LUCIEN-JEAN REMO
BORD
MUGNAIONI
L'ÉCRITURE CUNÉIFORME
OUVRAGES DE LUCIEN-JEAN BORD (ÉD. GEUTHNER)
Petite grammaire ...
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LUCIEN-JEAN REMO
BORD
MUGNAIONI
L'ÉCRITURE CUNÉIFORME
OUVRAGES DE LUCIEN-JEAN BORD (ÉD. GEUTHNER)
Petite grammaire du sumérien à l'usage des débutants Petit lexique du sumérien à l'usage des débutants Exercices corrigés de la petite grammaire du sumérien à l'usage des débutants
SYLLABAIRE OUVRAGES DE LUCIEN-JEAN BORD ET REMO MUGNAIONI
SUMÉRIEN
(ÉD. GEUTHNER)
Les statues épigraphes de Gudea du Musée du Louvre
BABYLONIEN
En préparation
ASSYRIEN
Les cylindres de Gudea du Musée du Louvre
LIBRAIRIE ORIENTALISTE PAUL GEUTHNER S.A.
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Nous tenons à exprimer toute notre gratitude à ceux qui ont bien voulu nous aider dans la réalisation de ce travail, et particulièrement: Jeanie BRAVELET Laurent COLONNA D'ISTRIA Lucelle DELFINO Bernard DROUOT Annick GERMAIN David LAVERGNE Jean-François Luc Agnès LUCIANI Jean-Marie LUCIANI Séverine PERILLAT qui ont mené à bien le long travail de dépouillement et de collation des valeurs pour chaque signe.
© 2002, S.N. L1BRAIRII:! ORIENTALISTE PAUL GEUTIINER S.A. 12 RUE VAVIN, 75006 PARIS ISBN 2-7053-3682-6 COUVERTURE
Signcs néo-suméricns Lcs caractèrcs cunéiformes dc cc volume ont été réalisés au moyen du procédé informatique DubSar® développé par L.-J. Bord
à la mémoire de
Paul E.
BOITA
Edward HINCKS Austen H. LAYARD Henry C. RAWLINSON et à tous ceux qui ont permis la découverte et le déchiffrement des langues cunéiformes
INTRODUCTION
Pour les sumériens, si l'invention de l'écriture était d'origine divine - Enki ayant confié la fonction scribale à la déesse Nisaba - une légende n'en altribuait pas moins la création de celte même écriture au roi-prêtre de la cité d'Uruk, Enmerkar'. Ce long poème raconte comment le souverain d'Uruk ouvrit ln route caravanière du lapis-lazuli en contraignant par sa sagesse et sa ruse le seigneur d'Anltta, cité prospère de l'actuel Iran, à lui livrer les précieux matériaux nécessaires à l'achèvement du temple d'Inanna. Parmi les péripéties du récit, on nous raconte comment Enmerkar fut le premier à écrire sur une tablette d'argile: « Le seigneur de Kullab lissa l'argile avec les mains, formallt Illle table//e, et il déposa les mots. Jusque là, persollne n'avait déposé des mots sur l'argile »2, et un peu plus loin le même récit nous renseigne sur la nature de cet écrit: « ... le seiglleur d'Aralia regarda l'argile, mais les mots étaiellt des clOIlS: SOlI frOllt s'assombrit» J. Quoi qu'il en soit de cette légende, c'est en Basse-Mésopotamie, l'ancien pays de Sumer, qu'ont été retrouvées sur quinze sites différents, à partir du début du XX C siècle, près de 5500 tablettes ainsi qu'un petit lot de bulles, couvrant une période qui s'étend de l'Uruk récent (3300-3100 av. E.e.) à l'époque des dynasties archaïques (2800-2400 av. E.e.), permettant de poser la question de la naissance de l'écriture en Mésopotamie4 •
,1
1 Sur cc long poèmc épiquc, cf. J.S. COOPER ct W. HEIMPEL, "Thc Sumcrian Sargon Lcgcnd", lAOS 103, p. 67-82; - T. JACOBSEN, Tire Harps tlrat Ollce... SlilIIeriall PoetlY ill Trallslatioll, Ncw Havcn, 1987, p. 275-319 ; - id., "Thc Spcll of Nudimud", dans Slra 'arei Talmoll. Stlldies ill Bible, Qlllllrflll, alld tire Allciem lIear East Prescnted ta SlrelllO/yalr1l Talllloll, Winona Lakc, 1992; - id, "Enmcrkar and Ihc Lord of Arallu", dans The COlltext of Scriplllre, l, Callollical Compositiolls from tire Biblical World, W.W. HALLO ct K.L. YOUNOER, éds., Lcidcn, t997, p. 547-550. 2 Enmerkar et le seigllellr d'Arappa, 1. 503-504. J Elllllcrkar et le seigllellr d'Arappa, 1. 536. 4 Ccllc documcnta/ion provicnt principalcmcnt d'unc quinzainc dc sitcs qui apparticnncnt pour la plupart à la culture d'Uruk. Pour ces documents on consultcra : A. FALKENSTElN, Arellaiselre Texte al/x Uruk, 13erlin, 1936; - M.W. GREEN ct lU. NISSEN, Arelraiselre Texte mis Urllk, Il, Zeicilelliisle des arellaisellell Textell al/s UllIk, (ADFU, Il), 13erlin, 1987; - lU. NISSEN, P. DAMEROW e/ R.K. ENGLUND, Fri/lle Sellrift IIl/d Teellllikell der Wil1sehaftsvenvaltllllg 1/111 Qlten Vorderell Oriellt, Bad, 1991. cc dcrnicr ouvrage a élé traduit en anglais: H.J. NISSEN, P. DAMEROW ct R.K. ENGLUND, Arellaie Bootkepillg: Eady Writillg alld Teelllliql/es of Economie Admillistratioll illtllc Ancielltllear East, trad. P. LARSEN, Chicago, 1993.
10
INTRODUCTION
L'ÉCRITURE CUNÉIFORME
Le premier problème posé par cette documentation est celui de sa datation. En effet, s'il est possible de proposer une chronologie relative des différents groupes de textes qui composent le corpus, en revanche, toute datation absolue est rendue difficile du fait de quelques imprécisions méthodologiques liées au déroulement des fouilles du quartier de l'Eanna sur le site même d'Uruk. Découverts au milieu de décombres antiques situés sous les constructions du niveau IIlc, dans la zone sud de l'Eanna, les documents les plus anciens ont, en effet, servi à définir la strate archéologique à partir de laquelle, sur la base d'un raisonnement quelque peu tautologique, ils furent eux-mêmes datés. Ainsi, considérant leur appartenance à la phase ultime du niveau IV, il fut alors généralement admis, que ces tablettes auraient été rédigées aux environs de 3300 av. E.C. Ces imprécisions peuvent être en partie corrigées, grâce aux documents mis au jour lors des fouilles entreprises sur l'acropole du site de l'ancienne Suse, où la stratigraphie permet, il est vrai, de proposer une meilleure chronologie des évènements. Toutefois, il n'en demeure pas moins problématique d'établir une correspondance entre les différents niveaux concernés au sein de chacune des deux cités 5 . De fait, il reste difficile, à ce jour, de préciser le moment où furent rédigés les plus anciens documents écrits en Mésopotamie. Tout au plus, est-il possible d'avancer qu'ils firent leur apparition dans une fourchelle chronologique oscillant entre l'Uruk V et l'Uruk IVa ou b, c'est-à-dire entre 3500 et 3300 avant J.-C. Compte tenu de sa quasi primauté au sein de l'espace proche oriental, toute tentative d'appréhension des mécanismes qui contribuèrent à la genèse et à l'évolution de celle documentation, n'est envisageable que sur la base d'une compréhension de son contenu. Considérant ainsi les similitudes structurelles qui rapprochent le texte de certaines tabielles archaïques de celui de tablelles de l'époque de Fan{', il apparaît qu'une quantité importante de documents archaïques présentent des parallèlcs avec des tcxtes administratifs plus récents et, dans unc moindrc proportion, avec les grandes listes lexicalcs largement allestécs par ailleurs?, Organisés sur le même principe ce dernicr type de texte permet, en outre, dc collationner, ligne à ligne, les deux reccnsions ct d'identifier ainsi les prototypes anciens de signes utilisés à une époque plus tardive. Il cst important de relcver que, dès l'époque d'Uruk, les scribcs avaient entrepris un vaste travail de classification des mots et des signes, dans un but pédagogique; ces 5 Cc problème a donné lieu à une Iillérature relativement abondante. Pour avoir une vue d'ensemble sur le sujet, il esttoujolll's utile de sc reporler à: P. AMIET, SI/se, 6000 aIlS d'histoire, (Monographies des Musées de France), Paris, 1988; - A. CAUBET, P.O. HARPER, 1. ARUZ ct F. TALLON, UI cité royale de SI/se. Trésors dl/ Proche-Oriellt allciell {/fI usée dl/ LOl/vre, Paris, 1994, part. p. 47-80. 6 Cr. A. DEIMEL, Die /Ilse/llijtell VOII Fa/(/, l, Liste der archaise/,ell Keilschrijtzeichell, (Ausgrabungen der Deulsehen Orient-Gesselschart in Fara und Abu Batab, 1-3), Osnabrllek, 1968-1970. 7 Cr. I-I.J. NISSEN, "Bemerkungcn zur Listenlilcralur Vorderasien im 3. lahrlausend", dans La lillgl/a di Ebla, L. CAGNI éd., Napoli, 1981, p. 99- 108.
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listes se multiplieront, restant la base de l'enseignement aussi longtemps que dureront les écritures cunéiformes. Pour la plupart, les textes administratifs rendent compte des livraisons ou de la distribution de divers produits, souvent à caractère agricole, ou de la gestion des personnels. Au regard du reste de la documentation, l'importance quantitative de ce type de textes et la spécificité de son utilisation sont révélatrices du profond enracinement de l'écriture, à ses débuts, dans les divers impératifs 8 comptables inhérents à d'importantes structures gestionnaires • Les tablettes d'Uruk font ainsi état de la gestion d'un magasin central dirigé par un personnage dont, par convention, nous lisons le nom KU.SIM, et qui, en sa qualité de responsable, signe des bordereaux énumérant la distribution quotidienne d'énormes quantités d'orge, livrées à de hauts fonctionnaires et destinées probablement à être elles-mêmes redistribuées à des subordonnés.
tabletle archaïque découverle à Uruk (d'après H.J, NISSEN et al., Arcllaic Bookkepillg, p. 38) De leur côté, les listes lexicales constituent un petit lot d'environ 650 tablettes constituant les duplicata de quatorze listes différentes où il est possible de reconnaître les archétypes de listes plus récentes découvertes à Tell Fara, Concrètement, ces textes se présentent comme des énumérations de mots ou de notions liées entre elles par un lien sémantique plus ou moins évident, déclinant divers types d'ustensiles de bois ou de métal, de récipients, de textile, ou encore de noms de profession, d'animaux, ou de villes. Le caractère immuable de ces documents, inlassablement recopiés à travers les siècles, laisse penser qu'ils jouèrent dès le début un rôle déterminant dans l'apprentissage de l'écriture voire dans l'élaboration même du système.
Cr. P. AMIET, "Comptabilité ct écritures archaïques à Suse ct en Mésopotamie", dans Ecritl/res: systèmes idéographiql/es et pratiques expressives: actes dl/ Colloql/e illtematiollal de l'Ulliversité Paris Vl/, 22, 23 et 24 avril 1980, A.M. CnRlsTIN éd., Paris, 1983, p. 39-45. La thèse d'une origine purement comptable de "écriture a fait depuis l'objet d'une remise en cause (cr. l.I. GLASSNER, Ecrire à SI/mer. L'illvelltioll dl/ cl/lléiforme, Paris, 2000), mais le débat reste ouvert. 8
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L'ÉCRITURE CUNÉIFORME
INTRODUCTION
Pour qui considère l'écriture et ses implications traditionnelles au niveau des divers produits de la pensée, il reste surprenant de constater, qu'au sein de cette documentation, n'apparaissent aucun texte à caractère littéraire, historique ou religieux. Pourtant, à bien y regarder, cette situation n'a rien d'étonnant si l'on prend conscience qu'à ce stade « l'écriture» reste avant tout un outil à la disposition d'une instance gestionnaire n'ayant aucune raison de venir se substituer à l'oralité dans des domaines où celle-ci à fait depuis longtemps ses preuves.
Depuis la fin de la culture de Halaf (c. 5100 av. E.C.) l'habitude avait été prise de garantir les opérations économiques ou comptables en plaçant des scellés sur les vases, les ballots ou même les pièces d'une maison contenant des marchandises, au moyen de petits cachets affectant la forme d'un bouton dont une face était pourvue d'un motif gravé en négatif, Pour des raisons qui tiennent probablement au caractère restreint de leur surface ornementale, ses objets vont, à partir de la période d'Uruk V (fin du IVe millénaire av. E,C.), laisser la place à lO de petits cylindres comportant un décor incisé sur la surface de révolution • La supériorité de cette innovation tient surtout à la possibilité de développer un contenu symbolique sur une surface plus importante. On peut ainsi délivrer un message plus détaillé impliquant, pal' le biais d'un champ décoratif élaboré, une information fournissant les conditions nécessaires à l'identification de responsabilités individuelles, dont manifestement le besoin se faisait sentir, tout en exprimant plus largement l'idéologie du moment.
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Sur la base des éléments de datation précisés plus haut et du fort enracinement de la documentation au niveau d'une problématique comptable inhérente à d'importantes structures gestionnaires, il est alors tentant d'essayer de dégager les éléments qui dans le contexte historique ont pu déterminer cette situation. Pour cela, et compte tenu de la datation retenue, il convient de comprendre ce qui est caractéristique de la culture d'Uruk et la différencie de celle d'Obeïd qui l'a précédée. La transition de la culture d'Obeïd à celle d'Uruk est marquée par le passage de la civilisation villageoise à celle de la citë. Les raisons de cette transformation restent difficiles à préciser. Toutefois, on peut penser qu'un certain nombre de facteurs, ayant pour conséquence un essor de l'agriculture rendu possible par une pratique plus large de l'irrigation, ainsi qu'un accroissement des échanges commerciaux favorisé par de nouveaux modes de transport, furent certainement à l'origine de ces mutations. Il en résulta une différentiation croissante entre les agglomérations, faisant de certaines d'entre-elles le centre et le sommet d'une structure dont dépendaient de nombreux villages. Trahissant une nouvelle organisation de la société, maintenant fondée sur un pouvoir coercitif exercé à travers une lourde administration, par une élite dont les prérogatives allaient en s'élargissant; la simple juxtaposition des habitations fit alors place à une véritable organisation interne, caractérisée par la naissance d'une architecture monumentale à vocation autre que domestique, ainsi que par une disparité plus grande de l'habitat où certaines maisons se distinguèrent par leur taille ou leur caractère somptuaire. Pal' ailleurs, avec l'augmentation des échanges, l'économie se faisant plus dynamique et acquérant une autre dimension entraîna inévitablement une complexité accrue des tâches de gestion, indispensables à la bonne marche des affaires. Dès lors, les moyens traditionnels permettant l'enregistrement des diverses opérations comptables se révélèrent tout à fait inadaptés pour répondre aux exigences de la nouvelles économie et deux innovations firent alors leur apparition : le sceau-cylindre et la bulle d'argile. Le premier permettant d'identifier l'auteur de l'opération, la seconde témoignant du nombre de biens qui y sont engagés. L'association des deux garantissant en outre l'intégrité de la transaction.
') Cf. H. WEISS, éd., The origills of Cities ill D,)'·Farmillg Syria al/(Imesop0lamia ill the Third Millellil/m B.C, Guilford, 1986; -M. VAN DE MIEROOP, The Allcielll Mesopotamiall City, Oxford, 1997; - J.N. POSTGATE, Early Mesopotamia. Society alld Ecollom)' at tlle DawlI of f1istOlY, London, 1992.
Bulle enveloppe et ses ca/CI/li (Paris, Musée du Louvre, Sb 1940) Comme pour les sceaux-cylindres, les bulles font leur apparition dans le II courant de la seconde moitié du IVe millénaire av. RC. Il s'agit de petites sphères d'argile, vraisemblablement destinées à contenir de menus objets de formes variées: bâtonnets, billes, disques, petits cônes ou grands cônes perforés dont les formes ne sont pas sans évoquer certains signes d'écriture utilisés plus tard pour transcrire des valeurs numérales, d'où leur nom de calculi par analogie avec les cailloux qui servaient à l'apprentissage du calcul. La surface des bulles était marquée par des déroulements de sceaux-cylindres et des enco~he.s, obtenucs par application d'un calame ou par impression d'un calcl/lus, et Il1chquant à l'extérieur le contenu de l'enveloppe, S'il n'existe pas toujours de correspondance stricte entre la forme imprimée et celle des calculi contenus dans la bulle, il y a néanmoins, dans tous les cas, une correspondance de nombre.
10 cr. MeG. GIBSON ct R.D. BIGGS éds., Seals alld SeaJillg ill the Allciellt Near East, (hibliotheea Mesopotamiea, 9), Malibu, 1977; - P. AMIET, La Glyptiql/e mésopolllmielllle archaïql/e, Paris, 1980. Il Cr. A. LE BRUN ct F. vALLAT, "l'origine de l'écriture à Suse", Colliers de la DAFl8, 1978, p. Il.59; - P. AMIET, L'lige des éc/umges illler·imlliells.' 3500 - 1700 al'. J.C, Paris, 1986; - D. SCHMANDT-BESSERAT, BefO/'e \l'ritillg, l, from cOl/lltillg to cl/lleiform; II, A Calalogl/e of lIear Eastem Tokells, Austin, 1992
15
L'ÉCRITURE CUNÉIFORME
INTRODUCTION
L'association de ces deux types d'objets, répond certainement à des besoins gestionnaires. Les sceaux identifiaient l'individu à l'origine de l'enregistrement, les marques indiquaient les quantités de biens engagés dans l'opération. Il y a tout lieu de penser qu'une fois l'enveloppe d'argile brisée, il suffisait alors, pour vérifier l'intégrité de la transaction, de confronter les quantités et la nature des biens avec les calculi enfermés dans la bulle et les marques imprimées sur sa surface. Toutefois, le caractère redondant de ce double enregistrement, fut probablement à l'origine de la disparition des calculi. Dès lors, le vide central de la sphère ayant perdu sa raison d'être, les bulles s'aplatirent pour former de petits coussinets arrondis: c'est là l'origine des premières tablettes.
interlocuteurs de comprendre le sens du code, c'est-à-dire d'en connaître préalablement les éléments.
14
Dès leur apparition, deux types de tablettes se distinguèrent au sein de la documentation: celles qui ne comportaient qu'une impression de sceau associée à des marques numérales, qui exprimaient probablement des ordres de grandeur, et celles qui présentaient des signes plus ou moins figuratifs placés en regard de ces mêmes indications chiffrées. Les premières se référaient certainement à une seule opération dans laquelle n'aurait été engagé qu'un seul type de bien, tandis que les secondes conserveraient la mémoire d'une ou plusieurs opérations mettant en jeu des marchandises de nature différentes. Les signes utilisés dans ces dernières tablettes étaient constitués soit par des pictogrammes - représentation schématique de la chose ou d'une partie caractéristique de celle-ci, tel un épis pour exprimer l'idée d'une céréale, ou un bucrane pour désigner un bovinsoit par des logogrammes évoquant indirectement la chose, telle la croix inscrite dans un cercle pour le mouton. A ce stade, il est tentant de considérer qu'en renvoyant à une réalité, ellemême en relation avec un mot de la langue, chaque signe graphique était alors naturellement perçu comme l'expression visible de la globalité d'un signifiant linguistique, Cependant l'absence d'analyse de ce signifiant en unités phonologiques minimales, indispensables à l'écriture des différentes marques morphologiques qui constituent les fondements d'un énoncé, empêche de voir dans ce système autre chose qu'une simple écriture de mots, capable, tout au plus, de rendre des segments d'un discours en relation avec une quelconque activité gestionnaire. Si l'on peut certes envisager que, pour rendre les noms de quelques individus ou de cités, impliqués dans ces activités, les signes ont également pu servir à transcrire tout son comparable au signifiant du mot représenté, il n'en demeure pas moins vrai, que cette potentialité du système resta longtemps cantonnée à la seule pratique onomastique. Il ne faut pas perdre de vue en effet qu'à ce stade, la transcription fidèle de la langue n'était pas dans la perspective de « l'écriture ». Seuls n'ont de raisons d'être pris en compte que les éléments fondamentaux engagés dans les opérations économiques teUes que les choses, les personnes, les modalités (m~.Hnent, durée, lieu, quantité), ou encore des aetions comme la distribution de biens. Ce sont d'ailleurs de telles considérations qui furent à l'origine de l'élaboration les listes lexicales, véritables outils au service du système. Et n'oublions pas, par ailleurs, la nécessité pour les deux
S'il est un point particulièrement frustrant pour l'étude de l'écriture cunéiforme, c'est l'absence de documents nous permettant d'aceéder aux modalités de création. Tout au plus pouvons-nous disposer des documents laissés par les scribes mésopotamiens des II" et le' millénaires av. RC. ont collationné ee qui, pour eux, constituait quelques unes des règles mIses en œuvre pour la formation des signes et les ont exprimées avee leurs mots:
ys
(hachuré) c'est-à-dire une surcharge du signe par ajouts de traits verticaux ou obliques ou par impressions de brefs traits à l'intérieur du signe.
gUlla
a
tell (incliné) modification obtenue en faisant pivoter le signe, principalement vers la droite et, parfois vers la gauche. Cette modification peut affecter le signe tout entier ou seulement l'un de ses éléments.
nulita (non achevé) soit un signe dont la forme extérieure est semblable au « modèle» mais dont un ou plusieurs éléments ont été omis. lIIinabi (double) le redoublement d'un signe.
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