Le rachis cervical vieillissant
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Samy Benday...
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Le rachis cervical vieillissant
Springer Paris Berlin Heidelberg New York Hong Kong Londres Milan Tokyo
Samy Bendaya Jean-Claude Goussard
Le rachis cervical vieillissant
Samy Bendaya Rééducation neuro-orthopédique Hôpital Rothschild 33, boulevard Picpus 75012 Paris
Jean-Claude Goussard Médecine physique et de réadaptation 24, rue George-Sand 75016 Paris
ISBN : 978-2-287-99073-1 Springer Paris Berlin Heidelberg New York
© Springer-Verlag France, Paris, 2009 Imprimé en France Springer-Verlag France est membre du groupe Springer Science + Business Media Cet ouvrage est soumis au copyright. Tous droits réservés, notamment la reproduction et la représentation la traduction, la réimpression, l’exposé, la reproduction des illustrations et des tableaux, la transmission par voie d’enregistrement sonore ou visuel, la reproduction par microfilm ou tout autre moyen ainsi que la conservation des banques de données. La loi française sur le copyright du 9 septembre 1965 dans la version en vigueur n’autorise une reproduction intégrale ou partielle que dans certains cas, et en principe moyennant le paiement des droits. Toute représentation, reproduction, contrefaçon ou conservation dans une banque de données par quelque procédé que ce soit est sanctionné par la loi pénale sur le copyright. L’utilisation dans cet ouvrage de désignations, dénominations commerciales, marques de fabrique, etc. même sans spécification ne signifie pas que ces termes soient libres de la législation sur les marques de fabrique et la protection des marques et qu’ils puissent être utilisés par chacun. La maison d’édition décline toute responsabilité quant à l’exactitude des indications de dosage et des modes d’emplois. Dans chaque cas il incombe à l’usager de vérifier les informations données par comparaison à la littérature existante.
Maquette de couverture : Nadia Ouddane
Liste des auteurs
Bendaya Samy
Rééducation neuro-orthopédique Hôpital Rothschild (AP-HP) 33, boulevard Picpus 75571 Paris Cedex 12
Ben Salah Fatma Zohra
Service de médecine physique réadaptation fonctionnelle Institut national d’orthopédie M. Kassab, La Manouba Tunis Tunisie
Carzon Jacques
Expert près la cour d’Appel de Paris Médecine physique et de réadaptation Clinique du Landy 93400 Saint-Ouen
Claus Delphine
Service de médecine physique et réadaptation CHU Clermont-Ferrand Clermont Université Hôpital Nord BP 56 Route de Châteaugay 63118 Cébazat
Coudeyre Emmanuel
Service de médecine physique et réadaptation CHU Clermont-Ferrand Clermont Université Hôpital Nord BP 56 Route de Châteaugay 63118 Cébazat
Diverrez Jean-Paul
Service de neurologie American Hospital of Paris 63, boulevard Victor-Hugo BP 109 92200 Neuilly-sur-Seine
VI Le rachis cervical vieillissant Dziri Catherine
Service de médecine physique et réadaptation fonctionnelle Institut national d’orthopédie M. Kassab, La Manouba Tunis Tunisie
Fayad Fouad
Service de rééducation et de réadaptation de l’appareil locomoteur et pathologies du rachis Hôpital Cochin 75014 Paris Université Paris Descartes 27, rue du Faubourg Saint-Jacques 75679 Paris Cedex 16
Givron Pascale
Service de médecine physique et réadaptation CHU Clermont-Ferrand Clermont Université Hôpital Nord 63118 Cébazat
Goussard Jean-Claude
Médecine physique et de réadaptation 24, rue George-Sand 75016 Paris
Guerini Henri
Cabinet d’imagerie de l’appareil moteur 5, rue Alfred-Bruneau 75016 Paris
Hantkie Olivier
Service de neuro-orthopédie Hôpital Rothschild (AP-HP) 33, boulevard de Picpus 75571 Paris Cedex 12
Jeannin Philippe
2, rue de Civry 75016 Paris
Lassaux Anne
Unité d’évaluation et de traitement de la douleur Hôpital Rothschild (AP-HP) 33, boulevard de Picpus 75571 Paris Cedex 12
Liste des auteurs
VII
Lazennec Jean-Yves
Département de chirurgie orthopédique Hôpital Pitié-Salpêtrière 43, boulevard de l’Hôpital 75013 Paris UPMC Paris
Lecacheux Jean
Médecine physique et de réadaptation 55, rue Jean-Jaurès 27500 Pont-Audemer
Maaouia Rym
Service de médecine physique réadaptation fonctionnelle Institut national d’orthopédie M. Kassab, La Manouba Tunis Tunisie
Maigne Jean-Yves
Médecine physique et de réadaptation Hôtel-Dieu de Paris 1, place du Parvis Notre-Dame 75004 Paris
Mane Michèle
Service de neuro-orthopédie Hôpital Rothschild (AP-HP) 33, boulevard de Picpus 75571 Paris Cedex 12
Mathieu Philippe
Cabinet d’imagerie de l’appareil moteur 5, rue Alfred-Bruneau 75016 Paris
Messedi Nadra
Service de rhumatologie Institut national d’orthopédie M. Kassab, La Manouba Tunis Tunisie
Missaoui Besma
Service de rééducation neuro-orthopédique Hôpital national de Saint-Maurice 4, rue Val-d’Osne 94415 Saint-Maurice Cedex
VIII Le rachis cervical vieillissant Morvan Gérard
Cabinet d’imagerie de l’appareil moteur 5, rue Alfred-Bruneau 75016 Paris
Nys Alain
Médecine et biologie du sport Médecine physique et réadaptation American Hospital of Paris 63, boulevard Victor-Hugo BP 109 92200 Neuilly-sur-Seine
Pascal-Mousselard Hugues
Département de chirurgie orthopédique Hôpital Pitié-Salpêtrière 43, boulevard de l’Hôpital 75013 Paris UPMC Paris
Piquemal Marc
Casilla Correo 2899 Asunción Paraguay
Portero Pierre
Laboratoire des Interactions posture-mouvement Service de rééducation neuro-orthopédique Hôpital Rothschild (AP-HP) 33, boulevard de Picpus 75571 Paris Cedex 12
Rakotovao-Razafindramavo Edwige H
Service de rééducation fonctionnelle Hôpital Joseph-Rovahangy-Andrianavalona Antananarivo Madagascar
Rannou François
Service de rééducation et de réadaptation de l’appareil locomoteur et pathologies du rachis Hôpital Cochin 75014 Paris Université Paris Descartes 27, rue du Faubourg Saint-Jacques 75679 Paris Cedex 16
Liste dess au uteurs
Revel Michel
Service de rééducation et de réadaptation de l’appareil locomoteur et pathologies du rachis Hôpital Cochin 75014 Paris Université Paris Descartes 27, rue du Faubourg Saint-Jacques 75679 Paris Cedex 16
Rousseau Marc-Antoine
Département de chirurgie orthopédique Hôpital Pitié-Salpêtrière 43, boulevard de l’Hôpital 75013 Paris UPMC Paris
Sautreuil Patrick
Centre d’appareillage 10, avenue de Fontenay 94120 Fontenay-sous-Bois Service de rééducation neuro-orthopédique Hôpital Rothschild 33, boulevard de Picpus 75012 Paris
Thoumie Philippe
Centre national de référence Maladies musculaires rares, UPMC Inserm U731 service de rééducation neuro-orthopédique Hôpital Rothschild 33, boulevard Picpus 75012 Paris
Vandermeersch Thierry
Centre d’appareillage 10, avenue de Fontenay 94120 Fontenay-sous-Boy
Vuillemin Valérie
Cabinet d’imagerie de l’appareil moteur 5, rue Alfred-Bruneau 75016 Paris
Wybier Marc
Cabinet d’imagerie de l’appareil moteur 5, rue Alfred-Bruneau 75016 Paris
IX
X
Le rachis cervical vieillissant
Zahar Maher
Orthodontiste Centre Phénicia Avenue Habib-Bourguiba La Marsa Tunisie
SOMMAIRE
Examen programmé du cou ...................................................................................................
1
J. Lecacheux
Évaluation instrumentale de la mobilité et de la force musculaire du rachis cervical - Applications cliniques ......................... 21 P. Portero
Place de l’exploration neurophysiologique dans les atteintes dégénératives du rachis cervical ........................................................................................ 31 J.-P. Diverrez
Particularités de l’imagerie du rachis cervical vieillissant ................ 37 P. Mathieu, G. Morvan, M. Wybier, V. Vuillemin et H. Guerini
Pièges diagnostiques des cervicalgies du sujet âgé
.....................................
59
A. Nys
Les camptocormies cervicales .............................................................................................. 75 S. Bendaya, B. Missaoui, M. Mane, O. Hantkie et P. Thoumie
Indications, stratégies et techniques de la chirurgie pour le traitement du rachis cervical dégénératif ....................................... 91 J.-Y. Lazennec, M.A. Rousseau et H. Pascal-Mousselard
Les infiltrations intradiscales cervicales : pourquoi et pour qui ? .................................................................................................................. 121 F. Rannou, F. Fayad et M. Revel
Peut-on manipuler un sujet âgé ? ..................................................................................... 125 J.-Y. Maigne
Le point sur les dernières recommandations dans la rééducation du rachis cervical ...................................................................... 127 E. Coudeyre, D. Claus et P. Givron
XII Le rachis cervical vieillissant Orthèses cervicales : descriptions techniques, indications, nomenclature ........................................................................................................................................... 135 P. Sautreuil, T. Vandermeersch, P. Thoumie, S. Bendaya, B. Missaoui et E.H. Rakotovao-Razafindramavo
Cervicalgies et acupuncture
...................................................................................................
151
P. Sautreuil, A. Lassaux, P. Thoumie, M. Piquemal et P. Jeannin
Problématique de l’expertise dans le cadre d’une atteinte traumatique du rachis cervical vieillissant .......................................................... 163 J. Carzon et J.-C. Goussard
Approche posturologique des cervicalgies rebelles ................................... 173 R. Maaouia, F.-Z. Ben Salah, C. Dziri, N. Messedi et M. Zahar
Examen programmé du cou J. Lecacheux
Introduction Le cahier des charges imposé à ce segment rachidien est particulièrement difficile : il faut porter la tête tout en assurant son importante mobilité et protéger le transit de l’artère vertébrale. Ces impératifs imposent un équipement musculaire performant, une configuration anatomique adaptée et une biomécanique subtile. Ces différents éléments dicteront les manœuvres d’exploration. C’est parcequ’il existe autant de procédés d’examen que d’écoles de rhumatologie ou de médecine manuelle qu’une tentative d’élaboration d’un algorithme diagnostique n’est pas inutile.
Algorithme diagnostique La démarche diagnostique consiste à dialoguer avec le patient pour récolter le maximum d’informations sur la pathologie. Puis, il faut retrouver le ou les éléments du cou qui souffrent par la palpation ou par l’appréciation des tensions ainsi que des limitations de mouvements. Ensuite, on évoque une origine qui permette de faire la synthèse des informations ainsi recueillies. Pour cela, on procédera à l’examen de la peau, des muscles et des tendons et on terminera en tentant d’objectiver une souffrance segmentaire vertébrale dont la mise en évidence reste difficile au niveau du cou.
Interrogatoire C’est une étape incontournable de l’examen pour plusieurs raisons. S’agit-il d’une cervicalgie commune ou d’une cervicalgie symptomatique ? En faveur de la seconde hypothèse, l’apparition récente, des antécédents traumatiques également récents et des signes associés, entre autres, neurologiques. Y a-t-il des antécédents médicaux ou traumatiques ? Dans quel climat évolue la douleur (inflammatoire ou mécanique) ? Existe-t-il une prise médicamenteuse qui pourrait déclencher des douleurs musculaires ou les potentialiser ? Quels sont les résultats des traitements déjà prescrits ? Dans quel contexte psychologique cette douleur évolue-t-elle ? Existe-t-il une « logique d’organe » ? (1)
2
Le rachis cervical vieillissant
Examen de la peau Les branches dorsales des nerfs rachidiens cervicaux commandent la motricité des muscles de la nuque et recueillent la sensibilité de la peau de la région (fig. 1) (2). La technique utilisée pour examiner la peau est, généralement, la technique du pincé-roulé. Friction du cuir chevelu, à la recherche d’une irritation du nerf occipitalis major : C2 (fig.2). Pincé-roulé de l’angle de la mandibule à la recherche d’une irritation du nerf auricularis magnus : C3 (fig. 3). Pincé-roulé du peaucier du cou, retrouvé, douloureux, dans les irritations du nerf transversus colli : C3 (fig. 4). Pincé-roulé du bord supérieur du relief du trapèze, sensible au cours de l’irritation du nerf supraclaviculares : C4 (fig. 5). Il faut parfois savoir s’éloigner du cou pour renseigner l’examen : pincé-roulé du moignon de l’épaule, à la recherche d’une irritation du nerf cutaneus brachii lateralis superior : C5 (fig. 6). Pincé-roulé du bord latéral du tiers proximal de l’avant-bras, à la recherche d’une irritation du nerf cutaneus antibrachii lateralis : C5-C6 (fig. 7). La dorsalgie inter-scapulaire ou « point cervical » de R. Maigne peut soulever quelques difficultés diagnostiques si sa technique de recherche n’est pas parfaite. En regard de T5 ou T6, à un ou deux centimètres de la ligne médiane, une pression ferme et continue de la pulpe du doigt révèle un point douloureux précis, qui reproduit la douleur du patient (fig. 8). À partir de ce point, le pincé-roulé révèle une zone cellulalgique plus ou moins étendue (fig. 9). Cette association semble traduire une souffrance du rachis cervical inférieur C5-C6-C7 (3).
Fig. 1 – Plexus cervical
Examen programmé du cou
Fig. 2 – Cuir chevelu.
Fig. 3 – Angle mâchoire.
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Le rachis cervical vieillissant
Fig. 4 – Peaucier du cou.
Fig. 5 – Cellulalgie C4.
Examen programmé du cou
Fig. 6 – Moignon d’épaule.
Fig. 7 – Cellulalgie avant-bras.
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Le rachis cervical vieillissant
Fig. 8 – Point interscapulaire.
Fig. 9 – Point cervical.
Examen programmé du cou
7
Examen des muscles Le grand oblique inférieur de la tête (rectus capitis inferior) est un rotateur homolatéral, innervé par la branche dorsale du premier nerf cervical (4). Il est très impliqué dans les déficits de rotation haute, il donne alors une sensation de résistance élastique au mouvement (fig. 10). Pour le palper, le pouce de l’examinateur part de l’épineuse de C2 et progresse latéralement en restant au même niveau, puis remonte en haut et en dedans pour croiser le corps musculaire, perpendiculairement. La contracture est très facile à percevoir, comparativement au côté opposé (fig. 11) (5). Le sterno-cléido-mastoïdien tourne la face vers le côté opposé et vers le haut, quand il agit seul. Quand ils agissent à deux, ils fléchissent le cou et tirent la tête vers l’avant. Son innervation est confiée au nerf accessoire (XI) et aux rameaux antérieurs du deuxième et, parfois, du troisième nerf cervical. Il donne des douleurs référées rétro-orbitaires et doit être systématiquement examiné dans les pathologies céphalalgiques (fig. 12). Le trapèze, dont l’innervation est identique, donne des douleurs référées rétro-auriculaires et temporales (6). Sa contracture perturbe les mouvements du cou et peut entretenir un torticolis (fig. 13). Comme nous l’avons fait pour la peau, s’éloigner un peu du cou peut apporter des informations intéressantes à l’examen. L’élévateur de la scapula, dont les insertions hautes se font sur les processus transverses des quatre premières vertèbres cervicales et les insertions basses sur l’angle supérieur de la scapula, est innervé par les branches dorsales des troisième et quatrième nerfs cervicaux. Sa contracture génère un torticolis invalidant. Les muscles grand et petit rhomboïdes, mobilisateurs d’omoplate, sont innervés par des branches venant de C4 et de C5. Leur examen fournit des renseignements sur le niveau de la souffrance cervicale (fig. 14). Devant une souffrance musculaire ou tendineuse de la ceinture scapulaire ou des membres supérieurs, il est indispensable qu’un temps de l’examen soit consacré à la recherche d’une origine cervicale et il est tout aussi important d’aller glaner en périphérie des éléments pour localiser précisément le niveau du cou qui souffre.
Fig. 10 – Muscle grand oblique d’après J. Travell et D. Simons.
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Le rachis cervical vieillissant
Fig. 11 – Palpé du grand oblique.
Fig. 12 – Palpé du SCM.
Examen programmé du cou
Fig. 13 – Palpé du trapèze.
Fig. 14 – Doigt supérieur sur l’angulaire ; deux doigts inférieurs sur le rhomboïde.
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10 Le rachis cervical vieillissant
Examen de la mobilité L’étude de la mobilité cervicale peut se faire sur un patient assis ou couché à plat dos. La position assise est choisie, du moins pour le début de l’examen. Elle permet de mettre le patient en confiance et de tester les mobilités actives. Une fois cette étape exécutée, on s’attachera à trouver les limitations douloureuses des mouvements. L’idéal est de faire reposer le patient contre son torse, en lui demandant de garder le regard horizontal et de l’examiner en se tenant au-dessus de lui (7). Pour être précise, l’étude de la flexion doit isoler les mouvements de la région cranio-rachidienne du reste du cou. L’amplitude totale de flexion-extension au niveau de C0-C1, CI-C2 est de 20 à 30° qui se répartissent équitablement entre la flexion et l’extension (3). L’action d’acquiescer traduit la flexion cranio-rachidienne (fig. 15). L’acquiescement-flexion explore la totalité de la flexion cervicale (fig. 16), c’est-à-dire environ 70°. L’extension s’apprécie également d’une façon précise, étage par étage, et le mouvement est guidé, d’une part par la main active mentonnière, et d’autre part par la main qui recueille les informations en se déplaçant, en même temps que le mouvement progresse, à la face postérieure du cou (figs. 17, 18 et 19). L’extension globale du cou est de 80°. Pour l’ensemble du rachis cervical, les mouvements de rotation sont symétriques et ont chacun une amplitude de 50°. Sachant que 25° sont assurés au niveau C1-C2, il est intéressant de pouvoir tester uniquement ce niveau. La manœuvre se déroule en quatre temps : acquiescement, flexion, impaction contre le thorax de l’examinateur et rotation, successivement à droite, puis à gauche (fig. 20) (5). L’étude de la rotation globale, mieux appréciée en se plaçant au-dessus du sujet, ne pose pas de problème particulier (fig. 21). Enfin, les inflexions latérales seront testées en individualisant ce qui revient au rachis cervical moyen et au rachis cervical inférieur (figs. 22 et 23). L’interprétation des résultats des recherches de limitations douloureuses ne se conçoit qu’en toute connaissance de la biomécanique du cou. Au niveau de la charnière cranio-rachidienne, l’étage C0-C1 assure exclusivement les mouvements de flexionextension (fig. 24). L’étage C1-C2 assure presque 50 % de l’amplitude totale de rotation du cou et quelques degrés de flexion extension (fig. 25). L’orientation des surfaces articulaires postérieures à partir de C3 et jusqu’à C7 fait que la rotation et l’inclinaison latérale sont homolatérales et indissociables (figs. 26 et 27). La lecture des résultats de l’examen se fait à l’aide de cette grille. Il y a donc un intérêt certain à localiser le plus précisément possible le mouvement étudié.
Examen programmé du cou
Fig. 15 – Acquiescement.
Fig. 16 – Acquiescement-flexion.
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12 Le rachis cervical vieillissant
Fig. 17 – Extension haute.
Fig. 18 – Extension moyenne.
Examen programmé du cou
Fig. 19 – Extension basse.
Fig. 20 – Rotation C1-C2.
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14 Le rachis cervical vieillissant
Fig. 21 – Rotation globale vue du dessus.
Fig. 22 – Latéro-flexion haute.
Examen programmé du cou
Fig. 23 – Latéro-flexion basse.
Fig. 24 – Occip. Atlas.
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16 Le rachis cervical vieillissant
Fig. 25 – Rotation atlas-axis. La rotation de la tête est effectuée par le segment atlanto-axoïdien (C1/2) entre la 1re et la 2e vertèbre. La dent de l’axis (1) joue le rôle d’un axe de rotation. Le ligament transverse (2) est un stabilisateur important.
Fig. 26 – Guide des vertèbres cervicales (orientation).
Examen programmé du cou
17
Fig. 27 – Rotations homolatérales.
Examen vertébral proprement dit Nous disions en introduction que l’examen segmentaire était difficile au niveau du cou pour trois raisons. D’abord, les vertèbres cervicales sont de petite taille, ensuite il existe au niveau cervical un équipement musculaire très développé qui protège le rachis, enfin la lordose cervicale éloigne les vertèbres de la main de l’examinateur. Là encore, il est conseillé de différencier l’examen de la charnière cranio-rachidienne du reste de l’examen du cou. Le repérage des apophyses transverses de l’atlas se fait patient en position assise, l’examinateur, placé derrière lui, place la pulpe de son médius entre la branche montante de la mandibule et le bord antérieur de la mastoïde (fig. 28). Il peut donc tester la mobilité des transverses de C1 au cours de la flexion et de l’extension, en évaluant la distance qui sépare les trois éléments en contact de la pulpe du médius, mandibule, transverse, mastoïde (fig. 29) (5). Le repérage de l’apophyse épineuse de C2 est facile, il s’agit du premier relief osseux palpé sur la ligne médiane, au-dessous de l’occiput. L’examen de la mobilité en rotation a été étudié dans le chapitre précédent (fig.20). Le prochain relief osseux palpé, sur la ligne médiane, au-dessous de l’occiput et qui ne se dérobe pas en extension, sera l’apophyse épineuse de C7. Entre ces deux vertèbres, seuls les reliefs des articulations postérieures sont perceptibles à la palpation d’une pulpe de médius, entraînée. Le patient est en décubitus dorsal, l’examinateur, à sa tête, pratique un glissé des pulpes des médius, le long des gouttières para-épineuses, de bas en haut, en va-et-vient, centimètre par centimètre (fig. 30) (8). Cette palpation va à la recherche de l’étage douloureux qui est ressenti sous la forme d’un gonflement de
18 Le rachis cervical vieillissant l’articulation, devenue sensible à la pression. La première articulation palpée sous l’occiput est l’articulation C2-C3. Nous devons cette technique d’examen à R. Maigne qui, pour valider sa méthode, recourait au bloc anesthésique péri-articulaire. La disparition de la douleur locale et des irradiations, à distance, apportait ainsi la preuve de la responsabilité du joint vertébral concerné. Quelques années plus tard, J.-Y. Maigne précisait que la douleur segmentaire, décrite précédemment, était présente à la fois en cas de souffrance discale ou en cas de souffrance articulaire postérieure (7).
Examen général À ce stade de l’examen, orienté par les résultats précédents, l’examinateur peut recourir à un complément d’informations qu’il trouvera dans la pratique d’un examen neurologique, d’un examen clinique général, d’un examen des articulations temporo-mandibulaires et de l’articulé dentaire, dont on connaît l’importante implication dans les souffrances de charnière cranio-rachidienne ou la pratique d’une imagerie. Dans tous les cas, c’est l’examen clinique qui décidera et, surtout, orientera le reste du bilan.
Fig. 28 – Transverse C1.
Examen programmé du cou
Fig. 29 – Examen C0-C1.
Fig. 30 – Palpation des articulaires postérieures.
19
20 Le rachis cervical vieillissant
Conclusion L’interrogatoire reste l’étape incontournable de cet examen programmé du cou, il orientera l’examen clinique. La biomécanique, très différente entre la charnière cranio-rachidienne et le reste du cou, impose une maîtrise technique des manœuvres d’examen, afin de bien les différencier. Enfin, la démarche qui consiste à retrouver l’élément qui souffre est plus que jamais indispensable puisqu’il renseigne avec précision sur le site d’origine du trouble. Quant aux manœuvres proposées pour explorer la mobilité du cou, une revue de la littérature leur accorde peu de reproductibilité inter-opérateurs, sauf si les examinateurs ont une formation identique et une bonne pratique de cet examen. En revanche, si l’on ne parle plus de trouble du mouvement mais de mise en tension douloureuse, les résultats sont meilleurs (9). Il est donc essentiel de mettre en évidence la douleur pour laquelle le patient consulte et de l’objectiver. Une exigence à laquelle seul l’examen palpatoire peut prétendre (10).
Références 1. Maigne JY (2001) Peut-on modéliser le mal de dos ? Les trois cercles de la douleur. Rev Méd Vertébrale 2: 16-21 2. Kahle W (1988) Anatomie Système nerveux. Paris, Flammarion Médecine-Science 3. Maigne R (1967) À propos du mécanisme de la douleur dans les dorsalgies dites des couturières. Le point inter-scapulo-vertébral. Rev Rhum 34 4. Piganiol G et al. (1987) Les manipulations vertébrales. Bases théoriques cliniques et biomécaniques. Dips, Dijon 5. Huguenin F (1991) Médecine orthopédique Médecine manuelle. Paris, Masson 6. Travel J, Simons D (1983) Myofascial pain and dysfunction – The trigger point manual. Williams & Wilkins Baltimore (USA) 7. Maigne JY (2003) Réflexion sur l’examen clinique du rachis cervical. Rev Maitrise orthopédique 125 8. Le Corre F, Rageot E (1991) Atlas de mobilisations et manipulations vertébrales. Paris, Masson 9. Brugnoni G, Martini S (2008) Reproductibilité interopérateur de quatre tests cliniques dans les cervicalgies communes. Rev Méd Manu Ostéo 25 10. Lecacheux J (2002) Principes de base des manipulations cervicales. Rev Méd Manu Ostéo 8
Évaluation instrumentale de la mobilité et de la force musculaire du rachis cervical Applications cliniques P. Portero
Introduction Les dysfonctionnements du rachis cervical sont extrêmement courants dans la population générale. Les cervicalgies communes, c’est-à-dire non secondaires à une cause organique particulière (infection, tumeur, affection rhumatismale inflammatoire, affection métabolique), sont les plus répandues, elles peuvent être d’origine traumatique, dégénérative ou ergonomique (maintien prolongé d’une posture ou répétitivité de la tâche). Leur prévalence est de 50 % aux États-Unis (1) et en France, une étude récente réalisée au sein d’une population active rapporte des cervicalgies chez 41 % des sujets au cours des 6 derniers mois (2). Pour une part importante de ces patients, l’évolution se fait vers la chronicité, les symptômes durant plus de 6 mois dans 30 % des cas (1). Pour toute pathologie affectant le rachis cervical, la fonction posturo-cinétique cervicale et les fonctions sensorielles (vision, équilibration, etc.) liées au placement de la tête dans l’espace sont perturbées. Lors de deux études récentes, l’incidence a été estimée à 18 pour 100000 habitants (3) et pour une cohorte étudiée en milieu professionnel en France à 7,3 et 12,5% des hommes et des femmes (4). Les conséquences socio-économiques sont importantes et ce, quels que soient les indicateurs utilisés (arrêt de travail et absentéisme, perte de production, recours aux soins, entrée en invalidité) (5-7). Aux États-Unis, le coût des cervicalgies post-traumatiques uniquement a été estimé à 3,75 milliards de dollars par an (5). Les patients cervicalgiques consultent leur médecin généraliste pour la prescription d’antalgiques mais aussi pour recevoir des conseils. Par ailleurs, environ 43 % d’entre eux s’assurent les soins d’un kinésithérapeute ou d’un chiropracteur (8). Récemment, Rat et Guillemin (9) ont souligné les conséquences des coûts indirects et directs et le fait que ces coûts soient attribués à une minorité de patients. En dépit de son incidence élevée, les dysfonctionnements cervicaux sont mal connus et peuvent présenter une difficulté en termes de diagnostic et de prise en charge par un manque de symptômes objectifs. La pathologie cervicale demeure complexe en termes de diagnostic et de traitement médical, ceci en raison des multiples symptômes subjectifs et du manque de critères objectifs qui la définissent (10). L’évaluation fonctionnelle du rachis cervical s’impose donc au même titre que l’évaluation des autres principales articulations de l’appareil
22 Le rachis cervical vieillissant locomoteur. Pour répondre à ce besoin, le développement de systèmes de mesure objectifs des capacités fonctionnelles spécifiques du rachis cervical apparaît nécessaire (8, 11). Les paramètres issus de l’analyse biomécanique (force, amplitude et vitesse de mouvement, etc.), comme ceux de l’activité électromyographique et de la morphologie musculaire, doivent participer à l’élaboration d’un tableau fonctionnel du rachis cervical dans son ensemble. Cet article se focalise sur l’évaluation de la mobilité cervicale (MC) et de la force des muscles cervicaux.
Évaluation de la mobilité cervicale L’évaluation des amplitudes articulaires de la colonne cervicale est habituelle dans l’examen clinique des patients cervicalgiques. Différentes méthodes existent, avec des degrés différents de précision et de reproductibilité. Actuellement, les professionnels de la santé devraient pouvoir disposer de moyens standards non invasifs, précis et reproductibles pour évaluer le rachis cervical dans plusieurs dimensions (12, 13). La mesure de la mobilité du rachis cervical est l’une des plus difficiles à réaliser étant donné le nombre d’articulations vertébrales et le manque de repères anatomiques précis. Il existe quatre groupes distincts de pathologies cervicales pour lesquels les modifications de la mobilité cervicale sont significatives : – celui impliquant les traumatismes du système ostéo-ligamentaire cervical ; – les pathologies dégénératives et inflammatoires cervicales ; – les pathologies neurologiques et congénitales ; – les troubles acquis associant douleur et limitation de mobilité. L’âge et le genre semblent être également deux facteurs impliqués dans la modification des amplitudes de mouvement. Dans une méta-analyse (14), il apparaît que dans la plupart des études les femmes possèdent une plus grande mobilité, cependant la différence de 2 à 4° n’est pas significative. L’âge a un effet délétère sur la mobilité cervicale, la réduction moyenne est de 4° par décennie quel que soit le genre (15). L’évaluation et le traitement de l’ensemble de ces pathologies nécessitent la mesure de la mobilité cervicale. La méthode la plus répandue de la mesure de la mobilité cervicale est visuelle. Bien que largement utilisée par les cliniciens, elle a été fortement remise en question. Dans un article de fond (16), la reproductibilité comparative de l’estimation visuelle, de la goniométrie classique et du système goniométrique CRoM (cervical range of motion) a été étudiée. Les résultats ont démontré la faible reproductibilité de l’évaluation visuelle et donc ils ont invalidé son utilisation en termes de méthode fiable de mesure. L’estimation linéaire de la mobilité cervicale par mètre-ruban est peu fiable, l’inconvénient majeur étant lié aux grandes variations de la morphologie humaine (17, 18). Les mesures angulaires peuvent être réalisées selon différentes méthodes : avec la première, classique, qui s’effectue à l’aide d’un goniomètre à deux branches, deux problèmes majeurs se posent, d’une part l’alignement de l’axe du goniomètre par rapport à l’« axe » de rotation du rachis cervical, et d’autre part le positionnement des
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branches du goniomètre par rapport à la tête et au thorax. Ces deux points majeurs font que l’utilisation du goniomètre à deux branches est problématique pour la mesure de la mobilité cervicale (15, 16). Les inclinomètres, ou goniomètres à gravité, sont des outils de mesure simples, faciles d’utilisation, précis, fiables et peu coûteux. Cependant, la validité de ces outils n’a pas fait l’objet de nombreuses études et leur validité semble modérée (19, 20). Par ailleurs, la marge d’erreur rapportée est importante (± 10°), ce qui rend contestable son utilisation clinique (21). Concernant les mesures avec le goniomètre CRoM, la reproductibilité des mesures est cliniquement satisfaisante (15), la plupart des études l’a déclaré comme étant un instrument de mesure de référence. Il est très fiable cependant lors de son évaluation inter-examinateurs avec des mouvements passifs, la fiabilité a été déterminée comme étant modérée (21). Ce résultat a été imputé au manque d’entraînement des examinateurs. Dans le plan sagittal, les résultats obtenus avec le goniomètre CRoM ont été aussi hautement corrélés aux mesures radiologiques (22). Enfin, un point sur l’évaluation de la mobilité cervicale serait incomplet sans les outils de mesures de la cinématique cervicale dans les trois dimensions et en temps réel. Ces systèmes fonctionnent selon le principe que le système de référence est fixé sur le thorax et/ou la colonne vertébrale, alors que le système de coordonnées mobiles est fixé sur la tête. Les différentes technologies disponibles ont été développées (électrogoniométrique, électromagnétique, ultrasonique) et ont amélioré l’enregistrement, l’analyse et l’interprétation des données de mobilité cervicale en offrant une haute précision de mesure (< 1°), en mesurant les mouvements couplés et en donnant accès à d’autres paramètres (e.g. vitesse, accélération, etc.). Ces systèmes sont fiables, ils permettent des mesures précises, reproductibles et valides, avec une faible marge d’erreur (21, 23-27). L’inconvénient majeur de ces systèmes dédiés est leur coût qui en limite leur utilisation. En conclusion, hormis les premiers outils, l’ensemble de ces autres moyens d’investigation permettent une évaluation correcte du rachis cervical en termes d’amplitudes de mouvement et de cinématique aussi bien chez des sujets sains que chez des patients cervicalgiques. D’un point de vue général, la principale limitation de l’ensemble de ces outils réside dans le fait qu’ils ne permettent qu’une évaluation globale du rachis et non segmentaire. D’un point de vue pratique, les choix techniques seront guidés par des objectifs cliniques (i.e. évaluation globale donnant les amplitudes) ou scientifiques (i.e. évaluation complexe donnant accès à la cinématique). Dans le premier cas, ce sont les outils simples (goniomètres et inclinomètres) qui seront utilisés alors que, dans le second cas, ce seront les systèmes plus sophistiqués utilisés en laboratoire explorant plutôt la cinématique tridimensionnelle cervicale (électrogoniomètres, systèmes ultrasons et électromagnétiques). Il persiste toujours un certain nombre de limites lié à la validité des méthodes car certains auteurs pensent que la meilleure façon de quantifier la mobilité cervicale est la mesure radiologique (19, 22), alors que pour de nombreux autres auteurs (13, 21, 26, 28), les méthodes de mesure précédemment citées présentent des garanties de validité et de fiabilité suffisantes pour être considérées comme des outils standardisés de référence.
24 Le rachis cervical vieillissant
Évaluation de la force musculaire cervicale Les 22 paires de muscles qui connectent la tête à la ceinture scapulaire assurent la mobilité et la posture du segment tête-cou. Leur rôle posturo-dynamique s’effectue à différents niveaux de contraction. L’intégration optimale de ce complexe musculaire est essentielle au fonctionnement normal de ce segment. S’il y a un dysfonctionnement, le tableau clinique typique des cervicalgies et des céphalées associe souvent douleur et fatigue musculaire (29). L’évaluation de la musculature cervicale peut être réalisée par imagerie (IRM, US, scanner), par électromyographie qui permet d’explorer la capacité d’activation en fonction d’un niveau de production de force et de la capacité à résister à la fatigue. Cependant, la plupart des études ne portent que sur une évaluation isométrique de la force et lorsqu’une analyse dynamique est proposée la force maximale n’est pas mesurée, les études reposant alors uniquement sur l’analyse des données électromyographiques (30). D’après de récentes revues de la littérature (31, 32), il ressort que l’évaluation de la force musculaire cervicale est réalisée le plus souvent en isométrique et pour les fonctions d’extension et/ou de flexion. Même si l’inclinaison latérale présente l’avantage d’évaluer simultanément les muscles antérieurs et postérieurs d’un même côté, cette fonction a été beaucoup moins explorée. De même, et en dépit de leurs rôles majeurs dans la coordination des mouvements (33), la force des rotateurs a été peu étudiée, probablement pour des raisons de sécurité lors des tests maximaux. À partir de l’analyse de la littérature, il est démontré que les valeurs de force pour les sujets sains présentent une grande variabilité. Plusieurs facteurs contribuent à cette variabilité et à la difficulté à comparer les études. Certains paramètres sont mesurés, d’autres calculés ou encore exprimés sous différentes unités (N, N.m, kPa, lbs, etc.). Par ailleurs, la grande disparité des protocoles de mesure et des types d’ergomètre – qui sont le plus souvent des systèmes de laboratoire « fait maison » – renforce la dispersion des données (11, 34). La position assise est la plus souvent utilisée pour l’évaluation des muscles cervicaux, elle est plus confortable et favorise une meilleure stabilité du tronc. La localisation précise de l’axe de rotation lors des différents mouvements cervicaux qui permet de mesurer ou calculer les couples de force représente également une difficulté. De même, la plus ou moins bonne stabilisation du tronc lors des tests permet d’expliquer les hautes valeurs de force exposées dans certaines études. À notre connaissance, il n’existe que deux dynamomètres commercialisables spécifiquement dédiés au rachis cervical qui permettent d’évaluer la musculature cervicale selon les trois plans de l’espace, le Multi cervical rehabilitation unit (Hanoun Medical, Canada) (35) et le DBC 140 (David Fitness and Medical, Helsinki, Finlande) (36). D’autres systèmes commercialement disponibles ont été également utilisés voire adaptés pour l’évaluation de la force cervicale en condition isométrique, d’une part les dynamomètres isocinétiques (Cybex®, Biodex®, Kin-com®) (37, 38) et, d’autre part, les dynamomètres manuels dont les études disponibles dans la littérature ont été réalisées sur un grand nombre de sujets (150 à 272) mais dont la fiabilité est faible (39, 40). En effet, le principal inconvénient est lié à la variabilité de la force qu’oppose l’expérimentateur (41).
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Les limites d’utilisation des dynamomètres à main sont équivalentes à celles de l’évaluation manuelle de la force (32). La technique isocinétique, quant à elle, est largement reconnue comme méthode standard pour l’évaluation de la fonction musculaire. Elle présente l’avantage de conditions standardisées en contrôlant la vitesse et l’amplitude du mouvement. Les travaux effectués sur ce système ont permis de mettre en évidence la bonne reproductibilité de la méthode et sa spécificité sur la plupart des grosses articulations, y compris le rachis thoraco-lombaire. Concernant le rachis cervical, les fabricants de matériel isocinétique ne proposent pas de système adaptable. Ceci est probablement lié à la vulnérabilité de la colonne cervicale. Il existe cependant quelques études sur l’évaluation isocinétique du rachis cervical réalisées par des chercheurs qui ont conçu eux-mêmes leurs propres systèmes. À partir du premier système conçu (37) qui ne permettait d’explorer que la fonction d’inclinaison latérale, la même équipe (42) et d’autres auteurs (43) ont développé un nouveau système permettant d’explorer en plus les fonctions de flexion, d’extension. Ces tests isocinétiques cervicaux sont réalisés avec l’axe du dynamomètre centré sur la jonction intervertébrale C7-T1, à une vitesse angulaire de 30°.s-1. Ces adaptations cervicales isocinétiques ont été validées et ont permis de caractériser l’adaptation des muscles cervicaux à l’augmentation de la demande fonctionnelle (43, 44). Malgré les très nombreuses études réalisées sur la force musculaire cervicale, le principal problème réside dans la reproductibilité des mesures. En effet, très peu d’études se sont intéressées de façon rigoureuse à la reproductibilité des mesures (45, 46). La force des muscles cervicaux peut être affectée par trois principaux facteurs, ce sont l’âge, le genre et le système de mesure. Peu d’études ont exploré la relation force-âge au niveau cervical. La plupart des résultats montrent une diminution de la force isométrique en flexion et extension aussi bien chez les hommes que chez les femmes (38, 40, 47). Cependant, la chute de force significative est discutable chez la femme (40), alors qu’elle semble retardée vers la 7e décennie chez l’homme (48). Concernant le genre, la plupart des études montre que de la 3e à la 6e décennie, les hommes développent une force maximale isométrique supérieure d’environ 40 % à celle des femmes, aussi bien en flexion qu’en extension (11, 38, 48), avec cependant une grande dispersion dans les résultats (49, 50). Enfin, bien que le système de mesure utilisé dans l’évaluation de la force musculaire cervicale soit d’un intérêt majeur, il ne semble pas exister, à notre connaissance, d’étude comparative à ce sujet, la raison majeure pouvant expliquer le grand écart des résultats est liée au système de mesure utilisé, indépendamment du protocole. En plus de ces facteurs potentiels pouvant affecter la reproductibilité des mesures, la situation de l’axe de rotation est mécaniquement fixe par rapport aux centres instantanés de rotation biologiques. Les travaux de Medendorp et al. (51) ont démontré, lors des mouvements dans le plan sagittal, la grande variabilité interindividuelle de la position de l’axe de rotation. De telles déviations des centres instantanés de rotation permettraient d’expliquer les grandes différences de résultats observées entre les études d’Olivier et Du Toit (43) et de Jordan et al. (48). D’autres points comme la protraction de la tête (mouvement linéaire) lors des efforts maximaux en flexion sont à considérer dans la compréhension de la variabilité des mesures. Enfin, la position du support de stabilisation
26 Le rachis cervical vieillissant thoracique a été récemment étudiée (52) montrant qu’en extension, en fonction de la hauteur du support, la valeur du couple isométrique produit allait de 34 à 53 Nm. Grâce à ces techniques d’évaluation et malgré la difficulté à comparer les résultats entre eux, certaines études réalisées chez des patients cervicalgiques montrent un déficit musculaire (29, 53) et que la mesure de la force isométrique est un moyen fonctionnel objectif qui permet de suivre l’évolution du patient (29, 34, 45, 54, 55). Il a été démontré par ailleurs qu’un programme de rééducation incluant du renforcement musculaire pouvait compenser ce déficit musculaire, quelle que soit la fonction testée, réduire la douleur, et favoriser les activités de la vie quotidienne (8, 56-59). Malgré l’intérêt évident de la mesure de la force musculaire dans le suivi de l’adaptation à la variation de la demande fonctionnelle et des pathologies cervicales, l’étude de la littérature montre que la validité reste modérée (11, 34, 60) et qu’aucune étude traitant plus spécifiquement de la validité de ces appareils de mesure n’a été trouvée.
Conclusion L’évaluation de la mobilité et de la force cervicale est d’un intérêt majeur, en particulier dans le cadre de la prise en charge du patient cervicalgique et des sujets exposés à un risque cervical élevé (sports de contact par exemple). Cependant, comme le démontre la récente revue critique de la littérature de Bertuit et al. (60), il existe encore quelques insuffisances méthodologiques dans le domaine de l’évaluation cervicale, en particulier en termes de fiabilité et de validité. Pour les différentes raisons développées précédemment, les évaluations de la mobilité et de la force cervicale doivent être réalisées de façon critique. Les travaux futurs devraient s’attacher à développer la standardisation des tests afin de proposer aux cliniciens et aux chercheurs un gold standard.
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Place de l’exploration neurophysiologique dans les atteintes dégénératives du rachis cervical J.-P. Diverrez
Introduction L’exploration neurophysiologique permet d’évaluer les conséquences des atteintes dégénératives du rachis cervical sur les racines nerveuses. Ces atteintes sont à l’origine des névralgies cervico-brachiales. Au niveau du rachis cervical, elles prédominent sur les racines C6 et C7. Il peut s’agir aussi d’atteintes polyradiculaires, en particulier dans le cadre des canaux cervicaux rétrécis. Les atteintes neurogènes périphériques de ces racines peuvent être très variables : simple bloc de conduction ou atteinte axonale chronique sévère. L’exploration neurophysiologique a pour but de savoir tout d’abord si la douleur présentée par le patient est bien d’origine radiculaire, puis, le cas échéant, de préciser de quelle(s) racine(s) il s’agit (diagnostic topographique) et, enfin, d’indiquer le type et l’importance de cette atteinte (diagnostic lésionnel). Il permet également d’établir éventuellement un diagnostic différentiel avec, en particulier, une atteinte plexique ou tronculaire. Les conclusions de cet examen sont des éléments importants dans la conduite thérapeutique.
Principes de l’examen électromyographique (1) L’examen électromyographique comporte deux parties très différentes. L’examen de détection, qui se fait à l’aide d’une aiguille électrode implantée dans les différents muscles au cours d’une contraction volontaire maximale, permet d’établir le diagnostic topographique en se basant sur les mêmes principes que l’examen clinique. Il montre un éventuel « tracé neurogène périphérique » que l’on peut observer avant l’apparition clinique d’un déficit moteur. L’examen de stimulo-détection consiste à stimuler les nerfs en différents points de leurs trajets avec recueil sur le nerf lui-même ou sur un muscle distal, permettant ainsi de calculer les vitesses de conduction nerveuse motrice et sensitive, dont le ralentisse-
32 Le rachis cervical vieillissant ment permet de localiser un site de compression éventuel. L’amplitude et la morphologie des potentiels obtenus sont aussi des éléments intéressants pour l’analyse des résultats.
Rappel physiopathologique des nerfs périphériques (2) L’examen électromyographique peut distinguer deux types de lésion nerveuse apparaissant à la suite d’une compression ou d’un étirement d’un nerf périphérique.
Simple bloc de conduction ou neurapraxie Il ne donne pas lieu à une dénervation musculaire dans le territoire correspondant et l’évolution est rapidement et complètement favorable dès la levée de la compression.
Lésion axonale ou axonotmésis Elle est à l’origine d’une dénervation avec dégénérescence wallérienne, suivie d’une repousse axonale dont l’évolution est lente et incomplète, pouvant donc laisser des séquelles. Au cours d’une atteinte axonale, le muscle dénervé présente des contractions désynchronisées et spontanées à l’origine d’une activité de repos observable à l’examen de détection : fibrillation et potentiels lents de dénervation. Il faut savoir qu’un même déficit moteur peut correspondre à des atteintes lésionnelles très différentes : un bloc de conduction complet peut être à l’origine d’un déficit moteur complet alors qu’une atteinte axonale chronique déjà avancée peut ne pas entraîner de déficit moteur. En effet, ce qui importe, c’est le nombre d’axones fonctionnels : or un simple bloc de conduction suffit pour qu’un axone ne soit plus fonctionnel de la même façon qu’une atteinte axonale aiguë ou chronique. C’est pourquoi il est impossible de distinguer cliniquement le type de la lésion nerveuse dont les conséquences sont pourtant très différentes sur l’évolution et le pronostic de l’atteinte nerveuse. Il convient de rappeler l’importance des mécanismes de compensation : – Tout d’abord, l’augmentation de la fréquence de recrutement des unités motrices restant fonctionnelles peut être multipliée par quatre, permettant de compenser une perte axonale de l’ordre de 70 % de la normale. Le seul élément qui pourrait être apprécié cliniquement, cette compensation serait la fatigabilité musculaire qui nécessiterait un testing musculaire fastidieux. – L’autre mécanisme de compensation est la formation d’unités motrices géantes : lorsque, à la suite d’une lésion axonale, la repousse nerveuse est de mauvaise qualité, les axones restant fonctionnels réinnervent les unités motrices restant dénervées, augmentant ainsi la taille des unités motrices non atteintes qui peut ainsi être multipliée par cinq.
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Il faut savoir que l’atteinte sensitive est généralement au moins aussi importante, si ce n’est plus, que l’atteinte motrice au niveau lésionnel, alors que les phénomènes de compensation sont moindres.
Réalisation de l’examen électromyographique (3) Préalablement à l’examen électromyographique, il convient d’interroger le patient, en particulier sur le mode de survenue de sa douleur et ses facteurs déclenchants, la topographie de ses douleurs, l’existence éventuelle d’un syndrome rachidien et d’un syndrome dure-mérien. Il faut rechercher aussi d’éventuels troubles sphinctériens ainsi qu’une atteinte des membres inférieurs, en particulier des troubles de la marche. Cet interrogatoire doit être suivi d’un examen clinique habituel : observation d’un déficit moteur et sensitif, recherche d’une amyotrophie, examen des réflexes, observation de troubles trophiques éventuels, recherche de signes pyramidaux et autres signes pouvant orienter vers une atteinte centrale. Les examens d’imagerie doivent également être analysés. L’électromyogramme pourra alors être réalisé en fonction de l’orientation donnée par le résultat de l’examen clinique et de l’imagerie. En effet, la cohérence des résultats de l’examen électromyographique et de l’ensemble de ces données est nécessaire.
Résultat de l’examen électromyographique (4) Diagnostic positif Il convient dans un premier temps d’établir un diagnostic topographique. Celui-ci repose sur les mêmes données que l’examen clinique nécessitant donc de bien connaître la topographie radiculaire et tronculaire de l’ensemble des muscles du membre supérieur. Lorsqu’on recherche une atteinte de topographie C6, il faut faire un examen de détection des muscles deltoïde moyen, biceps brachial, long supinateur et infra-épineux. Lorsqu’on recherche une atteinte de topographie C7, il faut explorer les muscles grand palmaire, radiaux et triceps brachial. En pratique, il convient d’examiner systématiquement ces deux territoires et, le plus souvent aussi, d’examiner également les racines C8 et D1 par l’exploration des muscles intrinsèques de la main, court abducteur du I, premier interosseux dorsal et adducteur du V. Si les données de l’interrogatoire et l’examen clinique orientent plus spécifiquement vers une racine C8, il convient également d’examiner les muscles fléchisseurs superficiels des doigts et long abducteur du I ce qui permet de distinguer une atteinte C8 d’une atteinte D1. La racine C5 n’a en revanche pas de spécificité particulière et il est difficile de la distinguer formellement d’une atteinte C6.
34 Le rachis cervical vieillissant Il convient dans un second temps d’établir un diagnostic lésionnel. Au cours d’une atteinte de type neurapraxie, il n’y a pas de modification de la morphologie ni de l’amplitude des potentiels d’action volontaire, mais on observe beaucoup moins de potentiels d’action volontaire que sur un tracé normal qui est dit « riche ». On observe en revanche une augmentation de la fréquence du recrutement de ces potentiels d’action volontaire (correspondant à l’augmentation de la fréquence de recrutement des unités motrices restées fonctionnelles) : il s’agit d’un tracé « neurogène périphérique », il n’y a pas d’activité spontanée au repos et la réponse à la stimulation est normale. Au cours d’une atteinte de type axonotmésis, en revanche, si l’on observe bien aussi un tracé neurogène périphérique, il existe une modification notable de la morphologie et de l’amplitude des potentiels d’action volontaires, en fonction du stade de la dénervation ou de la réinnervation où se trouve le muscle (petits potentiels polyphasiques de réinnervation, grands potentiels simples des unités motrices géantes ou tous les stades intermédiaires). Dans les dénervations aiguës, on observe de plus une activité spontanée au repos (fibrillation et potentiels lents de dénervation). Enfin, on observe une altération de l’amplitude de la morphologie des réponses à la stimulation. L’importance de l’appauvrissement du tracé neurogène périphérique est proportionnelle au nombre d’axones atteints, contrairement à l’examen clinique, en raison de l’importance des phénomènes de compensation déjà évoqués.
Diagnostic différentiel Lorsqu’on veut établir un diagnostic différentiel avec une atteinte du nerf supra-scapulaire, il convient d’examiner, outre les muscles précédemment cités pour l’examen de la racine C6, le muscle supra-épineux. Il faut également faire des réponses à la stimulation au point d’Erb, avec éventuellement comparaison avec le côté opposé, afin de disposer du temps de « latence », c’est-àdire le temps que met l’influx nerveux déclenché par la stimulation au « point d’Erb » (point sus-claviculaire) avec recueil à l’aiguille au niveau des muscles supra-épineux et infra-épineux. Dans une atteinte radiculaire C6, les temps de latence normaux sont de l’ordre de 2,5 ms pour le supra-épineux et 3 ms pour l’infra-épineux. Lorsqu’il existe une atteinte du nerf supra-scapulaire au niveau de l’incisure scapulaire, ces temps de latence sont allongés et il n’y a pas d’atteinte neurogène périphérique dans les autres muscles du territoire radiculaire correspondants. Une compression du nerf médian au canal carpien donne fréquemment des douleurs ascendantes pouvant remonter jusqu’à l’épaule, pouvant évoquer une atteinte radiculaire C6 à laquelle ce syndrome canalaire peut du reste être associé. Il convient alors de rechercher spécifiquement une compression du nerf médian au canal carpien.
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Une compression du nerf ulnaire au coude peut également faire discuter une atteinte radiculaire C8. En effet, toutes les atteintes radiculaires cervicales ne sont pas nécessairement associées à des cervicalgies, certaines hernies discales importantes peuvent ne pas être associées à des syndromes rachidiens ou dure-mériens. Il faut connaître également les polyneuropathies, en particulier diabétiques, qu’il faut rechercher si l’interrogatoire, l’anamnèse et l’examen clinique évoquent une telle possibilité, par un examen des membres inférieurs. Un syndrome de Parsonage et Turner, correspondant à des mononeuropathies multiples, peut également donner des douleurs violentes de la racine du membre supérieur. Là aussi, l’examen électromyographique permet de montrer qu’il s’agit d’une atteinte de topographie non systématisée orientant vers une telle possibilité. Enfin, certaines atteintes rachidiennes peuvent être à l’origine de douleurs irradiant vers la face externe ou postérieure de l’épaule correspondant en particulier à une atteinte de la branche postérieure des nerfs rachidiens et non à une atteinte radiculaire. L’électromyogramme est alors normal.
Intérêt des résultats de l’examen électromyographique dans les choix thérapeutiques Le type lésionnel doit être déterminant dans le choix thérapeutique : un bloc de conduction n’est pas une urgence car il ne laisse pas de séquelle après décompression et permet la poursuite du traitement médical. En revanche, une atteinte axonale aiguë ou chronique doit orienter vers un geste de décompression rapide.
Conclusion L’examen électromyographique est un complément utile de l’examen clinique pour apprécier les conséquences sur les racines nerveuses dans les atteintes dégénératives du rachis cervical. Il permet de confirmer qu’il s’agit bien d’une atteinte radiculaire ou polyradiculaire, d’en apprécier le type lésionnel et son importance et de faire un diagnostic différentiel éventuel. Enfin, il est un élément du choix thérapeutique.
Références 1. Fournier E (1998) Examen électromyographique et étude de la conduction nerveuse. Sémiologie électrophysiologique. Collection Explorations fonctionnelles humaines. Cachan, Éditions Médicales Internationales 2. Fournier E (2000) Atlas d’Electromyographie : 300 schémas pour l’exploration des nerfs et des muscles. Cachan, Éditions Médicales Internationales 3. Lenan JAR, Ritchie AE (1985) Électromyographie clinique. Paris, Masson 4. Kimura J (1989) Electrodiagnosis in diseases of nerve and muscle: principles and practice. Edition 2. Philadelphia, F.A. Davis Company
Particularités de l’imagerie du rachis cervical vieillissant P. Mathieu, G. Morvan, M. Wybier, V. Vuillemin et H. Guerini
Introduction Les deux fonctions principales du rachis cervical sont de porter et de positionner correctement la tête dans l’espace, permettant ainsi une exploration visuelle satisfaisante et d’autre part de convoyer et protéger la moelle, ses racines et la vascularisation artérielle du cerveau postérieur. Pour réaliser ces missions, la nature a doté le rachis cervical de particularités anatomiques et fonctionnelles multiples et variables selon l’étage, supérieur ou inférieur. Plus du tiers des possibilités de rotation du rachis cervical a lieu au niveau des articulations C1-C2. Ces articulations assument en particulier, par l’intermédiaire d’un système musculaire spécifique sous-occipital, le réglage fin de la rotation axiale de la tête, facteur essentiel de la précision et du suivi du regard, constamment mis en jeu dans la vie courante. Malgré leur sollicitation permanente, les articulations atloïdo-odontoïdiennes et atloïdo-axoïdiennes latérales sont nettement moins souvent affectées par l’arthrose que le rachis cervical inférieur, site le plus constamment et le plus précocement atteint. À l’inverse, il faut souligner la très mauvaise corrélation radio-clinique, notamment dans le cadre de la pathologie dégénérative, compte tenu de l’extrême banalité – pour ne pas dire la constance – des remaniements arthrosiques du rachis cervical inférieur à l’âge adulte. Pour élucider ces paradoxes, l’imageur dispose de plusieurs outils. Les incidences radiologiques classiques permettent déjà une approche détaillée du rachis cervical. Des raisons anatomiques (symétrie droite-gauche et orientation oblique des pédicules et des foramens) font que le bilan radiographique de base du rachis cervical comprend non pas une mais deux couples d’incidences : face – profil et deux trois quarts. La tomodensitométrie (TDM) volumique actuelle, qui a définitivement remplacé les tomographies, complète au besoin cette étude en fournissant des vues planes et volumiques de qualité du rachis. La pauvreté en graisse des espaces épiduraux cervicaux et leur richesse vasculaire incitent parfois à réaliser une injection intraveineuse de produit de contraste. L’imagerie par résonance magnétique (IRM) autorise une étude morphologique et signalétique précise de la moelle, mais explore un peu moins bien les
38 Le rachis cervical vieillissant racines. Elle peut parfois détecter une arthropathie congestive au sein d’un rachis cervicarthrosique apparemment banal.
Outils d’imagerie Clichés simples Les deux couples d’incidences traditionnelles (2) (incidences de face haute et basse, profil, obliques) fournissent des renseignements détaillés et sensibles sur la morphologie des corps vertébraux, des arcs neuraux et des articulations zygapophysaires. La minceur des parties molles prévertébrales, silhouettées par l’air pharyngé, permet une détection précoce de leur moindre remaniement. Ces clichés sont réalisés en charge, assis ou debout, regard horizontal. Normalement, le rachis cervical est lordotique, comme le rachis lombaire. Cependant, à l’opposé de celui-ci, dont la statique dépend pour une bonne part du segment sous-pelvien, la position du rachis cervical est soumise à de multiples facteurs : variantes du normal, morphotype individuel brévi- ou longiligne, importance de la musculature, position globale du rachis sous-jacent, tête plus ou moins anté- ou rétropulsée lors de la prise du cliché et, surtout, présence d’une contracture musculaire liée à la douleur, de quelque nature que soit cette dernière. Il est donc hasardeux de tirer des conclusions valables d’une rectitude ou d’une cyphose cervicale. Bien que la radio-anatomie du rachis cervical soit connue de tous (3), quelques points méritent d’être soulignés : – L’incidence de profil, la plus riche de renseignements, permet de prévoir le calibre du canal rachidien et des foramens en fonction de la position respective des corps vertébraux, des massifs zygapophysaires et des lames (fig. 1). On doit pouvoir par la pensée, a dit Auguste Wackenheim, faire tenir un corps vertébral dans un canal de taille normale. – De profil, les structures anatomiques homologues des vertèbres cervicales composent, à l’état normal, des lignes parallèles dont toute irrégularité est pathologique. Une exception : la racine du processus épineux de C2, normalement décalé de 2 ou 3 mm vers l’arrière. – La similitude anatomique des vertèbres cervicales de C3 à C6 fait que leur projection de profil est très semblable. Massifs articulaires et lames ont la même densité d’un niveau à l’autre. Un saut brutal de densité doit donc faire suspecter une lésion lytique (fig. 2d) ou condensante. – La corticale antérieure de la jonction lames-racine du processus épineux est toujours visible. Son absence traduit le plus souvent un spina bifida occulta, confirmée par le cliché de face. En C1, cette dernière, banale, s’accompagne d’une hypertrophie compensatrice de l’arc antérieur, à ne pas prendre pour une lésion expansive. – Les parties molles prévertébrales sont fines et régulières, de 4 à 5 mm d’épaisseur, parallèles au bord antérieur des corps vertébraux de C1 à C5 (fig. 1). L’épaississement de ces parties molles par du pus, du sang ou du tissu tumoral, est un des signes sémiologiques les plus précoces d’une lésion infectieuse, traumatique ou tumorale de la
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b
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c
a Fig. 1 – Analyse des rapports entre le corps vertébral (1), les massifs zygapophysaires (2), les lames (3) et les processus épineux (4) sur un cliché du rachis cervical de profil, avec déduction de la taille du canal et des foramens. a : Rachis normal. Les massifs articulaires (2) ne chevauchent pas le corps vertébral (1), les pédicules ont donc des dimensions normales et les foramens un calibre normal. La longueur des lames (3) est normale entre les massifs zygapophysaires (2) et le processus épineux (4), la dimension du canal central est normale. b : Étroitesse du canal central et des foramens secondaire à un arc neural en position trop ventrale par brièveté pédiculaire. Les massifs zygapophysaires (2) se superposent au corps vertébral (1). Cette avancée rétrécit les foramens et le canal central. c : Étroitesse du canal central due à des lames trop courtes et à un dièdre inter-lamaire trop ouvert. L’espace lamaire (3) est réduit voire absent. Dans ce cas, les foramens gardent souvent un calibre correct.
colonne antérieure du rachis cervical. Compte tenu de la position verticale du rachis, le niveau de la lésion correspond au point le plus élevé de l’épaississement des parties molles. – Les disques les plus mobiles sont C5-C6, puis C4-C5, C3-C4 et C6-C7. Ces disques sont, en toute logique, ceux qui dégénèrent le plus précocement. – Les incidences obliques exposent non seulement les foramens, mais aussi les pédicules controlatéraux, souvent oubliés. La lame controlatérale se projette dans le foramen et peut être à l’origine d’images piège. Les articulations zygapophysaires sont imparfaitement dégagées sur cette incidence où, vues de trois quarts, elles apparaissent ovalaires. Une incidence oblique plus prononcée (faux profil de Roy-Camille), utilisée en traumatologie, permet de les visualiser tangentiellement. La sémiologie des remaniements foraminaux (fig. 2) permet une bonne approche étiologique des névralgies cervicobrachiales (NCB).
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c a
b d
g
f
e
h
Fig. 2 – Sémiologie radiologique des lésions qui agrandissent ou rétrécissent les foramens cervicaux. Clichés des foramens droits et gauches sur un trois quarts. a : Aspect normal. b : Agrandissement concentrique du foramen dont toutes les parois sont lisses, régulièrement corticalisées. Il s’agit donc d’une masse expansive bénigne, unique, lentement évolutive, née au centre du foramen, qui a refoulé lentement ses parois, de manière concentrique et harmonieuse puisque celles-ci ont eu le temps de reformer une corticale régulière, mais amincie (flèche). Exemple type : neurinome confirmé par l’IRM (c). D’autres lésions lentement expansives nées dans le foramen pourraient être à l’origine d’un aspect semblable. d : Agrandissement d’un foramen, formé par la sommation des deux foramens adjacents. Disparition du pédicule qui normalement sépare ces foramens. La zone d’implantation du pédicule sur le corps vertébral est floue, mal limitée, de même que la corticale postéro-latérale voisine. Il n’y a pas d’hypertrophie compensatrice du pédicule controlatéral. Processus lytique rapide du pédicule, a priori malin : métastase. e, f, g : Sténoses foraminales liées respectivement à une brièveté constitutionnelle du pédicule à l’origine d’un foramen étroit antéro-postérieur (e), à une uncarthrose (f), à une arthrose zygapophysaire (g). Infiltration radioguidée de l’arthrose zygapophysaire par voie postéro-latérale (h).
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– De profil, les canaux transversaires se projettent sur la partie postérieure du corps de C2, ou sur la jonction corps-pédicule, sous la forme d’une lacune arrondie cernée d’un liseré dense. De face, ils sont parfois visibles sous la forme d’une ligne opaque courbe à concavité inférieure, sous une des facettes articulaires latérales de C2. Une asymétrie de ces canaux traduit la présence d’une artère vertébrale dominante, disposition anatomique parfois utile à reconnaître. – Le cliché de face doit être de taille suffisante pour permettre une étude satisfaisante des apex pulmonaires, des premières côtes et du rachis thoracique supérieur.
Scanner La technique d’acquisition hélicoïdale a bouleversé la TDM. Actuellement, au lieu d’effectuer quelques dizaines de coupes fines, proches voire jointives, mais distinctes les unes des autres, habituellement parallèles aux plans des disques (acquisition dite « séquentielle »), le radiologiste étudie en une fois, à l’aide d’un grand nombre de coupes – le plus souvent plusieurs centaines – très fines, imbriquées les unes dans les autres à la manière des spires d’un ressort (technique hélicoïdale), un volume englobant la région à étudier (acquisition dite « volumique »). Au sein de ce volume, il reconstruit secondairement, dans tous les plans anatomiques utiles, des images planes, ou tridimensionnelles de grande qualité (figs. 3 et 4). Sur les scanners modernes, l’acquisition des données peut se faire en un temps très court (moins de 10 secondes), progrès très appréciable en cas de cervicalgies importantes. La TDM, beaucoup plus performante et moins irradiante, a définitivement remplacé la tomographie. Elle s’est libérée du plan axial. Celui-ci, apport original de la technique tomodensitométrique, n’en constitue plus actuellement qu’une des possibilités parmi de nombreuses autres. Malgré ces importants progrès technologiques récents, les propriétés physiques des rayons X étant ce qu’elles sont, le scanner demeure une technique peu sensible pour l’analyse des parties molles, qui a des difficultés à différencier les tissus dont la densité est proche de celle de l’eau : c’est le cas des parties molles intracanalaires. D’où le recours fréquent à un rehaussement artificiel du contraste. Une injection intraveineuse de produit iodé (actuellement environ 1 cc/kg de produit de contraste non ionique), en respectant les précautions et les contre-indications de ce type de produit, permet d’opacifier les plexus veineux qui constituent l’essentiel de l’espace épidural cervical. On obtient ainsi une épidurographie opaque qui, compte tenu de l’excellente définition spatiale du scanner, peut être analysée de façon détaillée. Ceci constitue la base de la sémiologie TDM la plus utilisée à ce jour (fig. 5) (4). Cette injection permet en outre de rehausser la densité de la plupart des lésions sous-arachnoïdiennes et épidurales. Cette technique visualise la moelle, mais de manière insuffisante pour en tirer des conclusions précises. Étant donné le risque potentiel indiscutable d’une administration de produit de contraste iodé par voie intraveineuse (hypersensibilité à l’iode, risque rénal, etc.), certains auteurs ont conseillé, à juste titre, de réaliser les examens TDM sans injection. Ils considèrent que plus des deux tiers des hernies discales pourraient ainsi être visualisées. En pratique, ceci n’est vrai que dans des conditions anatomiques favorables : hernie de volume suffisant, patient à cou long et mince et à canal cervical large. Dans les autres cas, un petit fragment discal, notamment foraminal, pourrait être méconnu. En cas de doute, une deuxième série de coupes avec injection est préconisée.
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a
b
Fig. 3 – Arthrose zygapophysaire C4-C5 unilatérale suspectée sur le cliché radiographique de profil (a), mais confirmée avec certitude sur le scanner en reconstruction parasagittale (b).
Neutre
Extension
a
b
Flexion
c Fig. 4 – Instabilité rotatoire de C1 sur C2. Vue TDM volumique antéro-inférieure du rachis cervical supérieur. a : Extension. C1 est en position antérieure par rapport à C2, plus marquée à gauche qu’à droite. b : Position neutre. La facette articulaire droite de C1 revient en position normale, tandis que la gauche reste un peu trop antérieure. c : Flexion. Ce défaut s’accentue : la facette gauche de C1 avance, tandis que la droite recule par rapport à C2. Il s’agit donc d’une subluxation rotatoire permanente, mais qui s’accentue en flexion.
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Fig. 5 – Coupe TDM axiale passant par le disque C5-C6, après injection intraveineuse de contraste iodé. Remarquer l’opacification de l’espace épidural. La racine gauche est parfaitement visible en négatif dans le foramen. À droite, côté symptomatique, la racine est comprimée par une saillie discale foraminale (flèche).
IRM Il n’y a pas eu en IRM, comme en TDM, de révolution récente, mais cette technique est en progrès rapide et constant. C’est actuellement l’examen de référence pour l’étude de la moelle cervicale, du contenu de l’espace sous-arachnoïdien et de la portion sousarachnoïdienne des racines (pour cette indication particulière, le myéloscanner, examen beaucoup plus lourd, exceptionnellement utilisé, fournit des images encore plus détaillées). L’IRM est moins performante pour l’étude des racines dans leur trajet extradural et intraforaminal. La petite taille des foramens et des racines, qui implique l’utilisation de coupes minces et jointives, leur intime proximité avec des structures osseuses potentiellement compressives mais également génératrices d’artefacts, la minceur des disques, la pulsatilité du liquide céphalo-spinal, sont autant de handicaps pour l’IRM. Ces problèmes sont en voie de résolution sur les machines actuelles dotées d’antennes performantes dédiées au rachis cervical et de nouvelles séquences autorisant des coupes fines, jointives et peu artefactées : coupes axiales 3D en écho de gradient. L’inconvénient classique de l’IRM est de mal identifier les structures calciques (ostéophytes ou calcifications) car le calcium n’émet pas de signal en IRM. Ce défaut est actuellement moins handicapant que par le passé, probablement en raison d’une plus grande expérience de la sémiologie magnétique.
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Discographie, discoscanner, myélographie, myéloscanner La discographie n’est plus utilisée pour le diagnostic d’une hernie ou d’une discarthrose. Les injections intradiscales destinées à localiser l’origine d’une cervicalgie ou d’une névralgie cervico-brachiale (NCB) rebelle en reproduisant la douleur habituelle (« signe de la douleur réveillée ») ont de tout temps été discutées, sans preuve pour ou contre réellement convaincante. Le taux de complications infectieuses de la discographie cervicale est important, de l’ordre de 0,6 %, donc nettement supérieur à celui de la discographie lombaire. Quelques complications graves ont été rapportées (tétraplégie par expulsion intracanalaire d’un fragment discal, abcès épidural, etc.) (5). Ces techniques ont à l’heure actuelle pratiquement disparu. Elles ne sont plus utilisées qu’exceptionnellement dans quelques rares cas de contre-indication de l’IRM, en cas d’ostéosynthèse cervicale ferromagnétique, ou à la recherche d’un étage symptomatique en préopératoire s’il est absolument impossible de trancher autrement entre plusieurs étages suspects.
Imagerie dynamique Les clichés dynamiques en flexion-extension, auparavant réservés au rachis traumatique ou inflammatoire, sont de plus en plus réalisés dans le cadre de la pathologie dégénérative, à la recherche d’une instabilité, comme au niveau du rachis lombaire. Hier encore limitée aux clichés simples, cette imagerie dynamique commence timidement à faire son apparition en TDM (fig. 4), voire en IRM – acquisitions en position neutre, en flexion et en extension, voire en rotation, angio-IRM, etc. – notamment pour l’exploration des troubles rotatoires du rachis cervical supérieur et de leur répercussion sur le névraxe et les artères vertébrales (6). Les avancées technologiques TDM et IRM rendront certainement les examens dynamiques plus habituels dans un avenir proche.
Radiologie interventionnelle L’efficacité et le rapport bénéfice/risque des infiltrations cortisonées cervicales ne peuvent être, à l’heure actuelle, sérieusement évalués faute d’études contrôlées (7). Les techniques d’infiltrations radioguidées zygapophysaires en C1-C2 se sont sécurisées et simplifiées (8) (figs. 6 et 7). Lors des injections foraminales (7), où l’abord guidé par TDM constitue une alternative (9), il a été rapporté des accidents peu nombreux, mais graves. L’indication de ces injections, réservées aux échecs des traitements conventionnels et à ne faire qu’après un bilan TDM précis, doit donc être mûrement pesée. La chimionucléolyse à la papaïne a due être abandonnée, plus en raison de l’indisponibilité du produit que de son manque d’efficacité dans le traitement des hernies discales.
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a
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b
Fig. 6 – Arthro-infiltration radioguidée C1-C2 latérale. a : Arthrose érosive C1-C2 latérale droite responsable de cervicalgies invalidantes et rebelles aux traitements habituels chez une femme de 78 ans. Reconstruction TDM frontale. b : Voie postérieure stricte. Après opacification de l’articulation, injection cortisonée intra-articulaire. Bon effet antalgique pendant 6 mois.
Fig. 7 – Arthro-infiltration radioguidée zygapophysaire C3-C4 droite pour arthrose zygapophysaire douloureuse. Voie postérieure stricte. Après opacification de l’articulation, injection cortisonée intra-articulaire.
46 Le rachis cervical vieillissant
Hernie discale Une hernie discale cervicale peut comprimer une racine et/ou la moelle. Spontanément, la plupart des hernies discales molles cervicales ont tendance à diminuer de volume, voire à disparaître en quelques mois. Ce phénomène est d’autant plus net que les hernies sont plus volumineuses (10). Typiquement, une hernie discale récente n’entraîne pas de remaniement osseux des vertèbres adjacentes. En fait, les hernies surviennent souvent sur des disques déjà pathologiques, et on peut rencontrer tous les intermédiaires entre la hernie « molle » pure et la discarthrose. La connaissance précise de la nature de l’agent compressif, mou, dur, ou mixte, est d’un intérêt modéré en cas de traitement médical, dans la mesure où cette précision ne change pas grand-chose au traitement. Elle prend tout son intérêt en cas de traitement chirurgical, en aidant l’opérateur à planifier son geste : discectomie simple, ou résection d’une uncarthrose latérale. Elle était également essentielle au temps des thérapeutiques percutanées. Il n’a pas été décrit, à ma connaissance, de signe direct certain de hernie discale sur les clichés simples, le bâillement postérieur ou latéral d’un disque ne constituant qu’un argument de présomption. La présence d’un couple ostéophytique postérieur divergent témoigne de l’existence de matériel discal pris en sandwich entre les ostéophytes qu’il écarte, mais rien n’indique pour autant qu’il s’agisse d’une hernie discale et non d’une simple protrusion circonférentielle du disque. La TDM est l’examen complémentaire le plus utilisé actuellement pour le diagnostic de hernie discale. Sur une TDM sans préparation, une opacité de tonalité hydrique qui comble le foramen et peut se prolonger dans le récessus latéral, constitue un argument en faveur d’une stase veineuse secondaire à la présence d’un fragment discal intraforaminal (11). Ce signe, dit « de la stase veineuse », ne serait pas vu en cas d’uncarthrose simple. La présence de matériel discal hernié est à l’origine d’une déformation de l’espace épidural antérieur, parfaitement analysable sur une TDM après injection intraveineuse de contraste (fig. 8). Au lieu d’être rectiligne ou concave, l’espace épidural devient focalement convexe en arrière. La convexité est en situation latérale en cas de hernie postéro-latérale, plus centrale en cas de hernie postéro-médiane ou médiane. Dans la quasi-totalité des cas, au sein de cette voussure focale, on note la présence d’une ou de deux zones moins denses, qui correspondent à la présence d’un ou de plusieurs fragments discaux (4). Il est impossible, à l’heure actuelle, de définir précisément la situation de ces fragments discaux par rapport au ligament longitudinal postérieur, car ce dernier n’est pas individualisable (12). La taille de la hernie peut être très variable, allant de la minuscule hernie foraminale pure à l’énorme hernie qui occupe la quasi-totalité du canal et comprime la moelle. On voit nettement la racine, silhouettée par le contraste, refoulée par le fragment discal. Les reconstructions sagittales peuvent aisément repérer un éventuel fragment exclu, migré verticalement dans le canal ou latéralement dans le foramen, qui peut poser problème en cas de chirurgie par voie antérieure (13) – la plus utilisée actuellement – si ce fragment n’a pas été clairement identifié en préopératoire. L’IRM constitue une alternative à la TDM. Sur les coupes IRM sagittales (fig. 9a), une hernie discale se présente comme une masse épidurale antérieure, rétrodiscale, en général triangulaire à sommet postérieur. Parfois, notamment sur les coupes sagittales
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pondérées en densité de protons, on peut mettre en évidence une discontinuité de l’annulus postérieur, signant sa perforation. Comme en TDM, il n’a pas été décrit à notre connaissance de signes certains de solution de continuité du ligament longitudinal postérieur. Il est donc le plus souvent impossible d’affirmer le caractère exclu et/ou transligamentaire d’une hernie, voire son caractère intradural (14), éventualité exceptionnelle, mais connue. Sur les coupes IRM axiales (fig. 9b), la hernie se présente comme une masse épidurale antérieure ou antéro-latérale, de même intensité ou plus intense que le disque, refoulant en fonction de sa taille la racine, le sac dural, voire la moelle. Il est habituellement difficile d’affirmer sur une IRM la nature purement molle, non calcifiée, d’une hernie. Un hypersignal des plexus veineux sous-jacents (sorte d’équivalent IRM du signe TDM de la stase veineuse) a été décrit comme signe indirect de hernie.
Fig. 8 – Coupe TDM axiale après injection intraveineuse de contraste iodé. Déformation focale de l’espace épidural, par une hernie molle postéro-latérale (flèche). Noter le caractère sans ambiguïté de la compression de la racine droite dans l’orifice médial du foramen, de l’absence de composante osseuse de la compression, et de la nature herniaire de l’agent compressif.
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a
b Fig. 9 – a : Coupe IRM sagittale T2. b : Coupe IRM axiale T2. Hernie discale C6 C7 postéro-latérale droite. Masse épidurale antérieure en hypersignal (flèches). Remarquer la normalité de la moelle.
Dans notre expérience, basée sur une longue collaboration quotidienne avec des chirurgiens du rachis, et selon l’avis quasi unanime de ceux-ci, la méthode d’imagerie qui paraît, à l’heure actuelle, la plus constamment performante pour mettre en évidence une hernie discale cervicale, en faire un bilan anatomique complet et précis, et visualiser la compression radiculaire de façon à choisir la thérapeutique adaptée, est la TDM en acquisition volumique après injection intraveineuse de produit de contraste. Ceci étant, le risque modéré mais indéniable que constitue une injection intraveineuse de produit iodé doit être sérieusement pesé et ne se justifie à nos yeux, en l’absence de facteurs de risques particuliers, que si un geste local est envisagé. Si bien que dans un contexte « seulement » médical, un scanner sans injection est souvent suffisant. L’IRM, examen de référence pour l’étude de la moelle, est actuellement moins performante que la TDM injectée, surtout pour le diagnostic des petites hernies latérales et gagne à être complétée par un scanner non injecté (sauf si les clichés simples sont éloquents) à la recherche d’une éventuelle composante calcifiée. La mise à disposition des radiologues de coupes IRM axiales fines, jointives et de bonne qualité, éventuellement sensibilisées par une injection de gadolinium, moins allergénique que l’iode – ces séquences existent déjà chez quelques constructeurs – pourra probablement à brève échéance constituer une alternative valable à l’injection iodée.
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Cervicarthrose Cervicarthrose cervicale supérieure L’arthrose latérale C1-C2 est une entité clinique très différente de la cervicarthrose banale. Elle touche environ 4 % de la population porteuse d’arthrose rachidienne (15), presque toujours des femmes âgées et polyarthrosiques. Elle est beaucoup plus souvent symptomatique que la discarthrose du rachis cervical inférieur. Cliniquement, il s’agit de douleurs cervico-occipitales intenses, chroniques, invalidantes (16), souvent rebelles aux traitements habituels. Le diagnostic se fait sur un simple cliché de face haute bouche ouverte, sur la présence d’un pincement articulaire, d’une sclérose sous-chondrale, d’une irrégularité des surfaces articulaires, d’ostéophytes latéraux. L’atteinte est le plus souvent unilatérale. Cette arthrose peut être à l’origine d’un spondylolisthésis de C1 sur C2, rotatoire en cas d’arthrose unilatérale, antérieur en cas d’arthrose bilatérale, éventuellement instable (clichés dynamiques). L’IRM, inutile pour le diagnostic, met parfois en évidence un épanchement intra-articulaire et un œdème du spongieux sous-chondral qui authentifient la poussée inflammatoire de l’arthrose. En cas d’insuffisance des traitements médicamenteux et kinésithérapiques habituels, il est actuellement possible de réaliser en C1-C2 des infiltrations cortisonées radioguidées par voie postérieure, technique sûre, souvent efficace (7) (fig. 6).
Cervicarthrose cervicale inférieure Le terme de cervicarthrose recouvre l’association, à des degrés divers, d’une discarthrose, d’une arthrose zygapophysaire et d’une uncarthrose. C’est une arthrose précoce qui débute dès la trentaine. Il y a peu (quasiment pas) de parallélisme entre les signes cliniques et les images radiographiques, hormis une plus grande incidence des discopathies C5-C6 et C6-C7 chez les patients symptomatiques (17). Le diagnostic de l’arthrose cervicale repose sur les clichés simples (1) (fig. 10). Le cliché de profil permet d’apprécier les remaniements des espaces intersomatiques, l’importance de l’ostéophytose antérieure et surtout postérieure, le retentissement sur le calibre du canal rachidien (souvent sous-estimé), le degré d’arthrose zygapophysaire et la statique rachidienne. Le cliché de face met en évidence l’uncarthrose. Les clichés de trois quarts étudient les foramens et leur degré de sténose éventuelle par l’uncarthrose ou l’arthrose zygapophysaire. Ces clichés, qui n’étudient que la composante osseuse de l’arthrose, demeurent nécessaires et le plus souvent suffisants. Comme pour la discarthrose, l’arthrose zygapophysaire est mal corrélée à la douleur (18, 19). Cette arthrose survient le plus fréquemment au-dessus et en dessous d’un segment rachidien déjà rigidifié par une discarthrose (en général C5-C6-C7) et luimême exempt de dégénérescence postérieure (fig. 10). L’horizontalisation des facettes articulaires arthrosiques (très bien vu sur les reconstructions TDM sagittales, mais aussi sur les clichés simples de profil et en oblique) peut entraîner, comme en lombaire, un spondylolisthésis dégénératif à l’origine d’une sténose canalaire et/ou d’une instabilité
50 Le rachis cervical vieillissant (clichés dynamiques) (fig. 11). L’arthrose zygapophysaire peut être – exceptionnellement – à l’origine d’un kyste synovial, lui-même facteur de compression radiculaire, dont la sémiologie TDM ou IRM est la même qu’en lombaire : masse intracanalaire postérolatérale arrondie, de contenu variable (liquidien, gazeux, etc.), située en regard d’un interligne articulaire postérieur arthrosique, entourée d’une coque plus ou moins épaisse prenant le contraste.
Fig. 10 – Cervicarthrose. Remarquer la discarthrose C5-C6-C7, les articulations zygapophysaires préservées à ce niveau, et l’arthrose zygapophysaire sus- et sous-jacente. La largeur du canal rachidien est normale.
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Fig. 11 – Cervicarthrose. Cliché de profil en flexion. Spondylolisthésis dégénératif de C4 sur C5. Noter, comme dans la figure 10, le bloc fonctionnel cervicarthrosique C5-C7, et l’arthrose zygapophysaire sus-jacente à l’origine du glissement. Celui-ci était instable sur les clichés dynamiques.
Névralgie cervico-brachiale cervicarthrosique L’uncarthrose et l’arthrose zygapophysaire peuvent toutes deux entraîner une compression radiculaire par le biais d’un rétrécissement foraminal. Les sténoses foraminales arthrosiques et les compressions radiculaires même très prononcées mais asymptomatiques sont si fréquentes qu’une corrélation précise et critique avec un examen clinique
52 Le rachis cervical vieillissant de qualité, voire un électromyogramme est indispensable. À notre connaissance, rien ne permet actuellement, quel que soit le type d’imagerie utilisée, de faire la différence entre une compression radiculaire arthrosique symptomatique et une autre qui ne l’est pas. La présence d’une uncarthrose ou d’une arthrose zygapophysaire, et leur importance, se diagnostique sur de simples clichés de face et de trois quarts (1). En TDM, l’uncus arthrosique apparaît épaissi et condensé, surtout sur les reconstructions frontales, mais également sur les coupes axiales (fig. 12). Il déborde en arrière et latéralement les limites du corps vertébral, rétrécit la taille du foramen et comprime la racine. Le plus souvent, les deux uncus sont atteints, à des degrés divers. Entre les uncus, la protrusion disco-ostéophytique habituellement associée, se traduit par une saillie postérieure irrégulière des corps vertébraux et par un débord discal postérieur, plus ou moins calcifié, bien analysable sur les reconstructions sagittales. Sur ces dernières, et sur les coupes IRM sagittales, ce débord postérieur est parfois confondu avec une hernie discale. Or, en cas de hernie, le débord discal est uniquement ou préférentiellement postérieur alors qu’en cas de discarthrose il est à la fois antérieur et postérieur. L’étude des coupes axiales, toujours simultanée, rectifie au besoin facilement le diagnostic. Dans la discarthrose, il peut exister du gaz intradiscal, avec parfois des bulles épidurales ou foraminales en arrière ou en dehors de l’uncus, voire au sein de géodes intrasomatiques sous-chondrales. L’arthrose zygapophysaire se traduit par un massif articulaire épaissi qui saille en avant dans le foramen, parfois de façon très importante. Les reconstructions TDM sagittales montrent particulièrement bien ce type d’arthrose. Il n’est pas rare de constater la coexistence d’une hernie discale et d’une uncarthrose (fig. 13). Le scanner avec injection intraveineuse permet de bien faire la part des choses entre ces deux entités mais, pas plus qu’une autre technique, n’est capable de prévoir le caractère symptomatique ou non d’une compression radiculaire. En IRM, la discarthrose se traduit en T2 écho de spin par une diminution du signal du disque. Les formations ostéophytiques sont plus difficiles à analyser, leur signal dépendant de la présence d’os spongieux en leur sein. Les gros ostéophytes contenant du spongieux ont un centre graisseux qui apparaît en hypersignal en T1. Les autres, constitués uniquement d’os compact, n’émettent pas de signal. Ils peuvent donc passer inaperçus, noyés dans l’hyposignal global de la saillie discale. En T2 écho de gradient (variété de T2 parfois utilisée pour les coupes axiales), les ostéophytes peuvent être à l’origine d’un artefact dit « de susceptibilité magnétique », qui conduit à surestimer leur taille et donc le degré de sténose du foramen ou du canal. Les NCB arthrosiques posent, à notre sens, deux problèmes diagnostiques essentiels. Éliminer une lésion associée (tumeur, myélopathie, etc.) compte tenu de la fréquence de l’arthrose cervicale asymptomatique. L’IRM résout parfaitement ce problème, au moins en ce qui concerne les lésions intracanalaires. Déterminer le niveau exact de la compression radiculaire en cas d’uncarthrose étagée, éventualité fréquente. Ceci peut encore justifier en préopératoire, dans quelques cas exceptionnels, de limiter l’abord chirurgical à un ou deux niveaux au maximum, d’avoir recours à la discographie malgré tous les inconvénients de cette technique.
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Fig. 12 – Coupe TDM axiale après injection intraveineuse de contraste iodé. Compression de la racine droite par une uncarthrose pure (têtes de flèches) sans aucune composante molle.
Fig. 13 – Coupe TDM axiale après injection intraveineuse de contraste iodé. Compression de la racine gauche par une association d’une hernie discale et d’une saillie uncarthrosique (têtes de flèches). Les deux composantes sont parfaitement mises en évidence.
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Myélopathie cervicarthrosique C’est une lésion de la moelle cervicale secondaire à un conflit entre un canal cervical étroit arthrosique et la moelle et ses vaisseaux. Cette affection est complexe à de multiples points de vue : physiopathologie multifactorielle, histoire naturelle difficile à prévoir, présentation non univoque, début progressif et insidieux… Qui plus est, pour compliquer encore les choses, son traitement n’est efficace qu’entrepris précocement... L’imagerie joue un rôle majeur dans cette affection à plusieurs titres : diagnostic positif et différentiel, évaluation de la sévérité des lésions médullaires et de leur étendue en préopératoire. Les clichés simples statiques et dynamiques sont indispensables (1). Outre les lésions de cervicarthrose, ils peuvent mettre en évidence des signes d’étroitesse canalaire constitutionnelle et une éventuelle instabilité. Un diamètre antéro-postérieur inférieur à 11 mm correspond à un risque important de myélopathie cervicarthrosique (20). L’absence d’arthrose cervicale notable conduit inversement à récuser le diagnostic. L’IRM est le maître-examen. Elle permet d’éliminer facilement une autre cause de myélopathie (tumeur intra- ou extramédullaire, syringomyélie, malformation congénitale, sclérose en plaque, etc.), elle met en évidence la compression de la moelle, en apprécie l’intensité et en précise la topographie. Les deux signes sémiologiques majeurs de la myélopathie cervicarthrosique sont la déformation de la moelle et la présence d’anomalies de signal intramédullaires (fig. 14). L’importance de l’aplatissement antéropostérieur ou transversal de la moelle en regard des sites de sténose a été corrélée à la sévérité de la myélopathie (21). Le diagnostic clinique de myélopathie commence à être porté à partir d’une diminution de la surface de la moelle d’environ 30 %, soit 60 mm2 au lieu des 80 à 90 mm2 habituels. Un diamètre antéropostérieur inférieur à 6 mm sur les coupes axiales serait en faveur d’une mauvaise récupération postopératoire (22). Les anomalies de signal intramédullaire sont essentiellement la présence de zone(s) d’hypersignal en T2. Sur les coupes axiales T2, cet hypersignal affecte surtout les cordons latéraux et la partie antérieure des cordons postérieurs, soit une topographie transversale (fig. 14b). Il est fréquemment accompagné par une absence de différentiation entre substance blanche et substance grise au niveau de la zone comprimée. Ces zones d’hypersignal sont peu spécifiques et correspondent probablement d’abord à des lésions ischémiques et œdémateuses, puis à des lésions de gliose et de démyélinisation et enfin, au stade ultime, à une nécrose (il y a alors un hyposignal en T1), ce qui explique qu’une plage d’hypersignal nette et bien limitée – évoquant une nécrose – soit de plus mauvais pronostic qu’une plage en hypersignal peu intense à contours flous, évoquant un simple œdème (23). La corrélation entre plages en hypersignal et potentiel de récupération postopératoire est discutée. Pour certains auteurs, les patients porteurs d’un hypersignal auraient une moins bonne récupération, pour d’autres pas.
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a Fig. 14 – Myélopathie cervicarthrosique. Coupes IRM T2. a : Coupe sagittale. Canal cervical étroit constitutionnel décompensé en C3-C4, C4-C5, C5-C6 par des discopathies dégénératives. Hypersignal intramédullaire en regard de C5-C6. b : Coupe axiale passant par C5-C6. Topographie transversale habituelle des zones intramédullaires en hypersignal (flèches).
Conclusion Les indications d’imagerie dans le rachis cervical mécanique sont le plus souvent les cervicalgies communes, les névralgies cervico-brachiales d’origine herniaire ou arthrosique et la myélopathie cervicarthrosique. Bien que le parallélisme radio-clinique y soit souvent mis à mal, les clichés simples demeurent un outil performant en raison de leur précision, de leur sensibilité, de leur assez bonne spécificité, de leur reproductibilité et de leur coût modéré. Ils constituent donc un préalable, souvent suffisant, avant toute autre
56 Le rachis cervical vieillissant imagerie. L’IRM est l’instrument idéal d’étude de la moelle et de l’espace sous-arachnoïdien, et le scanner volumique celui du squelette. Jusqu’à présent, le scanner était l’examen le plus performant pour l’étude des racines dans leur trajet épidural et foraminal. Les progrès de l’IRM font qu’il sera bientôt possible de s’en passer.
RECOMMANDATIONS DE PRESCRIPTION D’IMAGERIE DANS LES CERVICALGIES COMMUNES ET LES NÉVRALGIES CERVICO-BRACHIALES MÉCANIQUES Source : ANAES (1)
Cervicalgie commune En cas de première poussée, le traitement symptomatique peut être entrepris avant toute imagerie. La résistance au traitement médical bien conduit, l’aggravation clinique ou la douleur et la raideur d’emblée intenses justifient la réalisation de radiographies du rachis cervical, face et profil, auxquelles sera ajouté un cliché de face bouche ouverte en cas de cervicalgie haute ou sous-occipitale. Les radiographies sont justifiées avant d’engager un geste local. La persistance de la cervicalgie sur le même mode ne justifie pas la répétition des clichés radiologiques. La scanographie et l’IRM n’ont pas d’indication dans la cervicalgie vertébrale commune, sauf en cas d’aggravation clinique ou s’il existe un contexte clinique évocateur d’une pathologie inflammatoire, tumorale, infectieuse ou un traumatisme récent.
Névralgie cervico-brachiale En cas de névralgie cervico-brachiale, il y a un accord professionnel pour faire réaliser des radiographies du rachis cervical (face + profil + trois quarts) à la recherche d’une cause autre que dégénérative. Le traitement de la névralgie cervicobrachiale, qu’elle soit d’origine herniaire ou arthrosique, est dans un premier temps médical. En cas d’évolution défavorable ou lorsque se pose l’indication éventuelle d’un acte invasif (intervention percutanée ou chirurgicale), la poursuite des examens complémentaires est licite. Celle-ci se fera soit par IRM, soit par scanographie, de préférence avec injection de produit de contraste.
Myélopathie cervicarthrosique L’histoire naturelle de la myélopathie cervicarthrosique est peu documentée. Cependant, des auteurs rapportent une aggravation clinique fréquente qui justifie la pratique d’examens complémentaires performants. La radiographie standard de profil permet d’évaluer les dimensions du canal rachidien. Mais ce sont l’IRM ou à défaut le myéloscanner qui permettent de faire le bilan lésionnel.
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Pièges diagnostiques des cervicalgies du sujet âgé A. Nys
Quelques rappels et définitions La cervicalgie est une douleur perçue dans la région postérieure du rachis cervical entre la ligne courbe occipitale supérieure et, inférieurement, une ligne imaginaire horizontale passant par la pointe du processus épineux de T1 et latéralement par les plans sagittaux tangentiels aux bords latéraux du cou (1). La source de la douleur est une lésion d’une structure anatomique à partir de laquelle est générée une activité nociceptive qui, à son tour, entraîne une perception douloureuse. Toute structure innervée peut devenir source de douleur : muscles, disques intervertébraux, corps vertébraux, articulations zygapophysaires ou interapophysaires postérieures, articulations atloïdo-occipitale et atloïdo-axoïdienne, ligaments longitudinaux antérieur et postérieur, dure-mère, ligament transverse au niveau du rachis cervical haut, mais aussi l’artère vertébrale de même que l’artère carotide interne (2, 3). La cause de la douleur est la pathologie responsable de l’atteinte de la structure anatomique à l’origine de l’activité nociceptive, source de la douleur. L’arthrose cervicale débute relativement tôt, vers la trentaine, et sa fréquence augmente avec l’âge pour devenir constante après 70 ans. Il y a peu, voire pas, de parallélisme entre les signes cliniques et les images radiologiques hormis une plus grande incidence des discopathies C5-C6 et C6-C7 chez les patients symptomatiques. De même, l’arthrose zygapophysaire (articulaire postérieure) est mal corrélée à la douleur (4). La prévalence des cervicalgies (instantanée) donne des chiffres de 14 à 43 %. La prévalence des douleurs cumulées sur un an est de 21 à 54 %. Les cervicalgies sont plus fréquentes chez les femmes (8 à 16 % des hommes, 13,5 à 23 % des femmes souffrent de cervicalgies chroniques) et chez les personnes jeunes ou d’âge moyen mais ceci n’est pas retrouvé dans toutes les études. La fréquence des cervicalgies peu invalidantes diminue avec l’âge tandis que celle des cervicalgies plus sévères ne varie pas avec l’âge (5). C’est dire que devant un symptôme aussi banal et fréquent, il conviendra, notamment chez le sujet âgé, en premier lieu de rattacher la cervicalgie à une origine cervicale et en deuxième lieu d’éliminer une cervicalgie symptomatique d’une affection sousjacente.
60 Le rachis cervical vieillissant Il est important, et tout particulièrement chez le sujet âgé, de ne pas se laisser abuser par des images d’arthrose sur les radiographies et de savoir, au moindre doute, compléter le bilan lésionnel. Mais avant tout, l’examen clinique doit être attentif, en accordant une grande importance à l’interrogatoire pour permettre de préciser le type de douleur, mécanique ou inflammatoire. Les cervicalgies communes, mécaniques, en rapport avec des phénomènes dégénératifs sont, heureusement, les plus fréquentes. Elles excluent les pathologies traumatiques, inflammatoires et tumorales, se caractérisent par une douleur de type ou d’horaire mécanique, avec des accès douloureux et une limitation des amplitudes articulaires. La démarche médicale diagnostique est donc dans un premier temps de s’assurer que la symptomatologie cervicalgique est bien en rapport avec une souffrance du rachis cervical. En deuxième lieu, de s’assurer que cette souffrance cervicale n’est pas symptomatique d’une lésion traumatique, tumorale, infectieuse, métabolique. Dans d’autres cas, il faudra savoir rattacher une douleur plus à distance, douleur projetée, irradiée, au rachis cervical.
Douleur d’origine cervicale dans le cadre de traumatismes Nous n’envisagerons pas ici les cervicalgies survenant tardivement après un traumatisme cervical bien traité, orthopédiquement ou chirurgicalement, et qui rentrent dans le cadre des cervicalgies communes, mais des cervicalgies post-traumatiques précoces. Nous ne souhaitons pas plus aborder le cadre des traumatismes cervicaux « en coup de fouet » communément appelés « coup du lapin » ou Whiplash dans la dénomination anglo-saxonne. En effet, cette entité pose plus des difficultés de prise en charge thérapeutiques que de « pièges diagnostiques ». Négliger une fracture peut paraître grossier. Néanmoins, il faut être vigilant, en particulier chez le sujet âgé du fait du fréquent contexte d’ostéoporose, et plus particulièrement chez la femme. La cervicalgie s’exprime souvent par des signes cliniques peu spécifiques. Les radiographies standards, qu’il faut au minimum demander dans un contexte post-traumatique, ne sont pas toujours faciles à interpréter, en particulier au niveau du rachis cervical haut. Pour exemple, citons le cas d’une patiente de 75 ans qui, après avoir trébuché sur le trottoir, fait une chute en avant et heurte avec le front une voiture en stationnement. Elle se relève sans difficulté, a une douleur cervicale mais qui ne l’amène pas à consulter de suite. La symptomatologie douloureuse persistant, elle consulte dans la semaine qui suit. À l’examen, il est constaté un syndrome douloureux cervical haut, une importante limitation des mouvements du rachis cervical dans toutes les directions, pas de brachialgie, pas d’anomalie à l’examen neurologique des membres supérieurs. Le bilan radiographique standard mettra en évidence une fracture de l’odontoïde (fig. 1). Une fracture parcellaire, une fracture de l’odontoïde ne sont pas toujours faciles à mettre en évidence sur les incidences radiographiques habituelles. C’est le cas, en parti-
Pièges diagnostiques des cervicalgies du sujet âgé
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culier, de l’incidence de face bouche ouverte, pas toujours facilement réalisée chez le sujet âgé. Il peut y avoir une superposition des incisives ou de l’arc postérieur de l’atlas, ne permettant pas de bien visualiser l’apophyse odontoïde. En cas de doute, il ne faut pas hésiter à demander des coupes de scanner centrées sur le rachis cervical haut. Il en est de même pour les fractures parcellaires, par exemple d’une apophyse épineuse, qui, pour être objectivées, nécessitent souvent le recours à des coupes scanner. La clinique est souvent, par son caractère fréquemment peu spécifique, trompeuse, ne permettant pas de fixer la gravité exacte, d’où l’importance du bilan complémentaire lésionnel bien conduit. Voici le cas d’une patiente qui, alors qu’elle était en vacances en France, une nuit, dans sa chambre d’hôtel, tombe du lit. Il s’agit d’une chute de faible hauteur. Elle a de suite une douleur cervicale avec une importante limitation des mouvements du rachis cervical, une discrète irradiation scapulalgique gauche. L’examen clinique constate un important syndrome cervical, aucun signe neurologique déficitaire tant aux membres supérieurs qu’inférieurs, pas de trouble vésico-sphinctérien. La radiographie standard, précisée par le scanner, contre toute attente, va mettre en évidence une fracture-luxation C5-C6 (figs. 2, 3 et 4).
Fig. 1 – Radiographie : cliché de profil, fracture de l’odontoïde.
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Fig. 2 – Radiographie de profil : fracture et luxation C5-C6.
Fig. 3 – Scanner, coupe sagittale et coupe axiale : fracture et luxation C5-C6.
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Fig.4 – Radiographie de profil : cliché de contrôle post-réduction avec arthrodèse.
La solution est ici chirurgicale avec réduction et rétablissement de la stabilité vertébrale. Ainsi, dans un contexte post-traumatique, devant un syndrome cervicalgique, souvent peu spécifique, au moindre doute, il ne faut pas hésiter à demander des explorations complémentaires, notamment un scanner. Le risque est surtout de méconnaître une entorse cervicale, lésion instable qui pourrait être à l’origine de fâcheuses complications neurologiques en l’absence d’un traitement approprié pour obtenir une stabilisation.
Dans un contexte d’altération ou de modification de l’état général Le contexte peut être rapidement évocateur, orientant vers le diagnostic d’une cervicalgie symptomatique dans le cadre d’une affection grave. L’interrogatoire a, ici également, une très grande valeur tant l’examen clinique peut être peu spécifique. Il conviendra de rechercher : – le mode d’installation de la douleur et être attentif dans le cas où il n’est pas retrouvé d’élément déclenchant précis, avec un début insidieux, s’aggravant très progressivement et s’exprimant suivant un horaire non strictement mécanique ;
64 Le rachis cervical vieillissant – une altération de l’état général (asthénie traînante, amaigrissement, etc.) ; – un antécédent de cancer ostéophile (prostate, sein, rein, thyroïde, poumon, etc.). Dans ce chapitre dominent les métastases vertébrales d’autres cancers, le myélome et le lymphome. Sur les radiographies, il faudra rechercher une zone d’ostéolyse, un pédicule effacé, un massif articulaire absent ou grignoté, une zone d’ostéocondensation voire un tassement d’un corps vertébral. La difficulté est de ne pas se laisser abuser par une arthrose, fréquente, voire d’attribuer un tassement à une ostéoporose. Là encore, les examens complémentaires d’imagerie, scanner ou IRM (fig. 5), sont nécessaires ainsi que les examens de biologie. Dans d’autres cas, le contexte toujours évocateur d’une cervicalgie symptomatique dans un contexte de syndrome fébrile peut faire évoquer une spondylodiscite qui sera soupçonnée particulièrement : – chez un patient ayant des facteurs d’immunodépression tel le diabète, ou suivant certains traitements ; – s’il y a eu peu de temps auparavant un geste local, par exemple une infiltration ; – dans le cas d’une infection concomitante, par exemple dentaire. La clinique associe des signes généraux avec un syndrome fébrile et des signes locaux avec une importante limitation des mouvements du rachis cervical dans toutes les directions (fig. 6).
Fig. 5 – IRM : localisations métastatiques osseuses multiples avec tassement du corps vertébral de C6.
Pièges diagnostiques des cervicalgies du sujet âgé
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Fig. 6 – Radiographie : spondylodiscite C6-C7.
Là encore, il faudra prescrire sans attendre des examens complémentaires biologiques (au moins NFS, VS, CRP) et d’imagerie avec une priorité à l’IRM. Il est des cas plus exceptionnels où le syndrome clinique est évocateur d’une spondylodiscite, mais l’évolution rapide, avec apparition de signes neurologiques, va imposer des explorations complémentaires et une prise en charge spécialisée urgente. Le Dr Ballouche, médecin au centre de gériatrie du CHR d’Orléans, rapporte l’observation d’un homme de 65 ans traité pour HTA, diabète non insulinodépendant, ayant des antécédents d’infarctus du myocarde qui a souffert spontanément et brutalement de la région cervicale haute suivant un horaire inflammatoire avec une altération de l’état général et une fièvre. Le bilan biologique met en évidence un important syndrome inflammatoire ainsi qu’une septicémie à streptocoque B. Le scanner cervical met en évidence un abcès épidural. Très rapidement est apparue une tétraparésie imposant un geste neurochirurgical de décompression. Il s’agit toutefois là d’une pathologie exceptionnelle (2,8 pour 10 000 admissions) en région cervicale rencontrée chez des sujets âgés, fragiles et immunodéprimés (6). Mais le tableau clinique peut être plus torpide. C’est dans ces cas où réside un vrai piège diagnostique. Il existe un syndrome douloureux cervical tenace, mal soulagé par les médications habituelles, une limitation des mouvements du rachis cervical mais peu importante, une radiographie avec des images d’arthrose plus ou moins érosive sans les classiques géodes.
66 Le rachis cervical vieillissant Dans ce cas, il faudra évoquer une spondylodiscite à bacille de Koch. On devra être particulièrement attentif chez les sujets migrants notamment originaires d’Afrique subsaharienne, du sous-continent indien ou d’Asie du sud-est. Le délai de diagnostic est de 3 à 13 semaines dans le cas des spondylodiscites hématogènes, de 6 à 8 mois au cours des spondylodiscites tuberculeuses (toutes localisations confondues) (7). Dans le premier cas où le tableau clinique est plus bruyant, le contexte est en général celui de spondylodiscite à germes banals avec, en premier lieu, un staphylocoque (plus de 50 % des cas : Staphylococcus aureus dans le cas de contamination par voie hématogène, Staphylococcus epidermidis en cas d’inoculation directe). Viennent ensuite Streptococcus, Enterococcus, Escherichia coli. Les bacilles à Gram négatif sont plus fréquents chez la personne âgée. La localisation au rachis cervical représente moins de 10 % des spondylodiscites (8).
Douleurs cervicales s’exprimant suivant un horaire qui n’est pas mécanique, en dehors de tout contexte fébrile Possibilité d’une tumeur intrarachidienne Au départ, la symptomatologie est essentiellement cervicalgique avec une raideur et, toutefois, des caractères particuliers qui doivent attirer l’attention : il s’agit de douleurs cervicales d’évolution progressive, insomniantes, non améliorées par le décubitus, entraînant plusieurs réveils douloureux nocturnes, le patient se lève et marche pour être partiellement soulagé. L’examen clinique constate une importante raideur cervicale dans toutes les directions. Le plus souvent ce n’est que progressivement qu’apparaissent des signes neurologiques déficitaires, sensitifs et/ou moteurs, aux membres supérieurs et/ou aux membres inférieurs, voire des troubles vésico-sphinctériens. Le piège diagnostique existe donc surtout dans cette période avant l’apparition de signes neurologiques. Il faudra être vigilant et savoir prescrire les examens complémentaires nécessaires, l’IRM étant, là encore, l’examen de choix. Les tumeurs intradurales extramédullaires sont les plus fréquentes : méningiomes, schwannomes sont des tumeurs bénignes et de croissance lente de telle sorte que le diagnostic peut errer au départ plusieurs mois avant qu’apparaissent les signes neurologiques qui rendent le diagnostic plus aisé. Les tumeurs intramédullaires (figs. 7 et 8) les plus souvent observées sont les astrocytomes et les épendymomes (8).
Pièges diagnostiques des cervicalgies du sujet âgé
Fig. 7 – IRM : tumeur intrarachidienne.
Fig. 8 – IRM : épendymome.
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68 Le rachis cervical vieillissant
Poussée douloureuse congestive dans le cadre d’une arthrose En rapport avec les articulations zygapophysaires Monsieur M. T. est un patient de 95 ans qui a des antécédents de cervicalgies peu gênantes. Depuis quelques jours, progressivement, ses douleurs ont pris un autre caractère. Il s’agit de cervicalgies hautes, nocturnes, tenaces, plus latéralisées à droite, avec des irradiations occipitales droites, entraînant une raideur cervicale, mal soulagées par les antalgiques de paliers I et II. Cliniquement, il existe un important syndrome cervical haut avec limitation et une douleur assez exquise en C3-C4 et C4-C5 à droite. La biologie ne met pas en évidence de syndrome inflammatoire. La radiographie standard objective une importante arthrose intersomatique et zygapophysaire d’allure banale chez un homme de cet âge. Le scanner avec contraste (une IRM n’est pas réalisable car il est porteur d’un pacemaker) confirme l’existence d’une arthrose intersomatique étagée et zygapophysaire étagée et met en évidence une importante synovite des articulations zygapophysaires C3C4 à droite (fig. 9). Le patient sera traité par infiltration scano-guidée d’un corticoïde en articulaire postérieur.
Fig. 9 – Scanner coupe sagittale : importante arthrose intersomatique étagée et coupe axiale avec contraste montrant une synovite de l’articulation interapophysaire postérieure C3-C4 droite.
Pièges diagnostiques des cervicalgies du sujet âgé
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En rapport avec une discopathie active Dans certains cas, la poussée douloureuse est en rapport avec une poussée de « discopathie congestive » (discopathie active de M. Revel), évolution correspondant certainement à une phase de discolyse. Cette pathologie a été davantage étudiée pour le rachis lombaire que cervical. La clinique n’est pas forcément caractéristique, mais le plus souvent il s’agit d’un patient ayant des douleurs rachidiennes chroniques de type mécanique et dont la douleur change rapidement de caractère, sans élément déclenchant retrouvé, pour devenir plus intense en fin de nuit et le matin. L’IRM mettra en évidence un œdème (inflammatoire pour certains auteurs) des plateaux vertébraux avec hyposignal en T1 et hypersignal en T2, signal de type Modic I (fig. 10). (9).
Fig. 10 – IRM, coupes sagittales : discopathie active C7-T1 (signal de type Modic I).
Poussée douloureuse dans le cadre d’une arthropathie microcristalline (hydroxyapatite, pyrophosphate de calcium) Monsieur S. M. est un homme de 67 ans qui est suivi pour des gonalgies de caractère mécanique avec essentiellement une souffrance fémoro-patellaire et un canal lombaire rétréci modéré responsable de lombo-radiculalgies. Il consulte un jour pour des cervicalgies hautes, de survenue brutale, sans élément déclenchant particulier, avec irradiation douloureuse à la région occipitale bilatérale et irradiation vers la région mastoïdienne droite. Il n’a pas de signes généraux, pas de fièvre. La biologie ne met pas en évidence de syndrome inflammatoire. Les radiographies démontrent une calcification péri-odontoïdienne réalisant un aspect de « dent couronnée » évocatrice d’un rhumatisme à hydroxyapatite (fig. 11). Le rhumatisme à apatite correspond à des dépôts extra- (péri-) articulaires de microcristaux d’hydroxyapatite. L’épaule est l’atteinte la plus fréquente avec des dépôts dans les tendons de la coiffe des rotateurs, la hanche avec dépôts dans le tendon du moyen gluteus.
70 Le rachis cervical vieillissant Le traitement fait appel aux AINS, voire à une corticothérapie en courte cure de 3 à 8 jours (8). La chondrocalcinose, souvent associée à l’arthrose, se caractérise par la précipitation dans les tissus articulaires et péri-articulaires (cartilage, fibrocartilage, capsule, tendons), de pyrophosphate de calcium dihydraté. Au niveau des disques intervertébraux, elle réalise des calcifications discales et du pourtour discal (fig. 12). Dans ce cas, il faudra rechercher d’autres localisations sur les radiographies avec présence d’un liseré sur les genoux, les poignets, la symphyse pubienne (8). La nucléopathie calcifiante n’est, le plus souvent, pas symptomatique chez l’adulte. En revanche, il existe une possible forme réalisant le tableau d’une atteinte pseudoméningée, avec tableau clinique de torticolis aigu fébrile. Le traitement fait appel aux AINS avec les précautions d’usage en particulier chez le sujet âgé. La colchicine peut être prescrite mais elle a un effet moins spectaculaire que dans la goutte.
Fig. 11 – Radiographies : calcification péri-odontoïdienne.
Fig. 12 – Radiographie du rachis cervical de profil : calcification discale antérieure.
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Pseudo-polyarthrite rhizomélique Il s’agit de sujets âgés et d’âge moyen (plus de 50 ans) chez lesquels, parfois, les cervicalgies vont être la plainte majeure, les arthromyalgies rhizoméliques étant au second plan. Ces douleurs sont d’horaire inflammatoire avec réveil nocturne, raideur matinale. Les douleurs rhizoméliques, la plupart du temps au premier plan, sont bilatérales dans 95 % des cas, pas toujours symétriques. Les signes généraux sont fréquents : asthénie, amaigrissement, et souvent fébricule. La pseudo-polyarthrite rhizomélique est fréquemment associée à une maladie de Horton. Le traitement repose sur la corticothérapie prolongée.
Rhumatismes inflammatoires Qu’il s’agisse de la polyarthrite rhumatoïde ou des spondylarthropathies, il est exceptionnel que la cervicalgie soit révélatrice. En revanche, dans un contexte de polyarthrite rhumatoïde (fig. 13), il faudra savoir rattacher une cervicalgie haute à une atteinte axoïdo-atloïdienne à l’origine d’une instabilité par lésion du ligament transversaire de l’atlas.
Fig. 13 – IRM coupe sagittale : atteinte axoïdo-atloïdienne dans le cadre d’une polyarthrite rhumatoïde.
72 Le rachis cervical vieillissant
Cervicalgies, expression d’affections neurologiques Les tumeurs de la fosse postérieure, sous-tentorielles, ainsi que les malformations nerveuses ou vasculaires peuvent se manifester par des cervicalgies hautes avec une attitude antalgique. S’il existe des signes neurologiques, le diagnostic sera plus aisément orienté ou si, sur les radiographies standard, il existe une malformation de la charnière occipito-cervicale. Deux fois moins nombreuses que les tumeurs supratentorielles, on distingue les tumeurs intra-axiales développées à partir du tissu cérébral et les tumeurs extra-axiales développées dans les espaces sous-arachnoïdiens (essentiellement à partir des enveloppes méningées) ou dans les parois osseuses de la cavité crânienne et les tumeurs extraaxiales, les plus fréquentes, siégeant surtout dans la citerne de l’angle ponto-cérébelleux (schwannomes vestibulaires, méningiomes, tumeurs épidermoïdes) (10).
Cervicalgies d’origine ORL ou œsophagienne Les affections tumorales, bénignes ou malignes, ou infectieuses, peuvent s’exprimer par un syndrome cervicalgique.
Douleur d’origine cervicale projetée : céphalées, scapulalgies, dorsalgies En dehors du contexte de polyarthrite rhumatoïde où l’on connaît la possible atteinte du rachis cervical haut et notamment de l’articulation atloïdo-axoïdienne, et dans lequel la céphalée n’est pas isolée, il est de fréquentes consultations pour céphalées qu’il n’est pas toujours facile de rattacher à une origine vertébrale cervicale. Des lésions anatomoradiologiques, en général arthrosiques C1-C2 et C2-C3, ont été reconnues comme cause de douleurs céphaliques. La névralgie occipitale d’Arnold qui exprime la souffrance de la branche postérieure de la deuxième racine cervicale a été signalée en particulier lors de lésions arthrosiques. Des douleurs auriculaires et rétroauriculaires unilatérales, attribuées à une souffrance de la deuxième racine cervicale, ont été décrites dans le cadre d’arthrose cervicale avec atteinte des articulations interapophysaires postérieures. Une injection anesthésique unilatérale de C1-C2 entraîne un soulagement spectaculaire (11). Dans d’autres cas, le lien est plus difficile à établir, c’est celui des céphalées cervicogéniques, concept avancé par Sjaastad en 1983 (11). La céphalée, de siège occipital et/ou occipito- frontal, est attribuée à des lésions infraradiologiques ou à des dérangements fonctionnels des articulations du rachis cervical haut (12). Toutefois, il faut être vigilant et se rappeler, avant de retenir le diagnostic de céphalées cervicogéniques par dérangement intervertébral mineur ou par lésion arthrosique, qu’un anévrisme de l’artère vertébrale ou de la carotide interne peut s’exprimer ainsi.
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Il est d’autres cas fréquents où des patients viennent consulter, avec pour doléance « une douleur de l’épaule ». L’origine cervicale de la douleur est la plupart du temps retrouvée par un examen clinique attentif. Le problème est parfois plus difficile lorsqu’il y a, concomitamment à la souffrance cervicale, une atteinte dégénérative de la coiffe des rotateurs avec, par exemple, une bursite sous-acromio-deltoïdienne ou une pathologie de l’articulation acromio-claviculaire. Une infiltration, de la bourse sous-acromiale ou de l’articulation acromio-claviculaire, à titre de test diagnostique (test anesthésique), peut être utile. Dans d’autres cas, le motif de consultation est une dorsalgie unilatérale de siège interscapulo-vertébral. L’examen attentif retrouvera une douleur de la région inter-scapulovertébrale que l’on rattachera à une origine cervicale basse par la constatation, lors de l’examen clinique, d’une douleur paravertébrale droite en regard de C6-C7. Enfin, parfois, le doute diagnostique avec une affection cardiaque peut être évoqué dans le cas de douleur thoracique. Il est évident que l’origine cervicale sera celle envisagée après que le bilan cardiaque et pulmonaire aura été fait. Une souffrance cervicale peut effectivement avoir une projection sur la paroi thoracique antérieure. Nous ne ferons enfin que signaler ici le problème des cervicalgies et vertiges, question fréquemment posée en pratique quotidienne, en particulier chez le sujet âgé, et dont le lien est bien difficile à établir avec les lésions arthrosiques cervicales. Pour certains auteurs, cette origine peut être envisagée dans le cas de lésion arthrosique sur le rachis cervical haut. Une autre hypothèse avancée est celle de la réduction du flux de l’artère vertébrale par une arthrose cervicale.
Conclusion La cervicalgie est un symptôme et un motif très fréquent de consultation en pratique quotidienne, dont les causes mécaniques, dégénératives – cervicalgie commune – sont de loin les plus fréquentes. Chez le sujet âgé, compte tenu de la très grande fréquence de l’atteinte arthrosique et du caractère souvent peu spécifique au départ du symptôme cervicalgique, il faudra rester vigilant, avec un examen clinique systématisé et rigoureux afin de ne pas méconnaître une cervicalgie symptomatique, expression d’une affection traumatique, tumorale, infectieuse, ou inflammatoire, dont le pronostic pourrait être péjoratif en l’absence – ou avec un important retard – de la mise en œuvre du traitement approprié.
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Les camptocormies cervicales S. Bendaya, B. Missaoui, M. Mane, O. Hantkie et P. Thoumie
Introduction La camptocormie cervicale (CCC), ou dropped head syndrome, est une déformation caractérisée par une flexion antérieure de la tête sur le tronc qui disparaît en position allongée ou lors de l’assistance active de l’extension de la tête par les membres supérieurs. Cormos veut dire en grec tronc et ptosis chute passive. Ce syndrome est au croisement de plusieurs affections neurologiques, orthopédiques et rhumatologiques.
Physiopathologie Les étiologies de la CCC sont très variées. En chef de file, nous retrouvons les maladies neurologiques. La maladie de Parkinson est particulièrement impliquée dans sa forme akinétohypertonique (1). Song (2) évoque, dans l’association de la maladie de Parkinson et de la camptocormie, un dysfonctionnement significatif des neurones non dopaminergiques dans les ganglions de la base du cerveau. Oyama (3) suggère une sensibilité des récepteurs dopaminergiques qui peuvent jouer un rôle dans la pathogénie. À l’opposé, Lepoutre (4) rapporte l’absence de toute activité électromyographique paradoxale des muscles spinaux, ce qui va à l’encontre d’une dystonie dans les spinaux thoracolombaires et que le traitement par lévodopa améliore de 24 % la cyphose vertébrale. Cette attitude serait liée à une rigidité axiale des muscles fléchisseurs et la déplétion de la voie dopaminergique dans la maladie de Parkinson induit des modifications fonctionnelles dans l’organisation des voies cortico- et réticulo-spinales. Ces dysfonctionnements peuvent contribuer à la rigidité spinale. Song et Kashihara (1, 2) n’écartent pas l’hypothèse d’une posture particulière liée à la dystonie des muscles axiaux. D’autres affections neurologiques, à l’origine d’un déficit des muscles spinaux, sont décrites telles que : la myasthénie (5, 6), la sclérose latérale amyotrophique (7), la myotonie de Steinert, les polyneuropathies inflammatoires chroniques, les syndromes post-poliomyélitiques, les myopathies à inclusion, myopathies mitochondriales, les
76 Le rachis cervical vieillissant myopathies congénitales non spécifiques, les myopathies des ceintures de type FSH, myopathie liée à la mutation du gène de la némaline et de la sélénoprotéine N1 (8). Des causes métaboliques sont évoquées, telles que le déficit en carnitine, le syndrome de Cushing, les myopathies secondaires à l’hypothyroïdie, les myopathies hypokaliémiques sévères. Des causes iatrogènes sont décrites, comme dans les suites de la radiothérapie cervicale d’un cancer du tissu hématopoïétique. Les causes rhumatologiques et orthopédiques sont de plusieurs natures. L’arthrose cervicale est incriminée en association avec le syndrome de la tête tombante (STT) idiopathique (9). Un STT peut survenir après chirurgie du rachis cervical et des causes posttraumatiques sont même évoquées (10). Le mécanisme serait alors en faveur d’une dystonie secondaire.
Différents tableaux cliniques Parkinson et syndrome de la tête tombante Plusieurs travaux décrivent la présence du syndrome de la tête tombante dans la maladie de Parkinson (1, 3, 11). Cette déformation peut être attribuée à l’hypertonie des muscles fléchisseurs du cou. Selon Ashmark (11), la faiblesse de leurs antagonistes n’a pas été rapportée dans la littérature. Cette déformation est également observée chez certains sujets âgés présentant une atteinte des muscles spinaux. S’agit-il de deux entités différentes ou des manifestations d’une myopathie axiale ? Cette association n’est pas rare au Japon, elle est estimée de l’ordre de 6 % par Kashihara (1) ; en effet, il la retrouve chez 15 des 252 malades parkinsoniens (plus fréquemment chez les femmes (12 femmes pour 3 hommes), la moyenne d’âge est de 62,8 ans, elle apparaît après 5,4 ± 4,3 ans d’évolution, particulièrement dans les formes akinéto-hypertoniques. Le score de Hoehn et Yahr était de 3,2. La camptocormie thoraco-lombaire dans le Parkinson par comparaison à celle cervicale est estimée, dans l’étude de Tiple, (12) à 6,9 % (19/275 patients), elle semble proportionnelle à la sévérité du Parkinson mais, selon lui, le degré de flexion antérieure du tronc n’est pas corrélé à l’âge, à la durée du Parkinson, au score de Hoehn et Yahr et à la durée et à la dose de lévodopa. Dans l’étude d’Ashmark (11), la maladie de Parkinson est retenue sur la présence de deux sur les trois signes de la maladie (rigidité, hypokinésie et tremblement), l’atrophie multi-systématisée (AMS) se caractérise en plus par une absence de réponse au traitement par lévodopa et la présence d’une dysautonomie. L’AMS et la maladie des corps de Lewy s’associeraient à un antécolis. Dans la littérature, seule une étude japonaise considère ces entités nosologiques comme différentes (myopathies isolées des extenseurs associée à une maladie de Parkinson. Oyama (3), à l’opposé, considère que le Parkinson et le syndrome de la tête tombante ne constituent pas une association fréquente, sur 28 parkinsoniens présentant cette déformation (2 hommes et 26 femmes) explorés par un examen clinique et électromyographique. Chez certains patients, la tête tombante se produit à l’initiation ou au renforcement du traitement par agonistes dopaminergiques (moins fréquemment avec la
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pergolide qu’avec la cabegorline et le pramipexole). À l’opposé, l’amélioration a été obtenue chez certains patients après réduction des doses des agonistes dopaminergiques chez certains et l’augmentation de la lévodopa chez d’autres. L’EMG à l’aiguille n’a pas montré de tracés myogènes, en revanche l’EMG de surface a mis en évidence une augmentation de l’activité électromyographique des muscles sterno-cléido-mastoïdiens, lors de la mobilisation passive en extension du rachis cervical. Il suggère ainsi une augmentation des doses en lévodopa et une diminution des agonistes dopaminergiques dans le traitement du syndrome du STT associé au Parkinson. Dans la maladie à corps de Lewy, la survenue d’un STT et des signes parkinsoniens après l’introduction d’un traitement par olanzapine à la dose totale journalière de 10 mg a été décrite (13). Une semaine après la suppression de ce traitement, la posture de la tête s’est progressivement corrigée jusqu’à un retour à la position normale après substitution par un traitement dopaminergique. L’auteur évoque comme mécanisme soit une myopathie des spinaux liée à la rigidité axiale, soit une dystonie cervicale focale induite par le blocage des récepteurs dopaminergiques. Le syndrome de la tête tombante peut avoir des origines multiples, la sensibilité des récepteurs dopaminergiques peut jouer un rôle dans la pathogénie. Dans le traitement du syndrome de la tête tombante chez les parkinsoniens, une augmentation des doses de la lévodopa et une diminution de celles des agonistes dopaminergiques doivent être prises en considération. Tagushi (14) a constaté, chez une femme âgée de 71 ans atteinte de maladie de Parkinson, après l’introduction du traitement à base de pramipexole à la dose de 0,5 mg, 2 fois par jour, la régression des symptômes associant au départ tremblement de repos, rigidité et bradykinésie discrète du membre supérieur gauche ; mais il a observé, un an et demi plus tard, le développement d’un STT et des cervicalgies liées à une dystonie permanente des sterno-cléido-mastoïdiens entravant l’extension cervicale. Cette déformation a été réversible deux semaines après l’arrêt du pramipexole et sa substitution par lévodopa/carbidopa à la dose de 50 mg, 3 fois par jour. Le test anesthésique à la lidocaïne peut être déterminant pour sélectionner les patients répondeurs au traitement par toxine botulique. Mais d’autres travaux sont nécessaires pour évaluer les résultats de ces traitements (3). Alors que dans la camptocormie associée à la maladie de Parkinson et l’AMS, la majorité des auteurs, hormis des cas rares (2), constate une amélioration des symptômes moteurs sous lévodopa ; les effets sur la camptocormie sont faibles ou inexistants. La série de Song ne comporte en revanche que quatre patients qui sont améliorés aussi bien au niveau des signes moteurs qu’au niveau de la camptocormie par le traitement à base de lévodopa. Ceci lui permet de retenir l’hypothèse d’une rigidité axiale liée à une déplétion en dopamine. Différents traitements ont été essayés, comportant les anticholinergiques, l’amantadine, les agonistes dopaminergiques, les myorelaxants, et la tétrabénazine sans résultat sur la posture pathologique. Oerlemans (15) suggère que la faiblesse de la musculature axiale affectant la région cervicale ou thoracique favorise l’apparition respectivement du syndrome de la tête tombante et des camptocormies.
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Syndrome de la tête tombante et camptocormie La camptocormie est un phénomène moteur dont les origines sont multiples. Elle peut être secondaire à un hématome intradural, à une infection vertébrale, à une tumeur de la moelle épinière, à un canal rachidien étroit, une myosite des spinaux ou à une toxicité du valproate de sodium (15). Elle peut avoir aussi une origine psychogène. D’autres étiologies sont rapportées telles que la myopathie isolée des muscles spinaux cervicaux et l’atteinte focale des extenseurs thoraco-lombaires, responsable d’une camptocormie thoraco-lombaire (bent spine syndrome). L’inflammation dans ces cas n’est pas prononcée et la réponse au traitement par immunoglobuline n’est pas habituelle. Cette association dans le cadre d’une myopathie est usuelle. Dominick (17) rapporte un cas de bonne réponse au traitement par immunoglobuline chez une femme âgée de 81 ans. Kocaaga (18) décrit une association rare de camptocormie thoraco-lombaire et d’un syndrome de la tête tombante chez une femme souffrant de dystonie myotonique. Dans d’autres cas, cette complication est décrite dans les affections extrapyramidales telles que le syndrome parkinsonien post-encéphalitique, le parkinsonisme juvénile d’origine autosomique récessif, la maladie de Parkinson idiopathique et l’atrophie multisystématisée après exposition au pramipexole et les dystonies axiales.
Camptocormie cervicale et myopathie Les mitochondriopathies (19, 20) peuvent entraîner un STT ; dans ce cas, la nuque tombante s’intègre dans un contexte de déficit affectant d’autres muscles. Des myopathies non spécifiques et non inflammatoires sont associées à cette déformation à un âge tardif entre 61 et 79 ans (21), celles-ci affectent soit sélectivement, soit de façon prédominante, les spinaux cervicaux. Dans une série de sept patients, deux jumeaux homozygotes ont présenté cette affection à un an d’intervalle, respectivement à 63 et 64 ans. Ceci évoque que certains patients souffrent de formes de myopathie distinctes d’installation tardive et génétiquement prédéterminées pouvant conduire au STT. Nakinashi (22) décrit un cas similaire de myopathie non spécifique chez une patiente âgée de 68 ans ayant développé sur un an un STT, compliqué de signes neurologiques en raison de l’installation d’une instabilité C4-C5 et d’une compression médullaire, ayant bien répondu au traitement chirurgical. Les myosites focales des spinaux cervicaux (23) donnent des modifications œdémateuses et un réhaussement qui disparaissent à l’IRM après traitement. Kastrup (23), à partir de la description d’un cas âgé de 74 ans ayant développé en 2 mois un STT, insiste sur la nécessité de réaliser une biopsie musculaire et une IRM cervicale à la recherche d’une myosite inflammatoire qui réagit bien au traitement corticoïde.
Camptocormie cervicale et sclérose latérale amyotrophique La présence du STT peut être un mode d’entrée dans la sclérose latérale amyotrophique ou un signe d’apparition tardive (7). Ce symptôme peut être inaugural et s’accompagne rapidement de signes d’atteinte de la moelle cervicale et du bulbe avec l’installation d’une dysphagie de fasciculation de la langue et de déficit des membres. L’IRM ne
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montre pas nécessairement des anomalies au niveau de la moelle et du cerveau et l’EMG met en évidence des potentiels d’unités motrices géantes, des fibrillations et des fasciculations, ainsi qu’une dénervation active et chronique dans les muscles de territoire bulbaire et cervical. Les vitesses de conduction motrice et sensitive étaient normales (7, 25). (Dans cette dernière étude sur une population de 683 patients atteints de SLA, 9 présentaient un STT ce qui représente une incidence pour cette pathologie de 1,3 %.) La gêne fonctionnelle majeure du STT dans la SLA prend une dimension plus grave dans le cadre de cette affection rapidement évolutive et redoutable.
Camptocormie cervicale et myasthénie Le STT bien que rare dans la myasthénie peut être évocateur ou associé à cette affection. La faiblesse des muscles extenseurs du cou peut être un signe de début de la maladie (6, 26). Le diagnostic de myasthénie sera évoqué sur les résultats du test à l’endrophonium, à l’enregistrement de l’activité musculaire volontaire caractéristique, à l’EMG et à l’augmentation dans le sérum du taux des récepteurs aux anticorps anti-acétylcholine. L’évolution a été favorable sous traitement par pyridostigmine à la dose de 120 mg par jour. Il n’a pas été nécessaire de réaliser une thymectomie ou d’introduire un traitement corticoïde. Dans un autre cas, ces derniers traitements étaient rendus nécessaires pour améliorer la symptomatologie (27). Dans ces cas rares, il n’a pas été objectivé d’autres signes de déficit musculaire habituels tels que ceux des muscles faciaux, des membres ou respiratoires. Ce signe doit néanmoins faire évoquer systématiquement la myasthénie parmi les causes neurologiques du STT. Un cas rare de STT est décrit par Wakata (5). Ce dernier se caractérise par une association d’une myasthénie et d’une dégénérescence sévère des muscles spinaux par délétion de l’ADN mitochondrial. Ces deux affections sont potentiellement responsables de cette déformation cervicale. Enfin, Fasano (28) rapporte la présence d’un STT dans une maladie de Parkinson, dont l’origine est imputée à l’association à une myasthénie sur la base des explorations cliniques, neurophysiologiques et à la réponse aux anti-cholinestérasiques et aux échanges plasmatiques.
Camptocormie cervicale et complications neurologiques Le STT peut être secondaire à une cyphose thoracique, entraînant le STT qui entrave le maintien de l’horizontalité du regard. Ainsi, un cas est décrit par Kawaguchi (29) chez une femme de 80 ans. L’extension forcée du rachis cervical a été responsable d’une déstabilisation rachidienne et l’installation d’une compression médullaire. L’évolution a été favorable après laminoplastie de C2 à C6. Nalini (30) décrit deux cas rares de STT survenus dans les suites d’une syringomyélie. Le déficit des muscles spinaux cervicaux s’est installé de façon rapidement progressive, dans les deux cas après environ 2 à 3 ans, de l’installation de paralysie asymétrique des muscles des mains, l’examen ne retrouvait ni syndrome de Claude Bernard-Horner, ni
80 Le rachis cervical vieillissant signes cérébelleux ou d’atteinte des paires crâniennes. Les réflexes ostéotendineux (ROT) étaient diminués aux membres supérieurs et vifs aux membres inférieurs. La sensibilité superficielle était perturbée avec un niveau lésionnel précis cervical haut épargnant la face. L’IRM médullaire retrouvait un hyposignal en T1 et un hypersignal en T2 au niveau cervical haut avec une syringomyélie. Dans l’étude de Nakanishi (22), à propos d’une femme de 68 ans, les signes neurologiques sont apparus 1 an après l’installation du STT dans un contexte de myopathie cervicale non spécifique isolée confirmée par la biopsie. Le tableau a associé dans ce contexte de cyphose et d’instabilité C4-C5 une myélopathie en regard et un déficit des quatre membres, une maladresse gestuelle et des troubles de l’équilibre. La reprise de marche a été possible un mois après la chirurgie associant laminectomie et fixation occipito-cervico-thoracique.
Camptocormie cervicale d’origine traumatique et iatrogène Amin (31) et Brazdil (16) incriminent le traitement antiépileptique comme facteur de risque de développement du STT. Brazdil rapporte la survenue d’un STT chez neuf patients épileptiques d’âge moyen de 33,6 ans. L’exploration complète clinique électrique et IRM n’a pas trouvé d’anomalies. Le traitement principalement à base d’acide valproïque a été incriminé comme produisant un déficit en carnitine (29). Shuper (10) décrit un cas rare de STT chez un enfant de 14ans survenu après un traumatisme cervical suivi rapidement d’un torticolis et d’une dystonie axiale. Le traitement médical de la dystonie et la rééducation étaient efficaces. D’autres causes iatrogènes sont décrites telles que dans les suites de la radiothérapie de carcinome du larynx (32) ou à la suite d’une maladie de Hodgkin, l’irradiation étant destinée aux adénopathies lymphoïdes des régions cervicales, axillaire et médiastinale (33). Le délai d’apparition varie entre 2 et 27 ans. Dans l’étude d’Astudillo (32), le STT est apparu 3 mois après une irradiation de 74,4 Gray, le mécanisme invoqué est une irradiation aiguë de la moelle. L’atteinte serait liée soit à une lésion de la moelle cervicale par radiothérapie pouvant entraîner une dystonie des muscles cervicaux antérieurs, soit à une fibrose et une atrophie des spinaux et de la région scapulaire accompagnant cette dystonie.
Discussion et traitement de la camptocormie cervicale Le traitement de la camptocormie cervicale doit être dans la mesure du possible étiologique, ce d’autant qu’il existe des causes curables. La posture en cyphose adoptée dans la maladie de Parkinson favorise un étirement mécanique des spinaux, une perte de l’élasticité tissulaire et par conséquent des lésions des spinaux. Ceci fait retenir l’hypothèse d’une myopathie non spécifique des spinaux (quatre malades sur sept dans l’étude d’Ashmarck (11) confirmée par biopsie), mais
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n’explique pas la survenue du STT quand il précède de quelques années la maladie de Parkinson. Quand ces conditions de myopathie des extenseurs cervicaux et maladie de parkinson sont réunies, Ashmark suggère la présence d’AMS. Dans la maladie de Parkinson, l’amélioration de la CCC par le traitement médical est sujette à controverse. Pour Kashihara (1), sur une série de 15 patients, 11 patients sont améliorés par la dopamine, chez deux autres patients l’administration d’agonistes dopaminergiques provoque l’apparition du STT, quatre patients n’ont pas réagi à tout type de traitement. Oyama (3) décrit aussi l’installation du STT après l’administration d’une dose de charge d’agonistes dopaminergiques réversible avec la réduction de ces doses et après augmentation de celles de la lévodopa. D’autres auteurs (34) ont suggéré que le traitement de la camptocormie thoracolombaire par stimulation électrique à haute fréquence de façon stéréotaxique au niveau du pallidum avait un bon résultat ; il n’y a pas d’études s’adressant à l’effet de cette technique sur la camptocormie cervicale. À l’opposé, Azher (35), à propos d’un cas, n’a pas obtenu de résultat sur la camptocormie avec cette méthode. Dans les indications orthopédiques, Macé (9) propose le traitement par halo de traction pendant 8 semaines, relayé par le port d’un collier cervical parallèlement à un programme de rééducation intensive pendant 10 semaines. Ceci a permis d’obtenir un très bon résultat stable pendant 2 ans de suivi. Le STT dans ce cas était lié à la fois à une arthrose cervicale combinée à une cause idiopathique. L’orthèse de Baseball comparable à une minerve avec un bandeau frontal (36) est décrite comme une alternative simple au traitement chirurgical du STT. Ce dernier est décrit comme pouvant perturber l’équilibre du rachis cervical, ceci à propos de deux patients souffrant d’affections neuromusculaires. Parmi les causes curables, nous citons la myasthénie à propos de deux observations de Spengo (27) et de Yaguchi (6), où chez chacun de leur patient l’administration de pyridostigmine et de prednisone a permis d’obtenir un excellent résultat, particulièrement après thymectomie en présence d’une hyperplasie du thymus. Fasano (28) suggère la présence, en plus du Parkinson, d’une myasthénie eu égard à l’amélioration du STT après administration d’anticholinestérasique et plasmaphérèse. Dans les myosites inflammatoires, aussi bien Dominick (17) que Kastrup (24) rapportent chacun à propos d’un cas le traitement de patients, âgés respectivement de 81 ans et de 74 ans, le premier patient est traité par immunoglobulines et le second par corticoïdes à quelques mois du début d’évolution avec un excellent résultat, appuyés sur des critères radiologiques par IRM et sur la biopsie musculaire. Le diagnostic peut être suggéré à l’IRM, qui montre un œdème et un rehaussement des spinaux cervicaux qui disparaissent après traitement (22). Les myopathies métaboliques (hypothyroïdie) relèvent d’un traitement spécifique. Le traitement chirurgical est sujet à controverse dans la littérature. Le traitement chirurgical (29) est préconisé en présence de signes neurologiques, il décrit une patiente de 80 ans présentant un STT et une myélopathie cervicarthrosique traitée par laminoplastie de C2 à C6 avec un bon résultat à 1 an de recul. De la même manière, pour
82 Le rachis cervical vieillissant Nakanishi (22), l’observation d’une patiente de 68 ans avec STT présentant une myopathie non spécifique des spinaux cervicaux a permis de constater une évolution en un an vers une compression médullaire du fait de l’obligation d’effectuer une extension forcée pour maintenir l’horizontalité du regard. Ceci a conduit à la réalisation d’une laminectomie et une fixation occipito-cervico-thoracique avec un résultat satisfaisant sur le plan neurologique et fonctionnel. Pour Petheram (37), sur une série de sept patients, un seul a bénéficié d’un traitement chirurgical, les causes du STT ne sont pas clairement précisées. Parmi les six patients traités par rééducation et collier cervical, trois ne sont pas améliorés, deux sont peu améliorés, un patient – le plus jeune – a vu son état bien s’améliorer. La seule patiente ayant bénéficié d’une arthrodèse C4-T2 a été insatisfaite du résultat en raison de la gêne fonctionnelle occasionnée et de l’impossibilité d’adaptation posturale. À l’opposé, dans l’étude de Gerling (38) portant sur neuf patients présentant une myopathie cervicale (quatre primitives et cinq secondaires à une radiothérapie), il rapporte sept excellents résultats et deux mauvais après une arthrodèse postérieure instrumentée de C2 au rachis thoracique supérieur. Il estime que les nouvelles instrumentations et l’utilisation de la protéine morphogénique osseuse ne peuvent qu’améliorer l’arthrodèse et la correction.
Cas cliniques Nous rapportons quatre cas cliniques suivis dans notre service pour des troubles de l’équilibre et de la marche d’origine neurologique ou neuro-orthopédique et qui présentent une camptocormie cervicale.
Cas n° 1 Monsieur R., âgé de 77 ans, a présenté en 1991 une tétraparésie C4 post-traumatique traitée orthopédiquement avec un rachis dégénératif. Le tableau neurologique associait un niveau sensitivomoteur C5 incomplet assimilé à une classification ASIA à C. En 2003, soit 12 ans plus tard, il a développé une camptocormie cervicale douloureuse de façon contemporaine à l’installation d’une névralgie cervico-brachiale mal systématisée. À l’examen, les mobilités cervicales sont limitées dans les trois plans et l’extension cervicale ne permet pas l’horizontalité du regard. À l’examen orthopédique, la déformation cervicale s’accompagne d’une cyphose dorsale supérieure et d’un début d’inversion de courbure lombaire (fig. 1). L’examen neurologique retrouve une hypoesthésie C5C6C7 et un niveau sensitif thermo-algique en D6-D7 bilatéral, la sensibilité profonde était normale à tous les modes, les ROT sont abolis aux membres supérieurs et vifs aux membres inférieurs, accompagnés d’une spasticité stationnaire des deux membres inférieurs affectant majoritairement les quadriceps et aux membres supérieurs les palmaires traitées à ce niveau par de la toxine botulique. La cotation musculaire sur l’échelle internationale est estimée globalement à 3/5.
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La radiographie cervicale montre, en plus de l’attitude vicieuse, une cervicarthrose étagée en C4-C5-C6 avec des foramens réduits dans ces mêmes niveaux. L’absence de modification de l’examen neurologique en 2008 par rapport à 2003 datant de la dernière IRM n’a pas incité à contrôler la myélomalacie cervicale par une IRM de contrôle. Celleci est néanmoins demandée afin de vérifier l’état des muscles spinaux cervicaux. La rééducation a comporté un assouplissement de toute la chaîne postérieure afin de favoriser les compensations postérieures à partir du bassin et de la région souspelvienne, le renforcement musculaire des spinaux cervicaux et le port d’un collier en mousse de type C2.
Fig. 1 – Camptocormie cervicale douloureuse de façon contemporaine à une névralgie cervicobrachiale mal systématisée.
Cas n° 2 Monsieur M. J âgé de 44 ans est atteint d’une myotonie de Steinert symptomatique depuis 1992, diagnostiquée en 1994, à la suite d’un alitement prolongé à l’occasion d’une occlusion intestinale compliquée en 2006. Son déficit moteur s’est aggravé au niveau des membres et du tronc et s’est accompagné d’une camptocormie cervicale (fig. 2). En dehors du syndrome dysmorphique caractéristique, l’attitude posturale globale en position debout comporte une camptocormie cervicale, le tronc et le bassin sont en rétroversion et les hanches sont en position fléchie. Les ROT sont abolis, le bilan sensitif est normal et la cotation musculaire est entre 3 et 4 aux membres inférieurs, entre 2 et
84 Le rachis cervical vieillissant 3 aux membres supérieurs, les muscles spinaux sont cotés à 2 et les fléchisseurs à 4 au niveau cervical. Ce patient a été pris en charge en rééducation en hôpital de jour dans notre service pendant 6 semaines. L’évaluation isocinétique au niveau du tronc à l’entrée à 60°/s a montré une force sur les fléchisseurs de 118 nm et sur les extenseurs de 47 nm. Le bilan de fin de prise en charge retrouve une force sur les fléchisseurs du tronc améliorée à 128nm et une aggravation sur les extenseurs à 38 nm. L’aggravation du déficit s’agissant d’un handicap évolutif a incité à prendre une canne simple afin de préserver son statut fonctionnel.
Fig. 2 – Examen neurologique.
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Cas n° 3 Monsieur S.C., âgé de 56 ans, est atteint d’un syndrome parkinsonien atypique avec une dopa-sensibilité modérée, de type atrophie multi-systématisée (MSA-P) découverte en 2003 (figs. 3 et 4). En 2005, il adopte une attitude camptocormique cervico-dorso-lombaire favorisée par une scoliose dextro-convexe préexistante, avec une gibbosité dorsolombaire gauche et le développement progressif d’un antécolis. Cette déformation est réductible en décubitus dorsal avec une élévation des deux membres supérieurs. L’examen neurologique est marqué par une dysautonomie, des troubles vésicosphinctériens, une dysarthrie, la commande motrice étant subnormale. L’attitude est celle d’une camptocormie globale avec une flexion antérieure et inclinaison latérale droite du tronc associée à un antécolis avec une perte de l’horizontalité du regard. Il n’existait pas de rétraction du secteur sous-pelvien. Le port d’un collier cervical de type C2 et le travail progressif de correction posturale et de renforcement isocinétique du tronc ont permis une amélioration partielle de la position de la tête. On a discuté une injection de toxine botulique des deux SCM lors de son prochain séjour en hôpital de jour.
Fig. 3 – Camptocormie cervicale en position de repos.
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Fig. 4 – Position corrigée.
Cas n° 4 Le sujet a une camptocormie cervico-dorsale séquellaire d’un accident vasculaire hémorragique sur HTA qui date de 1997. Il persiste une hémiplégie gauche spastique avec une légère hémi-négligence et des troubles sensitifs superficiels et profonds. Le membre supérieur gauche est non fonctionnel. Au membre inférieur, la commande est entre 2 et 3 à la racine et au genou, permettant une déambulation sur 150 m avec deux à trois pauses à l’aide d’une canne tripode. On note l’apparition de façon progressive d’une camptocormie cervico-dorsale qui a été corrigée partiellement en fin de séjour par la rééducation et le port d’un collier cervical de type C2 (fig. 5).
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Fig. 5 – Camptocormie cervico-dorsale séquellaire.
Conclusion La camptocormie cervicale constitue une gêne fonctionnelle et sociale majeure. Elle est d’étiologie variée et parfois peut constituer un mode d’entrée dans certaines maladies neurologiques ou rhumatologiques, elle doit faire rechercher dans ce cas : une maladie de Parkinson, une myasthénie ou une sclérose latérale amyotrophique, voire une polymyosite. Nous pouvons ainsi les classer en quatre catégories. Les plus fréquentes étant les causes neurologiques dominées par le syndrome de Parkinson, ensuite nous retrouvons les formes orthopédiques liées à la dégénérescence vertébrale avec la constitution, pour certains auteurs, de façon progressive d’une myopathie focale cervicale. Des causes métaboliques sont identifiées telles que le syndrome de Cushing et l’hypothyroïdie. Des formes iatrogènes sont décrites et semblent favorisées par certains traitements tels que la radiothérapie au niveau cervical, la chirurgie pouvant aussi engendrer une dénervation des spinaux par atteinte de branches des racines postérieures. Enfin, il semblerait que certains médicaments comme les antiépileptiques à base d’acide valproïque peuvent favoriser cette affection. Les formes curables grâce au traitement médicamenteux doivent être reconnues et traitées rapidement avant l’installation de raideur articulaire et une rétraction myotendineuse qui peuvent être responsables de l’irréversibilité de la déformation. L’efficacité du traitement antiparkinsonien à base de
88 Le rachis cervical vieillissant dopamine sur la camptocormie cervicale est diversement rapportée par les auteurs. Le traitement chirurgical est sujet aussi à controverse. Nous pensons néanmoins qu’il faut l’envisager en dernier recours, en cas de complications neurologiques ou l’installation d’une instabilité cervicale pouvant entraîner une compression médullaire. Il faut dans notre expérience privilégier le traitement fonctionnel basée sur la rééducation et sur l’utilisation d’un appareillage fonctionnel et confortable. Ces derniers préservent les possibilités d’adaptations posturales et de compensation, ce que supprime une arthrodèse étendue. L’approche thérapeutique ne doit donc pas être segmentaire et focalisée uniquement sur le segment cervical mais doit être élargie à l’ensemble du rachis cervicodorso-lombo-pelvi-fémoral. Une place particulière doit être accordée à la hanche et au bassin. En effet, l’absence de toute extension de hanche va empêcher l’hyperlordose lombaire compensatrice de la cyphose cervico-dorsale sus-jacente, qui représente la position économique du rachis autorisant le maintien de l’horizontalité du regard. L’étude des paramètres pelviens (incidence pelvienne, pente sacrée et version pelvienne) et de l’équilibre sagittal du rachis peut augurer de ces possibilités de compensation à partir du bassin. La rééducation visant à renforcer les spinaux dans les limites des pathologies, à corriger la déformation cervicale en utilisant un appareillage adapté et souple, à récupérer l’extension de hanche doit être entreprise avant que la déformation ne soit figée.
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Indications, stratégies et techniques de la chirurgie pour le traitement du rachis cervical dégénératif J.-Y. Lazennec, M.-A. Rousseau et H. Pascal-Mousselard
Introduction Les phénomènes dégénératifs sont d’une extrême banalité au niveau du rachis cervical. Il s’agit avant tout des détériorations anatomiques traduisant une évolution normale liée à l’âge, mais aussi de phénomènes plus spécifiques engendrés par des pathologies modifiant la statique ou la mécanique de la région ou par des microtraumatismes répétés, notamment dans le cadre de certaines activités sportives, Les indications opératoires sont rares et s’adressent essentiellement à deux situations anatomo-cliniques particulières : la névralgie cervico-brachiale (NCB) chronique et la myélopathie cervicarthrosique. La prise en charge médicale de la névralgie cervico-brachiale commune permet d’éviter la chirurgie dans l’immense majorité des cas. Toutefois, le recul actuel des possibilités d’infiltrations locales, notamment foraminales pour des raisons médico-légales, risque de reposer des problèmes d’indication opératoire pour décompression et stabilisation éventuelle dans des cas jadis traités par des radiologues spécialisés. Dans ce contexte, le développement des prothèses discales cervicales permet d’éviter le recours à la fusion dans certains de ces cas. La tendance au vieillissement de la population, l’amélioration des outils diagnostiques grâce aux progrès de l’imagerie et la meilleure connaissance de l’évolution naturelle des conflits neurologiques à l’étage cervical ont beaucoup modifié l’approche et les indications des chirurgiens face à la myélopathie cervicarthrosique. Si la démographie de ces patients atteints par une détérioration chronique a changé dans le sens du vieillissement, d’autres populations à risque peuvent être concernées par certaines indications opératoires, par exemple dans le cadre des traumatismes sur canal étroit ou « limite », ou dans le cadre des sports à risque (1). Les tableaux cliniques ne sont pas toujours faciles à analyser ; ils peuvent associer des signes médullaires et radiculaires. L’analyse de l’imagerie doit permettre une évaluation anatomique des obstacles radiculo-médullaires afin de définir la stratégie chirurgicale lorsque le traitement médical est insuffisant ou dépassé.
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Névralgie cervico-brachiale Position du problème La chirurgie s’adresse à la NCB d’origine mécanique, due à une compression de la racine accompagnée des artères et veines foraminales. La compression est rarement discale, plus souvent osseuse par ostéophytose rétrosomatique ou interapophysaire ou, très fréquemment, ostéodiscale par un « nodule disco-ostéophytique ». La NCB type C5 représente environ 5 % des cas dans les séries publiées. La douleur irradie à l’épaule et à la face externe du bras, le réflexe bicipital peut être atténué. La NCB type C6 représente 30 % des cas avec irradiation vers le bras et le bord radial de l’avant-bras, le pouce et le demi-index ; les réflexes bicipitaux parfois et styloradials sont diminués. La NCB type C7 représente 30 % des cas avec irradiation vers la face postérieure du bras et de l’avant-bras, les 2e, 3e et 4e doigts, surtout le majeur ; l’éminence thénar peut être atrophiée. Le réflexe tricipital peut être diminué et le patient peut présenter une difficulté à l’extension des doigts. La NCB type C8 représente 15 % des cas avec irradiation vers la face interne du membre supérieur et l’auriculaire. L’éminence hypothénar, les muscles interosseux, les fléchisseurs des doigts peuvent s’atrophier. Les réflexes tricipital parfois et cubito-pronateur plus souvent peuvent être diminués. Dans 20 % des cas, l’atteinte est polyradiculaire. La décision d’une option chirurgicale doit reposer sur une analyse anatomique soigneuse de la situation et une parfaite corrélation clinique (fig. 1a). L’imagerie doit permettre de mettre en évidence la hernie, sa localisation (médiane, postérolatérale ou foraminale), de déterminer le nombre d’espaces lésés et de caractériser le type de hernie : – le type I représente la très rare hernie molle née sur disque sain, lors d’un traumatisme violent, chez un sujet jeune ; – le type II est la saillie médiane d’un disque en voie de dégradation ; – le type III est la hernie souvent traumatique survenant sur un disque dégénéré ; – le type IV est la hernie chronique sur disque dégénéré, accompagnée d’ostéophytes et de calcifications ligamentaires ; – le type V est à part : l’uncodiscarthrose avec éversion ostéophytique des unci, hypertrophie des massifs articulaires, ostéophytose rétrocorporéale, hypertrophie et calcifications ligamentaires L’examen scanographique est la technique de choix pour définir le type de compression. Il permet de différencier les composantes molles et dures de la hernie. Après injection de produit de contraste en intraveineux, le contour de la hernie est bien délimité par le rehaussement des plexus veineux. Trois tableaux cliniques peuvent justifier dans certains cas le recours à la chirurgie.
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Fig. 1a – Anatomie du carrefour unco-vertébro-radiculaire.
Hernie discale « molle » Elle est due à une protrusion discale postéro-latérale (fig. 1b). Le traitement est d’abord médical et orthopédique. Même en cas de stade de déficit moteur, on commence par une mise au repos grâce au port d’un collier en associant, si possible, un traitement antiinflammatoire. Le traitement chirurgical classique n’est indiqué qu’en cas de persistance voire d’aggravation des signes déficitaires moteurs ou de l’intensité de la douleur. En cas de très grosse hernie discale à la TDM ou à l’IRM, on pourra d’emblée prévoir une probable indication, tout en jouant la carte du traitement médical initialement.
Hernie « dure » postérieure Lorsque l’uncarthrose se développe vers l’arrière, elle est souvent qualifiée de « hernie dure » (fig. 1c). Elle envahit le trou de conjugaison et peut alors comprimer la racine, la vascularisation radiculaire ou même radiculo-médullaire. L’uncarthrose postérieure peut être associée à une uncarthrose latérale ou à une ostéophytose postérieure médiane. Le traitement conservateur médical et orthopédique est le préalable indispensable à toute indication chirurgicale. Le traitement conservateur consiste en une immobilisation par minerve ou collier et traitement médical anti-inflammatoire. Le traitement chirurgical s’impose si la symptomatologie persiste ou récidive.
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Fig. 1b – Hernies discales « molles » volumineuses et symptomatiques ; échec du traitement médical : indication à une excision par voie antérieure.
Fig. 1c – Hernies « dures » postérieures.
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Un problème à part : la hernie « dure » latérale et le syndrome cervicocéphalique uncarthrosique L’uncarthrose peut comprimer l’artère vertébrale ou les racines nerveuses au sein du carrefour unco-artério-radiculaire, entraînant une symptomatologie vasculaire ou radiculaire (fig. 1d). Ce type de conflit peut se présenter à chaque niveau entre C6 et C2 ; le niveau C6/C7 est particulier puisque l’artère vertébrale ne pénètre pas dans le trou transversaire de C7 et reste ainsi à distance de l’uncus. Cependant, la racine et l’artère peuvent être comprimées par une arthrose très exubérante et parfois l’artère pénètre déjà en C7 dans le canal transversaire. L’uncarthrose latérale peut provoquer le syndrome cervico-céphalique uncarthrosique (SCCU) qui correspond à une forme d’insuffisance vertébro-basilaire ou IVB. Le traitement médical vasodilatateur et antivertigineux et un traitement orthopédique avec collier sont d’abord essayés. Seuls seront opérés les SCCU sévères et résistants à cette prise en charge. En cas de SCCU typique par uncarthrose entraînant un rétrécissement localisé d’une artère vertébrale, c’est l’uncusectomie du niveau concerné qui est indiquée.
Fig. 1d – Hernies « dures » postéro-latérales.
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Données pratiques concernant la technique chirurgicale et les indications Abords antérieurs du rachis cervical constituant la procédure « standard » pour les diverses procédures On distingue : – les approches antéro-médianes destinées à l’abord du disque intervertébral, du corps vertébral ou du canal cervical (hernie discale « molle » ou « dure » postérieure) ; – les voies antéro-latérales destinées à l’abord du carrefour unco-artério-radiculaire (artère vertébrale et partie antérieure du trou de conjugaison ; hernie discale dure latérale et le SCCU) ; – les abords combinés ou abords antéro-médio-latéraux qui permettent d’aborder simultanément le disque, donc le canal cervical et le carrefour unco-artério-radiculaire. Abord par voie antérieure La majorité des hernies discales cervicales est aujourd’hui abordée par voie antérieure. Une incision cutanée horizontale est souvent réalisée car elle est plus esthétique tout en permettant la plupart du temps une approche confortable de deux niveaux discaux. L’approche de routine est pratiquée entre la gaine viscérale (thyroïde, trachée, pharynx et œsophage) en dedans et le paquet vasculo-nerveux (carotide primitive, veine jugulaire interne, nerf pneumogastrique) en dehors, après avoir dégagé le bord antérieur du muscle sterno-cléido-mastoïdien. L’accès à la carotide primitive est barré par le muscle omo-hyoïdien qui est parfois sectionné entre deux ligatures ; il faut le reconstituer soigneusement en fin d’intervention en raison de son rôle dans la phonation. L’abord gauche reste pour certains le côté préférentiel car l’on reste ainsi à l’abri de tout étirement du nerf récurrent qui est profond de ce côté, parce qu’il quitte plus bas le nerf pneumogastrique autour de la crosse de l’aorte. Cette préférence gauche peut se concevoir pour les abords antéro-médians, que la symptomatologie radiculaire ou médullo-radiculaire soit gauche ou droite (il faut bien communiquer avec le patient qui pourrait croire à une erreur de côté pour une symptomatologie droite). Si l’abord indiqué est antéro-latéral, l’opérateur ne peut pas croiser la ligne médiane : il faut libérer l’artère vertébrale gauche par un abord gauche et la droite par un abord droit. Lorsqu’il s’agit d’une hernie récente, on trouve souvent un trou dans le ligament vertébral commun postérieur ; il faut y prendre garde et bien vérifier l’absence de fragment migré par cet espace dans le canal vertébral. Dans d’autres cas, il faut traverser un véritable mur cortical ostéophytique postérieur. Ce geste n’est pas toujours facile à réaliser et peut être à l’origine d’un saignement gênant ; les difficultés de dissections au fond de cet espace exigu peuvent être majeures, poussant alors l’opérateur à une résection partielle du corps vertébral pour obtenir une décompression efficace. Une fois le canal cervical libéré, le traitement classique consiste à réaliser une arthrodèse de l’espace intersomatique concerné. Diverses techniques sont possibles en utilisant soit un greffon iliaque tricortical impacté, soit un greffon spongieux tassé dans une cage
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intersomatique (résorbable type PLA) ou PEEK (polyether-ether-ketone) soit un substitut ; une stabilisation complémentaire est possible soit de principe, soit en fonction des cas grâce à une plaque antérieure vissée (fig. 2). Parmi les exceptionnelles complications possibles liées à l’abord, il faut insister sur le risque théorique de perforation de l’axe digestif. Même si ce risque concerne plutôt les abords antérieurs extensifs sur plusieurs niveaux avec une dévascularisation plus étendue et l’utilisation d’écarteurs agressifs, cette complication grave peut aussi intéresser un abord monosegmentaire, en particulier chez des patients au cou très court ou après des chirurgies antérieures préalables. Le diagnostic est parfois évident si l’on constate une issue de liquide digestif par la plaie opératoire mais il peut être beaucoup plus difficile, nécessitant parfois une épreuve au bleu de méthylène ou l’usage d’une opacification. D’exceptionnelles médiastinites révélatrices ont été décrites. La suture d’une brèche œsophagienne découverte en peropératoire est possible mais parfois délicate ; en cas de reconnaissance tardive ou si les tissus sont de mauvaise qualité, le recours à un lambeau de sterno-cléido-mastoïdien est une solution technique facile à mettre en œuvre. Il faut rapprocher de ces perforations directement iatrogènes les perforations chroniques sur le matériel antérieur (parfois très longtemps après la chirurgie primaire), aujourd’hui totalement exceptionnelles grâce aux systèmes de verrouillage des vis dans les plaques antérieures. À long terme, ces fusions, même à un étage, menacent les étages adjacents, surtout si la statique rachidienne n’est pas correctement rétablie (fig. 3).
Fig. 2 – Cure de hernie discale par cage intersomatique et autogreffe à 15 ans de recul ; léger déficit de lordose locale en C5-C6, mais comportement satisfaisant sur les clichés dynamiques.
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Fig. 3 – Évolution à 15 ans de recul de 2 hernies discales cervicales opérées par greffe antérieure. Cas 1 : la fusion a été réalisée par un greffon cortico spongieux sans ostéosynthèse ; noter la perte de lordose locale et la détérioration des 2 étages adjacents sur un rachis sans lordose. Cas 2 : une certaine lordose locale a été maintenue, néanmoins détérioration de l’étage susjacent.
Abord antéro-latéral Si l’abord est antéro-latéral, il faut libérer plus largement la carotide primitive aussi bien vers le bas que surtout vers le haut jusqu’à la bifurcation et, selon le niveau, lier l’artère thyroïdienne inférieure (si abord C6/C7) et supérieure (si abord C4/C5 ou plus haut). Cette libération carotidienne et ces ligatures rendent le geste plus agressif, mais il faut pouvoir mobiliser plus en dehors l’axe vasculo-nerveux jugulo-carotidien. Il faut donc renoncer à une incision cutanée horizontale esthétique. La dissection de l’apophyse transverse C6 est la première étape de la procédure car c’est le plus souvent à ce niveau que l’artère vertébrale pénètre dans le trou transversaire. Si ce n’est pas le cas, on peut ensuite remonter plus haut en tout sécurité. La libération du tubercule transversaire et de la face antérieure de chaque apophyse transversaire impliquée permet de dégager la partie latérale du corps vertébral près de l’uncus et de l’insertion corporéale de l’apophyse transverse. On ouvre alors chaque trou transversaire concerné et l’on peut pratiquer l’uncusectomie, c’est-à-dire la résection de la partie latérale de l’uncarthrose qui est située en regard de l’artère vertébrale, là où elle forme la paroi interne du « carrefour » unco-artério-radiculaire.
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Abord postérieur Il a été longtemps délaissé en raison d’une plus lourde morbidité théorique, notamment en ce qui concerne les complications médullaires. La chirurgie par voie postérieure a pourtant évolué en une chirurgie postéro-latérale, non délabrante, à morbidité extrêmement réduite. Certains auteurs rapportent des résultats fonctionnels excellents quand l’indication opératoire est réservée aux radiculopathies par hernies discales postéro-latérales, dites molles.
Un sujet d’actualité : l’indication des prothèses discales cervicales Aujourd’hui, l’indication des prothèses discales cervicales (PDC) est volontiers discutée pour combler l’espace discal laissé libre après l’ablation d’une hernie, molle le plus souvent, exceptionnellement dure, quand l’indication classique est la réalisation d’une fusion intersomatique. La PDC est censée maintenir une certaine mobilité intervertébrale et devrait réduire le taux de syndrome des segments adjacents à une fusion : l’objectif est ambitieux car il vise à réduire de façon significative le taux des dégradations radiologiques adjacentes à une arthrodèse cervicale (26 à 92 % selon les séries et les reculs), le retentissement clinique de ces détériorations (30 % environ) et le taux de reprise (7 à 18 %) (fig. 4). En dépit d’une technique d’abord beaucoup moins difficile, les PDC ont été utilisées en pratique clinique seulement après les prothèses discales lombaires. Plusieurs modèles sont aujourd’hui disponibles avec des concepts extrapolés des implants lombaires. Comportant des mécanismes « articulaires » voisins avec de fines pièces de polyéthylène ou des couples de friction « métal-métal » ou métal-polyuréthane comme la prothèse de
Fig. 4 – Altérations de l’étage sous-jacent à une fusion par greffe intersomatique avec cage : noter les signes de déstabilisation avec hypersignal T2 des plateaux vertébraux concernés dans le cas 2.
100 Le rachis cervical vieillissant Bryan et plus récemment métal-céramique, ils exposent aux mêmes problèmes biomécaniques et conceptuels que ceux déjà rapportés au niveau lombaire. Le développement et l’implantation de prothèses élastomériques dérivées des implants utilisés au niveau lombaire depuis plusieurs années peuvent apporter de nouvelles solutions technologiques intéressantes. Indépendamment des problèmes de designs et de matériaux, la PDC pose des problèmes spécifiques de pose et d’indication : les risques spécifiques reconnus aujourd’hui sont la tendance à la cyphose, les déstabilisations locales, les ossifications et l’enraidissement. À court terme, la PDC paraît aussi efficace que la fusion par cage intersomatique dans le traitement des hernies discales cervicales. De plus longs reculs sont nécessaires pour affirmer son efficacité dans le maintien de la lordose et la réduction du taux de syndrome des segments adjacents. Dans les cas de myélopathie par obstacle monosegmentaire, les avis sont partagés sur l’opportunité de la PDC.
Myélopathie cervicarthrosique et canal cervical étroit Position du problème Cette pathologie rare complique environ 0,5 % des cas de cervicarthrose. Elle est liée à une sténose centrale globale ou segmentaire, beaucoup moins fréquente que la sténose foraminale provoquée par l’uncarthrose. Les sujets présentant un canal constitutionnellement étroit présentent un risque supplémentaire (2). Elle est volontiers associée à une étroitesse du canal lombaire. La décompensation est liée au rétrécissement du canal avec deux mécanismes anatomiques essentiels qui peuvent être associés : – la dégénérescence discale avec débord intracanalaire du disque associée ou non à une ostéophytose rétrocorporéale ; – l’hypertrophie avec ossification ou calcification du ligament longitudinal postérieur (LLP), fréquente en Extrême-Orient (de C3 à C5). En avant et latéralement, le rétrécissement est dû à l’uncarthrose et à l’hypertrophie des massifs articulaires. En arrière, la sténose est due à l’hypertrophie du ligament jaune, à sa calcification ou à son ossification. Tous les niveaux peuvent être lésés, mais les lésions sont plus fréquentes en C6-C7 et C5-C6. La physiopathologie des lésions médullaires (démyélinisation, pertes axonales, cavitation, nécrose) est discutée : les hypothèses mécaniques ou vasculaires avancées renvoient aux stratégies chirurgicales de décompression et aux complications potentielles de ces gestes. Selon la théorie mécanique, les microtraumatismes répétés de la moelle et de ses enveloppes accolées par la « fibrose » au LLP provoquent des lésions de contusion et d’ischémie (3). La théorie vasculaire fait appel à une origine artérielle essentiellement par ischémie (une artère radiculomédullaire volumineuse et parfois unique en C5-C6) ou à une origine veineuse par stase.
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Dans le cadre d’une myélopathie cervicarthrosique avérée, l’imagerie permet de rechercher une sténose canalaire constitutionnelle et d’étudier les signes de cervicarthrose (mesures canalaires et foraminales, étendue des lésions osseuses, discales, ligamentaires en surface et en hauteur, retentissement de la sténose sur la moelle, rapports entre diamètres canalaire et médullaire). L’imagerie cherche aussi à établir un pronostic en recherchant les signes de souffrance médullaire. L’évaluation de la gravité du canal cervical étroit doit aussi prendre en compte le facteur dynamique. Les radios standard et les clichés en flexion et extension permettent l’étude dynamique en appréciant le degré de mobilité des différents segments et les éventuels glissements vertébraux, et en particulier le rétrolisthésis en extension associé à l’effondrement discal. La méconnaissance d’une instabilité est un piège classique si l’on se fie uniquement au scanner et à l’IRM alors que cet élément peut avoir une influence directe sur l’indication opératoire (fig. 5). L’étude de la courbure de la colonne cervicale semble avoir pour Batzdorf (4) une valeur prédictive sur l’évolution après la libération canalaire. Les inversions de courbure et les cyphoses semblent être de mauvais pronostic. Les coupes sagittales de l’IRM permettent la mise en évidence des niveaux et de l’origine (antérieure ou postérieure) des sténoses, l’évaluation de l’incongruence entre diamètres canalaire et médullaire et l’appréciation des signes de souffrance médullaire (5, 6). Elles guident dans le choix stratégique d’un abord plutôt postérieur, antérieur ou mixte. Les séquences en T1 analysent la morphologie médullaire et évaluent les empreintes sur le cordon médullaire générées par les ostéophytes postérieurs et la plica-
Fig. 5 – Décompensation progressive d’une sténose cervicale C5-C7 par dégradation d’un niveau sus-jacent C4-C5 à une zone enraidie par l’arthrose : ce cas de figure est typiquement à risque pour les aggravations post-traumatiques.
102 Le rachis cervical vieillissant ture des ligaments jaunes. Elles doivent être confrontées aux séquences T2 qui font apparaître des anomalies de signal intramédullaires sous la forme d’hypersignaux témoignant du caractère pathogène de la sténose avec souffrance médullaire. Il peut s’agir de lésions réversibles (ischémie, œdème) ou irréversibles (myélomalacie, gliose, démyélinisation) (7). L’hypersignal en T2 a longtemps été considéré comme un élément capital en luimême. En fait, dans les cas d’hyposignal intramédullaire en T1 associé à un hypersignal intramédullaire en T2 à limites nettes, avec un signal proche du LCR en densité protonique et en T2, on considère qu’il s’agit d’une lésion de mauvais pronostic. Par ailleurs, un hypersignal T2 étendu à l’ensemble des étages compressifs est également péjoratif. L’IRM révèle exceptionnellement une dilatation du canal épendymaire secondaire à une compression chronique du cordon médullaire. Les coupes axiales transverses en pondération T2 peuvent confirmer l’existence d’un signal médullaire anormal. Il faut se méfier car, dans ces séquences, les sténoses canalaires et foraminales sont volontiers surestimées, ce qui peut justifier très souvent un recours complémentaire au scanner pour affiner la stratégie opératoire chirurgicale. Le scanner permet la mesure exacte des diamètres canalaires osseux et de différencier les structures calcifiées ou ossifiées des structures fibro-scléreuses. Fujiwara (8) a montré l’importance pronostique de la surface du canal au niveau de l’étage le plus comprimé. C’est dans cette zone que la corrélation aux images IRM permet de retrouver l’image caractéristique de la moelle aplatie et atrophique avec l’aspect en œil de serpent. L’ossification du LLP est une entité pathologique très particulière qui conduit à des choix stratégiques particuliers. Le diagnostic est très facile en scanographie et difficile en IRM, d’autant qu’il s’agit d’une structure osseuse plus ou moins spongieuse et graisseuse qui peut être confondue en IRM avec le signal osseux du corps vertébral. La calcification des ligaments jaunes du rachis cervical est une pathologie rare décrite chez les Japonais et chez des sujets antillais. Le diagnostic positif repose sur le scanner du rachis cervical (9). L’IRM cervicale ne permet pas le diagnostic positif mais évalue l’importance de la souffrance médullaire, avant un geste de décompression obligatoirement postérieur (fig. 6).
Données pratiques concernant la technique chirurgicale et les indications La décompression médullaire, par voie antérieure ou postérieure, constitue le traitement réellement efficace des myélopathies dues à une sténose du canal cervical sur plusieurs niveaux (10). Les chances de succès dépendent de la précocité du diagnostic et du choix de stratégies adaptées aux diverses situations anatomiques (11-14). Le traitement chirurgical du canal cervical étroit reste controversé entre les partisans de la voie antérieure et ceux de la voie postérieure (15-17). Comme toujours, les choix stratégiques doivent être nuancés et basés sur une évaluation préopératoire rigoureuse du contrat à remplir sur le plan neurologique et sur le plan mécanique. Le terrain est un élément essentiel de la décision chez des malades souvent
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Fig. 6 – Images de sténose cervicale par ossifications des ligaments jaunes conduisant à l’indication de décompression par voie postérieure.
âgés et parfois en état général suboptimal, car la chirurgie de la myélopathie cervicarthrosique présente des pièges et des risques (18). Certains privilégient la laminectomie dans les atteintes cordonales postérieures associées à une compression postérieure et d’autres auteurs la corporectomie isolée en cas d’atteinte motrice ou pyramidale prédominante. Mais les tableaux cliniques ne sont pas toujours aussi nets et l’imagerie confirme très souvent la réalité d’obstacles combinés. La pratique des IRM dynamiques préopératoires montre bien les limites de l’imagerie statique conventionnelle dans la planification des décompressions ; les IRM postopératoires nous révèlent l’importance des décompressions indirectes obtenues par les temps postérieurs grâce à la migration postérieure du cordon médullaire. Certains auteurs ont insisté sur les limites de la voie postérieure, avec même des cas de récidive de la myélopathie cervicarthrosique à distance (19, 20). Certains insistent sur les complications liées à la voie antérieure pure, en particulier les risques liés à l’abord, à une décompression plus difficile techniquement. Le taux de pseudarthrodèse des greffons antérieurs n’est pas négligeable, même avec les techniques de fixations actuelles. Certains préconisent donc un double abord systématique (22).
Laminectomie La laminectomie reste la procédure de référence pour la décompression dans les myélopathies par canal cervical étroit.
104 Le rachis cervical vieillissant Elle a l’avantage de ne pas obliger à une fusion systématique, elle représente un geste simple et rapide (ce qui peut être appréciable sur certains terrains à risque), mais il faut se méfier de certains détails (23-25). L’installation est primordiale, notamment en ce qui concerne toutes les précautions à prendre pour retourner le patient avec une immobilisation de sécurité, éviter les compressions oculaires et la mise en lordose excessive. Par un bord postérieur simple, on atteint les arcs postérieurs cervicaux. Les apophyses épineuses et les lames sont réséquées en prenant garde de ne pas ouvrir les capsules articulaires et d’épargner au maximum les insertions musculaires. Dans la mesure du possible, en fonction des compressions mises en évidence au cours du bilan préopératoire, il faut épargner l’apophyse épineuse de C2 qui constitue un véritable carrefour musculaire. L’épargner permet de réduire le risque de déstabilisation postopératoire en cyphose (fig. 7). L’efficacité de la laminectomie ne tient pas seulement aux conséquences directes de la résection des obstacles postérieurs comme dans le traitement des ossifications des ligaments jaunes. La laminectomie permet la migration postérieure de la moelle, ce qui procure un effet indirect de décompression par migration postérieure du fourreau dural (figs. 8 et 9). Cette migration est parfois très significative, entraînant une traction importante sur les racines cervicales, ce qui peut même aboutir à un déficit postopératoire transitoire ;
Fig. 7 – Laminectomie étendue à l’arc postérieur de C2 : patient à surveiller compte tenu du risque de swann neck, car C2 constitue un carrefour important pour les insertions musculaires.
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Fig. 8 – Compressions globales antérieures et postérieures : indication à une laminectomie C3C7. Il est fort probable que ce geste suffise sur ces rachis encore en lordose à condition que les clichés standard ne révèlent pas de signe d’instabilité. À noter dans le cas 2 la forte probabilité qu’une laminectomie de C2 soit nécessaire « la main forcée ».
Fig. 9 – IRM dynamique après décompression par laminectomie étendue sur une myélopathie sévère.
106 Le rachis cervical vieillissant la racine C5 est la plus susceptible à ces modifications anatomiques (8 % des cas) et il convient d’en avertir le patient. Certains préconisent à ce niveau un geste de libération supplémentaire pour réduire ce risque (26). L’étendue de la décompression à réaliser demeure une question d’actualité car une laminectomie insuffisante expose à une nouvelle compression « satellite » au niveau des berges supérieures ou inférieure de la zone de laminectomie avec le risque d’un déficit neurologique rapidement évolutif, parfois dès le postopératoire. La détermination des limites de la zone de décompression n’est pas toujours aisée ; il faut anticiper sur la migration postérieure de la moelle en postopératoire en s’aidant en particulier des coupes sagittales de l’IRM qui, en fonction de la lordose existante, permettent une évaluation approximative du phénomène. Très souvent aujourd’hui, nous réalisons une libération étendue de C3 à C7 pour prévenir ces risques (fig. 10). La surveillance des patients après l’intervention est un point critique, dès le postopératoire immédiat en raison du risque d’hématorachis qui est une réelle préoccupation. Le risque infectieux n’est pas négligeable malgré les procédures de prophylaxie, en raison de l’importance de la dissection musculaire source de nécrose et de la macération postopératoire. Certains auteurs insistent sur l’efficacité limitée de la laminectomie ; des taux de 22 à 60 % d’insuffisance de libération ont été rapportés dans la littérature mais les séries restent difficiles à comparer (figs. 11 et 12a). L’absence d’instrumentation après laminectomie cervicale peut être source de déstabilisation postérieure (27), notamment en cyphose, dans des cas particuliers, ce qui justifie une analyse préopératoire soigneuse. Selon Batzdorf (4), les patients dont la cour-
Fig. 10 – Indication difficile pour une myélopathie cervicarthrosique : obstacles antérieurs pouvant orienter vers une corporectomie de C5, mais hypersignal médullaire en regard de C6 et obstacles postérieurs en C4-C5, C5-C6 et C6-C7. Le rachis cervical est en lordose, laissant supposer qu’une migration postérieure du cordon médullaire est vraisemblable. L’indication opératoire retenue a été une laminectomie C3-C7.
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Fig. 11 – Décompression insuffisante par laminectomie : malgré la migration postérieure de la moelle notamment en regard de la zone d’hypersignal, il persiste un aspect de chicane car la laminectomie n’a pas concerné C7 : la migration postérieure du fourreau dural est efficace en ce qui concerne la hernie C5-C6 mais pas pour la hernie C6-C7.
Fig. 12a – Échec à 8 ans d’une laminectomie sur un rachis en cyphose : apparition d’une hernie discale cervicale symptomatique en C5-C6. On devine le recul initial de la moelle mais celui-ci n’est plus efficace. Une simple cure de hernie discale par voie antérieure avec greffe ne sera pas suffisante : il faut prendre en compte le problème postural de ce rachis et récupérer de la lordose.
108 Le rachis cervical vieillissant bure cervicale est proche de la normale présenteraient une meilleure récupération de leur déficit. Il conclut à une perte d’efficacité de la laminectomie si le rachis cervical est maintenu en cyphose. De toutes façons, en cas de cyphose ou d’altération des articulaires postérieures faisant craindre une déstabilisation avec mobilité anormale, la laminectomie peut être facilement complétée par une fixation à ancrage articulaire classique (fig. 12b). Certains auteurs ont en effet démontré que l’instabilité est un facteur dynamique primordial dans la physiopathologie de l’affection (28, 29).
Laminoplastie La laminectomie présente certains inconvénients potentiels dans les décompressions étendues. Elle peut provoquer une instabilité postopératoire responsable d’une déformation en cyphose (swann neck) qui, à son tour, aggrave les troubles neurologiques (30). L’arachnoïdite réactionnelle est pour certains auteurs susceptible de favoriser une récidive de la sténose. Pour éviter ces inconvénients, des techniques de laminoplastie permettent l’expansion du canal cervical sans exérèse des arcs postérieurs, en faisant une sorte de volet postérieur réalisé par la mobilisation des lames. La technique consiste à ouvrir l’arc postérieur en son milieu et d’écarter les deux hémilames (comme les deux vanteaux d’une fenêtre) qui sont maintenues par diverses techniques. Les procédures réalisant l’ouverture unilatérale de l’ensemble de l’arc postérieur (comme une porte) ont été progressivement abandonnées en raison des risques de sténose secondaire du côté de la charnière de ce volet (fig. 13).
Fig. 12b – Laminectomie C3-C7 associée à une fixation postérieure corrigeant la tendance cyphotique du rachis. Noter la migration postérieure du cordon médullaire par rapport aux obstacles antérieurs : un temps antérieur ne sera pas nécessaire.
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Fig. 13 – Techniques de laminoplastie.
De multiples variantes techniques ont été développées pour éviter la récidive de la sténose due à un déplacement des lames traitées (31-34). Les indications de la laminoplastie concernent les sténoses congénitales, les sténoses dégénératives à plusieurs niveaux, ou les cas d’ossification du ligament vertébral postérieur sur plusieurs niveaux. Dans tous ces cas, il faut s’assurer de la persistance d’une lordose cervicale. La technique peut être utilisée en cas de compression postérieure liée à l’hypertrophie des ligaments jaunes et éventuellement combinée à une décompression antérieure. Il faut exclure les cas de cyphose cervicale, les compressions antérieures exclusives et les cas d’instabilité vertébrale, à moins que ne soit réalisé un geste associé de fusion. La réalisation d’une laminoplastie implique généralement un geste sur l’ensemble des étages de C3 à C7 (fig. 14) (35). Parmi les complications rapportées, il faut retenir la tendance à la cyphose malgré le procédé de conservation des arcs postérieurs (perte moyenne de 10 à 15°) et la réduction de 30 % environ de la mobilité régionale, alors que cette procédure avait pour objectif de maintenir un rachis mobile.
110 Le rachis cervical vieillissant
Fig. 14 – Antécédent de cure de hernie discale cervicale par voie antérieure en C5-C6 : décompression sans greffe aboutissant à une cyphose locale. Décompression de l’étage sous-jacent avec hypersignal médullaire en C6-C7. Tentative de décompression par laminoplastie insuffisante car réalisée sur un rachis en cyphose et s’arrêtant de plus en C6. Indication à un temps antérieur complémentaire avec corporectomie de C5 à C7.
Chirurgie par voie antérieure Cette procédure permet une décompression large de la moelle épinière sur toute l’étendue de la sténose grâce à la résection osseuse (36, 37). Mais elle oblige à une fusion des niveaux décomprimés par une arthrodèse éventuellement instrumentée (les plaques en titane de stabilisation permettent l’exploration IRM postopératoire). En fonction de l’étendue de la compression, une intervention à un étage intersomatique peut être nécessaire (décompression transdiscale), mais si deux étages adjacents sont compressifs, on réalise une corporectomie qui permet d’optimiser l’exposition. La décompression transdiscale n’est possible que si la zone d’insertion des obstacles ostéophytiques est limitée car l’angle d’attaque des instruments est souvent limité par l’ouverture insuffisante de l’espace discal. La décompression par corporectomie associe l’équivalent de deux décompressions transdiscales pour réaliser l’ablation du corps vertébral intermédiaire. La même technique peut être utilisée sur plusieurs corps vertébraux (fig.s 15a-c). En outre, la décompression par voie antérieure permet de corriger une cyphose régionale préexistante, tout en traitant directement les obstacles antérieurs. L’installation en décubitus dorsal paraît simple et classique. Il faut se méfier de la manipulation du patient anesthésié et de la tendance à le positionner en hyperextension, car cela peut exposer à un rétrécissement canalaire substantiel et à un risque d’aggrava-
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Fig. 15a – Obstacles cervicarthrosiques prédominant en avant : indication à un abord antérieur avec corporectomies C4, C5, C6. Compte tenu de la cyphose préexistante, la reconstitution de la lordose peut être difficile surtout dans le cas 2.
Fig. 15b – Intérêt de la confrontation entre radio standard et IRM pour les choix stratégiques : compressions antérieures en C3-C4 et C5-C6 avec un disque C4-C5 très douteux, perte de lordose, l’obstacle postérieur en C3-C4 semble au deuxième plan. L’indication retenue a été une voie antérieure avec fusion C3-C6. Dans ce cas l’installation est essentielle en prenant soin d’éviter une mise en lordose excessive avant la libération.
112 Le rachis cervical vieillissant
Fig. 15c – Corporectomie pour décompression antérieure isolée. 10 ans de recul : noter l’altération des niveaux adjacents.
tion neurologique, soit d’emblée, soit lors des gestes endocanalaires. Il faut réaliser le positionnement définitif, aussi proche que possible de la situation où la lordose paraît satisfaisante, lorsque tous les gestes de libération ont été réalisés. L’abord du rachis se fait par une voie antérolatérale droite ou gauche selon les habitudes de l’opérateur. L’incision cutanée est longitudinale, le long de la saillie du muscle sterno-cléido-mastoïdien, l’incision horizontale plus esthétique ne permettant pas une exposition aussi large. Les lésions pharyngo-œsophagiennes liées à l’abord sont rares, mais des atteintes spécifiques par érosion sur le matériel ou migration de celui-ci ont été décrites, ce qui a obligé à des améliorations substantielles de systèmes de fixation. Le risque essentiel est représenté par une libération insuffisante, en particulier du côté de l’opérateur. La persistance d’un obstacle peut être à l’origine d’une aggravation neurologique constatée en postopératoire, posant le problème d’une réintervention immédiate. L’événement le plus gênant lors de l’intervention peut être un saignement veineux (veines épidurales lors de la décompression) ou osseux (au cours de la résection corporéale). Le risque est, comme dans les cas où la tension artérielle du patient s’avère diffi-
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cile à contrôler, de provoquer des complications neurologiques par bas débit sur une moelle fragile. Le tamponnement par des compresses hémostatiques permet de résoudre ces problèmes. Des plaies de l’artère vertébrale ont été décrites ; elles sont exceptionnelles et liées à des trajets atypiques et contournés au contact d’un uncus arthrosique. Cette situation très rare peut nécessiter le recours à un contrôle plus large de l’artère si le tamponnement ne permet pas de solutionner le problème. L’hémostase est importante car elle peut entraîner, si elle n’est pas faite correctement, un risque d’hématorachis et de complications neurologiques. L’introduction du greffon dans la zone de résection peut parfois poser des problèmes avec un risque de déplacement vers la moelle épinière. Diverses astuces techniques peuvent être utilisées, comme la fixation initiale du greffon sur la plaque titane de stabilisation avant d’apposer l’ensemble sur le rachis. Si, exceptionnellement, on ne peut avoir une stabilisation correcte du greffon (mauvais capital osseux, tenue insuffisante de l’ostéosynthèse, antécédent septique), une technique « de repli » peut être utilisée : les greffons broyés sont déposés dans la tranchée réalisée pour la décompression. Un temps postérieur de stabilisation complémentaire est ensuite réalisé, parfois dans la même séance opératoire afin de mobiliser le patient rapidement et d’éviter une cyphose secondaire. La crête iliaque permet de reconstituer une lordose sur au moins deux corps vertébraux ; au-delà, elle peut être insuffisante, obligeant à une solution de repli par utilisation d’un fragment de fibula, os très cortical, plus difficile à faire fusionner et mal adapté à la restitution de la lordose. Le traitement des ossifications du ligament longitudinal postérieur oblige à un surcroît de prudence : il est impossible de le séparer de la dure-mère et le risque est donc une plaie dure-mérienne très difficile à suturer au fond de cet espace exigu. On considère qu’il faut laisser une épaisseur de ligament qui pourra migrer en avant. Les partisans de la voie antérieure rapportent une amélioration chez 92 % des patients pour Herkowitz (38) et 85 % pour Emery (20). Il s’agit d’une technique plus difficile que la laminectomie même associée à une fixation postérieure : ainsi, plusieurs complications ont été rapportées dans la série d’Emery de 108 corporectomies antérieures isolées avec, en particulier, une quadriplégie totale postopératoire liée à un problème ischémique par atteinte de l’artère spinale antérieure, quatre brèches durales et cinq cas de récidives de myélopathie.
Abords combinés La décision d’un abord combiné est une indication de principe pour certains dans les cas de compressions sévères ou d’anomalies préoccupantes du signal IRM à type de myélomalacie traduisant la gravité de l’atteinte neurologique, la fixation postérieure permettant d’éviter les risques de pseudarthroses des greffons antérieurs (figs. 16 et 17) (39). L’instrumentation postérieure solide dispenserait de tout montage antérieur complémentaire et donc des complications éventuelles, notamment pharyngo-œsophagiennes, liées au matériel, à la mobilisation des implants et des greffons (40).
114 Le rachis cervical vieillissant
Fig. 16 – Compressions étagées aboutissant à une sténose complexe justifiant une chirurgie avec double abord : temps postérieur premier avec laminectomie de C3 à C7 pour permettre une migration postérieure du cordon médullaire. Ostéosynthèse postérieure pour maintenir une lordose adéquate ; temps antérieur complémentaire pour corporectomies de C5 à C7 avec des difficultés techniques potentielles liées à l’ossification du ligament commun vertébral postérieur.
Fig. 17 – Aspect de décompression médullaire sur myélopathie sévère après chirurgie par double abord : noter que le temps antérieur n’a concerné que les niveaux inférieurs de la décompression réalisée par la laminectomie.
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Pour la majorité des auteurs, la décision d’un abord combiné fait partie d’une stratégie « au cas par cas », en sachant tenir compte du terrain, la localisation prédominante des compressions détectées par l’imagerie actuelle n’étant pas le seul argument pour le choix de l’approche chirurgicale. Dans les myélopathies cervicales sur rachis en cyphose, la laminectomie (ou la laminoplastie) associée à une fixation postérieure pour la correction de la posture peut suffire ou, au contraire, nécessiter un temps complémentaire antérieur si la décompression par migration postérieure est insuffisante, si la tenue des fixations postérieures est trop fragile ou si un « vide » discal jugé excessif apparaît après le temps postérieur. Le temps antérieur peut être réalisé dans la même séance opératoire, ou secondairement, si le risque de morbidité paraît excessif pour certains patients fragiles. Un temps postérieur aussi peut être réalisé après un temps antérieur jugé insuffisant, notamment sur le plan mécanique. Néanmoins, chaque fois qu’une chirurgie « combinée » est planifiée, il semble judicieux de commencer par le temps postérieur, de façon à protéger la moelle par sa migration postérieure postopératoire des risques mécaniques potentiels liés aux gestes opératoires antérieurs. Les myélopathies sur cal vicieux en cyphose constituent un cadre très particulier justifiant très souvent un abord combiné pour remplir un triple contrat de décompression, de stabilisation et d’amélioration de la posture cervicale.
Synthèse Les stratégies ne font pas l’objet d’un consensus comme dans le cadre des NCB par hernie discale. La décompression par voie postérieure a l’avantage d’une relative simplicité technique mais expose à plus de complications septiques ; elle ne met pas à l’abri des complications neurologiques parfois liées à un hématorachis et réversibles quand la reprise est immédiate, mais parfois aussi de mauvais pronostic, immédiates ou précoces, liées à des mécanismes vasculaires mal contrôlés. La décompression postérieure ne sera optimale que si le rachis peut récupérer une lordose et permet la migration postérieure du cordon médullaire. Les sténoses constitutionnelles étendues très souvent de C3 à C7 sont une excellente indication, comme les cas d’ossification du ligament longitudinal postérieur. Dès que la compression canalaire comprend trois niveaux, il faut évoquer de principe cette option technique qui permet de pallier les difficultés de reconstructions vertébrales étagées si une voie antérieure était envisagée initialement. Pour nous, la voie antérieure garde toute sa place pour les obstacles antérieurs prédominants, et en particulier sur les rachis en cyphose ; néanmoins, la reconstitution de la lordose n’est pas toujours aisée et les risques de lésion pharyngo-œsophagienne ou de pseudarthrose sont réels. La décompression par cette voie peut être difficile ; des complications neurologiques sont possibles. Les abords combinés sont pour nous rarement indiqués de principe, sauf dans les cas de sténose sévère mixte (arthrosique et constitutionnelle) et en cyphose. Dans ces cas, l’abord postérieur est réalisé initialement. Plus souvent, l’abord antérieur est réalisé
116 Le rachis cervical vieillissant secondairement devant une faible amélioration après le temps postérieur et si la migration postérieure du cordon médullaire ne semble pas suffisante.
Une situation particulière : les traumatismes sur canal cervical étroit chez le sujet âgé Les traumatismes sur un canal cervical étroit d’origine arthrosique ont fréquemment des conséquences médullaires graves. Il s’agit d’une pathologie d’avenir compte tenu du vieillissement de la population (41). L’hypermobilité au-dessus d’un bloc arthrosique peut provoquer un traumatisme médullaire par mécanisme de coupe-cigare. L’hyperextension est le mécanisme le plus souvent en cause car elle réduit les dimensions d’un canal cervical déjà étroit. Des traumatismes minimes, souvent associés à des traumatismes crâniens, sont responsables de troubles neurologiques sévères, en particulier par chute de sa hauteur chez le sujet âgé. Seul l’état neurologique initial semble avoir une valeur pronostique certaine. La récupération neurologique est d’autant plus importante que l’atteinte initiale est faible ; le taux de mortalité est beaucoup plus élevé chez les patients présentant une atteinte neurologique complète par rapport aux patients présentant une atteinte incomplète. Il existe une corrélation entre la sévérité anatomique de la sténose et une évolution défavorable. Les images d’hémorragie intramédullaire à l’IRM semblent corrélées à un mauvais pronostic alors que l’absence d’anomalie IRM est un élément de bon pronostic de récupération neurologique. Une image d’œdème médullaire serait de meilleur pronostic que l’hémorragie, mais un œdème étendu sur plusieurs niveaux reste péjoratif. L’évolution est plus défavorable chez les patients présentant plusieurs niveaux compressifs par rapport aux patients présentant un seul niveau de sténose (42). Le traitement est avant tout conservateur mais l’administration de cortisone à forte dose n’a pas fait la preuve de son efficacité. La chirurgie n’est pas indiquée en urgence et les décisions opératoires sont fonction du terrain et de l’évolution neurologique. Une chirurgie de stabilisation peut être décidée lorsqu’il existe une instabilité adjacente à un bloc arthrosique. L’aggravation ou la stabilisation de l’état neurologique après une phase d’amélioration peut conduire, en fonction du terrain, à réaliser une décompression à distance du traumatisme, le plus souvent 3 semaines après le traumatisme initial. Certains auteurs préconisent une chirurgie décompressive à distance, même au stade des séquelles et même chez des malades qui ont bien récupéré pour éviter une aggravation ultérieure.
Conclusion La prise en charge chirurgicale du rachis cervical dégénératif nécessite une appréciation soigneuse de tableaux cliniques parfois complexes et une analyse critique des données de l’imagerie. Les choix stratégiques ne font pas toujours l’objet d’un consensus, mais il est certain que la chirurgie constitue un outil réellement performant dans le traitement de la névralgie cervicobrachiale et de la myélopathie cervicarthrosique dans ses formes peu
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évoluées. Le contrat à remplir n’est pas seulement la décompression ; il faut aussi tenir compte de la stabilité locale et de la posture régionale afin de décider des abords antérieurs, postérieurs ou combinés pour la libération canalaire et pour choisir l’étendue d’une éventuelle fusion.
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Les infiltrations intradiscales cervicales : pourquoi et pour qui ? F. Rannou, F. Fayad et M. Revel
Introduction L’anatomie du rachis cervical est très différente du rachis lombaire, notamment au niveau discal. En effet, les articulations unco-vertébrales ne sont présentes qu’à l’étage cervical. Elles sont sollicitées principalement dans les mouvements de flexion/extension, et d’inclinaison latérale (1). Elles sont encloses dans une capsule articulaire confondue en dedans avec la périphérie du disque inter-vertébral. Il n’existe pas de communication entre les deux structures durant la première décennie de vie. En revanche, à l’âge adulte, il existe des communications entre le disque et les articulations unco-vertébrales, probablement à la faveur de fissure de l’annulus dans sa périphérie. Ces communications sont facilement détectables à la discographie. Ces articulations peuvent être le siège d’une arthrose visible sur les clichés de face du rachis cervical ; en conséquence, si l’on veut apporter au niveau de l’articulation unco-vertébrale un corticoïde local, le disque paraît être, en tout cas à l’âge adulte, le véhicule idéal pour permettre une véritable infiltration unco-vertébrale. Il est important de souligner que cette approche de l’infiltration du disque inter-vertébral cervical est totalement différente de l’approche développée au niveau du disque intervertébral lombaire. En effet, dans ce cas, l’infiltration intradiscale est justifiée par une anomalie de signal des plateaux vertébraux faisant évoquer une discopathie active (discopathie à l’IRM de type Modic I) (2). Les patients susceptibles de recevoir une infiltration intradiscale doivent souffrir d’une névralgie cervico-brachiale (3).
Névralgie cervico-brachiale et infiltration cervicale La névralgie cervico-brachiale se manifeste le plus souvent par une symptomatologie assez bruyante, qui dure entre 12 et 24 mois. La première ligne thérapeutique repose sur les anti-inflammatoires et les antalgiques. On peut y associer ensuite les corticoïdes par voie générale, et, en fonction de l’origine lésionnelle des douleurs, on pourra proposer des infiltrations. Néanmoins, les infiltrations foraminales, actuellement, sont fortement déconseillées en raison de plusieurs cas d’accidents neuro-vasculaires ce qui, en termes
122 Le rachis cervical vieillissant de balance bénéfice-risque, ne peut être acceptée (4-7). De plus, dans le cas d’une névralgie cervico-brachiale d’origine uncarthrosique, il semble plus logique d’aller déposer le corticoïde directement au sein de la lésion compressive uncarthrosique. Pour ce faire, la voie intradiscale paraît la plus appropriée, d’autant plus qu’elle nous permet de nous affranchir des accidents vasculaires dramatiques décrits dans la littérature. Nous avons donc mené dans le service une étude rétrospective chez tous les patients ayant eu une infiltration intradiscale entre 1997 et juin 2004 (3). Trente patients ayant eu une infiltration intradiscale ont été colligés, sur les critères suivants : névralgie cervicobrachiale avec une concordance radioclinique (pincement discal et ostéophytose uncovertébrale) et neurologique à l’examen : les patients devaient être en échec de traitement médical, incluant les anti-inflammatoires, le collier cervical, la kinésithérapie, les corticoïdes par voie orale, les infiltrations articulaires postérieures, transforaminales, épidurales pendant au moins trois mois. Chez ces patients, la chirurgie était en cours de discussion face à l’échec de tous les traitements médicaux. Ils devaient avoir une IRM de moins de trois mois et un scanner en coupe osseuse. Les critères d’exclusion étaient une compression d’origine discale molle et non pas dure par uncarthrose. L’existence d’une myélopathie, d’un traumatisme initial ou d’un syndrome du défilé cervico-thoracique ou d’une infiltration de corticoïdes sur un autre site articulaire, durant l’hospitalisation, excluait le patient. Finalement, sur les 30 patients ayant reçu une infiltration intradiscale, 20 ont pu être inclus. Les patients ont reçu une injection intradiscale sous contrôle fluoroscopique par un radiologue entraîné. L’injection délivrait 25 mg d’acétate de prednisolone (hydrocortancyl 2,5 %, Sanofi-Aventis Laboratoire, France) avec port pendant 24 heures d’une semi-minerve rigide. L’âge moyen des patients était de 53 ans, une durée d’évolution des symptômes de 15,5 mois, une douleur radiculaire de 61,3 et une douleur cervicale de 47,2 en moyenne. Le critère principal d’évaluation était la douleur cervicale et radiculaire qui étaient évaluées 2 jours, 1, 3 et 6 mois après l’injection intradiscale. À 48 heures de l’injection intradiscale, 19 patients sur 20 étaient améliorés de plus de 20 %, 15/20 de plus de 50 % et 11/20 de plus de 70 % sur la douleur radiculaire. À 6 mois, le nombre de patients améliorés à plus de 70 % était de 8/20, de plus de 50 % de 8/20 et de plus de 20 % de 12/20. Il n’y a pas eu d’effets secondaires majeurs, sauf chez un patient qui a eu un œdème laryngé résolutif sous corticothérapie per os et inhalé. À noter que toutes les infiltrations intradiscales étaient précédées d’un pulse antibiotique. Les disques injectés ont été C5-C6 chez 10 patients, C6-C7 chez 9 patients et C7-T1 chez 1 patient. Toutes les discographies ont montré une communication évidente entre le disque et l’uncus. Enfin, aucun des patients n’a nécessité d’intervention chirurgicale à l’issue du suivi de 6 mois.
Conclusion Ces résultats sont très encourageants pour des patients qui ont des névralgies cervicobrachiales chroniques rebelles au traitement médical. Nous proposons chez ces patients dans un premier temps de caractériser précisément le conflit. L’existence d’un conflit mou par hernie discale doit exclure l’intradiscale. Ce geste doit être réservé aux patients
Les infiltrations intradiscales cervicales : pourquoi et pour qui ?
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ayant un conflit dur d’origine uncarthrosique. L’apport du scanner avec fenêtre osseuse est déterminant pour distinguer hernie molle et dure. Dans un deuxième temps, on pourrait proposer l’infiltration intradiscale. Néanmoins, en l’absence de travaux multicentriques et prospectifs ce traitement doit être considéré encore comme expérimental. Il n’est donc pas encore question de disséminer cette technique. À noter qu’en termes de bénéfice-risque, cette injection paraît beaucoup plus acceptable qu’une injection foraminale. L’intradiscale cervicale paraît être une alternative sérieuse au traitement chirurgical dans la névralgie cervico-brachiale résistante au traitement médical complet. Néanmoins, ceci doit être réalisé en milieu très spécialisé par des praticiens habitués à poser l’indication et entraînés à la réalisation du geste d’infiltration. Des travaux prospectifs doivent être entrepris pour situer ce geste par rapport à la chirurgie mais également par rapport aux infiltrations foraminales.
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Peut-on manipuler un sujet âgé ? J.-Y. Maigne
Introduction Le vieillissement du rachis se traduit par une pathologie un peu différente de celle de l’adulte plus jeune, par une diminution de la mobilité et par une plus grande fragilité du fait de la perte osseuse liée à l’âge. Pour ces trois raisons, les indications et les règles d’applications des manipulations vertébrales sont un peu différentes chez le sujet âgé.
Définition de la manipulation Nous retiendrons la définition selon R. Maigne : une manipulation est un mouvement forcé unique, bref et sec qui porte un segment mobile rachidien au-delà de son jeu habituel tout en restant dans les limites anatomiques. Elle s’accompagne en général d’un bruit de craquement. Nous ajouterons que ce bruit de craquement constitue le principal critère de réussite de la manipulation car il témoigne de la survenue d’un phénomène de cavitation dans les articulations zygapophysaires. Ce phénomène ne survient que si la séparation des deux facettes articulaires s’est faite à vitesse suffisante. Cette vitesse est atteinte grâce à une impulsion manipulative suffisamment puissante pour vaincre les forces cohésives qui maintiennent les facettes les unes contre les autres. Une certaine force est donc nécessaire à la réalisation d’une manipulation, qui peut poser problème sur un rachis fragile. D’autre part, une mobilité segmentaire minimale est requise pour que la manipulation puisse avoir lieu. Une perte de souplesse ou une arthrose peuvent la rendre impossible.
Une pathologie différente chez le sujet âgé L’arthrose progresse avec l’âge. La pathologie qu’elle entraîne (lombalgies ou cervicalgies par poussées inflammatoires d’arthrose discale ou zygapophysaire, radiculalgies par sténose foraminale) est souvent plus sensible aux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) que chez le sujet jeune. D’autres affections douloureuses sont souvent l’apanage du sujet âgé, comme la maladie de Forestier ou le spondylolisthésis dégénératif, dont les poussées doivent aussi être traitées par AINS et les tassements vertébraux ou les fractures
126 Le rachis cervical vieillissant du sacrum, qui sont traités par antalgiques et repos, voire par vertébroplastie. Enfin, c’est chez le sujet âgé que l’on rencontre plus souvent des affections osseuses malignes. Quoique la pathologie mécanique commune existe à tout âge, sa fréquence diminue avec le vieillissement. Le recours aux manipulations est donc moins fréquemment indiqué chez le sujet âgé que chez le sujet plus jeune et il doit se faire après réflexion et enquête diagnostique. Une radiographie nous semble indispensable dans la plupart des cas.
Une mobilité qui diminue avec l’âge La mobilité vertébrale diminue avec l’âge. Les causes en sont une perte de souplesse ligamentaire, l’arthrose zygapophysaire et discale et d’éventuelles ossifications ligamentaires. En pratique, les techniques manipulatives nécessitant une rotation forcée sont peu utilisables chez le sujet âgé (manipulation cervicale en rotation, manipulation lombaire en décubitus latéral ou en rotation à cheval), du fait d’un déficit de mobilité prédominant sur ce secteur. On devra se contenter, si elles sont indiquées, de mobilisations en rotation ou de techniques myotensives. En revanche, les manipulations faisant appel à la flexion ou l’extension segmentaire restent possibles jusqu’à un âge avancé (manipulation en enroulé dorsal ou manipulation en appui sternal). Elles peuvent être utilisées sans risque particulier.
Des risques spécifiques La déminéralisation liée à l’âge ou à d’autres facteurs fragilise l’os. Les manipulations, qui sont par définition des manœuvres forcées, peuvent provoquer une fracture du corps vertébral, de côtes ou de l’odontoïde. Pratiquées chez le sujet âgé, elles se doivent donc d’être prudentes et effectuées en douceur. Une manipulation thoracique telle que l’enroulé dorsal peut être à l’origine d’une fracture de côte. Des techniques lombaires ou cervicales brusques et non contrôlées peuvent tasser un corps vertébral. Il a été décrit une fracture de l’apophyse odontoïde après manipulation cervicale. Enfin, les métastases osseuses sont évidemment plus fréquentes après 65 ans et font courir le même type de risque.
Conclusion On retiendra les deux principes suivants : 1) Nécessité d’une enquête étiologique plus poussée que chez l’adulte. Toute douleur d’apparition brutale doit faire évoquer une pathologie fracturaire. Une radiographie nous semble indispensable dans la plupart des cas avant d’envisager un traitement par manipulation. 2) Nécessité d’une grande progressivité dans l’exécution des techniques manipulatives. Ne jamais forcer d’emblée, mais explorer l’amplitude de mobilité disponible avant d’effectuer la manœuvre. Les manœuvres en rotation sont peu recommandées chez le sujet âgé.
Le point sur les dernières recommandations dans la rééducation du rachis cervical E. Coudeyre, D. Claus et P. Givron
Introduction Les cervicalgies sont définies comme des douleurs situées entre la région occipitale et la ligne passant par l’épineuse de T1, qui peut irradier vers la tête, la région postérieure cervico-dorsale ou la région pectorale (1). Elles sont qualifiées de communes en l’absence d’affection causale, et après avoir éliminé par l’interrogatoire et d’éventuels examens complémentaires une étiologie secondaire. Comme pour la lombalgie commune, une entité anatomo-clinique n’est pas identifiable dans un grand nombre de cas et il n’est par conséquent pas toujours possible de proposer un traitement spécifique. La prévalence des cervicalgies est élevée ; on estime en effet que 20 à 70 % de la population peuvent être concernés par ce type de douleurs au cours de son existence (2). Si dans la plupart des cas l’évolution naturelle est favorable, le risque de récidive ou de passage à la chronicité est important. Les concepts de prise en charge des douleurs rachidiennes sont actuellement fortement influencés par les travaux de la Québec Task Force qui concernaient non seulement le rachis lombaire mais également le rachis cervical (3). L’objectif de ce travail fondateur était de proposer une classification des affections rachidiennes basée sur des entités cliniques rencontrées en pratique quotidienne et des prises en charge dynamiques, issues de la médecine fondée sur les preuves, ayant pour but de réduire la désinsertion socioprofessionnelle des patients. Depuis 20 ans, on a assisté à une explosion de la littérature scientifique concernant la lombalgie commune comme en témoigne le grand nombre de revues systématiques ou de recommandations pour la pratique clinique publiées. En revanche, en dehors du contexte post-traumatique du coup de fouet cervical, la littérature concernant les cervicalgies communes est beaucoup plus pauvre. Deux travaux récents ont fait le point sur la prise en charge des cervicalgies communes ; l’un publié dans la revue du rhumatisme s’intéressant uniquement à la rééducation (1) ; l’autre réalisé dans le cadre de la Joint and Bone Decade, concernant l’ensemble des traitements non invasifs dont la rééducation (4). La première de ces revues (1) a tout d’abord mis l’accent sur l’évaluation de l’incapacité fonctionnelle via des échelles d’incapacité spécifiques à la pathologie cervicale et validées en français. Parmi celles-ci, l’indice de douleurs et d’incapacités cervicales
128 Le rachis cervical vieillissant (INDIC) (5), traduction du Neck Pain and Disability Scale (NPDS) (6), présente les meilleures propriétés métrologiques. Cette revue a également mis en évidence la relation entre l’incapacité fonctionnelle liée à la cervicalgie commune et les peurs et croyances erronées sur la relation douleur/activité (7) au même titre que pour la lombalgie commune (8). L’évaluation de ces peurs et croyances est essentielle car elle peut conduire à des approches éducatives spécifiques, même si le niveau de preuve dans ce domaine reste faible. En effet, la revue de la Cochrane Library (9) à ce sujet a retrouvé peu d’études et a souligné l’hétérogénéité des populations incluses. Concernant la rééducation proprement dite, différentes techniques ont démontré une certaine efficacité. On peut citer : les tractions cervicales en particulier sur un mode intermittent (10), le recouplage oculocervical (11), la mobilisation et les étirements (12), les programmes d’exercices (13). En revanche, un certain nombre de techniques restent sujet à discussion comme les massages (14) et la physiothérapie (TENS, ultrasons, thermothérapie, laser, ondes électromagnétiques athermiques) (1). La deuxième de ces revues (4) confirme l’intérêt des thérapies manuelles mais ne permet pas de trancher sur l’efficacité comparée des différents traitements entre eux. Elle a également mis en évidence les traitements ayant un objectif de restauration fonctionnelle précoce, qui apparaissent plus efficaces par rapport aux prises en charge n’ayant pas cet objectif. À partir des données de la littérature (études cliniques et revues), il peut être possible de proposer des recommandations pour la pratique clinique. Celles-ci ont été définies par l’Institut américain de médecine (Institute of Medicine, États-Unis) comme « des données définies de façon systématique pour assister les praticiens et les patients dans les décisions médicales nécessaires à des soins adaptés dans des circonstances cliniques précises » (15, 16). Associées aux recommandations d’ordre pharmacologique, les recommandations sur les thérapeutiques non pharmacologiques dont la rééducation sont de plus en plus souvent indiquées en traitement de routine pour les pathologies ostéo-articulaires et les cervicalgies en particulier.
Objectif L’objectif de ce travail est de faire le point sur les recommandations de la littérature concernant la prise en charge des cervicalgies communes en excluant celles concernant le traumatisme en coup de fouet cervical à partir d’une revue systématique de la littérature.
Méthodes Une revue systématique de la littérature est réalisée sur PubMed en utilisant comme mots clefs « neck pain » et comme limite « guidelines » et ne retenant que les articles en anglais et en français. Une analyse des recommandations de la Haute autorité de santé est également associée à cette démarche.
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Résultats La revue systématique de la littérature a retrouvé 12 articles. Parmi ces 12 articles, seuls deux traitent de la prise en charge rééducative des cervicalgies communes. Ce sont les recommandations du Philadelphia Pannel, publiées dans Physical Therapy en 2001 (17) et celles de la section orthopédie de « l’American Physical Therapy Association » publiées en 2008 (18). L’interrogation de la base de données de la Haute autorité de santé a permis de retrouver également les recommandations de l’ANAES, publiées en 2003, qui font actuellement référence pour la pratique française (19).
Recommandations de l’ANAES (19) Ces recommandations ont été établies selon la méthodologie proposée par la HAS. Les sociétés savantes concernées par le thème, réunies au sein du comité d’organisation, ont été consultées pour délimiter le thème de travail, connaître les travaux réalisés antérieurement sur le sujet et proposer des professionnels susceptibles de participer aux groupes de travail et de lecture. Les recommandations ont été rédigées par le groupe de travail, au terme d’une analyse de la littérature scientifique et d’une synthèse de l’avis des professionnels consultés. Les études retrouvées par la revue de la littérature sont classées selon leur niveau de preuve scientifique ; du niveau I le plus élevé au niveau IV le plus faible, permettant d’élaborer des grades de recommandations ; grade A preuve scientifique établie, grade B présomption scientifique, grade C faible niveau de preuve et enfin consensus professionnel en l’absence d’études. Ces recommandations comportent deux sous-parties. La première partie concerne le bilan kinésithérapique qui est une étape indispensable avant de débuter une rééducation. Il a pour but de choisir les techniques en fonction du diagnostic kinésithérapique, suivre l’évolution de la pathologie, mesurer les résultats thérapeutiques. Il explore différents domaines : douleur, posture, palpation, mobilité articulaire, activité neuro-musculaire, proprioception, retentissement fonctionnel (INDIC) (5) et professionnel. La deuxième partie concerne le traitement rééducatif proprement dit. Ce traitement kinésithérapique des cervicalgies doit associer différentes techniques, à la fois antalgiques, articulaires, musculaires, de reprogrammation neuro-musculaire et de réadaptation à la vie normale et professionnelle (grade B). Ces techniques ont été retenues même si leurs niveaux de preuve diffèrent étant donné qu’elles sont validées par la pratique des professionnels ayant participé à l’élaboration ou à la relecture des recommandations. Les différents niveaux de preuve sont rappelés pour chaque technique.
Physiothérapie Aucune étude méthodologiquement correcte n’a évalué isolément l’électrothérapie, les ultrasons et les infrarouges. Les seules études disponibles ont toujours évalué l’efficacité des agents physiques antalgiques ou anti-inflammatoires (électrothérapie, ultrasons, infrarouges) en association avec d’autres thérapeutiques kinésithérapiques. Elles suggèrent un effet positif de ces associations sans que l’on puisse mesurer leur rôle spécifique (grade C).
130 Le rachis cervical vieillissant Les études contrôlées ayant évalué l’efficacité du laser sur les douleurs cervicales ont fourni des résultats contradictoires. Il n’y a pas de raisons actuelles pour le recommander (accord professionnel). L’électromagnétothérapie et les aimants n’ont pas fait la preuve de leur efficacité et elles ne sont par conséquent pas recommandées (accord professionnel).
Tractions Il existe un manque de preuve de l’efficacité des tractions vertébrales (effectuées selon les modalités réglementaires), mais elles pourraient avoir un effet bénéfique à court terme (accord professionnel).
Massage Il existe un consensus fort pour l’utilisation du massage manuel, malgré l’absence d’étude montrant son efficacité. L’absence de risque démontrée, sa large utilisation par les kinésithérapeutes, la reconnaissance de ses bienfaits par les patients autorisent son emploi. Le massage ne doit pas constituer exclusivement la base du traitement kinésithérapique, mais être un adjuvant thérapeutique (accord professionnel).
Techniques de gain de mobilité Les techniques de mobilisations actives, passives ou de contracté-lâché participent à l’amélioration des amplitudes articulaires de la région cervicale. Ces techniques sont recommandées (grade B).
Rééducation oculo-cervicale Les techniques visant à solliciter le repositionnement céphalique sont recommandées pour tous les types de patients cervicalgiques (grade B). Ces techniques sont proposées en complément des techniques de gain de mobilité.
Exercices actifs Le travail actif est recommandé dans le traitement des cervicalgies chroniques et aiguës (grade B). Les exercices actifs intensifs ne semblent pas démontrer de supériorité dans le traitement des cervicalgies chroniques par rapport aux techniques actives simples, contrairement à ce qui est observé dans le cadre des lombalgies chroniques.
Recommandations du Philadelphia Panel (17) Les recommandations du Philadelphia Panel ont utilisé une méthodologie spécifique fondée sur une revue de la littérature associée à l’avis d’experts et validée par un large panel de professionnels sur un mode comparable à celui de la HAS. En revanche, la sélection des études était plus pertinente. En effet, les résultats des études étaient pris en compte en fonction de la pertinence du bénéfice clinique apporté, c’est-à-dire une amélioration de plus de 15 % du critère principal d’analyse. Les principaux critères retenus étaient la douleur, la fonction, l’avis du patient, la qualité de vie et le retour au
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travail. Ainsi, un grade de recommandations de A (bénéfice clinique de plus de 15 % à partir d’études cliniques randomisées) à D (absence de bénéfice clinique) est attribué pour les différentes techniques.
Exercices physiques Les programmes d’exercices comportant du renforcement musculaire et de la proprioception sont les seuls techniques pouvant être recommandées avec un niveau de preuve élevé, avec un grade A pour la douleur et la fonction et un grade B pour l’évaluation globale du patient. De plus, cette recommandation est validée à plus de 90 % par les praticiens interrogés.
Tractions Il n’est pas possible, en l’absence de données suffisantes, d’émettre une recommandation.
Ultrasons Il existe un niveau de preuve faible pour recommander ou pas cette technique de façon isolée.
Données insuffisantes En raison de l’insuffisance de données probantes, aucun avis n’a pu être donné pour l’EMG biofeedback, les massages, la thermothérapie, l’électrostimulation, le TENS, ainsi que pour les traitements combinés.
Recommandations de l’American Physical Therapy Association (18) Les recommandations publiées par l’American Physical Therapy Association ont pour particularité de s’être appuyées sur la Classification internationale du fonctionnement (CIF) pour définir les différents tableaux cliniques de douleurs cervicales. Les grades de recommandations proposés vont de A, niveau de preuve élevé, basé sur des études randomisées de bon niveau à F, qui correspond à l’avis d’experts. Comme pour l’ANAES, ces recommandations ont rappelé l’intérêt de réaliser une évaluation fonctionnelle préalable à la prise en charge. Cette évaluation peut s’appuyer sur des questionnaires standardisés comme le Neck Disability Index (6) ou de façon plus cliniquement pertinente sur le handicap prioritaire pour le patient à l’aide, par exemple, du Patient Specific Functional Scale (20).
Mobilisation cervicale/manipulation Concernant les traitements, la mobilisation associée à des exercices est recommandée avec un niveau de preuve élevée (grade A).
Exercices d’étirement Des exercices d’étirement des muscles cervicaux peuvent être proposés avec un niveau de preuve faible (grade C).
132 Le rachis cervical vieillissant
Exercices de coordination, renforcement et d’endurance Les thérapeutes peuvent avoir recours à des exercices de coordination, renforcement et d’endurance dont le niveau de preuve d’efficacité est élevé (grade C).
Exercices de « centralisation » Les exercices de « centralisation » de la douleur, fondés sur la méthode McEnzie, ne sont pas plus efficaces que les autres types d’intervention (grade C).
Tractions Les thérapeutes peuvent avoir recours aux tractions intermittentes, associées à des exercices de renforcement ou à des thérapies manuelles (grade B).
Discussion La lecture des recommandations internationales et des revues de la littérature les plus récentes confirme la supériorité des programmes d’exercices par rapport aux autres thérapeutiques dans la prise en charge des cervicalgies communes. Les techniques passives comme les massages et la physiothérapie n’ont globalement pas fait la preuve de leur efficacité et restent des techniques adjuvantes. Enfin, l’utilisation des tractions – en particulier sur un mode intermittent – semble avoir un intérêt mais reste sujet à discussion et ne sont pas actuellement unanimement recommandées. L’analyse de l’incapacité fonctionnelle à l’aide d’outils validés apparaît comme un préalable nécessaire à la prise en charge rééducative des cervicalgies communes. Cependant, il n’y a pas actuellement de consensus sur le meilleur outil qui peut être proposé. L’INDIC (5, 6), qui a les meilleures propriétés métrologiques, a un temps de passation plus long que le NDI. Ces deux indices n’ont pas, à notre connaissance, été comparés à des outils plus simples de mesure du handicap prioritaire tels que le Patient Specific Functional Scale (20). Ces différentes recommandations n’ont pas pris en compte les facteurs psychosociaux dans le traitement rééducatif des cervicalgies alors que l’on sait que ce sont des facteurs de risque majeur de passage à la chronicité (7). Par analogie avec la lombalgie commune, on peut penser qu’une information et une éducation spécifiques sur ces facteurs peuvent avoir un impact positif. Or, les recommandations proposent ce type d’approche éducative dans les suites de traumatisme en coup de fouet cervical (18) mais pas pour les cervicalgies communes non traumatiques. L’une des principales limites de ces recommandations concerne les traitements combinés ou faisant appel à différentes techniques utilisées de manière séquentielle, pour lesquelles il est difficile de faire la part de l’impact des techniques employées les unes par rapport aux autres. Ainsi, si les traitements combinés sont recommandés, c’est davantage à partir de l’expérience des professionnels que d’éléments de preuve de la littérature.
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Une autre limite concerne la définition clinique des différents tableaux de cervicalgies communes, ainsi que leur caractère aigu, récurrent ou chronique pouvant réduire l’application des recommandations en pratique clinique courante. D’autres limites participent à l’application des recommandations par les praticiens de terrain. En effet, leur mise en œuvre est un processus complexe et difficile (21). Les différentes stratégies retrouvées dans la littérature pour la lombalgie commune, qu’elles soient passives ou actives, sont décevantes (22, 23). Bien que ces interventions soient complexes, elles ne produisent pas l’effet escompté. Par conséquent, il n’y a pas à ce jour pour la lombalgie de stratégies significativement plus efficaces que les autres permettant de faire le lien entre la médecine fondée sur les preuves et la pratique fondée sur les preuves. On peut légitimement penser qu’il en est de même pour la pathologie cervicale. Ainsi, il a été montré récemment que le type d’approche des praticiens fondé sur le modèle biomédical ou biopsychosocial pouvait influencer leur stratégie de prise en charge de la cervicalgie commune (24).
Conclusion L’analyse des dernières recommandations pour la pratique clinique dans la rééducation du rachis cervical a confirmé l’intérêt des techniques actives de kinésithérapie fondées sur des programmes d’exercices. Les différentes techniques de physiothérapie apportent un bénéfice limité et doivent rester des traitements adjuvants. Des études complémentaires sont nécessaires pour les tractions et l’éducation thérapeutique.
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Orthèses cervicales : descriptions techniques, indications, nomenclature P. Sautreuil, T. Vandermeersch, P. Thoumie, S. Bendaya, B. Missaoui et E.H. Rakotovao-Razafindramavo
Introduction Pour les chirurgiens orthopédistes, les rhumatologues et les médecins de médecine physique, prescripteurs privilégiés en appareillage, pour les médecins généralistes et les kinésithérapeutes, pour tous ceux qui ont affaire, au quotidien, à des patients bénéficiant d’appareillage cervical, nous avons dressé une liste la plus complète possible du matériel disponible dans notre nomenclature. Le choix de la bonne orthèse peut être délicat* car pour bien prescrire une orthèse cervicale, il faut connaître ses caractéristiques techniques, ses effets mécaniques sur le rachis cervical et les parties molles ainsi que les contraintes entraînées par son utilisation.
Généralités Effets attendus des orthèses cervicales On recourt aux orthèses cervicales dans de très nombreuses situations : en urgence dans les traumatismes cervicaux, au long cours dans les paralysies, pour un port à durée limitée en rhumatologie ou après chirurgie rachidienne. On leur demande d’envelopper et d’apporter de la chaleur et ainsi de favoriser la décontraction musculaire et l’indolence ; de maintenir l’alignement vertébral et/ou de prévenir les déformations ; de limiter la mobilité dans un ou plusieurs plans ; d’assurer en partie ou en totalité la sustentation de la tête. Les principales différences avec l’appareillage du tronc sont la brièveté du segment cervical, les contraintes au niveau de la mandibule inférieure (gêne à l’alimentation voire à l’élocution), la réduction du champ visuel (l’immobilisation de la tête est compensée par une mobilité globale du tronc). * « Le problème primordial – qui reste toujours à résoudre – est de fixer l’indication thérapeutique » dit le Pr H. Serre, dans la préface du Tome « Orthèses » de Deltour (1).
136 Le rachis cervical vieillissant
Différentes classes et tarifs d’orthèses cervicales Comme dans les autres domaines de l’appareillage orthétique, il existe deux domaines : orthèses de série du petit appareillage orthopédique (PAO) et orthèses réalisées sur mesure du grand appareillage orthopédique (GAO). Le premier est disponible dans certaines pharmacies, dans des magasins spécialisés et chez les orthoprothésistes. La prise en charge se fait selon un tarif de responsabilité, c’est-à-dire que le tarif de la Liste des produits et prestations remboursables (LPPR) sert de base au remboursement (100 ou 65 %) mais peut être dépassé (et parfois largement) par le revendeur. La différence (35 % du tarif de la nomenclature ou différence entre ce tarif et le coût réel) est prise en charge en partie ou totalement par la mutuelle. Le GAO est réalisé par un ortho-prothésiste selon des mesures qui permettent de l’adapter à une personne à un moment donné. Le tarif est opposable, c’est-à-dire que l’organisme de prise en charge prend à 100 % le tarif de la LPPR et il n’y a pas de dépassement (2).
Orthèses pour tous les rachis cervicaux Le PAO convient pour des rachis ayant des formes standard dans des pathologies bénignes ou modérées. Parfois adaptable, il est limité au mieux à environ 70-80 % de la population. Les jeunes femmes au cou gracile (fig. 1a), comme les hommes obèses à cou court (fig. 1b) par exemple, ou les personnes présentant des asymétries posturales, ne peuvent bénéficier de ce matériel. Des problèmes morphologiques et une gravité plus importante orientent alors la préconisation d’orthèse cervicale vers du matériel sur mesure.
a Fig. 1 a et b – Cou hors normes.
b
Orthèses cervicales : descriptions techniques, indications, nomenclature
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Petit appareillage : colliers cervicaux, C1 à C4 Ils sont indiqués dans les pathologies bénignes : torticolis, « poussées » douloureuses de cervicarthrose, entorses cervicales bénignes. Ils n’assurent pas de soutien occipital ou mentonnier strict et ont surtout un rôle de rappel proprioceptif. Disponibles chez les pharmaciens, les revendeurs de petit appareillage et les orthoprothésistes, ils sont fabriqués en série de façon industrielle. Dans chaque classe, en fonction du fournisseur, il existe des différences techniques. Ces colliers sont le plus souvent au moins en trois tailles et trois hauteurs (cf. nomenclature et LPPR dans Annexe 1). – C1 : Collier cervical non réglable en hauteur pour soutien léger en mousse (naturelle ou synthétique d’une densité minimale de 30 kg/m3), recouvert d’une enveloppe en tissu non allergique, fermé par un velcro en arrière. – C2 : Collier non réglable en hauteur, pour soutien moyen. Le collier C2 est un collier C1 avec une « âme » rigide qui limite très partiellement les mouvements du rachis cervical (fig. 2). Les colliers C1 et C2 ont une action sur la mobilité du rachis négligeable. Ils apportent un bénéfice par effet gaine ainsi qu’un environnement chaud et décontracturant. – C3 : Collier pour soutien moyen, semi-rigide. Il est en polyéthylène avec un bourrelet mousse de confort périphérique au-dessus et au-dessous (fig. 3). Il est de hauteur fixe ou réglable et a une action plus importante sur les mouvements cervicaux. Certains possèdent une mentonnière (sans mentonnière, il s’appelle collier de Schantz). Ces colliers ne possèdent pas d’appui occipital et ne contrôlent pas l’extension. – C4 : Orthèse cervicale avec appui occipito-mandibulaire, collier cervical dit « miniminerve » pour soutien renforcé avec appui occipital, mentonnier et sternal sans ou avec réglage de l’extension sur le patient. Rigides et prenant appui au niveau du menton et de la région occipitale, le C4 limite encore plus le rachis cervical dans ses trois degrés de mobilité. On peut choisir un modèle avec flexion antérieure réglable afin de réduire la lordose cervicale et de décomprimer les articulaires postérieures.
Fig. 2 – Collier C2 en mousse avec « âme » rigide, parfois amovible.
138 Le rachis cervical vieillissant
Fig. 3 – Collier C3 en polyéthylène avec mentonnière et bourrelets mousses, réglable en hauteur.
On différencie : – le collier de « Philadelphie » en polyéthylène ou en plastazote (fig. 4) qui comprend deux valves, une antérieure mentonnière et une postérieure occipitale, réglables. Il est utilisé en traumatologie routière en urgence (3) et également utilisé en relais de corsets avec minerve la nuit, par exemple d’un corset garchois ; – le collier de « Miami » qui comprend un appui sternal et des réglages (fig. 5) ; – des appareils standards consistant en kits comprenant des plaques prédécoupées et préformées en plastique et des montants métalliques mis aux formes du patient ou des éléments en plastique avec des systèmes de réglages permettant d’adapter le collier aux formes du patient et à ses besoins.
Fig. 4 – Collier cervical dit « Philadelphie » en polyéthylène.
Orthèses cervicales : descriptions techniques, indications, nomenclature
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Fig. 5 – Collier de « Miami » comportant un appui sternal, une mentonnière réglable, une ouverture en regard d’une éventuelle trachéotomie.
Colliers cervicaux et mobilité du rachis cervical Logiquement, plus le collier est important et rigide et plus la réduction de mobilité est importante (tableau I). Mais c’est surtout vrai pour la flexion/extension. Les colliers cervicaux ont peu d’impact sur les inclinaisons et les rotations (4). Cette étude n’inclut pas la mini-minerve C4 qui, dans le domaine du PAO, est celle qui restreint le plus la mobilité de la tête. À noter qu’en pratique les orthèses C1 et surtout C2 sont vendues 5 à 10 fois plus souvent que les orthèses C3/C4. La principale raison est esthétique : un collier mousse n’est pas plus discret, mais plus élégant. Tableau I – Limitation des amplitudes du rachis cervical en fonction des colliers portés.
Limitation F/E Limitation IL Limitation rotation
Collier souple
Collier rigide
Collier rigide + mentonnière
23 % 3% 16 %
52 % 23 % 32 %
67 % 34 % 42 %
Autres appareils Il existe d’autres appareils, non distribués en France. Signalons l’orthèse américaine « Headmaster » (fig. 6) préconisée dans la maladie rhumatoïde pour contrôler la flexion antérieure (5). Elle consiste en un anneau plié de façon à appuyer sous le menton (protégé par un matériau mousse) et en haut du sternum, maintenu en arrière par une sangle auto-agrippante.
140 Le rachis cervical vieillissant
Fig. 6 – Orthèse « Headmaster » de contrôle de la flexion du rachis cervical préconisée aux États-Unis dans la maladie rhumatoïde.
Orthèses cervicales du grand appareillage orthopédique Ce sont au minimum des orthèses occipito-mentonnières. Elles répondent à des nécessités d’adaptation particulières liées aux formes du rachis (impossibilité de trouver des orthèses de série adaptées) ou au besoin d’une immobilisation plus importante sortant des possibilités du PAO. En augmentant le nombre de points d’appui et la surface de contention, on assure une plus importante immobilisation de la tête par rapport au tronc. La rigidité des matériaux mais aussi la rigueur de l’adaptation participent à la réduction de mobilité (cf. nomenclature dans Annexe 2).
Indications des orthèses cervicales du GAO Les indications des orthèses cervicales du GAO prolongent celles du PAO : traumatologie (entorses cervicales, fractures vertébrales), chirurgicales (canal cervical étroit, ostéosynthèse), rhumatologie (polyarthrite rhumatoïde sub-luxation C1-C2, arthrose cervicale, névralgie cervico-brachiale hyperalgique), neurologiques (tétraplégie, tétraparésie, myélopathie cervicale, dystonie, camptocormie et myopathie segmentaire, SLA), infectieuses (spondylodiscite), oncologique (néoplasie, métastase cervicale).
Matériaux du GAO et nomenclature Les orthèses de grand appareillage sont réalisées en thermoplastique basse température, en mousse de polyuréthane, en thermoplastique haute température ou en cuir armé. Les matériaux thermoplastiques basse température (polyisoprène, polyéthylène) sont formés
Orthèses cervicales : descriptions techniques, indications, nomenclature
141
à une température de 60° environ, directement sur le rachis cervical du patient. Leur réalisation est rapide. De même, pour la mousse de polyuréthane (Néofract®). Après adjonction des sangles et des galons le long du périmètre de l’orthèse, des capitonnages, de trous d’aération (pour limiter la macération), la livraison se fait dans l’heure ou, au plus, dans la demi-journée. Les orthèses en thermoplastique haute température en mousse de polyéthylène, en polyéthylène, en plexiglas (minerve du garchois) ou en cuir armé nécessitent un moulage et/ou de prises de mesures numériques, un positif rectifié, un (des) essayage(s), des finitions. Leur fabrication demande du temps, quelques jours pour les plastiques, plus pour le cuir (voir également Annexe 2, Matériaux du GAO). Si la mentonnière est amovible, le prix est majoré (88,70 euros). Les matériaux sont repérés par des lettres dont nous donnons le code en annexe.
Orthèses cervicales sur mesure Les orthèses du grand appareillage réalisées en polypropylène ou en polyéthylène thermoformées sur un positif issu du moulage du patient comportent trois, quatre ou cinq points d’appui : mentonnier et occipital, bien sûr, mais encore sternal, dorsal et parfois frontal. L’immobilisation est encore améliorée, en particulier au niveau du rachis supérieur.
Orthèses cervicales occipito-mandibulo-thoraciques ou minerves S’étendant en avant du mandibule aux articulations sterno-claviculaires, couvrant en arrière de la région occipitale à D1, reposant latéralement sur les trapèzes, ces orthèses appelées minerves (figs. 7 et 8) apportent une meilleure immobilisation de la tête que les colliers cervicaux de série (6).
Fig. 7 – Minerve réalisée sur moulage en mousse de polyéthylène (TR23N35) portée trois mois pour protéger le montage chirurgical (cf. fig. 8 a et b).
142 Le rachis cervical vieillissant
a
b
Fig. 8 a et b – Profils droit et gauche d’une ostéosynthèse antérieure C4-C6 17 ans après une entorse cervicale.
Orthèse cervicale occipito-mandibulaire avec appui sternal (ou grandes minerves = SOMI, soit sternal orthosis mandibular immobilizer des AngloSaxons) C’est une orthèse avec fermeture latérale ou bivalve prenant appui sur les régions claviculaires et scapulaires et soutenant la colonne cervicale en enveloppant les régions mentonnière et cervicale (fig. 9). Elles permettent d’immobiliser le rachis cervical dans une position précise, déterminée cliniquement et radiologiquement.
Fig. 9 – Minerve (en polyisoprène, TR24G45) avec appui claviculaire et sternal pour une patiente souffrant d’une entorse de gravité moyenne du rachis cervical. (Schéma réalisé à partir d’un cliché C. Calas.) Existe en polyéthylène TR24N35.
Orthèses cervicales : descriptions techniques, indications, nomenclature
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Orthèse cervicale occipito-mandibulaire avec appui thoracique C’est une orthèse bivalve prenant appui sur la partie supérieure de la cage thoracique avec fermeture sous-axillaire (fig. 10). La valve antérieure enveloppe la partie mentonnière alors que la valve postérieure s’étend à la région occipitale. La mentonnière peut être amovible (avec supplément de prix). : – avec adjonction d’un bandeau frontal (fig. 11), ce dispositif assure un très puissant maintien des inclinaisons et des rotations grâce au prolongement temporal bilatéral de la valve occipitale et en flexion antérieure par le bandeau frontal quand la tête est bien calée dans la valve postérieure ;
Fig. 10 – Minerve à appui thoracique (en polyisoprène, TR25G45) pour séquelles de traumatisme rachidien. (Schéma réalisé à partir d’un cliché C. Calas.) Existe aussi en polyéthylène TR25N35.
Fig. 11 – Orthèse cervicale pour un patient présentant une SLA prédominant au niveau du rachis cervical postérieur (TR25N36). Le bandeau frontal libère la mandibule inférieure. Le confort dans la vie quotidienne amène le patient à l’utiliser la nuit. Noter la grande lordose thoraco-lombaire. Le patient sans l’orthèse doit soutenir sa tête avec sa main. Cet appareil lui permet, entre autres, de manger plus facilement (orthèse atypique réalisée au CERAH Créteil par D. Azoulay et T. Vandermeersch sur moulage corrigé après une première ébauche en Plexidur™).
144 Le rachis cervical vieillissant – la minerve « garchoise » (fig. 12) comporte des plaques en polyéthylène découpées en X, une antérieure et une postérieure, posées sur un capitonnage en mousse de polyéthylène, qui servent de support à des tiges métalliques qui soutiennent en arrière la pièce occipito-temporale et en avant de la mentonnière. Celle-ci est amovible pour faciliter les repas. Les parties avant et arrière sont reliées en sous-axillaire par deux sangles larges.
Fig. 12 – Minerve « garchoise ». Des plaques en polyéthylène découpées en X, une antérieure et une postérieure, posées sur un capitonnage en mousse de polyéthylène, servent de support à des tiges métalliques qui soutiennent en arrière la pièce occipito-temporale et en avant la mentonnière. Celle-ci est amovible pour faciliter les repas. Les parties avant et arrière sont reliées en sous-axillaire par deux sangles larges.
Orthèse cervicale occipito-mandibulaire avec appui thoracique et abdomino-pelvien Elle concerne des pathologies lourdes, aiguës ou séquellaires. Il s’agit parfois de corsets dont la composante – cervicale, amovible – est une adjonction. Dans certains contextes, la tenue de la tête est réalisée par un bandeau frontal (patient polyhandicapé, spastique).
Corset garchois La minerve dans le corset garchois (fig. 13) n’est pas systématique, elle est nécessaire lorsque le patient ne tient pas sa tête. Elle présente des particularités : la mentonnière est aplatie et inclinée en avant en oblique. Elle autorise ainsi les mouvements de rotation de la tête. Elle est réglable en hauteur, en inclinaison et amovible pour faciliter l’alimentation quand elle a lieu par la bouche. Une ouverture postérieure permet d’accéder à la cicatrice opératoire. Le corset garchois, en Plexidur™, bénéficie d’une double référence : TR39K50 + TR24K27.
Orthèses cervicales : descriptions techniques, indications, nomenclature
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Fig. 13 – Le corset garchois équipé de sa minerve. Sur cette vue de profil, on voit bien l’inclinaison de la mentonnière en oblique en avant.
Corset en cuir avec minerve Rares par leurs indications mais aussi du fait de la disparition des savoir-faire et des entreprises capables de les réaliser, les orthèses en cuir apportent aux personnes qui les portent beaucoup de confort (fig. 14). Pour ces orthèses portées au très long cours, quand le choix existe, le cuir est préféré au plastique.
Fig. 14 – Corset minerve cuir et métal (TR29C11) pour des séquelles de polytraumatisme, lombaire et cervical.
146 Le rachis cervical vieillissant
Orthèses cervicales de GAO et mobilité Pour réduire à près de 100 % la mobilité du rachis cervical, surtout pour le rachis cervical supérieur, il faut employer le « halo-jacket », un halo monté sur une orthèse thoracique haute (fig. 15 ; tableau II). Il est utilisé en chirurgie quand une immobilisation absolue est nécessaire (une greffe intersomatique et/ou ostéosynthèse). Les orthèses avec valve postérieure occipito-temporale et bandeau frontal montées sur une orthèse thoracique haute rigide réalisent une efficace limitation du rachis inférieur (fig. 13).
Fig. 15 – Le « halo-jacket » permet une immobilisation à près de 100 % des mouvements de la tête par rapport au tronc (les quatre vis de fixation crânienne ne sont pas représentées).
Tableau II – Le « halo-jacket » est supérieur à l’orthèse cervico-thoracique pour bloquer les mouvements du rachis cervical en particulier supérieur (4).
Limitation mobilité
Halo + orthèse thoracique rigide
Orthèse cervico-thoracique
96 %
87 %
Durée de port de l’orthèse cervicale À part quelques exceptions (interactions psycho-psychiatriques entre la pathologie et la préconisation du port d’appareil), le désir du patient recoupe celui du prescripteur : que le port de l’orthèse soit le plus court possible. Son utilisation est souvent insérée dans une prise en charge globale de médecine physique (7). On doit porter attention au confort et à la tolérance des contraintes qui garantissent l’efficacité de l’orthèse et le port sur une longue durée.
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Coûts et amortissements Le petit appareillage est d’un rapport qualité prix intéressant, mais il n’est que partiellement remboursé. Mais si on calcule le coût journalier d’une orthèse de GAO en fonction de sa durée d’utilisation, il n’est souvent que de quelques euros. Exemple, le plus coûteux des appareils présentés ici est le corset cuir avec minerve (fig. 14). Il est porté en moyenne trois ans : le coût journalier est de 2 €. Autre exemple, une des orthèses les plus souvent prescrites est la minerve à appui thoracique, TR24G45 (fig. 9), son prix est de 353 €, elle est portée habituellement deux ou trois mois, son coût journalier est de 6 ou 4 €. L’appareillage du rachis cervical avec ces orthèses du GAO n’est pas dispendieux.
Fig. 16 – Chiffres permettant de repérer les limites en hauteur des orthèses. 2 : région occipitomentonnière ; 3 : base du cou ou C7 ; 4 : épine de l’omoplate ; 5 : pointe de l’omoplate ; 6 : D10 ; 7 : fausses côtes ou L1 ; 9 : grands trochanters (niveau 1, sommet du crâne, et 8, ailes iliaques, non utilisés).
Conclusion Nous avons montré la diversité technique des orthèses cervicales et les différences de service médical rendu entre les appareils de série et ceux fabriqués sur mesure pour une personne donnée à un moment donné. Préconiser un appareil est une première étape parfois délicate, s’assurer de son efficacité et de la façon dont il est toléré fait partie également partie de la prescription d’orthèse cervicale.
Références 1. Deltour M (1972) Traité d’appareillage des handicapés physiques, Tome 1. In : Les Orthèses. Maury Imprimeur 2. Blondel-Clavel P, Biausser JP, Chaubet C (1989) Les Orthèses cervicales. J Am Med Assoc Suppl. mai: 27-9
148 Le rachis cervical vieillissant 3. Carta G (1992) Le collier orthopédique en plastazote dans le traitement des traumatismes de type « coup du lapin » Techn Orthop Int 37: 21-4 4. Bendaya S et al. (2001) Prise en charge du rachis opéré et non opéré in Le rachis traumatique : actualités. Paris, Springer : 84-131 5. Kauppi M, Neva MH Kautiainen H (1999) Headmaster collar restricts rheumatoid atlantoaxial subluxation. Spine 24: 525-8 6. Quinlain JF, Mullett H, Stapleton R (2006) The use of the Zebris motion analysis system for measuring cervical spine movements in vivo. Proc Inst Mech Eng 220: 889-96 7. Macé Y, Yahia M, Rannou F, Lefevre-Colau MM, Poiraudeau S, Revel M (2005) Tête tombante fixée : efficacité d’une rééducation intensive. Ann Readapt Med Phys 48: 207-11
Annexe 1 – Colliers cervicaux Nomenclature et tarifs 201F00 C1 Collier cervical pour soutien léger 201F01 C2 Collier cervical non réglable en hauteur pour soutien moyen 201F02 C3 Collier cervical réglable en hauteur pour soutien moyen 201F03 C4 Collier cervical dit « mini-minerve »
9,25 € 13,10 € 15,71 € 18,77 €
Annexe 2 : Minerves du grand appareillage orthopédique Codification du tronc (cf. fig. 16) Matériaux du grand appareillage orthopédique A : Acier C : Cuir et peaux D : Alliages légers G : Caoutchouc et polyisoprène K : Copolymère acrylonitrile méthacrylate de méthyle L : Acétate de cellulose N : Polyoléfine S : Stratifié de polyester T : Textiles (feutres, tissus) U : Textile enduit de mousse de polyuréthane V : Bandes plastiques d’immobilisation en fibre de verre et acétate de cellulose ➛➛➛
Orthèses cervicales : descriptions techniques, indications, nomenclature
Collier, Appareil léger limitant les mouvements du cou : TR 23 TR23C11 Cuir moulé, gaine prenant appui sur la base du cou et s’étendant aux régions mentonnière et occipitale TR23N35 Polyoléfine TR23G45 Polyisoprène TR23V49 Bandes plastiques d’immobilisation en fibre de verre et acétate de cellulose avec garnissage molleton, pour maintien léger ou déformations rhumatismales Minerve à base scapulaire : TR 24 TR24C11 Cuir moulé TR24K27 Copolymère acrylonitrile méthacrylate de méthyle TR24N35 Polyoléfine, sans armature TR24S42 Stratifiés de polyester TR24G45 Textile R 4 enduit de mousse de polyuréthane TR24V49 Bandes plastiques d’immobilisation en fibre de verre et acétate de cellulose avec garnissage molleton, pour maintien léger ou déformations rhumatismales
149
510,75 € 174,05 € 294,72 € 308,48 € 941,49 € 391,21 € 242,13 € 383,49 € 353,25 € 386,02 €
Minerve à base thoracique : TR 25 TR25C11 Cuir moulé 1 125,64 € TR25C12 Corselet minerve en cuir moulé constitué par une valve postérieure armée sur laquelle est fixé un montant portant à son extrémité supérieure une pièce occipitotemporale armée, et par une valve antérieure armée sur laquelle est fixé un montant amovible et réglable en hauteur portant la mentonnière, avec bandeau frontal élastique amovible, gainage des ferrures compris 1 252,87 € TR25K27 Le même en copolymère acrylonitrile méthacrylate de méthyle 488,30 TR25N35 Polyoléfine, sans armature 285,14 € TR25N36 Polyoléfine, avec armature 510,96 € TR25S42 Stratifiés de polyester 427,31 € TR25K50 Orthèse cervico-dorsale, pour traitement des cyphoses, maintenue par deux sangles passant au devant des épaules, par une sangle passant sous l’auvent costal et un mât postérieur permettant la mise en place d’un collier de rappel 277,36 € TR25U01 Textile R 2 enduit de mousse de polyuréthane 282,43 € ➛➛➛
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TR25V49 Bandes plastiques d’immobilisation en fibre de verre et acétate de cellulose avec garnissage molleton, pour maintien léger ou déformations rhumatismales
445,02 €
Corselet minerve : TR 27 TR27O12 Corselet minerve s’étendant des fausses côtes aux régions occipitale et mentonnière, réalisé dans un des matériaux prévus à la nomenclature, constitué par une valve postérieure armée sur laquelle est fixée une pièce occipito-temporale, et par une valve antérieure armée sur laquelle est fixé un montant amovible et réglable en hauteur portant la mentonnière. Appareil ne nécessitant pas de moulage : 574,73 € (exemple : la minerve garchoise isolée) TR39K50 + TR24K27 Corset garchois avec minerve TR29C11 Grand corset cuirasse en cuir et armature acier
Cervicalgies et acupuncture P. Sautreuil, A. Lassaux, P. Thoumie, M. Piquemal et P. Jeannin
Introduction Nous n’entreprenons pas une description des différentes formes d’acupuncture traditionnelle dans les cervicalgies (1). Nous montrons une utilisation, adaptée à la médecine physique, de cette branche de la médecine traditionnelle chinoise. L’aiguille, agent physique, conducteur électrique plongé dans des tissus chargés électriquement, et en particulier le muscle, crée un traumatisme minuscule mais profond qui modifie les Trigger points à l’origine d’une grande partie des tableaux douloureux cervicaux. Cette acupuncture qui traite les « brindilles et non pas les racines » est volontiers méprisée par les acupuncteurs traditionnels1. Or, elle soulage efficacement les patients dont les cervicalgies sont structurées (antécédents traumatiques, arthrose, etc.). Les « aiguilles sèches» apportent une solution supplémentaire, complémentaire aux autres traitements, médicamenteux et physiques.
Déroulement d’une première séance Après avoir écouté les doléances du patient, enregistré ses différents antécédents et évalué la mobilité dans les trois axes et recherché des douleurs provoquées par cette mobilisation, un des temps importants de l’examen est réalisé, patient en décubitus dorsal, tête posée au creux de la main gauche de l’examinateur, rachis cervical en légère délordose. Une respiration ample avec pauses expiratoires permet d’obtenir une détente musculaire optimale. Cette mise en condition, avec séquences de traction axiales douces, a pour but de lever des tensions-contractures musculaires superficielles ou profondes. Elles sont le point de départ d’une majeure partie des douleurs cervicales à projection céphalique, thoracique ou vers les épaules et les membres supérieurs. Dans un deuxième temps, leur puncture apporte un rapide et profond soulagement au patient. La pratique d’une acupuncture pragmatique met en évidence le rôle premier du muscle dans la genèse des douleurs locales ou projetés, et non pas une compréhension reposant principalement sur les bilans radiologiques. 1- L’efficacité de l’acupuncture est souvent remise en question et pose surtout la question des différentes modalités d’applications (2).
152 Le rachis cervical vieillissant
Points « Ashi-Trigger » versus réseau des « méridiens » Un médecin ignorant de l’acupuncture mais habitué aux injections loco dolenti peut facilement utiliser les aiguilles d’acupuncture dans les points Ashi ou Trigger tel que nous le pratiquons. Mais il est indiscutable que de connaître la cartographie des points d’acupuncture de la pluri-millénaire médecine chinoise aide beaucoup au repérage des points à puncturer. Nous n’utilisons que de façon accessoire les règles de la médecine traditionnelle, midi-minuit, point maître de méridien… Si elles ont un éventuel intérêt dans les pathologies infra-paracliniques, sans lésions décelables à l’échographie, à la radiographie, au scanner ou à l’IRM, elles sont dépassées devant des pathologies structurées et ne peuvent être utilisées qu’en méthode d’appoint.
Notions de points « Ashi » et de Trigger points Nous reprenons brièvement les éléments déjà développés pour la réunion sur le rachis lombaire (3).
Points « Ashi » Les Chinois savent pratiquer une acupuncture pragmatique orientée par l’interrogatoire et la description par le patient de ses trajets douloureux. Le terme « Ashi » se décompose en : A ( ), sous entendu « ah ! » ou « aïe », exprimant la douleur et « shi » verbe « être » ( ). On peut traduire « ashi » par « c’est là que j’ai mal ». L’acupuncteur place alors les aiguilles en fonction des points repérés par la palpation. Pour les acupuncteurs asiatiques, sa puncture se complète d’une pratique particulière, la recherche du de qi.
Syndromes myo-fasciaux et Trigger points Travell et Simons (4) ont marqué la médecine physique en reliant des tableaux de douleur des membres, de la tête et du rachis à des cordons musculaires indurés et douloureux à la palpation : les Trigger points. Ils ont également fait des propositions thérapeutiques innovantes. Pour eux, quelle que soit l’origine du Trigger point, il bénéficie d’un double traitement associant étirement vif et réfrigération de la peau en regard de la zone douloureuse. Cette combinaison a pour but de débloquer une chaîne de commande musculaire, responsable d’une contracture permanente d’un ou plusieurs faisceaux musculaires. En cas d’échec de cette technique, ces auteurs préconisent des infiltrations avec des anesthésiques de ces Trigger points musculaires. Les Trigger points se développent dans de nombreuses et banales situations comme les mouvements répétitifs, les contractures liées à un mouvement de défense lors d’une chute par exemple, ou pathologiques comme la sclérose en plaques ou l’hémiplégie (Trigger points spastiques). Nous avons tous des Trigger points mais jamais avant l’âge d’un an. Les travaux initiaux de Travell et Simons ont été prolongés de nombreux autres. Parmi les plus contemporains, signalons ceux de Hong Chang Zern et de Chou Li wei
Cervicalgies et acupuncture
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(fig. 1). Le premier travaille sur le versant histologique de l’évolution du Trigger point devenant chronique et se sclérosant (par déficit vasculaire en particulier) (5, 6). Le second a montré que le Trigger point présente un bruit de fond électrique (« end plate noise ») qui confirme l’insuffisance de détente du Trigger point musculaire (7). Les Trigger points sont un domaine commun à l’acupuncture et à la médecine physique comme l’a montré Imamura en développant la notion de « sensitization », un envahissement progressif d’un membre, d’une partie du corps avec comme point de départ des Trigger points dans un muscle (8). Au cours des dernières décennies, l’acupuncture est devenue scientifique (9). La douleur de l’appareil locomoteur est un de ses principaux domaines d’efficacité (10). L’approche « Trigger point » n’est pas incompatible avec les repères chinois classiques, une grande partie des points d’acupuncture étant superposables avec les points moteurs des muscles.
Fig. 1 – Au premier plan, Hong Chang Zern, au second plan Chou Liwei, le premier concentre ses recherches sur la structure histologique du Trigger point, le second sur les phénomènes électriques associés. Cliché pris lors de la première conférence de médecine physique et réadaptation Asie-Pacifique, Nankin, mai 2008.
154 Le rachis cervical vieillissant
Réseau des méridiens (fig. 2) Au niveau du cou, la ligne médiane antérieure est parcourue par le méridien ren mai (vaisseau conception, » ), la ligne médiane postérieure par du mai (vaisseau gouverneur, ). Latéralement, de devant en arrière, on a le méridien d’estomac (zu yang ming, ), de gros intestin (shou yang ming, ), de triple réchauffeur, (san jiao, ), de vésicule biliaire (zu shao yang, ), d’intestin grêle (shou tai yang, ), et enfin de vessie (zu tai yang, ). La région cervicale antérieure est relativement bien pourvue en points d’acupuncture, en particulier le sterno-cléido-mastoïdien encadré par les 17 et 18 du shou yang ming (gros intestin, tian ting et fu tu, et ) et les points d’intestin grêle (tian chuang et tian rong, et ). Alors qu’au niveau du rachis thoraco-lombo-sacré postérieur, les points d’acupuncture sont nombreux et augmentés des points hors méridiens « Huatojiaji », le rachis cervical postérieur est un désert selon les cartographies officielles. Il n’y a aucun point entre la barrière cervico-occipitale avec tian zhu ( , 10 vessie) un travers de doigt de la ligne médiane, feng chi ( , 20 vésicule biliaire) dans la fossette rétro-mastoïdienne, wan gu ( , 12 vésicule biliaire) en dessous de la mastoïde en haut et, en bas, la charnière cervico-thoracique da zhui ( , 14 vaisseau gouverneur) sous l’épineuse de C7 et jian jing ( , 21 vésicule biliaire) dans le muscle trapèze. Les Chinois contemporains ne s’embarrassent pas de cette « anomalie » et piquent une à deux
Fig. 2 – Une partie du réseau des méridiens et des points d’acupuncture du dos, réalisé à partir de deux schémas du Précis d’acupuncture chinoise (11).
2- L’acupuncture chinoise contemporaine est très « physique » : les aiguilles sont nombreuses et enfoncées profondément. Elles sont également stimulées électriquement de telle sorte que les muscles sont secoués rythmiquement. Ce n’est pas une médecine « douce ».
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dizaines d’aiguilles de façon systématique le long des lignes médianes et paramédianes, profondément les muscles cervicaux et les espaces inter-épineux2. À notre avis, une palpation minutieuse telle que décrite ci-dessus permet de réduire le nombre d’aiguilles à un niveau minimal de 3 à 6.
À la recherche du de qi La recherche du de qi ( , de, saisir, , qi, souffle ou énergie) est peu enseignée en France alors qu’elle est au cœur de la pratique en Chine, au Japon ou au Vietnam. Elle consiste à faire tourner entre les doigts l’aiguille d’acupuncture par un mouvement alternatif rapide (un quart de tour maximum, plus d’amplitude serait inutilement douloureux), accompagné ou non d’un mouvement de va-et-vient en profondeur (2 à 3 mm d’amplitude). Cette technique permet d’avoir le retour sensoriel du patient qui sent – quand la puncture est bien réalisée et la recherche du deqi efficace – monter une douleur de plus en plus vive. Quand il y a correspondance, en localisation et qualité, entre la douleur dont souffre le patient et qu’il décrit, celle provoquée par l’examen clinique et celle du travail de l’aiguille, l’efficacité du traitement est maximale.
Indications de l’acupuncture dans les cervicalgies Une grande partie des dysfonctionnements de l’appareil locomoteur peuvent bénéficier à un niveau ou un autre d’acupuncture, traitement isolé ou intégré à une prise en charge de médecine physique. On peut considérer l’acupuncture comme une physiothérapie, l’aiguille jouant le rôle d’un shunt électrique comme l’a démontré l’un d’entre nous à propos de l’acupuncture antalgique dans les névromes d’amputation (12, 13). L’approche « Ashi-Trigger points » est parfaitement adaptée à cette compréhension du rôle des « aiguilles sèches », nom que l’on donne parfois aux aiguilles d’acupuncture sans évoquer la médecine traditionnelle chinoise. En pratique, les principales pathologies reçues à la consultation sont les céphalées d’origine cervicale, les cervicalgies dans la cervicarthrose (sans ou avec névralgie cervico-brachiale, l’acupuncture étant plus efficace sur le versant neuropathique de la NCB que sur le versant inflammatoire), les myélopathies cervicarthrosiques. Le résultat n’est pas égal dans chaque pathologie, ni dans un groupe chez tous les patients (14). Cependant, la diversité clinique est une dimension à laquelle répond facilement l’acupuncture qui peut proposer un soin différent pour chaque patient. Voici quelques exemples qui illustrent l’intérêt de l’acupuncture dans les douleurs d’origine cervicale.
Observation n° 1 A.P., 70 ans, est victime de deux accidents de la route en 1983 et 1994. Après celui de 1994, il a présenté un torticolis. Première consultation en médecine physique en 1998 pour cervicalgies avec douleurs à la pression des épineuses du rachis cervical supérieur et de la jonction cervico-dorsale. Amélioré par Rivotril® et Feldène®. Première séance
156 Le rachis cervical vieillissant d’acupuncture quelques mois plus tard axée sur les douleurs cervicales (points de la barrière occipito-cervicale (10 vessie, 20 vésicule biliaire) et l’irradiation dans la fosse sous-épineuse gauche (point moteur du muscle sous-épineux, 11 intestin grêle, tian zong, ). Première séance peu efficace. Deuxième séance, disparition complète des douleurs pendant 5 jours. Consolidation du résultat cervical au cours des séances suivantes. Les douleurs cervicales ont plus complètement et rapidement répondu à ce soin que la douleur référée au niveau de l’omoplate gauche. Ultérieurement, apparition d’une douleur identique au niveau de l’omoplate droite, également traitée par acupuncture. Puis élargissement de la prise en charge en acupuncture d’autres parties du corps dont la région lombaire (figs. 3, 4 et 5).
Fig. 3 – Radiographie montrant une arthrose plurifocale, relativement banale pour l’âge.
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Fig. 4 – Séance récente d’acupuncture cervicale avec en plus deux aiguilles (sur 20 vaisseau gouverneur, bai hui, , qui a certainement un rôle dans le contrôle de la « sensitization » et 3 IG, houxi, à l’angle métacarpo-phalangien du Ve à droite (projection dans le métamère C7).
Fig. 5 – Schéma montrant les différents points d’acupuncture utilisés.
158 Le rachis cervical vieillissant
Commentaires Les antécédents d’accidents de la route contribuent certainement à accélérer un processus naturel d’évolution vers l’arthrose cervicale. L’acupuncture se révèle un traitement efficace de ces douleurs cervicales et de leurs irradiations.
Observation n° 2 G.A. a 56 ans. Piétonne, elle est renversée par un véhicule en 2002. Dès cette époque, un état douloureux permanent avec des paroxysmes s’installe malgré les traitements et motive plusieurs arrêts de travail. Les radiographies cervicales faites à alors sont négatives. En 2005, mise en évidence d’une cervicarthrose C5/C6, C6/C7. Le scanner montre au niveau des discopathies, une protrusion de disque et des ostéophytes paramédians (figs. 6, 7 et 8). La patiente réagit dès la première séance d’acupuncture (EVA 7,5 > 3,5/10) avec amélioration de la mobilité rachidienne. Les séances suivantes consolident le bon résultat initial avec une diminution nette des prises d’antalgiques au long cours, mais un fond douloureux minimal de 3/10 ne pourra pas être dépassé. À cette époque, le médecin conseil refuse de faire un lien entre l’accident de la voie publique et le développement de l’arthrose cervicale. Depuis septembre 2006, des douleurs lombaires sont venues se surajouter au tableau initial.
Fig. 6 – Le scanner de profil montre la discopathie C5-C6/C6-C7 et le risque pour la moelle, actuellement épargnée.
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Fig. 7 – Patiente assise, le front en appui sur les mains posée sur le lit d’examen levé au plus haut. Puncture des points choisis après palpation : 20 VB et 12 VB à la jonction occipito-cervicale, 21 VB au niveau des trapèzes et deux aiguilles locales au niveau des points douloureux médians en regard des épineuses C4 et C5.
Fig. 8 – Schéma indiquant les différents points d’acupuncture utilisés.
160 Le rachis cervical vieillissant
Commentaires La patiente est suivie maintenant depuis quatre années. L’efficacité fragile de l’acupuncture est associée à des séquences de kinésithérapie sans implication personnelle dans un travail d’entretien (passage à la retraite, prise de poids, vie seule, etc.). En fonction d’aléas comme un déménagement (manipulation inhabituelle prolongée d’objet lourds), d’un voyage (port d’une valise, conduite automobile), le rythme des séances varie.
Observation n° 3 B.N. est une jeune patiente de 33 ans présentant une myopathie atypique et qui est adressée à la consultation pour des douleurs dorsales gauches évoluant depuis plusieurs années. Elle a bénéficié d’une ostéosynthèse rachidienne de D2 à L3 à l’âge de 20 ans, retirée ultérieurement. Le bilan radiologique est sans particularité. La scintigraphie ne montre pas de zone d’hyperfixation au niveau thoracique moyen. Échec des traitements pharmacologiques, neurostimulation, anesthésie locale et infiltrations de corticoïdes. Au cours de l’examen, lors de la première séance, la patiente reconnaît à la pression d’un point du méridien externe gauche de vessie la douleur dont elle se plaint (45 V, yixi, ). Le Trigger point est minuscule, le feuillet musculaire comme du papier. Elle perçoit une « douleur qui fait du bien »3 : le maintien de la pression s’accompagne d’une légère diminution la douleur musculaire. La puncture de ce Trigger point très fin, difficile à palper, est délicate. Cette première séance est marquée par un malaise vagal. Elle est coutumière de ces malaises qui surviennent parfois quotidiennement. Lors de la deuxième séance, la puncture bénéfique du point dorsal isolé est renouvelée mais elle fait un nouveau malaise vagal. La troisième séance est raccourcie à 15 minutes et comprend le 10 V droit (à la base du crâne, à un travers de doigt de la ligne médiane. Cette puncture est très bénéfique. À partir de cette séance, la jeune patiente ne fait plus de malaise ni en consultation ni à domicile et connaît également une rémission des céphalées droites paramédianes qui avaient commencé peu de temps après la pose du matériel d’ostéosynthèse. Les séances d’acupuncture lui ont permis d’arrêter progressivement l’Acupan® et de ne garder que le Neurontin® et l’Ixprim® (figs. 9 et 10).
Commentaires L’efficacité de cette forme d’acupuncture dépend de la minutie de la recherche d’un Trigger point particulier dans le contexte de la myopathie. Le résultat de la puncture du 10 vessie droit est logique si l’on se réfère aux travaux de George Soulié de Morant qui, dès les années 1930, indiquait des points d’acupuncture pour le traitement de syndromes neuro-végétatifs.
3- Concept de shiatsu japonais : quand le patient perçoit à la palpation du masseur la douleur qu’il ressent spontanément, que celui-ci maintient la pression, la douleur diminue. Et la douleur est enfin localisée, ce qui met fin à une sourde inquiétude (15).
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Fig. 9 – Patiente myopathe. Une aiguille sur le point 45 vessie gauche traite une douleur résistant aux traitements occidentaux, une aiguille sur le point 10 vessie droit traite les malaises vagaux et les céphalées paramédianes droites.
Fig. 10 – Schéma indiquant les deux points utilisés.
162 Le rachis cervical vieillissant
Conclusion Les cervicalgies sont multiformes. Les examens radiologiques orientent plutôt vers une compréhension articulaire des mécanismes douloureux. C’est sous-évaluer l’importance du muscle, remarquable mais fragile structure visco-élastique, dans la constitution de tableaux algiques. Celui-ci et surtout ses Trigger points sont la cible de l’aiguille d’acupuncture. Cette technique, appliquée de façon pragmatique, élargit l’offre de soins et enrichit la palette de la médecine physique.
Références 1. George Soulié de Morant (1972) L’Acupuncture Chinoise. Paris, Maloine (1re éd. 1957) 2. White P, Lewith G, Prescott P, Conway J (2004) Acupuncture versus placebo for the treatment of chronic mechanical neck pain: a randomized, controlled trial. Ann Intern Med 141: 911-9 3. Sautreuil P, Cadoret A (2007) Rachialgie, acupuncture et médecine physique. La lomalgie en 2007: aspects pratiques, Paris, Springer-Verlag France 4. Travell J, Simons G (1983) Myofascial pain and dysfonction: the trigger point manual (vol. 1 & 2). Baltimore, Williams & Wilkins 5. Hong CZ (2008) New advance in myofascial syndrome First Asian Oceanian Conference of Physical and Rehabilitation Medicine, Nanjing, China, May 6. Hong CZ (2000) Specific sequential myofascial trigger point therapy in the treatment of patient with myofascial pain syndrom associated with reflex sympathetic dystrophy. Australas Chiropr Osteopathy 9: 7-11 7. Chou LW (2008) Electrophysiological effects of remote acupuncture on the endplate noise First Asian Oceanian Conference of Physical and Rehabilitation Medicine, Nanjing, China, May 8. Imamura M (2008) East meets west for the management of chronic musculoskeletal pain: an update on informed based rehabilition First Asian Oceanian Conference of Physical and Rehabilitation Medicine, Nanjing, China, May 9. Sautreuil P, Piquemal M (2002) Acupuncture expérimentale. Acupuncture & Moxibustion 1: 106-10 10. Ma YT, Ma M, Cho ZH (2005) Biomedical Acupuncture for Pain Management. SaintLouis, Missouri, Elsevier Churchill Livingston 11. Académie de Médecine Traditionnelle Chinoise (1977) Précis d’acupuncture chinoise, Pékin, 12. Piquemal P, Sautreuil P, Thoumie P, Bendaya S (2009) Amputation, névrome douloureux, de qi et évolution du signal électrique. Lettre de Médecine Physique Réadaptation 25: 5559. 13. Piquemal M (2005) Advance in Acupuncture with Bioelectricity. Ascuncion, Paraguay, Ed. Piquemal 14. Mann F (2000) Reinventing Acupuncture. A new concept of ancient médicine. Oxford, Blutterworth Heinemann 15. Kuroiwa KI, Katano T (2002) Point gâchette, massage et acupuncture au Japon Acupuncture & Moxibustion 1: 62-74
Problématique de l’expertise dans le cadre d’une atteinte traumatique du rachis cervical vieillissant J. Carzon et J.-C. Goussard
Introduction L’expertise du rachis vieillissant ne devrait a priori pas se différencier d’une expertise médicale habituelle. Pourtant, aux difficultés connues de l’expertise du rachis cervical se surajoute l’importance de l’état antérieur, connu ou non, avec les possibilités d’aggravation secondaire et l’obligation d’affirmer l’imputabilité. Le médecin expert est un auxiliaire du juge. Il est désigné pour le renseigner quant aux conséquences d’origine médicale d’un fait accidentel. Il n’est en aucun cas juge et doit seulement donner son avis, en des termes simples et compréhensibles pour tous, concernant les séquelles présentées dans les suites de l’accident. L’expert doit donc répondre de façon précise aux questions qui lui sont posées par le juge au travers de la mission qu’il lui confie. Le juge n’a, bien entendu, aucune obligation de suivre les conclusions de l’expert.
Évolution de la mission d’expertise La mission d’expertise évolue dans le temps et, depuis peu, la mission de certains tribunaux s’appuie sur les résultats du rapport Dintilhac. Aussi, nous profiterons de cette communication pour aborder les nouveautés dans les missions d’expertises suite aux travaux de cette mission, et pour nous familiariser avec la nouvelle nomenclature Dintilhac. Les termes d’ITT (incapacité temporaire totale) et d’IPP (incapacité permanente partielle) n’existeront plus dans quelques années et seront remplacés par le déficit fonctionnel temporaire et le déficit fonctionnel permanent. Le législateur a souhaité que les victimes soient mieux indemnisées et surtout puissent profiter des indemnités allouées. Jusqu’à présent, l’IPP et l’ITT entraient dans le cadre du préjudice patrimonial et les préjudices d’agrément, de souffrance et esthétique dans le cadre des préjudices extrapatrimoniaux. Les préjudices patrimoniaux sont ceux qui donnent lieu à une action récursoire des caisses de Sécurité sociale.
164 Le rachis cervical vieillissant Ceci signifie que les blessés, qui devaient recevoir le montant financier de leur IPP, pouvaient très bien ne rien toucher si leur état avait nécessité de fortes dépenses de santé : hospitalisation en réanimation, plusieurs interventions chirurgicales, séjour prolongé en centre de rééducation… La Sécurité sociale se remboursait en priorité sur le montant de l’indemnité permanente partielle versée au blessé. Depuis quelques années, les actions récursoires des caisses étaient plus fréquentes et même sur les petits taux, les plus nombreux. L’ITT est désormais remplacée par le déficit fonctionnel temporaire, elle est maintenant extrapatrimoniale. Elle concerne les gênes subies dans les activités personnelles pendant la période s’étendant du traumatisme à la date de consolidation. En cas d’évolution, les différentes périodes seront individualisées en déficit fonctionnel total (période d’hospitalisation) ou de déficit partiel : il faudra alors fixer le taux pour chaque période en fonction de l’évolution. L’IPP se transforme en déficit fonctionnel permanent et devient également extrapatrimoniale. Elle prend en compte l’atteinte de l’intégrité physique, à laquelle il faut ajouter les phénomènes douloureux, les éventuelles répercussions psychologiques et leur retentissement dans la vie de tous les jours.
Nouvelle distinction entre préjudice patrimonial et extrapatrimonial en fonction de la période avant et après consolidation Avant consolidation, sont pris en compte le déficit fonctionnel temporaire, le préjudice de souffrance ainsi que le préjudice esthétique provisoire qui sont des préjudices extrapatrimoniaux. Dans les préjudices patrimoniaux sont pris en compte les dépenses de santé, les aides temporaires, les pertes de gains professionnels jusqu’à la date de consolidation. Après consolidation, les préjudices patrimoniaux concernent les dépenses de santé futures, les frais de logement adapté, les frais de véhicules adaptés, la nécessité d’une tierce personne en précisant la fréquence et son caractère spécialisé ou non (cette évaluation fait abstraction de l’aide de l’entourage), de même que les pertes de gains professionnels et les incidences professionnelles (possibilité ou non de reprise, notion de reclassement ou de travail à temps partiel). Enfin, sont évalués les éventuels préjudices scolaires ou universitaires. Dans le cadre du préjudice extrapatrimonial, en dehors du déficit fonctionnel permanent, sont pris en compte le préjudice d’agrément, le préjudice esthétique permanent, le préjudice sexuel, le préjudice d’établissement. Nous constatons qu’une place plus grande est donnée à l’aide temporaire humaine et matérielle avant et après consolidation, ce qui devrait dans l’avenir augmenter les dépenses des sociétés d’assurances. Un exemple de ce type de mission Dintilhac est en annexe.
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Expertise dans le cadre du rachis cervical vieillissant D’une façon générale, l’expertise dans les suites d’un accident à l’origine d’un traumatisme du rachis cervical pose toujours des problèmes. En effet, le traumatisme va toucher un axe sacré, situé entre « le corps et l’esprit ». Il y a donc tout un cortège émotionnel qui peut expliquer une partie des symptômes que l’on retrouve fréquemment dans le syndrome dit subjectif post-commotionnel. Les douleurs évoluent souvent de façon chronique, à l’origine parfois d’arrêt d’activité professionnelle excessivement prolongé, ce d’autant que l’accident survient dans le cadre d’une pathologie professionnelle (AT). Il n’est pas rare non plus qu’il y ait dans les suites de ce type de traumatisme une recherche de bénéfices secondaires. L’examen d’expertise peut se heurter souvent soit à des plaintes purement subjectives, soit à des problèmes de majoration fonctionnelle, soit enfin à des personnes apportant des éléments ne permettant pas d’affirmer l’imputabilité de leurs doléances au fait accidentel. Dans les suites du traumatisme cervical, les conséquences peuvent être plus ou moins graves. Elles vont de la simple douleur sans limitation de mobilité à la tétraplégie en passant par la névralgie cervico-brachiale. Ce n’est pas dans le cas de complications graves comme la tétraplégie, où les troubles sont confirmés par des examens objectifs, que l’examen d’expertise sera le plus difficile. Chez le sujet âgé, tout va se compliquer, car aux différents éléments cités précédemment se surajoutent l’aggravation d’un état antérieur, connu ou non par le blessé. Cette notion de mise en évidence d’un état antérieur pose beaucoup plus de problèmes, sachant que les complications neurologiques peuvent être beaucoup plus fréquentes en cas d’accident grave. Le rachis cervical vieillissant, du fait des lésions arthrosiques, perd de sa mobilité. Généralement les mobilités sont réduites dans tous les axes et souvent il devient de moins en moins douloureux chronique. Le fait accidentel peut ainsi réveiller une symptomatologie douloureuse chronique. Le traumatisme, s’il est violent, risque d’avoir des conséquences plus fracturaires et neurologiques que ligamentaires. Des personnes âgées atteintes de canaux cervicaux secondairement rétrécis par l’arthrose peuvent avoir, en raison de leur peu d’activité, peu de gêne dans la vie courante et être peu algiques. Ils pourront donc décompenser une myélopathie cervicarthrosique. L’examen neurologique d’une cervicalgie vieillissante doit être précis dans la recherche des signes d’irritation pyramidale et de déficit sensitif et moteur. Après s’être assuré du lien de causalité entre les séquelles et le fait accidentel, l’expertise devra donc faire la part des choses entre l’état antérieur et l’état séquellaire et renseigner le juge sur les incidences de cet état antérieur.
Déroulement de l’expertise L’examen doit se faire dans un climat de confiance. L’expert doit expliquer à la victime le déroulement de l’expertise, le tribunal qui l’a désigné et rappelle brièvement les points importants de la mission, le rôle de chaque personne présente (les médecins des compa-
166 Le rachis cervical vieillissant gnies d’assurances, les avocats, les médecins conseils, etc.). Il doit bien expliquer son rôle et faire reconnaître son impartialité. Ceci prend d’autant plus d’importance que la personne expertisée est plus âgée. Les avocats participent aux débats et doivent transmettre les pièces aux parties pour respecter les règles du contradictoire. Cette transmission se fait généralement avant les opérations (ce qui malheureusement est rare en médecine). Les avocats n’assistant pas à l’examen clinique, l’expert fera un résumé oral des résultats de son examen.
Imputabilité L’imputabilité doit être directe, certaine et exclusive. La lecture du certificat médical initial est primordiale, comme dans toute expertise médicale. Dans les suites d’un accident, les douleurs localisées ou pouvant provenir du cou doivent être d’apparition soit immédiate, soit avec un intervalle libre assez court, de l’ordre maximum de la semaine. Dans le cas du rachis cervical vieillissant, la relation de causalité entre le fait accidentel et l’apparition de douleurs cervicales diminuera de façon proportionnelle avec le temps. Il convient d’insister ici sur l’importance des certificats médicaux. Il faut les rédiger par excès en notant toutes les plaintes et surtout en n’hésitant pas à rédiger des certificats rectificatifs dès le moment où des symptômes surviennent dans les jours qui suivent le traumatisme. En cas d’oubli, tous les certificats rédigés à distance perdent de leur valeur et le doute ne profitera pas au blessé.
État antérieur C’est le problème du rachis cervical vieillissant. Outre l’arthrose et l’ostéoporose, il faut rechercher des antécédents de maladie inflammatoire, des antécédents traumatiques à type de fracture, d’entorse, de névralgie cervico-brachiale, de séquelles neurologiques post-traumatiques. Il peut également exister des malformations, qu’elles soient acquises, post-traumatiques ou infectieuses. Que ce soit pour l’état antérieur ou pour l’imputabilité, l’interrogatoire est primordial. L’interrogatoire va noter si l’état antérieur est : – connu et traité ; – inconnu et uniquement révélé dans les suites de l’accident. Il faudra alors reprendre le mécanisme lésionnel, avoir une description précise du traumatisme, savoir si celui-ci est direct ou indirect. Dans le cas d’accident de voiture, rechercher l’existence d’un « coup de fouet » cervical. Après une chute, savoir si celle-ci se fait en avant ou en arrière ou s’il existe un choc direct sur le crâne. Il faudra ensuite connaître en détail les suites immédiates du fait accidentel : – notion de traumatisme crânien avec ou sans perte de connaissance ; – notion d’une impotence fonctionnelle complète ou non ; – transport ou non dans un service d’urgence nécessitant une hospitalisation ou permettant un retour à domicile.
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Dans le cadre des accidents de voiture, il faudra préciser si le blessé a pu sortir seul de son véhicule et au bout de combien de temps. S’il a dû être aidé, à partir de quel moment les douleurs sont apparues, leurs localisations et leurs éventuelles irradiations. En cas de polytraumatisme grave, le traumatisme du rachis cervical peut passer initialement inaperçu mais les services de secours immobilisent systématiquement l’axe rachidien des blessés. Il faudra ensuite prendre connaissance des résultats des premières explorations qu’elles soient radiologiques, par scanner ou IRM, et connaître de façon précise l’ensemble des thérapeutiques prescrites et leurs effets, dans l’ordre chronologique. Dans le cadre d’un rachis cervical, la notion d’une immobilisation relative est importante, témoignant de l’importance des douleurs cervicales. L’évolution de la pathologie sera par la suite étudiée. Elle peut se faire rapidement ou bien être excessivement longue. Il n’est pas rare d’être confronté à des périodes de prise en charge médicale particulièrement prolongées. L’expert doit donc prendre connaissance de l’ensemble des traitements suivis, de l’ensemble des explorations complémentaires effectuées : – réalisation d’un ou plusieurs électromyogrammes ; – plusieurs scanners, voire plusieurs IRM réalisées ; – prise en charge en consultation(s) spécialisée(s) ; – prise en charge en centre antidouleur, en centre de rééducation, durée de la prise en charge rééducative ; – notion d’examen spécialisé en ORL ou ophtalmologie pour syndromes vertigineux secondaires ou troubles visuels ; – retentissement psychologique, dépression post-traumatique ; – multiplication éventuelle des avis spécialisés. Cette étude de l’évolution va se faire jusqu’à la date de l’examen d’expertise. L’expert prendra connaissance de tous les certificats présentés dans l’ordre chronologique ainsi que des rapports des examens réalisés dans le cadre des expertises effectuées par les assureurs.
Doléances L’expert demandera à la victime de faire une énumération la plus détaillée possible de ses doléances. Celles-ci seront intégralement notées mais jamais commentées. Dans le cas d’un état antérieur connu, il va essayer de faire préciser les modifications des douleurs et des signes fonctionnels survenus depuis le fait accidentel, soit absence de douleurs avant l’accident, soit modification des symptômes existants avant l’accident. Il fera également préciser les activités sportives et de loisirs effectuées par la victime avant le fait accidentel et les possibilités de reprise totale ou partielle en précisant les différentes dates. Nous ne reviendrons pas sur les données de l’examen clinique du rachis cervical mais nous insisterons sur la nécessité d’un examen neurologique extrêmement minutieux. Il faudra en effet rechercher un éventuel déficit sensitif et/ou moteur, des troubles de la lignée pyramidale des membres supérieurs et ou des membres inférieurs, des éventuels troubles sphinctériens.
168 Le rachis cervical vieillissant L’examen clinique devra être très prudent pour ne pas réveiller des douleurs. (Les experts peuvent aussi être poursuivis.) L’examen la tête hors de table sera donc évité.
Consolidation C’est le moment à partir duquel le blessé ne va plus sentir de modification de son état, ni en amélioration ni en aggravation, malgré la poursuite de soins bien conduits. Les différents postes de préjudice ne peuvent être fixés qu’à partir de cette date de consolidation. Il faut expliquer la définition de la consolidation, car ce mot est mal compris et souvent contesté.
Difficultés de l’expertise En cas d’état antérieur, connu ou non, après un traumatisme ayant entraîné des complications neurologiques ou cervicales graves, les questions posées à l’expert sont difficiles. Ce dernier devra évaluer l’état antérieur du blessé, et déterminer par différence l’état post-traumatique. Le juge souhaite connaître, du fait de l’état antérieur, le taux d’invalidité avant l’accident et surtout, en dehors de tout fait accidentel, à quel moment les séquelles auraient pu survenir et quelle aurait pu être l’évolution spontanée de cet état. Il est souvent difficile à l’expert de répondre de façon certaine à cette question.
Évaluation des séquelles en cas d’état antérieur Comment évolue actuellement la doctrine devant un déficit grave survenant sur un état antérieur majeur ? Les tribunaux actuellement ont tendance à indemniser les victimes d’accidents en essayant de les remettre le plus près possible des conditions antérieures au fait accidentel. Cette notion d’état antérieur dans les pathologies graves semble donc prendre de moins en moins d’importance, dès le moment où il n’existait pas de signe de gravité avant le fait accidentel (état antérieur non connu et asymptomatique ou à l’origine d’une symptomatologie ne dépassant pas 5 % d’IPP). En prenant le cas d’une personne de 75 ans, présentant un canal cervical secondairement rétréci, victime d’un accident de la circulation et présentant une tétraparésie avec troubles sphinctériens, son état avait été évalué il y a environ 25 ans aux alentours de 25 %, du fait de l’importance de l’état antérieur, aggravé par le fait accidentel. On peut considérer qu’actuellement l’indemnisation dépasserait de beaucoup ce taux prenant en compte les déficits sensitivo-moteurs et les éventuels troubles sphinctériens associés.
Conclusion L’expertise du rachis cervical vieillissant se doit d’être très rigoureuse. L’expert doit affirmer l’imputabilité du fait accidentel aux lésions présentées. Son examen doit être prudent pour ne pas réveiller ou aggraver la pathologie présentée. La fixation des différents préjudices repose de plus en plus sur les missions Dintilhac, dont les nouveaux éléments doivent être connus pour permettre aux blessés de ne pas
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être secondairement lésés. Il est donc important que tous les médecins s’occupant de handicap connaissent ces évolutions, qu’ils soient ou non au cœur de l’expertise. Outre une réponse précise de l’évaluation des différents postes de préjudice, la question importante dans le cas présent est l’imputabilité des lésions et symptômes allégués au niveau du rachis cervical au fait accidentel qui nous occupe.
UN EXEMPLE DE MISSION DINTILHAC I - Préjudice temporaire (avant consolidation) A - Préjudices patrimoniaux a) Dépenses de santé actuelles Les experts décriront les soins médicaux et paramédicaux mis en œuvre jusqu’à la consolidation et qui sont imputables au dommage. b) Frais divers L’expert dira si le patient a dû avoir recours à une aide temporaire (humaines et matérielles) en précisant la nature et la durée. c) Pertes de gains professionnels actuels L’expert indiquera les périodes pendant lesquelles la victime a été (avant sa consolidation) dans l’incapacité d’exercer totalement ou partiellement une activité professionnelle (il donnera des précisions sur les arrêts de travail prescrits, quant à leur imputabilité à l’événement causal sans se prononcer sur l’aspect financier qui est du domaine indemnitaire et non de l’évaluation médico-légale). B - Préjudices extrapatrimoniaux a) Déficit fonctionnel temporaire L’expert décrira les gênes subies par le patient dans ses activités habituelles en tenant compte : – des séquelles concernant toutes les victimes dans leur sphère personnelle ; – des gênes directement imputables ; – de la période comprise entre la date de l’événement indésirable en cause (accident médical, affections iatrogènes, affection nosocomiale) et la date de consolidation ; – de leur caractère dégressif (gêne totale ou partielle) : décrire leur caractère dégressif par étape en fixant un taux pour chacune de ces étapes. b) Souffrances endurées L’expert décrira les souffrances physiques, psychiques ou morales endurées par la victime depuis la survenue de l’événement indésirable en cause à l’origine du dommage, jusqu’à la date de consolidation, et les évaluera sur une échelle de 1 à 7 degrés. ➛➛➛
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c) Préjudice esthétique temporaire L’expert décrira la nature et l’importance du dommage esthétique subies temporairement jusqu’à la date de consolidation et l’évaluera sur une échelle de 1 à 7 degrés. Fixer la date de consolidation. II - Préjudice permanent (après consolidation) A - Préjudices patrimoniaux a) Dépenses de santé futures L’expert se prononcera sur la nécessité de soins médicaux ou paramédicaux, d’appareillage ou de prothèses nécessaires après la consolidation. Il précisera s’il s’agit de soins occasionnels ou définitifs. b) Frais de logement adapté L’expert indiquera si des aménagements domotiques sont nécessaires pour pallier les gênes engendrées par l’inadaptation du logement. c) Frais de véhicules adaptés L’expert se prononcera sur la nécessité de recourir à un véhicule aménagé. Il précisera les éventuelles difficultés qu’éprouve le patient à se mouvoir en transport en commun. d) Assistance par tierce personne L’expert indiquera si la victime a besoin d’une tierce personne pour l’assister dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité et suppléer sa perte d’autonomie. Il précisera les modalités de l’aide ainsi nécessitée : fréquence de la durée d’intervention, qualification de la personne affectée à cette raideur (spécialisée ou non, aide-ménagère, aide-soignante, infirmière). Cette évaluation sera faite en faisant abstraction de l’aide éventuellement apportée par l’entourage du patient. e) Pertes de gains professionnelles futures et incidences professionnelles L’expert dira si, en raison de l’incapacité permanente dont la victime reste atteinte après sa consolidation, celle-ci subit ou va subir une modification de son activité professionnelle (l’expert discutera l’imputabilité de cette situation à l’événement causal). Il précisera la nature du retentissement professionnel : – reclassement ou changement de poste ; – perte de l’emploi ; – nécessité d’un emploi partiel. f) Préjudice scolaire ou universitaire L’expert dira si, en raison de lésions consécutives à l’événement indésirable en cause, la victime a subi une perte dans ses études scolaires et universitaires, en précisant, le cas échéant, si celle-ci a dû se réorienter ou renoncer à certaines ou toutes les formations du fait de son handicap. ➛➛➛
Problématique de l’expertise dans le cadre d’une atteinte traumatique…
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B - Préjudices extrapatrimoniaux a) Déficit fonctionnel permanent Correspond à la réduction définitive du potentiel physique, psycho-sensoriel et/ou intellectuel résultant de l’atteinte à l’intégrité physiologique médicalement détectable, à laquelle s’ajoutent les phénomènes douloureux, les répercussions psychologiques ainsi que les conséquences liées à cette atteinte dans la vie de tous les jours. En pratique, l’évaluation se confond avec celle de l’IPP et son taux doit être évalué, après description, par référence au barème. b) Préjudices d’agrément L’expert donne un avis motivé sur l’impossibilité définitive de continuer la pratique d’une activité spécifique sportive ou de loisirs régulièrement exercée antérieurement. c) Préjudice esthétique permanent L’expert décrira la nature et l’importance du préjudice esthétique subi de façon définitive après la consolidation de l’état de la victime et l’évaluera sur une échelle de un à 7 degrés. d) Préjudice sexuel L’expert indiquera s’il existe un retentissement pouvant être considéré comme un préjudice sexuel. e) Préjudice d’établissement L’expert rapportera tout élément permettant de déterminer si, du fait de la gravité du handicap résultant de l’événement indésirable en cause, la victime a perdu l’espoir ou la chance de réaliser un projet de vie familiale normale.
Approche posturologique des cervicalgies rebelles R. Maaouia, F.-Z. Ben Salah, C. Dziri, N. Messedi et M. Zahar
Introduction La posture est le maintien de la configuration des différents segments du corps dans l’espace. Parmi la grande quantité d’organes et de fonctions auxquels le sujet se réfère pour élaborer automatiquement sa posture et se positionner dans l’espace, le rachis cervical joue un rôle déterminant, de par ses qualités proprioceptives de premier ordre, mais aussi de par ses relations avec la vision et le vestibule (1, 2). L’objectif de cette étude est d’approcher le rachis cervical en tant qu’un des composants du système postural global formé par tout le rachis, la ceinture pelvienne, l’entrée plantaire et les fonctions essentielles représentées par la vision et le système vestibulaire. (3, 4)
Matériel et méthode Depuis 2002, le service de médecine physique réadaptation fonctionnelle a mis en place une consultation multidisciplinaire de posturologie composée de médecins de médecine physique et réadaptation fonctionnelle, rhumatologues, chirurgiens orthopédiques et orthodontistes. Les malades présentant des rachialgies chroniques, rebelles, vus lors de cette consultation, sont soumis à un examen clinique « classique » et à une évaluation posturologique spécifique (flèche de profil, signe des pouces, signe de Barré et Fukuda) ; examen podoscopique et, selon les indications, examens complémentaires tels que des radiographies de face et profil du rachis cervical, du rachis entier et au besoin des panoramiques dentaires.
Résultats Sur 97 patients vus en consultation de posturologie entre novembre 2005 et février 2009, nous avons colligé 22 patients ayant consulté pour cervicalgies, 17 femmes et 5 hommes, d’âge moyen de 35 ans (15 à 54 ans).
174 Le rachis cervical vieillissant Les signes fonctionnels se présentent comme suit : – cervicalgies : 22 ; – cervicalgies + dorsalgies : 4 ; – cervicalgies + lombalgies : 5 ; – cervicalgies + dorsalgies + lombalgies : 3 ; – cervicalgies + dorsalgies + lombalgies + gonalgies : 1 ; – cervicalgies + névralgies cervicobrachiales (NCB) : 2 ; – cervicalgies + NCB+ lombalgies : 3 ; – cervicalgies + lombalgies+ céphalées : 1 ; – cervicalgies + torticolis : 1. À l’examen, on observe les troubles suivants : – asymétrie des plis : 2 ; – déséquilibre des épaules : 9 ; – enroulement épaules : 1 ; – hyperlordose lombaire : 6 ; – cyphose dorsale : 1 ; – scoliose dorsolombaire : 5 ; – inégalité MI : 5 ; – troubles stomatologiques : 8 ; – port lunettes : 3 ; – strabisme : 2. À l’examen podoscopique, il existe les troubles suivants : – hyperappui : 2 ; – pieds creux : 4 ; – pieds plats : 2 ; – valgus de l’arrière-pied : 1 ; – varus de l’AP : 2. Les radiographies objectivent les troubles suivants : – scoliose DL : 6 ; – uncarthrose étagée : 1 ; – bloc C2C3 : 2 ; – discopathie asymétrique L4 L5 : 1 ; – CLE : 1; – lombalisation S1+ spina S1 : 1. Le traitement a consisté en : – médicaments : 22 ; – mésothérapie : 4 ; – rééducation : 12 ; – manipulation : 1 ; – prise en charge (PEC) stomatologique : 10 ; – PEC ophtalmologique : 3 ; – appareillage : 7. On a observé une amélioration fonctionnelle objective.
Approche posturologique des cervicalgies rebelles
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Conclusion L’approche posturologique semble une alternative intéressante dans les cervicalgies communes rebelles.
Références 1. Gagey JM, Weber B (1999) Posturologie. Régulation et dérèglement de la station debout. Masson (2e édition). 2. Poiraudeau S, Revel M (1998) Couplage oculocervical et cervicalgie chronique: incidence sur le sens de position céphalique. Ann de Réad et de Méd Phys, vol 41 n°5 3. Gagey JM (1990) Les asymétries de tonus, de posture. Kinésithérapie scientifique, n° 294, p.5-9 4. Hérisson C, Simon L (2001) Pied et posturologie. Actualités et perspectives, Sauramps Médical.