GE O R G E S B A T A I L L E
uvres completes Premiers Ecrits, I9 2 2- I 9 40 H I ST O I R E D E
L CE I L
L A N U S SO...
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GE O R G E S B A T A I L L E
uvres completes Premiers Ecrits, I9 2 2- I 9 40 H I ST O I R E D E
L CE I L
L A N U S SO L A I R E - SA C R I F I C E S ARTI CLES
Presentation
de Michel Foncacclt
GAL L I M A RD
Il a ete tire de ce premier tome des CEuvres Completes de Georges Batatlle, trois cent die estemplaires sur Alf a numerotes de 1 d 310, constituant l'edition originale. Il a ltd tt'rd en outre ct'nq cents exemplaires reserves o la I i brairi e du Paltmugre.
I'resentation
I '~' i = )
Me ~ o~971
On le sait aujourd'hui : Bataille est un des ecrivains les plus importants de son siecle. L' Histoire de I'ceil, Madame Edwarda ont rompu le ftl des r(tcits pour raconter ce qui ne l'avait j amais (tt(t; la Somme a theologique a fa it entrer la pensee dans lej eu — dans le jeu rt'sque — de la limite, de l'extreme, du sommet, du transgressif; L' K rotisme nous a rendu Sade plus proche et plus do cile. T ous devons a Bataille une grande part du moment ot't nous sommes; mais ce qui reste a faire, a penser et a dire, cela sans doute lui est d 6 encore, et le sera longtemps. Son (euvre grandira. D u moins, faut-i l qu'elle soit la, rassemblee, elle que l'occasion, le risque, l'alea, la necessite, la pure d(tpense aussi ont dis persee et rendue aujourd'hui si dtJItct'le d'acces. Votci done les CEuvres completes- de Bataille. Cette (tdhtton regrouPe, avec les livres et les articles Nj a publies, l'ensemble des papiers qui ont (tte', chez lui, retrouvds apres sa mort. Certains forment des testes complets, parvenus ou presque a l'/tat d'ach(tvement, mais, pour diverses raisons demeurds in(tdt'ts. D 'autres sont les versions non retenues, ou
remises en chantier, des (euvres publi(Les: si elles en dif erent de fanon notable, on les pr(tsente intdgralement; sinon, les
variantes sont reports en notes a la pn de chaque volume. Il existai t ausst une quantit(t const'dtrable de testtes et de frag 7oas droits de tradaetioa, de reproduction et d adaptatioa rherots pour tous tes pays, y eosripris PU .R.S.S. O jl '.-g. Pauoert, pour "H istoire de L'ail".
O 6( it ians Galliraard, ega, pour le reste da oolame.
mentsjetds sur des feuilles volantes ou parfois sur des carnets:
on les a reproduits tels quels, selon leur date presume. Enftn, sur les exemplaires imprirne's de ses otuvres, Bataille a porte
6 %uv res compel)tes de G. Bataille des additions et des corrections — ecrites dans les marges ou inserees sur des feuillets intercalaires : toutes ces modifications jigurent en notes. Au total, les inedits forment un t iers a peu pres de la presente edition. A plusieurs reprises, Bataille avait s onge a r assembler ses oeuvres. I l avai t esquisse dig)rents plans possibles, qu'on t rouvera ici dans le dernier volume. Aucun n'a pu etre utilise :
car il n'en parapet point qui ft lt general et definitif. La plu part cependant proposent le partage entre deux grands ensembles de textes — ceux qui relevent de la Somme atheologique et ceux qui s'apparentent a la Part maudite. C' est ce principe qui a ete retenu. Les dix volumes des CEuvres de Bataille vont se rdpartir. en quatre sections : I. L e s premiers textes (zgaz-rg4o ): t omes I e t I I .
z. Romans et pommes (zg4o-rg b ) : tomes III et IV . ?extes aphoristiques (I94o-r g b ) , regroupes autour de la S omme atheologique: tome V. ?extes discursifs (1940-I96r ) , qui traitent de ti mes d conomiques ou esthetiques, mai s s'ordonnent tous a l a notion de depense: ?'omes VI a X. Dans chacune de ces quatre sections, on presente d'.abord les livres, puis les articles, enfin les textes posthumes; li vres et articles sont disposes dans leur ordre chronologique. L'Nuvre de Bataille etait dissdminee dans des publications f ort diverses. Ce n'est qu'apres la guerre, en I946 qu' il a donne l'essentiel de ses articles a cette revue Critique qu' il avait fondle et h laquelle jusqu'au bout il a donne tant d e soin. L a tache des editeurs etai t done considerable. Elle n'aurait p as,e'td possible sans l'attention, sans l' ai de de M Di a ne Bataille ni sans les conseils de M. Jean Bruno. Le travail de collation des textes, de lecture et de mise au net des manuscrits, d'dtablissement de l'apparat cri tique a ete assure, depuis sg67, par M . Denis H o llier pour l e s tornes I et I I , par M . ?badge A"lossomski pour les tomes II I et I V, par M Le duc pour le tome V, par M M . Henri Ronse et g. -M. Re@ pour les c inq derniers volumes. Mi chel Foucault.
N OT E D E L ED I T EV R
Les deux premiers volumes des CEuvres completes de Georges Bataille rassernblent sous le titre de Premiers merits la produc tion de cet auteur au cours d'une p6riode qu i commence en rgaa et s'acheve en rg4o. Le premier d 'entre eux contient ce qui a paru, duran t cette periode, en volume, plaquette ou revue, ou sous forme de tract ; 1'autre rassemble la masse des in6dits contemporains que 1'auteur avai t conserves et quelques autres qu' il a ete possible de retrouver. Dans le premier vnlume, les textes sont rdpartis en livres d'abord puis articles, 1'ordre chronologique de publication extant suivi dans chacun de ces groupes. Dans l e second, l e classement es t th dmatiqu e (trop d e manuscrits n'offrent aucun critere de datation suffisamment net) , l a succession des thhmes choisis correspondant d' ailleurs a une -chrono logi c assez souple. Les indications concernan t 1'origin e de s textes seront autornatiquernent donn6es, a vec les notes, e n 6 n d e volume, sans qu'un renvoi les annonce. Pour les manuscrits, la cote indiqude correspond a I'inventaire des papiers de Georges Bataille dresse par Thadde K lossowski. Nous ne publions pas la traduction que G. Bataille avait f aite, avec T. Beresovski-Chestov, du livre de Leon Ghestov : L'idee de bien chez Tolstoy' et nietzsche (public aux E ditions du S iecle, xgvg, avec une introduction de Jules de Gaultier ; ao edition chez V ri n en r94g).
Hi stoire de l 'ail par Lord Auch
Premih'e par6e
R RCI T
J'ai 6t 6 Riever trhs seul et aussi loi n que j e me rappelle, j' etais angoiss6 par tou t ce qu i es t sexuel. J'avais pres de seize ans quand j e r encontrai une j eune fille de mon age, Simone, sur l a plage de X . Nos families se trouvant une parents lointaine, nos premieres relations en furent pr6ci pitdes. Trois j ours apres avoir fai t connaissance, Sirnone et moi nous trouvions seuls dans sa villa. Elle dtait vi rtue d'un t ablier noi r avec u n co l bl an c empese. J e cornmengais a me rendre compte qu'elle partageait 1'anxidt 6 que j 'avais en la voyant, anxidtd d'autant plus forte ce jour-lh que j'esp6 rais que, sous ce tablier , elle dtai t entierement nue. Elle avait des bas de soie noire qui montaient jusqu'au dessus du genou, mais j e n'avais pas encore pu la voir jus
qu'au cul (ce nom que j'ai toujours employ avec Simone est de beaucoup pour moi le plus joli des norns du sexe); j'avais seulement 1'impression qu'en ecar t ~ dghrcment le tablier par-derriere, j e verrais ses partie( impudiqueh sans aucun voile. Or il y a vait dans le coin d 'un couloir u ne assiette conte nant du lait destinh au ch at : — L es assiettes, c' est fait pour s'asseoir, n'est-ce pas, me dit Simone. Paries-tu? Je m'assois dans 1'assiette. — J e pari e que t u n'oses pas, rdpondis-je,
h peu pcs sans souffle. Il f aisait ex tremement chaud . Simone playa 1'assiette sur un peti t banc, s'installa devant moi et , ne quittant .pas mes yeux, s'assit sans que je pusse la voir sous sa jupe tremper ses fesses br@antes dans le lait &ais. Je restai quelque temps devant elle, immobile, le sang I l a tete et trernblant pendant qu'elle regardait m a verge raide tendre ma culotte. Alors
CEavres completes de G. Bataille j e me couchai a ses pieds sans qu'elle bougeht et , pour l a premiere fois, j e vis sa chair s rose et noi r e » qui se rafra$ chissait dans le la it ~ la ne. N ous restames longtemps sans bouger aussi bouleversds 1'un que 1'autre... Soudain elle se releva et j e vis goutter le lai t le long de ses jambes jusqu'aux bas. Elle s'essuya rdgulihrement avec u n mouchoir , restant debout , au-dessus de m a at e , u n pied sur l e peti t banc, et moi j e me frottai vigoureusement la ve rge p ar-dessus le pa ntalon e n m 'agitant a rnoureuse m ent sur l e sol. L'orgasme nous arriva ainsi a, peu pc s au meme instant sans mneme que nous nous fussions touches 1'un 1'autre, mais quand sa mme rentra, 6tant assis sur un fauteuil bas, j e profitai du moment oi l la j eune fille s'6tait blotti e tendrement dans les bras m aternel s : j e soulevai par-derriere le ta blier s ans e tre vu e t j ' enfonqai m a m a in sous son cul entre les deux j ambes brulantes. Je re ntrai e n c ourant c hez m oi, a vide d e m e b ra nler encore et, le lendemain soir, j 'avais les yeux si cernes que S imone apr B m'avoir longuement d6visagd, se cacha l a . t6te contre m on d paule e t m e d it s erieusement: , s Je n e veux plus que tu te b ranles sans moi. » 7
Ainsi cpmmenckrent entre cette j eune fi ll e e t mo i des relations d'amour si 6troites et si obligatoires qu' il nous est impossible pr esque res q p de rester un e semaine sans nous voir . , Et cependant nous n'en avons pour ainsi dire j amais parld. ~Je comprends qu'ell e eprouve e n m e voyant le s m8mes sentiments que moi en l a voyant, mais il m'est diK cile de m'expliquer. Je me r a ppelle q u'un j o ur q ue n ous a llions en voiture a toute vitesse, nous avons 6cras6 une cycliste qui devait 0tre toute jeune et tr6s jolie: son cou avait presque dt's arrachd par les roues. N ous somines rest s longtemps
quelques mhtres plus loi n sans descendre, occupies a l a
regarder morte. L'impression d'horr cur et de d6sespoir I pr ovoqude pa r t ant de chairs s anglantes, 6 ca urantes e n p artie, en p arti e trks belles, est a peu pres dquivalente a
1'impression que nous avons habituellement en nous voyant. Simone es t grande et j olie. Ell e es t habituellement tr bs s imple : ell e n' a rien de ddsesp6rant ni dans le regard ni d ans l a voix voix. Cependan t d ans 1'ordre sensuel, ell e est si . lee pl uus s brusquement avide de tou t ce qu i bouleverse que.
Histoire de l'o,il
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imperceptible appel des sens donne d'un seul coup h son visage un caracthre qui sugghre directement tou t ce qui est
lip h la sexualis profonde, par exemple sarig, 6touffement, terreur subite, cr ime, tou t ce qui d dtrui t i nd6finiment l a b~ g ude iet l~honnetetd humaines. Je lui ai v u la premiere~ fpis cette contraction muette et absolue (que j e partageais) le jpur orr elle s'est assise dans 1'assiette de lait. I l est vrai que
npus ne no s regardons guerre fixemept qu'>. des moments Wo@l' ~~r: 7 » "~
a nalpgue . M ais nous ne sommes mpai'ses. et nous ne jouons ~ z3 V ' - , . que darls les courtes minutes de detente qui suivent 1 'orgasme. ~ f " Je dois dir e toutefois que nous restarnes tres longtemps sa,ns nous accoupler . N ous profitions seulement d e toutes les circonstances pour nous livr er , k des actes inhabituels. Nous n e manquions nullement d e pudeur , a u contraire, mais quelque chose d'imp6rieux nous obligeait a l a braver ensemble aussi i mpudiquement qu e possible. C' est ainsi q u' a peine ell e rn'avai t demands d e n e plus j amais m e branler seul (nous nous actions rencontr6s en haut d'une falaise) qu'elle me ddculotta, me fi t entendre a terre, puis elle s e retroussa complhtement, s'assit su r mon ventr e en m e tournant l e dos et commenga h s'oublier t andis que j e lui enfongais dans le cul un doigt que mon j eune foutre avait deja rendu onctueux . Ensuite ell e se coucha, l a t et e sous m a verge entre mes j ambes et envoyant l e cul en 1'air fi t revenir son corps vers moi qu i l evais la t et e sufiisamment pour 1'avoir I la hauteur de ce cul : ses genoux vinrent ainsi prendre appui sur mes dpaules. — Est-ce que t u ne peux pas faire pipi en 1'air jusqu'au cul ? m e dit-elle. — Ou i,
rhpondis-je, mais comme tu es lh, ga va forcomment retomber sur ta robe et sur t a figure. — Pourquoi pas? conclut-elle; et je fis comme elle avait dit, mais I peine 1'avais-je fait que je 1'inondai h nouveau, cette fois de beau foutre blanc. Cependant 1'odeur de l a mer se mhlai t a celle du Ji nge mouilld, de nos corps nus et de ce foutre. L e soir tornbait et nous restions dans cette extraordinaire position sans inquie tude et sans mouvernent quan d nous entendlmes un pas froisser 1'herbe. — N e bouge pas, j e t'en supplie, me demanda Simone. Le pas s'dtait ar i t h mais il nous 6tait impossible de voir qui s'approchait. Nos respirations restaient coupl es ensemble. Le cul d e S irnone ainsi d ressy en 1 'air m e paraissait i l e st
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CKuvres completes de G. Bataille
vrai une supplication toute-puissante, tant i l 6t ai t parfait, form6 d e deux fesses dtroites e t d blicates, profonddment tranch6es, et j e n e doutais pas u n instan t qu e 1'homme ou la femme inconnue ne succombat bientot et ne fht oblige de se branler sans fin en le regardant. Or, le pas recommenqa, pr6cipit6 cette fois, presque un e course, et j e vi s parattr e tout a. coup un e r avissante j eune fi ll e blonde,t M arcelle, la plus pure et l a plus touchante de nos amies. M ais nous 6tions trop fortement contractus dans nos attitudes horribles -pour' 'bouger -mtme g un .doit't~et p u t- eoudmn notre mei heureuse amie qui. f'effondr a et se blotti t Hans 1'herbe en sanglotant. Alors seulement nous nous arrachames i notre e xtravagante 6treint e pou r nous j eter su r u n corps livr e a 1'abandon. Simone troussa la j upe, arracha l a culotte et me montr a avec ivresse un nouveau cu l aussi beau, aussi pur que le si en : j e 1'embrassai avec rage tout en branlant celui de Simone dont les j ambes se refermhrent sur les reins de 1'strange M arcelle qui ne cachait deja, plus que ses sanglots. — M arcelle, lu i criai -j e, j e t'en supplie, ne pleure plus. Je veu x qu e t u m'embrasses l a bouche... Simone elle-meme caressait ses beaux cheveux pl ats en lui d or mant p artout des baisers aiTectueux. Cependant le ciel 6tai t complhtement tourne a 1'orage et, a vec l a nui t d e grosses gouttes de plui e commengaient a e tomber, provoquant une detente apres 1'accablement d une journde torride et sans air. La mer f aisait d e ja u n b ru it 6norme domin6 par de longs roulements de tonnerre et des dclairs permettaient de voi r brusquement comme en pl ein jour les deux culs branlds des jeunes filles devenues muettes. Une frdn8sie brutale animai t nos trois corps. Deux bouches juveniles se disputaient mon cul , mes couilles et m a verge, mais je ne cessais pas d'dcarter des jambes de femme humides d e salives ou de foutre comme si j' avais voul u 6chapper a 1'dtreinte d'un monstr e et ce monstre n'6tai t pourtant que 1'extraordinair e vi olence d e me s mouvements. L a p l ui e chaude tombai t finalement e n torrents et nous ruisselait par tout le corps expose alors entierement. De grands coups de tonnerre nous dbranlaient e t accroissaient chaque fois notre colere, nous arrachant des eris de rage redoubles I chaque eclai r pa r l a vue de nos par ties sexuelles. Simone avait trouve une flaque de bouc et s'en barbouillait le corps
Histoire de l'oil
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avec fureur : elle se branlait avec la terre et j ouissait violem ment, fouett6e par 1'averse, ma at e serrate entre ses 'jambes souilldes de terre, son visage vautr6 dans la flaque o6 el le a gitai t br utalement l e cu l d e M arcell e enl ac e pa r el l e d'un bras derriere les reins, la main tirant la cuisse et 1'ouvrant avec force.
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Histoire de l'Nil
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Simone dclatant de rire, a quatre pattes sur les poutres et exposant le cul devant mon visage, je d6couvris ce cul complh tement et me b ranlai e n l e regardant.
L'armoire normande
Dhs cette 6poque, Simone contracta l a mani c de casser d es ceufs avec son cul. Elle se plar,ait pour cela la t6te sur l e siege d'un fauteuil d u salon , l e dos contre l e dossier, l es
jambes replies vers moi qui me branlais pour la foutre dans la figure. Je plagais alors 1'ceuf juste au-dessus du trou du cul et ell e s'amusait habilement en 1'agitant dans la fente profonde des fesses. A u moment oi l l e foutr e commengait h j ailli r e t h r uisseler sur ses yeux, les fesses se serraient, cassaient 1'o:uf et elle j ouissait pendant que j e me barbouil lais la figure dans son cul avec une souillure abondante. Rapidement, bien entendu, sa mere, qu i pouvai t entrer dans le salon de l a vill a a tou t instant, surpri t ce manege peu ordinaire, mais cette fernme extremement bonne, bien qu'elle erat eu une vi e exemplaire, l a premiere fois qu'elle nous surpri t se contenta d'assister au j eu sans mot dire, si
bien que nous ne nous actions apercus de rien. Je suppose qu'ell e 6t ai t trop atterr6e pour p arler . M ai s quand nous e umes fini, alors que nous commencions I rdparer le d' or dr e, nous 1'apergiimes debout dans 1'embrasure de l a porte. — Pais comme s' il n' y av ai t personne, m e di t Simone e t ell e continu a a s'essuyer l e cul . Et en eeet nous sorthnes tranquillement comme si cette femme 6tait d ej a rdduite a 1'stat de portrai t de famille. Q uelques j ours apres, d'ailleurs, Simone qu i faisai t d e la gymnastique avec mo i dans l a charpente d'u n garage
pissa sur sa mere qui avait eu le malheur de s'arrester sous elle sans la voi r : al ors la triste veuve se rangea et nous fixa avec des yeux s i t ristes et un e contenance si d6sesp6r6e q u'ell e provpqua nos j eux , c' est-I-dir e si mplemen t qu e
Qependant nous actions rest6s plus d'une semaine sans voir M arcelle, quand un j our nous la rencontrames dans la rue. Cette j eune fill e blonde, tirnide et naivement pieuse rougit si profond6ment en nous voyant que Simone 1'embrassa avec une tendresse merveilleuse. — J e vous demande pardon, M arcelle, lu i dit-elle tout bas, ce qui est ar rive 1'autre j our 6tait absurde, mai s cela n'emp0che pas qu e nous devenions amis maintenant. J e vous promets qu e nous n'essaierons plus j amais de vous toucher. Marcelle qu i m anquai t exceptionnellement d e volonte accepta done de nous accompagner et de venir gouter chez nous en compagnie de quelques autres amis. M ais au lieu de thd, nous bumes du champagne k appa en abondance. I.a vu e d e M arcelle. rougissante nous avai t complhte ment boulevers'ds. Nous nous actions compris, Sirnone et moi , et nous dtions certains d6sormais que rien n e nous ferai t plus reculer pour arriver h nos fms. I l y avait la, outre M ar c elle, trois autres j eunes filles j olies et deux garcons : l e plus A.gd des huit n' ayant pas dix-sept ans, la, boisson pro duisit un effet certain, mais h part Simone et rnoi, personne n'6tait excite comme nous voulions. U n phonographe nous tira d'embarras. Simone seule dansant un charleston frdnd tique mantra ses jambes a. tout le monde jusqu'au cul et l es -autres jeunes filles invitees a danser seules de la mneme fanon dtaient dej a beaucoup trop j oyeuses pour se gener. Et@ngs doute elles avaient des pantalons, mais ils bridaQnt lache ment l e cul sans cacher grand-chose. Seule, M arcelle ivr e et silencieuse refusa d e d ans er. Finalement Simone qu i s e donnai t 1'ai r d'0tr e absolu ment ivre froissa une nappe et 1'dlevant dans la mai n pro posa un pars. — Je parie, dit-eHe, que je fais pipi dans la nappe devant tout le monde. C'6tait en principe une ridicule reunion de petits j eunes gens pour la plupart remuants et bavards. Un des garcons la d6fia et l e pari fu t f i x h discretion... I l es t bien entendu que Simone n'h6sita pas un seul instant et mouilla la nappe
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Histoire de l'eil
CEuvres completes de G. Bataille
abondamment. M ai s cet acte hallucinant l a troubl a visi blement jusqu'a l a corde, si i e n que tous ces jeunes fous commencerent a haleter . — Puisque c' est I disc 6tion, di t Simone au perdant, j e m' en vais maintenant vous deculotter devant tout le monde. Ce qui eut lieu sans aucune difBcultd. Le pantalon enlevd, on lui enleva aussi la chemise (pour lui eviter d' etre ridicule). Toutefois rien d e gr av e ne s'7etait encor e passd : a peine Simone avait-elle caresse d'une main ldgere son j eune ami tou t 67 bloui i v re~ et n u. Ma is elle ne songeait pourtant q u'a li ait Marcell e qu i depuis quelques instants d6j h m e supp 'ai d e l a l aisser partir . — O n vous a promis de ne pas vous toucher, M arcelle, a lors pourquoi voulez-vous p artir P — Parce que, rdpondait-elle obstinhment, tandis qu'une colere violente s'emparai t d'elle peu a peu. Tout a coup, Simone tomba I terre I la terreur des autres. Une convulsion de plus en plus forte 1'agitait, les vktements en ddsordre7 le cul en 1' air , comme si elle avai t Pdpilepsie, mais tou t en se roulan t au pied d u gargon7 qu'elle avai t d dshabille7 elle pronongait des mots presque inarticul ds : — Pisse-moi dessus... pisse-moi dans l e cul... r dp6tait elle avec une sorte de soif. Marcelle regardai t avec fi xit 6 ce spectacl e : ell e av ait ~ ' L' d i t a lors encore une fois rougi jusqu au sang. M ais eLe me dit s ans meme me voir , qu'elle voulai t enlever sa robe. J e l a lui arrachai a moitib en effet et, a ussitibt apres, son l inge: elle ne garda que ses bas et sa ceinture et s'extant a peine laissd branler et baiser a l a bouche par moi , ell e traversa la chambre cornme une somnambule et gagn a une grande armoire normande ou ell e s'enferma apres avoir murmurs quelques mots a 1'oreill e d e Simone. Elle voulait se branler dans cette armoire et suppliait qu'on la l aissa,t tranquille. Il faut dire ici que nous i tious tous trhs ivres et complh tement renversds par ce qui avait d6j h eu lieu. Le g ary ' n u se faisait sucer par une jeune fille. Simone debout et retrchfsfde ' 7&ottai o at son cu l ddnudd contr e 1'armoir e branlante o6 1'on t entendait un e j eune fi ll e se br anler avec u n h alLtemen brutal. Et soudain il arriva une chose incroyable, un strange
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bruit d' eau suivi de 1'apparition d'un filet puis d'un ruisselle ment au bas de la porte de 1'armoire: la ma1heureuse Marcelle pissait dans son armoire en se branlant. M ais Pdclat de rire a bsolument i vr e qu i suivi t d6g6n6r a r apidement e n un e dpbauche de chutes de corps, de j ambes et de culs en 1'air, de j upes mouilldes et d e foutre. L es rires se produisaient comme des hoquets idiots et involontair e~ m ajs ne r)pssis saient qu' h peine h interrompre une(rud+ebrutaTer vers les culs et les verges. Et pourtant, bientot, on entendit l a triste M arcelle sangloter seul e et d e plus en plus for t dans l a pissotiere de fortune qu i lu i servai t m ai ntenant de prison.
Une demi-heure apres, j'eus Pidde, 6tant moins saoul, de sortir M a rcelle d e son a rmoir e : l a malheureuse jeune fille restde nue etait ar r i ve h un stat effroyable. Elle trem blait et grelottait de f i br e. Dhs qu'elle m'apergut elle mani festa une terreur maladive mais violente. D' ailleurs j'6tais pale, plus ou moins ensanglantd et habilld de travers. Der riere moi, dans un d' or dr e innommable, des corps effron t 6ment ddnudds et m alades gisaient presque inertes. A u cours de 1'orgie, des debris de verres avaient profonddment coupe et mi s en sang deux d'entre nous; une j eune fille vomissait, de plus nous avions tous dt's pris une fois ou 1'autre d'un fou rir e si ddchain6 que nous avions mouill e qui ses vbtements7 qui son fauteuil o u l e parquet . I l e n r & ultait une odeur de sang, de sperme, d 'urine et de v omi q ui m e faisait dej a presque reculer d'horreur, mais le cri inhumain qui se d6chira dans le gosier de M arcelle dtait encore beau coup plus terrifiant . J e doi s dir e cependant qu e Simone a u mneme moment dormai t tr anquilleinent , l e ventr e en 1'air, la mai n encore k la fourrure, le visage apais6 presque s ourian t .
Marcelle qui s' dtait j etee h travers la chambre en tr6bu chant et en criant des esphces de grognements me regarda encore une fo i s : ell e recul a comme si j ' 6tais u n spectre hideux apparu dans un cauchemar et s'effondra en faisant entendre une kyrielle de hurlements de plus en plus inhumains. a qqg-(~
Chose 6tonnante, cel a m e redonna d u cceur au ventre.
On allait accourir, c'dtait inevitable. Mais je ne songeai pas
CEuvres completes de G. Bataille un instant a fuir ou a diminuer le scandale. Tout au contraire, j' allai rdsolument ouvrir la p orte. S pectacle et jo ie i nouxs! On imagine sans peine les exclamations d'horreur, les eris ddsespdrds, les menaces disproportionndes des parents entrant dans l a chambre! L a cour d'assises, le bagne, 1'6chafaud dtaient dvoqu 6 avec de s hurlements incendiaires e t des
irnpr6cations spasmodiques. No s camarade s eux-m&mes s '6taient mi s h hurler e n sanglotant jusqu' a produir e un eclat ddlirant de eris en larm es : on aurai t cr u qu'on venait de les mettre tous en feu comme des torches vives. Simone
L'odettr de Na reelle
e xul t ai t av ec m oi .
Quelle atrocity pourtant ! I l semblai t que rien ne pourrai t en fini r avec l e ddlir e tragi-comique de ces ddments, car Marcelle rest e nue continuait tout en gesticulant h exprimer par des eris de douleur d6chirants une souffrance moral e et une terreur impossibles a supporter on la vi t mordre sa mme au visage, au milieu des bras qui tentaient vainement de la maQtriser. En eRet 1'irruption des parents avai t achevb de d6truire ce qui lui restait encore de raison et en fin de compte on dut avoir recours a l a police, tous les voisins 6tant t dmoins du scandale inoui.
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Mes propres p arents n' 6taien t pa s survenus ce soir-l h avec la bande. Cependant je jugeai prudent de ddguerpir en pr6vision de la col&re d'un pere miserable, type accompli de gdndral gkteux et catholique. Je rentrai s eulement d ans la villa par-derriere. Je ddrobai u ne certaine somme d 'argent, Puis, bien certain qu'on me chercherait partout ai lleurs que
9,, je me baignai dans la chambre de mon padre. Enfin vers dix heur'es je gagnai la campagne ayant laissd le mot suivant sur la table de ma mme : s V euillez, j e vous prie, ne pas me faire chercher par la police car j'emporte un revolver et la premiere balle sera pour l e gendarme, l a seconde pour m oi . »
Je n'ai j amais eu en moi la possibility de prendre ce qu'on appelle une attitude et, dans cette circonstance en particulier, je ddsirais uniquement f aire reculer ma famille, irreductible ennemie du scandal ~ T outefois, ayan t meri t l e mot avec ' ' l a plus grande legeretd et non sans rire, j e ne trouvai p d , mauvais de mettre dans ma poche le revolver de mon pere.~ Je marchai presque toute la nui t le long de la mer, mais sanS m'8oigner beaucoup de X, e xtant d onn6 l es detours de l a cote. Je cherchais seulement h a paiser u ne agitation violente, u n strange ddlir e spectral o u de s phantasmes de Simone et de M arcelle sy composaient ma lgre moi a vec des expressions terrifiantesgpeu a peu 1'i d ' me vint meme qoe je me tnerais et en prenant ie revolver en main, j 'achevai ~de er Zre Te seas des r oots comme espoir on ddsespoir.Pl a it
je me renders compte, par las'situcTe, qu"3" faHait que ma vie erat tout de mneme un sens et qu'elle en aurai t seulement un dans la mesure o6 certains dvdnements ddfinis comme
Cn .
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Histoire de l'!eil
$Eafvres compl'etes de G. Bataille
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souhaitab es ~ a r riveraient . J'acceptai finalement 1' extra ordinai r hantiyd des norns : Simone, Marcelle, j 'avais beau rire, je ne po vais plus m'agiter qu'en acceptant ou en affectant d'imaginer un e composition fantastique qu i li erai t confu s6ment me s demarches le s plu s d6concertantes avec l es leurs.
J e dormis dans un bois pendant le jour et, a la to mb s de la nuit, j e me rendis chez Simone : je passai par le j ardin en sautant l e mur. La c hambre d e mon a mie 6 tant e cla ir ' , je j etai des caiHoux dans la fenCtre. Quelques instants apres, elle descendit et nous parttrnes presque sans mot dire dans la direction du bor d de l a mer . Nous 6tions gais de nous e tre r etrouves. I l f aisai t sombr e et , d e temps h au tre, j e relevais sa robe en lui pr enant le cul en mains mais cela ne me faisait pas jouir, au contraire. Elle s'assit, j e me couchai a ses pieds : or j e me rendis compte bient8t que je ne pour rais pas m'emp6cher d e sangloter e t e n effet j e sanglotai longuernent sur le sable. — Q u'est-ce qui te prend ? me di t Simone. Et ell e m e donna u n coup de pied pour r ire. Son pied toucha justement le revolver dans ma poche et une effroyable detonation nous arracha u n seul cri . J e n'6tais pas blesse mais j e me trouvai brusquement debout comme si j ' 6tais entr6 dans un autre rnonde. Sirnone eHe-mneme 6tait devant rnoi p hl e a fair e peur . Ce soir-lh nous n'eumes pas meme Hi de de nous branler , mais nous restames sans fin embrassds bouche contre bouche, ce qui ne nous 6tait encore j amais arrive. Pendant quelques j ours j e vou s ain si : nous rentrions, Simone et mo i, t a rd d ans la n uit e t n ous nous couchions dans sa chambre ou j e restais enfermd jusqu' a l a nui t sui vante. Simone me portait a manger. Sa mere n'ayant pas la m oindre autorit6 sur ell e (le j our du scandale, elle avait a peine entendu les eris qu'eHe 6tait sortie pour s e promener) acceptait cett e situation sans mneme chercher I s e rendre compte du rnystere. Quant au x domestiques 1'argent l es tenait depuis longtemps a la devotion d e Simone. C' est mneme par eux que nous apprbnes les circonstances de 1'internement de M arceHe et nfi n dans queHe maison de sant6 elle se trouvait enferrn 6 D e s l e premier j otIIr tout ",I
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notre souci s'dtait port6 sur elle, sur sa folie, sur l a solitude
de son corps, les possibilities de 1'atteindre, de la faire evader pent-6tre. Un j our que dans son Ht, je voulais forcer Simone, c He-ci m'6chappa brusquement : Tu es completement fou, cria-t-eHe, mais mon peti t, je n'ai pas d'int6r 8t : dans un l it , comme ga, comme une . mere de famille! Avec M arceHe seulement. g — Qu'est-ce que t u v e ux d ire? l ui d emandai-je d 'eau, mais au fond tout a fait d'accord avec elle. Elle revint affectueusement vers moi et me dit doucement a vec une voi x de r 6v e : — Dis-moi , eHe ne pourr a pas s'ernp0cher de pisser en nous voyant... farre 1 amour , En mneme temps, j e sentis un liquide chaud et charmant couler l e long de mes j ambes et quand elle eut fini j e me levai et lui arrosai a mon tour le corps qu'eHe tourna cornplai samment devant l e j et impudique et l dgerement bruissa,nt sur la peau. Apres lui avoir inondd le cul ainsi, j e lui bar bouiHai enfi n l a figure de foutre. T oute souiHde elle entra en j ouissance avec un e d6mence libdratrice. Ell e aspirait profond6ment notr e odeur Acr e et heureuse : « T u sens MarceHe » , m e confia-t-eHe aHegrement, quan d ell e eu t bien j oui, le nez tendu sous mon cul encore frais. Rvidemment Simone e t mo i 6tions pri s parfoi s d'une envie violente de nous baiser. M ai s I ' i d ' n e nous venait plus que cela f6t possible sans M arceHe dont les eris pergants nous agaqaient continueHement les oreilles, lids qu'ils dtaient pour nous a nos d8sirs les plus violents. C' est ainsi que notre rhve sexuel se transformait continueHement en cauchemar, Le'sourire de Ma rceHe, sa &aicheur, ses sanglots, la honte qui l a faisait rougi r e t r ouge jusqu' I l a douleur arracher eHe-mneme ses vetements, livrer tout a coup de belles fesses blondes a des mains, h des bouches impures, par-dessus tout le ddlire tragique qui 1' avai t fai t s'enfermer dans 1'armoire pour s' y branler avec tan t d' abandon qu'eHe n'avai t p as p u se retenir de pisser, tout cela, ddformait et rendait sans r c esse ddchirants nos ddsirs. Simone dont l a conduit e a u ) c ours du scandal e avai t dt' s plus obscene que j amai s couch6e, elle ne s'dtait mneme pas couverte, elle avait ouvert les jambes au contraire — ne pouvait pas oublier que 1'orgasme imprdvu provoqud par sa propre impudeur, les hurlements
a6 CE a vres completes de G. Bataille et la nudity des membres tordus de M arcelle, avaient ddpassd en puissance tout ce qu'elle avait pu mneme imaginer jusque la.. Et son cul ne s'ouvrait pas devant moi sans que le spectre de M arcelle en rage, en dhlire ou rougissante, ne vint donner
I son impudeur une portage accablante, cornme si le sacrilege devait rendre toute chose gdndralement affreuse et i nfame.
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D'aiHeurs les regions mar6cageuses dd cu l — auxquelles ne ressemblent que les j ours de crue et d'orage ou encore les dmanations suffocantes des volcans, e t qu i n'entrent en activity que, comme les orages ou les volcans, avec quel que chose de la catastrophe ou du ddsastre —, ces regions ddsesp6rantes que Simone, dans un abandon qui ne pr6sa g eait qu e des violences, m e l aissait regarder comm e en hypnose, n'dtaient plus d6sormais pou r mo i qu e 1'empire souterrai n e t pr ofond d' un e M arcell e supplicide dans sa prison et devenue la proie des cauchemars. Je ne comprenais mneme plus qu'une chose : k quel point 1'orgasme ravageait le visage de la j eune fille aux sanglots entrecoupds de eris hor rible s. Et Simone de son cot6 ne regardait plus le foutre acre et chaud qu'elle faisait j ai lli r de ma verge sans en voir au mneme instant la bouche et le cul de M arcelle abondamment soui118. — T u pourras lui fesser l a figure avec ton foutre, m e confiait-elle en s'en b arbouillant elle-mneme le cul , e pour qu' il fume », comme elle disait. j
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I V
Une tache d'e soleil
Les autres femmes ou les autres hommes n'avaient pl us aucun intbr6t pour nous. Nous ne songions plus qu'a Ma1' celle dont nous imaginions ddj h pudrilement l a pendaisdn volontaire, 1'enterrement clandestin, les apparitions funebres. Un soir enfin, bien r enseign6s, nous partimes a bicyclette pour aller jusqu'a l a maison de sant6 ou notre amie 6tait enferm6e. En moi ns d'une heure nous eumes 'parcouru l es vingt kilometres qui nous s6paraient d'une sorte de chateau e ntour6 d'un pare murd, isola sur une falaise dominant l a mer. Nous avions appris que M arcelle occupait la chambre 8, mais il aurai t fall u 6videmment arriver par 1'intdrieur de la maison pour l a trouver . Or , tou t ce qu e nous pouvions espdrer, c'6tait p6ndtrer dans sa chambre par la fen6tre apres avoir sci l les barreaux et nous n'imaginions aucun moyen d'identifier l a sienne parmi trente autres quand notre atten tion fut at t i re par une strange apparition. Nous avions saute le mur et nous trouvions dans le pare dont les arbres 6taient agites par un vent violent quand nous vimes une fen6tre du premier
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( t Histoire de l'nil 4 5 <x,uf, un ceil cr v6s ou mo n propre crane kbloui et pesam
ment colld a/ a i erre en renvoyaient h 1'infini des images symdtriques.
C jp-' Animaux obscenes
Pour in viter le s ennui s d'un e enqu0t e policier e nous' n'avons pas h6sitd un instant a gagner 1'Espagne ou Simone 1 comptai t pou r disparaitr e su r l e secours d'u n ri chissime Anglais qui lui avait dej a propose de 1'entretenir et qui 6tai t sans aucun doute 1'homme le plus susceptible de s'int6resser notr e cas.
La villa fut abandonee au milieu de la nuit. I l n'dtait p as difiicile de voler u'ne barque, de gagner un point retir e d e la c6te espagnole et d' y br uler l a barque entierement h 1 'aide d e deux bidons d'essence qu e nous aurions eu l a precaution de prendre dans le garage de la villa. Simone me laissa cache dans up b oi s pendynt l a j ourn6e pou r aller t rouver 1'Anglai s k(Saint-Sdbastiep. Ell e ne revint qu' a l a tomb6e de la nuit mais cette fois conduisant une magnifique v oitur e oi r se trouvaient des valises pleines de linge et d e riches v8tements. Simone m e di t qu e Si r Edmon d nous retrouverait Madrid et que pendant toute la j ourn6e il lui avait posh les
questions les plus ddtailldes sy la,mo r t a M arcelle, 1'obli geant h faire des plans et des cVoquis. Pinalement i l av ait e nvoye u n domestique acheter u n mannequin d e cir e a perruque blonde et avait demands a Simone d'uriner sur l a
figure de ce mannequin couche a terre, sur les yeux ouverts, dans l a meme position que lorsqu'elle avai t ur ine su r l es yeux d u cadavr e : pendant t ou t ce temps Si r Edmond
n'avait pas mneme touchd la jeune fille. Mais il y avait un grand changement dans Simone apres le suicide de M arcelle, elle regardait tout le temps dans le
orgasmes rares mais incomparablement plus violents qu'aupa ravp,nt. Ces orgasmes 6taient aussi diff6rents des jouissances habituelles que, pa r ex emple, l e rir e des negres sauvages est. dif f eren de celui des Occidentaux. En effet, bien que les salvages rien t p arfoi s aussi mod6rement qu e l es Blancs, i[s ont aussi des crises de rir e durables au cours desquelles toutes les par ties de leu r corps se libhrent avec violence, q ui les font malgr6 eux tournoyer, battre 1'air h toute volt e avec les bras et secouer l e ventre, l e cou e t l a poitrine en gloussant avec u n br ui t t errible. Quant h Simone, elle ouvrait d'abor d des yeux incertains, devant quelque spec tacle triste et obscene... Par exemple, un j our , Si r Edmond fi t j eter e t enferma dans une stable a pores tres etroite et sans fen6tre uptre yytite e t ddlicieuse belle-de-nuit iPe ~y . r'M.adri .; . y ~d >-' qui du t s'abaftre en ' chemise-culotte dans use mare ge puriri e t e ncore sous des g ~ ! ~ v entres de trures qui grognaient. L a porte une fois f er ne , Simone se fit longuement baiser par moi, le cul dans la bouc, devant la porte, sous une pluie fine, pendant que Sir Edmond se branlait. La j eune fille apresgn'avoi r 6chappb erII ralak t saisit son , cul a ,deux mains en se co'gnarrt violemrnent la tete renversde contre le sol, elle se tendit ainsi pendant quelques secondes sans respirer en tirant de toutes ses forces sur les bras qui s'accrochaient au cul par les ongles, elle se ddchira ensuite d'un seul coup et se ddcharna par t erre comme une volaille «>' ' dgorg6e, se blessant avec un bruit terrible contre les ferrrrres de l a porte. Si r Edmond lu i avai t donn6 son por'gnet h. mordre pour apaiser le spasme qui continuait a l a secouer et elle avait le visage souilld par la salive et par le sang. Apres ces grands acces elle venait touj ours se placer dans mes bras; elle installai t volontairement son peti t cul dans mes grandes mains et restai t longuement sans bouger et sans parler , blotti e comm e un e petit e fi lle mais touj ours sombre. Cependant au x spectacles obscknes qu e Si r Ed mond s 'ingdniait h nous procurer au hasard, Simone continuai t h
Hi stoire ele l'ail
5o (/ u vres ej rypletes de G. Bataille i j ).,~~r
pr6 drer les corrida's. %n e ffet i l y a va it t rois choses dans
les corri/a~>Quid captiyaien) : la premiere quand le taureau d6boocfie" en bohBe du'korin ainsi qu'un gros r at ; la seconde quand ses copi es se plongent jusqu'au cr i ne dans le Rane d'une j ument ; l a tr oisieme quan d cett e absurde j ument ef8anqude galope h travers 1'arene en ruant a contretemps et en lachant entr e ses cuisses un gros et i gnoble paquet d'entrailles aux affreuses couleurs pales, blanc, rose et gris nacrds. En particulier, elle palpitai t quand l a vessie crevice lachait sa masse d'urine de jument qui arrivait d'un seul coup s ur le sable en faisant f l o. D'ailleurs elle restait dans 1'angoisse d'un bout a 1'autre de l a course, ayant l a t erreur , bi en< ept@nd p expressive
surtout d'un violent ddsir, de voir le tie'ero(euler en 1'air par u n de s monstrueux coups de come qu e l e taureau, pr oj et d sans cesse avec col&re, frappe aveugldment dans l e vide des etoffes de couleur. I l faut dire de plus que si, sans long arret et sans Bn, le taureau passe et repasse brutalement
dans la cape du matador, a un doigt de la 1igne perigee du corps, n' import e qu i dprouve l a sensation d e pr ojection totale e t r dphtde, particulier e au j e u d u coit . L' extreme
proximity de la mort y est du reste sentie de la mneme fanon. Mais ces series de passes prodigieuses sont rares.(Aussi bien elles d6chafnent chaque foi s u n veritabl e ddlir e dans l es arenes et meme c' est une chose bien connue qu'a ces moments p ath6tiques de la corrida les femmes se branlent par le seg r frottement des cuisses. ) I » .. >('.,',' ' Mais h propos de corridas, Si r Edmond raconta un j our a Simone qu'a une 6poque encore r6cente, c'6tait 1'habitude de certains Espagnols virils, pour l a plupar t t or eros ama teurs a 1'occasion, de commander au concierge de 1'arene les couilles fraiches et grilldes de 1'un des premiers taureaux tubs. Ils se les faisaient apporter a leur place, c' est-i-dire au premier rang de 1'arene, et les mangeaient aussit0t en regar dant tuer les taureaux suivant s~ imone pri t l e plus grand intdrht I ce recit et comme nous devions assister le dimanche s uivant a l a pr emier e course importante de 1'anni e, el le demanda I Si r Edmond de lui faire donner ainsi les couilles du premier t aureau, m ais elle y apporta une condition elle voulai t les couilles crues. N
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— Enfin , obj ectai t Si r Edmond, qu e voulez-vous fair e de ces couilles crues? Vous ne voudriez tout de meme pas manger des couilles crues? — Je veux les avoir devant moi dans une assiette, conclut Simone.
Histoire 0'e l'nil En fai t cette extr h ne irrdalit6 de 1'eclat solaire est telle m ent lide I tout ce qui eu t lieu autour de moi pendant la corrida du 7 mai que les seuls objets que j'aie j amais conser ves avec attention sont un dventail de papier rond, mi-j aune, mj-bleu, que Simone avait ce jour-1h et une petite brochure
illustrate oh se trouvent un recit de toutes les circonstances
L'teil d'e Granero
Le 7 mai x gaa les toreros La Rosa, L a landa et G ranero devaient combattr e dans les arenes de M adrid, les deux derniers dtant consid6r6s en Espagne comme les meilleurs matadors et en gdndral Granero comme sup6rieur a L alanda. I l venai t tout juste d'avoir vingt ans, toutefois il etait d ej a e xtr6mement populaire, 6tan t d' ailleur s beau , gran d et d'une simplicit y encore enfantine. Simone s'6tai t vivement int6ressde h son histoire et , par exception, avait manifest' un veritable plaisi r quand Si r Edmond lu i avai t annoncd que l e celebr e tueu r d e taureaux avai t accepts de diner avec nous le soir de la course. Ce qui caract6risait Gr anero parm i les autres matadors, c' est qu' il n' avai t pas du tou t 1'ai r d'u n garison boucber, mais d'un prince charmant tres viri l et aussi parfaitement 61ancd. Le costume de matador, a ce point de vue, est expres
sif, parce qu' il sauvegarde la ligne droite toujours Giggle t res raide e t comme un j ai llissement chaque fois que l e taureau bondi t h cotd du corps, et parce qu' il adhere 6troi tement au cul. Une etof f d'un rouge vif et une 6pde brillante — en face d'un taureau qu i agonise et dont l e pelage est fumant a cause de la sueur et du sang — achevent d'accom pli r l a m etamorphose et d e d6gager l e caracthre 'l e pl us captivant du j eu . I l faut teni r compte aussi du ciel torride particulier h 1'Espagne, qui n'est pas du tout colored et dur comme on 1'imagine : i l n'est que parfaitement solaire avec une luminosity dclatant e mai s molle, chaude e t trouble, parfois meme irrdelle h force de sugg6rer la liberty des sens par I'intensity de la lumihre lide h celle de la chaleur.
et quelques photographies. Plus tard, au cours d'un embar quement, l a petit e valise qu i contenai t ces deux souvenirs tomba dans la mer d'oil elle fut retiree par un Arabe h 1'aide d'une longue perche, c' est pourquoi ils sont en trhs mauvais stat, mais ils me sont n6cessaires pour r attacher au sol ter restre, a un lieu gdographique, a une date precise, ce que mon imagination me reprdsente malgre moi comme une simple
vision de la deliquescence.solaire.
pgr.-~g, O .-.--., '-,) ' '
I,e premier taureau, celui ddt Sim6nre attendait les couilles crues servies dans une assiette, 6t ai t un e sorte de monstre noi r dont l e ddbouch6 hors du tori l fu t si rapide qu'en d6pit de tous les efforts et de tous les eris, il 6 ventra successivement les trois chevaux avant qu'on eut pu ordonner
la course; une fois, cheval et cavalier furent soulevds ensemble en 1'air pour retomber derri ere les comes avec &acas. M ai s Granero ayant pris l e taureau, l e combat commenga avec brio et se poursuivit dans un ddlire d'acclamations. Le j eune homme faisait tourner autour de lui la bete furieuse dans une cape rose; chaque fois son corps etait Sieve par une sorte de jet en spiral e et i l 6vitai t de t ri s peu un choc formidable. A i a fi n, l a m or t dc~ mo n
e soiair e s'accomplit avec nette td ,
la bete aveuglbe par le morceau de drap rouge, 1'dp5e plongde profonddment dans l e corps dej a ensanglant6; une ovatien incroyable eut lieu pendant que le taureau avec des incer t itudes ' d'ivrogne s'agenouillai t e t s e l aissait totnber l e s jamges en 1'air en expirant. Simone qu i se trouvai t assise entre Si r Edmond et moi et qui avait assists I l a tuerie avec une exaltation au moins dgale a la mienne ne voulut pas se rasseoir quand 1'intermi nable acclamation du j eune homme eut pris fin. Elle me prit par la mai n sans mot dire et me conduisit dans une cour ' extdrieure de I'arcane extremement sale oh i l y avai t une odeur d'urine chevaline et humaine suffocante 6tant donn6 la grande chaleur. Je pris, moi, Simone par le cul et Simone
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Cwvres eomPlktes de G. Batailfe saisit a travers la ciIly tte ma verge en colere. Nous entrkmes
ainsi dans des ctuott'es""puantes o6 des mouches sordides tour bi]lonnaient dans u n rayon d e solei l e t ou , rest d debout, je pus mettre a. nu le cul de la j eune fille, enfoncer dans sa chair couleur de sang et baveuse, d'abord mes doigts, puis le membre viril lui-meme, qui entra dans cette caverne de sang pendant que je branlais son cul en y p6ndtrant profonde ment avec le medius osseux. En meme temps aussi les rtdvoltes de nos bouches se collaient dans un orage de salive. L'orgasme du t aureau n'est pas plus for t qu e celui qui nous arracha les reins et nous entre-decbira sans que mon gros membre eut reculd d'un seul cran hors de cette vulve
emplie jusqu'au fond et gorge par le foutre. La force des battements d u co:u r dans nos poitrines, aussi brCilantes et aussi d6sireuses 1'une que 1'autr e d' etre colltges toutes nues a des mains moites, pas du tout apaistges, ') 'le cul de Simone aussi avide qu'avant, moi, la verge re«tee ( y~ obstin6ment r aide, on revint ensemble au premier r ang de )t's Varhne. M ais une fois arrives h notre place aupres de Si r Edmund, l a oh devsi t s'asseoir gimone, en pl ei n soleil , on trouva une assiette blanche sur laquelle deux c h ilies dplu ' k ehdes, glandes de l a grosseur et de l a formsr d' un~ceuf t d'une blancheur na c r e , ,a peine rose de sang, identique k belle du globe oculai r e : ' lies venaient d'0tre prdlevdes sur le premier t au r e , el age noir , dans l e corps duquel
f,'-.,granero avait plonk 1'Bee.
— Ce sont les couilles crues, di t Si r Rdmond h Simone
avec un laager accent anglais. Cependant Simon e s'6tai t mise a genoux devant cet te assiette qu'ell e regardait avec u n int6rkt absorbant , mais aussi avec un embarras extraordinaire. I l semblai t qu'elle voulait faire quelque chose et qu'elle ne savait pas comment s'y prendre et que cel a l a mettai t dans un stat d'exasptg ration. Je pris 1'assiette pour qu'elle pQt s'asseoir, mais elle me l a retir a avec brusquerie en disant « n on » sur un ton catdgorique, puis ell e l a replaga devant ell e sur l a dalle. Sir Edmond et moi commencions h Stre ennuy6s d'attirer 1'attention de 'nos voisins juste h u n moment oQ l a course languissait. Je me penchai a 1'oreille de Simone et lui deman dai ce qui la prenait.
— I di ot , rdpondit-elle, tu ne comprends pas que j e vou d rais m'asseoir dans 1'assiette et tous ces gens qui regardent ! — M ais c' est completement impossible, rdpliquai-j e, assoi t oi .
J'enlevai en mneme temps 1'assiette et 1'obligeai h s'asseoir tout en la d6visageant pour qu'elle vl t que j'avais compris, que je me rappelais 1'assiette de lait et que cette envie renou vel)ge achevait d e m e troubler . E n effet a p arti r d e ce moment-la, n i elle, ni moi ne pouvions plus tenir en place et cet stat de m al aise 6tai t te l qu' il se communiqua par contagion a Si r Edmond. I l est juste de dire que, de plus, la course 6tait devenue ennuyeuse, des taureaux peu comba tifs se trouvant en face de m atadors qui n e savaient pas comment les pr endr e e t p ar-dessus tout , comme Simone avait tenu a ce que nous eussions des places au soleil, nous tgtions pris dans une sorte d'immense bu6e de lumihre et de chaleur moite qui dess6chait l a gorge et oppressait. Il dt ai t vr aiment tout I f ai t i mpossible I S imone de relever sa robe et d'asseoir son derriere mis I nu dans 1'assiette aux couilles crues. Elle devait se borner h garder cette assiette sur les genoux. Je lui dis que j'aurais voulu la baiser encore une fois avant l e r etour d e Granero qu i devai t combattre seulement le quatrieme taureau, mais elle refusa et resta lh,
vivement ingress de m algren tout pa r de s 6ventrements de chevaux suivis, comme elle disait pudrilement, de «perte et &acas», c' est-a-dire de la cataracte des boyaux, Le rayonnement solaire nous absorbait pe u h peu dans u ne irrdalit h bien conforme h notre malaise, c' est-a-dire I 1'envie muette et impuissante d')gclater et de renverser l es culs. Nous faisions une grimace cause I l a fois par 1'aveu glement des yeux, l a soif et l e trouble des sens, incapables aussi de trouver la desaltdration. Nous avions r6ussi h parta g er a trois l a deliquescence morose dans laquelle i l n' y a plus aucune concordance des diverses contractions du corps. A u n tel point mneme que le retour de Granero ne r6ussit pas h nous tirer de cette absorption abrutissante. D'ailleurs le taureau qui se trouvait devant lui 6tait m6fiant et semblait peu nerveu»: la course se poursuivait en fait sans plus d'int5r6t qu'avant. Les 6vdnements qu i suivirent se produisirent sans tran sition et comme sans lien, non parce qu'ils n'6taient pas
56 CE uvres compl)tes de G. Bafaille lids vrairnent, mais parce que mon attention comme absente
restait absolument dissociate. En pe u d'instants j e vis, premie,rement, Simone mordre a mon effroi dans une des couilles crues, puis Granero s'avancer vers le taureau en lui pr6sentant l e drap Bcarlate — enfin, a peu pres en meme temps, Simone, le sang A. la tete, avec une impudeur suffo c ante, d6couvri r d e longues cuisses bl anches jusqu' a sa v ulve bumide ou ell e fi t entrer lentement e t s6rement l e second globule pAle — Gr anero renvers6 par l e taureau et coined t ee -la alustrade; su r cette balustrade les comes frapp rent trois cou s a toute volde, au troisieme coup une come d6fonga 1'o il r oi t et toute l a tete. U n cr i d'horreur i mmen e coincidp~avec un orgasme bref de Simone qui n e
fut soul ed de la dalle de pierre que pour tomber A. la
renverse P . i (
N ous con ations de plus un autre effet de cet acciden t : ['et of f ldghre de l a robe dtan t mouillee avai t adhdr d au corps et cornme ell e 6tai t ainsi tout a fai t tr ansparente le joli ventre et les cuisses de Simone 6taient rhvdlds d'une fanon particulierement i mpudique, noirs entre les rubans rouges de l a ceinture. — I l n'y a qu'0, rentrer dans 1'dglise, dit Sirnone un peu plus calme, ga va s6cher. Nous Ames irruption dans une grande salle ou nous cher chames en vain, Si r Edmond et moi , l e spectacle comique que la jeune fille n'avait pas pu nous expliquer. Cette salle 6 tait r el ativement fr aiche e t dclairde pa r de s fen6tres a travers des rideaux de cretonne rouge vi f et transparente. Le plafond 6t ai t e n charpente ouvrap6e, les mugs platres, mais encornbr6s d e diverses bondi/uWii eg g j i s''og inoins
au hasard. Le p lus souvent, Sir Edmonds,rious .suiyait+~ loin de fanon a nous surprendr e : i l devenait pour) re, mais il ne s'approchait j amais. Et s' il se branlait, il le Faisait dis c retement, non par reserve, i l est vrai , mais parce qu' il ne faisait j amais rien que debout, isola, dans une fi xi t presque absolue, avec une effroyable contraction m usculaire. — Ceci est tres intdressant, nous dit-il un j our en nous d6 ignant une dglise, c' est 1'dglise de Don Juan. — E t apres? rdpliqua Simone. — Restez ici avec moi, reprit Sir Edmond en s 'adressant d'abord a moi, vous Simone, vous devriez visiter cette Bglise toute seule.
charges de dorure. Tout le fond 5tait pris depuis le sol
— Quelle i d' ? Toutefois 1'i d ' 6t an t incomprehensible ou non, elle eut en fait la curiosity d'y entrer seule et nous 1'attendimes dans la r u e.
C inq minutes apres Simone rdapparaissait sur le seuil de 1'dglise. Nous restames tout a. fait stupides : non seulement e lle dclatait de rire, mai s elle ne pouvait plus ni parler ni s'arreter, si bien que, moiti6 par contagion, moitie A cause de 1'extr6me lumiere, je commengai a rire presque autant et
mneme, jusqu'a un certain point, Sir Edmond.
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jusqu'a l a charpente par u n autel et par un dessus d'autel gdant de style baroque en bois dord : cet autel, a, force d'orne ments contourn6s et compliquks dvoquant 1'I nde, d'ombres profondes et d'dclats d' or, rne parut des 1'abord t res myst6 rieux et destind a faire 1'amour. A droite et a. gauche de l a p orte d'entree 6taient accroch6s deux cdlebres tableaux du peintre V aldes Leal repr6sentant des cadavres en decompo sition : chose notable, dans 1'orbite oculaire de 1'un d'entre eux, on voyai t entrer u n r at . M ai s dans toutes ces choses il n'y avait rien a, d6couvrir de comique. Au contraire rnerne, 1'ensemble 6tait somptueux et sensuel, l e jeu des ombres et de l a lumihre des rideaux rouges, l a frafcheur et une forte odeur poivr6e de laurier-rose en fleur en mneme temps que la robe colli e h la fourrure de Simone,
6o CE u vres comp/Pter de G. Bataille tout m e pr dparai t h lecher les chiens et h d6nuder l e cul mouilld sur les dalles, quand j 'apercus aupr B d 'u n confes sionnal les pieds chausses de souliers de soie d'une penitente. — Je veux les voir sor tir, nous di t Simone. E lle s'assit devant mo i no n loi n d u confessionnal et j e dus me contenter de lui caresser le cou, la racine des cheveux ou les dpaules avec ma verge. Et mneme elle en fut bi ent8t 6nerv6e, si bien qu'elle me dit que si je ne rentrais pas imm6 diatement l e membre, ell e l e br anlerai t jusqu'au foutre. Il me fallut done m'-asseoir et m e contenter de regarder la nudity de Simone a travers 1'etof f mouillde, I l a rigueur parfois a 1'ai r li bre, quand ell e voulai t dventer ses cuisses rnoites et qu'elle les d6croisait en soulevant la robe. — T u va s comprendre, m 'avait-ell e d i t . C' est pourquoi j 'attendais patiemment le mot de Pdnigme. Apres une assez longue attente, une trhs belle j eune femme brune sortit du confessionnal en j oignant les mains, le visage phle et extasi6 : ainsi l a at e en ar rier e et les yeux blancs rdvulsbs, elle traversa la salle h pas lents comme un spectre d'opera. C' 6tai t lh , e n effet , quelque chose de t ellement inattendu que je serrai les jambes avec ddsespoir pour ne pas rire quand la porte du confessionnal s'ouvr i t : il en sortit un nouveau personnage, cette fois un prktre blond, tres j eune, tres beau, avec un long visage maigre et les yeux pales d'un saint ; i l gardai t les bras crois6s sur l a poitrine et restait
debout sur le seuil de sa cabine, le regard dirigo' vers un point fixe du plafond comme si une apparition celeste allait 1'dlever au-dessus du sol. Le pretre s'avangait ainsi dans la mneme direction que l a fernme et i l aurai t pr obablernent dispar u a son tour sans rien voir , si Simone, a m a gr ande surprise, ne 1'avait pas brusquement arr&t6. Une i d ' in croyable lui dtai t venue a 1'esprit : elle salua correctement le visionnaire et lui dit qu'elle voulait se confesser. Le prhtre continuant a glisser dans son extase lui indiqua le confessionnal d'un geste distant et rentra dans son taber nacle en refermant doucement la porte sur lui sans mot dire.
La confession de Simone et la messe de Sir E dmond
Il n'est pas difficile d'imaginer m a stupeur quand j e vi s
Simone s'installer a, genoux auprhs de la gunite du lugubre confesseur. Pendant qu'ell e se confessait, j ' attendai s avec un i nt6rht extraordinaire ce qu i allai t rdsulter d'un geste aussi imprdvu. Je supposais d6jh que cet 6tre sordide allait jaillir de sa boIte et se j eter sur 1'impie pour la Qageller. Je m'apprktais meme a. renverser et a pietiner 1'affreux fant6me, m ais rien de semblable n'arrivai t : l a boIte restait f e r ne , Simone parlait longuement a la petite fenetre gri l l e et il ne se passait rien d'autre. J'6changeais de s regards d'extr6m e i nterrogation ave c S ir Edmond quand les choses commenchrent a se dessiner ; p eu a pe u S imon e s e gr attai t l a cuisse, r emu ait l e s jambes; gardant u n genou sur l e prie-Dieu , elle. avangait un pied e n t e rre, el l e d6couvrai t d e plu s e n plu s ses jambes au-dessus des bas, tout en continuant l a confession v oi x basse. I l m e semblai t m em e parfoi s qu'ell e se branlait. Je m'approchai doucement par c8t6 pour essayer de me rendre compte de ce qu i se passait : e n effet , Simone se branlait, le visage coll ' h gauche contre la grille pc s de la ate ,d u pr6tre, les membres tendus, les cuisses dcart6es, les doigts fouillaient profond6ment l a fourrure; j e p ouvais l a t oucher, j e d6nudai un instant son cul . A ce moment-lh, j e 1 'entendis distinctement prononcer :
— Mon padre, je n'ai pas encore dit le plus coupable. Quelques secondes d e silence. — L e plus coupable, c' est tres simple, c' est que j e m e branle en vous parlant .
6z 4E uvres completes de G. Bataille Nouvelles secondes de chuchotement a 1'interieur , enfin p resque h voi x hau t e : — Si vous ne croyez pas, je peux montrer. Et en effet S imone se leva, cart a u ne cuisse devant 1'ceil
de la guni t e en se branlant d'une main sure et rapide. — E h bi en , curd, cri a Simone, e n frappant a gr ands coups contre le confessionnal, qu'est-ce que tu fais dans la baraque? Est-ce que tu te branles, toi aussi ? Mai s le confessionnal restai t muet. — A lors j'ouvre. Et Simone tir a l a porte. A Pi ntdrieur, l e visionnaire debout, l a t 6te basse, epon geait un front ddgouttant de sueur. La j eune fille chercha sa verge par-dessous la soutane: il ne broncha pas. Elle retroussa 1'iinmonde jupe noire et fit j aillir cette longue verge rose et dur e : i l ne fit que r ej eter sa tete pench6e en arriere avec une grimace et un sifllement entre les dents, mais i l l aissa faire Simone qui s'enfongait l a bestialitd dans la bouche et la sugait a, longs traits. Nous 6tions rest6s Sir E dmond e t m oi f rappds d e s tu p eur e t i mmobiles. Pou r mo n compte, 1'admiration me clouait sur place et j e ne savais plus quoi faire quand Pdnig matique Anglais s'avanga rbsolument vers le confessionna,l et apres avoir ecarte Simone aussi ddlicatement que possible, arracha par un poignet la larve de son trou et Pdtendit bruta lement sur les dalles h nos pieds : 1'ignoble pretre gisait ainsi qu'un cadavre, les dents contre le sol sans avoir pousse un cri. I l fut transports aussit6t a bras jusque dans la sacristie. Il 6tai t reste d6braguett6, l a queue pendante, l e visage livide et couver t d e sueur, i l n e r6sistait pas et respirait pdniblement ; nou s 1'installames dans u n gr an d fauteuil de bois aux formes architecturales. — Senores, prononqait le miserable larmoyant, vous croyez peut-&tre que je suis un hypocrite. — N on, rhpliqua Sir Edmond avec une intonation cate gorique. S imone lui demanda alor s : — Comment t'appelles-tu ? — D on A minado, rdpondit-il .
)">Histoire de l'ail 6 3 ~
L
Simone giGa cette charogne sacerdotale, ce qui fit rebander la charogne. On la ddpouilla entierement d e ses veternents sur lesquels Simone accroupie pissa comme une chienne. Ensuite Simone la branla et l a suga pendant que j 'urinais dans ses narines. Enfin, au comble de 1'exaltation a froid, 3 enculai Simone qui sugait vi olemment son vi t . Cependant Si r Edmond tout en contemplant cette scene avec so n visage caractdristique de hard l abour inspectait attentivement l a salle oil nous nous 6tions rdfugies. I l avisa une petite cld suspendue h un clou dans la boiserie. — Q u'est-ce que cette cia? demanda-t-il a Don A minado. A 1'expression d'effroi qu' il lu t sur l e visage du pr etre,
Sir Edmond reconnut la cid du tabes.a@le. v 'g ,I ~
j~~ + qui figure sur certaines * Contrairemen t h , 1' opinio n demise p a r D a ovxN (Le s m onnaies zodiaeales, p. a 7o) l e s r e pr6sentations d u z odiaque s ont r e lativement nombreuses dans 1'iconographi e xnusulmane. N ou s citerons u n m ir oir astrologique portant Ie nom d ' O urtouk-shah, sultan ortokite de K eifa de xzz5 h, ruing (cf. RaxNAvn, Description des rnonuments musulmans du due de Biaeas, t . I I , P arisy xSuSp in- 8, p . 4 o4-4uo e t p l. X ) ; u n e p la que d e
cuivre conserve au Cabinet des Mhdailles, provenant approximative ment de la mneme region et de la mneme 6poque que la prdcddente; une mini ature de l a collection K elekian publide sous le no 384 dans le Catalogue de /'Enposition d' art oriental, Chine, c apon, Perse, organis6e... x8, rue de la V i lle-PPveque, Paris, du 4 au 3x mai xgz5, s. 1. n. d., in-8o, hgalement du xxxxe siecle. The ?dzuk-i- j ahdngtrf, vo l, I I , p . 6 -7. L 'emp loi d cs douze signes isola sur une shirie mon6taire ne se retrouve que dans les bronzes d'A nto nin l c Pieux k Al exandrie sur lesquels on r encontre Bgalement l a figu ration du zodiaque entier comme sur les amulettes chinoises ou j aponaises dont les signes sont d'ai lleurs di f f e re nt. a* * Si 1'on excepte les monnaies d'Albi-ben-T im ourtash, sultan ortoki te
de Mardin, portant un sagittaire, qui d'ailleurs n'est pas forcomment un sign e d u zodiaque puisque l e solei l n' y es t pas j oi nt , l e seul sign e r eprdsent6 su r l es mounaies avan t Dj changi r es t celu i d u li on . O n l e
t rouve sur les pierce» d'argent du sultan seldjoukide d'Iconium ou il sexnble avoir 6th emplo y p ar l e souverain a ddfaut d e PeKgie de sa
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CEuvres completes de G. Bataille
m onnaies musulmanes et en particulier au revers des mohrs . h 1'effigie de Dj ehangir dates de zozo ou de zo24 de 1'hdgire,
alors que 1'innovation rapport ' dans les Mhtxoires ne remonte qu'au premier mois de la treizihrne anni e du regne du sou verai n (zoos A . H .-z6z8 A . C .) ; c' est l a dat e qu e porte la roupi e au belier qu i figur e au Cabinet de s M ddailles sous le no 69 et qui peut etre considdrde comme la premier e 6znission de monnaie au zodiaque. L 'indication donnee par Dj ehangir lui-mneme est precise et toutes les pieces zodiacales qui portent une date ant6rieure doivent Stre regard6es comme des imitations contemporaines ou non, I l faut ainsi regarder comme tel le no 5o [cf. pl. I ] du Cabinet des M ddailles sur lequel on li t zo26 coznme date de 1'hxxgire. I l es t possible h la rigueur de lir e zozg, ce qui concorderai t avec 1'annxxe du regne, z4, exprim6e au droit, toutefois il est h peu pc s sou qu' il y a 4 et non 9. Cette monnaie porterai t done une anomalie analogue a celle du no 62 qui port e zo34 et Q9. Dans les deux cas on serai t e n presence d'imitations trhs anciennes qu i r entreraient dans l a cattxgorie qu e Stanley Lane Poole a classde avec les monnaies authentiques comme v almost contemporar y i mitations » s'. Quan t au x roupies d'A gr a dat es d e zoz9, zozz, zoaz e t zo23 signaldes par Drouin +*, ce sont ainsi que toutes les pieces classdes comme favorit e n6e sous cett e constellation . Le li on a pparatt b gale me nt s ur des monnaies des I klhans M ongols, Ghazan, O ul dja'itou, Abou Said et de Moh ammed U zbek K han d e K h ip ch ak . Chez les M ongols de Samar cande et ensuite chez les Grands M ogols (comme auj ourd'hu i en Perse) il p araxt avoir servi norm al ement d'embi hme particulier (cf. S. H . H onx VAx.A, Portraits Muhrs of Dj ehangir, p. x 64-x66). Posthrieure me nt h I%mission de xo27, on trouve des figurations de signes du zodiaque sur des monnaies de bronze au nor d de 1'Inde et en Perse. O n ne trouve d'ai lleurs que l e lion , les poissons et l e taureau, concuremm en t avec des 61&phants, des chevau x e t de s oiseaux . Ce s m onnaies, a u xnoins dans un e cer taine m esure, on t dpi Str e i mitates d e celles des Grands M ogol s : ainsi u n e monnai e d e 1' I ra n d e x289 A . H . r eprdsentant un paon (Catalogue of coins of the shahs of Persia in the Bri tish i lfuseum, by R . S. Poor.E, Lo ndon, x 887, in -8 , A ntonomons Copper , n o 9) r eprodui t l a decoration d e l a monnaie au canard d 'A kbar (Bri tish Museum, no x 78). + Stanley LANE-Poox.E, 1h e coins of t he Mo ghul emperors, p . x.xx x m . as D r oui n qu i d onn e ce s monn sies comm e au thenti ques adm et Paflirmation d u colonel G e ntil (M m o i res sur t ' Indoustan, Pa ris, x 832,
p. 856) selon Iaquelle la premih'e monnaie zodiacale aurait dt's f rappe e n or et en argent l e j ou r anniversaire de l a naissance du ro i avec le signe du Cancer en xox8 A . H ., 4 du rogue. Cette afli rmation est contre dite par tous les documents contempor ains, et le fait que Gentil at tribuai t chaque signe du zodiaque h une anni e et non b un mois lui enleve tout e valeur .
Articles (Ardthuss) z z 9 imitations post6rieures sous les no' 8z h 96 [cf. pl. I ] (quelle que soit la liberty avec laquelle elles ont dt's copiees) de vxxri tables faux qui t6moignent de 1'intdrkt superstitieux qui a dt's continuelleznent portd aux monnaies zodiacales : ils dtaient destinds a servi r d e t alisznans porte-bonheur. Sans parler des croyances astrologiques communes au x Musulmans et aux H indous, tou t engageait a trouver dans ces pierres extraordinaires une vertu que rehaussait 1'eclat de tous les souvenirs du temps d'Akbar e t d e Dj ehangir , D es pieces beaucoup m oin s r emarquables t eiles qu e le s monnaies carrees au K alima d'Akbar ont l td grossi5rement mais littd ralement copiees, beaucoup plus tard, pour servi r a des musulmans d'amulettes pieuses. Il sujet d'ailleurs de jeter un coup d'ceil sur le monnayage postxxrieur a. Dj ehangi r pour se rendre compte du prestige que pouvaient garder aux yeux des I ndiens les znonnaies d 'Akbar et de son fils. De Shah-Dj ehan a Bahadour Shah I I la dtxcadence est rapide. I l fau t reconnaxtre de plus que si la collection du Cabinet des M ddailles est importante, au moins pa r l a quality, pour A kbar e t Dj ehangir , ell e est comme on le verra par le catalogue assez mediocre pour les successeurs. Elle a l t d composde pour la plus grande partie h un e 6poque o u o n at tribuai t beaucoup d 'intdret aux monnaies a fi guration, aucune au x au tres. L e 7ra it d des mottnaies de Bonneville ou l a collection f ranqaise est publitxe pour la premiere fois donne le dessin de quatorze des pieces z odiacales d' or qu i fi guren t dans l a collection actuel l e * . Elles excitaient dhs lors l a curiosity aussi bien en Europe que dans leur pays d'origine.
+ Zr aitd des monnaies d"or et d'argent, pa r P.-F. B oNNEvxLLE, Pa ris, xgo6, in-go, p. 209-2x 2, 220-22 x et pl. 2e des Indes Orientales. Les monnaies
publishes sont les noe 46, 48, 49, 52, 53, M , 56, 59, 6o, 62, 68, 6g et 6y
de l a collection actuelle. B onnevill e a p ubli c e n ou tr e un e curieuse medaille h, I'etfxgie d'A kb ar . Cette medaille d'argent de 44 m m . de dia mhtre devai t appartenir h l a collection de 1'auteur. Elle est certainement posthume, p ortan t l a d ate d e m ort. Le souverain y e st r eprdsentd e n buste de trois quarts a gauche dans un xumbe. L e revers porte le Ka li ma .
Articles (Ardthuse)
BAEELQN (Jean). La Medaille et les mddailleurs. P aris, Payot, I 927~ 234 p ~ 32 pl B ien q u' ell e const i t u e u n « ar t au t onor n e »
e t ex p r i rn e
ce qu'aucune autre ceuvre d' art ne peut exprirner, la medaille n' avai t pas dt's 1'objet jusqu'ici d'un ouvrage gbndral. Fried laender et plus rdcemment M M . G. F. Hill et Georg H abich ont expose 1'ensemble de nos connaissances sur les medailles i taliennes ou su r l e s mddailles d e l a R enaissance. M ai s
M. J. B. est le premier qui ait tent5 de repr6senter dans un seul volume cette sorte de « mi crocosme » que rdaliserait un mddaillier rassemblan t tout e 1'ceuvr e de s mddailleurs depuis Pisanello jusqu'a, nos jours. Le caractere spdcifique de la medaille oh la «valeur plas tique du type » se trouve unie a la «portee intellectuelle du s ymbole » , se tr ouv e ainsi Inis en r eli ef , no n seul em en t d an s
la forme primitive, propre a la. Renaissance italienne, mais en meme temps dans tous ses d6rivds. Et 1'histoir e de cet art se trouve n'avoir pas moins d'int6ret au point d e vue du developpement de la personnalitd hurnaine qu'h un point de vue strictement esthdtique. A 1'origine la piece de metal reprdsente a la fois les traits et 1'arne meme d'un personnage, traduce par l e symbole plus ou moins abstrus de Pimpresa du revers. Rien de plus brutal qu e cette expression a ses debuts : elle ne craint mneme pas de mettre en relief la laideur. Mais elle devient p1us tard un simple jeu sans force veritable. Et mneme a une dpoque ou on attache la plus grande irnpor tance a l a representation d u souverai n su r l e s mddailies, sous le regne de Louis X I V , le «gout pour 1'expression indi
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viduelle manqu e » : PeK gie du roi n'est plus qu'une « image immobi le ». Simple expression de la majesty et de la volonte de puissance du r oi , r emarque M . J . B., pent-6tre meme uniquement d6j h de la fonction ou du pouvoir royal pl utot q ue d'u n homme. Rvidemment cette transformation a eu lieu dans le sens de l a decadence, et 1'on pourrai t aj outer qu' il faut sans doute voir , dans la tendance de l a plupart d es hommes modernes a dissirnuler leu r personnalit d et ' a mettr e e n r elief l eu r fonction sociale, un e des raisons importantes d e l a m ddiocrit 6 r elativ e d e l a production actu elle. Tout en exposant cette evolution M . J . B. a dtudi6 m6ti culeusement l e ddveloppement concurrent de l a technique et d e 1'expression ar tistique, qu i s e trouvent etroitement likes. C' est ainsi que le tour a reduire a j oud, au cours de la p 6riode actuelle, u n r61e considerable et ndfaste. T ou t l e chapitre, entierement nouveau su r cett e derniere p6riode, est d'ailleurs extr6mement i nt6ressant et pr6sente des faits i m p or tant s a bi e n d e s dgar d s : i l s In etten t n ot amm en t en
lumiere les caracthres du ddveloppement primitif. Il faut enfin signaler ici le soin qui a ate apport6 a 1'illus tration de ce volume. Les cliches reproduits aux dimensions de 1'original on t dt' s ex6cut6s directernent d'apres les ori ginaux, sans passer par Pintermddiaire de moulages en platre. Le proc6dd a ltd di scus. M ais en presence des belles planches de 1'ouvrage de M. J. B., il faut abandonner toute hesitation. On peut meme dire que cette mdthode repr6sente un progres
technique important. I.es images sont plus praises et le reflet m dt al liqu e qu i caract6rise l a m edaill e l eu r donne P dclat indispensable.
Arfieles (Ardthuse) .F n
/Votes sur la numismatique des ICoushans et des Eoushan-shahs sassanides (A propos d'un don de M . Hackin au Cabinet des M ddailles)
L'histoire de l a Bactriane apres la conqu6te d'Alexandre est for t ma l corrnue. Des dynastes grecs y rdgnerent assez longtemps non sans d e nombreuses vicissitudes. I l s furent remplacds peu h peu h l a suit e de diverses invasions. D es S cythes, des Parthes, des H uns leu r succdderent. M ai s I peine quelques passa,ges d'historiens grecs ou chinois nous rappellent certains des bouleversements dont cette contrde fut l e thda.tre. Seules les monnaies nous fournissent d es renseignements nombreux su r l e s norns e t l a nationalit d des souverains, sur l a langue, 1'art, les traditions ou la reli gion des peuples maftres du pays. Elles perrnettent en parti culier d e d dterminer 1' dtablissement pui s l a d dcadence et l a disparition de la civilisation g recque dans la r dgion du globe la plus lointaine qu'ell e ai t atteinte. L'intdret de s trouvailles nurnismatiques faites dans l es diverses valldes de 1'Afghanistan est done particulierement imports,nt. C' est ainsi que 1'dtude d'un certain nombre de monnaies acquises par M . H ackin, au cours de sa mission au nord-ouest de 1'I nde et donndes par lu i a son retour, au Cabinet des M ddailles, nous a permis d'aborder u n des sujets les plus mal connus, en consdquence des plus intdres sants, de 1'histoire et de l a numisrnatique de cette rdgion.
Ce sont des monnaies des Koushans (en particulier ceiles des Shahanshahs K oushans sassanides) qu i r e prdsentent la partie la plus remarquable des acquisitions de M . Hackin.
Toutefois nous devons tout d'abord signaler ici un certain rrombre de monnaies plus anciennes : l eu r mention nous permettr a d'ailleurs d e r appeler dans ses gr andes lignes 1'histoire de cette rdgion depui s l a conqu0te d' Alexandr e jusqu' a 1'dpoque sassanide. L e s monnaies des roi s grecs se trouvent e n gran d nombr e a u nor d d e 1' I ndoukouch dans la vallde de Balkh (Bactriane) et au sud, dans la vallde de K aboul. C' est de 1'une ou 1'autre de ces valldes que pro viennent celles qui seront examindes ici. U n certain nombre de pihces reprdsentent ceux des rois qui semblent avoi r eu une puissance particulihr e et u n long reg n e : Eucratide, Hdliocles, Mdrrandre, Hermaios. Le premier, qui rdgna vers r75 av. J.-C., peut 6tre regardd comme le plus remarquable de ces souverains. Se s conquetes semblen t av oi r dtendu s on royaurne jusque dans l a rdgion du Pendj ab . I l pri t l e premier su r ses monnaies l e titr e de grand ro i. Celles-ci, q ui sont presque toutes &appdes a son effigie, sont fort bell es : sa piece d' or d e vingt st ateres, conservde au Cabinet des Mddailles, est non seulement 1'une des plus cdlebres, mai s 1'une des plus belles de 1'antiquite grecque. C'en est en tout
cas la plus grande. Nous n'avons I signaler ici aucune pierce exceptionnelle dmise par ce souverain. T outefois une imi tation inddite, d'un style for t barbare, de son obole au type du buste du roi casqud, peut etre donnde comme un tdmoi gnage curieux d'une longue survivance de prestige. Le revers, tres grossier, oRre encore une reprdsentation peu distincte des palmes des Dioscures (pl. [I I ] , no g). Des le milieu du rr~ siecle av. J.-C., des peuplades venues de 1'Asie centrale, connues par les historiens chinois sous le nom de T a Yue-tche, envahirent l a Bactriane proprernent dite au nor d de 1'Indou-Kouch, mais au sud, l a vallde de Kaboul, les Paropamisades et, a 1'est, les rdgions avoisinant 1'Indus rest6rent au x m ains des Grecs pendant plus d'un s iecle et leur dernier r oi , H ermaios, semble avoi r et d a l a tete d'une puissance assez importante. T outefois, alors que les monnaies d'Eucratide dtaient encore purement grecques, celles d'H ermaios reprdsentent le terme de 1'dvolution d'un style mondtaire particulier a cette contrde isolde du reste du monde grec, depuis 25o av. J .-C., c' est-h-dire depuis 1'dta blissement des Parthes dans 1' Iran . L a fabrication mneme est devenue gdndralement m ddiocr e e t i l faut regarder comme exceptionnels de beaux exemplaires de la monnaie
I 24 4Euores completes xk G . Bataxlle d 'argent de ce souverain, tel que celui du don Hackin (pl . I I , no r ) . A u r evers, 1'inscription en caracthre karoshti Ma ha rajasatratarasa Heramapasa correspond a u g rec B AXIAEQZ XQTHPOX EPMAIOY. Ell e es t d e regle, depui s longtemps,
sur toutes les monnaies de l a shirie, alors qu'k 1'6poque d'Eucratide, elle n'apparaissait guerre que sur les monnaies de bronze. Avec H ermaios disparatt l a domination grecque dans le nord-ouest de 1'I nde, mais non t outefois la tra dition, L e s Scythes, qui s'dtaient install& peu a peu dans la region de 1'Indus, les T a Yue-tche o u K oushans qu i s'emparhrent des Rtats d'H ermaios continuent ainsi le monnayage grec. Le type de leurs rnonnaies est tout d'abord le meme que celui des Grecs : double ldgende en caracteres grecs et karoshti, et gdndralement l a representation d'une divinit y grecque au revers. N otr e exemplair e a dt' s acquis par M . H ackin a Tach-K ourgan, c' est-a-dire dans une region d'ou le mon nayage d u m em e souverain provien t entierement e t qui
va de 1'Oxus mneme au nord jusqu'aux versants sud du Caucase indien.
La m onnaie a deja dt's 1'objet d'une abondante literature*: en dernier lieu l e colonel A llotte de L a Fuye 1'a 6tudide en
detail dans la shirie d'articles qu' il a consacrds a des mon naies incertaines de l a Sogdiane et des contrdes voisines*n. Cette piece rare, auj ourd'hui reprdsentee au British Museum par sept exemplaires, est dgalernent curieuse pour l a beaxitd barbare de son style et pour le caractere exceptionnel de sa ldgende. Celle-ci pr6sente de grandes difficulties de lecture. On li t su r l a monnai e reproduite pl.-[I I ] ,.no 4 : e n hau t, en cercle, TYIANNQYNT... et en bas sur deux lignes ANA- BOY~)...OIIANOY (seule, l a lectur e d u B d'ANABOY extant douteuse). V oici rnaintenant l a lecture des exemplaires du B ritish Museum :
r) TYIANNOYNTOZ HIAOY](XAVlAB()KOIIANOY. (C' est la lec ture donnee par P. Gardner dans son Catalogue d'apres le seul t dtradrachme al or s en collecti on : tr oi s d'entr e eux doivent auj ourd'hui Stre lus identiquement.) a) Comme r , mais ZANAQB. o L a bibliographic se trouve dans Rapson, Indian Coins. ao Colonel Axx.oTTa nE La Fox y , Mo nnaies incertaines de la Sogdiane et des contrees voisines, a p a rt ie, dans Revue Ãurnismatique, xga5, p. 8 6-@x,
et xgxo, pl. II I, x8 B.
Arts'eles (Ardthuse)
IQ5
3) Comme r , mais HAIQY.
sl) TYIANNQYQYHXQAQY~)ZAZABIY~ (...QIrIANQY. 5) Comme r, mais TYIANNQTOYOZ HAQY.
On remarquera que les plus saillantes difficulties qui rttsultent de ces divergences sont rdductibles I des rdpdtitions oxi cx des interversions errondes de lettres ou de groupes de lettres et que, selon toute vraisemblance, la ldgende du no r doi t etr e tenue pour originale. D e plus, l a fr equence des
confusions engage a affirmer que les difficulties d'interprxx tation de certains signes ne r&ultent pas de notre ignorance
actuelle mais de 1'imperfection belle de la Hgende. On en est done r6duit h une grande liberty pour l a lecture de ces signes et i l p aratt i mpossible d e continuer a discuter sur
de vaguesparticularities de forme. Les quelques oboles dmises par le meme souverain qui sont parvenues jusqu'a nous ne facilitent pas la solution du .pro bleme. Cell e qu i nous est p arvenue avec l e don H ackin (pl. [I I ] , n o a ) p or t e nettement IAIOY KOIIANOY. D eux exemplaires d u Br i tish Museu m semblen t p orter HIAQY mais ils sont peu distincts. U n autre porte IAIQY sans qu'on puisse 6tre certai n comme pour l e notre, que le premier jambage est 1'initiale du mot. U n autre enfi n HIIAQ. T oute fois le colonel Allotte de L a Fuye se r6fere a Cunningham s' pour afBrmer que le nom sur les oboles est lisiblernent 6crit MIAIUS ou MIAUS. M ai s i l suffit d e s e r eporter soi t aux monnaies elles-mkmes, soit aux photographies publiees par Cunningham pou r r econnaltr e qu e 1' M n'est qu 'une des nombreuses lectures douteuses auxquelles on est r6duit pour '1'interpretation d 'un e l dgende aussi incorrecte. D e plus, il y a lieu de remarquer slue sur les exemplaires les plus clairs et les mieux conservxxs du txctradrachme, 1'initiale du nom
est un H rbgulierement forrnal. - Quant a, la tres rare monnaie de bronze qu' il faut attribuer au mneme souverain, ell e n'est d'aucun secours dans cette circonstance. Au droit la idgende, autour d'un buste analogue a ceux du t6tradrachme et de 1'obole, est a peu pres illisibl e :
Cunningham a cru ddchiffrer TYPAN... et KOIC... mais i l n e faudrait pas exag5rer l a v aleur d e cette lecture. A u revers figure le roi I cheval et , semble-t-il, une legende en caracteres karoshti r est e absolument i nddchiffrable.
~ A . CoNNxxcoHAM, Co ins o f t he I nde-sythian k in g M i a its o r H e raus,
dans numismatic Chronicle, x888, p. yy-58 et pl. I IL
126 Cw v res completes de G. Bataille
Articles (grctthuse)
127
Si 1'on s'efforce cependant d'dtablir des donndes touchant cette obscure lkgende, dt an t admis qu'on peu t l i brernent interpreter I par P ou par I (comme cela r 6 ulte de la n«tces sittt d e l i r e TYPANNOYNTOZ), on p eu t admettr e comme plus vraisemblable qu'une autre la lecture suivante : TYPAN NOYNTOZ HPAOY ZANABOY KOPPANOY. Bien entendu H eraiis ne peut htre donnd pour autre chose q u'une lecture assez glndralement admise, commode et un peu plus probable qu'une aut r e : l e nom du souverain est impossible a determiner exacternent. M ais cette incertitude particulier e es t pe u i mportante. L a discussion t ouchant l a l ectur e ZANA BOY KOPPANOY passe dvidemment au premier pl an . I l s'agi t e n effet de determiner autan t que possible a 1'aide de ces deux mots h quel groupe appartient cet obscur monnayage. Il a dt's gdndralement admis depuis Oldenberg * qu'H eraiis 6tait u n Saka, c' est-a-dire u n Scythe. C' est par Z AKA e n effet qu'on a interprets le mot qu' I la suite de Cunningham, nous crayons devoir l ir e ZANABOY. M ais, de plus, Olden berg, lisant comme nous KOPPANOY, interpr5ta le premier ce rnot par K oushan. I l en r«csulta la croyance a un pretendu prince Saka-K oushan, c' est-a;dire a l a fois Scythe et Y ue tche qui aurait r6gn6 au 1er siecle dans le sud de la Sogdiane et en Bactriane. Et Phypothhse vient d' etre reprise et d6ve loppde brillamment par le savant colonel Allotte de La I"uye. Toutefois, l a lecture ZAKA, ddfendue par Percy-Gardner«.«, r epose sur deux conj ectur es : 1o le M doit etre tenu pour la forme rdguliere du K, a quoi Cunningham a r6pondu qu'on t rouve couramment dans ce monnayage M pour N ; 2o l e B qui se trouve presque r dgulierement a pres Z AMA s era it utte lettre inscrite dans l e champ. M ai s si Percy Gardner avait eu en tr e les mains 1'exernplaire qui port e ZANABIY (pour ZANABOY croyons-nous), i l aurai t p u difficilement persister dans cette strange elimination du B. Or l a' lecture ZAKA doit etre n«ccessairement heart«ce s' il y a bien ZANAB«a+ avec sa variante prdsentant l a desinence grecque du g6nitif ZANABOY.
Reste h savoir ce que peut signifier ce mot strange « I think it probable, dit Cunningham, that the term may be intended to represent the native title of tsanpu or changu, «c hief » or «k i ng ».. . 7s ap u i s a contraction of 7semli-Ehutu-tanju «Heaven s son great » or « Great Son of Heaven », = Deva put a». Ce titre de tsanpu est exactement celui qui correspondait 1'autorit h suprem e chez l e s H iong-nou de s historiens chinois : on li t en effet dans le Heou Ha n chou de Fan-ye + qu'au debut du premier siecle,. 1'empereur de Chine abaissa en dignity le Chanpu des Hiong-nou en changeant son titre contre celui de roi-vassaL I l faut rapprocher de cette dignit«c de tsanpu celle dejabgou (en chinois hi-heou) qui lui est inf6rieure et ne ddsigne qu'un chef surbordonnd. Quoi qu' il en soit, i l n' y a pas lieu de mettre en doute 1'interprdtadon d e KOPPANQY pa r K oushan ++. C e mot correspond assez exactemen t 0 , KOP CAN, KOPCOAOY, KOPOMA ou XOPANCY qu i su r de s monnaies d e bronze h 1«cgende incorrecte de K adphises I (K ozoulo K adphises) et de K adaphes est traduit au r evers en arien par Eushana ou jt"hushanasa. On remarquera surtout q ue sur l a monnaie de K adaphes XOPANCY est suivi d e ZAOOY, mot auquel correspond 1'arien pavugasa et dans lequel on reconnaft juste ment le titre turc jab-gou, «c hef ». Et si 1'on ne retrouve pas l e titre ZAOOY dans les ldgendes grecques de Kadphises I " , du m oin s l e s 16gendes ariennes donnen t r dgulierement Lushana pavugasa. Le t i t re p cc«to«u«; (en a rien Ma harjaa)
«O ldenberg, dans Indian Antiquary, t8 8 t, p, 67. ** T he coins of t he Greek and Scythic K ings of B actria a nd India in the British 2IIIuseurn, L o ndon, t 8 86, i n-8o, p. xn vn . "* « l l es t Ev iden t qu e XA MAOB (no u du B ri tish M u seum) n 'est qu'un exempl air e en tre au tres des nombreuses inversions et omissions prdsentdes par les lbgendes de ce monnayage.
«« I l s'est employ«c h cette dpoque avec la valeur ch et ce n'est que plus tard, k partir de K anichlca, c' est-h«-dire, semble-'t-il, au n ' siecle de notre
n'a dt's employ par ce dernier que pour un seul type de monnaie probablement postdrieur xg). Nous avons fait figurer sur la planche jointe h cet article, des types mondtaires qu i se r 6partissent en d e nombreux siecles. On y a a jo ut6 d 'autre part q uelques raretds. C ' est pourquoi l e lecteur risqu e d e s e rendr e imparfaitement compte de ce que ces suites si peu di ffdrencides, ont d'uni forme, et somme tout e de d6cevant d u pur point de vue esth6tique. Les V dnitiens eux-memes durent souffri r de cette strange
pauvre' de leur numdraire. C' est 6videmment pour cette raison que les doges, h leur avhnement, prirent h tache de faire frapper des pieces de plaisir. Ces pieces dont l e nom d'oselle rappelle les distributions
de victuailles (des volailles) dont elles 6taient census tenir lieu , e t qu i Ovoquent l e s l argesses impdriales r omaines, ne sont pas tant des monnaies que des mddailles comm5mo ratives, Klles sont en tou t cas aussi vari e s e t pittoresques que les monnaies proprement dites semblent soumises a, une sorte de discipline imperturbable.
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Nous avons choisi pour les reproduire parmi les nombreux et beaux exemplaires rdunis par M . L e H ardelay, 1'oselle d'Aloys I Mocenigo x570-x577 (pl. [I l l j , no u5) repr&entant un schema d'dglise de style classique; celle de M are-Antonio Giustiniani , x68@-x688 (n ~ a7) poxtant a u r evers I'image de l a Piazzetta l e j ou r d e 1' avenement d u doge ; cell e
d'Aloys I V Mocenigo, x76g-x778 (no a6), i llustrate d'une schne composite o6 1'on voit le lion de saint M are traverser un pont au bor d de l a mer . Les series de jetons pour les pauvres (n0 z8) et de tesshres (no a4, tesshre pour le sel) completent la collection, en nous montrant l a vie v6nitienne sous un aspect populaire et non plus sous l a ri gide parur e des ornements officiels. Ce peu de mots suffira h faire saisir a nos lecteurs toute la valeur du don qui vient de nous etre fait, et leur permettra d e s'associer a 1'expression de notre gratitude. C e qui l e rend prdcieux, c' est non seulement l a valeur m athrielle de ces monnaies, dont beaucoup sont de la plus grande r ar er mais 1 intdret de s r enseignements qu'elles fournissent titre de documents d'histoire, enfin 1'erudition et la patience de celui qu i les a recueillies, Blevant ainsi u n monument qu'on ne saurait maintenant edi f i e r s' il dtait j etd bas et si, comme i l arrive souvent, les dldments, rassemblds I gr and effort, en 6taient dispers6s au jeu des encheres, La collection Le H ardelay aur a for t heureusement dchappd h ce peril, et c' est pour le plus grand bien de la science. A
Arhcles (Ardthnse)
15I
fi angaises d u su d pou r lesquelles 1'Histoire monetaire des coloniesfra@aises de Zay (Paris, z8ga) reste, malgre ses imper fections, 1'ouvrage l e plus important .
Signalons toutefois que, seul, le regrets W. H. Valentine a joint un e bi bliographi c h so n i ntroduction . Sans doute on retrouve, ga et lh, les principales rdfdrences, mais 1'on s'6tonne de voir le nom de Zay mis en cause pour 1'ouvrage citd ici, sans que cet ouvrage meme soit dnonc6. C' est la dvidemment une lacune sans importance: le recueil que M . A llan nous offre auj ourd'hui revu et compldt6 par ses soins est en rdalitd de nature I satisfaire toutes les exi gences des chercheurs. Catalogue of the coins in the Indian Museum. C alcutta. Vo l. I V : s ection I : Coins of Awadh, by C. J . Brown ; section I I : Coins of Mysore and miscellaneous coins of South I ndi a, by J . R . H enderson ; section I I I : Bombay , R aj putana and Central I ndia, by W . H . V alentine. Edited by John All an. Cet important recueil vient combler en partie une lacune considerable de 1'histoire numismatique de 1'Inde. A u cours d es xvnr8 et x i x ~ siecles, pendant tout e l a p6riode o6 l a puissance des Grands M ongols ddclina, oil , pa r l a suite, la domination anglaise s'affermit lentement, une multitude de petit s Stat s r etrouvan t un e i nddpendance d' ailleurs prdcaire, se remirent I frapper monnaie. I l en rbsulte une
varied considerable de types gdndralement difficiles h iden tifier. I l n'existait jusqu'ici d'autre ouvrage ghndral que celui d'un des auteurs du nouveau recueil, 7he copper coins of India de W. H . V alentine. M ais comme le titre lui-mneme 1'indique, cet ouvrage ne comprenait ni 1'or ni 1'argent. M alheureusement l e catalogue ddit 6 pa r l e s soins de M. J. Allan n'est pas complet et ne comprend ni les monnaies du Bengale, ni celles des Sikhs. I l n'en rendra pas moins les plus importants services a tous les chercheurs que ne d6cou rage pas 1'extraordinaire complexit y des diverses omissions
mon6taires hindoues. Des descriptions completes et praises, une disposition typographique extr6mement cl aire, d'abon dants index font de cet ouvrage un manuel des plus commodes.
Nous devons done regretter d'autant plus l a pauvre' relative de certaines series, notamment cell e des omissions
Articks
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Le Cuzco dtait en effet le silage de 1'un des Stats les plus
L'cfm$rique disParue
La vie des peuples civilised de PAmdrique avant Christophe Colomb n'est pas seulement prodigieuse pour nous du fait de l eur d6couverte e t d e leur di sparition instantan8es, mai s aussi parce que j amais sans doute plus sanglante excentricit6 n' a Std congue par l a ddmence humai ne : crimes continuels commis en plein soleil pour la seule satisfaction de cauchemars dbifids, phantasmes terrifiants! D e s r epas cannibales des pr6tres, des c6r6monies h cadavres et a r uisseaux de sang, plus qu'une aventur e historique 6voquent l e s aveuglantes d6bauches ddcrites par 1'illustre marquis de Sade. I l es t vra i qu e cett e observation concerne surtou t l e Mexique. Le Pdrou repr6sente peut-etre un singulier mirage, une incandescence d' or solaire, un eclat, une richesse trou b lan te : l a rkalit6 ne correspond pas a cette suggestion. L a capital e de 1'empir e I ncasique, l e Cuzco, 6tai t situate sur un pl ateau 6l evd au pied d'un e sorte d'acropole fortifide. Cette ville avait un caracthre de grandeur lourde et massive. De hautes maisons construites en c arr6s de r ocs 6 normes, sans fen6tres ext6rieures, sans ornement e t couvertes en chaume, donnaient aux rues un aspect a dem i sordide et triste. L es temples qu i dominaient l es toits 6taien t d'une
architecture regalement nue: seul le fronton dtait entierement recouvert d'une plaque d' or repousse. A cet or il faut aj outer les 6toffes de couleurs brillantes dont les personnages riches et dldgants se couvraient, m ai s rien n e suffisait a dissiper une impression de sauvagerie mediocre et surtout d'unifor mit y abrutissante.
administratifs et les plus rdguliers que des hommes a ient form& . A la suite de conquhtes militaires importantes, dues h 1'organisation mdticuleuse d'une immense arm6e, le pouvoir de 1'Inca s'6tendait sur une region considerable de PAmdrique du Sud, Rquateur, P&ou, Bolivie, nord de 1'Argentine et du Chili . D ans ce domaine ouvert p ar d es routes, u n peuple entier obdissait au x or dres des fonctionnaires c omme o n obi t a ceux des officiers dans les casernes. Le travail 6tait r6parti, les mariages d6cidds par les fonctionnaires. L a terre et le s rdcoltes appartenaien t I 1 ' Etat . L e s r 6j ouissances 5taient les f6tes religieuses de 1'Rtat, T out se trouvai t prdvu dans une existence sans air . Cette organisation ne doi t pas 0tre confondue avec celle du communisme actu el : elle en diff'trai t essentiellement puisqu'elle r eposait su r 1'h6r6dit5 et la hi6rarchie des classes. Dans ces conditions, on ne s'6tonnera pas qu' il y ai t rela tivement peu de traits brillants h rapporter sur la civilisation incasique. M eme les horreurs sont peu frappantes au Cuzco. On btranglait a 1 'aide de lacets de rares victimes dans les temples, dans celui d u Soleil pa r exemple, dont l a statue d ' or massif, fondue d6s la conquete, garde malgrd tout un prestige magique. Les arts, b ien q u'assez brillants, n e p rd sentent cependant qu'un int6r6t de second ordr e : les tissus, les vases en forme de t etes humaines ou d'animaux sont remarquables. M ais c' est ailleurs que chez les Incas qu' il faut chercher dans cette cont r e une production vraiment digne d'int6r6t. A Tihuanaco, dans le nord de la Bolivie, la fameuse porte du Soleil tdmoigne d6jh d'une architecture et d'un art
prestigieux qu' il faut attribuer h une opaque trhs reculade. Des poteries, divers fragments, se rattachent par le style a cette
porte millionaire. Enfin, h 1'6poque mneme des Incas, ce sont les peuples de la cote, de civilisation plus ancienne, qui sont les auteurs des obj et s les plus curieux.
La Colombie, P Rquateur, P anama, l e s A n tilles p rAe n taient dgalement h Phpoque de la conqu6te des civilisations tri s ddveloppdes dont 1'ar t nous dtonne auj ourd'hui . C' est mneme aux peuples de ces regions qu' il faut attribuer une par tie importante des statuettes fantastiques, des visages de reve qui situent 1'art prdcolombien dans les preoccupations actuelles.
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CKuvres completes de G. Bataille
Toutefois, il faut imm6diatement pr aiser que rien dans 1 'Amdrique disparue n e peu t Stre, selon nous, dgal d au Mexique r egion dans laquelle i l f au t d' ailleurs distinguer deux civilisations for t diff6rentes, celle des M aya-Qu itchy et celle des Me xicains proprement d its. La civilisation des M aya-Qu'itchy passe en gdndral pour avoir dt's l a plus brillante et la plus int6ressante de toutes celles de 1'Amdrique disparue. En effet, ce sont probablement ses productions qui se rapprochent le plus de celles que les archdologues ont 1'habitude de donner comme remarquables. Elle s'est ddveloppde, a une dpoque ant6rieure de quelques siecles a l a conqu6te espagnole dans la region orientale de 1'Amdrique centrale, dans le sud du M exique actuel, exacte ment dans l a presqu'fl e du Y ucatan . Ell e dtai t e n pl eine
d6ch6ance lors de 1'arrive des Espagnols. L' ar t maya est certainement plus humain qu'aucun autre e n Am drique. Bi en qu' il n' y ai t ce rtainemen t pa s eu d'influence, i l est difficile de ne pas le rapprocher des arts contemporains d'Extr&me-Orient, de 1'art K hmer par exem p le, dont il a le caractere de v6g6tation lourde et luxuriant e : 1 'un et 1'autre se sont d'ailleurs ddveloppds sous un ciel de plomb dans des pays trop chauds et malsains. Les bas-reliefs mayas reprdsentent des dieux a forme hurnaine, mais lourde et monstrueuse, trhs stylisde, surtout tres uniforme. On pent les regarder comme tres d6coratifs. I l s faisaient, en effet,
partie d.'ensembles architecturaux assez prestigieux, qui ont permis les premiers de mettr e en r ivalitd les civilisations d 'Am perique avec le s grandes ci vilisations classiques. A Chichen-Itza, a U xmal , I Palenque, on ddcouvr e encore les ruines de temples et de palais imposants et parfois riche ment travaillds. On connalt, par ailleurs, les mythes religieux et 1'organisation sociale de ces peuples. Leur developpement a certainement e u un e grande influence et a d 6t ermind en grande partie l a civiiisation postdrieure des hauts pla teaux, mais leur art n'en a pas moins quelque chose de mort nd, de platement hideux en d6pit de l a perfection e t d e la r ichesse du travail . Si on veut 1'air et la violence, la po6sie et 1'humour, on ne les trouvera que chez les peuples du M exique central qui ont
atteint un haut degree de civilisation peu avant la conqulte, c' est-h-dire au cours du xv ' siecle. Sans doute les Mexicains qu'a trouve Cortes n'6taient que
Arkeles
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d es barbares rdcemment cultivbs. V enus du nord , o h i l s menaient l a vie errante des Peaux-Rouges, ils n'ont meme pas assimi16 d'une fanon brillante ce qu'il s on t empruntd a leurs prdddcesseurs. Ainsi leur s ysthme d'6criture analogue h celui des M ayas leur est cependant infdrieur. Peu impor t e ; entre les diver s I ndiens d 'Amdrique, l e peuple A zteque, dont la tr5s puissante conf6ddration s'est emparde de presque tout l e M exique actuel au cours du xv ' siecle, n'en est pas moins le plus vivant, le plus s6duisant, meme par sa violence d6mente, par sa ddmarche de somnambule. En gdndral, les historiens qui se sont occupes du M exique sont rest6s jusqu'h un certain point frapp6s d'incomprehen sion. Si 1'on tient compte, par exemple, de la maniere litt& ralement extravagante de repr&enter les dieux, les explica tions d6routent par l eur faiblesse. c L orsqu'on j ett e les yeu x su r u n manuscrit m exicain, di t Prescott, on est frappe d'y voir les plus grotesques cari catures du corps humain, des tates monstrueuses, dnormes, sur de petits corps rabougris, difformes, dont tous les contours s ont roides, anguleux ; mais, si 1'on y rqgarde de plus pcs , il devient cl ai r qu e c' est moins u n essai m aladroi t pour reprdsenter l a natur e qu'u n symbol e d e convention pour expriiner 1'idee de la mani&re la plus claire, la plus frappante.
C' est ainsi que les pieces de mnemevaleur dans un jeu d'6checs correspondent entre elles pour la forme, mais offrent d'ordi naire peu de ressemblance avec les objets qu'elles sont census r epr6senter. n Cette interpretation des d6formations horribles ou gro
tesques qui ont trouble Prescott nous parapet aujourd'hui i nsuffisante. T outefois, s i 1'on r emont e a. 1'8poque d e l a conqukte espagnole, on trouvera sur ce point une explica tion vraiment digne d'intdr6t. Le maine Torquemada attribue les horreurs de 1'art mexicain au daemon qui obs6dait 1'esprit des Indiens : « L e s figures de leurs dieux, dit -il , 6taient semblables a celles de leurs kmes pour le pdch6 dans lequel ils vivaient sans fin. n Un rapprochement s'impose 6videmment entre la fanon de repr&enter les diables chez les chr6tiens et les dieux chez les Mexicains. Les M exicains 6taien t probablement aussi religieux que les Espagnols, mais ils mklaient a l a religion u n sentiment d'horreur, de terreur, allid a une sorte d'humour noir encore
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C Kuores compl)tes de G. Bataille
plus effroyable qu e 1'horreur . L a pl upar t d e leur s dieux sont proces ou bizarrement malfaisants. Tezcatlipoca semble prendre un plaisir inexplicable h certaines « supercheri es ». Ses aventures rapport6es par le chroniqueur espagnol Sahagun forment une curieuse contrepartie de la L dgende doree. Au
miel chr6tien s'oppose l'aloes aztkque, a l a garison des malades, de sinistres plaisanteries. Tezcatlipoca se promhne a u milieu des foules en fo l i tran t e t e n dansant avec un tambour : les foules dansent en cohue et se pressent absur d6ment vers des abimes orr les corps s'6crasent et sont changes en rocher. U n autre «mauvais tour » du Dieu ndcromancien est ainsi rapport' par Sahagun : « Il plut une averse de pierres
et h leur suite un gros roc apped techcalt. A partir d e ce moment un e vieill e in dienne voyageait dans u n endroit appele Chapultepec cuitlapilco, off rant e n vente de petits dra peaux en papier en criant: "Aux petits drapeaux !" Quiconque p renai t l a resolution d e mouri r disai t : " A chetez-moi un petit drapeau" ; et, quand on le lui avait achetd, il se rendait h la place du techcalt, orr on le tuait sans que personne s'avisit de dir e : " Q u'est-ce done qui nous arriveP" Et tous 6taient pris comme de folie. » Il apparai t assez evident que les M exicains prenaient un plaisir trouble a ce genre de mystification. I l est meme pro bable que ces catastrophes de cauchemars les faisaient rire d'une certaine fanon. On est amend ainsi h comprendre direc tement des hallucinations aussi ddlirantes que les dieux des manuscrits. Croquemitaine ou Groquemor t sont des mots qui s'associent i ces violents personnages, mauvais plaisants sinistres, pleins d'humour malveillant, tel ce dieu Quetzal coatl faisant de grandes glissades du hau t des montagnes assis sur une petite planche...
Les demons sculptors des dglises d'Europe leur seraient tout a fait comparables (ils participent sans aucun doute de la meme obsession essentielle) s'ils avaient aussi le caracthre de puissance, l a gr andeur des fant8rnes azteques, les plus sanglants de tous ceux qu i ont peupld les nuages terrestres. Sanglants au pied de la lettre, comme chacun sait. Pas un d'entre eux qu'on n'ai t Bclaboussd p6riodiquement de sang humain pour sa fete. Les chiffres cites varient : toutefois, on p eu ut admettre a que le nombre des victimes annuelles atteignait au bas mot plusieurs milliers dans la seule ville de M exico. L e pr6tre faisait maintenir un homme le ventre en 1'air, les reins
Articles
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cambri c sur une sorte de grande borne et lui ouvrait le tronc en le frappant violemrnent d'un coup de couteau de pierre brillante. L es os extant ainsi tranch6s, l e ccr.ur 6t ai t saisi a pleines mains dans 1'ouverture inondde de sang et arrachb violemrnent avec une habiletd et une promptitude telles que cette masse sanglante continuai t a palpiter organiquement p endant quelques secondes au-dessus de l a br aise rou ge : ensuite le cadavre rejet6 ddgringolait avec lourdeur jusqu'au bas d'un escalier. Enfin, le soir venu, tous les cadavres dtant dcorchds, ddpec6s et cuits, les pretres venaient les manger. Geux-ci ne se contentaient d'ailleurs pas toujours de s'inon der de sang, d'en inonder les murs du t emple, les idoles, les fleurs brillantes dont 1'autel dtai t encombr 6 : h certains sacrifices comportant 1'6corchement immddiat d e 1'homme frappe, l e pretre exalt s se couvrai t l e visage avec l a peau sanglante du visage et l e corps avec celle du corps. A insi revetu d e ce costume incroyable, i l p riai t son dieu avec ddlire. Mais c' est ici le lieu de prdciser avec insistance le caractere 6tonnamment heureux de ces horreurs. M exico n' dtait pas seulement le plus ruisselant des abattoirs a hommes, c'6tait aussi une ville riche, veritable Venise avec des canaux et des
passerelles, des temples ddcor8s et surtout de tres beaux jardins de fleurs. Mneme sur les eaux on cultivait les fleurs avec passion. O n en parai t les autels. Avant les sacrifices, on faisait danser les victimes « p ortant des colliers et des guirlandes de fleurs. I ls avaient aussi des rondaches fleuries e t des roseaux parfum6s qu'ils fumaient et sentaient tour a tour. » On imagine facilement les essaims de mouches qui devaient t ourbillonner dans l a sall e d u sacrifice quand l e sang y ruisselait. M irbeau, qui les revai t dej a pour son ja rd in des supplices, 6crivait q ue «dans ce milieu de fleurs et de parfums c ela n'dtai t ni repugnant, ni t errible ». La mort, pour les Azteques, n'dtait rien. Ils demandaient a leurs dieux non seulement de leur fair e recevoir l a m ort avec joie, mais mneme de les aider a y trouver du charme et de la douceur. I l s voulaient r egarder les dp6es et les flhches comme des gourmandises. Ces guerrier s f|rroces n'6taient cependant que des hommes affables et sociables comme tous les autres, aiman t a se r6unir pour boire et pour parl er . Il 6tai t ainsi d'usage courant dans les banquets azteques
r58 CE uvres completes de G. Bataille de s'enivrer avec Pun des divers stupdfiants dont ils usaient c ourarnm ent . '
Il sembl e qu' il y ai t e u chez ce peupl e d'un courage extraordinaire un godet de la mort exc6dant. I l s'est livre aux Espagnols en proie a une sorte de folie hypnotique. La victoire de Cortes n'est pas le fait de la force, mais bien plut8t d'un veritable envoutement. Comme si ces gens avaient vague
ment compris qu'arTivds h ce degree d'heureuse violence la seule issue 6tait, pour eux comme pour les victirnes avec lesquelles il s apaisaient les dieux folatres, une mor t subite
Je cheval acadknique
et te r r if ia nt e .
Eux-rnemes ont voulu jusqu'au bout servir de « spectacle» et de « theatre » a ces personnages fantasques, «servir a leur risque», a leur « divertissement ». C'est, en effet, ainsi qu'ils concevaient l eu r bizarr e agitation . Bizarr e e t pr6caire, puisqu'il s son t m ort a aussi brusquement qu 'u n rnsecte
En appar ence, rien dans 1'histoire du regne animal, simple succession de metamorphoses confondantes, ne rappeHe les determinations caract6ristiques d e 1'histoir e humaine, les tr ansformations d e l a philosophic, de s sciences, des conditions 6conomiques, les revolutions poHtiques ou r eli gieuses, les pdriodes de violence et d'aberration... D'ailleurs, ces changements historiques relevent en premier lieu de la liberty attribuee conventionnellement h. 1'homme, seul animal auquel on consente des hearts dans la conduite ou dans la
qu'on erase.
pen see. Il n'en es t
pa s m oins incontestable qu e cette 'liberty, d ont 1'homme se croit 1'unique expression, est aussi bien le fait d'u n animal quelconque, dont l a form e particuliere
exprime un choix gratuit entre des possibilities innombrables. Il n' importe pas, en effet, que cette forme soit r6p6tde iden tiquement pa r se s cong6neres : l a prodigieuse multipli city du cheval ou du tigre n'infirrne en rien la liberty de la decision obscure en l aquelle on peu t tr ouver l e principe de ce que ces etres sont en propre. Seule reste I dtablir , afin d'61iminer un e conception ar bitraire, un e commune m esure entr e les divergences des formes animales et l es determinations contradictoires qu i r enversent p hriodique ment les conditions d'existence des hommes.
On trouve, lides h pdvolution humaine, des alternances de formes plastiques analogues h celles que pr6sente, dans certains cas, I'evolution des forrnes naturelles. Ainsi, le style acad6mique ou classique s'opposant I tout ce qui est baroque, I ,
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4KIsvres completes de G. Bataille
dement ou barbare, ces deux categories radicaleznent dM 6 rentes correspondent parfois a. des stats sociaux contradictoires. Les styles pourraient 0tr e ainsi tenus pour 1'expression ou le symptome d'un stat de choses essentiel et , de l a mneme f anon, le s formes animales, qu i p euven t dgalement et re r6parties en formes acad61niques et d6mentes. Antdrieurement h l a conquete, l a civilisation des Gaulois dtait comparable a celle des peuplades actuelles de 1'Afrique Gentrale, repr& entant ainsi , a u poin t d e vu e social , une veritable antithkse de l a civilisation classique. I l es t facil e d'opposer au x conqu6tes syst6matiques des Grecs ou des Romains, les incursions incohdrentes et inutiles des Gaulois h travers 1'ItaHe ou la Grece et, en gdndral, a une constante faculty d'organisation, 1'instabilit y et 1'excitation sans issue. Tout ce qu i p eu t donner a. des hommes disciplines une conscience de valeur e t d'autorit6 officieHe : architecture, droit thdorique, science laique et l i t er at ure de gens de lettres, 6 tait restd ignor e des Gaulois qu i n e calculaient ri en , ne concevant aucun progres et laissant libre cours aux sugges ti ons imm6diates et a tout sentiment vi olent. Un fai t d' ordre plastique peut etre donnd comme rkpon dant exactement h cette opposition. Dhs le rve siecle avant
J.-C., les Gaulois, ayant utilisd pour leurs exchanges commer ciaux quelques monnaies import6es, ont commence a. frapper des omissions originales en copiant certains types grecs, et notamment des types portant au revers une representation d u cheval (ainsi les stateres d' or mac6doniens) [cf. p1. I V ] . Mais leurs imitations ne pr&entent pas seulement les d6for mations barbares habituelles resultant de l a maladresse du graveur . L e s chevaux d 6ments imagines pa r l e s diverses peuplades ne relevent pas tant d'u n d6faut technique que d'une extravagance positive, portant partout a ses conse quences le s plu s absurdes un e premier e i nterpretation sch6matique. Le rapport e ntre les deux e xpressions grecque et gauloise est d'autant plus significatif qu' il s'agi t de l a forme noble et correctement calculate des chevaux, animaux qui comptent a juste titre parmi les plus parfaits, les plus acad6miques, Il n' y a pas lieu d'hdsiter a dire a ce sujet, pour aussi para doxal que cela puisse sembler, que le cheval, situs par un e curieuse coincidence aux origines d' At ones , est 1'une des
expressions les plus accomplies de 1'idle, au m neme titre,
Articles (DocgmcIIts) p
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e m pl e qu e l a phIlosophIe platonIcIenne ou 1 archI
t
ecture de 1'Acropole. Et toute repro ' at otni edcet arnmal sen 0, 1'6poque o u e classi classique, peut etr e donnee comme ex alt non sans
e e x t an t,
fonde avec le e g nie helldnique. Les choses se passent, en effet, comme si le s formes d u corps aussi bien qu e les formes s ociales ou les formes de la pensee t d ' t e e n ai en t v er s un e sor t e d e perfection iddale de l aquelle toute valeur procdderait ; comme si 1'organisation progressive de ces formes cherchait a satisfaire peu a peu a 1'harmonic et ' 1 h ' 6 hi bles ue la l a philosophic h ilos e s que grecque tendait h, donner en p er Et en propr e aux i d' //es, extdrieurement h. des faits concrets. cre s. t touj ours est-il s -i que le peuple qui s'est le plus soumis au besoin de voir
des ides nobles et irrdvocables ruler et diriger le cours des c hoses, pouvai t aisdment tr aduir e sa h t i fi l e corps co s du d cheval : les corps hideux ou comiques de 1'araignde ou de 1'hippopotame n'auraient pas rdpondu h cette 616 d' esprit.
Les absurdities des peuples barbares sont en contradiction a
vec les arrogances scientifiques, les cauchemar s g om6triques, les chevaux-monstres imagines en Gaule avec le cheval acaddmique. L es sauvages auxquel s son t apparus ce s h t inca,pables a de r6duire une agitation burlesque et incoh6rente, u ne succession d'images violentes et horrib l es, aux gran es i e s directrices qu i donnent a des peuples ordonn6s l a conscience de 1'autoritd humaine, dtaient incapables aussi de discerner clairement l a valeur magique des formes r6gu
'eres figurines sur les monnaies qui leur 6taient parvenues. T outefois, un e correction e t un e i ntell i bi lit d f ' imp 'quant I'impossibility d'introduire des 6ldments absurdes, s 'opposaient a l eurs habitudes aussi bien qu'un reglern t ernentde p L'ce aux plaisirs de l a phgre. I l s'agissait, reg en fait, t out c e qu'avai t p aralysd n6cessairement l a con c ti i a liste des Grecs, laideur agressive, transports lids a la vue u sang ou a 1'horreur, hurlements d6mesurds c' est-a-d' ce qui nn'a aucun sens, aucune utility, n'introduisant ni espoir n i st ability, n e confdran t aucune autori t 5 : d a dislocation du cheval classique, parvenue en dernier li eu h l a frdndsie des formes, transgressa l a regl e et r dussit a
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7s,
CKrmres comPlktes de G. Bafaslie
Arti cles (Documents)
a i ym onstrueuse rdaliser 1'expression exact e d e l a m entalit e ces peuples vivant k la merci des suggestions. Les ignobles singes et gorilles dquidds des Gaulois, animaux aux mceurs i nnommables et combles de l aid e t f ' gran randioses ioses, prodiges renversants, r epr6senterent ainsi une 'ne, ur esque et affreuse r esponse definitiv de la nuit humain b 1 ff aux platitudes et aux arrogances des iddalistes.
cis' aboutissant aux tant ' 1'effroi de ce qui est informe e t i n' dd
'n ou p rdcisions de 1'animal humain ou du c hev al1; ;tantot, dans un s arboques et le s P l u s t umulte profond, les formese sl ep u 1 fccceurantes se succtfdant. T ous ous les es renversements qui paraissent ' en p r op r e appartenir e a' la vie huinaine ne seraient qu'un des a spects de cette rdvolte alternat e, osci'l lation rigoureuse se s oulevant avec des mouvements de co l hre et, si 1'on envisa e ui de s successions de revo a rbii trairement en un temps r8duit a l utions qui ont dur6 sans fin battaan t e t c u m an t com m e un e vague ans un j our d'orage,
I l faut assimiler 'acette opposition, apparernment 1'm'tff humaine, les oppositions dquivalentes a u champ dee1 'activity a donn6es dans 1'ensemble du regne animal . I l es t evident, a e s, e n effet, qu e certains monstres natur 1 et s1 qu araign6es, a nce o scur g o ori rilles es , h i ppopotames, o prdsentent une ressemblanc b e pro onde avec les inonstres imaginaires aulois, insultant -ci I l aa correction des animaux acad6miques comme ceux-ci m i ques Ainsi les for6ts pourrissantes et les du cheval entr e autres. au
e sens S ans doute il est difficileu'vr de esuiv 1 e ces d oscillations es . . ar a travers les avatars historique P oif s 'seu ement, , ainsi ' i pour les grandes invasions, il est ossible de une inc o r ence sans espoi r 1'einporter su r un e mdthode rationnelle d'organisation progressive. M ais les al 'ques repr sentent souvent le principal sympt6me e s grands renversements : ainsi pourrait-i l sem er b l aujo ur d'hui q ue rien ne se renverse s i l a n 6 t i p rinci ' ipe s de e a r monie rdguliere ne venait pas t6moi ner es
mar6cages croupis des tropiques reprendraient la response i nnommable a tout ce qu i su r t er re, e s t ahr m o ni eu x et u or 16 , a tout ce qui cherche a faire au rr6 g t i et ' p ar u n asPect me e s caves maisons c orrect. Et il en serait de mneme d e nos d oA se o s e cachent cachent e t se mangent des araign6es et encore des a utres repaires des ignominies na ure t 1es1 . . oCm m e si u ne horreur infecte dtai t l a contreparti e constante et inevitable
par , que cette negation r6cente a provoqu6 les plus violentes me s de 1'e xi st ence av ai en t 6t fc c oleres, comme si les bases mmmm
mises en cause d' autre part, que les choses se sont passages avec un e gravity encore mal soupgonnd esprit s tat d'es ri t parfaitement incompatible avec les conditions actuelles de la vi e humaine.
des formes Elevates de la vie aniinale. d'observer a ce sujet que les paldontologues E tt i' l importe im admettent qu e l e cheval actuel derive d e lourds pachy d ermes, derivation qu i p eu t 6tr e r approchfie d e cell e de p pp o r a u hideux singe anthropomorphe, Sans doute, i l es t d i ffi cil e d' fit re f ixf f,a'u suj et d des ancetres ' omme, au moins quant a e xacts du cheval ou d e 1'homm e tout t i, i '1n y a pas ' e u e mettre leur aspect ext6rieur ' toutefois e n doute le fait que certains aniinaux actuels h i o g,o rillpe r ee ntent r & , par r appor t a des animaux bien pro p ortionn6s, des formes primitives. Il y ad on cli'e u ' e situer 1 opposition 'o i ' envisage de 1'engendrant a 1'en end 8 d au f i l s et e dee repr6senter re r comme un fai t typique des fi ures u' n 6gout nausda nobles et d fclicates apparaissant h 1'issue d b o nond . .Que u s' il faut donner un e valeur ob'ective aux d ' s i opp os , a nature, proc6dant constamment r h 1u' n d e e n opposition violente par rapport ' n t r e eux, devr ai t 6tre repr6sent6e e n constante rdvolt e avec elle-mneme
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Articles (Documents)
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et studio R . P. doct. H enrici Florezi, M adrid, I77o, in-40, xLvxxx'-584 pp. Dans le manuscrit de Saint-Sever, cet ouvrage est prdc6dd d'u n t ableau gdndalogique de s personnages d e 1' histoire sainte, suivi du Gommentair e de saint Jerome sur D aniel , de deu x au tres traitors r eligieux e t d e quelques chartes du xx< siecle concernant 1'abbaye de Saint-Sever.
L'Apocaylpse de Saint-Sever
Manuscrit de la Bibliotheque Nationale, fonds latin 8878, 2 92 feuillets. H auteur , 37 cm ; l argeur , 28 cm . Entr d h l a Bibliotheque en x 7go, il avait appartenu au cardinal d'Escou bleau d.e Sourdis h la vente duquel i l fut adjug6 au prix de I5 l ivres. Ddcri t pa r L eopol d D elisle (Me langes de paldo
OR I G I N E E T D A T E
L' abb aye b hnddictin e d e Saint-Sever (sons-prefecture actuelle d u departement des L andes, su r 1'Adour ) a dt' s fonda en g63. L e rnanuscrit de l a Bibliotheque Nationale y a dt's exdcutd, peu apres la fondation, sous 1'abbatiat de G rdgoire d e M ontaner , c' est-I-dire de IO28 I xo72. U n e inscription sur l e frontispice donne, en e6et, son nom sous cet t e f o r m e : G R E G O R I U S AB BA NO B I L I S ~
graphie et de bibliographic, x88o) et par P hilippe Lauer (Les Fnluminures romanes, xg28).
TEXTE
Le texte principal de ce manuscrit (f