30. La plupart de ces constructions ternoignent d'une tres etroite parente qui ne peut les situer a des epoques trop eloignees, Bien des edifices de dimensions plus modestes qui datent aussi de cette merne peri ode comprise entre 350 et 335 jalonnent la cote 31, etc. 11 s'agit Iii de manifestations tangibles d'un renforcement de I'unite de la satrapieprincipaute, sur laquelle nous sornrnes mieux renseignes grace a la diffusion de la langue grecque comme langue d' expression ofticielle de ces cornmunautes, D' ailleurs, certaines d' entre elles vivaient ii linstar des cites grecques dont elles avaient copie les institutions, ou plus exactement elles avaient inflechi les leurs en leur dormant I' apparence et les denominations grecques les plus approchantes 32. II ne faut rien attendre pour l'instant de l'epigraphie de Mylasa et d'Halicarnasse pour ces periodes. En revanche les sites d'ensembles plus modestes ayant ete moins dctruits ou pilles peuvent s'averer plus parlants. A Sinuri, alors qu'Hekatomnos est seulernent present par la mention de I'offrande d'une trapeza et que Ie hasard (?) a fait qu'il ny a rien pour Mausole, Idrieus et Ada apparaissent dans plusieurs inscriptions 33. L'une en particulier fait mention d'une EVTOA~ d'Idrieus et Ada (sans autre precision) 34. Le choix de ce terme montre bien quel type de rapports pouvait Isoerate, Phil., 103. Le lieu est occupe par un cultc d' Artemis qui est hien anrerieur au IV's. Cf. par cxemple lcs statuettes du VI's. et le fragment de frise en terre cuite du v- s. : Robert & Rohert 1993, 63 et fig. 35. 25 Robert & Robert 1993, 63 ; consecration du propylee par Idrieus, n" I, p. 93-95; mise au point commode sur Ia presence hekatornnide en Carie intcrieurc, p. 90-92. 26 Labraunda, 6. 27 Supra p. 392 n. 176. 2x Bean & Cook 1955, 122 sq. ; 1957, 89 sq. 29 Cf. Rohert & Robert 1983, 6 sq. ; ef. deja Robert 1953, 13. 30 Devambez 1959.28-29. 31 Radt 1970, pour ne retcnir que des monuments editcs. 32 cr. provisoirement Bresson & Debord, 1985, 210 sq. 33 Sinuri, 73 et 75. 34 Sinuri, 73 : texte ameliorc Robert 1949b, 63 sq. (= Hornblower 1982, M5). 23 24
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exister entre les maitres de Ia Carie et unc petite comrnunaute rurale avant son absorption par Mylasa. A noter cependant qu'Idrieus se definit lui-rnerne comme Mylaseus dans l'une des dedicaces de Labraunda 35, ce qui inciterait a quelque prudence a definir l'''en dedans" et l'''en dehors" de la satrapie par l'opposition quasi mecaniste de ces appellations. Cela nous amene a poser la question des rapports de cites comme Erythrees avec Idrieus a partir de la nouvelle inscription publiee par E. Varinlioglu 36. Ce dernier suggere que ce decret a pu etre pris en meme temps que celui pour Mausole. II semble pourtant y avoir plusieurs arguments qui incitent a pencher plutot pour la peri ode ou Idrieus est lui-merne satrape : par exemple les colleges qui sont aI' origine du decret sont different», Les seuls strateges dans celui pour Mausole et trois colleges dans Ie second: strateges, prytanes, epimenioi. Le dernier nomme apparait ici pour la premiere fois. II sera rernplace dans les institutions democratiques par celui des exetastai 37 et cela tendrait a prouver que nous sornmes dans un cadre oligarchique qui sierait bien a un controle, qui reste a definir, des Hekatornnides. Autre difference, la citoyermete parmi les honneurs que recoit d' office Mausole. II parait significatif que dans le cas d'Idrieus il sera citoyen d'Erythrees sil le veut et choisira son genos 38. Par consequent, meme si les Erythreens entendent sauver les apparences de l' autonomie, ils accordent par exemple a Idrieus un droit de priorite dans les proces qui pourraient Ie concerner (ou qu'il pourrait intenter...). II est clair que le droit de cite de la modeste Erythrees pese comparativement peu face a la puissance du recipiendaire, Nous semmes ici dans un rapport de forces qui prefigure ceux de l' epoque hellenistique. II n' est pas fait mention d' Ada dans le texte, mais on observera que dans le decret pour Mausole les honneurs concedes a Arternise viennent a la fin de la stele, or celle-ci est mutilee a cet endroit. On se demandera enfin quelle est la chronologie relative de ce document par rapport au traite passe avec Hermias 39. Bien qu'il n'y ait aucune preuve irrefutable, il est tentant de penser que ce nouveau texte est anterieur et que par consequent il suit de peu I'accession d'Ldrieus aux fonctions satrapales. La mort d'Idrieus en 344/343 entraine le renouvellement de la situation qui avait permis a Artemise de se saisir seule du gouvernement pour quelques annees : Ada (I) la sreur-cpouse devient la maitresse unique de la Carie. Cependant il convient tout aussit6t de remarquer qu' a I' exception des textes litteraires, aucune source ne nous renseigne sur cctte peri ode. Profitant des evenernents de 34 I1340 (la COIncidence parait trap belle pour etre purement fortuitc), Pixodaros evince sa sceur, laquelle sexile a Alinda 40, et exerce un pouvoir satrapique reconnu, au moins en 337 comme le montre la Trilingue de Xanthos, si 1'0n accepte la datation basse. Nous ne possedons a vrai dire qu'une information assez mince sur l'activite du satrape. Du point de vue architectural (la phase des grandes
l.ahraunda, TIL2. n° 15-19. Varinlioglu 1981,45-47. 37 E.g.IK, l-Erythrai, 10; 12, etc. 38 Cette mention semble confirmer Ihypothese emisc (Debord 1984, 210) sur la nouveautc que rcprescntaicm les institutions en -tys tchiliastys. ctc.) dans les cites de la facade anatolienne (contra Gauthier, Bull. ep., 1987, n'' 230), puisque dans une cite ou sont attestecs de tellcs subdivisions, seu1ement it partir de lepoquc hcllcnistique, il est propose it Idricus de choisir le geno.\' auquel i1 appartiendra. 39 IK,I-Erythrai, 9, infrap. 418. 4iJ Arricn. An .. 1.23.8. 35 36
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entreprises en ce domaine semble etre achevee, peut-etre faute de moyens) on rei eve en tout et pour tout un autel, peut-etre, a Xanthos 41 ; meme doute pour un autre homos a Mylasa 42. Comme on le voit cela est extremement mince, les temps ne sont pas a la magnificence. II existe quelques traces de son activite politique dans un decret des Plataseis ou Pixodaros est appele satrape s ', mais en realite son nom figure la comme element de datation par reference aI'autorite officielle sur la region. En Lycie, l'inscription bilingue (grec-Iycien) TL, 45 nous apprend qu'un certain nombre de cites lyciennes: Xanthos, Tlos, Pinara, Kadyanda recoivent un privilege que le mauvais etat de conservation de la stele ne permet pas de definir avec precision 44 (dime sur les transactions "internationales?"). 11 est peut-etre aussi fait mention dans le texte d'une guerre avec Caunos. Ce nest done sans doute pas un hasard si le texte le plus important a ce jour concernant Pixodaros provient aussi de Lycie, de Xanthos. II s' agit de la fameuse inscription trilingue datee de I' an I d' Artaxerxes, dont la date - et par consequent le contexte - ont ete si vivement discutes, Comme dans nombre de cas deja signales en Lycie et aussi a Tralles, il s'agit ici de decisions a caractere religieux. II n'est pas possible d'etablir sil y a un lien entre cet acte et la campagne supposee a Caunos. II convient en effet de rappeler que le basileus Kaunios, principal beneficiaire de la consecration des Xanthiens et de leurs perieques, etait connu a Xanthos au moins des I' epoque de la domination de Tissapherne 45 ; mais qu' il est aussi present a Cos, ile controlee par les Hekatomnides 46. Le texte de Xanthos est precieux par les indications qu'il fournit sur I'organisation administrative de la province 47. Un personnage au nom carien, Artemelis, est epimelete de la cite de Xanthos et cela est a rapprocher de la decouverte en Lycie orientale par J. Borchhardt 48 d'une tombe-tumulus dont la seule decoration est un autel a la double hache, marquant ainsi la volonte du defunt de sidentifier fondamentalement comrne carien. Les deux archontes de Lycie ont pour leur part des noms grecs, Hieron et Apollodotos. C' est la un fait dont il semble que l'on na pas suffisamment souligne l'importance. S. Hornblower 49 fait observer que leur patronyme ri'est pas indique et que par consequent on ne saurait preciser s'ils sont grecs ou si on les a seulement appeles de noms grecs. La premiere hypothese reste la plus probable mais dans les deux cas ces noms plaident plut6t pour la datation basse de I'inscription. Notons que le monnayage de Pixodaros 50 est
41 'l L, 145.1. 11..12; il ny a pas de raison de penser que I'autel du Roi de Caunos et d'Arkesirnas dans la trilingue avait ete offert par Pixodaros conjointement avec les Xanthicns et leurs perieques, (contra Hornblower 1982,279). 42 IK, 34-Mylasa, 7 ; mais heaueoup plus probablement eette offrande est faite par Mausole et non par Pixodaros eomme les traces de lettres copiees au XVIll' s. Ie laissent penser (par reference it IK, 34-Mylasa, 6). 43 Labraunda, 1Il, 42 (HornhIower M8). 44 Tl., 45 1. I sq.' i!8WKEv nl~Q,8ap(J)L 'EK[a}r{'l.llvO\J :;::a]vI8Iiolll;, TA.WlWl;, Ilrvc.peotj c, Kav8au8l'olt]; 8EK&~T)V 1ij; E~.l1IOp[la; ~ij;] ouaT); [[.Iv ~ijl rei oAjEl. Cf. Sveneiskaya 1967, 84 sq. (il rapproeher de TL, 65 I. 317). L'ex istence memc d'un eonflit entre Pixodaros, les cites susnommccs d'une part et Caunos de I'autre est loin dctrc assurcc, cr. Bean 1953, 18 n. 30 a ; ef. aussi Hornblower 1982, 115 n. 174 ; 121 n. 128 ; 161 n. 198. En dernier lieu Bousquet 1986, 10 ; Briant & Deseat 1998, 82. 45 Laroche 1980,6 (mais cf supra p. 68). 46 Paton & Hicks 1891, 109 n. 53; interpretation de ee tcxtc par Bean 1954. 47 Supra p. 357. 4~ Borchhardt 1978, 183-191. 49 Hornblower 1982,76. 50 PI. V. 9 et 13.
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identique a celui de ses predecesseurs par les themes retenus pour l'illustration de ses monnaies. Cependant il est le seul des Hekatornnides a frapper l'or >' et il faut penser qu'il s' agit la d'une manifestation de difficultes entrain ant la fonte des reserves metalliques, Plutarque 52 est le seul auteur a rapporter le ballet diplomatique qui eut lieu entre les cours de Macedoine et de Carie et qu'il convient de placer tout a la fin du regne de Philippe II. Rappelons succinctement ce que nous dit Plutarque: Pixodaros cherche a devenir l' allie de Philippe; illui propose de sceller un accord par Ie mariage de sa fille ainee (Ada II sans doute) et d' Arrhidee (Ie futur Philippe III). Ayant appris cela, Alexandre fait I'offre au Carien de remplacer son derni-frere, ce que Pixodaros accepte avec empressement. Cette demarche declenche la colere de Philippe qui avait semble agreer le premier projet. Que retenir de cette anecdote? Les mariages entre Macedoniens et Perses ne sont pas une nouveaute puisque nous pouvons noter qu' Alexandre Ter avait donne sa seeur en mariage au perse Boubares 53 et que ce mariage avait ete en quelque sorte "sanctifie" par Ie pouvoir perse puisque Amyntas, Je fils issu de cette union se vit doter d' Alabanda (plus probablement Blaundos) 54 en Phrygie. Pixodaros ri'est certes pas un Perse, mais il est le dernier representant d'une dynastie connue de tous pour sa richesse et sa puissance gagnee au service de l'Empire. Les modernes ont discute le sens qu'il convient dattribuer a cette tentative avortee 55. Faut-il suivre Plutarque lorsqu'il considere qu'il s'agit pour Pixodaros d' assurer une alliance militaire avec la Macedoine, attitude sur laquelle il serait revenu plus tard en "persisant"? Dans quelle mesure ri'y a-t-il pas la une trace supplernentaire de l'intoxication permanente chez les Grecs (principalement les Atheniens) concernant la politique des Hekatomnides? On peut aussi bien penser quil s'agit d'une maneeuvre plus complexe ou, avec I' assentiment tacite du Roi, un satrape cotier s' efforce d' etendre le reseau de ses relations, appliquant les preceptes qu'Herodote prete aux Medes 56 puis aux Perses. Quoiqu'il en soit, ce rapprochement echoue dans la mesure ou il devient en quelque sorte une affaire interne a la Macedoine, revelant les tensions profondes qui secouent la cour de Pella. Soit qu'il ait ete personneUement decu du refus macedonien, soit sur ordre royal, un mariage est conclu entre Ada II et Orontobates et ce dernier est bientot associe au pouvoir satrapal 57. Quels qu' aient ete les revirements de la diplornatie hekatornnide, ce mariage et ses consequences doit etre considere comme un cuisant echec pour la dynastic carienne. Malgre les hypotheses de Th. Petit 5R, il montre combien la marge de rnanreuvre dont elle disposait etait mince lorsque le pouvoir central decidait de rendre plus concret son controle effectif sur llne region. En ce sens Ie sort de la Carie ne se distingue guere de celui des satrapies "hereditaires" tenues par des Perses (Daskyleion).
Robert & Rohert 1983, 91 n. 63; Konuk 1993,241-242 (ef. PI. V, 10-11). Plut., Alex., 10. 5, Hdt. 5.21 ; ef. Hornblower 1982, 218. 54 Cf. supra p. 188 n. 206. 55 Hornblower 1982, 221 ; Griffith in Hammond & Griffith 1979, 679 sq. 56 Supra p. 78. 57 Supra p. 146; Arrien, An., 1.23.8 et Str. 14.2.17, fournissent des versions eontradietoires de lenchainemcnt des faits. 5S Suprap.137. 51
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2. LES INSULAIRES Nous avons a vu plus haut 59 comment Mausole avait profite de la Guerre des allies pour susciter des regimes a sa devotion. 11 apparait que sa mort suscita quelques espoirs de liberation de la tutelle carienne, en particulier a Rhodes. 11 n' est en effet pas justifie de rejeter comme pure invention la tentative malheureuse que firent les Rhodiens sur le port dHalicarnasse 60. 11 faut bien que le "Discours Rhodien" de Dernosthene ait repondu a quelque velleite de soulevement, mais surtout Ie ProLogue 23 6 1 apporte des precisions dont R. Clavaud a raison de souligner qu'elles nont pas recu suffisamment d'attention de la part des commentateurs modernes. 11 y a eu non pas une mais deux interventions rhodiennes a Athenes, L'une est le fait de dernocrates exiles a laquelle repond Ie discours Sur La Liberti des Rhodiens, l' autre des oligarques au pouvoir dans l'Ile qui inspire a Demosthene soit un discours dont nous aurions ici le prologue soit, comme le suggere R. Clavaud 62, une simple intervention a l' assemblee qui aurait ete integralement conservee, Le point commun entre ces ambassades est quelles viennent demander de I'aide a Athenes, mais les objectifs sont differents, Les dernocrates veulent rentrer dans l'Ile et ils ne le peuvent que par un renversement des oligarques soutenus par Arternise. Demosthene plaide en leur faveur bien qu'Ils aient eux-rnemes fait basculer l'Ilc du cote carien et se soient comportes avec impudence a son cgard. Ils se font desormais les suppliants de la cite 63. Les oligarques ont une toute autre perspective. Peut-etre alarrnes par les nouvelles qui viennent d' Athenes, ils decident de se placer en position de force par rapport a leurs ennemis en prenant l' offensive contre Ie pouvoir carien a un moment ou il est presume affaibli 64. On sait quelle fut I'issue de cette affaire et les propos severes de l' orateur : "quand ils entreprennent une guerre pour leur compte vous avez plus de tracas pour corriger leur presornption et leur malchance" parait tout a fait correspondre a la situation que decrit Vitruve, c'est-a-dire a I'expedition malencontreuse des Rhodiens a Halicarnasse, et par consequent en confirmer I' existence. Contrairement a ce que pense R. Clavaud, il me semble que ce discours prend naturellement sa place quelques temps apres le raid, alors que la harangue n'cvoque nullernent l'idee d'une quelconque intervention hors de I'Ile de Rhodes. La poursuite et meme, comme nous venons de Ie voir, le renforcement du controle carien n' a pas laisse beaucoup de traces tangibles 65. II en va de meme pour Cos 66 OU la presence hekatomnide parait pourtant permanente. Par
Supra p. 381 sq. Vitruvc 2.8.14-15 ; Berthold 1978, 129-134; 1984,32 n. 44, plaide dans le sens du rejct de ect episode. Cf. supra p. 400. 61 Dcmosthcnc, Prologue 23, Clavaud CUr. 62 Clavaud, 149 n. 5. 63 Dcrnosthcnc fait observer que les Athcnicns ont sauve chaeun dentre eux (done dernocrates ou oligarques) lun apres l'autre, en rappel ant par allusion les interventions d' Athcnes en faveur des Rhodiens quel que soit la nature du gouvcrnemcnt en place. 64 Le Prologue, cf. particulierernent le § 3, est une charge contre I'impudence des envoyes des oligarques. 65 En 346, Dcmosthcnc, Paix, 25, observe que 1c Carien (Idrieus) occupe Ies ilcs de Chios, Cos et Rhodes. Une monnaie rhodienne datee hypothetiquement des annees 340 porte une "tete satrapale" mais cf. infra p. 485. 60 Demosthcnc, lac. cit. ; Sherwin- White 1978,76 et n. 241 a la suite de Hill idcntifie une tete feminine qui apparait au IV'S. sur les monnaies de Cos avec Artemise suggerant que certaines pourraient avoir ete emises apres la mort de Mausole. C est unc hypothese UIl peu avcnturcc, mais cf. supra p. 381. S9
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rapport a la situation anterieure la seule modification importante est I'assujettissernent de Chios 67 qui etait sans doute restee I' alliee de Mausole puisqu' elle nintervient pas, comme Ie note Demosthene 68, lorsque Ie satrape met la main sur Rhodes. Elle subit Ie meme sort de la main d'Idrieus. En 346, la pression du Carien est done considerable sur la clerouquie athenienne de Samos et on s'cxplique mieux ainsi les contingents de clerouques envoyes successivement par Athenes 69. Assez rapidement les preoccupations des protagonistes vont devenir d'une autre nature avec la montee en puissance de la Macedoine, qui amene a un rapprochement entre Athenes et les lIes rneridionales. Plus au nord, I' evolution de l'Ile de Lesbos 70, pour laquelle nous possedons une information un peu plus abondante, montre bien les soubresauts et les ambiguites de la politique egeenne en ce milieu du lye s. La situation est rendue encore plus compliquee par le fait que, a la difference de toutes les iles comparables, le synrecisrne na jamais pu s'y realiser, Autre originalite par rapport aux iles meridionales, la loyaute de Mytilene et des autres cites lesbiennes a I'alliance athenienne ne parait pas avoir ete remise en cause par la Guerre des allies. Rappelons qu'en 367 le pcuple de Mytilene (auquel on associe Methyrnna, Antissa, Eresos et Pyrrha) 71 est loue pour sa fidelite. II est vrai que depuis 375 au moins 72, une garnison athenienne est installee aMytilene. Elle s'y trouve encore en 371 au moins 73. II ri'est fait nulle allusion a Lesbos au cours de la guerre proprement dite. Dans la periode qui suit Mytilene parait se comporter en alliee assez libre de ses choix 74. A une date de peu anterieure a 350, les Mytileniens sont passes sous un gouvernement oligarchique 75 mais ils ne quittent pas pour autant la mouvance athenienne 76. On se dernandera cependant sil n'y a
67 Demosthene. loco cit, Bosworth 1980, 178, propose de meurc Enee 11.3 en relation avec cet evenement, Cc qui parait incompatible avec la date de composition de [' ceuvre. 6S Demosthene, Rhodiens, 3. 69 Supra p. 292. 70 Pistorius 1913 ; cf. aussi Brun 1988a, 380. 71 Tod, 131; supra p.289. On rapprochera aussi Tod, 163 (IG, XII. Supp!. 3) qui montre que les Mytileniens geraient leurs affaires de Iacon autonomc en obtenant une reduction des taxes sur lexportation du blc du Bosphore. Faut-il considcrcr dans ee decret, dont la date n'cst pas fermement fixcc, vcrs 350, la mention sans autre precision "les Mytileniens" comme indice d'un gouvernement non dcmocratique? 72 Monument de Chabrias; cf. Burnell & Edmonson 1961.85 sq.; supra p. 287. 73 lsee, Astyphilos, 14 ; cf. Burnell & Edmonson 1961, 86. 74 Cf. en 363, Dcmosthene, c. Aristocr., 143: Thersagoras et Exeklestos, les meurtriers de Philiskos d' Abydos fait recemment citoyen athenien (supra p. 299), se refugicnt it Lesbos. Demosthene fait observer que Philiskos n' avait pas obtenu un decret similaire it eelui qui est rcclame pour Charidcmos et qui prevoit les peines les plus severes contre un eventue! meurtrier, ~ 91 : "Quiconque tuera Chari demos sera sournis it la prise de eorps ; si quclqu'un, particulicr ou cite, I'enleve au saisissant, il sera mis au ban de la Confederation" ref. 142). Ce dcveloppement appelle deux remarques, it ccttc cpoque Lesbos (dans son ensemble dapres Ie texte) apparticnt it la Confederation et e11e est tenue d'en appliquer les lois mais, au vu et au su de tous, les tyrannoetones ont ete accueillis it Lesbos ; vers 358, le Px-Dcmosthcne, C. Polycles, 53, atteste la perception it Mytilenc de l'indemnite de nourriture pour lequipage d'une triere ; en 354/3 1cs Mytileniens dedicnt une couronne it Athena, IC, IF, 1437, 1. 14-15. 7S Demosthene, Rhodiens, 19; Org. fin., 8. La faction oligarchiquc a probablement expulse plusieurs de ses advcrsaires cf. lsocrate, Leure. 8, note suivante. 76 Parmi d'autres, Glotz 1941, 280 n. 73 ct Bengtson, commentaire it SV2, 328 (Tod, 168) d'apres Dcrnosthcnc, Rhodiens, 19 concluent que 1cs Mytilenicns ont quirte l'alliance en rnerne temps qu'ils ehangeaient de regime. Comme le note it juste titre Cargill 1981, 95 n. 39, la lettre d'Isocrate, 8.7, adressee aux oligarques de Mytilcne (Ies destinataires sont 1cs apxov~£~ et non le demos) affirme que l'orateur a toujours oeuvre en leur faveur et celie des autres allies (ilfliilV KlX1TfllV aAAmv GUfll.uxxmv). Il ne doit pas y avoir de doute sur Ie fait qu'au moment
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pas eu quelques peri odes de flotternent en particulier en ce qui concerne Ie paiement des syntaxeis, lorsque la marine athenienne ri'etait pas en me sure daider efficacement a leur perception. C'est a l'une de ces expeditions que fait allusion I'mscription IG, IF, 207, en 349/ 348 si l' on retient cette date 77, ou l' on voit Chari demos, Chares et Phocion prendre contact avec Orontes apres avoir recu (ou exige") la contribution de Lesbos 78. Faut-il voir une reaction directe a cette exaction dans I'etablissement d'une tyrannie anti-athenienne par Kammys 79, que le stratege Phaidros, dont on peut penser qu'il avait conduit une flotte au nord-est de 1'Egee, a du contribuer a deloger de la cite pour y reintroduire la dernocratie (1. 10) 80. 11 est assez tentant de placer a ce moment le discours sur Mytilene de Dernosthene dont nous ne possedons que le prologue et qui evoque de facon assez vague l' oppression qui pese sur le demos de Mytilene que l'orateur invite a secourir 81. L'une des clauses du decret Tod, 168 parait repondre aux revendications des insulaires dans la mesure ou le renouvellement de I' alliance en 346 prevoit I' abandon par Athenes du montant de la syntaxis 82. Cet acte doit etre replace dans un contexte plus general, il suit de peu la Paix de Philocrates 83, et le decret est pris le meme jour que celui pour les fils de Leukon, roi du Bosphore, probablement dans 1'ambiance de reconstruction qui suit la paix si cherernent acquise, avec en particulier l'abandon des anciennes positions en Chalcidique eten Thrace. On revient donc ala politique traditionnelle en direction des iles, des detroits, de la mer Noire. En ce qui conceme Methyrnna 84, nous navons aucune indication depuis la date de l'entree dans la Deuxieme confederation en 378/377 85. Vers 345, elle est sous la coupe d'un tyran du nom de Kleomis. Isocrate Ie presente cornme un "bon" tyran 86. L'une des raisons en est qu'a la difference de Kammys a Mytilene, Kleornis est un ami des Atheniens, Par un decret, ces derniers le louent pour son attitude mais surtout pour avoir rachete des citoyens
au elle est ecrite, l'appartenance ala ligue na pas ete denoncee, La date de cette lcttre n'est pas clairement fixce, Mathieu, CUF p. 173 propose soit les annees 353 ou 352 soit 349 ou 348. La recherche de la coherence de l'ensemble des documents invite a proposer 350 ou 349. La conclusion que les oligarques sont reste fideles a l'alliance parait pouvoir etre encore confortee par Dcmosthene, Org .. fin., 8 : "la democratic succombc a Mytilene ; vous vivez tranquilles, et celie de Rhodes est detruite ; elle etait votre ennemie dira-t-on ...... Manifestement pour Dernosthene les deux cites ne sont pas dans une situation identique. 77 Supra p. 350 sq. Sur l ' ordre des evenements, cf. Glotz, loco cit. n Brun 1988, developpe I'idee, peut-etre un pcu trop subtile, que la mention des syntaxeis de Lesbos, pourrait masquer lc fait que celles-c:i sont pcrcues sur toutes les cites sauf Mytilene. 79 Demosthene, c. Boiotios, 36-37. 80 Phaidros est l'un des promoteurs du decret Tod, 168 (fG, IF, 213 ; Syll.', 205 ; 5V', 328) ; cf, Pistorius 1913, 154; Judeich 1892, 295 sq. Rl Clavaud, 16, pense que ce discours dont nous avons seulcment le prologue 36 (37 Bekker) est a placer a la mernc epoquc et dans la meme ambiance que Rhodiens. II voit la main dc Mausole dans I'opprcssion de la democratic a Mytilene. Comme nous l' avons note supra n. 74, il n' y a aucune preuve d'une intervention aussi septentrionale de la part du Carien. 82 Brun 1983, 80 sq. 83 E.g. Cawkwell 1978, 92 sq. R4 Buchholz 1975. R5 Tod, 122 = IG, IF, 42 (supra p. 285). 86 Isocrate, Lettre 7, 8 sq. le cite en exemple a Timoihec, fils de Clearchos tyran d'Heraclee du Pont (supra p. 301). A comparer au qualificatif rctcnu par Tod, 170: avTjp aya.86s. En revanche Athencc 10.442 sq ; 443 a, attribue a Thcopompe (FGrHist, 115, F219) un jugement ncttcment moins favorable, mais on sait que ce dernier netait pas specialernent philo-athenicn.
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atheniens captures par des pirates 87. Comme le note J. Cargill 88, rien nindique que Methymna ait quitte l' alliance it quelque moment. Polyen rapporte un stratagerne ou le stratege athenien Chares est affronte it un certain Aristonymos 89. D'apres Buchholz, il pourrait s'agir du me me personnage, nomrne Aristonikos par Arrien 90. Ce qui supposerait qu'il sest maintenu de 340 jusqu'en 334. II serait plus econornique de pcnser que les deux textes sont relatifs aux memes evenernents au moment de la reconquete navale de Memnon 91. La situation d'Eresos de l' epoque de Philippe it celle des Diadoques est bien docurnentee par un dossier epigraphique 92 concernant les tyrans qui ont domine la cite au moins it trois reprises.Vers Ie milieu du IVe s. trois freres : Hermon, Heraios et Apollodoros ont capte le pouvoir. Nous ne savons pas quelle incidence ce changement de gouvernement a eu sur les relations avec Athenes, L' expulsion des tyrans avec I' aide de Philippe ne plaide pas dans le scns de M. N. Tod 93 qui suppose, sans preuves, que les Eresiens ont participe it la Guerre des allies. On sait qu'Eresos etait membre de la Confederation 94. Dans les annees 346 Athenes, nous l' avons vu plus haut, parait encore en mesure, si la necessite s' en fait sentir, de retablir l'ordre dans Ie sens qu'elle souhaite. II n'y a pas lieu d'etablir necessairernent un lien entre I' action dans les detroits et lintervention it Lesbos, mais les deux sinscrivent dans un merne mouvement general en direction de rest, cause immediate de la rupture avec le pouvoir perse (infra). La date la plus recente parait la plus appropriee 95. Comme nous le verrons plus loin la conclusion logique est que I' eviction s' est produite apres 338 (et merne sans doute it un moment proche de 336). Il est possible que Theophraste ait joue un role determinant dans cet evenernent 96. II n'est pas assure que le regime mis en place ait ete dernocratique ; en tout cas, Ies troubles engendres en Macedoine par la mort de Philippe et les problernes successoraux permettent l' etablissernent d'une autre tyrannic, celle d' Agonippos et Eurysilaos (infra) qui controlent probablement aussi Antissa 97. II Y a peut-etre une autre tyrannie it Pyrrha 98. La multiplication des regimes de cette nature en ce
87 Le developpcmcnt de 1a piratcric, dont lc dec ret Tod, !70 (Syll.3, 263 ; IG, IF, 284) est l'une des prcuvcs, parait lie a laffaiblissernent de la flottc athenienne ; cf. encore Ps-Dernosthcnc, Halonnese, 15, qui souligne l'utilisation que Philippe peut faire de eelle situation. gR Cargill 1981, 92. 89 Po1yen 5.44.3 ; ef. Buchholz 1975, 149. 90 Arrien, An., 3.2.4. 91 Infra p. 457 sq. n. 265 sq. 92 Tad, 191 (entre autres editions IG, XII.2. 526 - XII.Suppl., p. 65 sq.; IJG, II, XXVII, p. 161 sq.; OGIS, 8). En dernier lieu Heisscrcr 1980, 27-78; Brun 1988b, 253-261. YJ Tad, 1948, 258. 94 Supra p. 284. YS Griffith in Hammond & Griffith 1979, no sq., discute la dale el propose 340 au 339. Pistorius 1913, 60 sq. el. 120 sq., apres avoir cvoque trois dates possibles: 350 (Premiere Philippiquei ; 343 (sur l'Halonneset ; 340, en relation avec 1es evenernents de Perinthe et de Byzanee, avait pour sa part retenu la seeonde. 96 Plut., MOl:, 1126 f (cf, I097b) precise que Thcophraste a contribue deux jois iI I'climination de 1a tyrannie (entre 338 et 336 et plus tard au eours des proces de 332) ; Diogenc Lacrce 5.45 et 50 ; Elien, HV, 4.19 ; ef. Heisserer 1980, 73-76 ne eroit pas iI cettc intervention qu'il juge trop precoce, 97 Ps-Dcmosthcnc, Traite Alex., 7 : l'auteur de eette harangue laisse entendre que 1a majeure part sinon la toialite de lIle de Lesbos etait tenue par des tyrans ; ees regimes ont etc renverses a Antissa et Eresos ou ils ctaicnt ctablis avant la Paix (cest-a-dire le renouvellement de lalliance de Corinthe). Infra p. 467 sq. 98 Plut., Mor , 1126e ; est-il bien assure qu'i1 sagissc dune tyrannie comme Ie pense Pistorius?
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milieu de rv- s. n'est manifestement pas Iiee a la pression perse. Elle correspond plutot a I'un de ces mouvements pendulaires qui les font apparaitre et disparaitre depuis Ie VIe s. dans la region. Mais I' exemple d' Hermias d' Atarnee montrerait si necessaire que la conception du pouvoir tyrannique et la personnalite de ceux qui I' exercent a bien evolue depuis cette epoque. Philippe a tres vraisemblablement affranchi toute Tile de ces regimes. Tenedos fait partie de la confederation athenienne, elle est inscrite en bonne place dans la liste annexee au decret d' Aristoteles. Les Atheniens l'utilisent comme base navale aux alentours de 360 99 . Ce choix se justifie pleinement si I' on songe ala situation strategique de l'Ile pour Ie controle de l'acces aux Detroits, On comprend done que, dans toute la mesure du possible, Athenes ait cherche a la maintenir dans sa mouvance. Cela ne signifie pas pour autant qu'jl n'y ait pas eu des "accrocs" conjoncturels a des moments daffaiblissement de la puissance navale athenienne. En tout cas, apres 350, les Tenediens semblent avoir ete des allies fideles 100. I1s ont rneme prete de I' argent aux Atheniens ce qui leur vaut d' etre honores par decret lOl et ,1' etre exernptes de toute contribution jusqu' au remboursement de la dette. Le motif de l' emprunt pourrait etre Ie siege de Perinthe et de Byzance par Philippe en 340/339, qui a entraine une expedition navale athenienne (infra) pour assurer la litre circulation dans Jcs Detroits, L'ile est encore dans l'alliance athenienne 102 avant Cheronee (tout comme Proconnesos). En conclusion, peut-etre plus a ce moment qu'en dautres periodes la zone insulaire parait divisee, Ie destin de chacune des lies n' est guere sembI able a celui de ses voisines. L' affaiblissement d' Athenes avait donne l' espoir, concretise pour les 'iles du sud, de se debarrasser de la tuteJle pressante de cette derniere, mais c'etait pour mieux tomber sous Ie joug des Hekatomnides, II n'y a pas lieu de considerer cornme paradoxall'appel a Athenes tente par les factions rhodiennes antagonistes. J. Cargill en fait atort un des arguments de sa "defense" d' Athenes. Ce type de virage qui nous apparait comme tres brutal dans la politique des cites, en particuJier insulaires depuis que celles du continent sont passees "dcfinitivernent" sous la tutelle royale, iJlustre bien l' obstination qu' eJles mettent a rechercher l' eleutheria. Tentatives qui nous paraissent assez vaines, mais c' est notre privilege d'historiens modernes que de pouvoir analyser les choses sur la longue distance. On a vu que ces coups de boutoir ont eu souvcnt comme consequence de la faire tomber encore plus lourdement sous la coupe d'un plus puissant. Si nous revcnons a l'exernple de Rhodes, il est clair que cest bien ce pari qui est poursuivi encore a l'epoque hellenistique, d' abord avec Ie succes que l' on sait, jusqu' a ce que la chance que representait l' equilibre des royaumes ne tourne a l' avantage de Rome avec comrne consequence inevitable I' abaissement politique de la grande cite insulaire. Le cas de Samos est bicn different, avec pendant toute la peri ode la presence de la clerouquie athenienne, On observera cependant que les objectifs des Samiens avant 365 etaient de merne ordre que ceux des Rhodiens et que leurs reves d' exiles, realises seulement it partir de 322, correspondent a ces memes aspirations. L'ile dc Lesbos presente toutes Jes caracteristiques, toutes les tares aussi, du Ps-Dcmosthcne, C. Polycles, 53-54. Ps.iDemosrhcnc. C. Theocrines, 35 datable de 345-342' IG, IF, 232, 1. 7, en 339. lOl IG, IF, 233; SyIP, 256; Tad, 175 ; Migcottc 1984,23-25 n" 2. 102 Dernosthene. Cour.. 302.
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systerne civique tel qu'il est vecu au rv- siecle : divisions chroniques de la population en entites distinctes, toujours rivales, parfois ennemies ; recherche de I' autonomie et de ses moyens, y compris economiques ; et en meme temps soubresauts politiques arepetition qui debouchent sur I'instauration de tyrannies diversement supportees avec comme corollaire lappel inevitable a des puissances exterieures (Athenes, la Macedoine), ce qui entraine ulterieurernent une reaction perse.
3. LES GRANDES INCERTITUDES DE LA PERIODE ET LA MEDITERRANEE ORIENTALE
360-340: LA CIUCIE
L'attitude du gouvernement perse face aux revoltes qui agitent I' Asie Mineure occidentale est mal connue. Les sources grecques sont particulierernent deficientes : les Atheniens sinteressent de facon quasi exclusive a leurs rapports avec la Macedoine et subsidiairement avec les iles. Certains d'entre eux interviennent en Asie ou en Egypte, mais c'est Ie plus souvent a titre personnel et nous ne Ie savons que de facon fort allusive 103. Parmi les auteurs d'histoires generales, seul Ie texte de Diodore nous est integralernent parvenu, mais, malchance supplementaire, son recit est ici entache encore plus quailleurs de graves confusions chronologiques et il est de surcroit peu explicite. On ne sait merne pas comment sont gerees les principales satrapies. A cela s' ajoute Ie fait que pour Ie Roi I'affaire importante, et qui mobilise I' essentiel des energies, est la reconquete de I'Egypte 104. Sur ce point, Diodore lOS est particulierement confus : la plupart des commentateurs saccordent en effet pour penser qu'il a amalgame indfiment deux campagne en Egypte, l'une infructueuse a partir de 351/350 et celie qui aboutit a la defaite de Nectanebo, beaucoup plus tardive. Pour cette derniere M. Sordi !06 propose une fourchette chronologique comprise entre 346 et 343/ 342, et il y a en effet de bonnes raisons de placer cet evenement apres 344. Dans ces conditions la remise au pas de Chypre liee par Diodore a l' avenernent d' Idrieus 107 serait en relation avec la premiere de ces interventions. Plus problematique est la reconquete de la Phenicie et en particulier de Sidon, qui interesse directement notre sujet dans la mesure ou elle est associee a la carriere du gouverneur de la Cilicie Mazaios/Mazday lOS. L'essentiel de I'information est fourni par la numismatique. Mazaios emet a Tarse plusieurs series de monnaies 109. L' une presente a I' avers Ie Baal de Tarse, de trois-quarts face mais la tete de profil, tenant l' epi et la grappe, avec la legende ararneenne BLTRZ ; au revers un lion attaquant un cervi de 110, dans un carre en Ieger creux marque par un grenetis ou avec un soulignage circulaire, et la legende ararneenne IOJ Ainsi Diophantos, dont la Lettre 8, 8 d'isoerate nous informe incidernrncnt quil se trouve en Asic, on ne sait au service de qucllc cause (Hermias"). 104 Kienitz 1953, 170 sq. 105 Diod. 16.44 ; 47 etc. 106 Sordi 1959, 107-118. 11)7 Supra p. 40 I. lOR Six 1884,97-159; Berve 1926,243-244, n° 484. 109 Newell 1919, 1-15; Mildenberg 1990-1991,9-23; Lc Rider 1997.154-155. 110 Cf. it titre de comparaison les bijoux scarabordcs, Boardman 1970 n° 909 ; 1975 n" 97 et les monnaics de Pumiathon roi de Kition (ef. Destrooper-Georgiades 1993, 249-259). Certains y voient la preuve dune intervention de Mazaios it Chypre, cf. par exemplc Bing 1998, 67 n. 75).
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MZDY 111 (la presence d'un carre en creux ne prejuge en rien de la datation relative des monnaies). Une autre reprend un avers proche du precedent mais Baal, tete de face, est appuye de son bras gauche sur le sceptre, sur sa main droite I' aigle, figurent aussi divers symboles secondaires ; sur le revers: un lion attaquant un taureau. Il est notable qu'il sagit la d'un theme perse 112 bien connu, mais aussi du retour a l'illustration ancienne des monnaies de Tarse 113 ; meme legende 114.11 n'y a pas de veritable raison de placer cette serie apres la precedente si ce n' est la parente du theme de revers avec celui de la troisierne serie, Le troisierne groupe 115 parait plus recent ala fois parce que les themes restent inchanges sur Ie premier monnayage de Balakros 116 et aussi a cause de la titulature qui apparait sur cette serie : "Mazaios, en charge de la Transeuphratene 117 (Ebirnari de I' Ancien Testament) et de Ia Cilicie". L'avers est tres proche des precedents mais le bras gauche est replie vers la hanche et drape; Ie bras droit tient le sceptre, la tete est de profil ; dans Ie champ, epi, grappe et aigle ; merne legende. Le revers est doublement original: par le titre donne a Mazaios, par le theme, Ie lion attaquant le taureau n' occupe que la moitie superieure du decor, et dans Ie bas figurent deux murailles superposecs a quatre tours. Pour E. Babelon 118, il sagit de marquer que Mazaios controle les deux systemes de defense des Portes de Syrie dont Xenophon 119 donne une description vivante, l'un en Cilicie, lautre en Syrie de l'autre cote du Karsos. On a pu remarquer aussi la parente de ce decor avec celui des monnaies de Sidon avec la merne disposition "a plat" des tours 120. Un dernier groupe a I'avers semblable a la serie precedente au est represente a gauche sur certains exemplaires un aigle perche sur un thymiaterion ; au revers un lion a gauche sur un croissant, au dessus une etoile a seize branches 121. Cette monnaie doit etre rapprochee d'un sceau-cylindre de calcedoine 122. On y voit le Roi en posture d' orant face aune deesse dont Ie corps est radie (Anahita?) montee sur un lion a gauche reposant sur une ligne de sol. L' etoile des monnaies est evidernrnent la representation symbolique de la deesse, Sur certaines divisions a la place de I'etoile 123
III SNG Levante 107-112 (108 = PI. X, 4) carrc au revers; Cop. 305-307 , von AuLock 5953-5956 , France 2 312-329 (320 = PI. X, 5) , vanante de revers, Mildenberg 1990-1991, pI. 2-4 , cf Le RIder 1994, 16. 112 Eg. Boardman 1970 n" 935 , cf. Bing 1998,67 et notes. 111 PI. VII. 3-4. 114 SNG l.evante lOO-106 , Cop. 308-313 , von AuLock 5957-5960 , France 2 330-353 ; Mildenberg 19901991, pi 2-5, vente Athena 1987,137 (= PI. X, 3). Bon nombre de ces rnonnaics provicnncnt d'un tresor disperse aux Etats-Unls (ct Bmg 1998, 63 et 73) La tete radicc de Baaltars en fall a levidence un dreu solaire, lc syncrcnsmc avec Zeus cst facile 115 SNG Levante 113-115 (114 = PI. X, 6), Cop 314; von /vulock 5961 sq.; France 2 354-360; Mrldcnbcrg 1990-1991, pi 2-7. 116 Supra p. 163 117 Cf it ce sujct la monnare erruse a Hrerapohs, Lemaire (Istanbul), au nom de MZDY "en charge de la Transeuphratene" (Bordreuil 1996,27-30). Sur eettc lcgcndc, Mildenberg (Istanbul) 118 Babelon j 910,459-460, deja SIX 1884, 137 119 Xen ,An, 144 120 BIen different par cxemple de la drsposruon circulaire sur lcs monnaies de Datames, supra PI. IX, 14. 121 SNG Levante I iS5-188 (185 = PI. X, 7) , France 2 433-434 ; Mildenberg 1990-1991, pI. 2 n" 11-12. Cf. Ie tres bel exemplairc de revers, RMC Ciltcia, pi XXXI, 3 Sur certains cxcmplaires . vanantes. hgne de sol it la place du croissant et pas detorle (ibid. 432-434) 122 Boardman 1970b n" 878 In SNG Levante 191 , France 2 435
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apparait Ie disque solaire aile d' Ahura Mazda 124. E. T. Newell 125 attribue cette sene a Myriandros, hypothese qui a eu la vie dure mais qu'il convient de rcjeter. On doit par exemple prendre en consideration les reserves emises par E. Levante, en introduction a la serie des monnaies attribuees a cette cite: "no corroborating evidence has sofar turned out and probably part of these coins were minted at Tarsos", C'est cette solution que nous retiendrons en fonction de l'hypothese enoncee plus haut sur les monnaies qui portent la legende (et pas seulement I' effigie) "Baal de Tarse" 126. II existe plusieurs autres monnaies similaires : l'une 127 presente un avers tres proche des precedents, Baal, l'aigle sur Ie thymiaterion ; au revers un lion marchant a gauche sans ligne de sol 128, symbole secondaire "2". Plus originale, une autre serie represente Baaltars a lavers mais avec une facture "orientale", il porte une tiare droite, tient une fleur de lotus dans la main droite et cette meme fteur couronne son sceptre, au revers un lion accroupi a gauche, et comme symbole secondaire, un arc 129. Les subdivisions combinant des clements des deux series concretisent Ie lien entre elles 130 et invitent a proposer Tarse com me lieu probable de lemission 13l. II convient enfin de rapprocher une monnaie du musee de Haifa 132, don nee com me de provenance incertaine. II s'agit d'un didrachme de 8,15 g, done appartenant au dernier avatar de la carriere de Mazaios si l' on retient I' argumentation d'E. Babelon 133. Ce dernier suggere que Mazaios, rallie a Alexandre, na pas modifie ses themes monetaires mais adopte I' etalon attique: Baal de trois-quarts face mais tete de face l34/lion assis a droite tete de face; symbole secondaire "2" comme ci-dessus 135. Le dieu est appele Baaldagon par la legende et l' on doit naturellement rappeler la monnaie des annees 380 i36. Cette continuite invite entin a penser que les series "de Myriandros'' sont les dernieres a avoir ete ernises par Mazaios en Cilicie. II ressort de ce qui precede que Mazaios a poursuivi la politique de frappe relativement intensive en Cilicie de ses predecesseurs perses, Tissapherne peut-etre mais a coup sur Tiribaze, Pharnabaze, Datarnes et cela dans des circonstances comparables cest-a
SNG Levante 189 (PI. X, 9) - 190 Newell 1919, 1-42. 126 Cf supra p. 339, Selon Babelon 1910,471 sq, cette sene aurait etc crnise en Syne et it Babylone avant 331 , il admet imphcitement quil sagu de la derrnere emission de Mazaios fidele au Grand ROI 127 Mildcnbcrg 1990-1991, pI. 3 n" 13 , Levante Suppl. I 28 (= PI. X, 8) 12S Pamu Ies trois monnaies que Levante attnbue it nouveau it Mynandros (Levante Suppl. 126-28) seulle n" 27 porte cxphcucmcnt 1c nom de Mazaros EI1c sc distingue par labscncc du thvmiaterton et lmdicauon d'une hgnc de sol figuree par un greneus sous les partes du lion marchant it gauche 129 SNG Levante Suppl 126 (PI. X, 10) ou J1 cst souligne que Ie nom du satrape nest pas mdrque , cf aUSSI France 2 422-424, Mildenberg 1990-1991, pI. 3 n" 14, Gulbenkian 815 :,0 E.g SNG France 2 425, avec Baaltars comme dans X, to, la COIffure est legerement differente, revers comme dans X, 8. 111 Autre argument: la lettre T sous lc siege de Baal sur I'cxcmplaire SNG Levante 186 Bing 1989 propose (it tort semble-t-il) Issos Hamson 1982a, 361-370 exclut Mynandros mars suggcrc un site inconnu it l' mtcncur des terres, Tarse pour MIidenberg 1990-1991, 12-13 132 MIidenberg 1990-1991, pl. 3 n" 20. IB Babclon 1910,475-478. Confirmation par lcs tresors, Mildcnbcrg 1990-1991, 15-16 (brbhographie) et pi 3, 18-19 134 Cf PI. X, 3 I3S PI. X, 8 116 SNG France 2 421, PI. VIII. 13 124
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dire la preparation des expeditions en Egypte ou la pacification de Chypre et de la Phenicie. Par exemple cornme Ie fait observer C. M. Harrison 137 au moment de la revolte de la Phenicie le Roi fait armer huit cents navires et on voit mal un autre endroit possible pour la constitution de cette flotte que la Cilicie. Beaucoup de rnodernes situent la nomination de Mazaios en Cilicie en 361, implicitement parce qu'il y aurait eu ainsi abandon de la forme de gestion anterieure de la Cilicie dans la mesure ou elle avait participe a la grande revolte des satrapes. II n'y a aucune preuve de cela, En fait, cette nomination marque une rupture avec la tradition et renforce le controle par Ie pouvoir central 138. Une telle decision correspondrait bien ala politique menee par Ochos, une date apartir de 358 l39 parait done plus plausible. Cela dit, Ie monnayage de Mazaios indique bien qu'il s'inscrit dans la continuite des officiers perses qui I'avaient precede, meme si ces derniers n' avaient pas Ie titre de satrapes de Cilicie. Le Baal de Tarse, avec l' epi et la grappe, est Ie dispensateur des ressources locales, necessaires a I' entretien de l' arrnee et de la flotte operant en Mediterranee orientale. Mazaios a continue a remplir ce role d'vintendance'' soit aupres dautrcs chefs designes par le Roi, soit pour son pro pre compte lors de la (rejconquete de la Phenicie. Selon J. Elayi 140 les series monetaires de Sidon font apparaitre que Mazaios controle cette cite pendant vingt et un ans l41. Les mentions de nombres indiquent les annees du satrape Mazaios, imitant en cela les rois de Sidon; selon E. Babelon il s'agirait des annees de regne d'Artaxerxes 142. Le fait que Mazaios nait pas ete demblee satrape de Cilicie et Transeuphratene (ce que montrent les series successives de son monnayage telles que classees ci-dessus) implique de choisir plutot la premiere hypothese. Une tablette babylonienne mentionne Ienvoi a Babylone de femmes sidoniennes, prises de guerre, que A. K. Grayson 143 date de I' an quatorze d' Artaxerxes III - soit 345 alors que J. Elayi 144 propose Ian quatre, soit 355. Dans limpossibilite d'argumenter sur ce point je me contenterai d' evoquer les implications, et les difficultes, des deux lectures. La date de 345 entraine le rejet de celie qui se deduit de Diodore 16.43.1 (351/350) pour les evenernents qui arnenent Ie sac de Sidon et pose un serieux probleme de chronologie pour le monnayage ernis par Mazaios dans cette ville dont nous avons admis plus haut qu'il remonte a 354. Cela amene G. Le Rider Wi a une hypothese cornpliquee ou Mazaios aurait ete charge a partir de ceue date d'une mission ponctuelle, sous l'autorite de Belesys, mais alors pourquoi Mazaios serait-il l' autorite ernettrice des monnaies? P. Briant 146 pense pour sa part
Hamson 1982a. 355 it parur de Diod. 16.406 En notant une rOiS encore en contrepoint les propos dIsocrate, Phd, 102. "En outre les regions de Chypre, de Phenicie, de CII1CIC. ct de tout cc pays dou les Perses uraicnt leurs flottcs, appartenarent alors au Grand ROi, mamtenant eIles l'ont abandonne ou sont en prow it la guerre et a de tels malheurs .." . "'J Harrison 1982a, 350 sq est tcntcc de proposer une date encore plus basse (peu avant 350). 140 Elayi 1989, 218 , cf auss: Harrison 1982a, 348-349 , Bnant 1996, 702 141 Faut-il cornrne le eornput babylornen, compter unc an nee supplerncntaire d' accession? Cf. e.g Vannhoglu et al.1990, 73 sq 142 Babelon 1910, 581 sq. 143 Grayson 1975, 114 n" 9, crte par Bnant 1996, 702. 144 Elayl 1989 145 Le RIder 1997, 160. 146 Briant 1996, 702. 107
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que la revolte a commence peu de temps avant 346 et que I'on fait dire au texte de Diodore plus qu'il ne dit, dans la mesure ou il n'y aurait pas de lien immediat entre l' echec de I' expedition en Egypte (351) et la revolte de Sidon. Si l'on retient 355, que faire alors de Belesys, dont Diodore 147 indique qu'au moment de la premiere action avortee contre Sidon, datee par lui de 351, il est satrapes de Syrie alors que Mazaios est archon 148 de Cilicie? Pour tenir compte des monnaies sidoniennes evoquees ci-dessus, J. Elayi conclut qu'il ne peut etre qu'hyparque de Syrie sous la tutelle de Mazaios 149. Il faudrait alors penser qu'il y a eu, a tres peu dintervalle, deux episodes dramatiques pour la cite phenicienne (destructions, deportations) et pourtant cette derniere a retrouve sa prosperite avant meme la conquete par Alexandre. Ne serait-il pas preferable de penser qu'il ri'y a eu en realite qu'un seul sac de Sidon - en 355 - la reprise en main ayant entraine un remaniement des gouvernements de la region - en 354 - au profit de Mazaios ISO. Dans ce cas, Belesys aurait bien ete satrape de la Transeuphratene, mais avant la revolte de Tennes. A noter enfin qu'il n'y a pas d'obstacle a supposer que Mazaios a pu faire battre monnaie pour son compte a Sidon, profitant des infrastructures preexistantes, en meme temps que d' autres series etaient frappees pour les autorites locales. Il n'y a en revanche aucune preuve qu' Arsarnes ait frappe monnaie 151.11 n'est meme pas assure qu'il ait ete veritablernent satrape 152. Arrien ne lui attribue pas de titre. Peu avant la bataille d'Issos ou il va mourir, cet auteur laisse penser qu'il etait responsable de la defense de la Cilicie 153 alors que dans la liste des morts d'Issos, il est seulement indiquc qu'il commandait une force de cavalerie au Granique 154 et que dans le meme passage Sabakes est explicitement qualifie de satrape d'Egypte. Quinte Curce 155 est en definitive le plus net: qui Ciliciae praerat. Rien dans son activitc n'impose la frappe de monnaie.
DlOd. 16.422 Cette distincnon faite me parait indiqucr que Mazaios eSI dote d' un commandement du type de ceux de Tmbaze, Pharnabaze, Datarnes, en plus de son ntre satrapal (contra Le RIder 1997, 156; cf. aUSSI Bnant 1996, 352353). Casabonne 1995, 165 pense que la nature du pouvoir de Mazmos est sembI able a celle de ses predecesseurs, c'cst-a-dirc qu'rl n'est pas a ce moment satrape de Cihcie. 149 Elayl 1989,232 n. 163. 150 Le RIder 1997, 160 cvoque cette hypothese sans la retemr ; Leuze 1935, 386-387 propose de dater Ie eumul de 345/344 ou 344/343. 151 Malgrc Babelon 1910,461 sq. et dans lc memc sens, Kraay 1976,284. Contra Hamson 1982a, 352 n" 20 pour laquelle la plupart des rnonnaies d'vArsames'' ont etc emiscs par Balakros. Bordreuil 1996,29 en fait un subordonnc de Mazaios 152 Berve 1926,81 sq. n° 149; cf. Babelon, note precedentc ct aUSSI Bosworth 1980a, e.g 325 Tous font de lUI un satrape de Crhcie. Weiskopf 1982, 495-498, souuent avec des arguments de poids (en paruculier Ie fait que tous 1es officrers qUI parucipcnt a la bataille du Gramque relevent des satrapics de Sardes et de Daskyleion, et aUSSI la possible appurtenance d' Arsames a la lrgnec de Phamakes) que la presence d' A. en Cilicie ctait purement conjoncturellc et lree a une fonction rmhtaire - cette hypothese suppose que l'on ecarte le temorgnagc de QumteCurce. C'est pourquoi jc me ralherai en dcrmere analyse au point de vue de Leuze 1935,403-405 et de Atkinson 1980, 138, qUI Ie subordonnent a Mazaios en Cihcie. Rien ne s' oppose a ce que cette "promotion" tardive au pour objet de strueturer la defense de la region en reponsc a lavancc d' Alexandre 153 Amen, An., 2.4.5. 154 Amen, An., 2.11.8 (d. 1.12 8) ; Drod 17.194 mentionne un Arsamenes (SIC) qUIcommande sa propre force de cavalcne au Gramque. Ille quahfie de satrape, sans indicauon de heu On a pu noter cornbien lemploi de ce terme chez cet auteur ctait sujet a caution. 155 Quintc Curce 3 4 3 147 148
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4. LES GRANDES TNCERTITUDES DE LA PERTODE MTNEURE OCCIDENTALE
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360-340:
L' ASLE
Tl serait capital d' arriver a fournir une chronologie plus satisfaisante des evenernents du Proche Orient dans la mesure ou I' Asie Mineure occidentale est la region vers laquelle Ie Roi tourne son attention apres la reprise en main de la cote phenicienne et de l'Egypte, et cela sans solution de continuite, Jusque la nous ne savons plus rien, ainsi par exemple Ie sort d' Autophradates, apres les evenements peu glorieux pour lui des annees 360, ne nous est pas connu. Seule don nee a peu pres assuree, pendant toute cette peri ode la region semble avoir joui d'une assez large autonomie de fait. Com me nous avons deja pu Ie noter, un des premiers beneficiaires de cette situation a ete la dynastie des Hekatornnides dont l'influence en Tonie s' est accrue, profitant en eel a du vide apparent qui est Ia caracteristique principale de la satrapie de Sardes a cette cpoque. Localernent, certains ont su exploiter au mieux la situation, tel est bien sur Ie cas d' Hermias d' Atarnee qui avait ete precede dans cette voie par Euboulos. Selon Strabon 156, ce dernier etai: un banquier qui controlait la region d' Atarnee et d' Assos 157. Les dates de la periode d'activite d'Euboulos font problerne. Que faut-il penser de l'episodc rapporte par Aristote 158 ou I' on voit Ie tyran se degager d'une situation critique en faisant accepter par Autophradates I'idee que le siege d'Atarnee couterait beaucoup de temps et d'argent et que Ie jeu n'cn valait pas la chandelle? Deux dates sont possibles pour cette operation: soit la reprise en main apres la revolte des annees 380, soit beaucoup plus vraisemblablernent 366 au moment de I' avancee d' Autophradates contre Ariobarzane 159. Euboulos avait -i I capte la tyrannie par des prets aux satrapes perses? Telle est l'hypothese quavait developpe, sans preuvcs, W. Leaf 160, suivi avec un peu plus de prudence par R. Bogaert 161. Rien n'est moins sur, Pour Theopompe 162, il tient une simple officine de changeur, 1panEsa apyupaJ.lOlptK~, son homme de confiance est Herrnias, un esclave eunuque originaire de Bithynie. C'est du moins ainsi que Ie depeint Theopompe et Strabon lui emboite partiellement Ie pas. Certains modemes ont mis en doute cette triple marque dindignite preferant croire a la malignite de l'historien de Chios ne pouvant imaginer qu'un tel homme ait pu etre disciple de Platon et Ie beau-pere d' Aristote ... mais on sait que I' ascension sociale dans Ie milieu des banquiers pouvait se faire de cette facon (Pasion, Phormion), Euboulos avait envoye Hermias a Athenes ou, cornrne nous venons de Ie voir, il se lie aux plus illustres esprits du temps 163.
Str. !34.3. La distance qUI separc ces deux cites amene il sInterroger sur lctcnduc du tcrntoire controlc par Herrruas et avant lUI par Euboulos. Le fait quHermras art pu en derruer ressort trouvcr un certain nombre dalhes cn particuhcr en lome (cf par exemple Frythrecs) ne prejuge pas quil avait personncllcmcnt mis la main sur un ensemble de cites consutuant une veritable pnncipaute Un certam nomhre dindices (en parucuher les tnbulauons d' Anstote aupres dHerrruas) larsseraient plutot supposer qu' Asses ct Atarncc constnuaicnt l ' csscntiel de son dorname. ISH Anst, Pol., 2 1267a. 159 Supra p. 296. 160 Leaf 1915,167-168; 1923,295-300. Inl Bogacrt 1968,240 sq. 162 FGrHlst, 115, F291. Cf Shnmpton 1991, 125-6, Flower 1994,205-207. Inl Dunng 1957,272-283. lSI,
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Revenu it Atarnee, il est aSSOCle au pouvoir et certains (it I'instar de Demetrios de Magnesie) 164 le rendent responsable de la mort de son predecesseur (vers 350?). II fait venir aupres de lui it Assos Xenocrate et Aristote, qui epousera apres sa mort sa fille adoptive et manifeste it titre posthume I'attachement qu'il avait it son egard 165. Tous ces faits sent bien documentes parce qu'ils relevent de l'histoire litteraire, le reste est plus aleatoire. Le fait qu'Herrnias tienne Atarnee qui avait fait autrefois partie de la Peree de Chios I'entraine tres probablement dans des difficultes avec cette derniere 166 et cela suffirait it expliquer I' hostilite de Theopompe it son egard. II faut rappeler qu' it ce moment Chios est sous la coupe des Hekatomnides et la montee en puissance d'Hermias gene naturellement ces derniers. C' est probablement dans ce contexte de relations difficiles, susceptibles de deboucher sur un conflit ouvert, qu'il convient dinterpreter l' accord passe entre Hermias et les Erythreens 167. Ceux-ci se sentant menaces passent une convention, d' ailleurs defensive, et obtiennent des garanties d'Hermias et de ses hetairoi (infra) pour les biens quils mettront it I'abri sur le territoire de ce dernier dans I'hypothese d'une guerre. L'imrnunite est totale sauf en cas de vente de ces biens, auquel cas une taxe de 1I50c (done une pentekoste) est percue it titre retroactif, des droits de garde seront exigibles apres le retablissement de la paix si ces biens ne sont pas recuperes dans les trente jours. La reciprocite est prevue de Iacon plus breve et apparait plutot comme une clause de style indispensable it un accord ou les deux parties sont censees figurer sur le meme plan. De telles clauses dans un traite d'alliance et surtout la determination chiffree de leurs limites nous rappellent qu'Herrnias est homme habitue it traiter les problernes de commerce et de banque. La date de ce document n'est pas connue. Cependant le contexte impose une fourchette comprise entre le debut du gouvernement d'ldrieus en Carie (it ce moment Erythrces est fidele it ce dernier) et bien entendu avant la chute d' Hermias. Vu la tonalite du traite on peut merne penser que les preparatifs du conflit sont avances et que nous sommes pres de 342. Au moment du depart de l'expedition dont Ie but ultime est l'Egypte, Ie satrape d'lonie et de Lydie est Rhoisakes 16S. II est donne comme l'un des principaux chefs de I'expedition et est accornpagne d'une force importante de cavalerie et d'un corps non negligeable dinfanterie, Ie lout compose de barbares, sans aucun doute les forces rassernblees traditionnellement it Kastolos, dont il a ete question it plusieurs reprises 169. Diodore traite ailleurs 170 des contingents grecs places sur le meme plan que les Grecs d'Europe et qualifies explicitement dallies (ils sont au nombre de six mille). Faut-il accepter cette assertion de Diodore? Dans ce cas, cela signifierait que tout ou partie de la cote grecque a echappe au controle des Perses et un certain nombre dindices montrent que telle devait
Diogcnc Laeree 5 3. Statue et epigrammc a Delphes Diogene Laerce 5.5, hyrnnc a sa mcmorre : Athenee 15.696a-d. 166 Dunng 1957, 462, supra p 267. II semble aUSSl concerne par l'anciennc chora de Mytilene cf. Shnmpton 1991, 125-126 , Flower 1994, 87. 167 IK, l-Erythrar, 9 = Tod, 165, a rapprocher de l-Uriiist, 115, F 291, lIPO£lIllAO:KlCl'£ lIA£lCHOUS 'IWVOlV, "11 circonvmt 1a majeure part des Iomens" 16H D10d. 1647.2, supra p 153 169 Supra p 123, en dermer lieu pour la campagne d' Autophradatcs contre Datames, supra p 364 n. 482 170 D10d. 16.444 164
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etre la situation de fait de plusieurs cites (Erythrees par exemple). Mais notons bien que Ie texte nous invite a aller plus loin puisqu'il implique la reconnaissance comme allies des parathalassioi. Si tel etait bien le cas, il parait peu vraisemblable que Ie pouvoir central ait pu tolerer longtemps un tel laisser-faire ou plutot une telle incapacite de reaction dont la premiere cause etait prabablement l'ordre dArtaxerxes III interdisant aux satrapes cotiers d'entretenir des mercenaires et dont rien n'indique qu'il avait ete rapporte. Comme toujours le changement de politique passe par un mouvement des personnels en place mais aussi par un redecoupage administratif selon des recettes deja eprouvees 171. II est fait appel a Mentor (et non pas Memnon comme l'indique Strabon) comme stratege autokrator 172 et c'est peutetre ii ce moment qu'a lieu Ie remplacement de Rhoisakes par Spithridates (rappelons que Pixodaros devient satrape en 341/0). On retrauve ainsi Mentor pour la premiere fois depuis la disgrace d' Artabaze, qu'il avait du accompagner dans un premier temps en Macedoine, mais a partir de Iii son sort est dissocie de celui de son frere Memnon. II est l'un des chefs mercenaires 173 au service de Tennes, roi de Sidon; mais il contribue a livrer la ville a Artaxerxes et cela lui vaut de rentrer en grace et merne de devenir l'un des principaux officiers de I'expedition egyptienne et de gagner la a la fois la reconnaissance du Roi et celle de Bagoas appele par la suite a jouer un role capital a la cour ou il sera Ie "supporter" de Mentor 174. En recompense de ses services, il recoit les plus hautes distinctions, et cent talents dargent. Son premier souci est dcradiquer la revolte latente ou declaree d'Hermias et des autres cites grecques cotieres, Ces evenements sont places par Diodore en 349/8 175. Ce qui est notoirement impossible puisque Aristote est cerise avoir vecu trois ans a la cour d'Hermias apres la mort de Platon. De plus comme nous Ie verrons plus loin la date de l'arrestation d'Hermias est fixee par la IVe Philippique. Selon A. H. Chroust 176 Ie Stagirite avait ete envoye a Hermias par Philippe II et il se comporte comme I'agent du Macedonien, une sorte d"'honorable correspondant" sans pour autant que cela entrave sa production scientifiquc 177. A ce titre il essaie d'''appracher'' Mentor a qui, selon Diogene Laerce 178, il avait adresse des lettres. Est-ce parce qu'il pense avoir reussi a Ie debaucher que Mentor accepte de se rendre aupres de lui (Chroust) ou plutot parce que, comme nous I'avons vu plus haut, il n'y a pas ouverture formelle des hostilites et que les cites grecques sont toujours censees etre les alliees du Roi? En tout cas, Mentor attire Hermias dans un traquenard 179. Du recit de Diodore 180, il ressort que nombre de cites d'Eolide et d'Ionie avaient suivi Hermias ; et cela a pu donner ii Philippe Iidee qu'une entreprise pour controler l'Asie Mineure se
Supra p. 129 (Strouthas). Supra p. 153. 173 Ces mercenaircs lui ont ete fourms par le roi dEgypre 174 Diod 16.50.8 Noter dam lc camp adverse, parrm lcs pnncipaux chefs des mercenaires rccrutcs par Nectanebo, Kleiruas de Cos qUIest tuc au cours des premiers engagements (Diod. 16485) m DlOd. 16.52.5-8 176 Chroust 1972, 170-176 177 C'est de cettc periode de la vre d' Anstotc que datcnt les traitcs "zoologiques", Htstotre des animaux , Les parties des animaux , cf. lcs mtroducuons de Louis aux volumes de la CUF, el 1948, 91-95 ; Chroust 1972, 171 et n. 4. 178 Diogene Laercc 5. 27 179 Drogcne Lacrce 5 6 , Didyrne 6.36 sq ,cf. Foucart 1907 ISO DlOd 16526-7 l7:
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revelerait assez faci Ie. La reprise en main de toute la region s' opere une fois eneore par la ruse 181. Le tyran est livre au Roi et sa fin est rapportee par Didyme 182.11 nous est indique que les Perses veulent apprendre quels sont lcs liens d'Hermias avec les Macedoniens dont il est considere com me I'agent. Telle est la reputation que lui faisaient les Atheniens, L'auteur de la lVe Philippique 183 lui voue une haine implacable: "I'agent du meme Philippe, le eompliee de toute les machinations contre le Roi vient d' etre arrache de chez lui. Ainsi le Roi va etre instruit de toute l'affaire... par celui-Ia meme qui a monte Ie coup et qui a tout arrange". Dans un tel contexte, peut-on suggerer l'hypothese que Ies hetairoi dont il a ete question plus haut pourraient etre une sorte de eonseil des "amis" qui trouverait son modele ala cour de Macedoine 184'1 Apres ee succes sans effusion de sang (autre que celui d' Hermias) Mentor se sent assez fort pour demander au Roi le retour en grace d' Artabaze et Memnon. 11 donne des postes militaires de responsabilite aux fils de I'ancien satrape 185. La progression de Philippe II vcrs I'est 186, avee les sieges de Perinthe, puis de Byzance et probablement de Selyrnbria 187, la menace qu'il fait peser sur les Detroits, entraine des reactions eonvergentes. Athcnes, dont I'attitude a I' egard de Byzanee etait empreinte de quelque reticence 188, pense surtout a la libre circulation de ses convois de ble et envoie un contingent naval sous Chares, Les preoccupations de Rhodes, Cos, Chios 189 sont pour une bonne part identiques mais il y a une dimension supplernentaire : on rappellera en effet les liens traditionnels au long d' un axe nord-sud dont nous avons signale maintes fois le fonctionnement 190. Si l'on suit l'argurnentation. quelque peu rhetorique, de Dernosthene, Couronne, 234, Rhodes et Chios etaient restees a I'ecart du conftit naissant entre Athenes et Philippe. L'explication de leur aetion par la sujetion aux Hekatornnides n'est pas entierernent satisfaisante. Certes il n'y a pas divergence sur ce point avee le satrape mais eontrairement a ce quaffirment certains modernes il u'y a aueune trace d'une intervention direete du Carien. L' aide des satrapes (sans plus de precision) est fournie a Perinthe ala fois par I'envoi de mercenaires etrangers 191, de l'argent, de la nourriture et du materiel de guerre. Diodore donne en quelques mots sans equivoque les raisons de I' attitude perse: "I' augmentation du pouvoir du roi (Phi lippe) ayant ete rapportee en Asie, Ie Roi, redoutant la puissance de Philippe ecrivit aux satrapes de la cote pour qu'ils soutiennent lcs Perinthiens lSI DIOd., foe CIt , meme histoire chez Polyen 6.48 IS2 Didyrnc 5 64 sq. , cf. Dernosthene, 4" Phil., 32 IS] Dernosthene, 4" Phil, 32, cf. Judeich 1842,298, Kahrstedt 1910, 10 sq IS4 Plutot que dadrncttrc lhypothcsc "mcrcantihstc" de Leaf 1923a, 299, pour qut J1 sagu de "banking partners" ; pour Tod 1948, 189 sq. (cornmentaire au n" 165), c'euuent des "chief officers". IS, DlOd 16524. iS6 Les motivations en sont discutees, Gnffith in Hammond & Griffith 1979, 568, propose dy voir unc action fondamentalcment anu-atherucnne : J1 bloquc ainsi Ie trafic de la mer Notre Cette dimension exrste mdubnablernent mars elle nest pas la seule com me pourrau le Iarre croirc I'uthcnoccntnsmc de nos sources Toutc la pohuque de Phihppc na pas pour but unique de nuire a Athenes , l'expansronmsme est un phenomene autoreproducteur bien connu a toutes les epoques La reduction il mcrci d'ancicnncs alhccs commc 01ynthc rclcvc du merne processus iS7 Griffith in Hammond & Gnffith 1979,574 n 2. iSS Cf. supra pour Rhodes i59 Drod 16772. Frontin, Strat, 1.4.13a, ne menuonnc que ChlOS ct Rhodes Cf aUSSI Ie dccrct fragmentarre IG, IF. 234 190 Suprap. 9-10 191 Ps -Demosthcnc, Rlfp Phd. 5.
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de leur mieux" 192.11 est clair que I'intervention du Macedonien dans cette zone sensible fut consideree par Ie pouvoir perse comme un casus belli. On en trouvera confirmation dans la lettre envoyee par Darius III a Alexandre, qui rappelle qu' autrefois Philippe et Artaxerxes etaient allies et en paix, mais qu'a I'avenement d'Arses Ie roi de Macedoine avait pris l'initiative de I' affrontement sans provocation de la part du Perse 193. Dans sa reponse, Alexandre rejette evidernment les arguments en precisant que les Perses avaient aide les Perithiens qui avaient "manque" a son pere 194. N ous apprenons par Pausanias 195 que c' est (tres naturellement) Arsites, le satrape de Phrygie hellespontique, qui engagea les mercenaires sous I' Athenien Apollodoros pour mener a bien le "sauvetage" de Perinthe, On connait I'issue incertaine de I'affaire : Philippe est incapable de s'ernparer de Byzance et de Perinthe mais il reussit un fructueux coup de main sur la ftotte qui ramene Ie ble de la mer Noire. Des pourparlers de paix semblent s'engager, mais apparemment sans succes 196.
5. LA CAMPAGNE ASIATIQUE DE
PARMENION
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Quelques mois avant sa mort, Philippe II envoie Parrnenion et Attale en Asie avec l'avant-garde de ses forces, soit dix mille hommes. II sagit, nous dit Diodore, de "charier (les Perses) pour la profanation des sanctuaires" 198 (ce programme avait fCI;;U I'assentiment des Grecs assembles a Corinthe) et de "liberer les cites grecques" 199. Nous ne sommes renseignes qu' indirectement sur la premiere annee de la campagne (336) et, bien qu' elle soit mieux documentee, la reconstruction des phases de celie de 335 n' est pas aisee. Le premier element concret est l'affrontement de Parrnenion et de Memnon a Magnesie, L'anteriorite de cet episode est assuree par le fait qu' Attale figure encore au cote de Parrnenion dans Ie recit de Polyen 200. De quelle Magnesie sagit-il? De celie du Meandre ou de celie du Sipyle? II y a tout lieu de proposer avec E. Badian 201 la seconde nommee. C' est la en effet que les generaux perses et Memnon peuvent disposer rapidement de la garnison de Sardes et d'une partie des forces des colonies du Moyen-Hermes, des troupes qui se reunissent a Kastolos.
192 Diod 16751-2 II tenta aussr vamement de faire alder lAtheruen Diopcithcs en Chcrsonnesc (en 341 au 340") par les Perses : Anst , Rhet., 2 1386 a 13 (lcs subsides arnvent apres la mort de ce derrner, cf Glatz & Cohen 1936, 334) 19, Amen, An, 2.14 2 194 tua. 5 195 Paus 129.10. 1% Sur ees evcncments, cf Griffith in Hammond & Griffith 1979,580 qUI pour sa part donne une version peu credible des faits. L'idee developpce Iii d'une paix separce avec Rhodes, Clues et Cos sappure unphcrtement sur Demosthenc 18.234 (au J1 est mdique de facon quelque peu rhctonque qu' Athencs ne pcut eompter m sur ChIOS, ru sur Rhodes) et plus exphcitement sur Frontin, Strat , I 4.13a au J1 est quesuon de vaisseaux de Rhodes et Clues mars d'une paix separcc seulement avec Byzancc Cf aussi Diod, 1677.2, une version des evencrncnts qUI parait presque totalement erronee 197 Badian 1966,37-69 (cf 39-43). Sur lcs circonstances de lexpcdiuon, RUZIcka 1985, 84-95. 195 Dlod. 1689.2; Justm 9.5. 199 DlOd. 16.912: cf. 17 2 4; 5-6 200 Polycn 5 44.4. 201 Badian 1966,41 , aussi CawkweJl 1978, 177 Dans un sens different Glotz 1941, 378 et encore McCoy 1989,424 11 suffira de se reporter ii la carte 13 pour trancher en faveur de la locahte la plus septentnonale
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Magnesie du Sipyle nest probablement alors qu'un phrourion ou guere mieux 202. Diodore indique que Memnon avait avec lui cinq mille mercenaires et ce faible nombre a surpris certains commentateurs, mais il faut tenir compte de l'urgence ; d'ordinaire la concentration des troupes roy ales prend beaucoup de temps. II n'y a pas de veritable bataille ran gee mais une sorte de ballet entre les adversaires. Contrairement a ce qu' ecrit E. Badian, il ne resulte pas de cette premiere passe d'armes que Memnon a pris Magnesie ou se retranche Parrnenion apres son echec. Il est plus probable que ce dernier I'a evacuee en se retirant vers le nord. A partir de ce moment, le combat a change d'ame. La mort de Philippe, les incertitudes de la succession, ses consequences pour certains des chefs de I' expedition (Artale), tout cela place le corps expeditionnaire macedonien dans une situation beaucoup moins favorable que l' annee precedente, La position des Perses est exactement inverse: en 338 Bagoas assassine Artaxerxes Ochos pour le remplacer par Arses 203 mais ce dernier est empoisonne quelques temps apres (en 336) et Darius III Codoman est porte sur Ie trone. II afferrnit son pouvoir en se debarrassant de Bagoas et peut alors se consacrer a la contreattaque en Asie Mincure. Apres Ie premier engagement de Magnesie, Memnon renonce a se heurter a Parrnenion en rase campagne et prefere I'isoler. Pour cela il se dirige au nord-ouest vers la cote. II s' agit manifestement de couper res Macedoniens de leurs arrieres : c' est ce qu'irnplique Ie fait que pour se rendre a Cyzique Ie contingent perse passe 8HX 'Tile; "[8T\e; 204. L'objectif que s'assigne Memnon est en effet le controle d'une cite grecque dont la position strategique est evidente si l' on constate que la voie normale pour traverser la Troade equivaut a un quasi contournement par Ie nord de cette zone accidentee. Cyzique en est veritablement le verrou et eUe s' est declaree alliee des Macedoniens 205. Malgre un stratageme qui consiste a coiffer une partie de ses hommes de casques macedoniens, Memnon ne peut pousser jusqu'au bout l'effet de surprise et penetrer dans dans la ville. II doit se contenter de ravager la chora et d'y faire un abondant butin 206. Cette option tactique contraint Parmenion a emprunter pratiquement la rneme route et a remonter vers Ie nord pour eviter l' enfermement. Si I' on suit Diodore, il n' est pas du tout en position de force mais bien au contraire sur la defensive (il est hors de question d'imaginer avec E. Badian que les generaux macedoniens visaient Daskyleion) 207 et cela dautant plus que les villes ferment leurs portes : en premier lieu Gryneion, a la longue tradition de soumission a des dynastes persophiles 208, confortee par la probable demonstration de force toute recente de Memnon.
202 L'htstoire de Magncsre aux hautes epoqucs est Impossible it etabhr Ihnken 1978, rcumt les maigres informanons concernant la locahte, Pour Ie VIe s quelques graffiti en Egypte ; pour Ie V" s. les propnctes paruculieres d'une source (Hcllamkos de Lesbos) ~ II nc reucnt pas le tcxte de Polyen. La place forte ou sc retire Parrncruon apres laffrontement a de bonnes chances detre Ie chorion de Palairnagnesia de OGIS, 2291 94 ou sont cantonnes les Perses dOmancs en 245 a.C, (ef. aussi le commcntairc de Ihnkcn, p. 114 sq.) supra p. 195. 201 Dlod. 17.53 204 Dlod. 17 7 3 205 Kaiser-Raiss 1984, 27-53, propose de reconnaitre Phihppe II sur les stateres delectrum von Fntze n° 199 (Zeus laurel qUI, sclon clle, auraicnt ete frappes a I'cpoque de lexpcdiuon de Parmcruon, mars cf infra p.484 206 Diod 1778, Poly en 5.44.5 Badran 1966 date cette acuon de juillet 335. 207 Badian 1966 2US Supra p 189
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La ville est prise d' assaut et ses habitants vendus comme esclaves. Le traitement inflige a Gryneion n'est en rien different de bien des episodes qui ont eu lieu avant ou apres en Grece d'Europe. A ce moment, comme Ie note C. B. Welles 209, Parmenion ne se preoccupe guere de la "liberation" des cites grecques, contrairement a I' argumentation specieuse de certains modernes 210. II sagit de se frayer a tout prix un chemin vers Ie nord et aussi de nourrir la troupe, de payer les mercenaires et de Icur fournir du butin 211. La ville de Pitane 212 qui resiste aussi aurait probablcment subi Ic merne sort sans l' arrivee de Memnon qui oblige Parrnenion a rom pre precipitamment et a se replier en Troadc. Une contre-attaquc menee avec I' adjonction de troupes fraiches, composees de Macedoniens et de mercenaires, arnenees par Kalas 213 ne donne rien face a la superiorite numerique des Perses, il faut se refugier au cap Rhoiteion 214. Les Macedoniens ne conservent apparemment qu'une seule tete de pont, a Abydos 215. Voila les donnees qui sont a peu pres assurees. II reste cependant bien des incertitudes concernant la campagne de 336 (par ou Parrnenion est-il venu?) et les evenernents d'Ephese. E. Badian 216 propose une solution originale : il suppose que les Macedoniens ont debarque pres d'Ephese et qu'ils tiennent dans un premier temps une bonne partie de Ja zone cotiere entre Lesbos et Samos. Ce que nous avons vu plus haut nous invite plutot a revenir a la solution traditionnelle, cest-a-dire larrivee par Abydos. Nous ne savons rien de I'offensive de 336, sans doute parcc qu' elle n' a cornporte aucun fait d' arme notable dans la mesure ou Ies Perses, surpris, ri'ont ete a aucun moment en mesure de sopposer a I'avancee macedonienne. Celleci a du se derouler selon un trace qui prefigure Ie debut de I' anabase d' Alexandre, au moins jusqua l'Herrnos 217. Remarquons aussi que Parrnenion n'avait probablement pas la flotte appropriee pour I' operation navale que suppose Ie debarquernent en Ionie. Que s'est-il reellement passe a Ephese? A coup sur linstallation d'un regime democratique hostile aux Perses et, par voie de consequence, philornacedonien, Est-il pour autant assure que Parrnenion et Attale se soient avances jusqu'a Ephese? Aucune source ne Ie dit. E. Badian soutient cette hypothese en soulignant que Diodore ne dit mot de la campagne de 336 (mais comme cela a ete note plus haut, peut-etre y a-t-il une explication a ce silence). On peut cependant se demander si en combinant Ie recit de Diodore et les informations fournies par Polyen on ne doit pas conclurc que Magnesie a ete Ie point d' avancee extreme du contingent rnacedonien. On comprcndrait mal en effet comment des officiers experirnentes seraient revenus vers la cote, pretant Ie flanc a I' attaque de I' arrnee perse concentree a Sardes et dans ses environs et au risque de se couper de leurs arrieres. Note a leduion de Diodore, coil Loeb, p. 137 n. 5, rclcvc par Badian 1966 Tarn 1948,219. 211 Sur la presence de mercenaucs en nombre pour cette campagne, cf Gnffith in Hammond & Gnffith 1979,438 sq 212 Kel11950. 1841-1843. 21:1 Sur ce personnage, supra p. 158. 214 DlOd.17 7 10, cf carte 6 p 240, Cook 1973,79 sq. 215 II semble que l' on peut infcrcr cela du pomt de depart de I'expedinon d' Alexandre, Amen, An., I 11.6. 216 Badian 1966,40. 217 L'cxpcdiuon d' Alexandre nc passe pas d'avantagc par 1a zone cotiere, pUlSqU'I! envoie aprcs la reddiuon de Sardes un detacherncnt pour prendre possession des domames de Mernnon, probab1ement en Eohde, infra p. 434 209
21[)
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E. Badian est conscient de cette difficulte puisqu'il fait venir les Macedoniens de la mer. Mais alors, dans cette hypothese, pourquoi netre pas revenu au point de depart suppose (Ephese) apres Ie serni-echec de Magnesie? Comment expliquer Ie ralliement de Cyzique a Parmenion et la tactique de Memnon? II ne parait possible d'envisager que deux hypotheses. Soit les Ephesiens ont d' eux-mernes declenche la revolte qui fait d' eux des allies des Macedoniens, au meme titre que les habitants de Cyzique (dont on ne sait pas si elle avait ete visitee par Parmenion). Soit le renversement de l'oligarchie a ete facilite par I'arrivee d'un detachement macedonien sans qu'il y ait eu combat, excepte les eventuelles luttes intestines: a quel moment et dans quelles circonstances est mort Herophytos qui avait son tombeau sur l' agora 218? Le principal argument de E. Badian pour une presence effective est Ie fait que Philippe devient le synnaos d' Artemis par la presence de sa statue dans le hieron 219. La comparaisons avec les autels de Zeus Philippios a Eresos 220 inciterait plutot a la prudence. On pourrait trouver de nombreux antecedents a la demarche des Ephesiens dans les iles et sur la cote: pour Lysandre, pour Conon. Ariobarzane avait sa statue devant le naos d' Athena a Ilion. Est-il par consequent pleinement legitime de placer cette statue sur Ie merne plan que celie de Philippe Iui-rneme lorsqu'il decide de fairefigurer sa propre effigie parmi celles des dieux lors de I'epiphanie de ces derniers aAigai 22l? Apres la retraite de Parrnenion, Ephese retombe aux mains de I' oligarchie soutenue par les Perses. Si I' on pense que l'installation d'une garnison suit de pres lareprise (ou le ralliement) de la ville, il faut conclure que I' evenernent precede de peu I' arrivee d' Alexandre en Asie. Arrien nous informe en effet que son chef etait un transfuge macedonien du nom d' Amyntas 222, ce qui suppose que les troubles qui ont suivi I' accession d' Alexandre au trone etaient regles et que les adversaires du nouveau roi avaient du s' exiler pour ne pas risquer leur vie. Pour interpreter cette campagne, il faut evidemment faire abstraction des evenernents ulterieurs, Comment son deroulernent a-t-il ete percu en Asie Mineure merne? Nous disposons de bien peu d'informations utilisables, mais une analyse globale indique clairement qu'elle sinscrit dans la tradition des expeditions rnenees par les Spartiates depuis la fin du ye siecle, sous Derkyllidas, Thibron et surtout Agesilas. Elle presente les memes caracteristiques et un deroulement assez comparable a celie dont les historiens locaux comme Theopompe ou Ephore entretenaient Ie souvenir. Les Macedoniens ont obtenu le ralliement de deux grandes cites au moins : Cyzique et Ephese, qui avaient derriere elles une longue tradition de resistance aux Perses, probablement de quelques unes en plus (Erythrees") 223. II est non moins assure que beaucoup d'autres - une majorite - nont pas Arnen, An., 1.17.10; supra p. 388 Arnen, lac. cu., on salt la polyvalence du terme hieron. II scrait plus prudent de lc traduire ICI par sanctuaire plutot que par temple. La nuance est ICI pumordiale SI l'on songe au nombre et a la drversue des documents qUI etaient cnges dans Ie temenos des dieux. En ce sens il est abusif de dire que Philippe est Ie synnaos d'Arterrus 220 Infra p 470 221 Dlod.l6.92 5 ,95 I . roic OCOOEKD: 8£OtL1jHXK'lVWV Ta ~acnAEw; TOD nEpG(llV 'l'POV'lCHXVTWV il Kat cxlT1CXV 'PpoviiGaI Aa~6vTwv. Par consequent nen nmdrque (supra p. 426) qu'rls aicnt adhere au parti de Philrppe au moment de 1'1 campagne de Parrnernon (contra Badian) 31 Amen, An, 1 13-16 , Diod. 17 19-21, 6 , Plut., Alex., 16. Sur ees divergences en particuher pour les noms, ef. Brunt 1962, 143. En derrner heu Me Coy 1989 (brbhograplne) 32 Sur Ie titre de ee pelsonnage. supra p 109 " Cr. Me Coy 1989,425 sq qui pose aUSSI la question (428 sq ) des rapports entre Memnon ct Arsitcs au moment de l' expcdruon de Parrneruon En l' absence de sources ccla est pure conjecture ,4 Leaf 1923a, 66 ; Hasluck 1910, 101 ; une inscnption datee gcneralcment de l' epoque de la conquete macedorucnne is-u>. 279), cf Rostovtzew 1910,260. ,5 Comme le note Heckel 1997, 195, Ie fait quarent parucipe a ce conseil tous les satrapes d' Anatolic et un certain nombre dc proches parents du ROI montre que 1'0n prcnait l'entrepnse d' Alexandre trcs au s6neux ,6 Comme note plus haut, el1e pare Ie phoros a Athenes et elle est probablement de nouveau dans I'obedicncc atherncnne en 410/409 (supra p 218) Amen, An , 1171-2
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Alexandre marche alors sur Sardes 38. Tous les auteurs concordent pour nous rapporter que le commandant de la citadelle, Mithrenes 39, se porte au devant du conquerant pour lui livrer la ville, les acropoles et les tresors qui y sont conserves 40. Mithrenes est accornpagne par Ies notables de Sardes. Le Macedonien concede la liberte aux Sardiens et a tous les autres Lydiens et leur permet de suivre les lois anciennes des Lydiens. Comme I'indique E. Badian 41, rien ne dit que les Perses avaient abroge ces lois (on peut meme ajouter que tout ce que I'on sait de leur mode de gestion inciterait a penser Ie contraire). Cette "liberation" n'exclut tres probablement pas le phoros, en tout cas la garnison est explicitement maintenue. Le texte d'Arrien montre done clairement qu'Alexandre na pas rnodifie la situation de la ville de Sardes. Que conclure alors a propos du statut juridique de cette derniere sous Ie regne d' Alexandre et de ses successeurs imrnediats? Ph. Gauthier argumente pour placer la naissance de la cite "grecque" de Sardes vers 226 42 . II est vrai qu' une premiere periode d' autonomie a du debuter a ce moment, materialisee pour nous par un monnayage avec la legende IAPMANQN 43. Faut-il en deduire pour autant qu'il n'y a pas de cite auparavant? II semble quil y ait lit confusion entre deux notions qui ne sont pas sur le meme plan. Nous avons vu plus haut qu' Alexandre conserve les institutions lydiennes et ce que l' on sait des rapports anciens entre Sardes et les cites ioniennes invite a penser que Ie developpernent institutionnel s' etait fait de facon parallele 44 et par consequent que Ie systeme politi que en vigueur pouvait permettre de passer assez rapidement au modele civigue. Les noms, l'ecriture et la langue Iydienne perdurent assez longtemps a Sardes, mais dans le domaine prive. Les documents a caractere officiel font defaut, sauf si I' on accepte de replacer ala fin du rv- s. (vraisemblablement peu avant 306) l'inscription Sardis, 7.1, I 45. Ce document est en grec, merne s'il ne nous en est parvenu qu'une copie, et la gestion des biens sacres par des neopoiai montre que I'hellenisation des institutions est largement engagee, Comment dailleurs pourrait-il en etre autrement dans la mesure OU Sardes reste une capitale satrapique de premier plan, avec par consequent un echelon administratif greco-rnacedonien important? Elle a done ete traitee tres tot a linstar d'une cite. II nest nullement necessaire d'imaginer une etape interrnediaire de "fondation" : son nom n'a pas change, sans doute a-t-on estirne qu'il etait assez celebre et glorieux pour ne pas la transformer en une banale Antioche ou Seleucie, Les limites a son autonomic tiennent d' abord a sa fonction de capitale et non a son "passe indigene". Rappelons a ce propos que I' atelier de Sardes est sans doute Ie premier en Asie a battre monnaie au nom dAlexandre 46. Dans le domaine religieux Alexandre a manifeste a I'egard de Sardes une mansuetude au moins egale a celle pour les
Bnant 1993, 13-27 Mithrincs pour Diodore Sur!c pcrsonnage et cettc drsuncuon entre les foncuons, cf. supra p. 40 n. 109. Comme lc fall observer Bnant 1993, 16, il est Ie premier Perse de haut rang a se ralher aAlexandre. 40 Amen, An., 1 17.3 , DIOd. 17.21 7 ; 1cs citadclles sont nous I'uvons note plus haut Ic pomt de convergence du phoros et probablcrnent de conservation d'une part de ce dermer, 41 Badran 1966,44-45. 42 Gauthier 1989,150-170. Cf. en un sens proche de celui expose ICI Bnant 1993, 19-23. 43 Seyng 1963, 35-38. 44 Cf. Briant 1995b relcvc l'existcnce dc tnbus a Sardes (Hdt. 4.45) . 'Acna; 'P1JA~. 45 Sur la date dc celte inscnpnon, cf. Debord 1982,244 sq. Dans Ic mcme sens que nous Briant 1982, 2l9, n. 227 , Corsaro 1985, 87, n. 63, etc. 46 Thompson 1983. 3B 39
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cites grecques. II a Ie projet de construire un temple de Zeus Olympien, laisse desordres en consequence 47 et accorde (ou confirme?) Ie droit d' asile du sanctuaire d' Artemis 48. Cela ne signifie pas pour autant que les relations avec les "vraies" cites du voisinage aient ete totalement depourvues d' ambiguite : retenons acet egard deux textes relatifs aux rapports de Sardes avec Milet et Ephese. Le premier est un accord d'asylie conclu entre Milesiens et Sardiens, sans doute de peu posterieur a 334 49 . Ph. Gauthier 50 insiste a bon droit sur la disparite des systernes qu'il laisse entrevoir : d'un cote (Milet), ce sont des magistrats qui sont responsables, alors que de l'autre (Sardes), il s'agit de personnes designees nominativement. Le second montre que ces rapports sont parfois difficiles : une inscription ephesienne 51 donne la liste de quarante six Sardiens condamnes amort pour avoir massacre des theores ephesiens d'Arternis. II ne doit pas s'agir d'une banale affaire de brigandage puisque l'un des condamnes parait etre Ie fils d'un des ambassadeurs de Sardes dans I'inscription milesienne. L'onomastique, en etant tout aussi majoritairement "indigene", presente bien des traits communs avec I' inscription de Mnesimachos precitee v . Mais cela ne doit pas etre considere de facon trop manicheenne comme preuve que la cite nexiste pas. A titre de comparaison on evoquera la liste des poleis cariennes qui figurent dans deux inscriptions de Sekkoy, datees du gouvernement de-Mausole 53. Leurs representants ont des noms presque exclusivernent cariens et pourtant leur statut de cite est reconnu par les successeurs imrnediats d' Alexandre (et on peut etendre ce raisonnement au moins a la Lycie). En bref, les Milesiens et les Ephesiens ne considerent probablement pas vers 330 les Sardiens comme constituant une cite similaire a la leur, mais la nouvelle conjoncture politique les amene a entretenir des contacts et rneme a conclure des conventions d'asylie, ce qui de facto les place sur un pied d' egalite. Un quart de siecle plus tard, Sardes fait gerer son principal sanctuaire, incontestablement tres ancien avec toute I' organisation traditionnelle que cela suppose, par un college de neopes dont la tonalite grecque et civique est indubitable et compte tenu de ce qui vient d' etre dit plus haut il me parait fort probable que des Ie debut de I'epoque classique au mains les Sardiens se consideraient comme appartenant a une polis. Tout comme a Daskyleion, Ie conquerant precede a un remplacement du personnel de la satrapie mais sans toucher a l'organisation mise en place (ou conservee") par lcs Perses 54 : Asandros, fils de Philotas est place a la tete de la Lydie et du reste de I' arche de Spithridates ; Nikias est charge de l' etablissernent et de la perception des irnpots 55 ; enfin Pausanias commande la garnison de I' akra.
47 Amen, An., 1 17.5-6 Cf Debord 1982, 268 , Herrmann 1989, 131 , Bnant 1993, 23. On ne Salt ce quil est advenu de ce projet 48 Tacite, Annales, 3.60-63 Sur ce texte en general Debord 1982, 278-284 ; sur le cas de Sardes, Herrmann 1989,127-131; Bnant 1993,23 sq. 49 Delphuuon, 135 , Syll ', 273 , cf. Gauthier 1972,242, n. 95. 50 Gauthier 1989, 160 sq 51 IK, 11 l-Ephesos, 2 ; ef. Robert & Robert, Bull ep , 1965,342, Robert 1967,32-36; Masson 1987, 225-239 , Gauthier 1989, 162 52 Debord 1982, 246 53 Supra p 179. 54 Amen, An., 1.17 7-8. 55 Supra p 168
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C' est de Sardes qu' Alexandre ordonne a Kalas de prendre possession de la chora de Memnon 56. Polyen 57 lui attribue un stratageme destine a "destabiliser" Ie Rhodien : apres avoir debarque en Asie, Alexandre aurait ordonne de ne pas toucher aux proprietes de Memnon afin de semer la suspicion dans Ie camp adverse 58. Partant de lidee qu' il est desorrnais I' adversaire le plus efficace 59, la motivation de cette mesure ne fait pas probleme. En revanche, la juxtaposition des sources invite a s'interroger sur la localisation de cette chiira si l'on admet qu'elle constitue un ensemble homogene, Sur ce point nombre de propositions divergentes ont ete presentees. - Ecartons demblee Ie point de vue de Chr. Tuplin 6IJ qui situe ces domaines dans la vallee de I'Aisepos, dabord parce que cela supposerait Ie retour loin en arriere vers le Nord d' un detachement non negligeable (Ie fait que Kalas ait ete nomme satrape de la region n' est pas en soi un argument) mais surtout parce que cette hypothese repose sur une confusion : Strabon 61 signale l'existence d'un tombeau de Memnon et d'une "kome de Memnon", mais il sagit, precise-t-il, du fils de Tithonos. c'est-a-dire du heros de la guerre de Troie et non du Rhodien 62. - S. Hornblower 63 reexamine les differentes attributions et retient comme solution la plus probable la chora de Tenedos mais il ne fournit pas une veritable demonstration. Son principal argument est la mise en demeure faite aux Tenediens par les successeurs de Mernnon a la tete de la fiotte perse de retourner a la Paix du Roi (Artaxerxes et non Darius comme l'indique par erreur Arrien 64 ou parce que le texte a ete corrompu) 65. La peree de Tenedos n' a sans aucun doute rien a voir dans cette affaire 66. On sait que l'ile etait restee fidele aux Athcniens jusqu'en 338 mais qu'elle avait change de camp a ce moment 67. II n'est pas exclu qu'Alexandre ait cherche a favoriser Tenedos, y compris par des restitutions territoriales mais le lien avec l'operation precitee est pure conjecture. De plus les memes objections que dans le cas precedent sirnposent pour une localisation aussi septentrionale.
Amen, An, 1.17.8 Polyen 43 15. is Rappelons que "symctnqucmcnt" scst ouvert chez les Perses un debar pour savoir si l'on dolt saenfier les dornames au nom de lefficacue mihtatre. 59 Mals a partir de quel moment') Rappclons quil jouc un role secondnire jusquau desastrc du Graruquc. 6U Tuplm 1987b, 136, n. 10! (;1 Str. 13 l.ll. 62 Sur la locahsauon de eet ensemble, Sekunda 1988a, 186-7 Heckel 1994, 93-95, sans menuonner la httcrature anterieure, note justcmcnt qu' Amen, An , 1 17 8 correspondrart mieux a une region proche de l'Ida mars on ne VOlt pas pourquoi Alexandre aurau specifiquement fait sarsir la chora de Mcmnon s'i1 ne sagissan pas de possessions de celui qut etart devenu son puncipal advcrsairc 63 Hornblower 1982, 128 , 144, n 58. Le texte de Polyen 4 3.15 nc parait pas etablir de hen tempore! immcdiat entre le debarquement et Ie fart d' cpargncr lcs biens de Memnon. II suffira de rapproeher Ie debut de cc paragraphe, 'AA£~C(v8pos 81C(~as ES 1~V 'Ao iuv et I Priene, 37, I. 146. 'A),[~&v8po'lJ 8lC(~rXV1Os Ei s 1~V 'Ao iov Alexandre regie un diffcrcnd de fronncrc entre Pncnc et Samos mats 11 est bien evident que ee ne fut point sa premiere preoccupation en posant Ie pled en Asie De plus Ie fall que cc stratagcmc vrcnnc avant cehn qUI est uuhse au Gramque nest pas un argument dccisif lorsquon pcnse a la desinvolture chronologique de Polyen 64 Amen, An., 2.2.2 65 Heisserer 1980, 132 sq. 66 Supra p 265 67 Demosthene, Cour , 302 56 57
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- Autre candidat, les anciennes possessions de Mentor et Memnon en Traade (Skepsis, Kebren, etc.) 68. Tel est le point de vue de K. J. Beloch 69, II faudrait alors supposer que Ies deux freres avaient rccu ces dornaines en don du satrape Artabaze en 362 ; qu' ils leur auraient evidernmcnt echappe au moment de la revolte et de I'exil, enfin que Memnon (ou Mentor?) les aurait obtenu a nouveau du mi. S. Hornblower releve la distinction juridique quil convient d'etablir entre les deux situations. - Il parait preferable avec A. Baumbach 70 de penser que Memnon a herite du domaine conquis par Mentor et qui pourrait etre constitue par les chorai de Chios et de Mytilene 71 et/ou de la principaute d' Hermias (les deux entites se recoupant au moins partiellement) 72. Rien ne prauve par ailleurs que les proprietes de Memnon aient constitue un ensemble geographiquement hornogene. De Sardes, Alexandre fait route vers Ephese. L'itineraire le plus court emprunte la passe de Karabel 73, mais il est possible qu'il ait choisi de passer a proximite du golfe de Smyrne, si du moins on accepte comme veridique la tradition selon laquelle il serait a I'origine du deplacernent de Smyrne de Bayrakh vers son site hellenistique 74. Le silence d' Arrien ne constitue pas un obstacle majeur: sauf pour les Smyrniotes eux-rnemes il sagit la d'un evenernent secondaire. Selon Arrien 75, le roi arrive a Ephese Ie quatrieme jour apres son depart de Sardes. Cela parait lui laisscr le temps pour lintermede cynegetique decrit par Pausanias, mais on ne saurait etre pour aut ant assure de I'historicite du fait 76 dans la mesure ou les Smyrniotes avaient tout interet a posteriori a placer ce transfert sous les meilleurs auspices, Alexandre devenant leur kiistes comme il avait ete celui d' Alexandrie et de bien dautres cites. En tout cas a defaut d'une "liberation" par Alexandre Iui-merne Smyrne se trouvait sur la route qui menait Alkimachos d' Ephese vers l'Eolide 77. L'etape suivante pour l'arrnee d' Alexandre est done Ephese, Apres J'echec de Parrnenion, Memnon avait installe dans la cite qui echappait depuis longtemps au controle perse une garnison comrnandee par Ie Macedonien Amyntas n. Le realisme I'emporte sur la terncrite : la garnison mercenaire senfuit en semparant de deux trieres ephesiennes. Alexandre ramene avec lui un certain nombre de ceux qui avaient ete exiles pour avoir pris
6S Demosthcnc, C /vrtstocr., 154 (cf. 157 pour la dcfimtion du terntorre autrefois controlc par Chandcmos), Supra p 347 69 Beloch 1923, 148 et n I, posiuon idenuque de Bcrve 1926 n" 497 , Seibert 1985,37 et Brunt 1986,73 n 5 70 Baumbach 1911, 17 ct notes, cc POint de vue remonte it G Grotc; contra Bcrve 1926, 252. n 1. Pour sa part, Hornblower 1982, 144, n. 58, considere - sans cxplicatton - que la localisauon est trop au sud. Rappelons, SI lon veut absolument her J'acuon de Kalas it son ressort satrapiquc, que la region a etc souvent l'objct de revendication de la part du satrape de Daskyleion 71 Supra p 267. 72 C' est cc qui rcssort du texte de Thcopompc supra p 418 Supra p 247 (la route inverse dAgesrlas) 74 Paus 7 5.1-4. 75 Amen, An., I 17 to 16 Cf. lcs clements du dOSSIer reUDIS par Cadoux 1938, 94-97. Doutant de l' authenncite, Gallet de Santerre 1947-48, qUI lui prete cependant la volontc dc cette rcfondation it partir de Plmc, HN, 5.118 , Aelius Anstide, Palm, p 431 Dindorf (mars contra Str 14 1.37 qUI attnbue ccla it Antigone ct Lysirnaque) 77 Cf Infra p. 436 7R Supra p. 425.
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son parti. 11 met a bas I'oligarchie pour la rcmplacer par un gouvernement democratique, La faction des demo crates entend bien se venger de ses adversaires : la mort est demandee pour ceux qui ont appele Mernnon, jete a bas la statue de Philippe et profane la tombe d'Heropythes sur I' agora 79. Le roi arrete rapidement cette "epuration" et en cela il se gagne, nous dit Arrien, la sympathie de beaucoup de Grecs 80. II enjoint aux Ephesiens de payer a Artemis les phoroi autrefois dus aux Perses 81. Strabon 82 rapporte que la cite etait alors en train de reconstruire Ie temple de cette deesse, incendie en 356 par Herostrate. D' apres Timee, cette operation etait menee a bien grace aux depots effectues par les Perses 83, mais Artemidore, suivi par Strabon, s'inscrit en faux contre une telle allegation. Alexandre propose aux Ephesiens de prendre a sa charge les frais passes et futurs de la reconstruction a la seule condition probablement que cela soit inscrit sur Ie temple (comme ce fut ensuite Ie cas a Priene). Les Ephesiens refusent par une sorte de pirouette: il ne sied pas a un dieu de consacrer des offrandes aux dieux. E. Badian en conclut que les relations d' Ephese et d' Alexandre etaient moins confiantes que celles entretenues par la cite avec son pere. Remarquons cependant qu'il porte a un stade les Iirnites de l'asile 84 et qu'il organise la des sacrifices a Artemis et une magnifique procession a laquelle participe I' ensemble de son armee, ce qui etait bien propre a eveiller I' admiration mais aussi la crainte des populations de I' Asie 85. Pline 86 signale que les Ephesiens firent placer dans Ie temple d' Artemis une peinture d' Apelle representant Alexandre brandissant Ie foudre. Manifestement ce dernier a franchi la une etape : il peut desormais se poser en arbitre indiscute a I'interieur des cites aussi bien que dans les rapports entre comrnunautes comme la situation interne d'Ephese en apporte la preuve. Magnesie 87 et Tralles 88 depechent des ambassades pour faire acte d' allegeance et Alexandre repond favorablement en confiant une mission a Parrnenion. Dans Ie rneme temps, il envoie un autre detachernent sous Alkimachos en direction de lTonie et de I'Eolide (y compris Ies i'les) pour "delivrer" les cites encore sujettes des Perses 89. Selon E. Badian, il faut interpreter cela comme une Realpolitik et non pas une conviction personnelle, et de fait revolution se fait sentir tres vite (cf. Ephese), en tout cas des quil est clair que I' Asie Mineure occidentale est conquise. 79 II est assez probable que Ie pcrsonnagc en qucsnon est celui qUI est mennonne sous Ie nom de Hcrophytos par Polyen 723.2, supra p 388 et n. 140 so Polyen 649, rapporte comment, quelques annees plus tard, trois freres assassinent un tyran d'Ephese, Hcgcsias, et encourrent de ce Iatt les foudres des autontes macedorucnnes, cn paruculier de Philoxenos, gouverneur d'Iorue (supra p 160). Comme lc note Badian 1966,64 n 36.11 sagu a ce moment d'un "cx-tyran'' (11 convient sans doute de penser a I'un des ohgarques nus en place par Memnon apres la campagne de Parmeruon) et 11 n'y a pas heu avec Tarn 1948, 174 sq , de douter de I' authcnticite de I' eprsode. 81 Amen, An ,117.9-13 82 Str 14.1 22. 81 Cr. Debord 1982, 226 ct notes 84 Str 14.123. 8S Amen, An, 1.18.2 , cf. Debord 1982, 268. 86 Phne, HN, 3S 92. 87 Amen, An., 1 18.1 Nous avons note a I' cpoquc dc Thibron (supra p. 236) Ie deplacernent de la ville vers Ie sanctuaire d' Arterms Lcukophryenc , ccst probablement seulement a parur de cc moment qu'clle fut considcrce comme une ventable cite grecque. 88 L'evoluuon de Tralles na pas dfi ctre tres differentc de celie de Magnesie Elle rccoit une garruson macedomenne (Amen, An, 1.236) ; cf Xen., Hell., 3 2.19 (en 397) ; Dlod 14.362 (en 399) 89 Amen, An , I 18 1-2
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De fait Arrien indique qu' ordre est donne de remplacer les oligarchies par des democraties, de liberer les cites des taxes payees aux Perses. II semble bien que pour la region concernee cette consigne ait ete appliquee a la lettre, c' est du moins I'image que les cites ont voulu conserver 90. Ainsi a Colophon ou un decret de la cite, par ailleurs assez mutile, comporte cette phrase parmi les considerants : "attendu que le roi Alexandre et Antigone lui ont donne (au peuple de Colophon) la liberte" 91. La date - done I'interpretation - du document ont ete discutees, L'editeur B. D. Meritt pensait a une date contemporaine du passage d' Alexandre, alors que L. Robert 92 proposait une date comprise entre 311 et 306. Merne ambiance dans une inscription d'Erythrees 93, lettre d' Antiochos II a la cite qui concede liberte et exemption puisque "sous Alexandre et Antigone la cite etait autonome et exempte du tribut", II n'est en revanche nullement assure qu'il convienne de situer a ce moment deux decrets, que I' on a parfois allegues, pour illustrer les turbulences engendrees dans les cites par les deux interventions macedoniennes 94. L' origine de la stele qui supporte ces textes est discutee ; elk a etc trouvee a Chios, mais on sait que nombre de pierres ont ete transportees dans l'Ile depuis Erythrees. C' est cette provenance que retient A. J. Heisserer 95, auteur d'un reexarnen attentif de l'inscription. II y est question de restituer son epee a la statue du tyrannoctone Philites, epee que les oligarques en accedant au pouvoir avaient subrepticement enlevee faute, peut-etre, d'avoir ose abattre la statue elle-rneme, mais la privant par ce gestc de sa signification originclle (Ph. Gauthier). La forme des lettres interdit un rapprochement direct avec I' epoque d' Alexandre 96, mais il convicnt de notcr quc le "scenario" retenu, a savoir : mort d'un tyran, suivi d'une probable democratic, installation d'une oligarchic, puis retour a la democratie, suppose un laps de temps relativcment long, sans que I' on puisse etablir la chronologie absolue de cettc sequence. Rien ne permet en effet daffirmer que Philitcs est la meme personne que celle qui apparait comme magistrat monetaire dans la periode 350-340 97. II est done impossible, en l' etat de notre
Brckcrrnann 1934,346-374, Badian 1966,46-53 ; Bosworth 1988,45-46; 251-253. 'II Mentt 1935, 358 sq : n" 1,1 6-7' b(Elo~ JrCXpEO[IlKEV lX1J1Qn . AAE~CXVOpO~ 6 ~CXCHA£U~ 1~V iCAEU8EplCXV
90
KCXI 'AV1lyOVO~. 92 Robert 1936b, 158 sq ,quasI unarurncment SUIVI par la suite 93 IK, l-Erythrar, 31 (OGIS, 223 ; Welles, RC, 15), I. 22-23 EJrl1£ 'AA£~&VOpou WI 'Avnvovo» lX1J10[ v[ouo; ~v WI &rpOPOAOYl1W~il JrOA1~ lJIlWV 94 284 ; IK, 2-Erythral, 503 95 Heisserer 1979,281-293 (deux photos) , Gauthier 1982, 215-221 ; 1985,32 Cette inscnption a ete donnec commc provenant de Chios pal tous les premiers cdrteurs, y compns MIchel 1900, 364 ; elle est attibuee it Erythrees par Dinenberger et H1IIer von Gaertnngen dans la Sylloge; Clazornenes par Wilhcm 1915,30-38 (dou lc c1assement cette cite par Engelmann & Merke1bach, IK, 2-Erythral, 503 ) 90 275-200 selon Hcisserer , rrulicu du Ill' s pour Gauthier Heissercr 1979,293, eonclut en indrquant qu' son avis 11 sagu lit d'unc copie d'un document plus ancien. II sappuie prmcrpalement sur les praescripta tres srmplrfies, ne comportant pas la mention des prytanes, strateges, exetastai. Mars II convicnt de nc pas conclure trop hativcmcnt dans la rncsurc ou Ie nombre des decrets erythrcens dont on a conserve Ie debut est tres Iarble et que Ie n" 27 de IK, J-Erythrar, que les edrtcurs proposent de dater des environs de 274, dcbute par Ie mcme forrnulaire, tel qu'rl est resume par Robert 1927, 119. Cf les reserves de Gauthier 1982,215 n. 4, coneernant Ie qualrficauf de tcxtes "cornmemoraufs" retenu par Heissercr-; 11 pense qu'rl cst Impossible en l'etat de fourrur une chrunologie ahsolue dans la mesurc au nous navons que Ie terminus (qurl suue pour sa part, rappelons-le, vers Ie milieu du
s-u», a
a
a
III'S.). 97 Cf, Hersserer 1979, 286, n. 17 (mforrnatrons fourrnes par Ph. K111ns) On eonsultera de ce derrner, sa these J980, 18-35, dont les pnnclpaux resultats sont resumes dans son article 1989, 186
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documentation, de relier ces cvenernents internes a Erythrces a la "grande histoire", II faut noter enfin qu' Alexandre s'cst interesse a la region concernee puisque selon Pllne il fait construire une digue a Clazomenes 9g pour relier l'Ile au continent et, inversernent, il projetait, toujours selon Pline 99 de percer par un canal listhme d'Erythrees. On ne saurait determiner a quel moment du regno se placent ces travaux ou projets. En revanche ce ne peut etre qu'au moment de sa campagne qu' Alkimachos dedi a dans le temple d' Apollon a Kyrne un grand candelabre de bronze provenant du sac de Thebes 100. Le cas de Priene doit etre aborde a ce moment de I' expose. Les sources litteraires sont muettes a son sujet, mais les inscriptions arnenent a reflechir sur les rapports entre Alexandre et la cite. Le premier document a considerer est l'inscription n° I du corpus 101, diagramma royal relatif aux Prieniens 102. Selon S. M. Sherwin-White 103, ce document a ete grave sur une ante du temple d' Athena 104, seulement dans les annees 280, au moment ou Lysimaque domine l'Ionie et en rapport avec le dossier de textes qui se trouve irnmediatement au dessous 105 et qui a trait aun confiit entre Prienc d'une part, les Pedieis 106 et les Magnetes de l'autre. Le diagramma servirait ainsi d'clement de reference dans un con flit a vocation territoriale, probablement de caractere seculaire, Cette hypothese est tres seduisante et eclaire d'un jour un peu different Ie contenu du document. Tout Ie texte selon S. M. Sherwin-White (en realite sa premiere partie seulement) est a rnettre en relation avec la fiscalite, en distinguant: 1) Les [Prieniens] qui habitent Naulochon, Icsquels sont, comme les autres Prieniens autonomes et libres, possedent la [terre] et les maisons en totalite en ville et dans la chora. Ceux-la, l'ensemble des Prieniens, Alexandre les exempte de la syntaxis 107. 2) Un certain nombre de komai, constituant au moins deux cornmunautes, Myrsileia et les Pedieis, si lon suit la tres probable restitution de A. J. Heisserer 109, villages que le roi reclame comme siens et qui, par consequent, doivent acquitter le phoros 109. Une nuance d'irnportance tout de merne. S. M. Sherwin-White s'est auachee a montrer la coherence du texte 1. Priene, 1, avec le reste de la documentation concernant les Pedieis, mais a certains
yg Plmc, HN, 5.117 ,Str 1.3.17 Plme, HN, 5.116 100 Gallet de Santerre 1947-1948,301-304 a partir de Phne, HN, 3514. 101 I. Prienc; I. Cette mscription a ete bien sou vent reproduitc (e.g OelIS, I) Plusieurs etudes lUI ant rcccmmcnt etc consacrees : Van Bcrchern 1970,198-205, Hersserer 1980,145-168, Sherwin-White 1985,69-89. Cf ausst Botermann 1994. 1]J2 Tcllc est la soluuon rctenue dcpuis Welles 1938,258 ct n 3 10l Sherwin-White 1985,72-74, selon elle II sagrran dun extraltd'une lettrc, ce qUI parait mal converur avec lc caracterc apparernment composite de la fin du document 104 Sherwin-Wlutc 1985, 71, fig I lOS I Priene. 14-16. 106 Faraguna 1995, 69-70 107 Infra p. 473. lOS Heisscrcr 1980,152 et 156, aux I. 9-10 du texte M1JpOTI[AFlcoy K]cxl nF[8'2coy ... 1 X({Jpay La zone du vacat cst csumcc a c a 9-10, nc pourrait-on penscr a quclque chose commc . Kw,uac; 1£ Kat') Hcissercr resutuc Myrsrlcia paree qu'elle est menuonnee dans une inscnpuon de Magnesie (certes beaucoup plus tardive, I Magnesia, 116, I. 53, 11 propos de ses agroi ; quant au Pedteis nous avons vu qu'rls sont I'occasion probable de l'rnscnptron de I' ensemble du dossier de l' ante du temple. lOY Ccla suppose a contra no que lcs Pnerucns etaicnt excmptcs pour 1a partie de la chora dont 1a possession leur etait reconnue Comme Ie note fort justernent Sherwin-White 1985, 83 II ne s' agu pas pour Alexandre de rcclamer Lachora dc Pnenc (contra Hornblower 19H2a, 162 sq) 99
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moments clle semble avoir perdu de vue la construction de la lettre elle merne 110. La premiere clause concerne les Prieniens de Naulochon : "Au sujet de ceux qui resident a Naulochon, autant qu'ils soient [Prieniens], qu'ils soient autonomes et libres, possedant la terre et les maisons - toutes celles qui sont dans la ville et la chora -, comme les Prieniens eux-rnemes". Cette formulation serait bien insolite si I'on comprend quil sagit la de mesures concernant les Prieniens en general. II me semble que I' on doit interpreter les choses ainsi : la liberation, I' autonornie, la pleine propriete sont deja reconnues par Alexandre aux Prieniens, c'est ce que pourrait indiquer la ligne 7: W[0TC£p ... 111, etc. ; Ie fait nouveau, que I'on met en valeur par la I. 2 112, c' est que les memes'droits sont reconnus aux Prieniens de Naulochon. Dans ces conditions, bien que S. M. Sherwin-White ait balaye rapidement cette hypothese 113, il parait inevitable d'admettre avec D. Van Berchem que lapolis de la I. 6 et la chora de la 1. 7 ne peuvent etre que celles de Naulochon, sinon comment les Prieniens de Naulochon pourraient etre dits possesseurs legitimes de la terre et des maisons en totalite (I. 6) s'il sagissait de Priene, Mon accord avec D. Van Bcrchem s'arrete la. Je crois en effet quil convient de renverser lordre des chases qu'il propose. II sagit, nous I'avons vu, d'un problerne de territoire, de frontieres, comme le differend seculaire avec Samos 114 dans lequel Alexandre etait intervenu des 334 liS. II faut tenir compte du fait que I'inscription figurait sur I' ante du temple ce qui implique que les Prieniens ant etc les beneficiaires de I' operation: il est clair que Naulochon appartient desormais aux Prieniens (ville et chora), alors que nous avons pu noter que vers Ie milieu du lye s. la numismatique lin montre que les deux communautes existaient separement, meme si leurs liens etaient testes etroits. La seule autre mention de Naulochon dans I'epigraphie prienienne provient de I. Priene, 196. Cette inscription ne manque pas d'interet dans la me sure ou cette dedicace 117 presente des ionismcs qui l' avaient faite dater du milieu du milieu du lye s. par Hiller von Gaertringen. Elle est en place et permet de fixer la chronologie du mur, a condition d'etre sur de celie de l'inscription. 11 me semble que cette reference au heros Naulochos conviendrait mieux a I'epoque ou Priene recupere la bourgade de Naulochon precedernment emancipee et done a I' epoque d' Alexandre. En meme temps, Alexandre fait valoir ses droits sur les Myrsileioi et les Pedieis (tout ou partie: on sait en effet que plus tard une partie de ces derniers se trouve dans la chora de Priene 118), et cela parce que le Macedonien se voulait I' heritier des grands domaines pcrscs (royaux au satrapaux) dont certains se trouvaient assurement dans la region de Magnesie 119. On ne connait pas l'emplacernent exact de Naulochon, probable port de Ill) Cf deja des la p. 81 infine, elle ne parle plus que du statut fiscal des Pneruens ; cf. encore p. 83, " ... the terruory the Pnenians are to control (the urban site of Pnene, the cham and Naulochon)". III Telle est la resutuuon que propose Heisserer 1980, 155 Mats en raison de ce qUI est conserve de la lettre, II est a vrat dire Impossible de traneher entre un n et un 0, qUI permettau une lecture o[ co hi 81, .. 11 argumentc sur Ja longueur de la Jacune qUI ne perrnet pas de loger [8£ ,u~J. 112 En realite la premiere Sl I'on admet avec Sherwm-Whue 1985, 81 que la lrgnc I . ~exatAEWe; 'A/,I£~av8Jpou a etc rajoutee apres coup, au moment de la gravure sur I'ante de I'ensemble du dossier. 113 Sherwm-Whitc 1985, 83, n. 113 I I. Priene, 37 ; supra p 268. liS I 146: 'AA£~av8po1J 8lC(~aVlOe; de; 1~V 'Ao iov. 116 Supra p. 390. 117 Chavane & Yon 1978, 140, donnent une traduction de ee texte liS Cf aUSSJ l. Priene. 3 qUI garanut les drous des Pedieis dans Ie decret pour Ie Megabyze 119 Supra p 46
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l'ancienne Priene (qui en possedait deux d'apres Ie Ps.-Skylax), sans doute assez a I'est sur l'ancien trace du golfe Latmique puisque Pline 120 parle d'un oppidum situe entre Myonte et Priene, Quant aux Pedieis, leur nom meme laisse supposer qu'ils habitaient Ie Pedion, cesta-dire la zone alluviale du Meandre entre Priene et Magnesie. Nous avons la tous les ingredients du confiit regie presque un derni-siecle plus tard par Lysirnaque et cela rend coherent Ie dossier dans Ie sens propose par S. M. Sherwin-White. Malgre les lacunes, les I. 1-15 se laissent done assez bien interpreter. II n' en va pas de merne pour la suite dont Ie texte est mal conserve mais il devait y avoir la des clauses d'une autre nature que fiscale, II y est d' abord question d' une phroura, une garnison ; il est raisonnable de penser qu' elle tient la Teloneia Akra dont il est question dans plusieurs decrets ulterieurs 121. Si Ie verbe d]auy£t[v de la I. 14 a bien pour objet ellV LO; ~v KlXl c«popoA6YTlw; il rro;,"; UWDV 11 y a Ia un contexte general a l'cpoque d' Antigone dans lequel smscnt tout naturellement la formule tres parnculiere des decrets pncrncns, IIP1TlV£WV lXDWV(If!WV £OVTWV. Cf sur la pohnquc d' Antigone a I'cgards des cites greeques, Snnpson 1959,385-409, sp. 398-401 ; BIllows 1985,436-445 (en general), 446-463 (Asie Mineure) , Ruzicka 1996, 131-134 139 Cf Ie point de vue de Gauthier, Bull ep., 1997, 503, OU lon sent percer quelques reserves Je rcviendrai ailleurs sur I'analyse de ces textes. 140 Crowther 1996, 210 eruct (pour la rcjctcr aussuot) I'hypothese que lcs dccrets 3, 4 et 7 pourraient apparterur a une periode comrnencant en 319 (mars pourquoi seulement ccux-Ia"). 141 I. Prtene, p XII ct 205. Cf. lcs prytancs crythrccns dans le decret pour Idncus, supra p. 404 142 On pourrait mettre en avant I' exemple de ChlOSou I' eponyrnc est destgne tan tat eomme prytanc, tantot eomme stephanephorc, avec mcrne un eas ou I' on a TOV npurcviv TOV CHE'PlXvTl'Plopov] ; cf Vanseveren 1937, 344347 (Robert & Robert, Bull ep , 1971, 581) , Crowther 1996, 206 VOIr les irnphcauons supra p. 390 pour linscnpuon de Pnenc concernant Ics Maromtams. 14J / Priene, p 204 136
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la fondation de Priene de peu avant 350 a.C. II me semble qu'une chronologie globalement rabaissee de vingt ans foumirait un debut plus credible pour la carriere d' Apellis en liaison avec l' autonomie concedee par Alexandre et Ie changement de personnel politique qui en a resulte 144. Le decret 1. Priene, 3 amene a s'interroger sur les etapes de construction du temple d' Athena. Nous avons note plus haut qu'il y a toutes chances que celle-ci ait ete cntreprise sous les Hekatornnides 145 mais n' etait pas achevee au moment de la conquete macedonienne. Rien ne prouve qu' Alexandre se soit rendu aPriene mais tout le reste du dossier (affaire de Samos, de Naulochon) amene a penser qu'il a recu des ambassadeurs (a Ephese? pendant le siege de Milet") et c'est a ce moment qu'il a promis les fonds necessaires a I'achevement du temple. La comparaison avec ce qui se passe en Troade, et precisernent a Ilion, incite a douter que la promesse ait ete suivie immediaternent deffet 146. 11 ne me parait nullement invraisemblable qu' Antigone, manifesternent tres actif dans la region, ait pu contribuer a l' achevement des travaux. Quel peut etre alors le role dans cette affaire de Megabyze, fils de Megabyze, neocore de I'Artemis d'Ephese 1477 La formulations des lignes 6 a 8 : rtepi "COD vuoii tflc; [' A811vaC;] t~V aUVtEA£cnv reacJ(Xv rep08ulliav re[Oll1cHxll£[vov indique bien plus surernent une intervention diplomatique qu'une contribution financiere qui eut ete sans aucun doute plus clairement indiquee. A partir de la, deux hypotheses egalernent plausibles sont susceptibles d' etre proposees : soit Ie neocore a intercede aupres d' Antigone, soit I'intervention a eu lieu au moment du passage d' Alexandre a Ephese mais les Prieniens ont attendu la fin effective des travaux pour Ie remercier d'un decret et d'une statue 148. On sait que ce dernier entretenait des relations epistolaires avec Alexandre 149 qui font necessairement suite a un contact direct a Ephese. La dedicace : "Le rai Alexandre a consacre le temple a Athena Polias" ISO ne peut evidernment avoir ete gravee qu'une fois Ie monument termine, au moins dans son gros-reuvre, Que conclure? Le regne d' Alexandre a ici encore ete trap court pour avoir Iaisse une trace tangible incontestable. La fortification de I' akra, les debuts du temple d' Athena remontent aux Hekatomnides lSI. Certains elements de la muraille semblent etre anterieurs a l' arrivee des Macedoniens, mais d' autres pourraient etre contemporains et merne posterieurs 152. En revanche il est assez clair que les
Contra Crowther 1996, 216-211;. Cf supra p. 31;9. 146 Heissercr 1980, 164, souhgne quen 334 Alexandre pouvait fairc des promesscs mcluant des engagements financiers mars quil etait mcapablc de lcs honorer a ce moment. En revanche, Crowther 1996,219 soutienr que la forme des lettres de la dedicace 1 Priene, 153 amcne a la placer en 334. Peut-on etrc aussi precis cn argumentant seulement sur la "forme des lcttres". 147 1 Priene, 3. Remarquons au passage que ce ncocore au nom cultuel perse se comportc dans un rescau relauormel tout a fait grec, on penscra a la pemturc de la pompe du Megabyze realisee par Apcl1e, Plme, fiN, 35 93 (cf aussi les rapports d'un des predecesseurs avec Xenophon, son voyage a Olympic). Faut-il conclure pour autant a une erreur de Strabon a propos des engines du pcrsonnages. Cela ne parait en aucunc facon assure ct temoigne ICI encore d'une concepuon quelque peu mamcbeenne des rapports entre Grecs ct non Grecs. 148 I. Prtene, 136. 149 Plut., Alex, 42. 150 I. Priene, 156 (SyIP, 277, Tod, 184); Heisscrer 1980, 143-145. lSI Supra p 39 r. 152 Cf Pimouguet 1994,330-336 et par exemple Mcxrcoll 1997,48-53; 71-74, qui la date de I'cpoquc hellenisnque avant 300 (ctat de la question p 49 n 25) 144
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constructions urbaines ont tout chance d' etre hellenistiques 153 et tous les ternoignages archeologiques iraient plutot en ce sens. En bref, le debat sur la refondation de Priene me parait etre un faux probleme. II y a eu reactivation sous les Hekatomnides d'un site qui etait rune des composantes de Priene et cela pour des raions geo-strategiques, Les effets ont ete des lors visibles sur le terrain et la faveur d' Alexandre puis des Diadoques a permis la construction d' un veritable centre urbain dont la cite etait certainement depourvue auparavant. Apres Ie desastre du Granique, veritable Crecy de la noblesse perse mais aussi tombeau de la tactique pronee par les satrapes, la situation personnelle de Memnon est confortee, 11 semble desormais etre le seul aavoir l' oreiJle du Roi. Un echelon de resistance s'organise a Milet, Memnon se sent en securite, car il pense disposer (en cela il n'a pas tort) de la superiorite sur mer. Alexandre met le siege devant la viJle 154 qui est tenue par une garnison royale selon Arrien 155. Le Macedonien etablit un blocus par terre et par mer (Nicanor se jette avec sa flotte sur Ie celebre 110t de Lade) en levant aux Milesiens l' espoir de recevoir le secours de la flotte perse. Les notables milesiens font alors la curieuse proposition de faire de Milet une ville ouverte en y accueiJlant simultanement les Perses et Alexandre 156. La flotte perse est ancree au cap Mycale mais elle est obligee de se ravitailler a Samos dans la mesure ou Alexandre envoie Phi Iotas pour l'ernpecher de debarquer, etablissant ainsi un blocus qu' elle se montre incapable de forcer. Alexandre reussit a s'ernparer de la ville de Milet. I1laisse la liberte aux citoyens milesiens, mais vend les autres comme esclaves 157. 11 est clair que la comme ailleurs est etabli un regime dernocratique philomacedonien, Alexandre figure comme premier eponyrne apres la "liberation" de la cite, done pour I'annee 334/333. Cela ne signifie nullement pour autant que les annees suivantes aient ete exemptes de difficultes com me Ie montrent les deux eponymies d' ApoJlon pour 332/33 I et 330/329 158. II faut y voir la consequence des exactions de Pharnabaze 159. II apparait cependant que Milet a retrouve assez rapidement sa prosperite au point de devenir des Ie regne d' Alexandre une capitale administrative et un atelier monetaire royal 160. H. W. Parke 16J a sans doute raison de mettre en relation la restauration de la democratic et celle de I' oracle de Didymes, dont Callisthene 162 rapporte la prophetie faite a Alexandre dans le sens que pouvait souhaiter ce demier, 153 Cf. par exemple Botermann 1994, 165, repoussant certains arguments de Demand 1986 11 propos de la date de construcuon des malsons Com me II a ete note plus haut, II est difficrle de urer des conclusions de 1. Priene, 196 dont la date n' est pas assurec, en revanche la relation avec 1a muraille dans laquellc Ie bloc ne semble pas etre en remplor, parait bien affirrnee. 154 DlOd. 17.22.1. 155 Amen..4.n., I 18.4 156 Amen, An., 1.19.1. Preuve 11 tout 1c moms dunc ccrtaine uedeur 11 legard d"Alexandre ou en tout cas que I'on ne rrusart pas 11 coup sur sur la victorre finale de ce derruer 157 Diod. 17.22.5 ; cf. Amen, An, I 19.6 ISS Cf la liste Sy1l3, 272 (Dolphimon. 122) 159 Infra p 463. 160 Supra p 161 161 Parke 1985, e g 67 , en revanche, son interpretation du "massacre des Branchidcs" (62-68) parait plus sujctte 11 caution 162 l-Grlhst, 124, FI4 apud Str 17 143
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Fort de son succes a Milet, Alexandre se fixe Halicarnasse comme objectif dans la mesure ou Memnon (avec aussi Orontobates) a choisi cette place, aisement defendable, com me point de concentration des forces perses dans la region 163. Le Rhodien a obtenu un vaste commandement sur les "riverains de la mer" 164. Alexandre congedie l'essentiel de sa flotte 165 et, dans sa marche vers Halicarnasse, soumet selon Arrien et Diodore les cites grecques qui se trouvent sur son chemin 166. Diodore est Ie plus explicite : "Sur sa route, il gagne a sa cause les villes par ses bienfaits ('m.lt; qnAav8pcontatt;), mais il etait particulierernent genereux pour les cites grecques 167, leur accordant lautonomie et I' exemption du pharos, ajoutant quil avait entrepris la guerre contre les Perses en vue de la liberation des Grecs". Nous avons note combien ces themes entraient pleinement dans toute la tradition d' intervention des Grecs d'Europe en Asie 168, mais apartir de Iiiils nourrissaient aussi I'irnage mythique du Macedonien. Le detail de la marche ne nous est pas donne. On ne sait par consequent si Alexandre a suivi le plus court chemin par la route cotiere ou s' il a pris possession directement de la region de Mylasa, l'un des centres du pouvoir dans la satrapie de Carie. En tout cas, l'un de ses points de passage quasi oblige, dans la perspective enoncee par Diodore, est lasos. Un parti au moins parmi les habitants de cette cite avait participe ii l' action navale contre l' escadre macedonienne qui avait bloque I' acces a Milet en se jetant sur lTlot de Lade 169. Ce sont eux qui montent Ie seul navire capture par les Macedoniens au cours d'une escarmouche. Faut-il voir Iii la preuve que la flotte carienne avait participe au face a face des deux fiottcs, au cote des Pheniciens et des Chypriotes 170? C' est a nouveau par une inscription que nous sont fournies quelques informations complernentaires : deux freres, Gorgos et Minnion, sont honores d'un decret par leurs concitoyens pour etre intervenus aupres d' Alexandre et avoir ainsi recouvre la "Petite Mer" qu'ils remettent a leur cite. II n'y est pas dit explicitement que le roi en avait prive les Iasiens, mais on peut raisonnablement penser que tel avait etc Ie cas dans I'un de ccs arbitrages a propos de terres depuis longtemps contestees : les cites profitant du passage d' Alexandre sur leur territoire ou a proxirnite pour lui faire rcgler leurs conflits seculaires, La localisation de la "Petite Mer" nest pas cornpletement assuree, lasos est une lie tres proche de la cote. Strabon precise 171 que sa chora est pauvre et que la richesse principale provient de la peche, car la zone est tres poissonneuse. Plusieurs savants modernes ont rendu vraisemblable quil sagit la d'une ctcnduc lacustre encore en communication avec la mer dans l' Antiquite, grace aux eaux du
DlOd. 1723.4. Suprap.155etn.315 165 Cf. Thommassen 1984, 9 sq., pour les motifs qui ont conduit Alexandre a ceUe decision qui pouvait apparaitre comme audacieuse, voire mcmc imprudcntc. 166 DIOd. 17 24.1 .Arnen, An., 1.20 2 A partir de cc moment cf Stark 1958a et b. 167 Ce qUI suppose qu'rl ne letan pas oblrgatoiremem autant pour Ics autres (convienr-il de rapprocher eela de I' offre faite a Phocion concernant lcs rcvenus de Mylasa? 165 Cf. par exemple Agesilas. 169 Amen, An , 1.19 11 170 Edward 1989,44-49 171 Str 14.221 que I'on oppose souvcnt i The 8.283 ITCXAaJOITAOlHOV xwpiov, "la place jourssait dune antique opulence". Les deux mentions ne sont pas contradictoires, a moms de donner un sens au mot chorion qut nc convient pas ICI 16-'
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Kybersos (aujourdhui Ie San Cay), mais cest I'alluvionnement dfl ace meme fleuve qui a entraine sa disparition progressive au profit d'une plaine alluviale 172. Il suffit de regarder une carte pour constater que ce secteur a dO ctre I' objet de convoitises, de disputes avec Mylasa en particulier, cette derniere ayant probablement exerce des periodes de domination sur la region contestee, dans la mesure ou il sagissait de son debouche Ie plus commode sur la mer. En revanche, il nc parait pas judicieux de suivre A. J. Heisserer lorsqu'il propose de verser au rnerne dossier Ie don propose par Alexandre a Phocion 173 des revenus 174 au choix de Kios, de Mylasa, de Gergithe 175 ou d'Elaia, Cela ne signifie pas que le Macedonien a integre, ou assirnile, ces villes grecques au domaine royal (comme il le faisait par exemple pour les komai mentionnees dans I'jnscription l. Priene, 1) 176. Si I'anecdote a quelque fondernent historique (et cette hypothese ne doit en tout cas pas etre rejetee au nom d'une certaine image que l'on croit pouvoir attribuer a Alexandre), eela prouve seulement que les cites en question n' etaient pas a<popoAoyrrrOl, exemptes du tribut. Avec ce cadeau propose par Alexandre nous serions dans Ie mernc cas de figure que pour Thcrnistocle 177. Pour revenir a Iasos, doit-on comprendre que, dans un premier temps, Ie roi avait puni la cite de sa participation a la Iloue ennemie puis setait Iaisse flechir par Gorgos et Minnion? Encore faudrait-il que la chronologie soit assurec, or nous constatons, une fois encore, que tel n'est pas Ie cas. Il convicnt done de reexarnincr les indices fournis par les autres inscriptions qui mentionnent Gorgos. C'est probablement ce merne personnage qui participe en 324 a Ecbatane 178, en tant que orrAo Tratle, II, n° 6R, pl. 8R, 2R , 2335, p1 164,25. 27 E.g. Traite, II, pl. 89,1 et 3 (PI. II, 18-19) 2R SNG Tubingen 2628 (PI. Xl, 9) , von /vulock 7622 , Cop 261 sq ; Sweden II 2181-21 R3 De facture differente, von Aulock 1547. 29 IGCH 404, date par Pnce 1991,53 de 323-320 (ou peu apres). 30 Sur Ie role Important de cette cite et la diffus.on de son rnonnayage, Robert 1951.83 sq 18
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- A Kios de Mysie, il convient d'examiner attentivement toute une serie de bronzes que W. Waddington-E. Babelon-Th. Reinach 31 datent du dernier quart du lye S. Le premier se singularise par la presence a I' avers d' un perse barbu 32, au revers une grappe de raisin entre deux epis de ble, anepigraphe. Ce personnage pourrait bien appartenir a la dynastie de Kios 33 ancetre des rois du Pont. Toutes les autres pieces ont en commun un avers a tete de Perse imberbe portant la tiare droite 34 que les auteurs identifient comme Mithra. Elles sont legendees : K], K]A, K]ANQN, ce qui indique qu'il sagit dernissions civiques. Les types de revers sont varies. Des themes dionysiaques dans la continuite de la monnaie precedente : grappe de raisin dans une couronne forrnee par les deux epis 35, canthare d' ou sortent deux grappes, couronne d'epis 36. Une monnaie se distingue en retenant Ie type a la proue de navire, habituel sur Ies monnaies d'or ou dargent, alors qu'une autre innove en placant au centre du revers une massue sous la Iegende KIANQN 37. Continuite et rupture caracterisent ce monnayage : comment ne pas voir en effet dans la mas sue une reference au nouvel ordre? A titre de comparaison Ie monnayage emis par Balakros en Cilicie au nom d' Alexandre se distingue essentiellement de celui de ses predecesseurs par I'apparition de la mas sue comme symbole secondaire 38. Notons enfin une serie avec Herakles imberbe a l'avers, la mas sue et Ie carquois au revers, done tout a fait comparable aux bronzes officiels d' Alexandre, mais la Iegende KIANnN atteste un emission civique 39 et le rendu est assez different. Trois cites micrasiatiques ou insulaires frappent des monnaies d' electrum, Tout montre qu'elles sont influencees en cela non seulement par leur propre somme mythologique mais aussi par les evenernents qui lcs concernent. Cela se traduit par une extreme variete des types retenus, trait qui leur est commun. Faut-il voir un effet du hasard si dans tous les cas apparait une figure imberbe, coiffee d'une tiare ceinte d'un diademe? - A Phocee, plusieurs hektai portent des teres satrapales tres differentes les unes des autres. Sans revenir ici sur la question de savoir s'il sagit ou non de portraits, nous serions tente de penser que I'on a voulu evoquer Pissouthnes (Ph 65) plutot que son predecesseur, Tissapherne (Ph 86), Autophradates (Ph JO]) plutot qu'Orontes, Tout cela pour montrer que I' hekte Ph 84 n' est pas un cas isole. Fr. Bodenstedt 40 propose d' y reconnaitre unjeune perse ou Attis. Cette attribution parait pouvoir etre revisee : I) il attribue une date de toute facon
11 Waddington-Babelon-Remach 1908,313 n" 6-13 (pI. 49, 28-34), cf aussi tvoae. II, I n" 2858-2864 (pi 180,27-33). cf aUSSl Hamson 1982, 146. 12 Tratte, II, n" 2865, pI. 180,34 = Waddmgton-Babclon-Rcinach 1908,314 n" 14, pI. 49, 35 (PI. III, 12). 33 DlOd. 15.90; 16.90. 14 De facon tout il fait comparable aux monnaies de Memphis, il tel point que SIX 1894, 311-313 attnbuatt ees dermeres et les bronzes de KIOS il Mithndate, fils d' Anobarzane pour la penode 337-302 15 tvaue. II, n" 2864, pI. 180,33; Waddmgton-Babelon-Remach 1908.314, n" 13, pI. 49, 34 (PI. XI, 10) 36 Tratte, II, n° 2859-2862, pI. 180,28-31, Waddmgton-Babelon-Remaeh 1908, pi 49,31 (= PI. XI. 11), SNG von Aulock 7003 qUi semble s' apparenter au portrait Delaware (infra) 37 Trauc, II n" 2858, pI 180, 27 = Waddmgton-Babclon-Remach 1908, 313 n" 6, pi 49, 28 (= PI. XI, 12) Babelon indiquc que "cette tete est sembI able sur les monnaies d' Amastns" 3H Cf. par exemple SNG Levante 122, pour Balakros, se distmgue pnncipalement de 114, pour Mazaios, par la presence de la massue dans Ie champ. 39 Waddmgton-Babelon-Reinaeh 1908, 314 n" 17; pI. 49, 38 (= PI. XI, 13) date lil sans ventable demonstranon du IIIe s. , cf. von Aulock 7005 40 Bodenstedt 1981, 153 Ph 84 (= PI. XII, 1) et pI. 8, 8
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a cette monnaie ; 2) si l' on observe que ce "Perse" porte une tiare mais aussi un diademe (dill debar qui a recemment oppose H. Cahn et J. Zahle 41 il ressort, a cote d'un certain nombrc dincertitudes, que Ie diaderne pourrait etre a l'epoque de la domination perse la marque du gouvernement satrapique) ; 3) si I'on "ate" au personnage la tiare qui a ete pour Ies modernes un obstacle insurmontable a toute interpretation, Ie rapprochement avec Herakles-Alexandre devient parfaitement evident. - Etant donne les liens qui unissent les emissions de Mytilene et de Phocee, on doit sinterroger sur l'eventuelle presence d' Alexandre sur ce monnayage. J. F. Healy 42 etudie l'abondante serie d'hektai (My 104 de Bodenstedt) qu'il considere (a juste titre) comme ayant ete la derniere emise aMytilene : avers tete de jeune homme imberbe a droite comes de bouc, trois boucles [?] sur Ie sommet du crane 43. II Y voit un Alexandre represente en fils de Zeus Ammon 44 et rejette ala fois l'Idee qu'il s'agisse du dieu lui-merne 45 ou encore d' Apollon Karneios selon une hypothese de Fr. Imhoof Blumer 46. Le premier apparaissait barbu sur My 67 ; Ie second est un dieu essentiellement peloponesien. Revers: aigle a droite regardant derriere lui inscrit dans un carre dont les cotes sont constitues par des bourrclets en relief. Cet aigle trouve sa contrepartie dans divers monnayages "macedoniens" 47 et on pense tout particulierernent a une breve serie reexaminee recemment par M. J. Price 48 : a I'avers, Zeus laure a droite identique a celui des monnaies de Philippe 11 et aussi a l' avers de My 103; au revers, un aigle a droite de trois-quarts face regardant derriere lui, symboles secondaires : une branche d' olivier et un bonnet perse deplie horizontalement 49, legende AAE3ANllPOY. M. J. Price c1asse cette emission a "Amphipolis" S0. Ses caracteristiques ainsi que son poids 51 avaient amene E. M. Pegan 52 a considerer qu' il s' agissait d'une serie de
trap haute
41 Cahn 1975. 84-91 et la reponse dc Morkholm & Zahlc 1976.82-84, aUSSI Zahlc ibid., 101- lO2 Le debat s'est largcment poursuivi cnsuite, cf par ex Hamson 1982, 81-93 ; Burner 1985 ; Pent 1988, 320-322 etc 42 Healy 1962, 65-71 SUlvl par Worthington 1990, 211 Biles ne figurent pas sur tous lcs exernplaires (My 104 = PI. XI, 15). 44 Tel est aussr le pomt de vue de Bodenstedt 1981, 101 On pensera bien sur aux monnaics de Lysunaque a l'effigic dAlexandre-Ammon, et mlCUX encore aux monnaics ernrses it Naucratis du VIvantd'Alexandre. 45 Ainsi Wroth 1892. et d'autres 46 Tel est aUSSI Ie point de vue de Jenkms, commcntaire a Gulbenktan 715 47 La representauon la plus proche etant celie des monnaies d' Amyntas III, cf Pegan 1968 . p1. 12, 11 En effet la parente cst cvidente entre lc rcndu des rnonnaies d' Amyntas (it Algal) et de Myttlene, mars c'est tout aUSSI net pour le monnayage au nom d' Alexandre (Pnce 1991, n° 96 sq., etc.) 4g Pncc 1991, n" 142 a et b (a = PI. XII, 2 = Babclon 1932, n° 910, p1. 311,18). 4~ L'rdenuticanon de cctte uarc, due a B V. Head, est reprise par Babelon 1932, 551 sq., ce qui le tart pencher pour unc fabncauon asratique - sans pouvoir unaginer qu'clle pursse ctrc lc fait d' Alexandre' Il attnbue a cettc sene une ongme bactncnnc Rappelons que l' une de ces monnares a ete trouvec au Pcnjab Les circonstanccs de I'anahase d'Alcxandre pourrarcnt expliqucr lc heu de la decouverte. 5(1 Gutllemets de M. J. Price. II pense aussi a Aigai. Lc RIder 1977,393 sq les attnbuc pour sa part a Pella. Son argumentation repose en partie sur une observation de Pegan . deux des cinq cxemplaires sont surfrappes sur des monnares de Patraos ror des Pcorucns (c. 335-315) Dans Ie memc sens Le RIder 1998, 239-241 et p1. 53 17. Argument certes fort pour une frappe en Macedome mars pas decisif a lUI seul 51 Entre 14,3 et 14,45 g, tctradrachmc de pords thraco-rnaccdoruen pour Lc Rider. L'cxemplaire de Rawalpindi est beaucoup plus lcger 52 Pegan 1968, 99-111 ; voir aussi I.e RIder 1977, 393-394 et p1. 49, 1-3 . ses photos ne laissent pas de doute sur l'rdenufication du bonnet. Celur-ci pouvait presenter des formes diverses, un cone retombant vers I'avant ou bien une sorte de "beret" dote de paragnandes et d'un couvre-nuque comme cest le cas ICI ; a titre de comparaison la photo donncc par Welser 1989, pI 18, 17 de la monnaie Bank Leu 42 Auknon 1987 n" 376 (PI III, 20) ou encore TrwII', u. pi 91,9,13,16,18-21, ete
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transmon entre les monnaies de Philippe et celles d' Alexandre 53. Si cette idee doit etre repoussee, I' attribution a la Macedoine devient moins contraignante et la presence de la coiffe perse (comme symbole secondaire) ferait plutot penser aSardes (infra) et en tout cas a un atelier anatolien, dans la periode precoce de I' intervention asiatique d' Alexandre. Le portrait de Zeus laure a droite est abondamment represente sur Ie monnayage de Mytilene (My 96, 98, 101) et il est tentant d'y voir une reference a I' action de Philippe dans Ie nord de I'Egce 54 mais nous avons vu plus haut que les autels de Zeus Philippios ne sauraient etre anterieurs a la campagne asiatique d' Alexandre. Mais que dire de la monnaie My 103 55 avec a I'avers Zeus et au revers un Herakles imberbe? Il est fort seduisant de penser que cette serie vise a associer Zeus Philippios, dont le culte est justement atteste a Lesbos (a Eresos precisement) par une inscription 56 et Alexandre Herakles 57 dans une representation qui va devenir canonique sur les monnaies du conquerant de I' Asie. C' est de cette seule facon que I' on peut expliquer I' ordre des faces. Fr. Bodenstedt place la monnaie My 102 58 immediatement avant dans son catalogue pour des raisons stylistiques evidentes, en particulier Ie meme type de carre delimite par un bourrelet continuo Il a interprete le type de revers comme Ie profil d'un satrape imberbe (les successeurs de Memnon au cours de la contre-attaque perse de 332 apres la mort de ce dernier a Mytilene"), Ie personnage de l'avers, traite a la grecque, etant Kammys, Diogenes ou merne Chares, Si cette lecture devait etre retenue I' ordre des faces serait quelque peu etonnant et le seul clement de comparaison apparent serait une autre piece de Mytilene, My 71, ou est represente au revers un Perse barbu qui a toutes chances d' etre Pharnabaze, dans le contexte de la reprise en main de I' Egee apres la bataille de Cnide en 394, mais a l'avers Athena doit symboliser l'action de Conon qu'une cite grecque insulaire avait evidernment la volonte de privilegier par rapport a celIe d'un Perse. Par consequent les conditions ne sont pas similaires. Nous proposons de voir a I' avers Philippe et au revers Alexandre en satrape (tiare et diaderne). -A Cyzique, des stateres et des hektai d'electrum 59 aussi bien qu'une herni-drachme et une subdivision dargent 60 ont pour illustration un "Perse" imberbe qu'E. Babelon 61 propose d'identifier a Atys en particulier parce que l'une des principales divinites de Cyzique est la Meter Dindyrnene, assimilee a Cybele, et dont Attis est Ie paredre. Mais cela est une reconstruction toute theorique dans la rnesure ou les references faites au sanctuaire montagnard de la deesse 62 ne mentionnent nullemcnt Attis. On notera aussi que dans ces exernplaires, comme E. Babelon I'indique lui-rneme, la tiare est ceinte du diademe et que Contra Pnce 1991, 103, "separate nunt" Unc Image quasi canomquc de ee Zeus laure (supra p 470) est presente avec une apparente srrnultaneite dans les series de Lampsaque (e.g Gulhenkzan 691-692) et de Cyzique (c g Gulbenkian 671), type figurant dans Jc tresor de Pnnkipo dont tout eoneorde a montrer qu'rl est contemporam d' Alexandre (mfra n 63). 55 PI. XI, 16. 56 IG, XIl.2. 526 , cf. en derruer lieu Heisscrer 1980, 58 sq 57 Bodenstedt 1981, 10 I. 5S PI. XI, 17. S9 Traite, II, n° 2619-2620 (PI 173,27 [PI. XII, 3J-28) ; Gulbenkian 644 (PI. XII, 4) , bibhograplue dans Mildenberg 1993-1994. 60 Traite, II, n" 2809-2810 (PI 178,14), ef. en derruer lieu vente Pegan, 23 fevner 1991 n" 38 61 Babelon 1910 col. 1461, sq. Cr. aussi von Fritze 1912. 62 Str 12 8 11 53
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plusieurs tetes de Zeus Ammon 63 figurent dans le merne groupe stylistique. Concernant la date de ces series, il doit etre observe qu'une monnaie sirnilaire a Gulbenkian 644 (ou le merne exemplaire?) figure dans Ie tresor de Prinkipo 64, ainsi qu'une tete d'Herakles imberbe 65. - Enfin a Rhodes, une monnaie conservee dans la collection Courtauld 66 et dont I'interet a ete souligne par S. Hornblower 67 presente dans le champ du revers une petite tete imberbe coiffee d'une tiare dans laquelle C. M. Kraay 6R voit une Demeter. Comme le fait observer R. A. Moysey 69 cette monnaie est datee des alentours de 340 par R. Ashton dans une fourchette comprise entre 350 et 334 (done implicitement avant les series frappees pour Alexandre). La rarete de cette emission - un seul exemplaire connu it ce jour - amene a suggerer qu'il sagit la d'une serie de "transition" au moment du ralJiement de Rhodes a Alexandre (et dans ces conditions on s'interrogera sur la presence de la lettre A syrnetriquement ala tete satrapale par rapport au bouton de rose, en rappel ant la meme lettre sur les monnaies de Saqqara). Ce cas est done different en ce sens que la tete "satrapale" est ici un symbole secondaire auquel on pourrait etre rente de n' accorder aucune valeur particuliere sinon la fantaisie du monetaire, Mais outre I' extreme rarete de tels symboles sur les monnaies rhodiennes de cette epoque, on notera une rencontre qui ne parait pas etre Ie fait du hasard. Certaines series officielles de Sardes 70, quil sagisse de l'or ou de largent, comportent comme marque de controle une tete coiffee d'une tiare. La serie VITI, ainsi definie par M. Thompson (n° 44-49), est datee par elle de la periode 330-325. Suivant en cela E. T. Newell 71 elle propose de reconnaitre un Mithra 72, tout en soulignant que Sanies etait Ie lieu Ie mieux approprie pour le rappel du pouvoir perse. II s'agit done bien plutot de la representation du pouvoir du Roi, et it ce moment il ne peut sagir que d'Alexandre. Sur certains exernplaires la tete est tres exactement sernblable a celle de Rhodes 73, en revanche, et comme il sied pour Ie roi, le tetradrachrne (n° 46) 74 presente une tete coiffee d'une tiare droite. II y avait longtemps que les Grccs connaissaient les subtilites de I'etiquette perse. On rappellera, a titre de comparaison, Ie discours que Xenophon 75 prete a Tissapherne "la tiare que Ie roi a sur la tete, lui seul a Ie droit de la porter droite" qui rend comprehensible la scene
Traite, II, n° 2623-2625 (pI 173,31-33); Gulhenkzan 640,652 qUI provient du tresor de Pnnkipo. Reglmg 1931, n° 12, IGCH 1239, date lit de 335/334, rnais on eonsultera lc commentaire de Lc Rider 1977,255-257, qUI doutc de lhomogencue de ce tresor venant de la plus grande des lies des Pnnces, en particuher de la liaison de groupe des phihppes d'or avec Ie reste 65 Gulhenkian 655 , von Fntze 1912, 194, pi 6.6; Kraay 1976, 264 n° 964, date cette monnare de 330, done de I'epoque d' Alexandre. Jenkins la plaee sensiblement plus haut dans lc IV's. 66 Pollard 1968, 68 n° 101 (datee lit des environs de 380, ef. Descat 1993, 228, qUI propose pour sa part 332 ou 331). Tctradrachme, 15,1 I g = PI. XI, 14 67 Hornblower 1982, 130 n 194 et p 134 (pI. 36a) II en tire des conclusions discutables, quelle que sort la date attnbuec it la monnaie 6, Kraay 1980, 61 69 Moysey 1989, 127 et n. 57 70 Thompson 1983,42. 71 Newell 1923. 72 E g p. 5 Les deux notions ne sont pas aussi evidemment hees que semble lc penser M Thompson. 73 Cf n044 et aussi 45 et p1 2 (= PI. XII, 5-6). 74 PI. XII, 7. 75 X6n, An , 2 5 23 ; Cyr, 8 13 3 , cf en comrepomt Hdt 7 61 et la note de Legrand, CUF, 95 n 63 64
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L' ASIE MINEURE AU IVe s. (412-323 a.c.)
depeinte par Plutarque 76: "Quand Dernarate Ie Spartiate, invite a solliciter une faveur, demanda de faire son entree dans Sardes a cheval en portant sa tiare droite, comme les rois, Mithropaustes, cousin du Roi, touchant la tiare de Demarate, lui dit, cette tiare n'a pas de cervelle a couvrir..." On sait par deux anecdotes concernant ce merne Dernarate et Thernistocle 77 que le Grand Roi pouvait exiger le port du costume perse en echange de dons et du statut de Perse. Ce type de costume devait etre tout a fait banal pour les aristocrates anatoliens quelle qu'en fut l'origine ethnique (cf. la Lycie, la Paphlagonie, etc.) et il n'y a pas lieu, sauf par un postulat intenable, de penser qu' i I en allait autrement pour les Grecs. Alexandre revetu d'un costume perse? Nous disposons de quelques indices qui vont en ce sens 78. Arrien 79 indique qu'il echange son ancienne coiffure contre la kidaris perse et Quinte Curce 80 fournit une version differente mais comparable: "II ceignit sa tete d' un diademe de pourpre broche de blanc, tel que Darius en avait eu un, adopta le vetement des Perses" 81. Plutarque 82 rapporte l'anecdote suivante: les serviteurs d' Alexandre se sont divises en deux camps, run dirige par "Alexandre" lautre par "Darius". Averti, le Roi organise un combat singulier entre les deux chefs. "Alexandre" I'ernporte. En recompense il recoit douze villages et le droit de porter le costume perse. Ce dernier faisait done a I' evidence encore partie de I' etiquette. II y a aussi les monnaies provenant du tresor de Babylone 83 dont M. J. Price 84 montre que la date d'enfouissement doit etre tres proche de 323. On y trouve, selon la terminologie de Price, des monnaies de deux shekels (poids autour de 16 g) et de cinq shekels (autour de 40 g). La monnaie de deux shekels n'etait pas connue avant la decouverte de ce tresor. II y avait semble-t-il plusieurs types et aussi plusieurs ateliers. L' une presente a I' avers un Perse avec bonnet en arriere tirant a I' arc a droite; au revers un elephant a droite 85. Une autre variete publiee par H. Nicolet-Pierre 86 illustre un archer sur un quadrige que M. 1. Price identifie au Roi, lequel ne peut etre autre qu' Alexandre. II poursuit un elephant monte par deux personnages qui se trouve sur Iautre face. Tout cela se retrouve sur la piece de cinq shekels deja bien connue 87. A l' avers deux
76 Plut., Them, 297 ; ]'anecdote a quclque chance detre authenuquc puisquelle remonte au moms i! Phylarque (Souda, s. v. tiaras. 77 Athenee 1.29f-30a ; cf. Sekunda 1991,90. 78 Stewart ]993, 178 et n. 70 refuse cette Idee en s' appuyant sur Plut , Dem , 25 3, mars ce qur est drt la (dans un contexte ires polerruque) est que l'Argcadc rcfusau le titre de rot des 1"01S. S affirme d'autre part que Price 1981,34 "demolishes the notion that the 'Alexander' head on the Mcmphitc corns. was wearing a Persian satrapal cap". Ce n'est pas ce que drt Price et, de surcroit, les tctcs memphites s'rnscnvcnt dans une tradrtion d'enussions perses. 79 Arrien, An , 4 7 4 80 Quinte Curcc 6.6.4. 81 RItter ]965,6-30 traue de la coiffure du r01 pcrse et souhgne, 31-78, que le diademe d'Alcxandre na pas de modele grec ou macedomen 82 Plut., Alex. 3] .2-5. Cf. Bosworth 1980b. 83 Babylonc ]973 : CH I, 1975, n° 38 , 2, ]976, n° 49 ; 3, 1979 n° 22. 84 Pnce 1982,75-78 ; cf. ]991, 5 I ,452 sq. Ces senes semblent aV01r circule avant la thesaunsation 85 Price 1991, pI 159, I-J (I = PI. XII, 9) L'un des pratagomstes de la mosaique d' Alexandre i! Pompei porte le bonnet exactement de la merne facon Lcs lettrcs BA ligaturccs ne sauraient s' interpreter autrcmcnt que BA(IlAEQI) dans la contmuite des monnayages officiels anterieurs. So Nrcolet-Picrre 1978,40]-405. 87 Cf. l'exceJlente photographic de cette monnaie donnee par DaVIS & Kraay 1973, pI. 10-12 (= PI. XII, 10) Pnce 1988,34 et n 14; ses n° G et H (= PI. XII, 11)
ALEXANDRE ET LES MONNAYAGES "PERSES"
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"Perses" sur un elephant poursuivi par un cavalier arme d'une lance; au revers un personnage de face regardant ii droite couronne par Nike, Le couvre-chef est original, la combinaison du rendu des differentes series permet d' en donner une description plus exacte. II s'agit d'une tiare droite 88 comme il sied au Roi, mais dotee d'un cimier. Curieuse rencontre entre pratiques grecques et perses, mais qui somme toute na rien d'inattendu. On peut penser qu'il sagissait Iii d'une coiffure pour la guerre. II est evidemment tentant de rapprocher ce casque de la serie reunie par J. Votokopoulou 89 apartir de decouvertes issues principalement de la zone balkanique. Traditionnellement ces casques etaient appeles "thraces", elle propose de les nom mer "phrygiens" en soulignant, en particulier a travers Herodote 7.73 les liens existant entre Macedoniens et Phrygiens 90. Si I' on rnene Ie raisonnement a son terme, les occurrences herodoteennes 91 mettent en relation ces deux peuples (avec d'autres). L'un des elements peut etre la parente originelle, mais la soumission des Macedoniens a la Perse et leur participation a I' effort de guerre de cette derniere pourraient expliquer des similitudes dans la panoplie des differents contingents. On connait aussi depuis longtemps un monnayage de Hierapolis Bambyke 92 ernis au nom d' Alexandre (LKSNDR). Des representations diverses figurent sur ces series. Nous retiendrons ici les numeros 8 et 9 : I' avers est legerernent different mais dans les deux cas il sagit d'un cavalier a gauche coiffe d'un bonnet perse. Sur Ie numero 9 93 il porte une tiare a fanons alors qu' ii I' avers figure Ie Baal de Tarse dont il est bien probable qu'il a ete a I' origine du revers des frappes d' argent du conquerant 94. C' est assurement Alexandre que I'on a voulu illustrer la, Y a-t-il une "rnemoire" de ce type de costume, et en particulier de la coiffure? J. S. Crawford 95 publie un poids decore d'epoque romaine representant Alexandre coiffe d'un casque dont Ie sommet est orne d'un griffon. II le decrit comme "thrace" en fournissant un certain nombre de paralleles, Ie plus net etant une monnaie de Philippe V, ou Ie roi est represente avec un casque I'identifiant au heros Persee, a l'arriere une harpe. On sait toute l'ambiguite dutilisation de ce dernier en jouant sur I'homophonie perse-Perses. Mais cornrne Ie note J. S. Crawford, Ie casque du document qu'il publie n'est pas aile et il semble bien seduisant de considerer comme Ie fait implicitement M. J. Price 96 que ce casque "thrace" ou "phrygien" est en realite "perse". L' adjonction du griffon etant a mettre en relation par exemple avec la serie IV du monnayage de Sardes 97 OU I'animal mythique sert de marque de contr6le. L'examen des monnaies d' Amastris fait apparaitre egalernent une tete imberbe coiffee d'une tiare souple ceinte d'une couronne de laurier. On sait que la cite doit son nom a
SR S9
90
91 92
93 94 95 9h 97
Cemte d'un diadcmc dont Ie ruhan !lotte en arnere. Votokopoulou 1982,497-520 Supra p. 92. Cf aUSSI Hdt 9 31 sq Seyng 1971, 11-21. PI. XII, 8 Infra n 104 Crawford 1979,477-481 et pI. 67. Pnce 1981a, 34. Thompson J 983, n° 16-25.
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L' ASIE MINEURE AU IVe s. (412-323 a.c.)
la reine homonyme niece de Darius III, divorcee de Cratere puis veuve de Denys tyran d' Heraclee pontique, qui la fonda par Ie synrecisme de plusieurs etablissements cotiers. Un premier monnayage est ernis it son effigie et Iegende a son nom it la fin du Ive s. 98. Lorsque la cite devient autonome au debut du me s. elle adopte logiquement la legende AMALTPIEQN, mais le personnage qui est figure portant le me me costume est alors masculin. Ceux des auteurs qui etablissent cette distinction pen sent alors a un Mithra. II me semble qu'il sagit d'un Alexandre idealise ?". C'est aussi un Alexandre "oriental", ou en tout cas syncretique, dont C. C. Vermeule 100 publie la representation. II sagit d'une statuette de bronze depoque romaine, derivant de la celebre statue de Lysippe pour Alexandre, main droite appuyee sur une lance, main gauche sur la hanche, costume de facture grecque mais sur la tete une tiare souple a fanons retombants sur les epaules et Ie croissant lunaire du dieu Men. Si l'on retient I'identification de C. C. Vermeule nous avons la une assimilation (tardive) d' Alexandre au dieu Men, probable volonte de reaffirmer le versant "oriental" de son epopee, N'oublions pas que Ie Dieu-Iune est presque assurernent un dieu d'origine iranienne. Certes, Alexandre (ou ceux qui ont utilise son image post mortem) n'a nullement repugne a de telles assimilations. Mais le phenomene que nous venons de decrire nest pas de meme nature: la floraison dans le dernier tiers du IVe S. d'un meme theme, un jeune homme imberbe coiffe d'une tiare, droite ou non, mais Ie plus souvent ceinte d'un diademe fait probleme. Les etalons, les meraux, les representations memes, sont aussi varies que possible mais il ne saurait en etre autrement lorsque I' on constate que ces monnayages sont civiques et que la frappe de ces derniers etait justement rune des manifestations les plus eclatantes de l' autonomie des cites. Quel pourrait-etre alors le denominateur cornrnun, si lon admet qu'il peut yen avoir un? Malgre C. M. Harrison cest une solution d'abandon que de penser quil sagit de representations divines. Certes ces dernieres sont innombrables sur les monnaies, mais de nombreux dignitaires de l'Empire perse y figurent aussi. De surcroit, les "identifications" de divinites varient tout autant que celles des humains : Attis, Mithra, Men ... Demeter meme. Sans se soucier des contradictions, les auteurs de ces propositions divergentes etablissent des correlations entre les differentes series, en general pour des raisons stylistiques. Soulignons enfin que les cultes des principales divinites retenues (Artis, Mithra) sont rattaches de facon parfois un peu laborieuse au pantheon de la cite concernee et, qu' it coup sur, leur veritable succes est posterieur it l' anabase d' Alexandre. Sauf omission de rna part, il ne me semble pas que I'on puisse alleguer une seule representation assuree d' Attis qui soit anterieure it l'epoque hcllenistique (plus tardive encore pour Mithra 1(1). On pourrait tolit au plus considerer qu'il est line consequence indirecte de cette derniere par les brassages culturels qui se produisent it ce moment.
9S E.g SNG Black Sea 1297-1300 (1297 = PI. XII, 12) , von Aulock 6798-6799, l'edueur G. Kleiner decnt une tete d' Amastns en Mithra ; nous avons Iii hien plutot une nouvelle illustranon des habitudes vestnnentaires des populations de I' Asie Mmeure iI cctte cpo que 99 SNG Black Sea 1303 (= PI. XII, 13). 100 Vermeule 1989.183- I85. IIlI Cf Vermaseren 1987
ALEXANDR'E ET LES MONNA YAGES "PERSES"
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On doit alors aller jusqu'au bout du raisonnement. C'est assurement deforrner les realites que de lire les etapes de I' epopee d' Alexandre a travers Ie prisme de recits bien posterieurs aux faits ou l'histoire des premisses est reecrite en fonction des resultats, Alexandre liberateur des cites grecques asiatiques 102, c'est devenu un debat d'ecole, presque un exercice de style chez les modernes. Si I' on essaie de "coller" le mieux possible aux sources conternporaines, telle est bien I'image qu'un certain nombre de cites ont voulu mettre en avant (cf. par exemple Priene) mais il nest pas moins interessant d'observer que ces memes cites ont represente dabord Alexandre non pas en roi macedonien, ni merne en nouvel Herakles mais en satrape puis en roi perse. A partir de la, deux hypotheses: soit qu' Alexandre ait choisi a ce moment de son apogee de revetir un tel costume, soit que les cites aient vu en lui le successeur du satrape perse qui les gouvernait jusque la et cela sans veritable solution de continuite 103. II est en effet aise de montrer que dans un premier temps Alexandre n' a modifie en rien I' administration satrapique. Les deux hypotheses sont dailleurs parfaitement compatibles dans la mesure ou on imagine mal que les cites aient pu developper un theme identique sur leurs monnaies sans I' aval du roi ou de ses representants, Sans entrer dans la controverse, qui comporte encore aujourd'hui quelques jugements subjectifs, sur la date (et done le lieu) d' apparition des monnayages royaux d' Alexandre 104, la synthese des elements presentes indique que son avance n' a pas localement entraine tout de suite des bouleversements dans les pratiques monetaires des cites. En ce qui conceme le bronze, c'est dans des ateliers ou l'on ernettait deja a I'effigie des satrapes, a Kios et a Kebren comme a Memphis, que l'on a evoque, avec la liberte de style qui caracterisait tres normalement les ateliers des cites grecques autonomes (ou des entites assimilees), Ie trait physique principal qui distinguait le jeune conquerant, Un certain nombre d'entre eux sont ensuite passes dans le nouveau systerne d'emission au nom du roi (Iegendes AAE:::ANflPOY ou BA) 105. En revanche Ie monnayage d'electrum na pas survecu au regno du Macedonien 106 : les frappes relativement abondantes de Mytilene (My 104) en constituent en quelque sorte le chant du cygne lCn.
102 Cf. par exemple 1'article de Badian 1966, 37-69. 103 Bnant 1993, 13 souligne lmteret prccoce el soutenu d' Alexandre pour les chases d' Asie. Mcmc s'11 a vou1u d'cmblee se poser en succcsseur du Grand ROI, I'opuuon des Grecs asrauques a pu etre plus nuancee, L'rmpact des victoires ct de lavancee vcrs I'rntcneur modifiant progrcssivcmcnt Ics donnees 104 Cf. Zervos 1979,1982,166-179, la reponse de Pncc 1982, 180-190, cf. encore de Callatay 1982,525 , Troxell 1991, 49-62 ct, reiterant son point de vue, Pncc 1991, 27 sq. ; 1993, 172. '05 Mats notons it ce propos quil ne s'aglt pas lit d'une "revolution" puisqu'rl existart depuis la fin du v c s. ou Ie debut du IVC s. des monnaies frappees dans les ateliers rrucrasiauques avec la lcgcnde BA au d'autres smulaires. 106 Healy 1962. 107 Cf. deJit les conclusions dc Babelon 1910, 1395 sq.
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Planche Xl
ey 3
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• 15
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Planche XII
3
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6
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9
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13
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Legende des planches XI-XII
I
XI.1, Memphis, Price 1991 pI. 149. 3960a, ae, 0,94 g. XI.2, Memphis, Price 1991 pI. 149. 3960a x 2, ae. XI.3, Memphis, Price 1991 pI. 149. 3960b, ae, 1,22 g. XI.4, Memphis (?), Babelon pI. 88. 26, ae, 1,12 g. XI.5, (7), Troxell 1977 pI. 4. 10, ae. XI.6, Teuthrania, Babelon pl. 88. 4, ar, 1,60 g. XI.7, Teuthrania, Babelon pI. 88. 5, ae, 1,05 g. XI.8, 'Ieuthrania, Babelon pl. 88. 6, ae, 1,02 g. XI.9, Kebren, SNG Tiibingen 2628, ae, 0,66 g. XI.10, Kios, WB.R. pI. 49. 34, ae. XI.11, Kios, WB.R. pl. 49. 31, ae. X 1.1 2, Kios, WB.R. pI. 49. 28, ae. X1.13, Kios, WB.R. pI. 49. 38, ae. Xf.14, Rhodes, Pollard 1968, 101,ar, 15,11 g. XI.15, Mytilene, Bodenstedt My 104, el, 2,73 g. XI.16, Mytilene, Bodenstedt My 103, el, 2,55 g.
XI.18, Mytilene, Bodenstedt My 102, el, 2,35 g. XII. I , Phocee, Bodenstedt Ph. 84, el, 2,55 g. XII.2, Macedoine (7), Price 1991 142a, ar. 14,45 g. XII.3, Cyzique, Babelon pI. 173. 27, el, 16 g. XIIA, Cyzique, Gulbenkian 644, el, 15,86 g. XII.5, Sardes, Thompson 198344, au, 8,59 g. XII.6, Sardes, Thompson 198345, au, 8,55 g. XlI.7, Sardes, Thompson 198346, ar, 17,23 g. XII.8, Hierapolis de Syrie, Seyrig 1971 pl. 2. 9, ar, 8,02 g. XII.9, Babylone (7), Price 1991 pl. 159. I, ar. XII.I0, Babylone (7), Kraay-Davies 1973 pI. 12, ar. XII.11, Babylone (7), Price 1991 pI. 159. H, ar. XII.12, Amastris, SNG Black Sea 1299, ar, 9,62 g. XlI.13, Amastris, SNG Black Sea 1303, ar, 9,17 g.
CONCLUSION GENERALE
Au moment de conclure, il convient comme il se doit desquisser un bilan. En premier lieu, on peut se demander quelle est la place de l'Asie Mineure dans les affaires du temps. Nous sommes convaincu qu'elle doit etre lue a travers divers "filtres" ou parametres: - En ce qui concerne l'Empire perse il ne faut pas se laisser abuser par nos sources grecques : l'Asie Mineure n'est pas, n'ajamais ete Ie centre d'interet primordial du Roi perse. Le controle de l'Egypte - et les tentatives pour la recuperer - ont occupe les meilleurs generaux (ou ceux qui etaient reputes tels : Tiribaze, Pharnabaze, Datames), mobilise les energies de regions riches et peuplees (Cilicie, Phenicie), entraine des depenses considerables. Dans cette meme Iogique, le roi ne pouvait accepter d'etre longtemps prive du controle de Chypre. Cela ne signifie pas qu'il faille tomber dans Ie travers inverse: chaque fois qu'une parceIIe de territoire (en particulier cotier) lui echappe, Ie Roi cherche a se la reapproprier par la guerre ou la diplomatie. Les moyens mis en oeuvre sont parfois tres importants : ainsi, l'envoi de Cyrus et les ressources dont il dispose et plus generalernent la nomination aSardes d'officiers de haut rang demontrent que Ie controle de la region n'est pas indifferent; de surcroit la recuperation du terrain perdu est en general assez facile, en tout cas rapide, que la rebellion soit locale ou perse (revolte des satrapes, Artabaze etc.) ou que l'agresseur vienne de l'exterieur (generaux lacedemoniens, Parrnenion). On pourrait objecter que des regions, ou parties de regions, ont echappe durablement a l'administration perse, mais il faut observer qu'il s'agit de contrees difficiles a maintenir dans l'obeissance et econorniquement peu productives. De plus nous avons note plus haut qu'eIIes etaient loin d'etre homogenes et qu'elles n'etaient pas integralernent refractaires, loin s'en faut, au pouvoir central. II n'y avait done aucune raison de deployer systematiquement de gros moyens pour les soumettre (ce qui n'ernpecha pas la mise sur pied d'operations de pacificatrices d'envergure : Autophradates en Pisidie). - Si on se place du point de vue des Grecs europeens, l'AnatoIie - ou plus exactement ses cotes - devient une preoccupation prioritaire en 412. Avec des avatars divers cette situation va durer jusqu'en 387, ensuite il faudra attendre l'expedition de Parrnenion pour que l'Asie Mineure revienne sous Ie "feu des projecteurs", Au dire d'Tsocrate et de ses semblables c'est une chape de plomb qui s'est abattue sur les cites grecques asiatiques qui ne sont plus guere mentionnees que pour se lamenter sur leur sort miserable avec, il faut bien Ie dire, une certaine dose de tartuferie. Les changements que connait Ie monde anatolien entre 412 et 323 se sont produits de facon continue et quasi insensible. En ce qui concerne l'administration, c'est toujours a partir de la satrapie que s'organise l'espace politique. Cependant, globalement, les satrapies sont plus nombreuses et deviennent de veri tables ressorts administratifs alors qu'au depart on
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etait plus proche d'un apanage aristocratique. Autrement dit, la conquete perse a mis bout a bout des territoires qui avaient chacun leur histoire et leur originalite. C'est de cette accumulation de parties que s'est degage progressivement un tout qui echappe aux definitions archaiques du pouvoir (la dcrniere grande liste des tributaires date de peu apres 480) et forme un veritable Etat, a partir duquel se redefinissent des subdivisions. Une fois encore le parallele avec l'evolution de la cite grecque parait s'imposer. La mise en place d'un maillage administratif plus etroit temoigne done de la capacite d'adaptation du systeme aux realia du temps, il n'est en aucune facon la manifestation d'une inexorable decadence. Considerons la Carie. Elle est, selon certains, I'exemple de ces territoires pcripheriques que Ie pouvoir central impuissant se resignc a voir acquerir une independancc de fait. La concession du pouvoir a des potentats locaux creerait une situation nouvelle dans la mesure ou ils ont une politique exterieure qui leur est propre. En allant jusqu'au bout du raisonnernent, sont-t-ils merne des satrapes? Sans reprendre l'argumcnt develop pe plus haut, envisageons les choses globalement : entre 392 et 334 nous sommcs informes sur une seule revolte, aux consequences limitecs, de Mausole. Nous savons d'autre part qu'Idricus a connu des difficultes, non definies, avec Ie pouvoir central. Si l'on compare a la situation des satrapies gouvernees par des Iraniens, il apparait que ces dernieres ont connu des crises bien plus nombreuses et plus graves. Les Hekatomnides ont mene une politiquc etrangerc conforrne a leurs interets particuliers (e.g. Ie decret pour les Knossicns, leur role dans la guerre des allies) mais ils n'ont pour autant jamais ete pris en flagrant-delit de s'etre mis en contravention avec ceux du Roi (merne si les auteurs grecs font part de leur suspicion a cet egard, par exemple a propos des affaires de Chypre). Le mariage avorte entre Alexandre et Ada II ne representait pas necessairernent une demarche secessionnistc. En tout cas, a la fin de la pcriode, la reprise en main (si tant est qu'elle ait etc necessaire) s'opere "en douceur" : Ada II epouse Orontobates qui succede a son beau-pere sans qu'il ait apparemment de solution de continuite dans les modes d'administration (cf. par exemple le monnayage). Localernent, Ie fait le plus significatif est le developpernent d'une koine grecque qui tend a reduire les particularisrnes, sans les supprimcr entierernent, ce qui permet l'entree progressive de communautes autochtones dans le crcuset commun (Sardes, Mylasa, Xanthos et tant d'autres). Ces particularisrncs locaux trouvent aisernent des paralleles dans les situations complexes des cites : Ephcse, Iasos, Halicarnasse ne sauraicnt etre definies autrernent que cornrne des cites grecques et pourtant bien des traits de la vie quotidienne devaient surprcndre ou merne ehoquer ceux qui venaient de I' autre cote de I' Egce. Le caractere tres mixte des populations etait aussi un trait commun a toutes ces entites (Halicarnasse, Kedreai, Sigeion, etc.). On pourrait done soutenir que les contours, mais aussi Ie contenu du monde gree anatolien, de la cite grecque en Anatolie, a change. II serait assez reducteur de parler a ce propos d'acculturation. Alexandre va traiter Sardes et Mylasa de la meme facon qu'il aurait pu Ie faire pour de "vraies" cites grecqucs. Pour quelques temps encore pour certains traits (langue), pour beaucoup plus longtemps pour d'autres (faits religieux), Ies donnees heritees perdurent, enrichissant a leur tour Ia civilisation commune qui est en train de sc creer. Par consequent la demarche vers l'unite, tant culturelle que des modes de gouvernemcnt, n'cst nullerncnt exclusive de diversite et d'cnrichisscment par des elements allogenes.
CONCLUSION GENERALE
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Com me cela a etc souligne dans l'Introduction, la cite avec ses formes multiples et dans la mesure du possible les autres types d'organisation locale rneriteront une enquete specifique, Mais merne si cette derniere na pas ete etudiee pour elle-rneme, il ressort de ce qui precede quelle est un element actif voire moteur des evenernents. De plus l'un des centres d' interet de la peri ode est de constater qu' elle devient une reference, un "standard" pour les entites qui ont pu entrer en contact avec Ie monde grec. L' exernple de la Carie demontre la volonte des Hekatomnides de generaliser Ie fonctionnement des communautcs en poleis, prefigurant en ce domaine encore celui des Etats hellenistiques, De facon presque plus significative, la demarche a pu etre naturelle et reposer sur des liens cconorniques et culturels durables ; cela vaut pour certaines parts de la Pisidie-Pamphylic, de l'Isaurie, de la Lycaonie. Le processus etait alors avarice pour Selge, seulement entame pour les Etenniens, Laranda, Isaura, etc. L'aventure d' Alexandre va avoir comme consequence paradoxalc une interruption mornentanee de I' evolutions de ces regions. Au plan politique on doit se poser la question de leur marge de manreuvre, Le point de depart pourrait-etre Ie jugement severe porte par Pausanias I sur lcs Ioniens dispensateurs de statues. Dans une de ses habituellcs digressions et a propos de la statue de Lysandre a Olyrnpie, il note que les Samiens ont consacre une statue de bronze a Alcibiade dans l'Heraion, puis apres Aigos Potamoi avec les autres Ioniens ils en ont offert une de Lysandre a Olympic. Vers cette me me peri ode lcs Ephcsiens multiplient les dedicaces : Lysandre, Eteonikos, Pharax et dautres Lacedernoniens quasi inconnus. Nouveau rcvirernent, Con on et Timothee sont honores aussi bien dans I' Heraion de Samos que dans I' Arternision d'Ephcse, et il conclut : "C'est toujours la merne chose, les Ioniens comme tout Ie monde, courtisent ce qui dornine par la force 2". A cette enumeration on pourrait ajouter pour Ephcse la statue de Philippe et lc portrait peint d' Alexandre. Le paralicIe Samos-Ephese montre que des deux cotes de ce que nous avons defini comme I' axe paralien, les reactions sont de me me nature. Pour la plupart des cites I' eleutheria est devenu un vain mot, ou plus exactement une aspiration a laquelle scules les circonstances peuvent de temps en temps donner quelque credit. Les cites les plus importantes continuent a exploiter toutes les occasions de se demarquer de la tutcllc du pouvoir. On pensera a Hcrrnias d' Atarnec et a I'espoir quil suscite dans nombre dc cites, ou encore a Ephese en situation de conflit avec divers satrapes, Mais ces deux cas montrent bien les limites vites atteintcs : a Ephcse Ie libre fonctionncment de la democratic a I' epoque d' Alexandre y compris dans ses cxces est rapidement cncadre par les represcntants du mi. La fin tragique d'Hermias marque Ie debut de l'inexorable decadence d'une region auparavant prospere et bien peuplee, Cela n' ernpeche nullement Ies cites de retomber dans leurs travers anccstraux, eomme par exemple les conflits locaux reposant en partieulier sur des contestations de limites territoriales, quittes, tels les plaideurs de la fable, a sc mettre plus encore dans la main du pouvoir central dont on sollicite l'arbitrage. Ces conflits, parfois violcnts, se poursuivcnt bien au dela de la conquete macedoniennc, On pensera en particulicr a cette zone particulierement agitec de l'Ionie ou s'affrontent Ephesc, Priene, Samos, Magnesie, I Paus.6.3.14-16. 2 1(11lTa flEV Ecmv i'xov1a OU10l10V on Kingship in Ancient Iran". Acta Iranica. 25, 75-82. - - - - (1983) : The History of Ancient fran, Munich. Funke, P. (1980a) : "Stasis und politiseher Umsturz in Rhodos III Beginn des IV. Jahr. v. Chr.... in: Eck et al. 1980. 59-70. ( I980b) Ilomonoia and arcbr. Athen und die griechische Staatenwelt vom Ende des Peloponnesischen Krieges his rum Konigsjrieden (404/3-387/6 v. Chr), Wieshaden. Gall. H. von (1966) Die paphlaeonischen t-elsvrciber: Eine Studie tur kleinusiatischen 1st. Mitt. Beih. I. - - - (1974) "Die Kopfbedeckung des persischen Ornats bei den Acbarncniden". AMI, 7. 145-162. (1989) "Zum Bildgchalt der graccopersischcn Grabstclcn", Anado!u, 22.1981/1983 [Melanges Akurgall. 143-166. Gallet de Santerre. H. 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