Déployer un projet Web 2.0
Éditions d’Organisation Groupe Eyrolles 61, bd Saint-Germain 75240 Paris Cedex 05
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Déployer un projet Web 2.0
Éditions d’Organisation Groupe Eyrolles 61, bd Saint-Germain 75240 Paris Cedex 05
www.editions-organisation.com www.editions-eyrolles.com
Du même auteur chez le même éditeur : Jean-Louis Lequeux, Manager avec les ERP, 3e éd., 2008. Jean-Louis Lequeux et Mélissa Saadoun, Quel Business Model pour mon entreprise ?, 2008.
Le code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992 interdit en effet expressément la photocopie à usage collectif sans autorisation des ayants droit. Or, cette pratique s’est généralisée notamment dans l’enseignement, provoquant une baisse brutale des achats de livres, au point que la possibilité même pour les auteurs de créer des œuvres nouvelles et de les faire éditer correctement est aujourd’hui menacée. En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage, sur quelque support que ce soit, sans autorisation de l’Éditeur ou du Centre Français d’Exploitation du Droit de copie, 20, rue des Grands Augustins, 75006 Paris.
© Groupe Eyrolles, 2009 ISBN : 978-2-212-54211-0
Gabriel Képéklian et Jean-Louis Lequeux
Déployer un projet Web 2.0 Anticiper le Web sémantique (Web 3.0)
Support de l’ouvrage sur les blogs des auteurs : http://www.kepeklian.com/blog http://www.weltram.eu/iweb.aspx
Cet ouvrage est dédié À mon cher Papa, Je ne compte plus nos discussions sur ces technologies que tu dis si merveilleuses parce qu’elles nous permettent de nous écrire facilement. Pour tes petits-fils, tu sais combien il va de soi que cela marche ! Gabriel Képéklian
À ma Mère, Que cet ouvrage te soit dédié, Maman, toi qui t’es toujours préoccupée de moi, surtout dans les moments où j’étais si loin de vous deux, séparé par la distance, mais pas par la pensée. Jean-Louis Lequeux
SOMMAIRE Préface Avant-propos CHAPITRE 1
TISSER
1 5 SON
WEB
Le premier Web
8
Le Web profond
10
Plonger dans le Web profond Exploiter le Web profond
Le Web social Adopter le Web social dans l’entreprise Introduire des composants sociaux Augmenter la popularité sociale de votre entreprise Distinguer entre communauté et entreprise
Le Web 2.0 Gérer les identités numériques Gérer les traces numériques Suivre les usages Favoriser les usages Développer de nouveaux usages Développer autrement le Web Passer à l’entreprise 2.0 Engager le projet Web 2.0 en entreprise
Après le Web 2.0
© Groupe Eyrolles
7
Distinguer une suite au Web 2.0 Rechercher autrement Puiser à de nouvelles sources d’information Développer des ontologies Glaner ce qui peut l’être Passer à la troisième dimension Donner du sens
10 12
14 15 16 18 19
21 22 23 24 25 26 27 27 30
31 31 31 33 33 33 34 34
VI
DES
CLÉS POUR LE
WEB 2.0
35
Comprendre le Web 2.0
36
Quelques exemples représentatifs Le point commun
36 51
Fonder le Web 2.0
53
Participer, partager Faire primer l’usage Relier, interfacer Ouvrir les données Gagner en performance Les classiques Développer autrement
53 55 56 58 59 59 60
Situer le Web 2.0
62
Dans l’entreprise À la direction informatique La communication 2.0 Le modèle économique Les limites du Web 2.0
CHAPITRE 3
TECHNOLOGIES WEB
62 64 64 66 70 POUR LES NULS
2.0
77
Les grandes mutations du Web
77
Les limites du HTML
78
Accroître l’interactivité
79
Étape 1 : interaction entre les pages Web et le système d’information Étape 2 : des Web services pour une architecture orientée services (SOA) Étape 3 : des utilisateurs actifs
CHAPITRE 4
LE WEB 2.0
EN ENTREPRISE
79 80 82
91
Les composants 2.0
91
L’ergonomie 2.0
92
Exemples Objectifs Nouveaux mécanismes Conseils
Les composants technologiques Démarche Suite collaborative
92 94 95 97
100 100 104
© Groupe Eyrolles
CHAPITRE 2
Sommaire
Wiki Blog Mashup Flux RIA Réseaux sociaux Tags et folksonomie SaaS, infrastructure et Web 2.0
109 115 121 128 139 146 155 161
Le projet Web 2.0
168
Pilotage par les usages Aspects organisationnels Aspects architecturaux Risques et facteurs de succès
CHAPITRE 5
ENTREPRENDRE
AVEC LE
169 172 176 177
WEB 3.0
OU
WEB
SÉMANTIQUE
Après le Web 2.0 Quelle dénomination ? Évolution des états de la page Web Le grand challenge du Web 3.0 : de la donnée à l’intelligence Niveaux des grands sites Internet actuels
Le transport de la connaissance par le Web Intelligibilité de l’information et connaissance Transmettre la connaissance De l’information à la connaissance De la connaissance à l’intelligence
Les structures du Web 3.0 sémantique L’infrastructure La suprastructure
181 181 181 182 184 185
186 186 188 192 194
195 195 198
Maturation nécessaire des usages
203
Intelligence et management de la connaissance
205
Le BI 3.0 Impact sur les business rules management Le KM 3.0 La valeur
Web 3.0, Intelligence 2.0 © Groupe Eyrolles
VII
Comment fonctionne l’intelligence ? Intelligence articielle et robotisation de l’intelligence Connaissance ou intelligence collective ? Des experts parmi le peuple ! Limites et dangers de l’intelligence collective
205 206 206 207
207 207 208 208 210 210
VIII
Web 3.0 = Web 3D 3D pour la simulation Web 3D temps réel
Virtualisation du monde réel Espaces réels Web 3.0 : retour vers le futur Web 3.0 : usages du passé pour le futur
La créativité, mode 3.0 Créatif, analyste et développeur Créatifs, fonctionnels et développeurs Auteur, contenu et audience
Le Web, réplique de l’univers Le Web est le système d’information Le Web 3.0, miroir du monde Le Web, outil… surtout de recherche
Instiller le Web 3.0 sémantique dans un projet Web 2.0 Les déclencheurs Les approches possibles Les postes du chantier Web 3.0 sémantique Généraliser un zeste de Web 3.0 aux autres projets
Le Web du futur et le futur du Web Projeter le Web futur Au-delà du Web 3.0 : « webbionique » et homme bionique Les domaines bénéficiaires du Web du futur Les grandes puissances du Web du futur L’i-Web
Postface Sigles Glossaire Copyrights Bibliographie Index
211
212 212 213
214 214 214 215
216 216 218 218
220 220 221 221
222 223 223 225 228
228 228 229 232 233 234
235 239 241 244 245 247
© Groupe Eyrolles
La publicisation généralisée
PRÉFACE
Le Web 2.0 et ses paillettes semblent souvent très éloigné du monde plus austère et sérieux de l'entreprise et si vous dirigez une entreprise de production de lacets, vous pouvez vous demander en quoi Amazon, Google, Facebook ou Wikipédia vous concernent dans votre travail quotidien. Je pense au contraire que les entreprises ne peuvent plus se permettre d'ignorer le Web 2.0 et ce, pour trois bonnes raisons.
© Groupe Eyrolles
Le Web 2.0 est avant tout un Web participatif dans lequel les contenus sont créés par les utilisateurs. La facilité apparente avec laquelle il réussit à obtenir la participation de chacun est d'autant plus troublante que bien des entreprises peinent à faire utiliser les systèmes collaboratifs. Le partage des connaissances est pourtant un enjeu capital. Que diriez-vous d'un petit Wikipédia interne à votre entreprise ? Ne serait-ce pas fantastique si les personnes avec qui vous travaillez prenaient autant de soin à mettre à jour leur état actuel et les liens qu'elles ont dans l'entreprise qu'elles le font sur Facebook ? Ou qu'elles partagent leurs bookmarks comme elles le font sur del.icio.us ou Netvibes ? La première bonne raison pour laquelle votre entreprise doit d'intéresser au Web 2.0 est que des applications similaires aux « killer apps » du Web 2.0 sont disponibles et peuvent être déployées chez vous. Il serait pourtant illusoire de penser qu'il suffit d'installer le logiciel MediaWiki, qui propulse Wikipédia, pour qu'une base de connaissances jaillisse spontanément. Il y a beaucoup d'enseignements à tirer de la manière dont les « success stories » du Web 2.0 sont organisées, notamment en termes de cycle de développement centré sur les utilisateurs, d'optimisation de l'interface utilisateur et de marketing viral.
2 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
Les enseignements à tirer de ces expériences débordent du champ des méthodes de gestion de projet ou de la relation avec les utilisateurs et couvrent également celui de l'architecture informatique. Il y a quelques années, nous avions coutume d'opposer le monde de l'informatique d'entreprise et ses contraintes en termes de montée en charge, de robustesse et de sécurité à celui de l'informatique plus « grand public » du Web. Les contraintes de l'informatique d'entreprise justifiaient des méthodes de développement lourdes, des architectures matérielles spécifiques et l'utilisation de logiciels propriétaires aux licences d'utilisation coûteuses supportées à grands frais par leurs éditeurs. Moins critique, l'informatique Web utilisait au contraire des méthodes de développement plus agiles et des logiciels open source tournant souvent sur des serveurs ou même des PC plus bas de gamme. Ces différences persistent aujourd'hui au niveau des méthodes et des architectures utilisées par ces deux segments de l'informatique et c'est d'autant plus paradoxal que la hiérarchie des contraintes et des performances s'est inversée entre informatique d'entreprise et informatique Web. Le nombre d'utilisateurs des grandes applications Web est supérieur de plusieurs ordres de grandeur à celui des applications d'entreprise et la fiabilité des applications Web dépasse souvent celle des applications d'entreprise. Qui de nous n'a pas tendance à charger la page d'accueil de Google pour tester sa connexion à Internet, admettant implicitement que la probabilité de son indisponibilité est tout simplement négligeable ? Performances et fiabilité sont des questions de vie ou de mort pour les grandes applications Web soumises à une concurrence implacable, plus encore que pour les applications d'entreprise.
La deuxième bonne raison de vous intéresser au Web 2.0 est que l'utilisation des méthodes et des architectures techniques de ce dernier sur vos projets informatiques, y compris et surtout sur vos projets stratégiques et internes, vous permettra d'augmenter le
© Groupe Eyrolles
Nous sommes dans une situation similaire à celle que nous connaîtrions si nous appliquions des méthodes plus lourdes pour fabriquer des bicyclettes que pour produire des avions ! Malgré l'intérêt que peuvent avoir certains acteurs à préserver la situation actuelle, la pression économique fera tôt ou tard voler en éclat cette distinction entre informatique d'entreprise et informatique Web.
Préface
3
rapport entre les performances et la fiabilité de vos systèmes et leur coût. Une autre caractéristique du Web 2.0 est l'utilisation du Web comme d'une plate-forme. Si le Web s’est mué en plate-forme, cela signifie qu'il est devenu possible de créer des systèmes d'information en utilisant des composants disponibles sur le Web. Cela permet en outre l'émergence de nouvelles formes d'externalisation représentées par tous les acronymes et « aaS » (as a Service) qui fleurissent aujourd'hui. Conscients du fossé technologique qui s'est creusé entre l'informatique d'entreprise et celle du Web, de grands acteurs du Web 2.0 y ont vu une opportunité de diversification et proposent de louer leurs infrastructures et leur savoir-faire sous forme de services. C'est le cas notamment de Google et d’Amazon, qui proposent de l'espace de stockage (Amazon S3), de la puissance de calcul (Amazon EC2), une infrastructure Web (Google App Engine) ou des applications (Google Docs). Dans tous les cas, l'offre est tentante : il serait présomptueux de penser concurrencer le savoir-faire d'Amazon en termes de stockage et de puissance de calcul ou Google en matière de déploiement d'applications. Et pour peu que les tarifs soient compétitifs, un raisonnement purement économique sera fatalement favorable à de telles offres qui permettent des économies d'échelles substantielles. À côté de ces offres généralistes, on voit également se développer des offres métier telles que celle de salesforce.com dans le domaine de la gestion de la relation client.
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Les services informatiques ont déjà traversé plusieurs phases d'externalisation et le mouvement entamé par le Web 2.0 peut être vu comme une nouvelle étape dans l'industrialisation de l'informatique aboutissant à une externalisation complète ou partielle de l'informatique auprès d'un nombre réduit de grands fournisseurs. La troisième bonne raison de vous intéresser au Web 2.0 est de comprendre et d'être capable d'anticiper l'informatique de demain ! La meilleure manière de vous frotter au Web 2.0 est indéniablement d'expérimenter et de lancer un projet Web 2.0. Si c'est là votre souhait, ce livre de Gabriel Képéklian et Jean-Louis Lequeux est fait pour vous. Vous y trouverez à la fois une introduction permettant
4 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
de mieux comprendre le Web 2.0 et des conseils illustrés par des exemples. Enfin, le Web 2.0 n'étant pas un aboutissement en luimême, mais une étape dans l'évolution du Web, un des chapitres enchaîne sur la présentation du Web sémantique, que beaucoup voient comme la prochaine évolution majeure du Web sous le terme « Web 3.0 ».
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Éric van der Vlist, co-fondateur de Dyomeda
AVANT-PROPOS
Ce livre, destiné aux acteurs de l’entreprise comme à leurs consultants, est conçu avec le dessein de leur permettre une prise de recul lors des choix organisationnels, fonctionnels ou techniques. En rappelant les fondements de l’Internet ainsi que son évolution actuelle vers le Web 2.0, le lecteur prend conscience que c’est un nouveau continent qui s’ouvre à ses utilisateurs. Il ne s’agit pas d’un changement radical de technologies ou de l’irruption de nouvelles applications dans le paysage de l’entreprise. L’émergence du Web 2.0 y relève avant tout des usages et des bonnes pratiques qui évoluent soit à l’intérieur pour les collaborateurs, soit à l’extérieur pour toutes les parties prenantes de l’entreprise, clients, prospects, partenaires, fournisseurs, administrations.
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L’habitude avait été prise de tout faire tourner autour des projets, de les spécifier, de décrire leur cycle de vie. Le projet était devenu l’objet de toutes les attentions. Aujourd’hui, ce sont les utilisateurs qui sont placés au centre des préoccupations. Leurs usages sont devenus un sujet d’étude et le motif de développements nouveaux. Il faut les écouter, les comprendre, les rencontrer pour leur apporter des réponses concrètes alliant confort, simplicité et sécurité. Les usages attendus sont source de progrès. Quant aux usages inattendus, souvent les plus intéressants, ils ont acquis des lettres de noblesse et ne sont plus rejetés aux calendes grecques, car ils suggèrent des pistes prometteuses pour l’innovation. La dimension sociale du Web 2.0 est le moteur de son succès. Il n’y a pas d’innovation sans valeur ni de valeur sans usages. Quant à ces derniers, ils n’existent qu’en raison de la qualité des réalisations et du nombre des utilisateurs.
6 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
Écrit par des praticiens, ce livre s’adresse à d’autres praticiens. Il est rédigé dans une perspective de partage de connaissances comme de convictions. Ses objectifs sont les suivants : • Apporter des clés de compréhension sur le mouvement, voire la mutation que connaît Internet, un véritable changement de fond que le tapage marketing pourrait faire prendre pour du vent. • Faire un tour d’horizon pour mieux comprendre le fonctionnement des nouveaux outils et services d’Internet en prenant soin d’observer les importantes ressources sous-jacentes. • Parvenir à une maîtrise de l’utilisation d’Internet et non de ses technologies afin de toujours mieux situer les réels enjeux pour l’entreprise. • Prendre conscience du décalage qui se creuse entre l’informatique des entreprises à la mode 1.0, celle des sites statiques où l’accès à l’information était central, et les usages permis par un Internet 2.0, un Web qui devient lui-même plate-forme, lieu d’ubiquité et d’interactions. • Et puisqu’il faut, non pas suivre, mais être dans le mouvement, par où faut-il commencer ? Comment négocier l’adoption du Web 2.0 ? • Faire plus qu’entrevoir les évolutions du Web 2.0 en cours en les décrivant et en les analysant. • Puisque le propre du mouvement est de continuer, annoncer le Web 3.0, qui se dessine peu à peu, et le définir.
© Groupe Eyrolles
Ce livre est destiné à donner des conseils pragmatiques qui touchent à l’organisation, aux techniques et la méthodologie. Il s’appuie sur des exemples concrets et sur des cas. Il permet au lecteur de se préparer à mettre immédiatement en application ce qu’il lit, de mettre en chantier des projets Web 2.0.
Chapitre 1
Tisser son Web
Les dénominations Web 2 ou Web 2.0 ne font pas référence à un numéro de version, contrairement à ce que ce que l’on pourrait penser. Le Web est multiple et c’est donc très librement que nous désignons aujourd’hui par Web 1 ou Web 1.0 les premiers pas de l’Internet, comme pour marquer l’antériorité de l’un par rapport à l’autre. Il existe encore bien d’autres appellations, chacune rendant compte de particularités remarquables. Parmi ces dénominations, nous en avons retenu trois, celles qui se rencontrent régulièrement : le Web profond, le Web social et le Web sémantique. Mais il existe déjà un nouveau numéro : on commence en effet à entendre parler du Web 3.0.
© Groupe Eyrolles
Dans les paragraphes qui suivent, nous abordons ces différents Webs. Cela permet de les situer les uns par rapport aux autres et de placer le ou les sites de l’entreprise dans cette toile, qui se complexifie toujours plus. Nous en profiterons pour énoncer un certain nombre de conseils pour évoluer vers ces Webs. Peut-être qu’in fine, après avoir appris à naviguer avec le premier Web, pourrait-on être en mesure de tisser sa propre toile ? En effet, ce n’est pas tant le Web qui change que les usages que nous en faisons au quotidien. Lorsqu’en 1877, Antoine Bréguet présente à l'Académie Française un appareil téléphonique inventé dans les ateliers d’Alexander Graham Bell, la question de l’interconnexion n’est pas encore résolue. Plus de dix ans après, Clément Ader propose aux premiers abonnés du téléphone d’écouter des pièces
8 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
de théâtre à domicile. En 1900, on compte 23 000 abonnés au téléphone alors que le « théâtrophone » disparaît en 1932 avec trois cents abonnés. Cette petite histoire de l’innovation montre une certaine analogie avec les débuts du Web. Notre usage contemporain du téléphone n’est pas lié à l’appareil lui-même, mais à ce qui en est fait, à son appropriation. Le théâtrophone était un téléphone 1.0 dont l’abonné pouvait choisir la pièce qu’il voulait écouter. Le téléphone que nous connaissons est un téléphone 2.0 dont les usages sont la mise en relation, la conversation. Il est devenu le paradigme de l’objet social.
LE PREMIER WEB Le premier site1 ouvre en 1991 dans l’indifférence la plus totale. Cela se passe au CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire), à Genève, dans un laboratoire de ce grand centre de recherche. Si les premières possibilités de la technologie sont encore immatures, un Web historique se dessine pourtant rapidement. Pour en savoir plus, il existe de très nombreux livres et sites narrant l’histoire de ces débuts qui nous semblent parfois si lointains.
Souvent qualifié par la suite de Web des consommateurs, le Web des commencements ne correspond qu’en partie à ce que son créateur, l’Anglais Tim Berners-Lee, souhaitait mettre au point. Il désirait réaliser un moyen simple et efficace de communiquer par ordinateur à l'échelle mondiale. Mais il était plus facile de mettre au point des navigateurs Internet que des serveurs et des outils de création et de gestion de site. Les usages privilégiés s’orientaient alors naturellement vers le modèle de navigation. 1. http://Info.cern.ch/ est l’adresse du premier site Internet.
© Groupe Eyrolles
Dans ces premières années, les internautes pouvaient trouver et lire des informations mises en ligne par un très petit nombre de spécialistes qui maîtrisaient une technique tout juste sortie des laboratoires. Par exemple, deux étudiants de l’université américaine de Stanford créent l’annuaire internet Yahoo! en 1994.
Tisser son Web
9
À l’époque des pionniers, un bon site pouvait se contenter de présenter des informations de façon structurée et proposer une navigation bâtie sur des menus, des mots et des images porteurs de liens. Le développement d’un site se faisait souvent « à la main », avec un éditeur de textes. Il était difficile de concevoir des applications complexes puisqu’aucun outil n’intégrait l’ensemble des technologies nécessaires. Si les pages du site, la partie visible, pouvaient être réalisées en HTML avec un minimum de compétences, il n’en était pas de même pour ajouter un peu d’intelligence. Il fallait développer des scripts ésotériques sous Unix et le recours à une base de données était rare. Mais très vite, c’est l’engouement et l’offre technologique se démultiplie. L’épisode qui suit est bien connu, il se conclut par l’explosion de la bulle Internet. En 2001, le Web souffle ses dix bougies. Il a une dimension internationale et le nombre de sites dépasse les trente millions. Le moteur de recherche Google indexe déjà dix fois plus d’images et cent fois plus de pages HTML. Après des années euphoriques, la croissance marque le pas, comme le montrent les chiffres de la fréquentation des sites Web publiés par Xiti1, une société spécialisée dans la mesure d’audience.
Évolution de la fréquentation des sites webs 35 29,2
30 25,2
Pourcentage
25 20 15
16,8 12,1 8,2
10
6,3
5
5 0 2002
2003
2004
2005
2006
2007
© Groupe Eyrolles
Année, en janvier
Figure 1 : Croissance de la fréquentation du Web 1. http://www.xiti.com/
2008
10 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
Les données dont nous disposons ne distinguent pas celles qui proviennent de sites du premier Web des autres. Il n’est donc pas possible de savoir si cette baisse de croissance de la fréquentation concerne un type de Web plutôt qu’un autre. Gageons qu’il s’agit d’un indice de maturité. Les mesures d’audience s’adaptent elles aussi, et il est de plus en plus régulièrement question de mesurer les usages plutôt que la seule fréquentation. Nous sommes tous plus intéressés par le comportement des utilisateurs que par les mesures de fréquentation.
LE WEB PROFOND Alors que le Web se déploie, qu’il semble envahir notre société, chacun s’aperçoit alors qu’il est de moins en moins aisé de s’y retrouver. Aux annuaires de sites tels que Yahoo! ou Dmoz succèdent les moteurs de recherche. Malgré leur puissance, ces machines à digérer le Web, comme l’incontournable Google, n’accèdent plus à tous les nouveaux contenus.
Plonger dans le Web profond
1. L’article qui a rendu célèbre ce thème est disponible en ligne sur le site de l’université du Michigan http://www.press.umich.edu/jep/07-01/bergman.html 2. La société américaine Comscore (http://www.comscore.com/) publie régulièrement la liste des dix premiers moteurs de recherche.
© Groupe Eyrolles
En France, nous appelons Web profond, ou Web caché, ce qu’outreAtlantique on appelle Deep Web1 ou Hidden Web. Cette expression désigne cette partie du Web qui est inaccessible aux moteurs de recherche. Google étant actuellement crédité d’un taux d’utilisation supérieur à 62 %2, le Web profond pourrait être assimilé à celui que nous cache Google. Mais est-ce bien le cas ? Tout ce qu’un moteur ne peut pas indexer est-il de facto caché ? Les chercheurs Chris Sherman et Gary Price ont établi quatre types de Web caché. Cette typologie nous éclaire sur les raisons du manque de visibilité sur ces régions du Web.
Tisser son Web
11
libre Web privé
volontairement
Accès
identification oui
Web propriétaire
Pages exclues
involontairement Pages indexables
Web opaque
non Web invisible
Figure 2 : Les profondeurs du Web
Le Web opaque comprend les pages qui pourraient être indexées par les moteurs, mais qui ne le sont pas. La limitation d’indexation est fixée au nombre de pages d’un site, à la fréquence de son indexation et aux liens absents vers certaines pages. Le Web privé est celui des pages disponibles, mais volontairement exclues de l’indexation. Le Web propriétaire se trouve là où les pages sont seulement accessibles aux personnes qui s’identifient.
© Groupe Eyrolles
Le contenu du Web vraiment invisible n’est pas indexé pour des raisons tout simplement techniques, par exemple le format inconnu par le moteur, les pages générées dynamiquement. Le Web profond est la somme des Webs invisible, opaque, privé et propriétaire. Selon des évaluations, la taille du Web caché varie beaucoup et il est extrêmement difficile d’en faire une estimation. Pour certains, les meilleurs moteurs n’indexeraient pas plus de 5 % de la totalité du Web et ce pourcentage ne ferait que décroître.
12 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
Selon CompletePlanet1, le Web profond serait cinq cents fois plus grand que le Web de surface. Comment mesurer, comment vérifier ? Nous savons en tout cas une chose de façon certaine : le Web profond existe et il est immense. De la difficulté d’accès et de parcours du Web profond est née une spécialité dont certaines sociétés ont fait leur métier. C’est le monde de la veille stratégique, de la gestion de crises, de l’analyse concurrentielle, du référencement, etc. Avec près de 95 % du Web, il s’agit d’une véritable forêt vierge où les explorateurs s’aventurent extrêmement peu. Il va sans dire que dans le Web caché se terre autant du Web 1.0 que du Web 2.0. Au passage, notons encore que seulement 3 % du Web est en langue française.
Exploiter le Web profond Il faut intégrer la dimension cachée du Web, car c’est en en comprenant les arcanes qu’on peut d’une part progressivement maîtriser l’exposition des projets Internet accessibles « à la surface » du Web, mais aussi d’autre part faire des recherches efficaces dans les profondeurs du Web. Pourrait-on négliger de visiter une véritable mine d’or ? Cela conduit à relever plusieurs défis, un mot loin d’être trop fort. Il s’agit d’une part de mettre à disposition des outils qui permettent d’éclairer un peu ce Web obscur, dont : • méta moteurs (Copernic2, Mamma3, etc.) ; • moteurs spécialisés dans le Web profond (science.gov4, intute5, etc.) ;
1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10.
http://aip.completeplanet.com/ http://www.copernic.com/meta/web/ http://www.mamma.com/fr/ http://www.science.gov/ http://www.intute.ac.uk/ http://www.google.fr/blogsearch?hl=fr http://images.google.fr/ ; http://www.flickr.com/search/ http://www.google.fr/books?hl=fr http://www.codase.com/ ; http://www.koders.com/ http://www.search.com/people
© Groupe Eyrolles
• moteurs spécialisés pour rechercher des blogs6, des photos7, des livres8, des codes sources9, des personnes10, etc. ;
Tisser son Web
13
• moteurs sociaux, par exemple wikia search1, que nous aborderons plus en détail dans ce livre, qui favorisent la recherche communautaire, l’entraide ; moteur pour les enfants (babygo2 ; etc.) ; • partage de liens, en anglais social bookmarking (del.icio.us) ; • filtrage de flux d’information, sujet développé plus loin dans ce livre. Il s’agit d’autre part de proposer des veilles thématiques (alertes, abonnements RSS, abonnements aux services de sociétés spécialisées, etc.) pour la direction de l’entreprise afin d’accompagner ses réflexions stratégiques (planification, axe de développement, marchés émergents, technologies émergentes, etc.) et environnementales (nouvelles lois, normes, corrélations technologie/pollution, etc.). Cela peut concerner aussi l’équipe commerciale de l’entreprise pour répondre aux enjeux de la compétition (connaître sa concurrence, ses résultats etc.), pour mieux connaître la clientèle (besoins, potentiels etc.), mais aussi les juristes (veille juridique), le service informatique (veille technologique). Pour faire face au côté obscur du Web, l’important est de garder son bon sens. Si l’on cherche un objet d’un type particulier, on commence de façon de plus en plus réflexe par consulter le moteur de recherche le plus utilisé. Mais si on ne peut pas se contenter d’avoir les mêmes résultats que tout le monde, il faut alors se demander si le thème n’est pas couvert par d’autres moyens comme : • un moteur spécialisé ; • des communautés dédiées ; • des blogs thématiques ;
© Groupe Eyrolles
• des nuages de mots clés (tagcloud). Il faut bien reconnaître qu’à utiliser le même moteur, le monde finit par manquer de relief et on risque de passer à côté des vraies richesses du Web, celles qui dorment au fond. Les dispositifs propo1. http://search.wikia.com/wiki/Search_Wikia/fr/ 2. http://www.babygo.fr/
14 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
sés à l’instant sont tous très Web 2.0 dans la forme et le fond. N’oublions pas qu’une des meilleures façons d’accéder au Web profond consiste à demander à ceux qui y sont déjà allés, c’est-àdire à faire appel au Web social.
LE WEB SOCIAL Autant on peut se sentir perdu face au Web profond et même ressentir comme un vertige, autant on peut percevoir la présence des autres et les possibilités d’entrer en relation avec eux quand on aborde ce nouveau versant du Web, désormais appelé Web social par analogie avec le monde réel. Mais de quoi s’agit-il précisément ?
Tableau 1 : Pourcentage d'utilisateurs d’Internet ayant visité ce site 1. http://www.alexa.com/
© Groupe Eyrolles
Après la folle époque du e-commerce, de ses erreurs de stratégie et de son modèle économique explosif, nous connaissons maintenant un Internet assagi, dont l’image est plus douce, moins « âpre aux gains ». Il est moins perçu comme une juxtaposition de sites isolés et sa transformation en socle d’échanges entre les utilisateurs s’opère avec une relative sagesse. Les moyens d’entrer en relation entre personne ne se limitent plus à la messagerie électronique. Les internautes s’emparent progressivement du Web par la pratique des nouveaux usages qu’il favorise et deviennent peu à peu des « Webparticipants ». Arrêtons-nous au top 10 des sites mondiaux relevé par Alexa1 en mai 2008.
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Les chiffres parlent d’eux-mêmes. En se basant sur ces dix premiers sites mondiaux, la catégorie « réseau social » (en anglais « social network ») est aujourd’hui en tête. Elle passe devant les moteurs de recherche. En 2007, l’ordre d’arrivée était l’inverse. Il est intéressant de noter ici que les utilisateurs des moteurs de recherche sont anonymes alors que ceux des réseaux sociaux sont identifiés. L’identité numérique des utilisateurs dans ces réseaux peut être virtuelle ou authentique. Nous ne disposons pas de statistiques sur ce point. Tous les utilisateurs des sites d’entreprise sont aussi, et peut-être même premièrement, des utilisateurs du Web domestique. Et ce Web est nettement en avance sur le Web d’entreprise en matière sociale. Cela signifie que les collaborateurs de l’entreprise ne sont pas à prendre pour des novices. Nous rencontrons et rencontrerons de plus en plus de « Web natives » comme disent les Américains, c’est-à-dire de personnes tombées dans le chaudron quand elles étaient petites pour reprendre une imagerie d’Épinal bien gauloise. En termes de stratégie informatique, deux axes de projet s’en déduisent. L’un concerne l’adoption en interne du modèle social, l’autre introduit dans les projets Web de l’entreprise des composants sociaux. Abordons ces deux dimensions.
Adopter le Web social dans l’entreprise
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Hors de l’entreprise, les utilisateurs d’Internet ont fait du réseau social un outil quotidien, banal, utile, incontournable. Pourquoi n’en serait-il pas de même en entreprise ? Pourquoi observons-nous au contraire un fossé qui sépare le Web domestique du Web d’entreprise ? Dans certains cas, il s’agit même d’un abîme. Comment faire pour qu’un projet d’entreprise 2.0 prenne en compte le Web social ? Pour commencer, il faut que chacun partage la même vision de la communauté virtuelle. Celle-ci doit tout d’abord rassembler plusieurs personnes de l’entreprise autour de centres d'intérêts communs (métiers, bonnes pratiques, secteurs de marché, filières etc.). Elle doit par ailleurs favoriser les rencontres et les échanges à l’aide de moyens techniques informatiques et de communication, mais aussi renforcer le sentiment d'appartenance à l’entreprise et la communauté en créant des liens sociaux. Enfin, elle doit permettre
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le dialogue, l’échange des informations et la mutualisation des ressources. Souvent, l’entreprise a fait l’impasse sur les liens entre les personnes et s’est nettement plus attachée à définir les tâches et les processus à réaliser. Or, c’est en valorisant les liens interpersonnels que des potentialités nouvelles apparaissent comme : • le partage des bonnes pratiques, leur enrichissement ; • la formation entre pairs ; • la résolution de problèmes par la mobilisation d’une communauté ; • la mobilisation de savoirs informels. Des composants du Web 2.0, comme le wiki ou le réseau social, sont particulièrement adaptés et peuvent être mis en œuvre pour outiller, valoriser et accompagner l’adoption de ces potentialités. Chacun de ces outils est décrit en détail plus avant dans ce livre. Il ne faut pas pour autant renier les outils plus anciens comme les lettres de diffusion, les listes de discussion, les forums etc. Mais les outils ne suffisent pas. Il faut accompagner le changement et accepter les modifications dans la structure hiérarchique de l’entreprise. Le projet d’entreprise 2.0 ne peut faire l’économie d’un sponsor au plus haut niveau de la hiérarchie puisque le modèle social de l’entreprise et donc sa culture sont touchés. Les compétences et le bon vouloir des utilisateurs sont sollicités, la direction du projet leur exprime sa confiance et y trouve son intérêt.
Introduire des composants sociaux Afin de favoriser les relations entre les personnes dans l’entreprise ou avec ses clients, l’introduction de composants sociaux dans le
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Pour réussir, il faut parfois lutter contre certaines idées reçues. Peutêtre objectera-t-on que le réseau social coûte trop cher, voire qu’il est sans retour sur investissement ? La meilleure arme étant toujours l’anticipation, puisqu’elle permet de désamorcer au plus tôt les bombes, il est indispensable de mettre au point une bonne métrologie et d’en suivre les indicateurs. Des tableaux de bord peuvent alors être construits et travaillés pour en tirer matière à communiquer sur les résultats. Les idées reçues ne tiennent pas devant les mesures concrètes.
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système d’information représente une solution de plus en plus envisageable. En effet, c’est un domaine particulièrement innovant du Web 2.0 et la question qui se pose vite est plutôt celle du choix parmi tant d’idées nouvelles. Après l’e-mail, la messagerie électronique historique de l’entreprise dont le client peut être remplacé par un accès webmail, la communication interpersonnelle peut se déployer avec les messageries instantanées comme Yahoo Messenger, GoogleTalk, MSN Messenger ou AIM pour les plus connues. Pour en choisir une, les critères sont simples. Principalement, elle doit fonctionner dans un navigateur, proposer une liste de contacts, enregistrer les conversations, afficher une photo du collaborateur ainsi que son statut d’occupation. Ces deux modalités de messagerie n’ont pas le même rapport au temps : la première est asynchrone, la seconde synchrone. Certaines messageries instantanées supportant l’utilisation du micro et de la webcam, il est possible de téléphoner et même d’organiser des vidéo-conférences pour un coût extrêmement réduit. Les composants sociaux se logent aussi dans les nouveaux outils bureautiques à la mode Web 2.0. Ils sont naturellement collaboratifs. Les membres d’un projet peuvent rédiger en même temps plusieurs types de documents partagés. Ce point est vu en détail plus loin dans ce livre (voir dans le chapitre 4 le paragraphe intitulé « Suite collaborative »).
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Après la messagerie et la bureautique collaborative, qui ont su passer au modèle Web 2.0, de nouveaux types d’outils sociaux se sont développés nativement selon le paradigme Web 2.0. Les plus emblématiques sont les wikis et les blogs. D’autres, un peu plus discret, peuvent être mentionnés, comme les sites de partage de liens, de tags. Tous ont un usage en entreprise. Il existe aussi des sites au caractère social évident dont l’usage professionnel n’est peut-être pas immédiat. Mais pourquoi ne pas utiliser une plate-forme de partage de vidéos pour héberger des séquences promotionnelles ? Pourquoi ne pas faire de même avec les sites de partage d’images ? Les utilisateurs ont de plus en plus les moyens d’être connectés, de collaborer et partager des ressources. Les performances communautaires prennent le relais de la juxtaposition des performances
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Figure 3 : Changement de paradigme
personnelles. Quand les outils sont de plus en plus nombreux, c’est bel et bien selon l’usage que se décide le recours à l’un ou l’autre d’entre eux. Il ne faut pas s’arrêter aux idées préconçues que l’on peut rencontrer sur le Web. Quand tant de solutions sont disponibles, de surcroît souvent gratuitement, il serait dommage de ne pas les évaluer et d’en analyser la valeur pour l’entreprise. Les nouvelles générations de techniciens et d’ingénieurs sont toutes formées à ces nouveaux usages. Rejoindront-elles une entreprise qui ne dispose que de vieux outils et n’a pas de politique de modernisation ?
Augmenter la popularité sociale de votre entreprise
Commencez par faire une première mesure à l’aide de socialmeter. Il indique une note par source et une note globale. Sur la base de cette vision, on sait sur quels référencements doivent porter les 1. http://www.socialmeter.com/
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Pour améliorer le référencement du site Internet de l’entreprise, on peut travailler sur sa visibilité sociale, c’est-à-dire sa popularité auprès des grands sites du Web social puisque ce sont eux qui captent le plus grand nombre d’utilisateurs. Le site socialmeter1 a eu la bonne idée de répondre à cette question. Il mesure la présence des sites vus depuis les sites sociaux les plus reconnus aujourd’hui (del.icio.us, Digg, Furl, Google, Netscape, Linkroll, Reddit, Technorati, Shadows, Jots, Spurl et Yahoo MyWeb). Voici un exemple de façon de procéder.
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efforts. Il faut alors se fixer un but et refaire régulièrement cette mesure pour voir si les efforts portent leurs fruits. Raisonnons avec bon sens. Si la visibilité sociale tient compte des liens sociaux, il suffit donc de créer des liens pour gagner en exposition. Voici des actions simples à mener qui y contribuent grandement. Repérez les communautés auxquelles il est naturel que votre entreprise appartienne. Après en avoir dressé la liste, ciblez celles qui sont les plus référencées. Puis devenez un membre actif de ces communautés, contribuez, réagissez, commentez. Enfin suscitez aussi des liens vers votre site, ne serait-ce qu’en signant toutes vos interventions avec votre URL. Il s’agit là d’un travail à part entière qui ne s’improvise pas. Il faudra l’inclure dans les plans de charges et les budgets.
Distinguer entre communauté et entreprise En arrière-plan de la volonté de profiter du modèle du Web social en entreprise se loge un débat d’importance qui porte sur des questions comme : • l’entreprise est-elle naturellement portée à accueillir et promouvoir des communautés ? • quels sont les prérequis à la constitution d’une communauté en entreprise ? • comment gérer, accompagner des communautés en entreprise ? • que doit-on attendre d’une communauté ? • à quelle aune les mesurer, juger de leur pertinence, de leur apport de valeur ?
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Ce qui suit n’épuise pas les réponses à ces questions. Pour aller plus loin, le livre Organisation 2.0 Le knowledge management nouvelle génération, de Martin Roulleaux-Dugage (voir la bibliographie en fin d’ouvrage), traite abondamment de ces sujets.
Émergence de la communauté Pour répondre à la première question, on peut commencer par dresser un tableau des ressemblances et des différences entre entreprise et communauté. Il n’est pas naturel de s’interroger en ces
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termes, mais cet exercice peut s’avérer très salutaire au début du projet Web 2.0 et peut être conduit à la façon d’un brainstorming. Il est bon de mettre au clair les rôles, les motivations des personnes qui constituent une communauté ou une entreprise. Le tableau suivant n’a donc de valeur qu’indicative.
Tableau 2 : Différences entre communauté et entreprise
Accompagnement La communauté doit maintenant vivre et se développer. Elle va devoir probablement se professionnaliser et se ritualiser. En procédant à cet effort de formalisation, la communauté se rend plus visible. L’entreprise va pouvoir composer positivement avec elle. Sur l’organigramme classique et officiel viendront se juxtaposer les territoires communautaires. La communauté tire légitimité de sa symbiose avec l’entreprise.
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Prérequis Une communauté ne se décrète pas. Elle naît d’une dynamique sociale coalescente. Des personnes deviennent membres d’un groupe et s’y reconnaissent. Ce ne sont pas les outils qu’elle utilise qui fait la communauté, un wiki ne crée une communauté. Ce n’est pas non plus l’énergie et le temps apportés par chacun, mais l’évidence que tous ont un intérêt commun. C’est de l’ordre de la force centripète. Pour que la communauté naisse, encore faut-il des facteurs de cohésion – trivialement on dirait de la colle. Parmi les facteurs, citons le sentiment d’appartenance, déjà évoqué, la reconnaissance des autres membres comme autant de pairs, l’envie de partager, d’apprendre des autres.
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Attentes Puisque l’entreprise est le berceau de la communauté et qu’elle l’a permis et facilitée, la communauté aura, tôt ou tard, des comptes à lui rendre. Le collaborateur qui s’est investi dans une communauté en escompte au moins un avantage au niveau de ces compétences. Il en attendra une reconnaissance qui pourra se matérialiser dans sa progression au sein de l’entreprise. Juger de la pertinence d’une communauté Ce sont tout d’abord les qualités d’une communauté qui viennent à l’esprit, par exemple sa reconnaissance auprès des autres membres de l’entreprise, sa capacité à innover, sa force mobilisatrice, etc. Mais il n’est pas aisé de les mesurer à l’aide de critères quantitatifs. On peut commencer avec ceux-ci, qui ont le mérite de pouvoir s’appliquer à toute communauté. • membres : leur répartition) ;
nombre,
leur
ancienneté
(moyenne
et
• action : le taux de consultation (moyen et répartition), les contributions (moyenne par membre, répartition) ; • audience : le nombre de liens vers la communauté, la qualité de ces liens (lien, citation, reprise).
LE WEB 2.0
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On parle du Web social depuis quelques années lorsque Tim O’Reilly publie le 30 septembre 2005 « What is Web 2.0 » dans son blog1. Il n’imagine pas la secousse que va produire son article. Pourtant, il faut se garder des simplifications abusives comme celle qui consisterait à considérer que le Web 2.0 vient remplacer le Web 1.0. C’est bien tout le contraire. Les différents Webs que nous venons d’évoquer jusqu’ici se complètent et s’enrichissent mutuellement. C’est un ensemble de tendances économiques, sociales et technologiques qui sont à l'origine d'un Internet plus mature, carac1. L’original de cet article http://www.oreilly.com/pub/a/oreilly/tim/news/2005/ 09/30/what-is-web-20.html a été publié en anglais ; une version française est accessible ici http://www.eutech-ssii.com/ressources/view/1
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térisé par la participation des utilisateurs, l'ouverture et des pratiques en réseau. La façon de dénommer les différents Webs vaut d’être analysée, ne serait-ce que rapidement. Lorsqu’on parle de Web profond ou de Web social, l’adjectif épithète apporte indubitablement des renseignements, une qualification signifiante. Avec ce chiffre « 2.0 » accolé au mot Web, il faut relever une continuité – il s’agit toujours de Web – et un changement symbolique. C’est ce symbole qui importe donc. Pour faire simple et éviter de faire de la mauvaise philosophie, il veut signifier une progression, un développement, mais ne le qualifie pas. Tim O’Reilly observe que quelque chose a changé dans le Web et tout son article va s’attacher à poser des mots sur son intuition parce qu’un seul adjectif ne suffit plus. Le deuxième Web est donc multiple.
Gérer les identités numériques Le Web 2.0 se focalise sur les usages et la participation. La personne y est donc centrale. Cela n’est pas sans poser de nombreuses et difficiles questions qui ne peuvent être éludées. En voici quelquesunes, aujourd’hui devenues des classiques des forums : • doit-on exister dans le Web 2.0 avec sa véritable identité ou avec une ou plusieurs pseudo-identités ? • peut-on rester indéfiniment anonyme dans le monde 2.0 ? • qu’est-ce qui peut constituer un profil sans provoquer tôt ou tard une intrusion dans la vie privée ?
Les grands contributeurs du Web 2.0 sont les utilisateurs des wikis, des blogs, des réseaux sociaux. Très vite, la distance entre contributeur et auteur s’amenuise et le besoin de reconnaissance fera le reste… Hors de l’entreprise, le recours aux pseudos permet de rester dans une ombre relative. Dans l’entreprise 2.0, l’anonymat ou la pseudo-identité ne sont pas encouragés. Le collaborateur, quoiqu’il décide, pourra toujours être désigné. L’entreprise 2.0 ne connaît pas l’ombre. Sa trop grande
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• comment se prémunir contre le vol d’identité numérique et de quels recours dispose-t-on en cas de délit ?
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transparence lui vaut un frein culturel à la contribution. Les personnes auront-elles le courage de s’exprimer, même dans un champ purement professionnel, si elles risquent d’être critiquées ? Les écrits restent… C’est bien connu. Intuitivement, les collaborateurs de l’entreprise savent que leur identité numérique n’a rien de virtuel. Ils savent aussi qu’elle est composée de données formelles comme celles qui constituent leur signalétique mais aussi de données nettement plus informelles et d’autant plus subjectives. Parmi elles, on trouve en premier lieu toutes les contributions que le moteur de recherche ne manquera pas d’indexer et qu’il sera alors si facile à retrouver. La maîtrise de son identité dans le Web est un défi pour chacun et il n’y a pas de panacée. La liste rouge du téléphone n’a pas trouvé d’équivalent en version 2.0. Il reste une question, délicate entre toutes, qui concerne tous les projets Web 2.0 : peut-on exister professionnellement avec un pseudo dans le Web 2.0 ? Autrement dit, hors de l’entreprise mais dans des actes professionnels, peut-on utiliser une identité virtuelle sans affecter les questions de la responsabilité, de la confiance ? Il n’y a pas actuellement de réponses satisfaisantes, mais le projet Web 2.0 sera interrogé sur sa tentative de réponse et sur son évolution.
Gérer les traces numériques En 2004, une étude réalisée par MSN et Harris Interactive sous le titre « What is America searching for ? » révéla les usages suivants d’un moteur de recherche : • 39 % des personnes se sont cherchées elles-mêmes ; • 29 % ont cherché des membres de leur famille ;
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• 17 % ont recherché leur ancien(ne) petit(e) ami(e). Pour ce qui est du champ professionnel, plus de 20 % des personnes interrogées ont avoué s’être intéressées aux informations disponibles sur Internet concernant un employé, un employeur, un partenaire, un sous-traitant, etc.
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Ces données dépassent le cadre de l’identité numérique stricto sensu et relèvent soit des contenus explicitement et volontairement déposés, soit de traces laissées. La gestion de l’identité numérique est plus complexe qu’il n’y paraît s’il faut dorénavant surveiller tous ces fragments d’information, surtout lorsqu’on veut profiter du Web comme d’un hall d’exposition. Faudra-t-il recourir à des conseillers en communication d’un genre nouveau ? Il est paradoxal de constater d’une part l’immensité abyssale du Web profond et d’autre part l’extrême difficulté, voire l’impossibilité, que l’on a à faire disparaître des traces sur Internet une fois qu’elles ont été faites. Les traces appartiennent-elles à celui qui les a laissées ou à celui qui possède le lieu où elles ont été prises ? Toutes les réponses se rencontrent. Par exemple, Facebook indique explicitement dans ses conditions d’abonnement que toutes les traces lui appartiennent. En France, en revanche, les traces sont assimilées à des données personnelles. Autres cultures, autres droits, or Internet est international. C’est la quadrature du cercle. Le Web 2.0 nous promet des migraines ! Les projets Web 2.0 ne peuvent éluder de poser clairement leur politique de gestion des traces des utilisateurs. Si les développements Web 2.0 de l’entreprise deviennent sensibles et qu’il faille demain en répondre devant un conseil d’administration, ou devant un tribunal, cette charte d’un nouveau genre sera une pièce utile du dossier.
L’audience, dont les projets du premier Web fait grand cas, se mesure en nombre de visiteurs, en nombre de clics, en taux de rebond, etc. Mais mesurer n’est pas comprendre. C’est à partir des chiffres qu’un lent travail va les faire parler. Les exemples et les contre-exemples ne manquent pas dans la littérature et maintenant la blogosphère. Par exemple, que peut-on dire des personnes qui entrent dans un site commercial et le quittent lorsqu’elles arrivent à la page où les prix sont indiqués ? Le prix était-il trop fort ou voulaient-elles seulement le connaître ? Dans un Web d’usage et de partage, pourquoi s’intéresser aux motivations des utilisateurs à leur insu ? Reformulons la question. Pour-
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Suivre les usages
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quoi ne pas leur demander ? C’est ce que des sites très Web 2.0 font avec beaucoup de succès, et ils ne s’en cachent pas. On cite régulièrement Amazon, qui a ouvert son catalogue aux commentaires de ses acheteurs. Les bons produits reçoivent des notes et des avis élogieux, les mauvais sont boudés ou mal notés. Dans tous les cas, l’enseigne sait ce qui marche et ce qui ne marche pas. Le client prend généralement le temps d’acheter. Il étudie les prix, compare, fait ses comptes. Il peut donc prendre le temps de donner son avis. La règle du 1,9,90 de Jakob Nielsen1 dispose que 9 % des clients passeraient à l’acte. Cela n’empêche pas de stimuler les acheteurs par un mail de relance à l’envoi automatisé dans la semaine qui suit avec un petit questionnaire fermé bien ciblé. Si on applique ce que nous venons de voir aux usages du Web 2.0, cela peut conduire à proposer aux utilisateurs de livrer un commentaire à chaud après avoir fait usage. Le cas échéant, une relance vient, mais à froid, demander à nouveau un avis. Les commentaires sont des contenus de première catégorie. Quand on juge de la difficulté de les obtenir parfois, il serait vraiment regrettable de ne pas en tirer le meilleur profit. Pour cela, il faut les indexer, permettre les tags et même proposer, quand cela devient significatif, leur folksonomie. Le recours à l’appel à commentaire pour les projets Web 2.0 en entreprise n’est pas entré dans les mœurs. Si le projet est jugé positivement, le responsable en tirera avantage. Et si le jugement est négatif, ne cherchera-t-on pas un responsable ? Pourtant, dans le monde 2.0, la culture participative doit être honorée jusque dans l’acceptation des remarques faites par ses pairs.
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Favoriser les usages Si l’on suit les usages, c’est pour mieux les comprendre et les favoriser. Mais cette démarche classique des services informatiques est en train de changer peu à peu. Les collaborateurs de l’entreprise qui sont passés au Web 2.0, c’est-à-dire qui en utilisent des outils, commencent à exprimer leur besoin selon de nouveaux schémas. Ils sont nettement plus avertis de ce qu’il possible de faire. 1. http://www.useit.com/alertbox/participation_inequality.html
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Favoriser les usages signifie dorénavant aider les utilisateurs à développer de nouveaux usages. En mettant l’homme, son travail et ses relations au centre, en lui donnant les moyens correspondant à ses usages, c’est l’entreprise qui vit un changement de fond. Elle était centrée sur ses processus, aujourd’hui elle se focalise sur l’usage. Avec l’équation qui s’écrit « usage = processus + bonnes pratiques », le taux de conversion s’améliore. C’est une mutation qui dépasse les outils mis à disposition.
Développer de nouveaux usages Depuis l’invention des ordinateurs, ces derniers ont été chargés de se substituer toujours plus à l’intelligence humaine. L’intelligence artificielle, les réseaux neuronaux, les algorithmes génétiques, toutes ces dénominations l’expriment assez. Ces courants, répondant à une vision positiviste, n’ont pas permis à ce jour de modéliser l’intelligence.
Prenons l’exemple des moteurs de recherche. Il faut plus d’un million d’ordinateurs à Google pour délivrer son célèbre moteur à toute la planète. Les autres moteurs ne doivent pas être en reste. Pourtant, Olivier Parriche, directeur de Yahoo! Search France a déclaré : « Un système qui ne se base que sur des algorithmes est insuffisant. » Toute la puissance cumulée des machines ne suffit pas et ne suffira jamais. Des moteurs au goût Web 2.0 intègrent maintenant la dimension sociale. Par exemple, Yahoo! propose un site de recherche collaborative : Yahoo! Questions/réponses1. Prenons un autre exemple : dans le Web 2.0, le mashup est un mécanisme de composition d’applications dont le principe extrêmement simple libère la créativité des utilisateurs. Il sera décrit en détail plus loin 1. http://fr.answers.yahoo.com/
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Aujourd’hui, l’informatique s’est un peu humanisée à être moins prétentieuse. La puissance des machines est requise pour les gros calculs et vient contribuer à faciliter le travail des hommes. Mais il n’est plus question de remplacer les personnes. Le Web 2.0 en est la concrétisation : seul l’homme peut créer du contenu, contribuer, partager et échanger.
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dans ce livre. Les nouveaux usages méritent qu’on fasse leur promotion dans une culture de l’innovation.
Développer autrement le Web En même temps que le Web se développe en usages multiples, on assiste à l’émergence de nouveaux usages dans les pratiques de développement. Ainsi, le numéro de version a disparu, l’application évolue continûment et reste en version bêta. Des groupes d'utilisateurs sont toujours prêts à être sollicités pour tester les nouveautés. De plus, une application Web 2.0 se compose d’une partie destinée aux utilisateurs et d’une partie qui leur est cachée où leur comportement est analysé. Par ailleurs, les applications sont progressivement conçues avec l’exposition des ressources et des services qui permettent de créer des mashups. Les services sont exposés sous la forme d’API. Les ressources sont disponibles dans des flux. Enfin, la granularité de développement s’attache à favoriser l’équation « un usage – un service ».
Passer à l’entreprise 2.0 Sous cette appellation racoleuse se trouve l’entreprise qui adopte les nouvelles pratiques du Web 2.0. Cette intégration des usages participatifs du Web concerne au premier chef non pas la technologie ou le système d’information, mais les collaborateurs, leurs métiers et leurs besoins de mettre en commun des bonnes pratiques.
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Si l’entreprise est capable de remettre en question ses usages, ce sera alors le moment d’adapter son système d’information. Pour faire simple, il n’y a pas plus d’entreprise 1.0 que d’entreprise 2.0 avec une frontière nette à la façon d’une rupture. En revanche, tout cela s’inscrit dans un lent processus de maturation et d’adoption.
Dans un monde 2.0 La génération de nouvelles recrues est appelée « génération Y » où Y est l’initiale de youth qui signifie jeunesse en anglais. Ceux que
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l’on nomme encore les « Web natives » sont nés dans le monde câblé de l’Internet. Ils en ont les réflexes et les appétits. Si l’entreprise n’adopte pas le Web 2.0, elle sera en décalage de plus en plus prononcé avec les nouvelles générations. En 2010, le nombre de webnatives dépassera celui des baby-boomers.
Figure 4 : Nombre d’heures par semaine et par média (source Jupiter Research)
Le déploiement de l’entreprise 2.0 réclame une organisation dont l’encadrement a compris les avantages du Web 2.0 dans un environ-
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Il y a quelques années, Seymour Papert, célèbre professeur du MIT (Massachusetts Institute of Technology), déclarait que « la façon d’apprendre évolue dans le temps. Nos parents n’apprenaient pas comme nous avons appris, nos enfants non plus […]. Nous en sommes cependant rendus à un point où l’enseignement et l’apprentissage ne rejoignent plus le niveau où sont arrivés la société, le monde extérieur, le milieu dans lequel les enfants seront plus tard plongés ». Depuis, de nombreux projets de généralisation des espaces numériques de travail (ENT) sont lancés pour les écoles, les collèges, les lycées et les universités. Ces systèmes aux fonctionnalités pédagogiques, mais aussi administratives et de gestion, sont destinés à toute la communauté éducative : des élèves aux parents en passant par les enseignants et tout le personnel de l’éducation.
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nement qui change. L’innovation se dynamisera, irriguée par des idées et des énergies nouvelles. Le Web 2.0 permet une meilleure diffusion des bonnes pratiques vers des utilisateurs plus motivés et qui peuvent collaborer plus. Les employés les plus dynamiques peuvent être valorisés et l’image de marque de l’entreprise améliorée.
Une entreprise mieux informée La génération Y et les personnes qui ont adopté le nouveau Web savent accéder à la bonne information, au bon moment, à l’aide de leur réseau et de la maîtrise des nouvelles applications et services. En ménageant l’accessibilité à cette intelligence collective, l’entreprise 2.0 prend un avantage compétitif. D’abord les nouveaux usages L’erreur serait de passer au Web 2.0 par les outils et non par les usages. Le projet Web 2.0 de l’entreprise est une réponse à une demande en matière d’usage. C’est parce que les façons de travailler évoluent que les outils doivent s’adapter. Les exigences de l’ergonomie sont ainsi prises en compte dans le monde de l’entreprise.
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On observe dans les entreprises que les utilisateurs trouvent toujours une astuce pour utiliser les outils de leur choix lorsque ceux de l’entreprise n’évoluent pas ou pire lorsqu’il est interdit d’en utiliser de nouveaux, ce qui se fait par exemple à l’aide d’accès refusés par les firewalls aux sites de téléchargement. Il ne faut pas mésestimer les qualités des utilisateurs ; in fine, lassés, ils se démotivent.
Puis les outils Le schéma s’énonce facilement : l’entreprise 2.0 adopte d’abord des pratiques et des usages nouveaux, puis les outils du Web 2.0. Pour autant, la réalité n’est pas aussi simple. Il faut déjà accepter que des usages nouveaux puissent venir perturber ou bouleverser des façons de faire anciennes qui ont certainement fait leur preuve. L’étape suivante consiste en une prise de recul pour observer quelles sont ces bonnes pratiques qui sont touchées. La conduite d’un changement s’engage ainsi. C’est ensuite que le projet Web 2.0 se dessine dans sa dimension technique.
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Engager le projet Web 2.0 en entreprise Pour clore cette partie consacrée au Web que l’entreprise tisse, soulignons à présent quelques points d’attention majeurs. On se souvient des projets informatiques mettant en œuvre des schémas directeurs et des plans informatiques successifs. À cette époque, les projets pouvaient prendre la forme d’un big bang affectant non pas seulement le système d’information, mais aussi les personnes. Les plans se doublaient de plans d’accompagnement au changement. Peu à peu, les budgets se sont réduits et à cette politique dispendieuse sont venus se substituer des travaux d’urbanisation pour rechercher comment harmoniser l’existant et aborder plus à la marge ce qui devait être amélioré. Les schémas directeurs orientaient les projets du système vers les utilisateurs et cette direction donnée reflétait des réalités économiques prégnantes. Les questions posées étaient, dans l’ordre : • comment construire un système qui ne soit pas trop cher avec toutes les fonctionnalités utiles à l’exercice du métier de l’entreprise ? • comment aider les utilisateurs à maîtriser l’outil ainsi conçu ?
Une échelle de temps extérieure Longtemps, les technologies sont restées inaccessibles aux personnes individuelles. Seuls l’État ou l’entreprise pouvaient les acquérir. Mais, depuis l’avènement de la microinformatique et plus récemment du Web, l’équipement des ménages ne comprend plus seulement des machines domestiques destinées à la cuisine ou au confort dans la maison, c’est dorénavant l’informatique qui s’est invitée avec ses offres d’abord ludiques et bureautiques puis de multimédia et maintenant de connectivités interpersonnelles multi canal. L’innovation parvient aujourd’hui plus ite dans la sphère domestique qu’au sein de l’entreprise. Que ce soit par le biais par exemple des enfants rentrant de l’école, ou celui des rubriques Internet des journaux gratuits distribués dans le métro, l’innovation est plus prompte hors de l’entreprise. Le temps s’écoule plus vite dehors que dedans.
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La promesse du projet Web 2.0 est un changement de perspective radical : aller des utilisateurs aux outils et des outils au système.
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Prendre la vague L’entreprise est le terrain sur lequel s’implante le projet Web 2.0. Les collaborateurs, qui sont au quotidien des utilisateurs domestiques dans un monde extérieur plus innovant que celui de l’entreprise, ont des usages de plus en plus empreints d’habitudes acquises au contact du vaste Web. L’entreprise qui saura profiter de ce changement et bénéficier des nouvelles compétences y trouvera un facteur de succès et de motivation. Utilisateurs
Utilisateurs
Utilisateurs
Utilisateurs
Monde extérieur Usages
Pro
jet
jet
jet
Pro
Pro Utilisateurs
Pratiques
Utilisateurs
Entreprise Outils, techniques, infrastructure
Temps
Figure 5 : Le déploiement du projet
APRÈS LE WEB 2.0 Distinguer une suite au Web 2.0 Le Web 2.0 est à peine sec, qu’un nouveau est déjà annoncé. Est-ce à dire que quelque chose d’important et de remarquable se produit ?
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La première question est bien celle de savoir si un nouveau Web peut être ou non distingué de ce qui précède. Les paragraphes qui suivent vont tenter d’apporter un premier éclairage à cette question avant qu’elle ne soit reprise et traitée plus loin dans un chapitre entièrement consacré au Web 3.0.
Rechercher autrement Web 1.0 Les moteurs de recherche que nous connaissons sont nés dans un Web statique fait de pages HTML. C’était idéal pour les moteurs et
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l’accès à l’information était aisé même si, techniquement, en arrièreplan, la prise en compte des contenus dynamiques posait de vrais problèmes en les reléguant très souvent dans le Web profond.
Web 2.0 Pour ne pas voir sombrer tout le Web nouveau dans l’obscurité du Web caché, il a fallu trouver le moyen de doter les moteurs de recherche de capacités nouvelles. Mais ce n’est pas seulement avec de la technologie que la réponse a été apportée. En effet, nous avons tous été mis à contribution. L’intelligence collective qui s’exprime dans tous les blogs, wikis, digg, folksonomies, etc., tout comme toutes les traces laissées par les utilisateurs dans la grande toile, tout cela est stocké dans des silos toujours plus profonds pour y être traité par les algorithmes des moteurs insatiables. Web 3.0 Mais cela ne suffit plus. Le Web croît plus vite que les moyens mis en œuvre pour le « cruncher ». Comme on l’avait fait pour passer de HTML à XML, le Web se sémantise progressivement. Le Web sémantique décrit par Tim Berners-Lee est « une nouvelle infrastructure devant permettre à des agents logiciels d’aider plus efficacement différents types d’utilisateurs dans leurs accès aux ressources sur le Web ».
Mais est-ce la seule voie ? Le grand gagnant des Webs 1.0 et 2.0, toute catégorie confondue, est le moteur de recherche. Or, si le Web émergeant venait à s’affranchir du moteur tutélaire, la roue de la fortune tournerait… ouvrant le champ à d’autres Webs. 1. http://swoogle.umbc.edu/
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En Irlande, des chercheurs du DERI (Digital Enterprise Research Institute) travaillent depuis 2003 sur le moteur de recherche sémantique SWSE (Semantic Web Search Engine). Il indexe des données RDF (Resource Description Framework) récupérées à partir de nombreuses sources (dont OWL, RDF et RSS). Il a récemment réussi à traiter sept milliards de RDF en quelques fractions de seconde. Les moteurs de recherche deviennent plus intelligents, mais évidemment plus ils peuvent traiter de données, plus ils sont intelligents. D’autres projets de moteurs sémantiques se développent comme Swoogle1, qui se targue d’utiliser plus de 10 000 ontologies. Et ce n’est qu’un début.
Tisser son Web
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Puiser à de nouvelles sources d’information Les données accessibles à l’informatique sont gigantesques en quantité et d’une extrême variété en termes qualitatifs. Parmi les nouvelles sources captées, on trouve les traces laissées dans le Web. Longtemps considérées comme non significatives et sans valeur, elles sont aujourd’hui porteuses d’enjeux considérables, pas seulement en termes applicatifs, mais aussi en termes de pouvoir. D’une tout autre nature, le « surface computing » met en scène le contact entre les mondes virtuel et réel en permettant notamment de capter le geste. Par exemple, l’utilisateur, tapant sur un clavier virtuel visualisé sur la surface d’une table, laisse augurer des développements passionnants en termes d’interface homme/machine (IHM). Toutes les nouvelles sources enrichissent sémantiquement le champ des possibles pour les ordinateurs.
Développer des ontologies Les relations sémantiques entre les concepts et les entités d’un domaine donné peuvent être décrites à l’aide de diverses logiques basées sur les langues ou les vocabulaires appelées ontologies. Ces objets complexes sont les référentiels sur lesquels repose l’enrichissement sémantique du Web. Des outils spécifiques permettent leur création, leur visualisation. Des API (Application Programming Interface) exposent leurs méthodes d’interrogation.
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Glaner ce qui peut l’être La sémantique offerte par XML et XHTML et leurs innombrables dialectes se fait à l'aide de tags. Pour pouvoir effectuer une recherche sémantique dans des documents rédigés dans ces idiomes, l’idée proposée par le World Wide Web Consortium (W3C) est que leur auteur mentionne explicitement que ses données peuvent être extraites et pointe vers l'algorithme à utiliser pour les convertir au format RDF. Ce mécanisme est appelé GRDDL (Gleaning Resource Descriptions from Dialects of Languages, récupération des descriptions de ressource depuis des dialectes de langages). Le troisième Web sera peuplé de documents XML et XHTML sémantiquement enrichis. Son format fédérateur du Web sémantique est le RDF.
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Passer à la troisième dimension Dans un monde où la part de l’image est toujours importante, il fallait s’attendre à ce qu’à côté du texte, le Web 3.0 s’intéresse à l’image. La 3D est un sujet de recherche depuis plus de quarante ans. Toutefois, c’est depuis l’avènement des jeux vidéo sur console avec des moteurs de rendu particulièrement performants qu’on imagine de mieux en mieux les possibilités de l’utilisation dans un univers virtuel à trois dimensions. Les unes concernent la restitution d’images ou de vidéos 3D, les autres captent le mouvement en 3D. Voici quelques exemples. Dans un spot publicitaire récent, Google communique sur la vision que Google Earth offrira en 2020 et montre le survol d’une ville américaine dans un réalisme inégalé. Pour sa part, Second Life, initialement un jeu, est devenu peu à peu un portail sociétal où dans un univers virtuel, l’utilisateur à l'opportunité de vivre une seconde vie dans un monde créé et partagé par l’ensemble des utilisateurs. L’entreprise peut y trouver des prolongements sous plusieurs formes, par exemple la salle de réunion, le rendez-vous commercial ou l’entretien d’embauche. Quant à la technologie « Touchlight 3D », elle capture des mouvements dans l'espace avec l'aide de trois caméras. Cela permet de manipuler des images tridimensionnelles en bougeant les mains dans le champ des caméras.
Il semble bien que l’une des principales raisons de l’émergence du troisième Web soit la quête du sens que les précédentes toiles n’ont pas satisfait. Le Web a permis la publication de contenus nombreux qu’il a indexés et mis à disposition. Pourra-t-il les comprendre, donner accès à leur compréhension sous une forme ou une autre ? En attendant, le prochain chapitre revient sur le Web 2.0 pour en donner les clés. Pour entrer dans le paradigme du Web 3.0 et connaître ses promesses, il faut passer au dernier chapitre de ce livre.
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Donner du sens
Chapitre 2
Des clés pour le Web 2.0
Différents Webs ont été abordés dans le précédant chapitre, depuis le premier jusqu’au Web 2.0. En fixant des points de repère précis, il est maintenant possible de les situer les uns par rapport aux autres et peut-être de sentir des manques, des besoins laissés sans réponse. Ce deuxième chapitre approfondit le Web 2.0 afin d’en donner les clés. Pour cela, il commence par un certain nombre d’exemples concrets. Chacun est choisi pour le nouvel usage qu’il représente clairement. En faisant appel à l’expérience, la description facilite une compréhension pragmatique.
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Les fondements sur lesquels repose cette nouvelle toile sont alors mis en évidence. Le propos est de mettre l’accent sur ce qui caractérise véritablement le Web 2.0 et de poser des mots précis sur les concepts. Même si cela peut passer pour une tentative de réduction du Web 2.0 à quelques idées, cet exercice est indispensable, car dans toute conduite de projet, la phase amont, destinée à convaincre la direction générale de l’entreprise, doit établir des bases à l’aide d’un vocabulaire véhiculant des notions partagées ou à partager. Après avoir complètement situé le Web 2.0, il sera possible d’envisager ses limites, ce qui pourra laisser imaginer de nouvelles formes de web à venir. Ce chapitre aura atteint son objectif s’il permet d’articuler une argumentation claire du projet Web 2.0. La dimension technique de cet argumentaire pourra être préparée à partir du chapitre suivant.
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COMPRENDRE LE WEB 2.0 Quelques exemples représentatifs Est-il nécessaire de donner une nouvelle définition au Web 2.0 dans ce livre ? N’y en a-t-il pas déjà assez dans la presse, les livres, les sites, mais aussi les blogs ou les wikis ? Quelles soient claires ou non, elles sont souvent plus académiques que pratiques. Alors puisque le propos de ce livre est d’apporter des réponses pragmatiques, voici quelques exemples concrets pour brosser à grands traits le Web 2.0. Bien sûr, le choix des exemples est arbitraire et de meilleurs exemples pourront toujours être mis en avant. Notre sélection a simplement été guidée par le souci de présenter des réalisations connues et facilement identifiables comme représentatives d’un usage précis. Et c’est sur cet usage que porte notre commentaire. La méthode est pointilliste, mais pédagogique.
Figure 6 : http://fr.wikipedia.org/wiki/
Créé en 2001, Wikipédia est devenu le wiki le plus visité au monde. La célèbre encyclopédie en ligne n’est plus à présenter. Elle a
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Collaboration et wiki : Wikipédia
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dépassé les dix millions d’articles en mars 2008 avec près de deux cents éditions localisées par langue, dont près de cent vingt sont actives. Elle est le prototype même du fonctionnement d’un site selon le principe wiki. Chacun peut facilement participer à création ou à la modification du contenu du site en y contribuant librement, soit en étant un membre identifié, soit en restant anonyme. La liberté offerte par le système de gestion de contenu d’un wiki est sans véritable contrainte. Cela fait dire à certains qu’il ne sera donc pas possible de faire confiance au contenu d’un tel site. Il suffirait qu’un malicieux modifie ce que d’autres ont rédigé avec sérieux et conscience. Le modèle du wiki résiste à cette critique. En effet, les auteurs suivent généralement leurs productions, ils peuvent donc rétablir les contenus originaux. De plus, les lecteurs sont très nombreux, tous ne seront pas dupes et les corrections ne tarderont pas à venir. Enfin si un malicieux est repéré, il peut être suivi par son identification ou son adresse IP. En entreprise, les collaborateurs sont les contributeurs du wiki. Les contenus sont de ce fait de très grandes qualités. L’expérience montre que les wikis rencontrent un très grand succès dans les sociétés qui les ont déployés. Le mode de contribution des wikis manifeste la liberté et la confiance données aux membres de l’entreprise. Ce sont des valeurs très positives qui bénéficient en retour à l’entreprise.
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Un paragraphe spécifique traite largement des wikis plus loin dans ce livre (voir chapitre 4). Ici, notre propos est de mettre l’accent sur son modèle d’usage : les utilisateurs participent librement et l’entreprise leur fait confiance en tant qu’auteurs. En signant leurs contributions, ils gagnent en reconnaissance.
Agrégation et planète : XMLfr Éric van der Vlist, gérant et co-fondateur de Dyomedea, publie ses premiers articles sur xmlfr.org en janvier 2000. Le site connaît aussitôt un accueil favorable au point de devenir très rapidement le portail francophone de référence sur XML et ses technologies : « Souhaitant créer un site qui soit aussi une vitrine des technologies XML, j'avais choisi une architecture qui pour beaucoup semblait à l'époque un pari risqué : les pages de la majeure partie du site
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Figure 7 : http://xmlfr.org/
seraient générées dynamiquement par des transformations XSLT effectuées au niveau du serveur. »
La transposition au monde de l’entreprise est intéressante à plus d’un titre. Les blogs y sont apparus depuis quelques années et commencent à remplacer les carnets de notes des ingénieurs et des cadres. Ils y rapportent leurs idées, les progrès de leurs travaux, mais aussi les questions en suspens. Le modèle de la planète permet de fédérer les blogs d’une ou de plusieurs équipes sur un thème précis et de publier l’ensemble sur une seule adresse, dans un seul
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Depuis fin 2007, le portail propose, sous le nom de Planète XMLfr, une agrégation de blogs. Les publications de plusieurs blogueurs sont assemblées pour former un plus gros blog. Ce modèle de publication porte le nom de planète. Ses principes sont très simples. Une règle précise comment choisir les auteurs dont les blogs sont repris et une autre pour ne retenir de chaque blog que les articles relevant du thème de la planète. Dans le cas de Planète XMLfr, les nouveaux auteurs sont proposés par des membres de la planète à l’ensemble. Le choix des articles se fait sur un ensemble de tags propres à chaque blog.
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flux. C’est une façon douce de structurer les connaissances et les informations en laissant chacun libre de sa production. Il ne faut pas confondre blogosphère, planète et agrégateur. La première désigne un ensemble de blogs ou l'ensemble de ses rédacteurs. La seconde est un site qui agrège selon ses règles un ensemble de blogs et en publie l’agrégation antichronologique. Le dernier est un logiciel qui permet de suivre plusieurs flux de syndication simultanément.
Ergonomie et portail : le New York Times
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Figure 8 : http://www.nytimes.com/
Le New York Times est une véritable institution. Créé en 1851, il a vécu toutes les transformations du monde de la publication en étant souvent précurseur. Son site Internet mérite une visite approfondie à plus d’un titre. Nous retiendrons dans ce paragraphe l’ergonomie qu’il met en œuvre dans un portail aux services des usages préférés des lecteurs. Les onglets en haut à gauche montrent les pages majeures du site, c’est-à-dire du New York Times virtuel. La page d’accueil fait office d’Une virtuelle. Le deuxième onglet permet à l’utilisateur qui s’est
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créé un compte de composer sa propre maquette du journal en plaçant des rubriques du quotidien, les sélections des journalistes de son choix ou des flux RSS. Les onglets suivants sont la reprise d’Une de l’édition papier, la présentation de plusieurs sujets proposés en vidéo, l’accès aux sujets les plus populaires triés par média Internet : • e-mail (articles les plus fréquemment envoyés par e-mail par les lecteurs) ; • blog (articles vers lesquels on compte le plus de liens vers des blogs) ; • recherche (mots clés les plus recherchés) ; • vidéo (films les plus populaires) Le dernier onglet donne accès par sujet traité. Le thème de la Une d’un journal est ainsi décliné selon cinq usages principaux : • la Une virtuelle semblable à ce que font tous les journaux en ligne ; • la Une personnalisée par le lecteur ; • la Une classique qui reprend la Une papier ; • la Une vidéo ; • la Une plébiscitée par les lecteurs. Le dernier onglet est un répertoire (à l’instar des catalogues de sites comme dmoz.org). Un moteur de recherche offre un accès à tous les articles parus depuis la création du journal.
Composition et mashup : earthquake.googlemashups Si nous avons tous utilisé Google Maps pour voir à quoi ressemblait le toit de notre maison ou pour jeter un coup d’œil depuis le hublot d’un satellite sur la plage de nos vacances, avions-nous imaginé
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Le New York Times a parfaitement compris que son lecteur change. Son site Internet lui permet d’explorer parallèlement plusieurs démarches. En analysant les usages des visiteurs, le journal répond toujours mieux à leurs attentes et reste de ce fait un titre incontournable.
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Figure 9 : http://earthquake.googlemashups.com/
qu’il serait possible de coupler ce service cartographique avec toute sorte d’informations géographiquement localisables ? Par exemple, en écoutant les informations sur les derniers tremblements de terre, il était possible d’imaginer une carte sur laquelle seraient placés les impacts. Mais comment développer facilement et rapidement une application qui rende ce service ?
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Avec la technique du mashup, c’est désormais devenu une réalité. Intuitivement, on sent bien qu’il suffit d’assembler la liste des localisations des tremblements de terre et une carte. Concrètement, cet assemblage va se faire par la surface, par opposition à ce que les technologies d’infrastructures, comme l’EAI par exemple, permettent. D’une part, il faut disposer de l’information de base, la liste à jour des points d’impact, et d’autre part, on a besoin de l’API qui permet de transmettre une liste de points à localiser à Google Maps. Pour mixer ces deux applications, Google Maps et la production de la liste actualisée des localisations de points d’impact, les développeurs de ce mashup ont bénéficié de l’exposition libre des API de Google Maps. Le Web est devenu une plate-forme où l’on trouve
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des services en libre-service. Moyennant un développement léger, qui peut d’ailleurs être téléchargé (en cliquant sur « voir source » en haut à droite), il possible de suivre l’activité sismique terrestre en bénéficiant de toute la richesse de la cartographie. La société Google n’a pas été sollicitée, elle a exposé ses API en libre-service. Elle bénéficie en retour d’une publicité gratuite.
Commentaires et ventes : Amazon
Figure 10 : http://www.amazon.com/
Dans notre exemple, à côté de la réduction du visuel du livre, les premières informations qui suivent le titre et l’auteur sont la note, ici quatre étoiles, et le nombre d’évaluations client. Il ne reste plus qu’à cliquer pour lire. Le dispositif est ici plus élaboré encore. À la section « commentaires en ligne », le détail des notes est donné et pour chaque évaluation, on peut savoir combien de lecteurs l’ont appréciée. Chacun
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L’achat d’un livre suit souvent la discussion avec un ami qui nous le recommande. Pour le vendeur, c’est parfait, il n’a pas besoin de faire l’article. Imaginons un magasin dont tous les vendeurs sont des lecteurs de tous les livres, qu’il leur est possible de donner des avis motivés sur tous les rayons. C’est la gageure des plusieurs sites de vente en ligne. Ils ont recruté leurs acheteurs eux-mêmes !
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est aussi invité à donner son avis soit par une note soit en écrivant un commentaire pour « partager [son] opinion avec les autres clients ». Pour finir, une fonction de recherche dans les commentaires est offerte. Ainsi, le chaland peut lire les appréciations de ses pairs. Après l’achat, s’étant fait sa propre opinion, il peut, revenant à l’occasion d’une nouvelle commande, partager ses impressions. Si dans l’entreprise, le projet Web 2.0 intègre un dispositif de vente, comment ne pas se laisser inspirer par le succès des sites de vente en ligne qui ont su si bien métaboliser les mécanismes du Web 2.0 ? Amazon, ouvert en 1995 selon le modèle du « pure player », a su résister à l’explosion de la bulle Internet pour être aujourd’hui le premier de sa catégorie. Le modèle économique est celui de la « longue traîne », abordé plus loin dans ce livre. Le modèle des typologies d’audience est celui de la règle de Jakob Nielsen.
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Audiences et clics : Digg
Figure 11 : http://www.digg.com/
Le moteur de ce site est le « user generated content ». Les visiteurs inscrits peuvent voter d’un clic ou donner leur avis sur une informa-
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tion, une vidéo, une image, un balado (podcast en anglais) déjà proposé ou en déposer d’autres. Les objets plébiscités se retrouvent en tête de liste. Si l’on ajoute encore un moteur de recherche rustique, et plein de publicités, on obtient un cocktail que les investisseurs apprécient. Mais que reflète cette hiérarchisation ? Elle est éminemment liée à une langue, à une culture, voire à un courant culturel. Pour que Digg ait du succès en France, il faut un Digg français. Le projet est ici celui de la capture d’audience pour sa revente ultérieure. Ce bien très immatériel est typique dans le commerce. Quelle est la boulangerie qui marche le mieux dans votre ville ? Celle qui est en centreville, près de l’église et la mairie, ou celle qui est dans une petite rue excentrée ? On sent bien que la communauté réunie par Digg n’est pas homogène. Il fallait donc un petit moteur, qui n’a d’ailleurs pas coûté cher, car il ne sait vraiment pas faire grand-chose. Mais c’est suffisant. Ce site est en quelque sorte le discounter d’audience. Sur le côté, la petite icône nous informe qu’un flux RSS est disponible. Il est paramétré pour reprendre exactement la situation du visiteur (recherche et item). Si le projet Web 2.0 consiste à capter de l’audience, on peut adopter ce modèle. Son développement est peu onéreux. En revanche, il faudra travailler le référencement. Plusieurs entreprises se sont lancées en France sur ce créneau. Elles optent souvent pour des thématiques ciblées comme les histoires drôles, les recettes de cuisine – tout cela est très français – ou des scripts, des vidéos, etc.
Réalité augmentée et cartographie : Géoportail L’IGN propose un petit bijou de technologie 3D qui permet de se déplacer comme en avion au-dessus du territoire national. La nouvelle version 3D du Géoportail de l’IGN, présentée comme le « portail des territoires et des citoyens », délivre de l’information géographique non pas seulement aux géomaticiens, mais à tous et
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Financièrement, plusieurs économistes affirment que la rentabilité n’est pas atteinte. Mais, attendons de voir si Digg, le site historique, trouvera preneur. Car, in fine, le seul but de ses créateurs est bien celui-là depuis le début.
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Figure 12 : http:// www.geoportail.fr/
son positionnement dépasse largement celui d’un simple moteur de recherche géographique.
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L’utilisateur peut superposer à sa guise plusieurs couches d'informations sur le même fond de carte. Il peut en modifier l'ordre d'empilement et la transparence. Ainsi, sur une même carte, un professionnel des secours peut par exemple superposer selon ses besoins métier le relief, les risques d'avalanche et d'inondation, les zones à risques et la carte des réseaux routier et ferroviaire. Un autre se composera d’une carte touristique, un enseignant préparera son cours de géographie, etc. Le Géoportail s’enrichit régulièrement et les données fournies par les nouveaux partenaires permettent de satisfaire de plus en plus de besoins privés ou professionnels. La carte est devenue un vecteur de communication vivant ouvrant sur de nouvelles applications. Son concurrent direct, Google, offre plus de détails en zone urbaine mais est dépassé par le Géoportail pour la couverture des zones rurales et des petites agglomérations. Quant à la richesse du multicouche, la palme revient sans conteste au portail de l’IGN. Les projets Web 2.0 qui doivent intégrer de la cartographie peuvent trouver un avantage concurrentiel certain dans l’utilisation ou le
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partenariat avec le Géoportail dont l’actualité est riche à ce sujet. Plus globalement, même si la réalité augmentée n’en est qu’à ses balbutiements, elle n’est pas pour autant de la science-fiction. Une visite sur le site de la société Total Immersion permet de s’en convaincre. La France est très innovante dans ce domaine.
Co-développement et crowdsourcing : « mechanical Turk »
C’est désormais une tendance affirmée du Web 2.0. L’utilisateur est un acteur, sollicité pour contribuer, commenter, noter, évaluer, s’exprimer, partager, acheter, vendre, etc., et même développer des services. L’entreprise s’est virtualisée, elle n’a presque plus besoin d’employés puisque son principe pourrait être celui du codéveloppement : « Une visite, une contribution ». Pour que cela fonctionne, il faut trouver tout de même le moyen d’utiliser le temps de la visite des utilisateurs pour créer du contenu, résoudre des problèmes, faire de la recherche, etc., en un mot pour développer l’entreprise et augmenter sa visibilité. Avec ce modèle, l’entreprise souhaite entrer dans un cercle vertueux pour un faible coût.
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Figure 13 : http://www.mturk.com/mturk/welcome/
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La RATP cherche des idées innovantes avec www.vous-et-la-ratp.net. Google propose http://images.google.com/imagelabeler. Sous la forme d’un jeu, il s’agit de présenter des images aux utilisateurs qui doivent alors fournir des mots clés venant enrichir le moteur de recherche d’images. Derrière chaque site qui vante un partage de photos, de vidéos, de textes, etc., se trouve immanquablement un vaste silo de mémoire qui engloutit tout ce qui est « partagé ». Le site engrange et en contrepartie permet le partage. Qui est gagnant ? Plusieurs sites ouverts sur le modèle du crowdsourcing dès 2006 ont disparu. Que sont devenues les contributions ? En référence à un célèbre automate inventé au XVIIIe siècle, Amazon a mis en ligne un « mechanical Turk ». Ce service fait appel à ses utilisateurs pour réaliser des tâches que les ordinateurs ne savent pas accomplir. Non sans ironie, le service est présenté comme un site d’« Intelligence Artificielle Artificielle ». Il s’agit par exemple d’indiquer la présence d'un objet dans une image. La rétribution se fait à la tâche, soit quelques cents. C’est un salaire qui peut paraître ridicule mais pas dans tous les pays. Avoué ou non, offert ou payé, le crowdsourcing, même immature, est en marche. Le projet Web 2.0 de l’entreprise aura certainement à s’y confronter.
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Publication et blog : Wordpress Certaines plates-formes proposent des blogs déjà installés, prêts à l’emploi. Aucune opération technique n’est nécessaire : en quelques clics, l’utilisateur peut commencer à publier. Les inconvénients n’apparaissent pas immédiatement. Mais s’il faut récupérer ce qui a été publié ou simplement personnaliser un peu l’interface. Ce n’est donc pas gagné. Pour maîtriser son blog, il faut installer son propre serveur. Le projet comporte alors deux phases. La première est technique, mais on en vient facilement à bout de différentes façons, jamais bien coûteuses. Après avoir téléchargé un moteur de blog, l’avoir éventuellement personnalisé peu ou prou, il faut le mettre en ligne. La seconde étape, plus délicate, est la même pour tous les blogs. Il s’agit de la publication de contenus. Puisque le blog doit vivre, il faut écrire de nouveaux articles régulièrement, intéresser un lectorat à fidéliser… Cela n’a rien de technique !
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Figure 14 : http://fr.wordpress.com/
Si le projet Web 2.0 doit proposer une plate-forme de blogs à une partie de l’entreprise, par exemple pour une communauté d’experts, pour faciliter le dialogue ou tout autre objectif, il existe des solutions gratuites comme Wordpress multi users (wpmu). Cette dernière est quasi identique au Wordpress classique. De l’expérimentation au déploiement, la démarche est toute tracée. Il reste à définir quelques règles pour écrire, pour être lu. Par exemple, énoncer ce qu’est un bon billet, quels sujets doivent être traités, inviter à utiliser des tags, le moteur de recherche, proposer une palette de
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Wordpress, le site du moteur de blogs de notre exemple, est l’un des plus utilisés au niveau international. Il propose plusieurs designs au choix et il est encore possible de modifier les sources. En ajoutant des widgets, à choisir dans une bibliothèque bien fournie, il est possible d’ajouter beaucoup de fonctionnalités supplémentaires, à commencer par un dispositif anti-spam. En effet, le propre d’un blog est d’attirer les commentaires et malheureusement, ce sont d’abord les spam-machines qui se mettent en branle.
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widgets validés. L’important, pour ne pas bloquer la rédaction, est de laisser suffisamment de degrés de liberté.
Viralité et réseau social : Facebook
Figure 15 : http://www.facebook.com/
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Les réseaux sociaux, chacun en a une idée, ne serait-ce que parce que le sujet n’est pas récent. En fait, ils sont étudiés depuis la première moitié du siècle dernier mais n’ont trouvé que tout dernièrement une réalisation phare par le truchement de la virtualité de l’Internet. Aujourd’hui, tout le monde parle du phénomène Facebook. Les ingrédients sont une plate-forme ouverte à tous les développements tiers (un site est dédié aux développeurs), une absence totale de publicité – le buzz (bouche-à-oreille) suffit –, une croissance fulgurante qui lui évite le choc de la concurrence et lui permet de conserver son autonomie et ses particularités. Il a été créé en février 2004 par des étudiants qui sont aujourd’hui les dirigeants d’une puissante entreprise. Pourtant, malgré ce succès et la valorisation de l’entreprise, il manque toujours la localisation dans différentes langues – le
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réseau ne parle qu’anglais américain –, l’identification n’est pas interopérable avec des passeports comme OpenID, et on lit même que Facebook n’a pas encore de modèle économique. Quel est l’objectif de cette machinerie ? À quoi et à qui cela sert-il ? La bonne réponse est-elle : aux membres du réseau ? Avec sa présence au top 10 mondial, où est encore la justification du caractère fermé de ce réseau ? Le plus prégnant avec Facebook, c’est sa croissance basée sur une dynamique virale. La possibilité de pouvoir ajouter des applications en les plaçant dans sa page personnelle les rend accessibles à toutes ses relations qui peuvent alors être tentées de l’essayer à leur tour. Et puisque le nombre des applications ne cesse de croître, on pourrait penser que l’utilisateur membre n’a plus besoin de sortir du réseau. Est-ce une toile d’araignée ? Gardons l’œil sur le développement de ce réseau viral. Sait-on combien de collaborateurs de l’entreprise en sont membres ou quelle est l’empreinte de l’entreprise dans ce réseau ?
Figure 16 : http://appengine.google.com/
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Atelier 2.0 et Saas : Google App Engine
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Lancé en avril 2008, Google App Engine est un atelier de développement en langage Python qui intègre la mise ligne des applications développées et leur hébergement. Les outils destinés aux développeurs sont fournis gratuitement, il suffit de les télécharger et de les installer. Ce sont Python, puis Google App Engine. Le développement se fait en chargeant le code Python sur Google. On fait alors évoluer l’application à l’aide de Google App Engine. Le service est gratuit dans un premier temps et comprend des limitations : la taille des applications ne peut pas dépasser plus de 500 mégaoctets, ni plus de cinq millions de pages vues par mois et bien sûr les applications doivent être écrites en Python (Google a recruté l’inventeur de ce langage). Après la période de prévisualisation, Google commercialisera ses services. Les applications sont exécutées sur une infrastructure dédiée par Google à cette offre de service. Une galerie permet d’accéder à tout un ensemble d’exemples, des vidéos permettent de se former. Le site sera localisé dans plusieurs langues. Mais qui va développer avec cet atelier ? Pour quel besoin ? Et quelle est la stratégie de Google ? Il est encore trop tôt pour répondre. Google n’en est pas à sa première innovation. Observons avec un peu de recul. Vers 2002, le fait de fournir des logiciels s’exécutant dans le Web, le modèle SaaS (Software as a Service), vient concurrencer et peu à peu remplacer les ASP. Aujourd’hui, apparaissent les DasS (Development as a Service) et le PasS (Platform as a Service). C’est au développement du projet Web 2.0 que nous sommes amenés à repenser. Quel est le modèle des futurs développements de l’entreprise ? Aura-t-on encore besoin de serveurs au sein de l’entreprise ? Comment les offres d’hébergement actuelles vont-elles évoluer ? L’entreprise est-elle prête pour repenser de fond en comble ses relations à l’outil informatique ?
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Le point commun Chaque exemple est un projet Web 2.0 qui a été réalisé et connaît le succès. Le développement de plusieurs de ces sites a débuté avant 2004, c’est-à-dire avant qu’on commence à parler du Web 2.0. Pourtant, quand on les observe aujourd’hui, il est indéniable qu’ils font
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bien partie du deuxième Web. Ceci montre bien que lorsqu’on a commencé à utiliser cette dénomination, elle correspondait à un phénomène déjà nettement repérable. Tous ces exemples prouvent combien le Web initial s’est ouvert à de nouvelles possibilités et manifeste par son dynamisme que ce n’est qu’un début dont personne ne peut prédire l’issue. Les utilisateurs ont su se saisir de ses potentialités et par une fréquente utilisation en faire un usage qui peu à peu s’est concrétisé en outil. Cet outil ne s’est pas figé, il évolue, se modifie, s’améliore ou disparaît au bénéfice d’un autre, de façon flexible, au gré de l’utilité qui lui est reconnue.
Si on décompose les usages mis en œuvre dans cet exemple, nous repérons la mémorisation, la structuration, la catégorisation, la séparation, la conservation, le téléchargement, l’accès, le partage. Partout, le point commun est l’utilisateur, il est l’acteur, le sujet de toutes ces actions. Pour les objets, il y en a de plus en plus : l’e-mail, la photo, le raccourci, le calendrier, la structure, le document, l’application, l’identité etc. Avec tous ces ingrédients, le Web ouvre sur toutes sortes d’applications existantes ou à inventer. Gageons que sous la pression de ses utilisateurs, le Web 2.0 nous garde de développer l’inutile, c’est-à-dire ce qui ne sert pas un usage.
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L’histoire de la page favorite redit bien tout ce cheminement. Très tôt, dès ses premières heures de navigation, l’utilisateur a mémorisé des signets dans son navigateur. Devant leur nombre croissant, il a cherché à les ranger, à trouver une structure hiérarchisée et personnelle qui correspond à sa façon de catégoriser. Chaque fois qu’il changeait de navigateur ou de système d’exploitation, au mieux il était obligé de transférer cette arborescence, mais souvent il devait la reconstituer, car elle était perdue. Il a alors eu l’idée de la conserver indépendamment du navigateur. Puis, quand il a été continûment connecté, il lui a donné l’ubiquité en la plaçant dans le Web, quelque part. Voulant la partager avec ses collègues, il l’a publiée. Qui aurait pu prédire une telle série d’outils pour manipuler ce qui, au départ, n’est qu’une adresse ?
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FONDER LE WEB 2.0 Pour bien construire le projet Web 2.0, il en va comme d’un édifice. On commence par les bases qu’on assoie sur un sol ferme. Pour que ces bases garantissent à la construction sa stabilité, elles doivent avoir des fondements profonds. Ces fondations doivent pouvoir s’énoncer clairement car chacun aura à s’y référer tout au long du projet. « Montre-moi ton Web, je te dirai qui tu es ! »
Participer, partager L’identité numérique Bien souvent, lorsque le nouveau collaborateur arrive, son identité numérique est déjà prête. Ce sont des identifiant(s) et mot(s) de passe pour accéder aux outils mis à sa disposition par l’entreprise : ordinateur, Intranet, Internet, applications, etc. Pour communiquer, il reçoit encore des numéros de téléphone, de fax et un e-mail. Nous sommes encore loin d’une identité numérique unique. Dans le monde 2.0, la création d'une telle identité unique est désormais possible avec une sorte de passeport numérique (Open ID ou Open Social). Ce dernier permet de s'enregistrer sur les sites qui reconnaissent ces passeports avec le même nom d'utilisateur et le même mot de passe. L’utilisateur y retrouve son profil. Pour y parvenir, beaucoup parmi les grands noms du Web se sont associés au sein de l’OpenID foundation.
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L’entreprise doit-elle délivrer son propre système d’identité numérique ou peut-elle s’appuyer sur l’OpenID ? Il est trop tôt pour statuer. La question mérite d’être débattue.
L’empreinte numérique Participer et partager se font en nom propre ou au nom d’un autre ou d’une entité. Avec Internet, l’identité est devenue numérique. Lorsque l’on cherche à connaître la notoriété de l’entreprise, le geste réflexe consiste à saisir son nom dans les moteurs de recherche Internet et à analyser les résultats. C’est tout à fait radical tant il est vrai qu’Internet est devenu la véritable source d’information dans notre société. Ce reflet obtenu est ce qu’on appelle l’empreinte
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numérique ; elle représente l’identité numérique perçue par les utilisateurs. Le projet Web 2.0 de l’entreprise est très dépendant de l’empreinte numérique. D’un côté, l’empreinte existante est un sillon qui guidera vers les nouveaux services offerts. De l’autre, ces services auront un impact sur l’identité. Tout projet Web 2.0 doit prendre en compte sérieusement son couplage avec l’identité numérique de l’entreprise.
L’évolution des services autour des communautés virtuelles Messagerie instantanée, wikis, blogs, réseaux sociaux, téléphonie, web-conférence, etc., et bien sûr nous en oublions. Ces services permettent de participer et de partager. Une équipe du laboratoire Sense d’Orange Labs s’est intéressée au fonctionnement des sites du Web 2.0 mettant en œuvre une démarche relationnelle forte. Elle a établi un ensemble de caractéristiques génériques qui se retrouvent régulièrement dans les sites, mais qui, contrairement à ce que l’on pourrait croire, ne valorisent pas un esprit communautaire.
Le crowdsourcing La conviction centrale du Web 2.0 est que, lorsque le nombre d’utilisateurs s’accroît, les services rendus s'améliorent de facto. Chacun contribue à l’édifice non pas isolément mais dans une modalité participative qui favorise les corrections éventuelles. Le crowdsourcing est une modalité de la participation et du partage du deuxième Web. La foule des utilisateurs délivre des informations, elle en fait bénéficier tous les autres. Organiser et outiller : le crowdsourcing est un moyen mis en œuvre dans les projets Web 2.0 qui cherchent à capter un sourcing généralement à bon compte.
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La question sous-jacente demeure celle de la contribution au bien commun à partir des intérêts de chacun. Le débat est philosophique, mais aussi intéressant qu’il soit, cet ouvrage n’a pas vocation à le traiter. Notons toujours que c’est sur la force des coopérations faibles que s’articule la synthèse du laboratoire.
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L’intelligence collective Avant, il y avait les utilisateurs et le système. Aujourd’hui, le modèle s’est un peu complexifié. Il y a l’utilisateur, les communautés et le Web. Et le Web a dépassé ses limites initiales, celles qui ne voyaient en lui qu’une vaste bibliothèque de tous les savoirs. Sous le terme d’intelligence collective ou d’intelligence des foules, dont le journaliste et blogueur Francis Pisani a fait le titre d’un livre, se trouve l’entité collective, vue comme un tout homogène, qui participe au Web avec une pertinence alignée en proportion sur le nombre de ses membres. Le terme de membre est toutefois impropre, car il n’y a ni association, ni règlement intérieur d’aucune sorte. Il s’agit d’une émanation opportune du Web qui se fait et se défait selon une électivité sans engagement. C’est l’image du ban de poissons qui semble être lui-même un poisson que l’arrivée du moindre requin peut disperser. Il s’agit d’une nouvelle éthique de la coopération. Le service à rendre opère à la façon d’un intermédiaire intelligent entre les membres eux-mêmes.
Une contribution libre C’est la majeure différence entre le modèle wiki et les solutions de gestion de connaissance précédentes. Fini les gestions de droits compliquées des solutions de knowledge management. La confiance est plus volontiers accordée aux utilisateurs. Dans le monde du Web 2.0, l’utilisateur bénéficie d’un a priori positif.
Faire primer l’usage
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La simplicité L’usage est d’autant favorisé qu’il est simple à acquérir, à reproduire à transmettre. Ce truisme est une donnée fondatrice du Web 2.0. Il faut encore ajouter d’autres attentes en termes de simplicité. Le Web 2.0 proposant pléthore d’outils, leur repérage et leur adoption dépendent de la simple équation : un outil = un usage. La personnalisation Le « poste de travail » est le nom emblématique d’un projet que l’on retrouve dans presque toutes les entreprises. C’est celui qui s’atta-
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che à définir et à mettre à disposition de tous les membres de l’entreprise un poste de travail complet, sécurisé et maîtrisé économiquement. Tous les collaborateurs sont dotés alors d’un poste standard, le même pour tous, mais dont l’évolution est lente et trop souvent complètement en retard par rapport aux versions du commerce. L’usage domestique des PC est à ce titre souvent particulièrement avant-gardiste par rapport à celui de l’entreprise. Combien de fois les parents sont-ils dépassés par ce que leurs enfants leur montrent le soir, après le bureau ? Avec le Web 2.0, le projet « poste de travail » prend une tournure nouvelle et tout à fait intéressante. En effet, il existe aujourd’hui une offre nombreuse de solutions Web qui constituent une alternative à quantité de logiciels que l’on trouve dans les postes de travail standard : des solutions bureautiques (traitement de texte, tableau, présentation) sont disponibles librement sur Internet, les messageries en mode Web sont nombreuses, les serveurs de fichiers ont aussi leur équivalent Web, etc. Pour faire simple, il est désormais possible, et vraiment avantageux, de concevoir un poste de travail sur la base d’un PC standard, voire low cost, pourvu d’un navigateur et d’un accès Internet. Le contenu du poste de travail se limite alors à une liste de favoris enregistrés dans le navigateur Internet.
La confiance Le Web 2.0 permet de proposer de nouveaux usages, d’offrir une meilleure place à l’utilisateur. En leur donnant la possibilité de créer des contenus originaux, l’entreprise fait preuve de confiance envers ses collaborateurs. Ce sont de telles conditions confortables qui siéent au bon développement de l’entreprise.
Une ergonomie efficace car adaptée au propos du site Faire un maximum d’effet pour un minimum de gestes : le registre des possibles en ergonomie est aujourd’hui très vaste. Certains sites ont développé un modèle ergonomique qui est en quelque sorte leur signature. Avec le Web 2.0, la tendance est au confort de l’utilisateur et à la convivialité.
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Relier, interfacer
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L’interface est personnalisable, les blocs qui composent la page peuvent être déplacés, le thème visuel peut être changé, les déficients visuels peuvent espérer une ergonomie adaptée, la souris est devenue la fidèle compagne des navigations au long court comme des petites traversées.
La convergence texte et voix La convergence des messages, écrits ou vocaux, issus de différentes sources vers un seul serveur accessible à tout type de terminal (ordinateur, téléphone, mobile, PDA) est rendue possible par les progrès des technologies de synthèse vocale, de vocalisation et de compréhension du langage naturel. Il est devenu possible d’utiliser un ordinateur en lieu et place d’un téléphone ou même d’un visiophone. Cette convergence représente aussi un grand espoir pour les personnes souffrant d’une grave déficience visuelle. Un visuel dépouillé Fini les pages multicolores et encombrées qu’on rencontrait dans tant de sites Web 1.0. Il faut dire que lorsque la présentation de quelques informations supplémentaires sur une page coûtait le chargement de toute la page, les sites « à l’ancienne » préféraient tout charger en espérant ne rien oublier.
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Le Web se tournant vers l’usage, la prime est à la lisibilité de celuici. La tendance marketing des pages à la mode Web 2.0 va donc vers la sobriété. Les moteurs de recherche ont intégré cette nouvelle donne. Par exemple, Google prend en compte depuis peu le temps d’affichage des pages dans son calcul de classement des résultats. Ce « Quality Score » sert aussi à calculer le prix des publicités. Plus les pages sont lentes, plus le prix est élevé.
Enrichir les interfaces utilisateur Enrichir ne signifie pas encombrer. Il ne s’agit pas d’ajouter à la page, mais les éléments qui s’y trouvent déjà peuvent constituer le support d’une nouvelle interactivité. Par exemple, le niveau obtenu équivaut à l’interface d’un PC classique pour les suites collaboratives du Web 2.0. Ces dernières ont bâti leur succès sur cette richesse fonctionnelle ; il n’était pas pensable d’attirer le chaland autrement. Depuis peu, l’apparition de système d’exploitation fonctionnant
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dans un navigateur Internet démontre à quel point l’interface s’est encore enrichie, par exemple avec eyeOS1.
L’interopérabilité plus poussée Sans interopérabilité, il n’y aurait pas de Web 2.0. Elle est intrinsèquement constitutive à plusieurs niveaux et cela s’étend progressivement encore à d’autres domaines que ceux déjà couverts. Citons quelques exemples : • pour les données : flux RSS, portabilité, formats standardisés, ouverture ; • pour les API : ouverture, publication, utilisation de standards ; • pour les identités numériques : les passeports OpenID. Pourtant, il reste encore beaucoup à faire puisque les Web services ne sont toujours pas normalisés.
Ouvrir les données Ouvrir les données des sites ou des applications Web signifie que ces données peuvent être importées ou exportées par des utilisateurs ou des traitements d'autres sites.
Le principe est simple, un peu comme le format PDF pour les documents bureautiques. Toute donnée stockée peut être vue comme un couple : la donnée elle-même et son format. S’il existe une équivalence entre ce format et RDF et que cette équivalence est disponible, alors SPARQL peut accéder à la donnée. 1. http://eyeos.org/fr/
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Les interrogations SPARQL SPARQL est un standard du W3C pour l'ouverture des données qui permet de s’engager sur la piste du Web sémantique. Le niveau d'abstraction d’une interrogation SPARQL est élevé, c’est un langage et un protocole destiné à interroger les données en RDF (un format normalisé). Les utilisateurs se concentrent sur leur recherche et non sur la représentation des données ou leur structure. La requête doit même pouvoir fonctionner avec des sources de données imprévues.
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Un pas vers la normalisation des Web services Il existe de plus en plus de Web services et ne faut pas s’en plaindre. Mais ils ne sont pas normalisés. Il est donc indispensable de connaître les méthodes du Web service et sa structure des données pour pouvoir l’utiliser et interroger ses données. Dans le cas des entrepôts de données exposés en RDF, le langage de requêtes et le protocole sont uniques. Il s’agit de SPARQL. Les flux RSS et Atom Pour les outils du Web 2.0, comme les blogs ou les wikis, l’ouverture des données ne fait pas problème puisqu’en standard ils intègrent la production et l’exposition de flux Atom ou RSS.
Gagner en performance La performance s’exprime dans deux espaces. Le premier est éminemment technique et répond aux questions de la puissance des serveurs, de l’efficacité du code, de la capacité des canaux etc. Le second est fonctionnel et même marketing. Il rend compte de l’atteinte des objectifs visés par les développements engagés. Par exemple, si l’audience cible est atteinte, le modèle économique peut être valide ; si les utilisateurs utilisent le wiki qui a été mis à leur disposition, alors la valeur du contenu informationnel du catalogue s’enrichit ; etc. Dans ce livre, nous ne traitons pas spécifiquement de la dimension technique de la performance du projet Web 2.0. Elle appartient plus à des ouvrages spécialisés en architecture. Nous abordons la performance sous son angle plus particulièrement Web 2.0, c’est-à-dire celui des usages et de la qualité de services.
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Les classiques Parce que le projet Web 2.0 renvoie mécaniquement à ce que l’on sait faire au niveau du Web, la tentation est grande de répondre avec les mêmes dispositifs, avec les mêmes réflexes que ceux du Web 1.0. Souvent, nous voyons des mesures d’audience comptabiliser des clics, les pages vues, la durée de visite, etc. Il ne faut pas s’en débarrasser, mais il est urgent de pousser plus avant la réflexion pour lire dans les statistiques non plus seulement que les serveurs ont tenu la
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charge ou que la base de données est bien dimensionnée. On s’intéressera plus à des données comme le taux de conversion, des corrélations, l’analyse en composantes principales.
La mesure 2.0 Dans le paradigme du Web 2.0, lorsque l’on se demande pourquoi on mesure, la réponse n’est pas de s’assurer que l’infrastructure est bien calée. La visée est tournée vers les utilisateurs. A-t-on répondu à la promesse qui leur a été faite ? Parmi les outils de métrologie disponibles, l’enquête de satisfaction et la « gap analysis » (analyse des écarts) sont tout à fait indiquées. Passage du « pull » au « push » Le premier Web a été fondé sur le modèle de l’information mise à disposition dans l’attente qu’un navigateur la tire à lui. Ce mode « pull » résultait du fait que les technologies ne permettaient pas de pousser de l’information vers les utilisateurs à un coût admissible par les entreprises. Avec AJAX, l’une des composantes techniques du Web 2.0, le rafraîchissement de l’information n’est plus calé sur la page, mais sur une fraction de celle-ci. En même temps, la vitesse et la capacité des réseaux ont augmenté de façon remarquable et à un prix très attractif. Les services d'informations peuvent désormais exploiter Internet pour diffuser de l’information : c’est le mode « push », avec le passage de l’asynchrone au synchrone.
Réduction de la bande passante Le temps de chargement des informations a diminué de façon très significative. L’utilisation d’AJAX permet de ne faire circuler que les données et non plus toute la page à chaque fois. Cela permet aussi d’imaginer des ergonomies nouvelles.
Réutilisabilité Les services développés selon le modèle du Web 2.0 sont conçus pour être réutilisables seuls ou avec d’autres pour pouvoir être composés et former des applications composites (mashup). La tendance est donc au développement réalisé à des niveaux d’abstraction élevés, à l’utilisation de plate-forme de développement, à l’expo-
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Développer autrement
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sition des services, au recours au maximum de standard. Tout doit être fait pour que les obstacles à la réutilisation soient minimums. Mais il ne faut pas se bercer d’illusion. Sans hygiène de développement, il y a beaucoup de vanité dans le discours.
Le Web comme plate-forme La formule est désormais consacrée. Rappelons tout de même en quelques mots de quoi il en retourne. Si l’on reprend la définition donnée par WordNet1 d’une plate-forme, nous avons la combinaison d’un type d’ordinateur (matériel, hardware) et d’un système d’exploitation (logiciel, software) qui permet à des applications de fonctionner. Le deuxième Web est donc bien une plate-forme puisque quantité d’applications et de services y sont utilisés. Des développements affranchis Puisque les services et les applications s’exécutent désormais sur cette plate-forme, le hardware importe peu, pourvu qu’il offre un navigateur. La fin des cycles de développement : le développement continu « Nous mettons deux ou trois nouvelles fonctionnalités quelque part sur le site chaque jour, si elles ne sont pas utilisées, nous les retirons. Si elles sont appréciées, nous les implémentons partout ailleurs sur le site », a expliqué en 2008 le principal développeur de Flickr, en révélant qu’une nouvelle version était déployée toutes les demi-heures.
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Le développement d’un service ou d’une application Web 2.0 n’est jamais véritablement clos. Le souci de l’amélioration des usages et du service rendu fait qu’il n’y a plus de numéro de version. Le service ou l’application sont en version bêta. C’est aussi devenu un argument marketing. Attention toutefois, il ne faudrait pas que le statut permanent de version bêta rime avec un manque de sécurité inhérent aux développements incomplets.
Développement invisible Les développements faits pour le Web 2.0 sont composés de deux applications. La première est visible et est destinée aux utilisateurs. 1. http://wordnet.princeton.edu/
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La seconde est conçue pour analyser le comportement des utilisateurs et remonter ces informations vers le serveur. L'observation en temps réel du comportement des utilisateurs est indispensable pour savoir quelles sont les fonctionnalités utilisées.
SITUER LE WEB 2.0 Après avoir abordé le deuxième Web à l’aide d’exemples qui en manifestent incontestablement les usages, nous avons souligné les fondamentaux de ce Web qu’il nous faut maintenant situer dans le paysage de l’entreprise selon plusieurs axes.
Dans l’entreprise Le Web 2.0 n’est plus absent de l’entreprise. À ses débuts, très médiatisés, il intéressait un public averti et technophile, puis il s’est démocratisé auprès du grand public. En 2007, les études n’étaient pas très engageantes. L’éditeur BEA, un des premiers promoteurs du Web 2.0, avait fait une enquête auprès de 320 entreprises, réparties dans sept pays européens. Les technologies du Web 2.0 déjà utilisées ou identifiées pour être déployées en 2008 n’étaient pas encore perçues clairement comme créatrices de valeur.
Compréhension des bénéfices métiers
57 %
Sécurité
20 %
Régulation des contenus
10 %
20 %
30 %
40 %
50 %
60 %
Source BEA Systems Figure 17 : Principaux freins à l'introduction du Web 2.0 en 2007
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0%
23 %
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En 2008, le vent tourne et on sent plus qu’un frémissement dans les grandes entreprises et les séminaires succèdent aux formations. Le Web 2.0 entre dans l’entreprise et ce n’est pas pour répondre à une mode. Le mouvement est net. Le cabinet Forrester Research Inc.1 avance que les investissements des entreprises dans les technologies du Web 2.0 vont croître pendant les cinq prochaines années pour atteindre 4,6 milliards de dollars en 2013, soit une croissance de 43 % par an. Pour plus de la moitié des entreprises nord-américaines et européennes, les projets Web 2.0 représentent une priorité d’autant plus forte que l’entreprise est grande. Ainsi, les réseaux sociaux, les mashups, les flux RSS, les wikis, les blogs et les balados vont se développer fortement. Podcasting 273 Blogs 340 Résaux sociaux 1997 Widgets 340
Wikis 451
Flux 563 Mashups 682
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Figure 18 : Dépense prévue en 2013, par catégories 1. http://www.forrester.com/. Forrester Research Inc. est un cabinet qui analyse l'économie de l’Internet et de son impact sur la société et le monde des affaires. Il édite des rapports sur les tendances et les stratégies, au niveau des entreprises et des technologies.
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Le fait que les grandes entreprises soient plus promptes que les autres à se lancer dans les projets Web 2.0 est essentiellement lié à leur niveau d’information et d’investissement en formation et en innovation. Paradoxalement, ce sont les petites et moyennes entreprises qui ont le plus de chance de réussir le passage au deuxième Web.
À la direction informatique Le projet est-il du ressort de tel ou tel service, de telle ou telle direction ? Le débat, maintes fois entendu, a-t-il changé de nature parce que nous touchons au Web 2.0 ? Ce qui est sûr, c’est que l’utilisateur est au centre du projet. C’est à partir de ses usages, actuels ou futurs, que se focalise le débat. Qui est le plus à même de l’écouter, d’accompagner sa réflexion, de comprendre son métier, de réaliser les premières phases etc. ? L’équipe est pluridisciplinaire. Si nous prenons le découpage classique d’une direction informatique, les études s’intéressent aux innovations et doivent avoir un esprit de veille. Elles vont recueillir les besoins, le développement réalisera l’application et la production produira. Ce schéma n’est plus très opérant. L’écoute et une relation suivie avec les utilisateurs, ou plutôt les communautés d’utilisateurs, vont remplacer les rédactions de cahiers des charges et l’amorçage des cycles de vie de projet qui prennent un temps précieux. On ne peut éloigner l’utilisateur de la conception des outils ou des applications Web 2.0. On compte de plus en plus de façons de coopérer à toutes les phases. Le co-design et le co-développement ont déjà fait leurs preuves comme le montre par exemple la roue de Deming (voir p. 99).
La communication 2.0 La persistance de l’empreinte laissée dans le Web est telle que toute communication doit être absolument pensée, pesée et maîtrisée.
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La direction informatique pourra développer de nouvelles compétences comme celle d’animer des communautés, de les faire se rencontrer, d’accompagner le développement des réseaux sociaux, etc. Techniquement, les nouvelles architectures vont se développer de plus en plus avec l’extérieur ou carrément à l’extérieur. Les aspects contractuels seront importants à maîtriser dans nombre de dossiers.
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Devrait-on craindre un effet papillon ? Une information sans importance aujourd’hui, mais mémorisée dans le Web, ne risque-t-elle pas demain d’avoir une incidence néfaste pour l’entreprise ?
La communication externe Influence est le mot qui incarne le mieux le type de communication dans un monde Internet qui, par bien des aspects, suit un modèle de développement viral. Les médias y sont plus nombreux que jamais : blogs, wikis, chaînes télé Web, podcasts, etc., tout comme le bouche-à-oreille que permettent les réseaux sociaux. Une bonne communication peut maintenant s’organiser à l’aide de médias ou par des médiations. Les statistiques (source Nielsen « Trust in advertising », octobre 2007) sont intransigeantes : 14 % des consommateurs font confiance à la publicité alors qu’ils sont 78 % à se fier aux recommandations d’autres consommateurs. Nous savons bien que les médias dont peuvent se saisir les consommateurs sont ceux du deuxième Web. Pour augmenter la visibilité de l’entreprise et donc mieux exposer ses produits et services, la surface à investir est le Web. Et comme cette surface n’est pas uniforme, qu’elle connaît des grands boulevards comme des ruelles où personne ne passe, il faut augmenter le trafic de sites Internet, créer du buzz, défendre une image ou une réputation.
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Que la communication soit volontaire ou involontaire, elle dépend de sa visibilité, donc de son référencement, lequel n’est jamais un bien acquis. Il est tributaire des règles que fixent les moteurs de recherche et notamment les plus en vogue du moment, comme Google aujourd’hui. Ces règles sont un mélange de données techniques et commerciales que les communicants de l’entreprise doivent connaître.
La communication interne L'interactivité offerte par le Web 2.0 permet à la communication interne de l’entreprise de s’exprimer entre pairs ou de façon plus canonique par le canal de la direction de communication interne. L’entreprise peut autoriser des outils d'échanges comme sur Internet, mais aussi les refuser. Aujourd’hui, quelques grandes entreprises françaises s’y sont essayées. Pour les autres, on observe que le
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nombre des communautés non officielles de salariés ne fait que croître. On les retrouve dans Facebook, LinkedIn (près de 25 millions de professionnels interconnectés au moment de la parution de ce livre) et autres réseaux. Qu’est-ce qui est préférable pour l’entreprise ? Il est plus difficile de suivre, ne parlons même pas de contrôler, le mouvement sur des plates-formes extérieures que dans des applications internes. L'entreprise doit acquérir des compétences éditoriales et ouvrir sa communication interne. Alors elle maîtrisera, au moins territorialement, cette expression. Laisser les communautés extérieures se développer représente un risque, voire une menace. Permettre une expression interne, même débridée, évite à l’entreprise que le débat interne sorte sur la place publique et n’y laisse des traces.
Les agences Les agences de communication qui veulent rester dans le coup ont investi pour comprendre et anticiper les principes de l’intermédiation 2.0. Elles avaient déjà pris le tournant avec le e-marketing. Elles proposent différentes prestations. Ainsi, l’audit permet de prendre une photographie de la communication actuelle, de ses messages et des canaux empruntés. Le conseil stratégique, lui, définit une cible atteignable à partir de la situation actuelle en optimisant les étapes à franchir pour y parvenir. Enfin, les plans d’actions offrent une gamme très large. Celle-ci va des prestations de conseil ciblées à la conception de médias internes ou externes, et serait incomplète sans des préconisations pour une bonne évaluation des résultats obtenus pour adapter le plan de communication à l’actualité de l’entreprise et de son milieu écologique.
La gratuité est la partie visible du modèle économique du Web 2.0. L’entreprise y gagne un visage sympathique, car elle offre ses services à ses clients utilisateurs. Ce n’est pas la logique du cadeau offert en plus d’un produit acheté, à la façon des cadeaux publicitaires qui accompagnaient les paquets de lessive dans les années 1970. Ici, le service offert est le produit lui-même. Il est de qualité professionnelle et accomplit un travail efficace et gratifiant. Le client utilisateur
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Le modèle économique
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peut parfaitement se satisfaire de ces services, il n’a nul besoin d’en chercher d’autres. L’entreprise atteint ainsi l’un de ses objectifs : augmenter le nombre des utilisateurs de ses produits. Il faut alors passer à la réalisation d’un autre objectif : se faire payer. Car l’entreprise doit, comme toutes les autres, faire face aux réalités de ce monde. Elle doit payer son personnel, ses fournisseurs, ses impôts, etc. Où trouve-t-elle les moyens de sa politique constituée de largesses ?
Les services pro Cette première stratégie s’applique bien aux entreprises qui offrent une ligne de services gradués. Les premiers sont offerts gratuitement. Les services plus haut de gamme, généralement ceux que l’on désigne par l’expression « services pro », sont en revanche commercialisés. C’est ce que font par exemple, Flickr, Meetic et quantité de sites à compte « premium ». Le commissionnement Lorsque l’entreprise prend le rôle d’un intermédiaire et organise le rencontre entre l’offre et la demande, elle peut prélever une commission sur les transactions initiées. Ce dispositif est celui par exemple des places de marché, des sites d’enchères en ligne, des librairies d’occasion en ligne.
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Le revenu étant composé de la somme des commissions perçues, celles-ci pourront être d’autant plus faibles que le nombre des ventes réalisées sera important. La commission sera alors un vrai facteur d’attraction vers ce modèle de vente dont le principe paradigmatique est celui désormais communément appelé maintenant « longue traîne » (en anglais long tail). Ce modèle est présenté plus loin dans ce livre.
Le troc explicite La démarche consiste à mettre en ligne une première version non définitive du service opérationnel, présentée comme une version bêta. L’utilisateur y est invité gracieusement. En échange, il accepte d’aider le site et de lui donner par exemple un accès aux traces de son utilisation, ses coordonnées, celles de personnes à qui il veut faire connaître ces services, etc. Ce que l’utilisateur donne peut avoir de la valeur pour lui ou lui sembler tout à fait anodin. Cela
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peut être en rapport avec le développement du service ou le développement commercial de l’entreprise. L’important est de proposer un dispositif gagnant/gagnant.
Le don Les associations ou les fondations ont majoritairement recours à ce mode de rémunération. L’utilisateur est libre de choisir le montant de ce qu’il verse. Il a le sentiment de contribuer au projet de l’association ou de la fondation, mais non de payer l’utilisation d’un service. Cette modalité joue dans le registre communautaire. L’exemple est le plus connu est le projet encyclopédique Wikipédia. La publicité Mais la principale solution, et aussi la première à avoir été mise en œuvre, consiste à attirer du trafic et à le valoriser par des revenus publicitaires, fonction du nombre de pages vues et du temps passé par les visiteurs. Le revenu peut être direct lorsque l’entreprise loue elle-même de l’espace publicitaire sur son site. Il peut aussi être indirect lorsqu’elle place des liens vers des sites qui reversent une commission.
On voit bien que toutes ces solutions ne peuvent s’appliquer partout. Un projet Web 2.0 doit inclure une phase d’analyse de son modèle économique sous-jacent afin de choisir parmi les différentes méthodes de rémunération. Lorsque l’entreprise met en œuvre sa stratégie de rémunération, elle doit lui adjoindre un dispositif
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Les façons de mettre en place de publicité sont assez variées. La plus répandue consiste à afficher des bandeaux que des régies publicitaires rétribuent au CPM (coût par mille affichages). Si le type de bandeau à afficher peut être déduit de la connaissance de l’utilisateur, un ciblage peut améliorer la portée du message publicitaire. Pour les sites à très forte audience, c’est un modèle de bon rapport. En revanche, lorsque l’on dispose d’une petite audience, il faut chercher une autre voie. Par exemple, on peut passer un contrat avec une agence qui agit pour le compte d’un grand nombre de sites et recrée ainsi une grande audience. L’agence place les contenus confiés dans l’ensemble des sites ou dans une partie ciblée. Nous n’avons pas épuisé ce sujet où l’innovation est féconde. L’idée est toujours la même : atteindre une dimension suffisante.
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d’accompagnement afin de l’améliorer, voire la corriger. À ces réglages qui suivent le lancement, il faut encore ajouter une réévaluation périodique du modèle. En effet, un bon site est vivant, ses usages et son audience évoluent et entraînent des déplacements qui imposent des recalages. L’entreprise doit travailler avec efficacité et cohérence sur ses produits propres et sur son modèle économique. Ces deux axes peuvent déformer la vision que l’on aura de l’entreprise. Par exemple, on peut se demander si Google est une agence de publicité ou une société informatique. La réponse est bien sûr : les deux.
La longue traîne La longue traîne est, au départ, une loi mathématique qui permet de rendre compte du phénomène suivant : la demande pour un bien décroît en fonction de son rang de classement dans la demande globale. Cette fonction suit une loi exponentielle décroissante. Si l’on divise l’aire totale de la courbe de cette exponentielle décroissante en deux aires égales, elle a pour abscisse un point proche de l’origine.
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Figure 19 : La longue traîne
C’est en 2004, en recourant à cette loi, que Jeff Bezos, le créateur d’Amazon, a décrit le modèle économique qui porte depuis le nom de « longue traîne ». Il expliquait le potentiel de toutes les niches de produits qui n’étaient jusqu’alors (avant Internet) que peu ou pas
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profitable. Jeff Bezos n’y est pas arrivé par hasard. En effet, on se souvient qu’Amazon.com a longtemps perdu de l’argent puisqu’il faisait des investissements importants et que chaque vente semblait se faire à perte. Il s’agissait d’une politique délibérée qui aujourd’hui a montré sa pertinence. En réalisant moyennement ou peu de ventes sur un très grand nombre de références, on a la même espérance de gain qu’en faisant de très gros volumes de vente sur un petit nombre de références.
Les limites du Web 2.0 À l’aube de l’ère 2.0, plusieurs blogueurs se sont intéressés aux frontières du nouveau continent internet. Parmi les facteurs identifiés comme limitant le Web 2.0, il s’en distingue de deux natures que nous proposons de parcourir et de discuter.
Les limites d’usage L’isolement communautaire Lorsque les communautés se forment, elles peuvent être tentées par une forme de cloisonnement et d’imposer un processus d’adhésion à leurs visiteurs, même de façon rudimentaire. Cette tendance peut produire des communautés aux visées très voisines, mais dont le rapprochement, pour l’utilisateur, sera fastidieux. Les membres respectifs de ces espaces n’aspirent-ils pas à partager ce qui fonde leur communauté ? Pour autant, que l’une d’elle souhaite réduire ses accès à ses seuls adhérents est tout à fait compréhensible. Il y a de la place pour tout le monde. Mais si la définition de la communauté ne prend en compte que ce qu’elle partage, il existe un risque de ne pas s’entendre avec ceux qui y ajoutent les modalités de l’appartenance.
La surproduction Avec la facilité de publication offerte par le deuxième Web, la quantité de contenus disponibles d’un clic s’est démultipliée. Dans ce mouvement, il faut observer que le nombre de sources s’est aussi
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Quel que soit le bord dont on se réclame, n’y aurait-il pas un service utile pour tous et capable d’indiquer les communautés présentant un ensemble de points communs ?
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accru dans les mêmes proportions. Cela nous donne donc un grand foisonnement qui impose actuellement de nouvelles stratégies de recherche pour s’y retrouver, mais aussi un effort de référencement encore plus soutenu. Certains prédisent que de nouveaux outils sauront prendre place ici. Les moteurs de recherche ont déjà évolué pour offrir par exemple des recherches spécifiques dans les blogs. Les nuages de tag constituent aussi une réponse pour retrouver un peu de pertinence, mais il faut pour cela que le créateur de contenu étiquette sa production. Ces nouveaux gestes ne sont pas immédiats. Paresse ou incompétence, cela nous interroge ici aussi sur la possibilité qu’aurait la technique de prendre le relais. Moins de lecture Plusieurs indicateurs convergent. Le temps moyen de lecture d’une page Web baisse, le nombre moyen de lecteurs pour une page aussi. Faut-il s’en alarmer alors qu’il n’y a pas moins de lecteurs, au contraire même ? Beaucoup d’internautes se sont mis à écrire et nous observons la surproduction décrite juste ci-dessus. La technique ayant rendu le geste beaucoup plus facile, on pourrait être tenté de croire que la publication de contenu soit maintenant à la portée de chacun. Il n’en est rien. Cherchons plutôt à comprendre quelles différences se présentent entre un contenu déposé et un contenu publié. Puisque l’objectif de toute publication est de trouver des lecteurs, il faut dépasser le simple dépôt de contenu.
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La publication intègre tout un travail soigné sur le titre, les métadonnées, les mots clés, les tags, les liens vers des contenus connexes, etc. Il y a une différence entre la bouteille jetée à la mer et la lettre mise dans une enveloppe et postée. Puisque le deuxième Web est celui des communautés, publier revient à s’adresser explicitement à elles, d’où émaneront les commentaires des lecteurs. L’indice de confiance Cette limite est un corollaire des deux précédentes. Le Web 2.0 a permis que le nombre des sources augmente de façon galopante. Et dans ce galop effréné, qu’en est-il de leur validité ? A-t-on encore le temps de vérifier ses sources ? Cette question se posait déjà avec le premier Web.
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Mais aujourd’hui, c’est la réponse qui change. Précédemment, l’auteur était la caution de ses écrits. Maintenant, « la foule est porteuse de sagesse », selon les mots de Tim O’Reilly. Le contenu est d’autant plus crédible qu’il aura été lu et commenté par un plus grand nombre de personnes. Les auteurs sont ainsi sanctionnés ou portés aux nues par la « foule ». Après tout, c’est un signe de maturité. En littérature, les grands écrivains ne sont-ils pas généralement les plus lus ? Et leur succès n’est pas venu d’un livre apprécié du plus grand nombre. La faible participation En 2007, un certain nombre d’études ont jeté un froid. Et l’on a pu lire un peu partout : « La “règle des 1 %”, qui prévaut jusqu’à présent dans plusieurs études sur les usages des services du Web 2.0, dit que les deux tiers des contenus proviennent seulement d’1 % des utilisateurs actifs. » On pouvait lire une autre règle, très proche de celle de Jakob Nielsen, qui promet que sur 90 lecteurs, neuf commenteront un contenu et un seul publiera. Depuis, des analyses très attentives classent les services et les usages du Web 2.0 qui suscitent le plus d’intérêt chez les utilisateurs, comme cette analyse réalisée fin 2006 par Forrester Research Inc. sur les activités des consommateurs pendant une période d’un mois.
Les limites techniques
Un certain immobilisme technologique Le socle technique sur lequel reposent les développements Internet a peu changé avec l’arrivée du Web 2.0. Tout le monde le reconnaît. Ne serait-ce pas une limite tacite que chacun de nous accepte ? Et si la technologie avait fait plus de progrès, où en serions-nous à ce
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Le manque d’interopérabilité Les applications composites ou mashup ne sont concevables que si les services de base à mixer peuvent être appelés selon le bon protocole. À ce jour, il n’existe pas encore de standard universel. Les développeurs de mashup le savent, ils ont souvent à s’affranchir du mur de l’interopérabilité. Peu à peu, des solutions sont trouvées, testées et éprouvées. Il émerge de facto des principes pour faciliter la réutilisation. Espérons que l’on passe rapidement du temps du bricolage à celui de l’industrialisation.
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Figure 20 : Échelle d'implication1
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jour ? Le Web sémantique serait-il à portée de main ? Nous aurions des outils propres à manipuler les ontologies et pas uniquement quelques tags. Des services permettraient-ils de jeter des liens automatiquement et avec pertinence entre des contenus similaires ou des services interopérables ?1 Des technologies trop gourmandes Lorsqu’un site est jugé comme d’un usage non professionnel par l’entreprise et que de surcroît il génère trop de trafic, il peut alors être mis au ban du réseau. S’il s’agit de refuser aux collaborateurs de l’entreprise l’accès à un site à très forte audience, il faut tout de
1. http://blogs.forrester.com/charleneli/2007/04/forresters_new_.html
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même y réfléchir à deux fois. Par exemple, l’arrivée de Facebook a suscité deux attitudes diamétralement opposées. Certaines entreprises ont compris tout l’intérêt que leurs collaborateurs pouvaient tirer d’un tel réseau, tandis que d’autres en ont bloqué tout accès. Avec plusieurs millions de comptes créés, les grands réseaux sociaux sont devenus incontournables, y compris dans la sphère professionnelle. C’est peut-être même à ce niveau que les réseaux sociaux vont s’avérer particulièrement utiles, car les clients, les fournisseurs, les partenaires, etc., toutes les parties prenantes de l’entreprise peuvent s’y rencontrer. Si les blocages n’étaient justifiés que par un souci de performance pure, une volonté de ne pas consommer toute la bande passante du réseau, on refuserait l’accès au moteur de recherche Google. Or ce n’est pas le cas. Ce sont donc bien les réseaux sociaux qui sont l’objet de cette incompréhension… d’un autre âge. Des infrastructures concentrées Idéalement, le Web repose techniquement sur une logique ouverte à toutes les possibilités, à toutes les expérimentations, à toutes les innovations. Les offres y sont multiples et la concurrence joue un rôle déterminant qui profite à tous les acteurs. Toutefois, lorsque certaines offres techniques demandent des infrastructures très onéreuses, il peut y avoir des déformations dans le modèle idyllique de l’Internet démocratique, celui où chacun peut participer sans demander la permission à quiconque.
Des boîtes à outils dispersées Les progiciels de traitement de texte, de feuilles de calcul ou de données possèdent tous des taux de maîtrise très faible. Personne, même parfaitement formé à ses outils, n’en utilise toutes les fonc1. http://joi.ito.com/weblog/2008/05/23/is-mobile-inter.html
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Le blogueur japonais Joi Ito1 a écrit un post très intéressant dans lequel il explique que les intérêts des grands groupes qui opèrent ces concentrations ne nécessitent pas la libre compétition et ses innovations. Les technologies qu’ils mettent en œuvre sont plutôt fermées et leurs mécanismes d’utilisation sont bien réglés. Ils conçoivent ou orientent les usages.
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tionnalités. Communément, on évoque un pourcentage d’utilisation n’excédant pas 5 %. Si on essaie d’imaginer ce que pourrait être le taux de maîtrise du Web 2.0, il ne devrait pas être loin de 0 %. En effet, le nombre d’outils a véritablement explosé. De surcroît, ils semblent ne jamais être finalisés puisqu’ils arborent crânement leur version bêta. Les utilisateurs livrés au Web 2.0 zappent d’un outil à l’autre, souvent en fonction du buzz, c’est-à-dire du qu’en dira-t-on social. Lorsque la boîte à outils est dispersée, comment travailler ? Est-il indifférent qu’on change d’outils ? Pour trouver des outils, les utilisateurs ont recours à des moteurs de recherche – certains sont même spécialisés. Ils cherchent aussi par d’autres voies, comme celle des réseaux sociaux. Quand un outil les satisfait, ils le placent parmi leurs favoris et le font savoir en partageant leurs signets. Le Web 2.0 ne répond pas bien à la question de la structuration de la boîte à outils. Pour que ce ne soit pas à l’utilisateur de se débrouiller, le service informatique va devoir proposer des bouquets de service, référencer ce qui marche vraiment, publier une information spécifique, développer des mashups, mener une veille sur les nouveautés. On sait déjà qu’il ne s’acquittera bien de cette tâche qu’avec le concours des utilisateurs.
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La sécurité des données Où sont stockées les données manipulées par les outils du Web 2.0 ? Qui y a accès et comment ? Ces questions ne sont pas les premières que l’on se pose. Pourtant, il faudrait. Par exemple, les documents créés par les suites collaboratives de Google sont stockés sous forme de fichiers conservés sur leurs serveurs. Leur sécurité n’est absolument pas maîtrisée par l’utilisateur. Quelle garantie a-t-on de retrouver ses données le lendemain ? Le monde du Web étant féroce avec les start-ups, plusieurs d’entre elles ont disparu plus ou moins rapidement. Les données dont elles avaient la charge ont-elles été restituées à leur propriétaire ? Étaient-ils d’ailleurs vraiment propriétaires de leurs données ? Il est intéressant, comme toujours, de bien lire les contrats. La règle très majoritaire en la matière est celle de l’abandon de propriété. Le projet Web 2.0 doit être pris en compte dans ses dimensions de sécurité au plus tôt pour ne pas faire des choix engageants et difficiles à changer.
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La sécurité du code Les technologies du Web 2.0 connaissent une évolution perpétuelle. On ne peut donc pas être assuré de leur infaillibilité. L'utilisateur peut facilement publier des contenus, interagir de plusieurs façons. Toutes ces possibilités pour de nouveaux usages bénéfiques peuvent se muer en opportunités pour des malveillances. Par exemple, les attaques de type XSS (« cross site scripting ») consistent à injecter du code malveillant dans une page existante. Le réseau social MySpace a été victime en octobre 2005 d’un ver en Javascript. Son auteur avait conçu et placé dans son profil MySpace des scripts destinés à ajouter automatiquement des amis à sa liste. En moins d’un jour, il est passé de soixante-treize à plus d’un million d’amis. D’autres types d’attaque existent, comme XSRF (incitant un utilisateur à cliquer ou à aller sur une page Web malveillante ; une tâche spécifique est alors déclenchée), ou existeront. Les malfaisants sont inventifs.
1. http://www.adaptivepath.com/blog/
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La limite de ces limites Ces limitations concernent en très grande part le contenu du Web. Or, il ne faut pas réduire le Web à la vaste bibliothèque où tous les savoirs du monde finiront par être stockés. C’est sur ce point précis qu’appuient les promoteurs du Web 3.0. Dan Saffer1 explique dans son billet « The Web 2.0 Experience Continuum » que le Web 2.0 serait un Web de transition entre celui des contenus structurés et celui des contenus non structurés. Par exemple, les mashup sont des mutants du troisième type qui inaugurent un Web de services. La dernière partie de ce livre approfondit ces questions.
Chapitre 3
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La plupart des technologies expliquées ci-après existaient bien avant que la dénomination Web 2.0 ne soit utilisée. C’est pour cela que le titre de ce chapitre mentionne simplement les « technologies Web ». Cependant, nous nous limitons à celles des technologies utilisées dans le Web 2.0.
LES GRANDES MUTATIONS DU WEB
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À la fin des années 1990, Internet a permis de construire des pages lisibles par tous, à partir de postes de travail qui ne nécessitaient pas de couplages forts avec aucun serveur. Mieux encore, il devenait possible pour tout utilisateur de se connecter à un nombre illimité de serveurs dans le monde, sans avoir à recomposer, chaque fois, un numéro de téléphone. À partir de ces possibilités, les professionnels de l’informatique ont commencé à bâtir des sites Web, puis des « portails », dont le but est de pouvoir accéder au contenu d’autant de sites que nécessaire pour leurs utilisateurs. Certes, à cette époque, les pages étaient statiques ! Mais les entreprises disposaient alors de la possibilité de présenter leurs services et leurs produits et de communiquer avec l’ensemble de leurs clients, partenaires et fournisseurs, en utilisant des pages électroniques riches tant au niveau des graphiques que des textes. Cette « staticité » des pages Web ne pouvait satisfaire ni les entreprises, ni les internautes. Aussi, depuis la création du Web, les profes-
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sionnels de ce secteur de l’informatique ont eu pour seul objectif de rendre ces pages Web de plus en plus dynamiques. Cette dynamique est obtenue d’une part par l’intégration des divers médias de communication : • les sons (voix, musique) ; • les images (fixes, animées). Elle est d’autre part obtenue par la mise au point de nouvelles technologies qui permettent d’accroître cette « dynamicité ». Nous décrivons ci-après les technologies qui concourent au Web 2.0, de façon accessible à tout lecteur. Aussi, pour chacune de ces technologies, nous décrirons le plus simplement possible : • comment cela fonctionne ? • que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Nous mentionnerons également les bénéfices qu’apporte la technologie décrite et pourquoi elle est utilisée : que doit-il faire ? Nous indiquerons enfin ce qui est demandé à l’utilisateur au niveau des connaissances nécessaires pour bénéficier de cette technologie.
LES LIMITES DU HTML
Mais HTML ne permet que de construire des pages statiques ; aussi dès le début des années 1990, DHTML est conçu pour prendre en charge quelques animations. Dès les années 2000, avec XHTML, la voie est ouverte pour l’« eXtensible Mark-up Language » (XML), qui rendra possibles les fonctionnalités actuelles du Web. Comment cela fonctionne ? Un utilisateur lit une page HTML dont l’image lui est intégralement envoyée sur son poste de travail par un
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Tout commence à la fin des années 1980 avec l’« Hyper Text Markup Language » (HTML) ou Langage Hyper Texte à Balise. Ici, les deux mots importants sont « hyper text », qui indique la faculté de pouvoir « sortir » de la dimension de la feuille virtuelle ; et « markup », qui indique que, comme son ancêtre SGML, HTML permet de structurer la page afin de pouvoir marquer tout ou partie des mots à l’aide d’un effet visuel.
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serveur 1. En cliquant sur un lien, une autre page lui sera envoyée par un serveur x.
Figure 21 : Hyper-Text et Langage à balises
Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Il dispose ainsi de la possibilité de « naviguer1 » sur un nombre infini de pages Web. Que doit-il faire ? Il doit cliquer sur sa souris et connaître les fonctions des clics droits et clics gauches lui permettant d’afficher la nouvelle page dans une autre page ou un autre onglet.
ACCROÎTRE L’INTERACTIVITÉ
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Étape 1 : interaction entre les pages Web et le système d’information Le caractère statique des pages Web constituant un réel frein à la progression d’Internet, les informaticiens ont tout de suite cherché 1. C’est-à-dire d’être routé, grâce aux liens, vers une autre page Web, hébergée par un autre serveur.
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des solutions. En permettant les échanges XML entre les pages Web et les applications du système d’information, il devient possible d’obtenir un premier niveau d’interaction. Comment cela fonctionne ? Une page Web peut envoyer un flux XML à une application. XML permettant d’insérer des données dans le flux échangé, ces données sont alors entrées dans les applications du SI. Elles sont traitées par les applications. Puis les résultats sont restitués sous forme de données et présentés à l’utilisateur dans sa page Web. Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Il bénéficie ainsi d’application en mode « client léger », c’est-à-dire accessible par Internet, où les écrans se présentent sous la forme de pages affichées par le butineur (Internet Explorer, Firefox ou tout autre). Que doit-il faire ? Rien, à part cliquer sur sa souris et renseigner les zones demandées par saisie à partir de son clavier.
Les Web services et la SOA Les systèmes d’information doivent pouvoir communiquer entre eux sans nécessité de couplages forts. Pour cela, les concepteurs utilisent des Web services qui s’appuient intégralement sur l’échange de données et d’information par le Web. Comment cela fonctionne ? Les Web services offrent des services d’accès à des données, des informations ou à des services applicatifs tels que la résolution de règles ou de calculs utilisant des algorithmes. Ces services doivent être utilisables par des applications différentes ou des systèmes d’information différents. Il convient donc de définir a priori quels services peuvent être candidats à devenir des Web services. Ces Web services sont « publiés » sur le Web, c’est-à-dire rendus accessibles à leur consommation par d’autres applications Web. Il faut bien sûr respecter les standards de sécurité des Web services avant de les mettre en œuvre. Une architecture fondée sur les Web services est une SOA1. 1. Aucun sigle français pour l’Architecture Orientée Services n’existant, nous utilisons l’acronyme anglais de Service Oriented Architecture : SOA.
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Étape 2 : des Web services pour une architecture orientée services (SOA)
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Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Il bénéficie ainsi de l’interopérabilité entre des applications différentes et n’a donc pas besoin d’accéder à de multiples applications. Que doit-il faire ? Ce processus est totalement transparent pour l’utilisateur.
Figure 22 : Notions de Web services
SOA et REST Pour faire simple, les Web services s’appuient aujourd’hui sur le protocole « Simple Object Access Protocol » (SOAP), qui repose sur un ancien protocole d’appel de procédure à distance, « Remote Procedure Call » (RPC). Le « Representational State Transfer » (REST) est une nouvelle alternative au choix de protocole.
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Comment cela fonctionne ? REST utilise le protocole standard « Hyper Text Transfer Protocol » (HTTP) ainsi que toutes les technologies qui s’y rattachent. Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Il dispose ainsi de plus de réactivité et de sécurité. Que doit-il faire ? Cette alternative est totalement transparente pour l’utilisateur.
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Étape 3 : des utilisateurs actifs La réactivité de l’utilisateur Pour que les utilisateurs puissent agir sur la page Web qu’ils affichent, il est indispensable que l’affichage et le rafraîchissement de la page Web sur leur poste soient performants. Les technologies suivantes permettent cette performance.
Figure 23 : Fonctionnement d’AJAX
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AJAX Comment cela fonctionne ? « Asynchronous JavaScript And XML » (AJAX) est une méthode de codage des pages Web qui permet de gagner en performance et en temps de réponse. Sans AJAX, chaque fois que l’on doit mettre à jour ne serait-ce qu’une ligne ou une image, c’est-à-dire qu’une partie de la page Web, ne serait-ce qu’un seul mot, c’est toute la page Web qui doit faire un aller-retour entre le poste de travail de l’internaute et le serveur. C’est donc très pénalisant pour les performances. Avec AJAX, la page est divisée en bloc et seul le bloc concerné est mis à jour. On transporte donc beaucoup moins de données pendant l’aller-retour, d’où un gain de performance considérable.
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Qu’est cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Il bénéficie ainsi d’un meilleur confort d’utilisation et de temps d’attente beaucoup plus court. Que doit-il faire ? L’utilisateur n’a rien de particulier à faire. Les applications « riches » ou « Rich Client Applications » (RIA) Il est dommage de ne pas pouvoir profiter de la puissance de calcul du poste de travail de l’utilisateur. La technologie RIA permet de mettre en œuvre cette possibilité.
Figure 24 : Fonctionnement de RIA
Comment cela fonctionne ? Avec RIA, les traitements subis par un bloc, par exemple des calculs sur les données, sont faits localement, c’est-à-dire par le poste de travail de l’utilisateur. Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Il bénéficie ainsi de temps de réponse plus court et son confort est amélioré.
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Que doit-il faire ? L’utilisateur n’a rien à faire. C’est l’application qui doit être développée de façon à ce que certains traitements puissent être pris en charge localement. Les données en cache local L’échange permanent de données entre le poste de travail de l’internaute et le serveur internet, via la page Web publiée par le serveur, est extrêmement pénalisant au niveau des performances. La gestion, en mémoire cache – c’est-à-dire dans un espace de stockage éphémère sur le poste de travail – apporte un gain en termes de performance et de sécurité. Comment cela fonctionne ? Dans cette technologie, ce sont les données du bloc qui sont stockées provisoirement dans une base
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de données ou un fichier temporaire, que l’on appelle cache, pendant toute la durée de la session. On réduit ainsi encore plus les échanges entre la page WQeb et le serveur.
Figure 25 : Fonctionnement du cache local de données
Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Encore plus de performance. Que doit-il faire ? L’utilisateur ne doit rien faire. C’est l’application qui est programmée pour constituer cette base cache et l’effacer une fois la session expirée. Les « master pages » Comment cela fonctionne ? Les « master pages » sont des pages Web modèles, accompagnées d’une séquence de paramètres indiquant des variantes de présentation. Ainsi, à partir d’une même page Web « master », le développeur peut obtenir un affichage complètement différent selon les utilisateurs, en fonction de leur langue, du groupe auquel ils appartiennent, de leur culture régionale. Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Il bénéficie ainsi d’une personnalisation poussée de la page Web qu’il consulte.
Flash et Silverlight Comment cela fonctionne ? Les technologies Flash d’Adobe et Silverlight de Microsoft ont pour objectif l’animation à l’intérieur d’une page Web. Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? L’animation des pages Web lui offre un plus grand confort au niveau de la consultation des pages,
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Que doit-il faire ? Rien.
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aidant ainsi à divers objectifs, tels que la formation de l’utilisateur ou l’illustration d’exemples. Que doit-il faire ? Rien.
L’interactivité avec les utilisateurs Au-delà de la réactivité de l’utilisateur, les opérateurs de sites Web 2.0 offrent aux utilisateurs de participer à l’élaboration du Web d’aujourd’hui. Les technologies présentées ci-après sont indispensables à l’obtention de cette interactivité. Les utilisateurs contribuent de cette façon à la création de contenu.
Figure 26 : Le Web de l’utilisateur participatif
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Personnalisation des pages par l’utilisateur L’utilisateur est susceptible de personnaliser lui-même les pages qu’il consulte en déplaçant des blocs de la page et en les positionnant les uns par rapport aux autres. Comment cela fonctionne ? La technologie est assez analogue à celle d’AJAX. Des blocs sont définis par le développeur sur la page Web. Ils sont vus et gérés en local au niveau de leur positionnement. La mise à jour de leur contenu est bien réalisée faite à partir
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du serveur de site Internet. Le système garde en mémoire ce paramétrage fait par l’utilisateur lui-même et chaque fois qu’il se reconnecte, il retrouvera exactement la même fenêtre, avec les blocs positionnés aux mêmes endroits. Dans le monde Microsoft et .Net, ces blocs se nomment WebParts. Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Il dispose ainsi localement sur son poste de la possibilité de configurer sa page selon les rubriques qu’il souhaite voir en premier. Il devient libre de l’agencement des pages Web qui lui sont destinées. Que doit-il faire ? Il suffit à l’utilisateur de faire un « drag and drop » (glisser/déposer) à la souris. Il pointe sa souris sur un bloc, en maintient le bouton appuyé tout en la déplaçant vers l’endroit où il souhaite mettre le bloc. Les endroits possibles apparaissent en pointillés, pour l’aider.
Figure 27 : Exemple de personnalisation de page et de blocs
Comment cela fonctionne ? Le blog est un espace personnel où son propriétaire peut déposer chaque jour des billets, c’est-à-dire un texte, une analyse, une réflexion, une proposition ; des photos, musiques, vidéos ou documents. Bien que le blog apparaisse en visibilité indépendante aux internautes qui le consultent, il appartient à un site.
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Blog C’est un site personnel de publication, analogue à un carnet pour des prises de notes.
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Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Au fil des jours, il constitue un site personnel interactif, beaucoup plus riche qu’un site Web classique. Que doit-il faire ? Il doit être suffisamment autonome pour pouvoir s’enregistrer sur un site offrant la possibilité de créer un blog. Il dispose alors de tous les outils nécessaires à la création de ses billets, dont un éditeur de texte, tout à fait semblable à l’éditeur d’un wiki (voir la figure 30 ci-après). Wiki Le wiki est un site Internet sans structure a priori. Ce sont ses visiteurs qui en créent le contenu et peuvent le modifier à volonté. Nul besoin de compétence technique particulière.
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Figure 28 : Contribution à Wikipédia en mode « création-modification » d’articles
Comment cela fonctionne ? Le Wiki est un espace collaboratif permettant d’élaborer des articles de façon collective, où chacun apporte sa connaissance sur un sujet faisant l’objet d’une fiche, appelée « article », en créant une nouvelle entrée ou en modifiant par enrichissement ou correction une fiche existante.
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Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Il peut ainsi contribuer très activement à l’élaboration d’un projet collectif. Que doit-il faire ? Il doit être autonome en traitement de texte pour pouvoir utiliser l’éditeur proposé par l’outil de wiki (voir figure précédente). Balado Le terme anglais « podcast » est très connu, car il vient de l’agrégation des deux mots, iPod (baladeur de marque Apple) et « broadcast » (diffusion). Comment cela fonctionne ? Le balado est une forme de diffusion audio-radio-phonique individuelle1 (musique, voix, son) sur Internet. Il est tout à fait équivalent au blog. Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Il peut ainsi partager ses passions musicales… sans être entendu ! Que doit-il faire ? Il doit savoir utiliser… Internet ! Twittering Ce mot vient du verbe anglais « to twitter », c’est-à-dire « gazouiller ». Comment cela fonctionne ? C’est un blog instantané, composé de billets très courts, diffusé à tout moment à partir de tout type de terminal dont les téléphones portables… C’est une messagerie instantanée sans interlocuteur ! Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Il peut confier sa position, ses préoccupations, ses états d’âme… à tout instant. Que doit-il faire ? Il doit être atteint du syndrome de « blog addiction » !
1. L’idée de diffuser personnellement ne vient pas d’Internet… Parmi les plus anciens « podcasteurs » ou considérés comme tel, on trouve l’écrivain et journaliste britannique William Le Queux, dès le tout début du XXe siècle. Voir l’article sur son œuvre dans Wikipédia, en faisant la recherche sur son prénom et nom (http://www.wikipedia.org/).
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Messagerie instantanée Contrairement au twittering, la messagerie instantanée présente une indéniable utilité professionnelle. Elle a été popularisée dans sa
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version ludique par des outils tels que MSN Messenger de Microsoft ou Yahoo Messenger. Comment cela fonctionne ? C’est une messagerie synchrone où des interlocuteurs peuvent s’envoyer des messages et se voir par une webcam. Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Dans des réunions de travail où l’on reste connecté via son ordinateur portable, l’utilisateur peut être en contact permanent avec des collaborateurs restés en back office et susceptibles de lui apporter des informations importantes en temps réel. Que doit-il faire ? Il doit savoir utiliser une messagerie où l’interface présente simultanément deux zones : celle de l’échange des messages et celle de la composition de son message instantané.
Les agrégateurs Les agrégateurs sont des outils qui établissent, à travers un couplage faible, une liaison entre des sites, des pages ou des zones de pages Web. Mashup Ces mashup, également appelés API, sont des applications qui connectent des pages Web à des applications ou à d’autres pages Web. Comment cela fonctionne ? Des liens sont créés, à l’initiative de l’utilisateur pour activer le mashup dont il a besoin au sein de la page Web qui lui est présentée. Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Il dispose ainsi d’un portail complètement configuré selon ses besoins et ses aspirations, fédérant des sites selon son propre point de vue.
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Que doit-il faire ? Il doit suivre les instructions données par le fournisseur du mashup et cliquer sur la souris, puis naviguer dans la nouvelle page ainsi obtenue. RSS RSS signifie « Really Simple Syndication » ou « syndication vraiment simple ».
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Comment cela fonctionne ? Il s’agit d’un abonnement à des événements d’un blog ou d’un site, dont l’utilisateur souhaite être informé à temps. Que cela apporte-t-il à l’utilisateur ? Il est ainsi alerté en temps réel des nouveautés, billets sur des sujets qui l’intéressent, événements et annonces qui interviennent sur un site ou un blog. Les alertes lui sont envoyées par e-mail ou sur une zone apparaissant sur son blog. Que doit-il faire ? Il doit savoir cliquer sur sa souris selon les instructions affichées. Trackback En français, ce sont des rétroliens ou système de liens inter-blog que le propriétaire d’un blog configure selon ses besoins et ses visites à d’autres blogs (voir RSS).
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Figure 29 : L’agrégation
Chapitre 4
Le Web 2.0 en entreprise
LES COMPOSANTS 2.0 Qu’est-ce qui définit le projet Web 2.0 ? Est-ce le fait de pouvoir introduire des technologies Web 2.0 dans l’entreprise ? Ou bien, ne serait-ce pas plutôt la réalisation d’un développement qui réponde à des besoins grâce au Web 2.0 ? Au final, si l’on aboutit à la même application ou au même service, le geste n’aura pas été le même.
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Est-ce un projet d’infrastructure, un nouveau site, un nouvel outil, une nouvelle façon de développer ? La diversité des composants que nous allons décrire dans ce chapitre montre que le Web 2.0 peut concerner tous ces sujets, toucher tout ou partie du système d’information de l’entreprise. Bien sûr, il a des projets francs-tireurs de telle équipe qui, par ses moyens propres, innove sans pour autant chercher, ou à le faire savoir ou à en faire profiter les autres. Mais ce n’est pas une démarche très Web 2.0. Il existe aussi les projets exploratoires, ceux qui visent à découvrir tel outil ou telle technologie pour savoir ce qu’on peut en faire. Mais, ce sont là des essais presque toujours sans suite. Le projet de maturité est celui de l’usage compris qui cherche la technologie de sa mise en œuvre. Il suppose un investissement pour comprendre ce qu’on peut attendre les principaux composants 2.0. Ce quatrième chapitre répond à cette démarche.
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L’ERGONOMIE 2.0 Faut-il définir l’ergonomie ? Savons-nous tous bien de quoi il en retourne ? Nous avons pu constater, au cours de nos missions de conseil, que ce n’est pas si sûr. Il existe ainsi une certaine confusion entre ergonomie et esthétique. Combien de chartes graphiques traitent marginalement de l’ergonomie comme s’il s’agissait d’une partie de la question du graphisme d’un site. Rares sont même les chartes ergonomiques à part entière. Pourtant, il ne s’agit pas de la même chose. L’ergonomie vise à optimiser les relations avec l’utilisateur. Elle s’intéresse à la logique d’accomplissement de ses tâches et tente de proposer le meilleur compromis entre le confort, la sécurité et l’efficacité. Alors voici un conseil : quand on en est à la rédaction cartulaire, il faut opter pour un titre clair comme « Charte ergonomique et graphique » en plaçant délibérément l’ergonomie en premier.
Figure 30 : Le graphisme sert l’ergonomie et non le contraire
Supposons que les neuf objets à gauche doivent être utilisés par groupe de trois de forme identique. Le graphisme, en l’occurrence les couleurs, indique à l’utilisateur que la vision proposée à droite est la bonne. Le groupe au centre est tout aussi fonctionnel, mais le graphisme n’induira-t-il pas l’utilisateur en erreur ?
Voici le haut de page d’un site de partage de photographies en ligne. Observons la proposition ergonomique. Un visuel flanqué du logo du site occupe la moitié gauche de l’écran, la partie que l’œil occidental lit en premier. Si on recharge la page, on constate que l’image a changé. Mais, nonobstant, on reconnaît le site. L’objectif est atteint : identifier et reconnaître le site. Notre regard est alors
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Exemples
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Figure 31 : http://www.flickr.com/
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attiré par l’accroche du site « Partagez vos photos. Explorez le monde. » C’est efficace. En six mots, deux verbes à l’impératif, le propos est clairement posé. On découvre encore trois boutons et une zone de saisie. « Créez votre compte » et « Connexion » introduisent immédiatement dans la thématique communautaire du site. Il n’y a pas eu besoin de discours. Quant à la zone de saisie suivie du verbe « rechercher », elle fait appel à toutes nos habitudes des moteurs de recherche dont le paradigmatique Google, qui fait le même emploi : une unique zone de saisie et le même verbe.
Figure 32 : http://www.orange.fr/
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Sur un site plus ancien dans sa conception, la page complète est quatre fois plus longue et réclame deux hauteurs d’écran pour être entièrement vue. Un bon lecteur mettra plus d’une minute à la lire pour y découvrir tout ce qui est présenté. La proposition faite à l’internaute n’est pas claire. À force de vouloir tout exposer, rien ne se distingue particulièrement du reste. Ces deux sites résultent de choix faits après un long travail qu’il ne nous appartient pas de juger. Ce que nous remarquons immédiatement, c’est que le premier site est très Web 2.0. Il répond à la question de l’usage. Mais le second exemple ne s’affirme pas nettement. Il énumère toutes les possibilités offertes à l’utilisateur. C’est à ce dernier de découvrir ce qu’il peut faire, quels usages il va pouvoir mettre en œuvre.
Objectifs Signe manifeste de maturité, si l’ergonomie ne s’intègre pas à la réflexion, aux outils, à la réalisation, il est clair que, même inconsciemment, l’utilisateur en fait un critère de premier ordre pour l’adoption ou l’oubli d’un site ou d’un service. Steve Krug est un consultant en ergonomie de réputation internationale. Pour lui, les sites ou les services doivent s’attacher à répondre positivement aux questions suivantes : • le visiteur comprend-il ce qu’il découvre ? • le site ou le service sont-ils clairs ? • le visiteur trouve-t-il ce qu’il cherche ? • le site ou le service peuvent-ils être utilisés sans effort d’apprentissage ? • le visiteur peut-il utiliser aisément le contenu ? Steve Krug a intitulé son best-seller Je ne veux pas chercher ! (voir bibliographie en fin d’ouvrage). Il a choisi ce titre provocateur tout simplement parce que l’utilisateur va intuitivement reconnaître un site ou un service bien fait d’un autre au premier manquement à l’une de ces questions. Le paradoxe de Steve Krug est bien celui-ci : ne prenons pas les utilisateurs pour des idiots… alors ne les faisons
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• le site ou le service sont-ils irréprochables ?
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pas réfléchir ! La bonne ergonomie cherche à se faire oublier. Alors qu’elle est acquise, elle voudrait passer pour innée.
Nouveaux mécanismes En matière d’ergonomie, Internet est incontestablement le plus innovant de tous les développements informatiques et les navigateurs sont les applications les plus utilisées au monde. Pourrait-on se passer des liens hypertextes ? Pour autant, l’ergonomie des sites du premier Web est dépassée. Plus qu’une simple évolution, nous assistons à une rupture. Le grand métier à tisser fonctionne à toute allure. Prenons quelques exemples : les bases de données deviennent des réseaux, les services se font collaboratifs, les utilisateurs mettent en commun leurs contenus. Le Web 2.0 met en œuvre des technologies matures. Elles ont fait leur preuve et ce n’est donc pas là qu’il faut chercher la nouveauté. Tout vient de l’art et la manière d’agencer ces technologies pour créer des services innovants bénéficiant d’une ergonomie réellement conçue pour et souvent avec l'utilisateur. En utilisant les langages HTML, CSS et Javascript, créés dès le début du Web 1.0, et en ajoutant la fonction XMLHttpRequest (introduite en 1998 dans Internet Explorer 5, mais passée totalement inaperçue pendant sept ans), on obtient le cocktail AJAX. Ce dernier se trouve à la base du modèle de développement du deuxième Web. Tout était là, mais il a fallu du temps avant que l’on sache combiner efficacement quatre composants. Les possibilités techniques du Web 2.0 apportent un confort jamais atteint. Il est désormais possible d’offrir une ergonomie haut de gamme. Ce que seules les interfaces riches offraient se situe désormais à la portée d’un simple site ou d’un simple service. On peut lui apporter des améliorations substantielles quant à la compréhension, la saisie, la recherche, la navigation, la personnalisation, tout ceci concourant au succès du site ou du service. L’utilisateur est pragmatique, il adopte ce qui marche. Illustrons cela par quelques exemples.
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Pour la saisie : • la validation d’une saisie à la volée ; • les formulaires extensibles ; • l’auto-complétion.
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Pour la recherche : • des agents virtuels, animés ou non, répondent aux questions en recourant à un moteur sémantique spécialisé ; • les cartes géographiques ou leur métaphore par exemple sémantique ; • les configurateurs qui prennent en compte les spécifications données par les utilisateurs et réduisent progressivement la liste des résultats possibles Ce dispositif est d’autant plus efficace que l’utilisateur connaît le domaine de sa recherche. Pour la navigation : • le glisser/déposer ; • une gestion astucieuse du clic droit ; • les liens permanents ; • les nuages de tags. Pour la personnalisation : • la possibilité de modifier votre page sans connaissance technique en choisissant des composants, en les déplaçant ; • la combinaison de services de base ;
L’utilisation de tous ces mécanismes ne conduit pas nécessairement à faire le succès d’un site ou d’un service. La réussite ne naît pas de l’accumulation des recettes, aussi bonnes soient-elles. Il faut œuvrer avec discernement et éviter la surenchère : une interface qui vise au but au lieu de faire plaisir à son concepteur. Par exemple, peut-on imaginer proposer une messagerie électronique Web ou un agenda Web qui tranche avec ceux déjà existant ? Si Google a pu innover avec sa messagerie Gmail ou avec Google Agenda, c’est parce que ces services n’avaient pas encore de concurrents dans leur créneau respectif. En partant sans utilisateurs, ces nouveaux services ne risquaient pas d’en bousculer. De surcroît, l’innovation a aussi porté sur des mécanismes élémentaires où la simplicité et l’efficacité sont
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• l’utilisation d’onglets pour la gestion d’espaces distincts et structurés dans votre page personnelle.
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les ressorts d’une ergonomie réussie. Pour l’un, le classement des emails ne se fait plus dans des dossiers, mais repose sur un dispositif de libellés. Pour l’autre, la lecture d’une sélection d’agendas partagés se fait d’un clic pour cocher les agendas retenus.
Conseils Tous les bons conseils en matière d’ergonomie du premier Web restent-ils valables ? Cela ne fait aucun doute. Rappelons-nous bien que les utilisateurs ont acquis des habitudes qui ne peuvent être bouleversées que pour de très bonnes raisons. Y aurait-il tout de même de nouveaux conseils à prendre en compte avec le deuxième Web ? Nous répondons à cette question selon deux axes : technique et méthodologique.
Cinq conseils techniques
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Veiller à la sécurité Le passage du Web 1.0 au Web 2.0 peut présenter des risques pour la sécurité des sites ou des services. Avec le recul des premières années, nous avons analysé des formes de vulnérabilité inhérentes au développement de l’ergonomie. En reportant une partie de la logique des traitements du serveur dans le navigateur, ce dernier exécute du code Javascript et mémorise des informations persistantes localement. Parmi les impacts identifiés, notons le transfert de données sensibles dans le navigateur et donc leur exposition potentielle à des regards indiscrets, voire à la malveillance. Du fait du nouveau partage entre serveur et navigateur, des contrôles réalisés précédemment sur le serveur sont repris par le navigateur. Or certains navigateurs ne peuvent ou ne veulent pas toujours les exécuter. C’est au moment d’arbitrer les partages d’architecture qu’on a la main pour y remédier. Pas d’installation ne signifie pas utilisation immédiate Les services Web 2.0 gagnent en simplicité du fait de la suppression d’un certain nombre d’opérations fastidieuses comme l’installation. Il faut tout de même rester vigilant et ménager à la première utilisation son caractère de première fois. Le deuxième Web permet la personnalisation. Cela signifie qu’à la première utilisation du site ou du service, des opérations d’initialisation devront
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être réalisées. Il est bon que l’utilisateur le sache. Il pourrait reprocher au site ou au service d’avoir pris des informations à son insu. Ergonomie et accessibilité L’utilisateur peut-il adapter l’ergonomie selon ses handicaps ? L’ergonomie est-elle adaptée à tous les utilisateurs, y compris aux handicapés ? Quelle que soit la façon dont on pose la question de l’accessibilité, le site ou le service doit y répondre. Les choses paraissent plus complexes tant qu’on ne s’y est pas frotté. On n’aura pas de mal à imaginer comment faire si la démarche intègre une personne handicapée dans l’équipe. Ergonomie d’intégration L’ergonomie peut permettre de lisser en surface les composants hétérogènes qui ont été réunis techniquement. Les mashups réussis ne se remarquent pas. Ergonomie et performance D’avoir confondu ergonomie et esthétique, on aura pu penser que la performance ne pourrait être au rendez-vous. En permettant aux utilisateurs d’être performants, ils seront reconnaissants en retour. La mise en œuvre d’une saine ergonomie apportant simplicité et confort fait toucher à l’excellence.
Cinq conseils méthodologiques
Conception participative Concevoir l’ergonomie de façon participative n’a rien de nouveau et c’est très Web 2.0 dans l’esprit. Prenons la méthode de la roue de Deming. Si elle remonte aux années 1950, cela n’ôte rien à sa pertinence.
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Bon sens, bonne ergonomie Aller là où le bon sens conduit ! Quand on se saisit d’un marteau, on n’y réfléchit pas et pourtant on le prend de la meilleure façon qui soit. Les utilisateurs ont une grande habitude d’Internet, acquise depuis longtemps. Devant tout nouveau site ou service, ils réagiront simplement, au moindre effort, selon ce que le bon sens leur commande. Alors quand on fait des choix en matière d’ergonomie, il faut laisser le bon sens parler.
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Figure 33 : La roue de Deming
Préparer : la phase de préparation est destinée à l’analyse. Comment les utilisateurs vont-ils réagir devant le nouveau site ou service ? Pour le savoir, il importe de s’entretenir avec les futurs utilisateurs, de faire un questionnaire, etc. Les techniques ne manquent pas. Réaliser : fort de cette étude, la réalisation peut être lancée en suivant les priorités que l’analyse aura révélées. Il est judicieux de commencer par les gains rapides (en anglais les « quick win »), ceux qui coûtent peu et sont du meilleur rapport en termes d’usage.
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Tester : s’assurer toujours par des tests qu’on reste conforme aux besoins des utilisateurs. Il existe plusieurs moyens pour évaluer l’utilisabilité de la réalisation. Cela va de la mesure de critères ergonométriques à l’oculométrie1.
1. Cette technique a pour objectif d’enregistrer et d’analyser les trajets oculaires des utilisateurs. Elle est mise à profit pour comprendre les stratégies de navigation Internet, les zones où se porte le regard.
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Réagir : tenir compte des observations constatées pour apporter rapidement les correctifs idoines. Soigner l’ergonomie Quand l’utilisateur est guidé par analogie, l’ergonomie est dictée par le bon sens et le travail consiste à bien reproduire l’usage. Inversement, plus l’idée est nouvelle, plus son ergonomie doit être travaillée. Il n’est rien de plus difficile que de concevoir quelque chose de facile. Ce paradoxe doit inciter à travailler l’ergonomie avec d’autant plus de soins qu’elle s’applique à une fonction innovante. Le sophisme du développeur nous le rappelle : il n’y a pas d’innovation sans valeur, pas de valeur sans usage, pas d’innovation sans usage. CQFD. Écouter les utilisateurs Que ce soit en direct, avec des enquêtes de satisfaction ou encore en lisant les tableaux de bord construits à partir des statistiques d’audience du site ou du service, on tire toujours un très grand profit de ce que les utilisateurs disent. La valeur du site ou du service leur revient, ils sont dignes d’une écoute attentive. Adapter l’ergonomie Les utilisateurs évoluent, leurs usages mûrissent, l’ergonomie doit s’adapter. On peut mettre en place les outils qui permettent de déceler les évolutions d’utilisation du site ou du service. Il faut analyser sans affect ce que l’on observe et ne pas hésiter à remettre en question les piliers, surtout s’ils ne supportent plus rien. La roue de Deming tourne…
LES COMPOSANTS TECHNOLOGIQUES
Ce chapitre a une vocation méthodologique. Il est destiné à exposer et à justifier la démarche que nous suivons pour décrire les différents outils et services du Web 2.0 exposés dans cette partie du livre. Ce chapitre est aussi conçu comme une aide. Lorsqu’il s’agira de lancer un projet de mise en œuvre d’un outil ou d’un service Web 2.0, on trouvera ici de quoi bâtir son propre argumentaire.
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Démarche
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Enfin, le fait de recourir à la même méthode pour décrire tous les outils correspond à un tour de main de consultant.
Exemple(s) C’est par un premier exemple, choisi pour son caractère pragmatique, que nous ouvrons pour illustrer immédiatement l’outil et éviter d’en rester aux concepts. Comme nous le répétons, le Web 2.0 est un Web d’usages et un usage, c’est concret. À l’aide d’une ou de plusieurs illustrations, nous en expliquons les traits caractéristiques pour appréhender l’outil dans son ensemble et situer l’utilisation attendue. Le cas échéant, un second exemple peut illustrer en contrepoint un aspect contraire, voire se présenter comme un contre-exemple. Description Le Web 2.0 n’est pas avare en noms exotiques qui n’évoquent généralement rien de prime abord pour un francophone. Lorsque c’est le cas, nous commençons par un premier paragraphe pour expliquer d’où vient le nom de l’outil. Ceux qui maîtrisent l’anglais ont plus de chance d’imaginer quelque chose et encore ! Par ce détour qui offre un petit côté historique, on touche une part de l’intention des concepteurs. Une description unitaire des composants de l’outil suit pour en dégager toutes les caractéristiques selon trois axes majeurs. Il s’agit d’abord de situer le composant dans la page, dans l’outil. Puisque le Web 2.0 développe les usages, ceux-ci doivent être assimilés le plus facilement possible par les utilisateurs. Le caractère « acquis réflexe » est privilégié. Par ailleurs, l’ergonomie propre du composant est ensuite détaillée pour juger de son adéquation à l’usage.
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Pour finir, le service rendu par le composant peut alors être pleinement expliqué.
Usages La force des outils du Web 2.0 réside moins dans leur richesse fonctionnelle que dans l’usage qu’ils servent. C’est là l’une des raisons du nombre important d’outils. Chacun peut être vu comme un service de base et cette simplicité permet une adoption rapide par l’utilisateur. Pour les futurs projets à conduire, cela produira le
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même impact positif : des solutions faciles à mettre en œuvre, à déployer et à accompagner. Faut-il voir comme un revers de médaille le fait que ces outils ne soient pas fonctionnellement très développés ? Nous ne le croyons pas. Pour s’en convaincre, on peut déjà observer que les grands éditeurs comme Microsoft, IBM, SAP, Oracle, etc., proposent tous des composants du Web 2.0 dans leurs offres. Quant aux pure players, ils commercialisent désormais des versions de plus en plus « pro » de leurs outils qui, au début, passaient pour des gadgets ou des expérimentations. Autour de ces usages, des communautés se sont constituées. À côté des premiers adopteurs, on y rencontre de nombreux utilisateurs plus ou moins matures dans leur pratique. Le lien communautaire peut être très fort, au point d’être un réel joker pour les futurs projets. Nous ne croyons pas à la dichotomie avantages et inconvénients pour les outils du Web 2.0. S’ils existent, c’est qu’ils sont portés par une nombreuse foule d’utilisateurs qui les influencent positivement en les utilisant. Pour paraphraser une célèbre publicité, un outil du Web 2.0 ne s’améliore que s’il est utilisé. C’est l’un des effets de la loi de participation1 énoncée par Ross Mayfield, président et co-fondateur de Socialtext, l’un des premiers wiki d’entreprise2.
• dans le système de l’entreprise ; 1. La loi de participation est présentée ailleurs dans le livre (voir p. xx). 2. www.kepeklian.com/blog/2008/02/04/la-loi-de-participation/
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Recommandations Ce paragraphe prodigue des conseils pour les trois grands temps du cycle de vie de l’outil du Web 2.0 qui a été choisi pour être mis à disposition des collaborateurs de l’entreprise. Les premières recommandations sont ainsi consacrées au temps du projet, les suivantes concernent le lancement et les dernières le développement du service rendu. Le temps du projet : il s’agit de cerner les objectifs visés par l’entreprise, choisir la technologie (le moteur), personnaliser (identité visuelle, agencement, etc.) et décider des intégrations autour de l’outil :
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• avec d’autres outils du Web 2.0 de l’entreprise ; • avec une communauté. Le lancement vise à proposer un lancement avec un outil déjà pleinement utilisable ; éviter les temps de rodage, de montée en charge ; expliquer quand et comment utiliser l’outil (communiquer sur les usages) ; et donner aux utilisateurs le plus de liberté possible pour une meilleure et rapide appropriation. Enfin, le temps de l’utilisation permet de : • faire vivre l’outil, augmenter son audience ; • faire connaître l’outil, communiquer sur les bonnes pratiques ; • capitaliser et analyser les statistiques pour une boucle d’amélioration ; • rester à l’écoute des usages prévus comme imprévus, rester en version bêta ; • savoir arrêter et remplacer un outil qui ne répond plus aux attentes.
Évaluations La justification d’un outil tient à son utilisation et au bénéfice qu’on en retire. On a donc besoin de rendre des comptes qualitativement sur les usages et les bonnes pratiques, mais aussi quantitativement sur le bilan économique, le nombre d’utilisateurs servis, etc. Les outils produisent habituellement un certain nombre de statistiques qui permettent de concevoir les indicateurs qui alimenteront les tableaux de bords. Mais cela peut s’avérer insuffisant. Nous verrons alors, selon les outils, quels indicateurs de production ou de résultats sont pertinents et comment les jauger.
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Cas d’étude De même que ce chapitre s’ouvrait sur un premier exemple concret, il peut être bon de conclure sur un cas d’étude plus complet où une bonne partie de la problématique entre en jeu.
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Suite collaborative Exemple : Zoho
Figure 34 : http://www.zoho.com/
Plusieurs de ces outils sont libres et sans limite d’utilisation. D’autres sont proposés avec une limitation à quelques essais, puis il faut payer. Les applications bureautiques sont offertes, et tout ce qui engage peu à peu dans le domaine de l’ERP est onéreux. Le modèle économique de cette solution repose sur cette équation.
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Pour pouvoir utiliser Zoho, l’utilisateur doit se créer un compte ou utiliser un compte Google ou Yahoo existant. Les services offerts sont pour moitié des applications de productivité personnelle ou collaborative : traitement de texte, tableur, présentation, bloc-notes, wiki, organiseur, chat, bureau et messagerie. À la suite de ces composants bureautiques classiques, la seconde moitié est destinée aux affaires et propose une gestion de projet, une gestion de clientèle, une facturation, un assistant de conférences, une base de données avec des possibilités de développement, une gestion de personnel.
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L’apprentissage est rapide. L’ensemble est très intuitif, car il reprend l’ergonomie classique de solutions similaires. Les utilisateurs peuvent aussi s’entraider grâce à un forum. Ils forment naturellement ainsi la communauté des utilisateurs de Zoho. Ajoutons pour finir que Zoho est considéré à juste titre comme le principal concurrent de Google Documents.
Description Les suites collaboratives sont des applications du Web 2.0 de première classe. Elles s’exécutent à l’intérieur d’un navigateur et n’ont donc pas à être téléchargées ou installées. Pour son confort, l’utilisateur peut, mais cela n’est pas obligatoire, installer des plugins dans son navigateur ou dans la suite résidente dans le poste de travail, en l’occurrence ici Microsoft Office. Une grande partie des suites existantes propose plusieurs clones des applications classiques de la bureautique des postes de travail. La grande différence réside dans le fait que les applications du Web 2.0 se concentrent sur les fonctionnalités essentielles. Cela les rend plus légères que les applications classiques, dont le taux d’utilisation est très faible. Toutefois, parce qu’elles ont besoin de se différencier et de gagner des parts de marché, les suites collaboratives se spécialisent pour se distinguer sur certains aspects : ergonomie, conversion de format en import ou export, synchronisation, sécurité, sauvegarde automatique, organisation des documents, etc. Un autre facteur de différentiation, trop peu visible, concerne les limites physiques des offres : taille des fichiers, nombre de feuilles de calcul, nombre de cellules par feuilles de calcul, nombre d’images dans les présentations, etc.
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Il faut avant tout remarquer que ces suites connaissent une évolution constante. La version bêta est généralisée. À ce jour, il semble bien qu’une bataille soit engagée pour savoir quelle sera la suite collaborative la plus utilisée sur Internet.
Usages Le plus remarquable dans ces suites est la façon dont elles proposent le travail collaboratif. Précédemment, l’utilisateur travaillait seul sur un document à l’aide d’une suite bureautique installée dans son ordinateur. Il déposait ensuite le document dans un espace collabo-
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Recommandations Le projet Web 2.0 peut choisir l’approche du remplacement pur et simple des licences des suites bureautiques installées dans les ordinateurs des collaborateurs de l’entreprise. Il peut aussi y passer en douceur, en permettant aux utilisateurs d’acquérir progressivement les nouvelles habitudes. Avant de choisir une suite collaborative, il faut faire une étude précise de l’offre Internet la plus récente. En effet, le spectre fonctionnel ne cesse de se développer. Les sources d’information à mobiliser pour réaliser cette étude sont internes (par exemple les forums des suites elles-mêmes) et externes (par exemple : blogs d’utilisateurs, articles, comparateurs, wikis). Faut-il faire le choix d’une unique suite collaborative ? Dans la mesure où le caractère collaboratif est essentiel au projet Web 2.0, il ne peut y avoir plusieurs suites dans l’entreprise. Où s’opérerait la collaboration ? Si celle-ci doit s’étendre à des partenaires en dehors de l’entreprise, la question du choix prend une dimension stratégique. Il peut arriver que des suites collaboratives soient déjà utilisées dans l’entreprise et que la direction informatique n’en sache rien. Au lancement de tout projet de ce type, il faut donc s’inquiéter de l’existence de francs-tireurs. S’il s’en trouve, il faudra les mettre à contribution, car ils ont nécessairement une expérience à faire valoir. L’offre est actuellement et pour un bon moment encore en évolution permanente. Les versions bêta ne sont pas prêtes de disparaître. Il existe donc une difficulté paradoxale à dépasser. D’un côté le champ fonctionnel des solutions évolue rapidement, de l’autre, si un choix doit être fait pour l’entreprise, il ne pourra pas être remis
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ratif au sein d’un outil généralement très onéreux où un autre utilisateur pouvait alors prendre la main. Le Web 2.0 permet à la collaboration d’exister à l’intérieur même de la suite qui est de ce fait collaborative. Pour les fonctionnalités classiques de bureautique ou d’ERP, les suites ont joué la carte de la sagesse. On ne bouleverse pas les habitudes d’un utilisateur dont on veut gagner le suffrage. Les deux maîtres mots des usages sont donc collaboration intégrée et clonage.
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en cause avant quelques années. Pourtant, il ne faudrait pas se réfugier dans un attentisme passif. Il faut donc orienter la veille vers des solutions interopérables avec la suite historique de l’entreprise, mais aussi entre suites collaboratives. Il ne faut pas négliger non plus les utilisateurs et leur bon sens. Plus vite ils sont mis à contribution pour choisir, plus on a de chances de réussir le changement. Les points d’attention critiques lors du choix d’une suite collaborative sont les suivants : • la conservation des documents ; • l’archivage des documents ; • la pérennisation des documents ; • la sécurité des documents ; • les formats utilisés ; • les conversions de format ; • l’import et l’export ; • les limites physiques de l’offre.
Évaluations L’ensemble des besoins de la bureautique classique et du travail collaboratif (traitement de texte, tableur, présentation, gestion de projet, agenda, etc.) est couvert par de nombreuses offres de services en ligne selon le modèle Web 2.0.
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Utilisées d’abord à titre personnel, les suites collaboratives en ligne progressent dans les entreprises qui songent à remplacer des logiciels propriétaires. Les nouveaux entrants, à l’exception de Google, sont des éditeurs de taille modeste. Ces suites sont pour partie gratuites, le reste répondant à un profil de location de logiciel. Un de leurs paris est de réussir à prendre la place des ERP pour les petites et moyennes entreprises. Certains paramètres liés à la sécurité des données et au degré de confiance à accorder à ces services en ligne pourraient-ils peser sérieusement dans la balance au moment du choix jusqu'à en limiter leur expansion ? Si la sécurité pose à ce point un problème, il est
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toujours possible de commencer par des documents qui n’y sont pas sensibles. Un autre critère de choix, nous l’avons vu plus haut, est de s’assurer que les données ne sont pas bloquées dans la suite collaborative. Pour cela, la meilleure façon de procéder consiste à faire la matrice d’interopérabilité pour juger le plus objectivement possible de la meilleure solution.
Cas d’étude Il s’agit de profiter de la refonte du poste de travail pour passer au travail collaboratif. Aujourd’hui, la refonte du poste de travail est un projet Web 2.0. Il inclut la question de la suite bureautique. Doit-on poursuivre avec la même, dans la très grande majorité des cas Microsoft Office, ou bien doit-on opter pour une autre solution ? Si on met en parallèle les offres existantes avec les nouvelles offres Web 2.0, cela donne trois grandes familles à envisager : les suites historiques des éditeurs, les suites libres du monde de l’Open Source et dorénavant les suites collaboratives. L’expérience nous enseigne que les suites bureautiques font partie du patrimoine informatique depuis longtemps et qu’il est très difficile d’en changer. Les habitudes de tous les collaborateurs impriment une demande de stabilité que confirme aussi le poids du fonds documentaire dont les fichiers ont des formats liés à la solution utilisée. Le choix d’une nouvelle suite est très engageant pour toute l’entreprise, tout son personnel, son passé documentaire et son présent en termes d’utilisation. En cas de changement, quels sont les postes principaux impactés ? • le capital informationnel, qui se mesurait en mètres linéaires d’archives et désormais de plus en plus en nombre de CD ; • la formation du personnel, la fonction support ;
• l’archivage, la conservation et la pérennisation (processus, standards). Compte tenu de ces impacts qui ne sont pas des moindres et aussi du fait que très souvent, la solution qui a cours dans l’entreprise a
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• les achats (licences, maintenance) ;
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été déployée en moyenne il y a dix à vingt ans, le projet de refonte du poste de travail réclame une étude minutieuse. Il faut commencer par dresser un panel des solutions qui vont être analysées en y mettant des représentants pour les trois catégories citées plus haut et la « solution idéale » ; elle n’existe peut-être pas, mais portera exactement les besoins de l’entreprise et matérialise la cible. La détermination des fonctions effectivement utilisées actuellement dans l’entreprise va permettre de cerner le besoin minimum. Elles sont nécessairement incluses dans la solution idéale. Les analyses comparatives porteront sur ces fonctions utilisées et prendront en compte les points d’attention relevés plus haut. Mais à côté de ce travail très classique, l’écoute et la rencontre des utilisateurs seront de première valeur. Ce n’est pas en leur parlant de l’existant seulement qu’il sera possible de choisir la suite de demain. L’organisation d’ateliers autour de la collaboration a toutes les chances de faire tomber des murs entiers de « mauvaises habitudes », les bonnes pratiques collaboratives d’aujourd’hui n’ayant pratiquement jamais été informatisées. À l’issue de ces ateliers, la solution idéale sera enrichie. Le travail de comparaison pourra vraiment commencer.
Wiki
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Exemple : TWiki Avec un simple navigateur, l’utilisateur lit ou édite le contenu du wiki dans une interface agréable qui tranche avec l’austérité d’autres wikis. Aux fonctions classiques, comme celles de la consultation de l'historique des changements des articles, de la recherche d’un contenu précis, de l’utilisation des rétroliens, Twiki en offre d’autres, moins répandues. Ce sont par exemple la possibilité de joindre des documents aux pages, de gérer leur version ou d’administrer les droits des utilisateurs et des groupes. Plusieurs autres fonctionnalités en font un wiki orienté entreprise (British Telecom, le CERN, Disney, Google, Michelin, Motorola, Nokia, SAP, Sun, Yahoo!, etc., l’ont déjà adopté). L’information peut être structurée à l’aide d'espaces de travail distincts ou en associant des formulaires aux pages. L’utilisateur, qui débute avec des usages
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Figure 35 : http://twiki.org/
aussi simples que la lecture, peut graduellement en arriver à développer des applications métier.
Description Le premier wiki est né au début des années 1990… « Wiki » est un mot du dialecte hawaïen , « wiki wiki », qui signifie « rapide ». En 2001, l’encyclopédie en ligne Wikipédia est créée et démontre très vite la maturité de ce type d’outil. Le Web 2.0 n’est né que quatre ans plus tard. On peut donc s’étonner de voir le wiki associé au deuxième Web au point d’en être quasiment l’emblème. Mais replaçons les choses dans l’ordre : ce sont les usages qui ont dicté l’arrivée du Web 2.0, non les outils.
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De très nombreux greffons sont proposés et plusieurs sont déjà intégrés, par exemple les modules « commentaires », « feuille de calcul », « éditeur de table », « notification par courrier électronique », « diaporama », etc. Enfin, parmi les facilités pour l’utilisateur, on peut remarquer un éditeur WYSIWYG, les requêtes de recherche de type SQL, une procédure d'installation simplifiée et une gestion des greffons.
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Si nous réduisons le wiki à son minimum fonctionnel, nous obtenons un outil instantané, collaboratif et autogéré, doté d’une interface Web où les utilisateurs consultent et éditent un ensemble de contenus situés sur un serveur. La forme du contenu unitaire détermine souvent des usages précis. Ainsi, des wikis peuvent cibler la documentation, la gestion de projet, le support de produits, la communication dans une communauté, la résolution de problème, la généalogie, etc. Le contenu d’un wiki bénéficie de sa simplicité. Les mises à jour sont rapides, c’est un gage de fraîcheur pour l’information. Puisque tous les collaborateurs peuvent interagir sur le contenu, celui-ci gagne en fiabilité. La simplicité des gestes à apprendre pour l’utiliser place les utilisateurs à égalité. Il n’y a nettement moins à redouter de partitions entre experts et simples utilisateurs. Les compétences techniques à acquérir ne sont plus un frein. Les deux modèles de modération des publications sont possibles : a posteriori, a priori. Il faut se garder de poser des règles de publication trop strictes, elles anesthésieraient complètement la motivation des contributeurs et un wiki sans contributeur est un wiki mort.
Usages
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Figure 36 : Usages collaboratifs comparés
Jusqu’à ce jour, si l’on essaye de collaborer avec certaines personnes, souvent les seuls outils dont on dispose sont une bureautique et une messagerie. La figure 38 montre que cela n’est pas idéal : il
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existe beaucoup d’actions élémentaires et une forte circulation de documents. Avec le wiki, les actions se résument à deux seulement et le document est unique. Il n’y a plus de problèmes pour savoir qui a le document le plus à jour, ou si quelqu’un a perdu une mise à jour intermédiaire… La simplicité de cette collaboration favorise des usages comme : • la capture, la conservation et le partage de l’intelligence et de la connaissance collective ; • la constitution d’une base de connaissances métier dynamique ; • l’augmentation du nombre de contributions ; • la discussion autour des contributions ; • la recherche d’un consensus autour d’une information, d’un dossier ; • le développement de la participation ; • l’émulation de la synergie de groupes ; • le décloisonnement de l’information entre les services ; • la mutualisation d’un outil, de contenus ; • la valorisation de tous les participants. Il faut aussi être lucide : le wiki ne constitue pas la solution collaborative universelle. Le contenu n’est pas structuré, la modification peut être ouverte à tous et si les moyens de contrôle sont trop limités, des dérives, voire des malveillances, peuvent arriver. Cela reste tout de même marginal et éphémère.
Recommandations Si le projet Web 2.0 consiste à installer un wiki dans l’entreprise, il peut être bénéfique s’il permet de :
• faire contribuer tout employé puisque chacun peut apporter quelque chose selon ses connaissances, ses compétences ; • gérer efficacement les connaissances et permettre aux collaborateurs d’y trouver les bonnes pratiques, les réponses aux problèmes fréquents ;
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• fluidifier la circulation de l’information ;
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• valoriser et mobiliser les utilisateurs en leur permettant d’exposer leur savoir ; • réduire la quantité de courriels, surtout lors des collaborations sur un document. Il suffit de peu de chose pour bloquer un projet wiki, mais ces freins ne sont pas impossibles à juguler. Au démarrage, il est bon qu’un contenu initial significatif soit déjà présent avec un minimum de structuration pour ne pas imposer le syndrome de la page blanche aux utilisateurs. Une bonne campagne de communication doit accompagner tout lancement. Un wiki bien calé suscitera, par contagion, l’intérêt dans différents espaces de l’entreprise et les demandes pour d’autres wikis arriveront. Au niveau de son fonctionnement nominal, le moteur du wiki ne doit pas tomber en panne et les utilisateurs doivent toujours pouvoir se connecter. En effet, un wiki devient vite névralgique si les utilisateurs l’investissent. Ils y placent une information vitale.
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Pour la contribution, l’utilisateur peut être indécis quant au nom des articles, à la structure et à l’articulation des articles entre eux, à la présence de doublons, etc.
Évaluations On mesure un wiki à l’aide d’indicateurs sur les contenus, les utilisateurs et les usages. Contenus : nombre total d’articles, progression de la publication, taux moyen par article de consultation/commentaires/modification, répartition des consultations/commentaires/modifications, nombre de pièces jointes, typologie des pièces jointes, répartition des pièces jointes, etc. Utilisateurs : nombre d’utilisateurs, de commentateur, de contributeurs, de contributeurs actifs, nombre moyen de consultations/ commentaires/contribution par utilisateur, par groupe d’utilisateurs, cartographie hiérarchique (isocline) des consultations/commentaires/contributions, etc. Usages : certains wikis sont plus orientés vers la publication, comme médiawiki, ou vers le collaboratif, comme Twiki. Le fait de mesurer les usages permet de savoir si l’on a fait le bon choix. On mesura par exemple le nombre de liens encore ouverts, la répartition des
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nouvelles publications, celles des collaborations sur un même contenu, etc. Mais ces indicateurs ne sont pas les seuls puisque très rapidement, un wiki peut devenir l’un des outils les plus utilisés de l’entreprise ou d’un secteur. Il devient alors urgent de vérifier la robustesse de son architecture, les principes qui guident son stockage, la vitalité de la communauté Open Source qui le développe s’il est libre, les procédures de sauvegarde, la possibilité de la réversibilité, etc. Enfin, n’oublions pas qu’un projet wiki se gagne auprès des utilisateurs dès ses premiers jours d’usage. Il faut donc n’ouvrir le wiki à ses utilisateurs que s’il est efficacement suivi afin de pouvoir réagir au plus vite à tout signal impliquant un accompagnement.
Cas d’étude Adopter le modèle wiki en entreprise n’est plus un pari hasardeux. Dans une grande partie des cas, nous avons observé qu’en entreprise, le wiki avait été initialement mis en place par des francstireurs. Il suffit de peu de moyens pour installer et mettre en marche un moteur de wiki. Et puisqu’il facilite la constitution d’un capital d’informations de façon collaborative particulièrement souple, sans les lourdeurs hiérarchiques, avec des processus de publication non autoritaires mais plutôt une modération et un contrôle a posteriori, son adoption est rapide et progresse à la façon d’une tâche d’huile.
Les projets wiki sont dans la très grande majorité des cas des succès rapides. Pour s’en convaincre, il suffit de lire les blogs des responsables informatiques. Dans certaines entreprises, la gestion et l’animation du wiki sont devenues des compétences identifiées et incarnées par un collaborateur. Nous avons observé que pour chaque projet wiki identifié et lancé, on comptait près de deux demandes pour d’autres wiki
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C’est le schéma de l’innovation ascendante. Le succès des francstireurs aiguisant la curiosité des directions informatiques et surtout celles d’autres services, un projet d’entreprise peut alors avoir sa chance. Malheureusement, il arrive aussi qu’une hiérarchie bloque le wiki au nom de la sécurité, de la prudence. Les bonnes raisons ne manquent pas, mais ce n’est justement pas une bonne raison.
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dans l’entreprise. En satisfaisant une communauté existante, d’autres communautés se révèlent, se font connaître et reconnaître. Les demandes complémentaires ne sont pas commandées par le désir d’un outil Web 2.0 dans le vent, mais par les usages constatés dans le premier projet et par la valeur en retour, l’éclairage sur la communauté, son travail, ses idées et ses pratiques rendues visibles dans l’entreprise.
Blog Exemple : Kagou
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Figure 37 : http://blog.kagou.fr/
Comment choisir un blog pour en faire l’exemple de ce chapitre ? Sera-ce au hasard, en prenant le plus lu, ou le plus ceci ou cela ? Un blog exemplaire est un blog normal avec un graphisme simple, un nom facile à retenir, un thème clair, bref un blog qui affiche ses couleurs. C’est encore un blog avec des billets courts qui proposent quelques liens pour aller plus loin, des billets récents et fréquents, la possibilité de s’abonner aux billets ou à leur commentaire, un
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moteur de recherche, etc. Notons encore que Kagou, l’auteur de ce blog, précise quel type de licence régit ses billets.
Description Le mot blog vient de la contraction de Web et de log, qui signifie « journal de bord » en anglais. Le terme « weblog », utilisé dès l’apparition de cet outil, s’est raccourci en blog. Une seule syllabe est plus efficace et plus facile à prononcer. Il s’agit donc d’un journal Web que l’on peut voir comme la forme personnelle de l’appropriation du modèle collaboratif. En entreprise, comme en dehors, le blog est un outil personnel de publication d’articles, rehaussés de quelques illustrations et précisés par une poignée de mots clés (les tags), présentés antichronologiquement et qu’un moteur de recherche permet de retrouver facilement. Son succès vient de la simplicité qu’il offre dans la publication de l’information et la richesse des greffons proposés.
Carnet de bord Cet usage, le plus fréquent et le plus connu, trouve son utilité en entreprise, partout où une personne doit garder une trace écrite des événements et que la forme du petit billet de quelques lignes suffit. Il peut s’agir par exemple d’un journal d’exploitation, d’une « to do list », d’un suivi de mission. L’auteur, au lieu d’être une unique personne, peut être à tour de rôle plusieurs individus qui se succèdent à un même poste ou une petite équipe. On sent aisément aussi combien il peut être opportun de consolider les blogs de ceux qui exercent la même fonction dans l’entreprise. On trouve là de facto
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Usages En détrônant la page personnelle, le blog est aujourd’hui considéré comme une des figures emblématiques du Web 2.0. Les exemples de blogs célèbres ne manquent pas. Toutes les personnalités en vue de la société publient le leur blog. À l’inverse des blogs ont rendu célèbre leur auteur, certains l’ont même discrédité. En Chine, avant les jeux Olympiques de 2008, plus de trente blogueurs ont été mis en prison pour avoir exprimé leur opinion. À n’en pas douter, le blog est un média de communication qui peut être particulièrement puissant et même dangereux. Il convient de savoir en user sans en abuser.
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une communauté qui produit la matière première d’un retour d’expérience. Journalisme Puisque certains blogueurs ont un vrai talent, en plus d’être experts dans leur domaine de compétence propre, leurs écrits peuvent être repris par la communication interne ou externe de l’entreprise. Il est parfois bien difficile de réunir les articles nécessaires au bouclage du journal d’entreprise. Les blogs des collaborateurs sont des mines qu’il faut savoir creuser. Partage de connaissances et de compétences Les blogs internes établissent des canaux de communication à l’intérieur de l'espace Intranet de l'entreprise. Leur animation n’est pas confiée au niveau d’un seul plan hiérarchique, responsable ou simple employé. Le blog est destiné au développement de la collaboration, à l'échange d’informations, au partage des bonnes pratiques.
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Communication interne Puisque les moteurs de blog produisent des flux RSS, les collaborateurs peuvent s’abonner à un blog et en faire ainsi une source d’information tirée. Cela contribue d’une part à la réduction du volume des e-mails et d’autre part à la constitution et à la gestion des listes de diffusion. Il faut toutefois bien faire de la communication autour des blogs de référence. Cela peut se faire très simplement, soit par une planète (voir plus haut dans ce livre) soit par la publication de la liste des blogs dans une page de l’Intranet. Communication externe En les rendant accessibles depuis l’Internet, les blogs s’externalisent et deviennent de facto des médias de la communication externe. L’entreprise, ouvertement, sous sa marque, diffuse des informations sur ses produits et services. Il appartient au service clients ou au marketing d’y publier régulièrement. On rencontre aussi, mais plus rarement, le « point de vue » des dirigeants. Si l’entreprise communique, elle ne peut ignorer ce média, mais doit bien en comprendre les règles du jeu. Quoi qu’il en soit, il faut éviter celle-ci, qui s’observe de plus en plus : « Plus l’entreprise est grosse, moins son blog est intéressant. » Le blog n’est pas une plaquette.
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Baladodiffusion Pour agrémenter le blog d’un contenu multimédia, des fichiers son et vidéo peuvent y être intégrés. Si un abonnement à un flux RSS spécialisé est proposé, les utilisateurs pourront automatiser le téléchargement d'émissions audio ou vidéo pour leur baladeur numérique ou leur ordinateur personnel en vue d'une écoute immédiate ou différée. Vidéoblog On rencontre cet usage du blog plutôt dans la sphère privée. Toutefois, peu à peu certaines entreprises s’y mettent et réalisent des petites séquences filmées à vocation principalement interne. Le groupe AcelorMittal, pour sa communication interne, publie régulièrement des vidéos sur la fusion des deux sociétés. Le groupe Atos Origin, lui, met en scène des bonnes pratiques et les diffuse.
Recommandations Une entreprise peut tirer de nombreux avantages des blogs internes ou externes.
Choisir une plate-forme Quel est le meilleur moteur ? Faut-il que tous les blogs de l’entreprise soient motorisés avec le même moteur ? Et si tous sont dotés du même moteur, faut-il les mêmes greffons ? Doit-on choisir le moteur d’un des « pure players » qui proposent des versions de plus en plus « pro » de leurs outils qui passaient, au début, pour des goodies, ou celui des grands éditeurs comme Microsoft, IBM, SAP, Oracle, etc. ? En dehors de toute considération technique, le choix
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Thématiser Il existe autant de types de blogs que de thèmes sur lesquels on peut communiquer. C’est une lapalissade. Prenons la question dans l’autre sens. Ayant créé un blog, il ne faut pas se demander ce que l’on va en faire, mais s’il faut communiquer dans l’entreprise pour telle ou telle raison : le blog est-il un média adapté à la situation, aux lectorats ciblés, au retour qu’on attend de lui, etc. ? S’il s’avère opportun d’ouvrir un blog, son objet doit être clairement lisible et son lancement accompagné d’une communication adaptée. La sobriété d’un blog en fait sa valeur.
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d’un moteur de blog et de son bouquet de greffons se fait sur des critères fonctionnels et les usages qu’ils servent. Si le responsable informatique de l’entreprise peut prendre une option sur telle ou telle technologie, il est très souhaitable que les besoins fonctionnels aient aussi été recueillis. Pour que le blog atteigne son but, ce sont les usages qu’il permet qui sont déterminants. Rédiger Quand faut-il rédiger un billet ? Que faut-il raconter ? Combien de sujets faut-il traiter dans un blog ? Comment doit-on répondre aux commentaires ? Bien sûr, le blog est une page blanche, mais ce n’est pas le journal de l’entreprise. Le style « prise de notes » ou « compterendu de réunion » est parfaitement adapté. L’important est que l’information circule. Et après quelques billets, on trouve très vite le ton juste. Offrir un dialogue bidirectionnel Le blog établit un lien réciproque entre l'entreprise et ses lecteurs. Il sera d’autant plus efficace et pertinent qu’il sera confié à une même personne qui aura pour mission de le faire vivre au quotidien. Un blog d’entreprise qui publie dix articles le premier mois puis s’assoupit au point de ne plus rien diffuser pendant des mois devrait plutôt être démantelé.
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Rajeunir l'image En termes d'image, les blogs internes permettent de répondre à la demande des jeunes embauchés qui possèdent une culture du blog et qui savent en faire un outil avec naturel. Ils pourront entraîner leurs aînés. Le ou les blogs externes de l’entreprise la positionnent avantageusement comme techniquement avancé, mais aussi impliquée dans les nouveaux usages. Stopper un blog Un bon blog délivre des informations fraîches et utiles. Si ce n’est plus le cas, les lecteurs s’en désintéressent. En surveillant l’audience, il est facile de suivre le succès de ce média. La tenue d’un blog peut donc être remise en cause, faute de lectorat. Il faut alors savoir stopper un blog, peut-être le fermer. Les contenus devront-ils être
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conservés, sous quelles formes ? Puisqu’un blog est un média vivant, il peut mourir.
Évaluations Pour les blogs externes, l’évaluation passe par le suivi de leurs référencements dans différentes sphères. En premier lieu, on pense à Google et à son « page rank » ou encore à Alexa. En termes de référencement, un blog externe bénéficie en général d'un positionnement de meilleure qualité que celui du site Web de l'entreprise, du fait des dispositifs propres au blog que sont la réécriture d'URL, les fréquentes mises à jour et les rétroliens. Si on cherche des indicateurs spécifiques aux blogs, on trouve aussi des petits outils qui calculent la valeur financière d’un blog. Mais leurs résultats diffèrent d’un outil à l’autre et de façon très discordante… Que faut-il en penser ? L’évaluation d’un blog est et demeure subjective tant qu’on ne lui a pas assigné un objectif précis. Il est alors nettement plus facile de concevoir une métrique ad hoc pour juger de l’atteinte ou non du but. Le bon sens enseigne qu’on ne mesure pas du flou.
L’analyse quantitative des fichiers traces (en anglais, « log ») permet de suivre l’audience. Si on utilise des outils de statistiques, des indications sur les usages peuvent même être déduites. Il s’agit d’informations précieuses pour aider les blogueurs à trouver une meilleure audience ou à stopper l’expérience. En entreprise, à vouloir accéder à toutes sortes de données sur les blogs internes, ne risque-t-on pas de franchir la ligne rouge de l’éthique ? Les blogs sont des lieux d’expression. La liberté d’expression et ses exigences font partie du décor. Une charte doit poser les règles et les limites du bon usage.
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Les blogs internes sont plus faciles à évaluer que les externes. Le lectorat est connu et captif. Dans ce cadre, les enquêtes de satisfaction constituent des outils efficaces, tout comme les sondages. Mais attention aux dérives. Si le directeur a un blog, il est possible de savoir qui l’a lu. Si les chefs de projet doivent tenir un blog, on peut savoir quels blogs ne sont pas lus ou qui ne l’a pas lu. Les fichiers traces peuvent révéler beaucoup de choses. Pour autant, faut-il chercher à obtenir ces informations ?
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Cas d’étude Plusieurs grands groupes – entre autres IBM, Sun et Microsoft – ont encouragé leurs collaborateurs à bloguer. Dès 2005, IBM avait fait appel à tous ses collaborateurs. Le célèbre constructeur invitait ses 130 000 employés à parler des produits et des technologies de l’entreprise, que ce soit dans leur blog personnel ou dans leurs commentaires. Pour faciliter l’opération, un guide de bonne conduite a été distribué à tous où il est recommandé, par exemple, d’écrire à la première personne, de toujours signer ses billets ou ses commentaires, etc. Il s’agissait aussi d’indiquer des bonnes pratiques comme de rechercher et de citer, dans les billets, tous les blogs qui abordent les mêmes thèmes. Lancée en décembre 2004, l’initiative IBM comptait cinq cents blogs internes en février, 3 600 en juin et 15 000 après un an ; et le développement des blogs externes fut cinq fois moindre. Ces données chiffrées sont intéressantes et ne s’appliquent pas seulement à la culture américaine : les blogs sont tenus par des utilisateurs répartis dans près de soixante-dix pays. À l’inverse de cet exemple, plusieurs entreprises ont une politique interdisant toute interactivité sur un site « corporate ». Les questions soulevées sont nombreuses : que choisir ? Permettre des blogs internes, permettre des blogs externes ? Qui peut publier ? Qui doit publier ? Comment aider les auteurs ? Faut-il les contraindre ? L’entreprise doit prendre position en matière d’utilisation des blogs. Elle doit pouvoir l’expliquer et faire évoluer sa position. Une mission d’étude est certainement nécessaire pour aider la direction à prendre sa décision.
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Mashup Exemple : Askvox Vox est un agent virtuel qu’on peut interroger sur toutes sortes de sujet. La réponse est vocalisée avec une voix synthétique féminine. L’avatar de Vox est animé, ce qui le rend plus réaliste. Le dialogue se fait en langue anglaise. Le design est simple et renvoie au champ graphique habituel du Web 2.0 (par exemple traits épais, bords arrondis, caractères sans sérif, effet ombré).
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Figure 38 : http://www.askvox.com/
Quand Vox n’a pas de réponse, on peut lui en donner. Le mécanisme d’autoapprentissage est modéré par un signalement d’abus. Il est aussi possible (par un lien en bas de page) de demander à faire partie des modérateurs. Il faut alors répondre à une liste de vingtcinq questions. En fonction de leur qualité, la candidature est acceptée ou rejetée.
Revenons au mot « mashup » pour mieux comprendre ce dont il s’agit. Ce terme vient de la musique, où il désigne un assemblage de fragments musicaux de toute sorte dont le résultat mixé est un nouveau morceau. Si on remplace les fragments de musique par des données provenant de diverses sources d’information et des fonctionnalités d’application disposant d’une interface de programmation (API) et si on substitue un éditeur de mashup à la table de mixage, on dispose alors du matériel nécessaire à la fabrication de mashups. Un mashup désigne donc un site ou une application Web
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Techniquement, ce site utilise des services du moteur de recherche Yahoo!. La mention en est explicitement donnée par le petit sticker « web services by Yahoo! ». Les questions sont soumises au moteur, puis les réponses sont transmises à un vocaliseur. La composition de ces deux services en crée un nouveau.
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créée à partir de données et de fonctions existantes que l’on a assemblées. Sa valeur ajoutée ne tient donc pas aux constituants (données ou fonctions), mais à leur composition (interface utilisateur ou assemblage de sources de données).
Usages Dans les entreprises, on peut entendre un commercial dire « Si je pouvais combiner les données des ventes et la carte de mon territoire, je pourrais intensifier ma prospection » ou un agent immobilier déclarer « J’aimerais mettre les photos des maisons à vendre dans mon agenda ». Le mashup répond à ce type d’expression de besoins. Repérer des possibilités de mashup On ne décide pas de faire du mashup simplement pour faire du mashup. Cette approche ne vaut que s’il s’agit d’expérimenter cette technique de conception. En revanche, en observant les manques fonctionnels et les manques d’information de l’entreprise, en commençant par regarder dans les backlogs (ces listes des restes à faire de projets), on peut repérer des mashups potentiels. Pour chaque manque identifié, une analyse rapide doit indiquer sa nature (données, fonctionnalité, les deux à la fois) et les ressources de base qui pourraient entrer dans sa composition. Pour qu’une ressource soit utilisable, il faut en connaître les spécifications. Cela signifie que ces dernières sont publiées ou exposées. Si ce sont des données, il faut un accès à leur flux (RSS ou Atom) ; si ce sont des fonctions, il faut la description de leurs API.
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Si la présence de ces normes ou standards facilite grandement la création d’un mashup, leur absence n’interdit pas tout projet. Il faudra en revanche ajouter une étape pour que les ressources à intégrer soient bien conditionnées. Innover En partant des ressources existantes et prêtes à l’intégration, c’est-àdire en prenant le contre-pied de la méthode précédente, il s’agit d’interroger sur l’opportunité de mixer des ressources habituellement non liées dans le système d’information de l’entreprise. Pour réussir cet exercice, il faut créer un cadre propice à l’innovation. Et puisque le Web 2.0 est celui des usages, il faut partir de cas concrets, de la
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situation de l’entreprise. Les réalisations pourront commencer par des prototypes rudimentaires. Un coup d’œil sur les sites qui cataloguent les mashups déjà réalisés peut développer la créativité. Valoriser l’initiative personnelle On assimile de plus en plus le mashup à la base de données bureautique des années 1990 qui avait permis tant de développements personnels de la part de collaborateurs astucieux et inventifs. Créer un mashup ne demande pas un investissement important, ni en temps ni en termes de compétences techniques. L’initiative revient souvent à une personne qui a commencé par vouloir découvrir une nouvelle technologie. Si son mashup résultant répond à un vrai besoin et que cela est reconnu par quelques-uns, très vite cela se saura par contagion. Il est opportun alors de tout faire pour que ces initiatives soient canalisées positivement. En réponse à cette notoriété de facto peut se produire une mise en avant officielle dans l’Intranet de l’entreprise. On se souvient trop des désagréments des développements non répertoriés qui finissent par détourner les outils de l’entreprise et qui sont la source de risques majeurs. Le passage à l’an 2000 nous a-t-il vaccinés ? Offrir le mashup, vendre autre chose La plupart des mashups accessibles sur Internet sont gratuits. Comment faire payer un service dont les composants n’appartiennent pas au réalisateur du mashup ? Peut-on faire payer un mashup dont les composants sont gratuits ? Quelle modalité de rétrocession imaginer ? Les aspects à prendre en compte pour mettre au point un modèle économique sont multiples. L’une des solutions le plus souvent adoptée consiste à déplacer la question. Une fois le mashup créé, on peut y placer de la publicité, des programmes d’affiliation… dont on tirera des revenus, le mashup restant gratuit.
Respecter les copyrights Très souvent, les données des sites, et donc de leur flux, sont sous copyright. On ne peut pas les reproduire sans en obtenir la permission du propriétaire. Si on n’a pas l’autorisation, il faut rester dans la
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Recommandations
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légalité des obligations liées à l’utilisation des données sans autorisation du propriétaire. Ne pas saturer les fournisseurs Si un mashup émet trop de requêtes vers ses fournisseurs de données pour des extractions sur leurs serveurs, il est possible de les saturer. Sans accord avec les fournisseurs, ceux-ci risquent de réagir rapidement et de bloquer le mashup. Il faut donc régler la fréquence des requêtes au juste milieu entre le confort des utilisateurs du mashup et celui des fournisseurs. Cela prend généralement environ quelques secondes. Surveiller les fournisseurs Le mashup n’est pas maître de ses fournisseurs. Au contraire, il en dépend complètement. Si l’un d’eux modifie ses flux, ses services, le mashup peut être stoppé net. Pour s’en prémunir, soit l’on passe un accord avec le fournisseur pour être informé au plus tôt, soit l’on surveille soi-même, par exemple à l’aide de solutions de surveillance de sites (services tiers qui informent par e-mail depuis l’extérieur de l’entreprise). Respecter les fournisseurs Si un mashup intègre des données et des services, c’est parce qu’ils ont été jugés de qualité. Il est bon de mentionner ses sources par un lien, un logo, une mention positive. Cela présente plusieurs avantages : attirer les bonnes grâces des fournisseurs, générer du trafic vers les fournisseurs et donc augmenter leur audience, augmenter le crédit du mashup par retour.
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Anticiper sur les fournisseurs Si un fournisseur demande à ne plus être utilisé, il faut répondre rapidement et positivement à la requête. Il faut toujours disposer d’au moins une solution de repli pour passer au plan B. Se préparer, « mashabiliser » le SI Pour créer des mashups, il faut préparer le terrain : rendre le système d’information recomposable (en anglais « mashable »). Voici les étapes à suivre.
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Il faut tout d’abord séparer les informations de leur présentation, par exemple en produisant des flux de données (RSS ou Atom) ou en rendant les bases de données accessibles par Web services. Il faut encore transformer l’architecture du système d’information pour faciliter l’accès aux données pour aboutir soit à une architecture orientée service (SOA) avec le protocole SOAP, soit à une architecture orientée ressource (ROA) avec le protocole REST. Ensuite, on doit créer des services d’accès avec des API en Javascript d’une part aux services SOAP ou REST avec AJAX ; aux flux aux standards RSS ou Atom d’autre part. L’étape suivante consiste à communiquer sur le potentiel de recomposition avec des documents de référence mais aussi par des exemples concrets. Enfin, il faut accompagner la recomposition avec un support méthodologique et un suivi des initiatives, depuis l’idée jusqu’au développement. Référencer les mashups Les moteurs de recherche ne disposent pas de catégorie « mashup », « fournisseur de mashup » ou « fourniture pour mashup ». Il est donc opportun de tenir une page à jour sur le site de l’entreprise où les informations qui doivent être portées à la connaissance de l’extérieur sont explicitées et peuvent être référencées. Valider les mashups Lorsqu’on conçoit un mashup, il faut procéder avec méthode à une série de tests de validation. En effet, puisqu’il est impossible de corriger un composant de mashup qu’on n’a pas développé, les bugs éventuels doivent être identifiés et contournés.
Écouter ce qu’en disent les gourous Pour Douglas Crockford1, architecte chez Yahoo! connu pour ses contributions à JavaScript et JSON, les mashups constituent l’une des innovations les plus intéressantes en matière de développement de logiciels depuis la fin des années 1980. 1. http://www.crockford.com/
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Évaluations
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Pour sa part, Jeff Huber, vice-président de l'ingénierie chez Google, estimait en 2006 que le mashup était une nouvelle approche de développement qui pourrait diviser par dix les temps de développements. Enfin, selon le cabinet Gartner Research, les mashups seront le modèle dominant (80 %) pour la création des applications composites d’entreprise. Catégoriser son besoin de mashup En fonction de ce qu’on a besoin d’intégrer, on aura recours à un mashup de données, un mashup de services ou un mashup mixte. Choisir un moteur de mashup Le choix du moteur doit tenir compte d’un certain nombre de paramètres dont les suivants. Le type de composition est l’un d’eux : • enchaînement de services (modèle du workflow) ; • modèle « feuille de calcul » ; • « Web clipping » (insertion d’une page Web dans une page d’un autre site) ; • « page scrapping » (récupération du contenu d’une page Web pour le réutiliser). Citons aussi la maturité, la richesse fonctionnelle, la facilité d’utilisation (pour un informaticien, mais aussi pour un non-informaticien) et enfin les technologies (socle et ouverture pour l’intégration).
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Aucun moteur n’est supérieur à tous les autres. C’est en fonction de l’importance pour l’entreprise de tel ou tel aspect que l’on peut retenir un moteur.
Cas d’étude Tous les analystes s’entendent pour prédire aux mashups des lendemains qui chantent. Pourtant, l’horizon des entreprises ne s’éclaire pas de leur lumière salvifique. Des problèmes de sécurité des mashups expliqueraient-ils cet atermoiement au démarrage ? Voyons cela de plus près. Le mashup intègre plusieurs sources. Si l’une d’elles est de piètre qualité et que son niveau de confiance s’avère difficile à évaluer,
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alors la faiblesse du maillon affectera l’ensemble et la probabilité d'apparition d’une faille de sécurité augmentera. Ne baissons pas les bras, voici quelques remèdes : ne retenir que des sources dont la fiabilité est certaine, limiter le nombre de sources, vérifier les données reçues pour éviter les injections de type XSS, programmer plus sûrement en suivant les recommandations de l'alliance OpenAjax1. Il ne faudrait pas que les problèmes de sécurité freinent l’adoption des mashups par l’entreprise quand il existe des réponses techniques pour corriger le tir. IBM a parfaitement compris le profit à tirer de cette peur. Son offre « smash » a été conçue pour créer directement les mashups dans un environnement sécurisé. Smash isole chacun des composants du mashup, contrôle leur communication interne et bloque les accès à l’extérieur.
Flux Exemple : Le Monde
Le quotidien Le Monde propose à ses lecteurs de s’abonner à des flux (ou fils) thématiques. Pour leur faciliter la vie, ces flux ont été 1. http://www.openajax.org/whitepapers/Introducing%20Ajax%20and%20OpenAjax.php
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Figure 39 : http://www.lemonde.fr/
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thématisés et disposés dans un ordre précis répondant aux indices de lecture décroissant. Il est possible d’ajouter directement les flux aux trois agrégateurs actuellement les plus en vogue.
Description Nul besoin d’être sorcier pour comprendre les flux d’information. Le bon sens sera pour nous le meilleur guide. Monsieur de La Palisse aurait pu dire : « Un flux d’information, c’est de l’information qui s’écoule. » Derrière cette apparente banalité, nous trouvons l’essentiel : une information n’est présente dans un flux que pendant un délai de temps qui dépend du débit du site. Dit autrement, dans un site où l’on publie beaucoup et régulièrement de l’information, le débit est grand. L’information ne reste pas longtemps disponible dans le flux. À l’inverse, un site moribond qui souffre d’anémie informationnelle chronique aura un débit quasi nul : son flux sera presque à l’arrêt. Notons une seconde caractéristique des flux que laisse entrevoir notre métaphore et qui peut sembler tout aussi banale : un flux s’écoule d’autant mieux qu’il est fluide. Si les informations qui forment le flux sont standardisées, les traitements de leur production comme de leur consommation en seront grandement facilités : voilà pour la fluidité promise. Un flux désigne une courte liste d’accroches présentées antichronologiquement. Chaque accroche ne contient généralement que quelques mots et un lien qui renvoie à plus de détail. Elle doit susciter l’envie chez le lecteur d’en savoir plus. Un flux est donc idéal pour rendre compte de l’actualité, pour faire valoir l’important, l’essentiel. Il s’agit d’un objet d’une extrême simplicité. Pourtant, à en juger par les usages qu’il offre, c’est un composant Web 2.0 de première classe.
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La syndication, mot hérité de l’anglais, est apparue initialement dans l’audiovisuel pour désigner la diffusion d’un même contenu sur des supports différents et sous des formes variables. Par analogie, les technologies de syndication du Web ont d’abord été utilisées par les sites de presse pour diffuser les titres des dépêches et des articles. Le désormais célèbre RSS vient de là. Tout l’intérêt d’un flux tient aux gains qu’il offre. Le premier de ceux-ci est le gain de temps à la prise de connaissance pour le lecteur. Il n’a plus à aller lire les informations sur leurs sites d’origine. Seul le strict résumé des informations les plus récentes est
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mis à disposition par syndication. Si un sujet retient l’attention du lecteur, un clic suffit pour aller lire la suite au bon endroit.
Usages Recevoir un flux Comment savoir qu’un site vient d’être mis à jour ? Comment avoir accès à des informations qui nous intéressent sans être obligés d’aller à leur recherche tous les jours et d’y perdre un temps qu’on n’a pas ? La réponse est connue sous le nom d’information poussée (peut-être connaissez-vous plutôt le mot anglais « push » ?). Avant, l’utilisateur devait se connecter puis chercher l’information ou tirer l’information à lui puisqu’il ne pouvait pas rester branché tout le temps. Aujourd’hui, les abonnements des fournisseurs d’accès sont nombreux sur un marché concurrentiel, le coût des télécommunications baisse régulièrement et les technologies ont fait des progrès immenses. Nous pouvons être connectés en permanence et recevoir au plus tôt toute information, dès sa parution. Les usages ne manquent pas en entreprise de mettre à profit cette possibilité d’être informé sans délais. S’abonner à un flux La meilleure façon de recevoir l’information poussée consiste à s’abonner aux flux continus d’information qui nous intéressent. Au passage, notons que c’est une bonne façon d’éviter d’être bombardé de spams.
Il ne faut pas non plus négliger les réseaux sociaux. En interrogeant ses « amis », on peut obtenir des réponses d’une haute pertinence. Entre amis, il existe une connaissance réciproque qui dépasse ce qu’un moteur de recherche peut savoir. S’abonner constitue la seconde opération. Elle demande d’inscrire les flux choisis dans un lecteur de flux ou un agrégateur de flux. Nous verrons la question du choix de ce composant dans les para-
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Concernant les flux externes à l’entreprise, commençons par repérer des flux intéressants. Il existe des moteurs de recherche spécialisés, des annuaires thématisés. On peut aussi utiliser les moteurs de recherche classiques moyennant des requêtes spécialisées ou astucieuses (www.newsisfree.com).
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graphes qui suivent. Sur Internet, les abonnements aux flux sont de plus en plus gratuits et anonymes. Concernant à présent les flux internes à l’entreprise, des flux peuvent être produits dans une société pour informer une communauté de pratiques, une équipe projet, etc. Les personnes qui doivent s’abonner à ces flux sont prévenues. D’autres peuvent s’y adjoindre volontairement si les flux ne sont pas exclusifs. Lire un flux, lire des flux La lecture d’un flux doit être rapide, c’est sa première caractéristique. Des lecteurs de flux sont disponibles dans toutes les technologies. Voici quelques exemples : • pages d'accueil personnalisables (client léger) (Netvibes, iGoogle, Yahoo, Bloglines) ; • greffons de navigateur (RIA) comme Sage (Firefox) ; • lecteur (client riche) ; ces applications hors navigateur dépendent donc du système d’exploitation (Multiple RSS Feed Reader d’Apple, FeddDemon de Windows, Akregator de Linux ; • intégration dans le client de messagerie (Thunderbird, NewsGator Inbox d’Outlook) ; • téléphones portables (NewsGator Go !, NetNewsWire) ; • PDA (Hand_RSS de Palm).
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Mettre un flux en favori Si on place l’adresse d’un flux dans ses favoris, quand on reviendra le lire quelques jours plus tard, son contenu aura probablement changé. Si on veut garder un lien sur une information lue dans un flux, il faut placer le favori sur cette cible. Manipuler des flux Il est possible de manipuler les flux à des fins diverses. L’offre de services est importante et parfois même très innovante. Cela peut stimuler les projets. Par exemple, xfruits1, une startup corse, propose des fonctions de fusion de flux, conversion, transformation 1. http://xfruits.com/?lg=fr/
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de flux en e-mail, page Web, pdf ou page pour mobile, vocalisation, envois de flux par e-mail. Citons quelques manipulations de base qui correspondent à des usages en entreprise. L’envoi par mail transforme le contenu d’un flux en e-mail et l’envoie à des abonnés. Le flux couplé à une liste de diffusion devient une lettre d’information. L’agrégation de plusieurs flux consiste à les assembler pour en former un nouveau. Le résultat est présenté antichronologiquement. Typiquement, l’agrégation des flux des quotidiens du matin peut alimenter la direction de la communication. Avec le mashup, la combinaison de flux peut se complexifier plus qu’une simple agrégation. L’assemblage peut faire intervenir des filtres, des Web services, etc. La direction de la communication peut demander la création d’un flux spécialisé sur les marques de l’entreprise dans la presse quotidienne. Plus on pousse le modèle, plus on approche ici des agents de business intelligence. Enfin, l’encapsulation sous la forme de widget peut être une autre forme encore d’utilisation d’un ou de plusieurs flux. On trouve des services de création de widget sur Internet, par exemple avec grazr (www.grazr.com). Produire un flux La production d’un ou de plusieurs flux pour permettre aux utilisateurs de suivre l’actualité de l’entreprise est un service de base disponible dans un très grand nombre d’outils Internet. C’est le cas par exemple des moteurs de blogs, de wikis, des gestions de contenu.
Référencer un flux C’est la même opération que pour un site Internet, mais elle s’applique spécifiquement aux flux de l’entreprise. L’effort peut par exemple porter sur le référencement des pages sur lesquelles les utilisateurs trouvent les adresses des flux pour s’y abonner.
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Un fichier XML est tenu à jour par flux publié. Le nombre de flux dépend du nombre de formats de flux proposés par le site. Chaque fois qu’un article est publié, le ou les fichiers sont recréés à la bonne URL, prêts à être lus. La production de flux peut être réalisée à destination de l’extérieur ou de l’intérieur.
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S’il s’agit de référencer le contenu d’un flux, le travail est différent. Techniquement, le contenu d’un flux étant un fichier XML mis à jour sur le site en temps réel, on peut utiliser un outil de réécriture du flux XML en page HTML et faire référencer cette dernière. Rechercher un flux On ne recherche pas un flux pour lui-même, mais pour ses qualités qui sont de rester dans le thème annoncé, éviter toute digression ; publier des informations fraîches, c'est-à-dire fréquentes et nouvelles ; et d’être rapidement exploitable en respectant son ergonomie. Il suffit à un flux de déroger à ces principes un petit nombre de fois pour être abandonné par ses lecteurs. Une fois déréférencé, le flux n’a plus aucune chance de revenir. Archiver un flux Dans Internet Explorer 7, la dernière version du navigateur de Microsoft, il est possible d’enregistrer un flux RSS et de consulter les informations déjà téléchargées. On peut modifier les paramètres d'archivage des flux, globalement ou au niveau du flux. L’historique peut conserver jusqu’à 2 500 éléments par flux.
Recommandations
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Faire passer du flux aux contenus Les flux délivrent une information très réduite qui renvoie vers plus de détails dans un blog, un wiki, etc. Au minimum, lorsqu’on découvre un flux, on y lit les titres tronqués à quelques dizaines de caractères flanqués d’un lien vers un article ; parfois ce titre est avant tout une accroche racoleuse. Lorsqu’il y a plus de place, on peut trouver la date, le titre en entier, le début de l’article, le nom de l’auteur, etc. À ce niveau, nous devons constater une vraie différence entre le Web dans et hors de l’entreprise. En effet, sur Internet, la publicité est présente sur les sites qui en tirent un revenu substantiel quand ce n’est pas l’unique source. Aussi, si les flux d’information fournis par de tels sites sont trop explicites, le chaland risque de ne pas s’y rendre lui-même. En revanche, un flux qui sait rester accrocheur a toutes les chances de faire passer son lecteur de l’autre côté du
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miroir. Et comme la publicité paie à raison de la fréquentation, la boucle est bouclée. Dans l’entreprise, le raisonnement n’est pas le même. La prime ne dépend pas du nombre de clics. Le lectorat se gagne à la qualité du contenu, à sa fraîcheur. L’élément de flux présenté ne cherche pas à provoquer le clic, mais vise à faire gagner du temps en délivrant la bonne combinaison entre la clarté de l’information et le temps de parcours du flux à lire. On pouvait lire en 2007 sur le blog de Cyril Durand, consultant indépendant (http://blogs.codes-sources.com/cyril/) : « C'est donc autour de 1 000 posts que j'ai à lire. Rassurez-vous je ne lis pas tous les posts, seulement ceux dont le titre m'intéresse et souvent en diagonale. Cela me prend entre vingt et trente minutes par jour. » Suivre les standards Un flux est une liste d’éléments de flux, lesquels se caractérisent par leur taille (nombre de caractères), leur présentation (texte pur ou mise en forme HTML), avec ou sans inclusion multimédia (images, sons, etc.). C’est au niveau du flux qu’on définit le nombre d’éléments présents qui le constituent et les standards qui le structurent.
Pour le producteur, il n’y a pas de bon choix puisqu’il appartient au lecteur et non au producteur de flux. Le mieux de proposer le maximum de standards, à l’instar de ce que fait le journal Le Monde. En fait de sélection, il faut tout prendre : RSS et Atom. Abondance de biens ne nuit pas. Tous ces formats sont tous basés sur XML et leur dernière version (RSS 2.0 et Atom 1.0) offre la possibilité d’étendre le format en utilisant les namespaces. Cela signifie qu’il est possible d’ajouter des éléments tout en respectant les standards. Autrement
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Les premiers flux d’information apparus ont été très vite appelés flux RSS. Il s’agit d’un ensemble de formats XML dont plusieurs niveaux de standard existent. En fait, il faudrait donc distinguer le Rich Site Summary (RSS 0.91), le RDF Site Summary (RSS 0.92 et 1.0) et Really Simple Syndication (RSS 2.0). Mais l’affaire s’est semble-t-il encore compliquée avec l’arrivée d’un nouveau standard, Atom, qui ambitionne de rendre les choses plus simples. Il faut aussi signaler OMPL. Alors comment choisir ?
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dit, en tant que producteur de flux, il est désormais possible d’octroyer toute la richesse qu’on souhaite aux flux. Pour le lecteur, étant un consommateur de flux, il faut rechercher un lecteur de flux qui acceptent les dernières versions des standards. On accède alors à toute leur richesse. Respecter l’ergonomie du flux Pour être exploitable, un flux doit présenter un certain nombre de qualités qui le rendent facile et agréable d’emploi. Tout d’abord, le nombre d’items présentés dans le flux doit être paramétrable du côté producteur comme du côté lecteur. Par ailleurs, le poids d’un item de flux doit être très faible pour en permettre le suivi par le plus grand nombre. De plus, le graphisme des items doit être identique et simple. L’important est de les lire vite et d’aller à plus de détail si l’élément est pertinent. Enfin, les items sont toujours présentés par défaut selon l’ordre antichronologique.
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Filtrer un flux Les lecteurs d’un flux ne sont pas nécessairement intéressés par toutes les informations et pourraient préférer des flux thématiques. Pour répondre à cette demande, il faudrait commencer par repérer tous les thèmes à servir, puis intervenir techniquement dans le site pour démultiplier la production des flux selon cette nouvelle distribution. Mais cela ne met pas à l’abri de nouvelles demandes pour de nouveaux flux. La solution n’est pas du côté de la production du flux de syndication. La réponse doit être donnée aux lecteurs et à leurs outils d’accès aux flux pour que ces derniers n’accèdent qu’à la portion utile et désirée. Un certain nombre de solutions existent, qui permettent d’envisager sereinement la question des flux thématisés. C’est bien une réponse « à la Web 2.0 » ! L’usage se précise, se spécialise et l’utilisateur n’est pas soumis au bon vouloir de l’administration du site dont il ne veut accéder qu’à une partie du flux. Il peut, en revanche, mettre en œuvre de son côté un dispositif de filtrage qui lui fournira le service correspondant à son besoin. Le Web 2.0 rend l’utilisateur de plus en plus acteur. Les solutions de filtrage sont multiples et on peut trouver leurs derniers développements dans plusieurs blogs avertis. Nous nous
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contenterons d’indiquer ici des services auxquels on peut facilement faire appel. Les uns construisent une URL qui intègre un filtre. Cette adresse sert alors le flux filtré. Prenons quelques exemples pour voir leurs limites.
Figure 40 : http://www.filtermyrss.com/
Figure 41 : http://re.rephrase.net/filter/
Voici encore un service gratuit. Cette fois, on a accès à une documentation développée. ReFilter est très complet au niveau des
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Ce service propose de filtrer des flux à l’aide de mots clés. Il traite parfaitement les flux RSS, mais ne prend pas en compte les autres standards de flux comme Atom.
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standards de flux reconnus et des opérations proposées pour construire votre filtre. Enfin, le texte source étant disponible, on peut donc installer cette technologie dans l’entreprise pour régler d’éventuelles questions de sécurité. Valider un flux Avant de mettre un flux en production, il est bon de pouvoir le valider. Plusieurs sites proposent des services de validation pour une très large variété de standards de flux. Migrer un flux Quand un site change d’adresse, ses flux vont eux aussi changer d’adresses. Il y a un grand risque de perdre alors d’un coup tous les abonnés. Une vraie catastrophe. Heureusement, il existe un service gratuit pour parer le coup : Feedburner (www.feedburner.com/). Certains pourront hésiter à utiliser ce service, dont la pérennité n’est pas garantie. Mais pour l’heure, il n’existe pas d’alternative. On peut aussi avoir besoin de migrer ses flux quand le nombre de lecteurs devient trop important et que la plate-forme technique commence à pâlir. Pour soulager le serveur, on peut recourir au service de Feedburner. On commence par créer un compte, puis on laisse Feedburner se synchroniser régulièrement avec les flux qu’il doit « répéter ». Le serveur de Feedburner absorbe alors la charge. Dans les deux cas, au lieu de s’abonner à un flux de la forme http:/ /domaine/feed, les lecteurs s’abonnent à un flux de la forme http:// feeds.feedburner.com/domaine.
Évaluations
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Évaluer un flux Pour le lecteur, un bon flux représente d’abord une source satisfaisante, c'est-à-dire qu’elle donne accès à des informations fraîches, fiables et pertinentes. Après ce premier critère, viennent des considérations plus techniques. Pour le producteur, un bon flux attire de nombreux lecteurs du flux vers les contenus eux-mêmes, vers le site. Il a un bon taux de transformation. FeedBurner est une plate-forme qui fournit des services d'analyse de flux RSS. Son principal intérêt est de fournir des statistiques sur les visites des flux (RSS ou Atom) : nombre d’abonnés aux
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flux, nombre de lectures d’articles via les lecteurs de flux, quelles notes ont été les plus lues, quels logiciels sont utilisés pour lire les flux, etc. Évaluer un lecteur de flux Les critères essentiels pour monter un tableau de comparaison sont les standards acceptés, la facilité d’utilisation (par exemple avec ou sans installation), les possibilités de personnalisation. Évaluer un producteur de flux Un producteur de flux est souvent une fonction intégrée dans un composant Web 2.0 comme un blog, un wiki, une gestion de contenu, etc. On n’a alors pas souvent le choix. C’est au moment où l’on choisit ces outils qu’il faut penser à regarder du côté de la production des flux.
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Cas d’étude Début 2008, un procès en référé a menacé l’existence des flux. On a craint en effet qu’une jurisprudence trop soucieuse de responsabilité et de réparation envers la victime d’une atteinte à la vie privée ne vienne condamner les flux à disparaître. Un site avait publié un article contesté et son flux RSS avait propagé un lien vers cet article. Un second site avait automatiquement reproduit ce flux et donc le lien. La victime assigna les deux sites en procès. Si le premier site pouvait être poursuivi, le second pouvait-il l’être aussi ? De la réponse à cette question dépendait le sort des flux en France. Les flux véhiculent des informations dont on ne peut juger du contenu que si l’on y accède pour les lire. Les éléments du flux sont composés automatiquement par l’outil qui publie le flux. Ils reprennent habituellement quelques dizaines de caractères du titre de l’article et un lien. Le second site ne publiait pas l’article mais un lien vers un article qu’il n’avait pas lu. Les juges ont heureusement conclu que le second site, celui ayant utilisé le flux, « n’a ni la qualité d’hébergeur, ni d’éditeur, ni de “webmaster” ayant la maîtrise du site litigieux ».
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RIA Exemple : Mixbook
Figure 42 : http://www.mixbook.com/
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Ce site propose à l’utilisateur de construire un album photo, un catalogue ou un livre électronique en quelques actions qui ne nécessitent aucune formation ni mode d’emploi. Les nombreuses possibilités offertes par Mixbook concernent les photos elles-mêmes (rotation, zoom) et le livre ou l’album (fond, cadre, polices, disposition). Les photos peuvent provenir de l’ordinateur de l’utilisateur ou être importées depuis des sites comme Flickr, Facebook, Picasa, etc. Ce travail de composition peut aussi s’entreprendre à plusieurs, de façon collaborative. Au final, le résultat est très élaboré et peut être publié en ligne auprès d’un lectorat plus ou moins restreint. On peut aussi l’imprimer. Le site Mixbook rend un service précis et de qualité professionnelle à l’utilisateur. L’interface mise en œuvre lui permet de réaliser une tâche qu’il n’aurait pu accomplir sans l’aide d’un spécialiste. C’est une nouvelle expérience positive pour l’utilisateur.
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Description L’interaction entre l’utilisateur et Internet a évolué, tirée par les exigences des utilisateurs et par les progrès des technologies du Web. Nous n’en sommes plus aux textes statiques illustrés avec quelques images, l’utilisateur 2.0 navigue à l’aide d’interfaces dynamiques continuellement enrichies par de nouvelles expériences d’interaction dans les trois voies que sont le client léger, le client riche et la RIA. Le client léger Ce que l’on nomme « client léger » (ou « thin client » en anglais) est une application dont la très grande majorité du code s’exécute sur le serveur et dont le résultat des traitements est transmis au client pour y être présenté dans un simple navigateur sans greffon. Les technologies sont principalement HTML et XHTML, CSS, Javascript et Ajax. Le client riche Le client riche (ou « rich client » en anglais) est une application qui s’exécute sur le bureau du poste client. Elle est connectée à Internet, mais peut aussi fonctionner hors ligne. Elle n’utilise pas de navigateur, se connecte à Internet généralement à l’aide de Web services et ne connaît pas de limitation technologique dans son développement.
Usages L’informatique a massivement délaissé les mainframes puis les architectures client/serveur. Dorénavant, l’internaute travaille de
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L’application Internet riche Les RIA sont des applications Internet qui s’exécutent dans un navigateur et caractérisées par la richesse de leurs interactions avec l’utilisateur et celle de leurs moyens de communications. Elles constituent un trait d’union entre le client léger et le client riche (lourd, le mot serait péjoratif). Il n’existe pas de cahier des charges précis du RIA, mais des RIA plus ou moins légers, et donc respectivement moins ou plus riches. Tout est affaire de dosage. C’est en combinant les deux approches, en prenant le meilleur de chacune, client léger et client riche, que la RIA peut viser un juste équilibre.
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plus en plus avec un navigateur. Ce dernier lui procure un accès à l’intérieur comme à l’extérieur de l’entreprise : de l’Intranet à l’Internet en passant par l’extranet. L’utilisateur est d’autant plus disposé à rester connecté que l’interface s’est améliorée… très nettement ! La RIA s’inscrit complètement dans ce mouvement. L’utilisateur n’a plus besoin de clients riches quand les applications Internet peuvent l’être. Les clients riches demandent d’être installés et mis à jour. Avec les RIA, ce n’est plus nécessaire. Il suffit d’une connexion avec code et mot de passe à laquelle on ajoute parfois l’installation de greffon(s) dans le navigateur. Où que se situe l’utilisateur, il peut utiliser les RIA à l’aide de n'importe quel ordinateur doté d'une connexion Internet et d’un navigateur. Ainsi, ce sont l’utilisateur et ses usages qui se trouvent au centre de la RIA. Tout est mis en œuvre pour que l’interactivité et la vitesse d'exécution soient particulièrement soignées. Une bonne RIA possède une navigation plus simple, intuitive et fluide – les rechargements de pages ont disparu et les ressources locales sont accessibles. Les coûts opérationnels sont aussi réduits, car les RIA sont plus faciles à maintenir du fait de leur installation centralisée : il n’y a plus de déploiement. Les utilisateurs ont le sentiment de contrôler et de maîtriser leurs actions. Leur expérience est enrichie par une interface dédiée présentant des contenus élaborés. Il est de plus en plus courant de voir des indicateurs, des symboles et des objets animés qui accroissent la compréhension et fidélisent l’utilisateur.
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Recommandations Besoin d’experts Les technologies mises en œuvre dans la réalisation des RIA ont une incidence sur les profils des personnes qui vont les concevoir. En effet, les compétences sont très différentes pour le développement d’une RIA et celui d’un client léger. Techniquement, pour une RIA, le travail sera confié à des spécialistes, car les technologies sont nombreuses, souvent propriétaires (par exemple Flex, Silverlight) et nécessitent une formation. Pour le client léger, on reste dans les standards du Web : HTML, CSS, DOM, Javascript – en un mot, le cocktail AJAX.
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La contrepartie de ce haut niveau de compétences se rencontre dans les résultats obtenus, qu’il s’agisse de leur finition ou de leur interactivité. La RIA est beaucoup plus « léchée » que son homologue développée en client léger. Ce dernier demande, lors du développement, d’être testé et ajusté aux différents navigateurs pour être certain que le fonctionnement sera bien le même partout. On y parvient relativement bien en recourant à des bibliothèques de fonctions (framework) conçues pour le développement AJAX. Si les développeurs se forment pour passer aux RIA, ils auront gagné en compétence. Accepteront-ils de revenir au client léger, moins « qualifiant » ? Mise au point d’une RIA Une RIA s’exécute dans un navigateur Internet, mais peut aussi être exécutée localement dans l’environnement sécurisé de ce que l’on appelle un bac à sable (en anglais « sandbox »). Cela facilite la mise au point. Il est bon de le prévoir dès le départ au niveau des platesformes à installer.
Installation Une RIA peut être exécutée sur un navigateur Internet : aucune installation n'est requise, à l’exception des plugins. Pour l’utilisateur, l’installation du ou des greffons doit se faire sans douleur. S’il faut redémarrer le navigateur, ou répondre à des messages techniques liés à la sécurité ou tout autre aspect trop complexe, l’utilisateur sera déboussolé et ne pourra conclure avec succès. On peut parier qu’il ne cherchera plus à utiliser une telle RIA.
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Plus ou moins RIA La RIA se situant entre le client léger et le client riche, il est donc possible de prévoir « plus ou moins » de technologies RIA et de garder des parties en client léger. Ce n’est pourtant pas une bonne idée, car il faut alors maîtriser les deux approches, notamment et principalement au niveau de la mise au point. Quand on s’engage dans la RIA, il vaut mieux y aller franchement. Si un site, ou un service, peut être découpé proprement, on peut développer les composants évolués en RIA et garder le client léger pour le reste. C’est là le seul bon « mix ».
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Difficulté du référencement Jusqu’à il y a peu, les RIA posaient un véritable problème au niveau de leur référencement. L’indexation des moteurs de recherche ne voyait que les textes statiques dans les fichiers des RIA, et encore, pas dans tous les cas. De plus en plus de technologies RIA ont compris que ce point était déterminant à leur adoption par l’entreprise. Des solutions sont de plus en plus offertes. Encore faut-il le vérifier. Une offre qui s’étoffe Pour un même service rendu, il n’est plus rare de trouver une application en RIA à côté de celle de forme classique avec installation. Même si elles ne sont pas de même facture et que leurs ergonomies diffèrent, comme entre un client riche de messagerie – par exemple celui d’Outlook de Microsoft – et un webmail, l’utilisateur est de plus en plus prêt à accepter les interfaces plus ciblées de la RIA quand il y gagne en revanche en mobilité et qu’il n’a plus besoin ni d’installation ni de maintenance. Il dispose d’une application toujours prête à l’emploi et à jour de la dernière version. Spécifier une application en RIA Toutes les RIA qui ont été réalisées et qu’on peut découvrir sur Internet ne sont pas équivalentes. Les unes tirent vraiment partie du modèle RIA, d’autres constituent des essais, voire des échecs. Parmi les succès incontestables, notons, en dehors du champ des applications de divertissement, dans le domaine du commerce, par exemple : • les catalogues de produits ; • les configurateurs de produits ; • les gestions de panier (en anglais « cart »). Dans le domaine de professions précises, citons notamment les succès suivants : © Groupe Eyrolles
• la retouche photographique ; • le suivi de l’actualité boursière ; • la messagerie, la tenue d’agenda ; • la gestion de projet.
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Compte tenu de ces exemples et des caractéristiques que nous venons de voir plus haut, il ressort qu’il existe une façon de spécifier un service pour en faire une RIA. Selon ces mêmes critères, il est aussi possible de voir si le développement de cette RIA est un bon choix architectural. Une bonne RIA est un juste milieu entre client et serveur dans plusieurs dimensions. Celle du stockage des données, celle du traitement, celle des services invoqués. Tout déséquilibre doit inciter à une analyse et à une justification, car il sera préjudiciable tôt ou tard en termes de performance.
La RIA est parfois présentée comme la couche visible des architectures SOA. Elle est aussi requise dans les mashups serveurs ou dans le modèle SaaS.
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Figure 43 : Principe de l’architecture RIA
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Évaluations Les technologies sont très nombreuses. Elles ne sont pas équivalentes et ont des adhérences diverses avec celles déjà déployées dans l’entreprise. Pour un premier développement de RIA, une étude précise des points forts et des faiblesses des technologies est nécessaire afin de faire le meilleur choix, et peut-être même afin d’opter pour un bouquet de technologies compatibles. XUL, Wazaabi, Flash, Flex, OpenLaszlo, Java Applets, Active X et Silverlight sont les principales technologies habituellement rencontrées. Les retours d’expérience sont de plus en plus nombreux, souvent en anglais. Il faut lire les blogs de certains gourous et des développeurs qui ont expérimenté. L’expérience parle à l’expérience. Elle est bonne conseillère, car il n’existe pas encore de filière universitaire ou d’écoles spécialisées. La tendance est irréversible. Selon le Gartner Research, d’ici 2010, plus de 60 % des nouveaux développements Web incluront des composants RIA. Certains composants Web 2.0, appliqués jusqu’ici en client léger, sont revisités par des expérimentateurs RIA pour augmenter les possibilités pour les utilisateurs. Il existe des blogs en RIA (par exemple www.parleys.com/). Ce n’est que le début d’une possible tendance. Affaire à suivre…
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Cas d’étude Plutôt qu’un cas d’étude, il nous paraît utile de prévenir le lecteur contre des écueils possibles dans les projets de RIA. Tout d’abord, les interactions entre l’utilisateur et la RIA doivent être bien réglées et se conformer à des principes arrêtés – à la façon d’une charte ergonomique. En effet, dans le feu de l’action, le développement de la RIA peut aboutir à un joli petit monstre visuel et fonctionnel techniquement très réussi, mais ne correspondant à aucun usage, à aucun acquis des utilisateurs à servir. La promesse de la RIA est d’apporter une expérience nouvelle aux collaborateurs de l’entreprise sans qu’il soit nécessaire de mettre en branle la lourdeur d’un plan de gestion du changement. Une RIA est une interface qui répond à des problèmes. Elle n’est pas là pour en poser. Au risque de nous répéter, la RIA est un juste milieu, le résultat de la recherche d’un point d’équilibre pour tirer le meilleur des clients légers et des clients riches.
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Réseaux sociaux Exemple : Facebook
Description Contrairement à une idée reçue, Facebook n’est pas le premier réseau social en France alors qu’il l’est au niveau international. Avec 3 072 000 visiteurs uniques, le réseau américain est cinquième en France, loin derrière les deux premiers, Skyblogs et Copains d’avant, qui touchent respectivement 6 988 000 et 6 273 000 visiteurs uniques (source Médiamétrie, mai 2008). Les deux sites français ne sont pas franchement très Web 2.0, mais ils sont Français, de culture française. Les réseaux qui suivent au palmarès sont américains et représentent bien leur culture. Au niveau international (source Alexa.com, juillet 2008), le champion national Skyrock n’est que quarante-troisième. Il en ressort qu’en France, pour les réseaux sociaux, la prime est très nettement en faveur « des Français parlent
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Figure 44 : La version française de Facebook
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aux Français ». Dès qu’on touche un public plus ouvert à l’international, la faveur des utilisateurs français passe aux réseaux internationaux. Message reçu chez Facebook ! Longtemps uniquement anglais, Facebook essaye dorénavant de suivre a minima les cultures locales. Le site a été francisé et la page consacrée aux applications sait en tenir compte. Ainsi, en changeant de langue, les applications présentées varient. La même remarque vaut pour la publicité. Pourquoi essayer en effet de vendre de l’immobilier français à des internautes américains ? Voyons un peu le reste. À chaque item des menus hauts « Profil » et « Amis » correspond une page. Le dernier menu, « Messages », renvoie à un webmail assez complet qui ne propose toutefois pas de pièces jointes ; mais avec une webcam connectée, il est possible d’enregistrer un message vidéo et de le transmettre. C’est un choix délibéré qui signifie que Facebook ne cherche pas à se substituer aux messageries existantes, mais dit clairement quel usage lui semble être celui d’une messagerie dans le contexte d’un réseau social. À suivre… Facebook est visiblement un bon lecteur des usages. C’est l’une des recettes de son succès qui ne se dément pas.
Usages D’un côté, la première fois qu’on se retrouve devant un site de réseau social, on se demande à quoi cela bien servir… De l’autre, les scientifiques, comme les sociologues, tiennent là un sujet d’étude pour de nombreuses années et le nombre de rapports et de thèses est déjà important, comme « le rôle des réseaux sociaux dans la création et la structuration de l’information sur Internet »1. Essayons de nous repérer à l’aide de quelques usages, car il est impossible de prétendre traiter exhaustivement un tel sujet.
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Catégories Les réseaux sociaux ouvrent leur plate-forme à des sujets spécialisés ou généralistes. Dans tous les cas, la catégorie est annoncée dès la première page du site et très souvent dans le nom (par exemple 1. Travail soutenu en 2006 par Paul-Emmanuel Bernard, Marie-Line Chautemps et Xavier Galaup à l’ENSSIB (École Nationale Supérieure des Sciences de l’Information et des Bibliothèques).
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LinkedIn, Facebook, Second Life, AgoraVox, etc.). Il est primordial qu’un réseau social soit tout de suite repéré par sa cible. Tout manquement à cette règle fait que l’audience en pâtit. Privé ou professionnel Les réseaux sociaux les plus connus ont un usage centré sur la sphère privée (Facebook, MySpace, etc.). Les réseaux sociaux professionnels (Viadeo, LinkedIn, etc.), moins médiatisés, méritent qu’on s’y intéresse. L’entreprise peut y trouver son avantage. Voici trois cas : le recrutement, les démarches commerciales et le marketing viral. Concernant le recrutement, les cabinets spécialisés prennent contact avec des personnes qui ne sont pas spécialement en recherche, mais dont le profil est particulier. Ils sont à l’écoute du marché et les informations personnelles publiées sont intéressantes, car rarement présentes dans les CV.
Enfin, le marketing viral signifie la possibilité d’atteindre très vite à un coût réduit des publics très ciblés en profitant des blogs et des réseaux sociaux pour délivrer un message commercial. Le site MarketingSherpa1 publie régulièrement des études très documentées et gratuites. Selon ces experts, actuellement, la deuxième grande tendance du marketing est claire : « Il faut faire du 1. http://www.marketingsherpa.com/
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Dans le cadre des démarches commerciales, il est devenu relativement facile d’identifier une personne en fonction de son statut dans l’entreprise. Le moteur de recherche intégré au réseau social et le méta-moteur spécialisé sont devenus des outils efficaces aux mains des utilisateurs avertis du Web 2.0. Un commercial peut ainsi trouver directement le bon contact ou se voir proposer un chemin de liens indirects. Pour entrer en contact, Thierry Lunati, co-fondateur du réseau Viadeo, estime que le taux de succès atteint 40 % par la voie directe et progresse jusqu’à 70 % par la voie indirecte. D’après AgoraVox, « ces chiffres record s’expliquent par le fait qu’une personne qui reçoit une proposition par la voie indirecte la tient nécessairement d’un de ses contacts, en qui elle a confiance. Elle est donc normalement bien disposée à son égard ».
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marketing 2.0 en utilisant par exemple les réseaux sociaux comme Facebook et MySpace. » Évolution, tendance Les réseaux qui connaissent le succès n’ont pas tous la même histoire. Les plus anciens ont connu plusieurs époques repérables par leurs « look et feel » successifs. Quant aux plus récents, ils sont assez semblables ergonomiquement. Il semble que pour capter une large audience les réseaux se copient, même s’ils s’en défendent. L’ensemble des réseaux sociaux évolue globalement dans le même sens autour des fondamentaux : informations, outils, mise en commun. L'importance des réseaux sociaux se niche dans l'information qu’ils captent et les nouveaux outils (wikis, blogs, etc.) qui les manipulent. Audiences Si tous les réseaux courent à l’audience sur le Web, une autre course a lieu dans les réseaux eux-mêmes. Leurs membres cherchent à regrouper les amis de leurs amis dans des groupes en expansion continue. Ouverture La très grande majorité des réseaux sont gratuits et ouverts. Cela n’empêche pas que certains affichent une spécialisation pour telle ou telle catégorie de personnes (femmes, retraités, jeunes, sportifs, etc.). Ouverture ne signifie pas nécessairement large spectre.
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Fermeture Les réseaux de membres d’un groupe existant en dehors du Web, par exemple un club, une entreprise, une école ou une université, sont généralement fermés, c’est-à-dire qu’ils nécessitent code et mot de passe. Ils ne sont pas pour autant nécessairement payants, même si dans certains cas, les codes d’accès sont délivrés avec le paiement de la cotisation. Réseaux payants Quelques rares réseaux sont délibérément payants. C’est le plus fréquemment un élitisme qui ne dit pas son nom.
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Identités Si un utilisateur peut toujours découvrir le site d’un réseau social, assez rapidement, la demande de s’identifier intervient. Il appartient à l’utilisateur d’accepter ou de refuser. S’il accepte, il peut alors choisir entre fournir sa véritable identité ou donner une identité virtuelle, créée pour la circonstance. Dans tous les cas, il devra indiquer une adresse de messagerie pour la confirmation de création de son compte. Étendre son réseau Les membres d’un réseau social ont accès à un moteur de recherche d’autres membres. C’est l’une des fonctionnalités de base pour qui veut étendre son réseau personnel. Si un utilisateur est membre de plusieurs réseaux, il peut aussi synchroniser ses carnets d’adresses avec Plaxo. Quelques moteurs de recherche sont spécialisés dans la recherche de profils individuels (dimension personnelle) et la constitution de communautés (dimension collective). Wink, Zoominfo, Spock ou Pipl sont de ces outils. Pour se donner une idée de l’intrusivité des réseaux sociaux, leur utilisation aura de quoi étonner les Saint Thomas.
Influencer Le cabinet Jupiter Research, en partenariat avec LinkShare, a publié en 2008 une étude sur l’influence des réseaux sociaux dans le commerce en ligne. On y apprend par exemple que plus de 50 % des jeunes de 18 à 24 ans qui lisent les commentaires publiés dans les sites communautaires se disent directement influencés dans leur
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Recommandations De tous les composants du Web 2.0, le réseau social est celui qui fait l’objet des plus vives critiques et les recommandations sont nombreuses pour prévenir l’utilisateur sur les risques nombreux qu’il encourt. S’il entre dans le périmètre du projet Web 2.0 de l’entreprise, il est temps de poser les crayons et de tout bien peser et penser. L’éthique et la déontologie de l’entreprise et de ses collaborateurs sont concernées. Les actes de l’entreprise, son respect et ses manquements, même involontaires, aux lois l’exposent sur un terrain juridique où il faut être bien conseillé.
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décision d'achat. Tout récemment, on pouvait lire qu’au Canada, la présence de Facebook dans l’offre d’un opérateur de mobiles lui avait valu d’attirer plus de la moitié des « ados ». Les réseaux sociaux sont les nouveaux espaces des campagnes de marketing, un marketing qualifié de viral. Recruter Les réseaux sociaux sont devenus une nouvelle source d’information pour les recruteurs. On y trouve de plus en plus de CV, de commentaires laissés entre collègues, de liens vers des relations. Respecter L’entreprise peut décider de créer (ou acquérir) un réseau social pour ses clients, ses partenaires ou son personnel. Elle doit être transparente sur ses intentions, notamment en ce qui concerne les données personnelles des personnes et les recommandations de la CNIL doivent être respectées à la lettre. Limiter les risques Dans la mesure où les collaborateurs de l’entreprise peuvent publier des informations personnelles, d’autres ayant un rapport avec l’entreprise, certaines sociétés mettent en garde leurs employés en les invitant à se sentir personnellement responsables de leurs propos et de leur profil. Le Web se comporte comme une énorme éponge, il absorbe tout. Et la moindre trace laissée est quasiment indélébile. Voici quelques-uns des conseils devenus des classiques du genre.
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Les réseaux sociaux réclament tous la saisie de nombreuses informations personnelles. L’usage qu’ils en font explicitement commence par leur publication. Pour les autres usages, l’utilisateur n’a strictement aucun moyen de contrôle et encore moins de moyens d’action. Les réseaux sociaux indiquent de façon déclarative leur pratique, c’est bien peu. Les risques sont nombreux. Ils peuvent être délictueux en allant de la fraude en ligne au vol d'identité. Ils commencent à un degré moindre au niveau du respect de la vie privée quand dans le réseau toutes les données des membres sont publiées. L’agence européenne pour la sécurité de l’information et des réseaux (ENISA) a
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publié un premier rapport1 en octobre 2007. Ses travaux et ses publications méritent d’être suivis. Les réseaux sociaux sérieux permettent les modifications, les suppressions et certains contrôles sur les informations pour les qualifier de confidentielles ou publiques. Il est malheureusement parfois difficile de trouver les pages concernées et quand on les a enfin localisées, tout est en anglais. Réciprocité Le respect des règles et des bonnes pratiques dans les réseaux sociaux est indispensable, dans le cas d’un usage personnel comme professionnel. L’outil de contacts qu’est le réseau est ce composant de la relation partenaire ou client où s’établit et se conforte réciproquement la confiance. Les demandes de mise en relation doivent être traitées de préférence par des messages personnalisés après avoir pris connaissance du profil du contact et avoir parcouru le site de sa société. Il y a fort à parier que les contacts font de même. Il faut avoir une fiche profil bien renseignée et transparente. Elle doit posséder les qualités que l’on attend des autres.
Créer un réseau social L’entreprise peut se saisir d’un tel outil pour le déployer en interne. Les expériences sont encore peu nombreuses et encore moins médiatisées. Les collaborateurs sont invités à participer en y renseignant leur profil et en le mettant à jour pour faire part de leurs dernières bonnes pratiques, de leurs missions en cours, etc. Avec ces seules informations et un moteur de recherche, il est possible de suivre compétences et carrière. Il faudra mener une veille des blogs 1. http://www.enisa.europa.eu/doc/pdf/deliverables/ enisa_pp_social_networks.pdf
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Identité numérique Les bonnes pratiques en matière d’identité numérique doivent faire l’objet d’une information auprès des employés de l’entreprise. Si la gestion de son identité numérique sur Internet est une affaire personnelle, elle doit faire l’objet d’une procédure d’entreprise pour toute utilisation touchant peu ou prou à l’entreprise.
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RH pour faire le suivi des usages qui ne manqueront pas de se développer.
Évaluations La question de l’évaluation des réseaux sociaux est délicate. Elle peut-être abordée de maintes façons. En voici quelques aspects. Catégorisation Plus un réseau est clair sur son orientation et sa philosophie, meilleur il est. Ses membres sauront d’autant mieux en faire l’article lorsqu’ils inviteront leurs amis ou leurs relations. Voici une catégorisation de réseaux sociaux pour l’entreprise qui pourra toujours être améliorée. Les orientations ne sont pas exclusives. Un même réseau peut appartenir à plus d’une catégorie. Ainsi, l’objectif d’une orientation communication est de rester en relation dans l’équipe, entre utilisateurs, avec les clients, etc. Celui d’une orientation usage est de mettre à disposition des outils communs adaptés et un dispositif pour capter toutes les demandes d’amélioration. Pour sa part, une orientation diffusion vise à distribuer ou à échanger des informations, des photos, des vidéos, etc. Enfin, une orientation management a pour but d’organiser une communauté, un groupe, proposer des informations ciblées et des outils adaptés. Ouverture Un réseau se caractérise aussi selon sa modalité d’ouverture. Ce point doit être clairement visible. Il n’y a rien de pire qu’un membre trompé sur la marchandise et qui se plaint. Ainsi, lors de l’ouverture, tout le monde peut être membre. Les liens seront créés ultérieurement.
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On peut aussi devenir membre en acceptant l’invitation reçue d'un des membres. Les membres sont donc assurés d’être tous reliés. Enfin, un réseau professionnel, dédié aux relations de cette seule nature, est sans invitation.
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Population Pour ce qui est de l’audience des réseaux ouverts du Web, le plus simple consiste à consulter régulièrement le site alexa.com, qui tient à jour les audiences de tous les grands sites mondiaux. On peut vouloir connaître la population des membres d’un réseau : existe-t-il des fonctions qui offrent cette information ? La notion de communauté est-elle portée dans le réseau et comment ? Panel d’usages Les usages sont-ils présentés de façon structurée, leur présentation répond-elle aux codes de reconnaissance du Web 2.0 ? Les fonctions de base sont-elles immédiatement repérables (moteur de recherche, mise en relation, contrôle des données personnelles, etc.). Il est risqué d’offrir trop d’usages, car la vision que l’on a de la stratégie du réseau peut s’en trouver brouillée. En façade Un réseau social doit être visible et bien référencé pour attirer de nouveaux membres et valoriser ceux qui le sont déjà. Son graphisme et son ergonomie doivent flatter ses membres et leur donner envie de dire « mon réseau… ». N’oublions pas qu’ils sont les meilleurs promoteurs du réseau. Enfin, les mentions légales sont-elles accessibles, lisibles et compréhensibles par les membres ou les futurs membres ?
Cas d’étude Un réseau social est un environnement propice à l’innovation, voire à la surprise. Ce qui suit était-il prévisible ? En octobre 2007, près d’un millier d’employés d’IBM en Italie ont manifesté contre la politique salariale de leur entreprise d’une façon bien singulière. C’était en effet la première manifestation virtuelle. Les manifestants s’étaient donné rendez-vous dans Second Life. Quel est l’impact d’un tel événement ? La manifestation avait été préparée et des kits
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Technologies L’évaluation technique d’un réseau social doit porter sur son évolutivité et sa capacité à répondre à de nouveaux usages. On peut en juger au niveau du socle comme des plugins. À ce titre, Facebook est actuellement le champion, avec plusieurs milliers de greffons.
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virtuels, comprenant tee-shirts et banderoles, ont été mis à disposition des manifestants. Pour participer, il fallait s’inscrire. On a pu lire1 que la direction d’IBM était « inquiète de cette initiative qui pourrait faire du bruit en étant relayée par les différents médias et avoir des répercussions néfastes pour l’entreprise ».
Tags et folksonomie Exemple : Del.icio.us
Figure 45 : Résultat d’une recherche par tag
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Description La page de Del.icio.us présente une liste de signets. Chacun est décrit en trois lignes : titre, sous-titre et liste de mots clés. Toute personne qui a un compte dans ce site peut ajouter des signets. Comme le site est américain, les tags français y ont une portée moindre.
1. http://www.blog-cybermarketing.com/article-12295210.html
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Si une personne marque un site déjà connu de Del.icio.us, tous ceux qui l’ont déjà tagué en sont informés afin de favoriser leur mise en relation. La recherche de sites enregistrés peut comprendre un ou plusieurs tags et une ou plusieurs personnes. L'objectif est de créer en ligne de nouvelles communautés autour de centres d'intérêts. Le mot « tag » désigne une étiquette, un mot clé, un marqueur qui sert à nommer une catégorie. Lorsqu’un utilisateur tague une page, une photo ou tout autre contenu, il le catégorise explicitement et déclare : « Ceci est un(e)… » Cet acte, totalement libre et volontaire, est une participation à l’indexation sociale d’Internet.
Figure 46 : Folksonomie et nuage de tags
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Pour une même photo, deux utilisateurs placeront certainement des tags différents. Le premier pourra évoquer les qualités artistiques et techniques quand le second s’intéressera au paysage photographié. Chacun enrichit la vision de tous sur cette photo et la « folksonomie » du site de publication des photos se développe.
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La folksonomie désigne l’ensemble de tous les tags, ceux définis par les auteurs des contenus et tous leurs lecteurs. C’est un dispositif de classification. Les tags peuvent former des agrégats qu’on appelle « tag cloud » ou « nuage de tags », qui servent à leur visualisation. Folksonomie et nuage de tags sont donc des objets de nature différente. Dans notre illustration, la folksonomie désigne l’ensemble de tous les tags. En revanche, le nuage de tags est un regroupement de tags choisis pour être visualisés. Ici, ce sont les tags de l’auteur d’un contenu précis.
Usages Classer avec des tags Les tags s’appliquent à tous les types d’objets du Web. Des objets simples (signets, sons, photos, vidéos, flux, etc.) ; des objets complexes (pages, billets de blog, rubriques de wiki, mashup, etc.). Les tags sont comme des adjectifs. Qu’est-ce qui rapproche la pomme verte de la colline verte ? Elles ont le même tag : vert. Choix d’un tag Lorsque l’on pose un tag sur un objet, on ne le choisit pas dans un ensemble de tags prédéfinis. Les tags n’appartiennent pas à un thésaurus. Ils sont ce que l’utilisateur décide, par exemple « vert » ou « X008-5 ». Rassembler les tags Quand on rassemble des tags, on peut le faire à plusieurs niveaux : • dans le même outil, par exemple tous les tags d’un même blog ; • dans une liste d’outils, par exemple tous les tags de tous les blogs des employés ;
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• ceux d’un même utilisateur, par exemple tous les tags utilisés par M. Xyz ; • ceux d’un même groupe d’utilisateurs, par exemple tous les tags utilisés par les responsables des ventes. La logique de regroupement a pour seule contrainte de répondre à un usage et d’être réalisable. Les nuages de tags permettent de les visualiser.
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Constituer une folksonomie
Figure 47 : Nuage des tags les plus populaires de Del.icio.us
La folksonomie est « vivante », car elle évolue au fur et à mesure que les utilisateurs posent de nouveaux tags. Il est intéressant de visualiser le nuage des tags les plus utilisés d’une folksonomie et d’observer ses fluctuations dans le temps. On rend visibles les centres d’intérêt des utilisateurs et comment ils se déplacent. Son vocabulaire n’est ni normalisé, ni structuré, ni spécifique. Les tags y sont a priori sans relations sémantiques ou hiérarchiques. La folksonomie n’est ni un thésaurus ni une ontologie.
Indexer L’utilisation des tags est l’usage majoritaire des sites de « social bookmarking », comme del.icio.us, Blogmarks ou Yoolink. Les folksonomies qui y sont constituées influencent Internet car les moteurs de recherche comme Google en tiennent compte. Il n’est pas faux de dire que les utilisateurs indexent le Web.
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Valoriser la folksonomie La folksonomie est une forme de classification collaborative, une indexation qui prend en compte le « facteur humain ». Ce sont les employés qui s’entraident. À la recherche d’informations faite avec le désormais classique moteur de recherche, s’ajoute à présent la folksonomie.
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Recommandations Préparer l’utilisation d’une folksonomie L’utilisation de tags et de folksonomies en entreprise doit être préparée. Puisque les tags doivent étiqueter des informations afin de permettre d’y obtenir un accès privilégié, des règles doivent être élaborées pour que leur usage soit rationnel. La pire des choses serait que les tags donnés ne soient pas pertinents, ce qui entraînerait, lors des recherches, une grande inefficacité. À l’inverse, dans certains cas, seuls les tags et les folksonomies donnent accès à des objets sur lesquels les moteurs de recherche ont peu de prise. Par exemple, il n’est pas possible d’analyser automatiquement une séquence vidéo pour en déduire l’indexation réalisée sans l’intervention de l’homme, mais il est très facile à quelqu’un de donner quelques tags. Dans le monde de l’entreprise, les cas de recours aux tags et aux folksonomies sont fréquents. Cela peut éviter de dépenser trop d’énergie à vouloir optimiser un moteur de recherche, notamment quand on a dépassé la frontière des 80/20.
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Choisir les bons tags Nous ne croyons pas qu’il faille imposer une liste de tags. Cela demanderait un important travail, semblable à celui de la constitution d’un thésaurus. Après plusieurs mois de réunion, on aboutit généralement à une liste qui vieillit mal et qui doit être réaménagée. Il est préférable de laisser la liberté aux collaborateurs de l’entreprise et de signaler simplement que les tags sont susceptibles d’être améliorés et harmonisés de temps à autre pour un meilleur profit de tous. Lever les ambiguïtés L’utilisateur dispose d’une totale liberté de création de tag. Souvent, il n’existe ni standard, ni règle d’écriture et l’utilisateur peut même mélanger jargon(s) et langue(s). On peut encore trouver des homonymes, des synonymes, des doublons, dus à des fautes d’orthographe ou aux flexions d’un mot. Tant qu’il n’y a pas de règles, il est particulièrement difficile de lever les ambiguïtés. En leur absence, c’est en consultant la liste des tags utilisés qu’on pourra procéder à des ajustements comme : • identifier les doublons (fautes d’orthographe, flexions grammaticales, synonymes) pour les réduire ;
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• pointer les accumulations sur un unique tag qui mériterait d’être démultiplié par plusieurs tags plus précis ; • réduire la dispersion en regroupant les utilisations uniques d’un tag. Un tag utilisé une seule fois n’apporte pas beaucoup d’informations.
Évaluations Si le choix des tags est confié à des utilisateurs constitués en communauté de spécialistes dans l’entreprise, leur collaboration produira une folksonomie d’expert. En revanche, si tous les collaborateurs de l’entreprise sont invités à participer, la folksonomie sera « ouverte ». La première sera très pertinente et professionnelle. La précision de la seconde sera peut-être moindre. Si on pouvait créer les deux, leur différence permettrait certainement de mesurer l’acquisition de certains savoirs dans l’entreprise. Une folksonomie peut représenter le meilleur comme le pire en termes de catégorisation de l'information au sein de l’entreprise. Elle peut être imprécise, ambiguë et même pervertie. Elle peut aussi être développée avec rigueur, précision et contrôle. Cela signifie tout simplement qu’on ne laisse pas un dispositif créateur de folksonomie aller à vau-l’eau. Une mauvaise folksonomie traduit sa mauvaise gouvernance.
Cas d’étude Un travail très intéressant est actuellement conduit au Met, le Metropolitan Museum of Art de New York, avec le projet Steve1. La documentation sur les collections, qui, traditionnellement, est confiée exclusivement à des historiens de l’art, fait l’objet d’un certain 1. http://www.steve.museum/
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La folksonomie rend compte plus de la popularité que de la pertinence des notions qu’elle manipule. Puisque chaque tag doit pouvoir renvoyer à un ou des contenus, il est choisi pour sa valeur évocatrice, à l’instar d’un symbole, et moins pour son pouvoir analytique. Il faut encourager les utilisateurs à organiser les informations dans leur propre intérêt. Une folksonomie bien utilisée converge naturellement vers la qualité. Une mauvaise folksonomie sera en revanche vite délaissée.
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nombre d’expérimentations sur l’usage des tags et des folksonomies. Le projet repose sur la conviction que les moyens d'accès à l’art doivent aussi refléter les perspectives d’autres groupes ou communautés. Le marquage social et la folksonomie qui en résultent offrent les moyens aux musées d'art de comprendre ce que les visiteurs en ligne des collections des musées considèrent comme important. Les résultats de cette étude montrent que le marquage social et la folksonomie sont bien une stratégie d'accès à part entière aux musées d'art. Les utilisateurs donnent des tags qui pourraient contribuer à combler le fossé sémantique entre le discours professionnel du conservateur et la langue populaire du visiteur. La collaboration proposée par le projet Steve va permettre de développer des outils et des méthodes de recherche sociale basés sur le marquage des collections des musées d'art et d'étudier l'utilité de la folksonomie pour offrir un meilleur accès aux collections.
SaaS, infrastructure et Web 2.0
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Exemple : Salesforce
Figure 48 : CRM en mode SaaS
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Le Web 2.0 peut sembler à bien des égards ne concerner que la surface des sites Internet. Et nous avons répété à l’envi qu’il y est d’abord question d’usages, lesquels s’expriment justement au niveau de l’interface entre l’homme et la machine : en surface. Pourtant, le Web 2.0 ne se résume pas à la relation avec l’utilisateur, à l’interface et son confort. Nous allons voir dans cette ultime partie consacrée aux composants 2.0 que : • certains d’entre eux sont intimement liés à l’infrastructure ; • le projet Web 2.0 doit aller au-delà de la couche de contact entre l’utilisateur et le système ; • il s’agit d’industrialisation, de fiabilité, de sécurité ; • il y va aussi du modèle économique de l’ensemble.
Le modèle SaaS Qui achète une perceuse pour posséder une perceuse ? Le bricoleur n’a-t-il pas plutôt besoin de faire des trous ? Si nous n’achetons pas une perceuse pour elle-même, mais pour la possibilité de percer, alors nous pourrions aussi louer ladite perceuse. Au final, ne seraitce pas plus avantageux ? Combien d’heures utilisons-nous une perceuse dans une année ? Le coût de possession n’est-il pas exorbitant ? Nous pourrions participer, à notre échelle personnelle, au développement durable en rentabilisant le plus possible le matériel de location !
Il n’y a donc plus de freins techniques et fonctionnels à l’utilisation des solutions mises en œuvre en Web 2.0 et proposées en location. Pour la composante économique, il suffit de consulter les offres sur Internet, de lancer un appel d’offres et de comparer avec le coût
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C’est en transposant notre exemple dans le monde de l’entreprise et des logiciels, que le modèle SaaS se comprend : il s’agit de louer des services et des logiciels conçus pour le Web. En étant créés pour Internet, ils ne nécessitent qu’un effort de déploiement minimal. Quant au lien avec le Web 2.0, il est simple. Nous avons vu qu’il était interactif et participatif et permettait un travail ergonomique pleinement comparable à ce qui se pratique dans les applications classiques.
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total de possession de l’équivalent en mode classique, pour s’apercevoir que les tarifs sont vraiment très attractifs.
Pourquoi choisir le SaaS Le choix du modèle n’est pas seulement intellectuel. Pragmatiquement, l’entreprise ne se décide qu’au regard de critères concrets, car le SaaS permet de maîtriser l’usage de l’outil informatique dans toutes ses dimensions (temporelle, fonctionnelle et économique) et le rend ainsi particulièrement gouvernable. On a les moyens d'optimiser les coûts. Un engagement pour une durée suffisamment longue : en effet, il faudra inclure des temps de paramétrage et de reprise de données. Même si la rentabilité est rapide, il y va aussi du changement des pratiques. Une disponibilité contractualisée : les services loués doivent être accessibles et opérationnels au moment où l’entreprise et ses partenaires en ont besoin. Les contrats de service doivent être parfaitement explicites pour que les engagements de l’entreprise envers ses clients et partenaires puissent être tenus. Une solution maintenue, mise à jour et dont l’administration et l’exploitation sont faites dans les règles de l’art : ainsi, l’entreprise est assurée de ne pas perdre de données (sauvegarde), de disposer des fonctionnalités les plus à jour et les plus robustes, etc. La réversibilité doit être possible à tout moment. Un paiement à l’utilisation : généralement, il y a un abonnement et un tarif à l’usage (par utilisateur et par mois).
Les acteurs SaaS
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Les prestataires Les acteurs qui offrent des services selon la modalité SaaS, peuvent être classés dans quatre catégories. Tout d’abord, les éditeurs sont déjà bien présents sur le marché SaaS. À côté de leur offre classique en mode ASP en vente pleine, leur proposition SaaS peut séduire, car ils maîtrisent normalement la logique du changement de mode. Il faut toutefois savoir que, pour un éditeur historique, le passage de sa solution vers le SaaS consti-
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tue un projet de première catégorie : long et coûteux. Il faudra bien payer ! Les « pure players », eux, sont complètement SaaS. Leur solution technique est a priori la plus Web 2.0 et leur plate-forme est 100 % faite pour Internet. Quant aux intégrateurs et hébergeurs, ils prennent le dossier entièrement en main : du paramétrage initial jusqu’à la maintenance de la solution. C’est le must : le SaaS avec le fini du sur-mesure. S’ils ne sont pas partenaires officiels d’une seule marque, ils offrent de surcroît du conseil pour choisir parmi plusieurs offres SaaS. Enfin, lorsque plusieurs entreprises appartiennent à un groupement de moyens (groupe, holding, GIE, etc.), la solution mise en œuvre par l’une peut être retenue par les autres pour être partagée. On a alors un modèle SaaS pour un groupement fermé. Les clients L’hébergement, l’administration et l’exploitation des applications louées en SaaS ne sont plus sous leur responsabilité. Par contrat, ils ont transféré leurs exigences de qualité de service et de disponibilité à leur prestataire. Pour les clients, l’enjeu technique a été transformé en une garantie de moyens et un engagement de résultat.
Une plate-forme Web Une plate-forme se définit comme une infrastructure qui permet le fonctionnement d’applications. De la même façon qu’on peut dire qu’une application s’exécute sur une plate-forme Linux ou Windows, on peut considérer que des applications SaaS tournent sur une plate-forme Web. L’entreprise n’a rien à déployer dans son système d’information et utilise des applications entièrement disponibles sur Internet. Le Web n’est plus seulement un espace d’information ou de communication, mais une plate-forme, un lieu où l’on
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Mettre en œuvre le SaaS On sent intuitivement qu’il présente des avantages pour les clients. Par exemple, dans un marché concurrentiel, le SaaS va pousser les éditeurs à toujours améliorer leur offre pour remporter de nouveaux marchés, mais aussi pour conserver leurs clients. Mais concrètement, que faut-il faire pour mettre en œuvre du SaaS ?
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peut utiliser de véritables applications. Pour disposer d’une plateforme Web, l’entreprise nécessite un bon accès réseau avec du débit, de la sécurité, un bon contrat de service et des navigateurs dans les postes de travail. Une industrialisation Le Web 2.0 naît de l’usage, parfois d’un bricolage, d’un prototype, d’un mashup convaincant par la nouvelle expérience qu’il autorise. Mais ce n’est pas parce que cela fonctionne que la performance sera au rendez-vous et que les utilisateurs bénéficieront d’une bonne qualité de service. À l’artisanat 2.0 doit succéder une industrialisation 2.0. Ce sont essentiellement des travaux sur l’infrastructure. Ils traitent le socle et ne sont pas perceptibles pour l’utilisateur en dehors d’un service rendu sans accroc. Au moindre dysfonctionnement, ce sont tous les clients qui peuvent subir des dommages. Le prestataire SaaS est donc acculé au maximum de qualité. Une offre qui ne serait pas industrielle ne peut être SaaS. On peut en juger aux références du fournisseur, aux tests de performance qu’il présentera et au bouche-à-oreille. Le réseau social est un bon informateur !
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Une personnalisation, un paramétrage L’entreprise qui choisit de passer au SaaS a besoin que soient pris en compte des éléments qui lui sont propres. Pas seulement au niveau de l’identité visuelle, mais aussi par exemple dans ses règles de gestion. La mise en œuvre effective d’une solution SaaS commence donc par un pré-paramétrage. Cette opération est d’autant plus rapide que la solution a vraiment été conçue pour le modèle SaaS. Cette phase constitue même une prestation qui tend à être de plus en plus régulièrement gratuite (les paramétrages ultérieurs demeurent payants). Une territorialité Si les données conservées par l’entreprise ne doivent pas quitter le territoire national, pour répondre par exemple à des exigences légales françaises de la CNIL, le contrat SaaS en doit stipuler expressément le respect.
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Une confidentialité des données On lit beaucoup de choses sur la sécurité des données… Et ne se fait-on pas peur avec le SaaS ? Christian Fauré1, senior manager chez Atos Origin, spécialiste des questions SaaS, a écrit en 2008 sur son blog :« Le data center d’une solution SaaS n’est peut être pas la solution ultime, il peut comporter des risques. Mais il est en tout cas très certainement au moins aussi sûr que les organisations où ce sont les employés qui se retrouvent à transporter des données, qu’elles soient sur les clés USB, les disques, ou dans les ordinateurs portables, et bientôt les téléphones. »
Les offres en SaaS Toutes sortes d’application peuvent avoir une déclinaison « as a Service ». Mais les cabinets de prospective prédisent un bel avenir plus particulièrement pour la gestion de la relation clients, le collaboratif, le stockage et les ERP. Le succès actuel de Salesforce2 en est l’illustration. Selon ces mêmes officines, plus de la moitié des nouvelles offres applicatives seront proposées en mode SaaS d’ici à 2011. Le choix sera-t-il plus difficile à faire qu’en 2008 ? Le succès d’une application est très lié à son adoption par les utilisateurs. Il faudra surveiller de près les solutions dont l’interface sera particulièrement soignée : simplicité d’utilisation, intuitivité et graphisme irréprochable. Si elles sont plébiscitées, elles auront les moyens de se développer et de devenir plus robustes. 1. http://www.christian-faure.net/2008/01/19/je-seme-a-tout-vent/ 2. http://www.salesforce.com/fr/
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Une réversibilité Une fois passé au SaaS, peut-on revenir changer de fournisseur ? Peut-on revenir dans l’entreprise ? La réversibilité ne doit pas être que déclarative dans un contrat. Il faut la mettre à l’épreuve régulièrement. Mais est-ce suffisant ? Le système d’information est comme un muscle. S’il travaille moins, il s’atrophie, on ne recrute plus, on licencie… et, in fine, on a du mal à récupérer le contrôle sur ce que l’on savait pourtant faire. Pendant tout le temps que dure l’externalisation, les choix d’évolution, d’architecture, etc., seront ceux du prestataire. Il sera difficile d’en être informé et de les suivre. La réversibilité n’est pas une clause, c’est un projet en soi. Et il a un coût.
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Ultimes repères L’histoire John McCarthy, génial chercheur du MIT à qui nous devons par exemple le Lisp, avait fait la remarque que l’informatique pourrait un jour être consommée comme l’eau ou l’électricité. C’était en 1961 ! Différences entre SaaS et ASP Les applications destinées à être commercialisées en SaaS sont par construction faites pour ce modèle. Leur architecture intègre intimement le Web et cherche à en tirer le meilleur parti (interopérabilité, mutualisation, haute disponibilité). Les applications délivrées en ASP sont d’une autre facture : ce sont des architectures classiques de type client serveur qui sont hébergées et une couche Web est ajoutée. L’ASP n’est pas conçue pour la mutualisation. La licence ne peut donc pas s’articuler sur la consommation. Différences entre SaaS et On-demand Ce qu’on appelle le mode « à la demande » (« on-demand » en anglais) est uniquement un mode de paiement à la consommation. Il faut donc bien vérifier que le terme SaaS est présent et que le service rendu est celui-là. SaaS et Open Source Les pure players SaaS devraient, selon le Gartner Research, adopter des plates-formes Open Source pour leur développement afin de réduire le prix, tout en conservant une très bonne qualité technique de socle.
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Cloud computing Ce terme anglais n’a pas encore sa traduction française. Si l’on répartit et diffuse le système d’information de l’entreprise de telle sorte que toute panne arrivant à l’un de ces composants n’empêche pas l’ensemble de continuer à fonctionner, on a alors conçu un tel dispositif. On peut rapprocher le « cloud computing » des systèmes à tolérance de pannes de l’informatique classique. C’est en quelque sorte son pendant SaaS. Mélanges dangereux Il est très probable que l’entreprise qui adopte le SaaS y viendra progressivement. Un premier service, puis un deuxième, et ainsi de
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suite. À chaque service, si la logique est la même – maîtriser les coûts et bien gouverner –, elle risque de fabriquer un mélange détonant. En effet, dans le système d’information classique de l’entreprise, la logique d’intégration de l’ensemble conduit à penser les nouveaux composants en fonction des autres selon des critères techniques d’interopérabilité, de compatibilité, d’harmonisation, etc. Mais le mode SaaS a tendance à cacher les réalités techniques et les difficultés de conjugaison des différentes briques du SI externalisé. Alors, si l’on ne s’en soucie pas suffisamment, l’optimisation de la facturation des composants SaaS peut rendre aveugle : on risque de bâtir un système métissé dont la complexité est ingérable. Auprès de quels prestataires SaaS se tourner si le SI dispersé ne fonctionne pas correctement ? Pour se ménager une possibilité de maîtriser ces risques, il faudra prendre quelques dispositions : • probablement limiter le nombre de prestataires SaaS ou celui des souches techniques mises en œuvre ; • intégrer la problématique de l’interopérabilité dans les contrats de services SaaS ; • opter pour des standards, des labels, etc.
LE PROJET WEB 2.0 Le projet Web 2.0 est d’abord et avant tout un projet. Il ne faudrait pas imaginer que le fait qu’il concerne le Web 2.0 n’en fasse pas un projet à part entière. Il est défini par sa durée, ses objectifs et ses ressources, comme tout projet qui se respecte. Pourtant, quelque chose semble avoir changé. En quoi pourrait-on distinguer le projet Web 2.0 ? C’est ce que cette partie va permettre de préciser en pointant des aspects saillants.
Nous observerons quelques incidences sur l’organisation du projet, sur les questions de gouvernance que cette primauté des usages soulève. Nous poursuivrons en détaillant quelques aspects architecturaux concernés.
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Le projet Web 2.0 est piloté par les usages : ses objectifs portent moins sur les technologies et les fonctionnalités que sur les usages, nouveaux ou non, qu’offrira la réalisation.
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Pour terminer, sans prétendre être exhaustif, nous énoncerons des risques et des facteurs de succès du projet Web 2.0.
Pilotage par les usages Pourquoi un projet Web 2.0 diffèrerait-il d’un projet Web 1.0, ou d’un projet tout court ? Est-ce le fait de nouvelles technologies révolutionnaires ? Est-ce à cause d’un découpage des tâches qui serait en rupture avec tout ce qu’on a fait jusqu’à aujourd’hui ? Il y a encore bien des questions de ce type que nous pourrions nous poser. Non, il ne faut pas chercher de ce côté-là ! Rappelons-nous que depuis le début de ce livre, nous n’avons cessé d’indiquer combien le Web 2.0 était un lieu où les usages sont travaillés, où l’utilisateur est central. Si un même résultat peut être obtenu de différentes façons, n’y en at-il pas de meilleures que d’autres ? Le Mont Blanc peut être escaladé seul ou en cordée et plusieurs voies sont possibles. Les unes sont aisées, les autres difficiles et même périlleuses. Les premières sont ouvertes aux amoureux de la montagne pour peu qu’ils soient un tant soit peu sportifs. Les dernières ne sont praticables que par des alpinistes émérites, particulièrement bien préparés. Nous avons vu que le Web 2.0 ne se caractérisait pas par des innovations technologiques majeures. Mais puisqu’il favorise la personnalisation en plaçant l’utilisateur au centre, l’interactivité en offrant confort et la performance et la collaboration en permettant les relations et la communication entre les utilisateurs, le projet Web 2.0 doit être piloté par les usages.
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Prenons l’exemple de Google. Son interface historique a fait la réputation du célèbre moteur de recherche, à tel point qu’il s’agit d’un style que des quantités de sites ont voulu copié : un design d’une grande sobriété où l’utilisateur saisit ce qu’il recherche dans l’unique zone de saisie et lance la recherche d’un clic sur l’un des deux seuls boutons proposés. Observons maintenant les innovations de Google en matière d’interface. Dans celle qui suit, lorsque l’utilisateur saisit ce qu’il recherche, le moteur suggère un certain nombre de possibilités. Ce sont les plus fréquentes ou les plus probables.
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Figure 49 : La recherche vue par Google
Avec l’interface classique, l’utilisateur ne saura s’il y a des réponses que s’il clique. Avec Google Suggest, il sait au fur et à mesure de la saisie s’il y aura des réponses et l’ordre de grandeur du nombre de réponses lui est même fourni. Dans le premier cas, nous sommes devant un moteur de recherche. Dans le second, il s’agit d’un moteur qui trouve. Après tout, n’utilise-t-on pas Google pour trou-
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Figure 50 : Google Suggest
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ver des réponses plutôt que pour chercher ? Mais poussons plus avant, car si cette interface est peu connue – elle n’est d’ailleurs disponible qu’en anglais – une autre est d’une utilisation nettement plus répandue et d’une conception Web 2.0 encore plus visible. Détaillons-la. L’utilisateur peut se connecter, sa page Google est personnalisable. Les boîtes qui apparaissent dans la partie basse de la page peuvent être déplacées et agencées par l’utilisateur. Les informations qui s’y trouvent peuvent être saisies par l’utilisateur ou transmises par le serveur sans que la page ne soit rechargée. Toutes ces opérations sont indépendantes les unes des autres et se déroulent de façon asynchrone. Il s’agit toujours d’un moteur de recherche, mais Google propose à l’utilisateur une interface plus riche. Elle est personnalisable et réagit à des événements. Le confort d’utilisation a été amélioré.
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Figure 51 : iGoogle
Cet exemple concret montre qu’un même besoin peut être satisfait strictement, d’une façon simple, ou en prenant en compte l’utilisateur et son désir de ranger son espace de travail. Dans tous les cas, la fonction de base est honorée avec la même efficacité. C’est toujours un moteur de recherche. Mais n’y a-t-il une prime d’usage qui nous fera préférer iGoogle ? À l’instar de ce que nous venons de
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voir, le projet Web 2.0 ne va pas modifier le fond des fonctionnalités des produits ou des services. En revanche, un soin tout particulier va être apporté aux usages qui en seront faits et à l’utilisateur qui travaillera avec.
Aspects organisationnels
Besoins desoi soi Besoins de de rréalisation éalisation de Besoins d'estime Besoins de sociaux Besoins de sécurité Besoins physiologiques
Ordre de satisfaction
Niveau supérieur
Niveau inférieur
Motivation Pour étudier les aspects organisationnels du projet Web 2.0, nous allons commencer par aborder quelques notions de sociologie, connues sous le nom de hiérarchie de Maslow1. Elles nous permettront de constater sans équivoque que le Web 2.0 est bien plus motivant que le Web 1.0 et que nos utilisateurs seront plus enclins à utiliser le résultat produit par un projet Web 2.0 que celui obtenu à l’issue d’un projet Web 1.0. Maslow explique la motivation par une pyramide des besoins constituée de cinq niveaux.
Figure 52 : Pyramide de Maslow
1. Abraham Maslow (1908-1970) est un psychologue américain d’origine russe. Il est essentiellement connu pour ses travaux sur les motivations de l’homme et sa théorie de la hiérarchisation des besoins.
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Très utilisée en marketing, notamment dans l’approche du positionnement des produits ou des services, elle va nous permettre d’analyser avec pertinence les pratiques et les usages d’un projet Web 2.0. Reprenons la segmentation proposée par Maslow et obser-
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vons notre projet selon ces cinq approches thématiques précises. Ce découpage rend plus facile l’analyse de la motivation des utilisateurs. Par ordre de satisfaction des besoins, on trouve d’abord trois niveaux inférieurs : • besoins physiologiques ; • besoins de sécurité ; • besoins sociaux. Puis on trouve deux niveaux supérieurs : • besoins d’estime ; • besoins de réalisation de soi. Si nous appliquons cette vision théorique aux différences entre le Web 1.0 et le Web 2.0, il semble que ce soit ce dernier qui ressorte gagnant. En d’autres termes, c’est le plus motivant. Le Web 2.0 satisfait spécifiquement trois besoins sur cinq, ceux de niveau supérieur. Voyons cela plus précisément.
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Le Web ne répond pas aux besoins physiologiques : c’est un monde virtuel, où l’utilisateur se sent en sécurité, il s’y déplace sans sortir de chez soi. Le Web 2.0 présente cet avantage sur le Web 1.0 d’offrir beaucoup plus de possibilités de sociabilité. Il favorise la création et l’appartenance à des communautés, les services d’échanges entre internautes, et bien d’autres usages de type social comme de pouvoir participer aux forums ou de donner son avis sur un article. Plus que le Web 1.0, le Web 2.0 permet à l’internaute de sortir de l’anonymat, de faire valoir ses réalisations. La course à l’audience sur le Web… Vous savez, le compteur en bas de page et tous ses avatars qui permettent de vérifier qu’on est lu et reconnu sur la toile. Le référencement « à la papa » est en train d’évoluer à tel point que cela inquiète même les institutionnels qui observent que de nouveaux pouvoirs émergent. Il se crée de nouveaux réseaux qui peuvent vite devenir très efficaces… Vous pouvez aller par exemple du côté des buzz pour vous en convaincre. Ce besoin d’estime est décidément très Web 2.0. Avec le Web 2.0, l’internaute peut publier son blog, son wiki. Les besoins de réalisation de soi se retrouvent aussi dans la participation à des grands projets (encyclopédies, développements, etc.).
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Avec le Web 1.0, l’internaute n’était souvent qu’un lecteur, un spectateur, un consommateur.
Gouvernance de projet Puissance des utilisateurs Les utilisateurs du Web 2.0 sont aujourd’hui plus matures que ceux du premier Web. Ils sont devenus critiques et s’expriment, qu’ils y soient invités ou non. Forment-ils le groupe le plus influent qui ait jamais existé ou simplement un groupe influent ? Il ne peut plus y avoir, en tout cas, de gouvernance sans que ce groupe ne soit partie prenante. Puissance de la communauté Le projet Web 2.0 met en contact plusieurs métiers de l’entreprise. Ce sont autant de communautés plus ou moins formalisées avec leurs habitudes et leurs bonnes pratiques. En piochant dans la panoplie des outils du deuxième Web, plusieurs peuvent être d’un grand profit en matière de gouvernance. On peut s’organiser au niveau de chaque communauté, puis entre communautés. Puissance du membre Le Web 2.0 permet à chacun, individuellement, de réagir, de contribuer, d’interagir. L’utilisateur s’identifie pour agir, il se reconnaît dans un groupe ou une communauté qui ne peuvent exister sans lui. Les outils du Web 2.0 portent en eux des vecteurs de valorisation personnelle qu’il est bon de connaître pour s’en servir à bon escient.
Utilisateurs Le mot est dépassé par la part que l’utilisateur prend dans le Web 2.0. Le vocabulaire ne s’est pas encore ajusté et certains propo-
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Parité Là où la communauté et l’interaction sont centrales, les utilisateurs sont à parité. Les figures hiérarchiques s’estompent. Ce sont les rôles assurés au sein du projet qui prévalent. Et après la livraison du projet, ce sont les rôles dans le service Web 2.0. Les fiches de description de poste, les contrats de travail commencent à porter des traces de ces changements.
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sent des néologismes comme « utilis’acteur ». Il faut en effet honorer les dimensions ouvertes par les nouveaux usages du Web : coauteur, contributeur, collaborateur, consommateur, producteur, etc.
Les droits d’auteur Un sujet aussi délicat ne peut être traité que par un juriste. Toutefois, on peut citer les « Creative Commons », des contrats de droit d'auteur pour la diffusion sur Internet. Ces autorisations non exclusives permettent aux titulaires de droits d'autoriser le public à effectuer certaines utilisations, tout en ayant la possibilité de réserver les exploitations commerciales, les œuvres dérivées ou le degré de liberté (au sens du logiciel libre)1.
Figure 53 : Licences Creative Commons
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Paternité : l'œuvre peut être librement utilisée, à la condition de l'attribuer à son l'auteur en citant son nom. Pas d'utilisation commerciale : le titulaire de droits peut autoriser tous les types d’utilisation ou au contraire restreindre aux utilisations non commerciales (les utilisations commerciales restant soumises à son autorisation).
1. http://fr.creativecommons.org/
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Pas de modification : le titulaire de droits peut continuer à réserver la faculté de réaliser des oeuvres de type dériv » ou au contraire autoriser à l'avance les modifications, traductions, etc. Partage à l'identique des conditions initiales : à la possibilité d'autoriser à l'avance les modifications peut se superposer l'obligation pour les œuvres dites dérivées d'être proposées au public avec les mêmes libertés (sous les mêmes options « Creative Commons ») que l'œuvre originaire.
Aspects architecturaux Flux En informatique, historiquement, l’intérêt portait sur les machines, leur puissance, leur mémoire, en un mot leurs caractéristiques. Puis avec l’avènement d’Internet, le point focal s’est déplacé vers le réseau et ses caractéristiques s’exprimant notamment en nombre de sites, de pages, de liens hypertextes. Mais les machines, tout comme l’Internet, seraient des enclos d’information si les flux ne venaient pas les irriguer. Dans les projets Web 2.0, les flux jouent un rôle déterminant. Ils ont leur norme de représentation (RSS, Atom), leurs fonctions de génération, leurs lecteurs, leurs compositions (mashup). L’architecture des flux est une composante du dossier projet. La statique et la dynamique de chaque flux sont décrites. La cartographie d’ensemble permet la modélisation et la simulation, la création des jeux de tests. Elle permet aussi de concevoir les tableaux de bord d’exploitation, de poser la métrologie pour le suivi d’audience.
Clients et serveurs Ce qui se passe sur le serveur est totalement caché à l’utilisateur. Et plus cette partie est cachée, plus elle doit tenir compte de l’utilisateur, être informée sur ses attentes, ses goûts pour s’adapter à lui et passer encore plus inaperçue.
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Enfin, puisque les flux viennent remplacer des dispositifs comme les listes de diffusion, les envois d’e-mails, il faut penser à mesurer ce qui permettra de calculer le retour sur investissement, qui n’est pas le moindre ici.
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Le terme d’architecture peut s’avérer impropre devant la complexité. Si le système qui délivre les services attendus par les utilisateurs est composé de plusieurs blocs, on peut parler d’urbanisme. Peu importe. Ce qu’il faut retenir ici est que l’interface n’est que la partie émergée d’un iceberg que le réchauffement climatique n’atteint pas. Dans les lignes consacrées au SaaS, nous avons vu plusieurs questions qu’il faut peser avant de se décider, la réversibilité devant toujours être possible.
Risques et facteurs de succès Le Web 2.0 n’est pas encore complètement stabilisé et balisé. Le nombre d’acteurs concernés n’a jamais été aussi grand et leurs prérogatives sont supérieures à celles du Web 1.0. Les risques et les facteurs de succès sont à l’aune de cette croissance.
Risques Quelques risques du Web 1.0 demeurent. Diffusion incontrôlée L’information circule facilement et chacun peut accéder aux contenus directement, avec des liens ou avec un moteur de recherche. On se souvient par exemple que lorsque les malversations d’un homme politique cambodgien se sont retrouvées sur Internet, la sphère politique du Cambodge s’en est trouvée bouleversée.
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Technicisme L’euphorie nourrie par les innovations technologiques de l’Internet a été la mauvaise conseillère de nombreux projets où les besoins et les usages des utilisateurs n’ont pas été pris en compte. Mauvaise anticipation et atermoiement L’emballement technophile pouvant conduire à une mauvaise anticipation, la confiance des décideurs ne s’établit souvent qu’après que la preuve tangible a été produite. Pendant ce temps, le projet prend du retard. De nouveaux risques sont apparus avec le Web 2.0.
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Mécompréhension Le démarrage effectif du projet Web 2.0 est lié à la compréhension au plus haut niveau de la direction de ce qu'est le Web 2.0, de ses conséquences, de ses impacts, de la puissance opérationnelle qu'il permet et de son contenu effectif. Il peut être perçu comme une « usine à gadgets » – ce qu'il n'est pas –, comme une « prime à l'amusement » – pourquoi alors ne pas le financer sur le budget du CE ? –, comme une vitrine marketing – cela reviendra moins cher de passer une séquence publicitaire télévisée –, ou, pire encore, comme la solution miracle qui remplacera à lui tout seul N applications ! Incompréhension technologique Certains projets Web 2.0 sont freinés par des directions d’entreprise qui disent ne pas comprendre ses technologies. La première des actions à entreprendre consiste à faire comprendre que le débat n’est pas technique, mais qu’il se situe au niveau des usages. Manque de confiance Alors qu’il est devenu beaucoup plus aisé de publier, le manque de contrôle sur les contenus diffusés à l’aide des outils du Web 2.0 constitue un frein puissant dans les entreprises où la culture locale a toujours consisté à garder la main sur la communication. Sécurité Les utilisateurs sont de plus en plus acteurs ; les systèmes sont de plus en plus ouverts et communiquant ; les données sont plus riches, il faut mieux les protéger ; les services sont exposés, ils peuvent être détournés ; la contribution peut être pervertie : tout concourt à une forte demande de sécurité.
Les outils ne sont que des moyens Dans le projet Web 2.0, quand l’entreprise confond la fin et les moyens, elle se met à produire des choses comme « collaborer », « mettre les gens en réseau », « créer des flux RSS », « partager
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Facteurs de succès C’est un fait, nous sommes déjà dans l’ère du Web 2.0. Il ne s’agit plus de se demander s’il faut y aller. La question est seulement cellelà : quels sont les facteurs de succès des projets Web 2.0 ?
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l’information », « créer un mashup », etc. Il ne s’agit que de moyens, pas d’objectifs. En revanche, si elle s’attache à « être plus réactive », « innover plus », « répondre aux besoins des clients », « interagir avec ses partenaires », etc., elle poursuit alors de vrais objectifs. La gestion du changement Quand l’entreprise est déjà équipée d’une solution dont la mise en place est un projet long et onéreux, la réussite du passage au 2.0 dépend de la capacité des personnes chargées de gérer le changement à impliquer les collaborateurs, à communiquer sur les usages. Le réseau social L’entreprise qui entre dans le monde 2.0 doit en adopter les bonnes pratiques. Cela signifie qu’elle apprend à être 2.0. À ce titre, elle prend place dans les réseaux sociaux et cette exposition maîtrisée l’ouvre notamment : • à de nouveaux partenariats ou des partenariats renouvelés ; • à des clients contactés par le marketing viral ; • au recrutement de « web natives » motivés. La valorisation des acteurs Il ne s’agit pas de mettre en place une méritocratie. Les utilisateurs mutent pour devenir des « utilis’acteurs » 2.0 et les outils du Web 2.0, intrinsèquement, savent mettre en valeur la participation pour la favoriser. Ce sont des composants qui ont intégré un mélange de logiques : celle de la roue de Deming et celle de la pyramide de Maslow. Les données en action Les données du Web 1.0 étaient publiées pour être lues, celles du Web 2.0 appellent la contribution. Elles héritent de cette capacité plusieurs qualités : © Groupe Eyrolles
• les utilisateurs peuvent les améliorer ; • sous forme de flux, elles peuvent irriguer ce que l’utilisateur des flux voudra ; • des applications composées (mashups) peuvent être réalisées.
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Les liens partagés Dans le Web 2.0, les liens ne sont plus à suivre, mais à partager. Voilà qui promet de tisser des toiles plus solides, faites de brins plus nombreux. Qualité homogène L’utilisateur 2.0 n’a pas conscience de l’infrastructure qui opère pour lui. Que les applications soient exploitées dans l’entreprise ou à des lieues de là, en mode SaaS, il ne comprendra pas s’il existe des différences de qualité de services. Pour lui, le système d’information demeure un tout homogène. La co-création La participation est une caractéristique fondamentale du Web 2.0. Sa traduction au temps du projet est la possibilité offerte aux utilisateurs d’être co-créateurs de leurs outils. Des décideurs avertis Souvent, la pression concurrentielle impose aux projets Web 2.0 de s’inscrire dans des délais très courts. Si les décideurs sont suffisamment au fait du Web 2.0, ils ne feront pas perdre un temps précieux au développement de leur entreprise au moment des choix.
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Des leaders impliqués Les outils du Web 2.0 ont une belle tendance à se moquer de la hiérarchie. Chacun n’est-il pas invité à participer, sans discrimination ? L’implication ou la non-implication des leaders dans le projet se remarquera immédiatement.
Chapitre 5
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
Le support de ce chapitre est à l’adresse suivante : http:// www.weltram.eu/i-web.aspx.
APRÈS LE WEB 2.0
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Quelle dénomination ? Il est difficile de parler de Web 3.0, puisque le Web 2.0 ne désigne pas une version particulière de l’Internet, mais un ensemble d’usages et d’outils. Il est certainement prématuré également de le « baptiser » par une incrémentation de « pseudo-version », car des appellations concurrentes sont d’ores et déjà utilisées, telles que le « Web sémantique ». D’ailleurs, aux États-Unis, le terme « semantic Web » est le plus utilisé. D’autres appellations seraient tout à fait recevables, par exemple Web2 (Web puissance 2), qui aurait l’avantage de marquer à la fois la continuité avec le Web 2.0 et l’accroissement de la puissance et des capacités de ce « Web futur ». Aux Assises du Numérique, qui ont eu lieu du 30 mai au 25 juin 2008, les appellations Web 3.0 et Internet 3.0 ont été utilisées. Cependant, pour simplifier, nous adoptons, dans ce dernier chapitre, le terme de Web 3.0. Quel que soit le nom qui sera adopté, tout comme pour le Web 2.0, le Web de l’avenir se met en place progressivement. Dès 2002, on
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parlait déjà de Web sémantique (voir notre bibliographie). Comme pour les générations antérieures, on observe que les éléments suivants permettront de stabiliser cette nouvelle génération du Web : • la maturation de nouvelles technologies ; • l’adoption de nouvelles techniques ; • l’introduction de nouveaux usages et habitudes chez les internautes ; • la montée en puissance de nouveaux acteurs, et en particulier des Fournisseurs d’Accès Internet (FAI) ou Internet Service Providers (ISP) en anglais. Mais avant de parler de nouvelles technologies, de nouveaux usages et de nouveaux acteurs, l’un des axes de progression de l’Internet est la généralisation du Web 2.0 et sa déclinaison dans les entreprises (entreprise 2.0), dans les administrations, etc. Aussi, l’une des premières étapes du Web 3.0 sera-t-elle la « mise à niveau » de l’ensemble du paysage des sociétés dans le monde. Quelles nouvelles technologies seront à même de se substituer aux existantes et de se développer dans les prochaines années ? Quelles techniques seront largement partagées entre les acteurs du marché ? Quels usages et habitudes seront popularisés parmi les utilisateurs ? C’est à ces questions que nous allons tenter de répondre. Pour projeter une idée de ce que sera le Web dans les prochaines années, il convient d’analyser les évolutions du Web depuis sa création.
Évolution des états de la page Web
L’état 0 ou état passif Nous étions alors à une période que nous pourrions appeler « préweb ». Les utilisateurs se satisfaisaient de pouvoir afficher à distance une page HTML, c’est-à-dire une page électronique codée en « Hyper Text mark-up Langage » disposant de la possibilité de navigation et affichant des images.
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Elle est passée par plusieurs états.
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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L’état 1 ou état actif La page HTML devient active, dans le sens où la page ne sert plus seulement à présenter simplement à la manière d’un livre, mais également à déclencher des actions, telles que le remplissage d’un formulaire ou l’envoi d’un e-mail. L’état 1.5 ou état interactif Ce passage de l’activité à l’interactivité a eu lieu quand il a été possible de s’appuyer sur le Web, c’est-à-dire sur des fenêtres qui sont des pages Web et en utilisant les couches du protocole Internet pour interagir sur des données gérées par des SGBD-R (Système de gestion de Base de Données Relationnelle) ou interopérer avec d’autres applications, qu’elles soient en mode Web ou non, en mode réparti1 ou non, ou encore en mode « batch2 ». Ces étapes 1 et 1.5 appartiennent toutes deux à la génération du Web 1.0. L’étape 2 ou le Web réactif La page Web permet la réactivité de l’utilisateur final – par contribution à des blogs et des wikis, par personnalisation de sa page d’accueil – comme cela est décrit pour le Web 2.0 dans cet ouvrage. L’étape 3 ou l’état « senso-actif » Dans cette étape, qui se met en place progressivement, le Web véhicule des informations d’une part contenant et définissant des sens, à travers des structures telles que nous l’expliquerons dans les paragraphes suivants, d’autre part intégrant une dimension « sensorielle » avec un sens : • transmettre des sensations ; • pouvoir capter en temps quasi-réel des indications, tendances, informations partielles ou informations complètes sur l’environnement social, technique, organisationnel.
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Enfin, le Web véhicule des informations permettant plus que jamais des actions humaines de plus en plus élaborées telles que : 1. Une application en mode réparti est exécutée sur plusieurs couches de systèmes physiques ou logiques. 2. Une application en mode batch est exécutée de façon centralisée.
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• l’acquisition de la connaissance par l’intégration de nouvelles informations ; • la compréhension acquise, induite ou déduite des informations portées à la connaissance de l’utilisateur qui reste décideur ; • finalement la prise de décision faite complètement sur la base de ces informations véhiculées par le Web. Alors quelles seront les tendances du Web 3.0 ? Sera-t-il sémantique ? Mais que met-on techniquement derrière ce terme ? L’appellation « Web sémantique » nous semble soit bien prétentieuse car ce qui s’applique aux langages humains ne saurait en aucun cas s’adapter à une technologie ; soit, limitée seulement à la dimension sémantique, alors que la problématique est nécessairement beaucoup plus large, intégrant a minima l’intelligibilité, et a maxima les approches possible de l’intelligence humaine par le Web. À moins que, l’informatique permettant de traiter la compréhension des signes, nous devions aller encore plus loin et utiliser le terme de « Web sémiotique » ? En tout cas, le Web 3.0 devra véhiculer des aspects cognitifs. Mais cela est loin d’être suffisant, car l’homme a la faculté d’agir de façon pragmatique. Aussi pouvons-nous simplement demander à ce Web du futur d’être une aide à l’intelligence humaine.
Le grand challenge du Web 3.0 : de la donnée à l’intelligence Le grand challenge pour les acteurs du Web 3.0 sera de passer d’un système qui véhicule de la donnée à un système qui véhicule de l’intelligence. Les grandes étapes de ce passage, décrites dans les paragraphes ci-dessous, comprennent les éléments suivants.
L’évolution de la société de « l’information » à celle de la « connaissance » fait que la quantité d’informations stockées et gérées dans des référentiels accessibles par le Web constituera alors le noyau de la connaissance. Enfin, en quelque sorte, on assistera à la sublimation d’un Web de la « connaissance » à un Web de « l’intelligence ».
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Dans la phase de mutation de « donnée » à « information » une donnée n’est plus une suite de zéro et de un, mais une information qui contient un potentiel de renseignements.
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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Le vrai challenge restera cependant la façon dont cette connaissance pourra être transformée en intelligence. Mais aujourd’hui, nous sommes encore loin de cet idéal et les sites Internet que nous utilisons sont à des générations différentes de notre classification Web.
Niveaux des grands sites Internet actuels Les grands sites actuels peuvent être représentés par un univers en expansion vers le Web 3.0. Les grands acteurs y sont figurés par des systèmes stellaires dont l’étoile centrale est la marque et autour de laquelle gravitent, à la façon des planètes, leurs sites principaux : • des fonctionnalités Web, par exemple iGoogle chez Google ; • des sous-sites, par exemple Gmail chez Google ;
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• des sites qui ont été rachetés, par exemple YouTube pour Google.
Figure 54 : « Niveaux » actuels des grands sites internet
Il est difficile de dire qu’un site est au niveau Web 1.0 ou Web 2.0, car les sous-sites peuvent se situer à des niveaux complètement
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différents. Cette représentation évolue très rapidement, avec les modifications technologiques de chacun des acteurs. Par ailleurs, les sites les plus importants sont toujours susceptibles de racheter leurs concurrents plus petits.
LE TRANSPORT DE LA CONNAISSANCE PAR LE WEB Intelligibilité de l’information et connaissance Il est important de définir ce qu’est l’intelligibilité d’une information. Il s’agit de la possibilité contenue dans une information d’être, d’une part, compréhensible pour un utilisateur humain et d’autre part, de pouvoir suggérer à cet utilisateur des références qu’il connaît.
Définition de l’information intelligible Nous reprenons ici la définition donnée dans le chapitre 7 de Manager avec les ERP, Architecture Orientée Services (SOA), de Jean-Louis Lequeux (Éditions d’Organisation, 2008, 3e éd.) : « Toute information est la concaténation d’informations élémentaires. Le codiel est la plus élémentaire des informations, perceptibles, dans un domaine donné. Parmi les exemples de codiel, les informations élémentaires suivantes sont d’un usage courant : • les lettres de l’alphabet, dans ce livre ; • les phonèmes, dans le langage écrit : • les nombres binaires, 0 et 1, dans un fichier informatique, etc. La concaténation de codiels ne livre une information intelligible que si l’on connaît les règles d’interprétation de la concaténation. »
Premier ordre : les règles de structuration textuelle et non textuelle. Ce sont les règles techniques du langage de codage ou du format, qui permettent une restitution du texte et des images, donc de leur lecture par les utilisateurs ; ces règles sont de toute nature :
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Dans le cas du Web, qu’il soit de génération 1.0, 2.0 ou encore 3.0, on est bien dans le cas de fichiers informatiques, en format HTML ou XML voire autres. Les règles de concaténation sont de deux ordres.
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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• règles de présentation ; • règles d’organisation ; • règles portant sur les types de données manipulées par les pages ; • règles d’interactivité entre les pages. Scond ordre : les règles contextuelles et exo-textuelles1. Ces règles peuvent être techniques ou non techniques. En effet, depuis que le Web permet interactivité et réactivité, des informations véhiculées par une page Web peuvent aussi bien provenir d’autres pages Web, ou de bases de données, ou encore de tout autre système. Ces règles sont liées à l’usage des pages consultées et aux contextes de la page Web. Ce sont ces règles qui permettent une interprétation intelligente de l’information textuelle, non textuelle et contextuelle. Aussi, les enjeux du Web 3.0 se situent-ils définitivement au niveau du second ordre, même si on ne peut ignorer l’importance des règles techniques qui structurent la présentation des pages Web. La figure 7.1 du même ouvrage est reprise ci-dessous :
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Figure 55 : Les codiels, les informations et la base de données 1. Le contexte exo-textuel sort de l’environnement strictement textuel, car le Web permet de communiquer avec des systèmes d’informations, des bases de données, etc.
188 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
Les composantes de l’intelligibilité de l’information Les règles d’intelligibilité contextuelle et exo-textuelle sont basées sur des mécanismes analogues à ceux que nous, êtres humains, utilisons pour comprendre et échanger naturellement entre nous. Les dimensions de ces échanges sont habituellement : • la communication gestuelle ; • la communication audio (voix, sons, musique) ; • la communication documentaire (signes, dessins, écriture, images, images animées – aujourd’hui vidéo).
Transmettre la connaissance Constats En reprenant les trois modes de la communication naturelle humaine, il est indispensable d’analyser les mécanismes de communication naturelle avant de reporter sur l’univers du Web l’héritage de nos usages de communications antérieures. Nous constatons les choses suivantes. La communication gestuelle Elle existe sous deux formes : l’une naturelle, primordiale, qui perdure malgré les évolutions sociales ; l’autre conventionnelle pour la communication entre personnes malentendantes ou encore dans des milieux professionnels où le bruit environnant oblige à s’appuyer sur des gestes ou des signes de la main. C’est le cas, par exemple, des techniciens d’appontage sur les porte-avions.
Les communications audio La transmission orale est fondamentale dans les échanges humains et est éventuellement substituable par un langage par signes seule-
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Dans les deux formes, les codes socioculturels sont prépondérants et définissent les gestes échangés. Ce qui veut dire qu’en l’absence de la connaissance préalable de ces codes, il sera impossible de comprendre deux locuteurs communicants gestuellement. Certes, on pourra deviner par les regards, l’attitude générale ou par le caractère des échanges, des bribes du contexte, mais il sera impossible de saisir le fond de l’échange.
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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ment dans des cas extrêmes justifiés par un handicap ou un environnement ne permettant pas de communiquer par des sons. De plus, les formes de communications audio sont toujours structurées : • structuration phonétique et grammaticale pour le langage parlé ; • structuration musicale. Outre cette structuration, les échanges audio sont codifiés par des formules ; par des conventions d’échange permettant aux interlocuteurs un niveau de compréhension qui dépasse la simple intelligibilité des sons échangés. La communication documentaire Le document classique est dépendant de la finalité de son support (note, rapport, livre) et des matériaux constituant ces supports (bois, pierre, papyrus, parchemin, papier). Par ailleurs, certains documents ayant pour objectif la restitution des observations de la nature font appel à des images qui peuvent être fixes (dessins, peinture et aujourd’hui photos) et animées (films et vidéo). Enfin, les signes transportés dans les documents adoptent plusieurs formes. Cela peut être l’écriture qui est une forme codée et structurée, qu’elle soit alphabétique ou non ; ou encore la forme graphique non codée à l’origine, mais aujourd’hui codifiable en mode vectoriel1 ou en mode bit-map2.
Fondement de la connaissance Nous exprimons, ci-après, de façon très simple, les « piliers » sur lesquels est fondée la connaissance ainsi véhiculée. Nous avons tout d’abord des règles strictes et structurées : • règles lexicales (gérables par un dictionnaire ou un lexique) ;
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• règles grammaticales de construction des phrases. 1. Dans le mode vectoriel, chaque trait est codifié par un vecteur avec des coordonnées de début de trait (x0, y0), de fin de trait (x1, y1), une épaisseur de trait ainsi qu’une texture de trait : type de pointillé, texture des pointillés. 2. Le mode bit-map est un mode dit « image » où cette dernière est représentée sous forme de pixels (ou « picture elements »).
190 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
Les mécanismes sont de deux ordres : • mécanismes phonétiques spécifiques à chaque langue ; • mécanismes syntaxiques liés à la culture des locuteurs. Enfin, des usages sont formalisés par les domaines suivants : • la sémantique vise à chercher le sens des mots ; • la sémiotique vise à définir le sens des signes ; • la pragmatique vise à trouver dans l’expérience acquise la signification contextuelle des phrases échangées.
Situation actuelle Aujourd’hui, l’ensemble des contenus de la communication, à l’exception de la gestuelle, est produit sous forme numérique, en format standardisé. Tableau 3 : Quelques formats numériques standardisés Contenu
Format standard
Son numérique
mp3
Image fixe numérique
jpeg (bit map) wmf et autres (vectoriel)
Image mobile numérique
mpeg
Par ailleurs, les fichiers de contenus numériques, sons et images sont transportés dans les fichiers XML. La problématique de l’extraction de la connaissance résultant des échanges numériques peut être résumée par l’adaptation des techniques linguistiques exprimées ci-dessus au monde du Web. En reprenant les « piliers » présentés ci-dessus, leur adaptation Web s’exprime de deux façons. Pour les règles strictes et structurées ainsi que les mécanismes, nous constatons qu’aujourd’hui c’est une partie d’ores et déjà complète-
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La dématérialisation dans ce domaine est complète et tous ces contenus sont pris en charge par le Web. Quant au document papier, il est produit aujourd’hui nativement en format numérique bureautique où le standard est devenu le XML. Il convient de préciser que le document numérique c’est majoritairement aussi et avant tout les pages Web, elles-mêmes codées en format HTML et XML.
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ment opérationnelle ; il n’y a pas de spécificité du Web par rapport aux autres domaines technologiques. En effet, il est possible de concevoir à nouveau complètement les constructions lexicales, grammaticales, syntaxiques, phonétiques en mode numérique. Pour la formalisation des usages, au niveau de la sémantique, une première a atteint, depuis quelques années, un niveau d’utilisation opérationnel : la gestion de contenu, à travers les fonctionnalités de recherche et découverte de ces contenus et de gestion des versions de ces contenus. Pour la seconde étape, qui consiste à aller au-delà du contenu lui-même, la structure même de XML permet d’élaborer des méthodes et des outils (voir les paragraphes suivants dans cet ouvrage). En ce qui concerne la pragmatique, son traitement est assuré d’une part par la recherche et la découverte du contexte du poste de travail de l’internaute ou de l’utilisateur ; d’autre part par le « profiling », ou analyse des habitudes/recherche du contexte de l’environnement de l’utilisateur, le plus souvent appliqué pour les applications de commerce électronique. Deux remarques s’imposent ici. En linguistique, la pragmatique est considérée comme un sous-domaine de la sémantique. Dans cette optique, on peut dire que d’ores et déjà, en Web 2.0, les traitements par profiling constituent une première approche du Web sémantique.
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Quand à la sémiotique, s’il est vrai que la gestuelle n’est pas transportée aujourd’hui dans les échanges documentaires, le traitement de l’interprétation du signe véhiculé par le Web peut d’une part, rester au niveau de l’interprétation des gestes, à l’humain, par les utilisateurs eux-mêmes quand ils visionnent vidéos et images. D’autre part, au niveau purement documentaire, il est intéressant de noter le phénomène des « smileys ». Ces petits personnages tantôt souriants, tantôt grimaçants, utilisés de façon ludique, permettent de plus en plus la communication de l’« état d’âme » de l’interlocuteur. Dans ce sens, on peut considérer qu’il y a une toute première ébauche de numérisation de la gestuelle.
192 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
Tableau 4 : Quelques smileys Signes
Signification
:-)
souriant
:-(
fâché
;-)
clin d’œil
:-|
ça m’est égal
;-(
tant pis !
/!\
attention
:-))
hilarant
;~)
moqueur
:-o
surprise
:-x
« bouche cousue »
):-(
préoccupé
De l’information à la connaissance
Une phase de structuration Elle concerne la structuration des composants internes au niveau des sites Web eux-mêmes et au niveau des « pages Web » qui peuvent résulter de la structuration de plusieurs autres pages. Elle concerne aussi la structuration de la « Toile ». L’ensemble du réseau, au niveau mondial, doit être restructuré en vue de pouvoir véhiculer la connaissance. Cette restructuration repose sur la refonte de l’ensemble des infrastructures des sites les plus importants, en particulier parmi les acteurs majeurs du domaine de l’Internet ; la constitution de fonds de connaissance comprenant toutes les bases de la connaissance humaine. Parmi les exemples les plus emblématiques de constitution de fonds, nous pouvons citer le projet Internet Archive (www.archive.org/) qui numérise livres, musiques, émissions radiophoniques et de télévisions dont les droits sont passés dans le
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Le Web doit pouvoir passer d’un stade de média de transport de l’information à celui du transport de la connaissance. Cette évolution s’appuie sur deux phases.
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domaine public. De même, les fonds de photographies satellites de la planète rassemblent les trois acteurs suivants : Google, Microsoft et Yahoo. Désormais, toute application de type « Système d’Information Géographique » (SIG) s’appuie sur l’un de ces trois fonds, l’éditeur du SIG rajoutant alors ses cartes dédiées – réseaux électriques, canalisations, représentations de type géoéconomiques, géomarketing, géopolitique, géologistique, géodémographique ou géostatistique.
Une phase de fédération La phase de fédération est déterminante pour passer de la notion de l’information à celle de la connaissance du Web. Cette fédération comprend tout d’abord la fédération des médias. Elle est d’autant plus facile que le « tout numérique » devient une réalité actuelle. Elle comprend en outre les fédérations des terminaux. L’ubiquité du Web nécessite que tout terminal puisse être récepteur d’un Web global. Par ailleurs, certains terminaux, tels que les téléphones portables, deviennent des outils multifonctionnels, servant également d’appareils photos et de vidéo, voire de carte de paiement ou de moyen d’authentification. Enfin, elle comprend la fédération des services. Ces sites fournissant toutes sortes de services, ils doivent offrir des fonctionnalités d’interopérabilité. Les grands sites Web fournissent des services extrêmement divers, à l’image d’Amazon, site de vente en ligne qui commercialise également aujourd’hui de l’espace de « matériel virtuel » en mode « Hardware as a Service » (HaaS). Citons également Microsoft qui offre : • de la formation à la demande ; • un service encyclopédique (MSN Encarta) ; • un service de messagerie instantanée (Live Messenger) ; • des applications accessibles en mode SaaS.
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Enfin, Google propose : • un outil de recherche ; • une messagerie gratuite ; • des applications en ligne.
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De la connaissance à l’intelligence Une fois le transport de la connaissance rendu possible, il est envisageable d’injecter quelques fonctionnalités d’« intelligence », qui permettront au Web de gagner en fonctionnalités. L’inconnu reste le niveau d’intelligence acceptable. Il ne faut cependant surtout pas parler d’intelligence artificielle, comme cela a été fait dans le passé et qui a abouti à des échecs successifs. Aujourd’hui, avec le Web, il s’agira essentiellement de mise en œuvre de mécanismes « d’apprentissage » automatique de la connaissance domaine par domaine ou dans une approche « sémantique » dans les axes cités plus haut. On exige alors pour chaque domaine la description préalable de l’organisation des bases de la connaissance. De même, un modèle de structure des « données et informations concourant à la connaissance », que nous appellerons ci-après « dinaissances » – mot constitué de « donnée », « information » et « connaissance » – doit être accepté par les professionnels des domaines concernés. Et, dans la mesure du possible, quand cela s’applique, un fonds commun des « dinaissances » globales, comme le fonds de photographies satellite de la Terre, doit exister. Ces mécanismes, tout en contribuant à l’enrichissement des caractères « intelligents » du Web, laissent néanmoins le dernier mot à l’humain. En résumé : l’interprétation humaine reste indispensable pour l’interprétation intelligente des « dinaissances », ainsi que pour les décisions.
1. Ce magazine, dont le thème est l’entreprise 2.0, a pour nom, 2.n : n s’incrémente au fil des numéros.
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Par ailleurs, face à la masse de données, d’informations et de connaissances nécessaires, les usages du Web nous ont conduits à privilégier davantage le traitement de ces matériaux que le savoir intrinsèque lui-même, comme le disent Alice Gracel et Heather Gatley dans leur article : « Bienvenue à l’école du futur », paru en mars 2008 dans le magazine 2.21 : « Ce n’est plus le savoir qui est essentiel mais l’habileté à décoder l’information proposée en ligne. »
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LES STRUCTURES DU WEB 3.0 SÉMANTIQUE Le Web 3.0 sémantique comprend trois couches, qui existent d’ores et déjà et dont le processus de structuration est en cours. La couche d’infrastructure (couche basse) concerne essentiellement les équipements physiques ainsi que les protocoles et les logiciels qui prennent en charge et gèrent ces éléments matériels. La couche intermédiaire, que nous appelons « intrastructure », définit les interconnexions et les fonctions d’interopérabilité du Web. Enfin, dans la couche que nous appelons ici « suprastructure », les acteurs du Web mettent en œuvre les fonctions et les composantes sémantiques de l’Internet. Les paragraphes qui suivent décrivent ces couches au niveau de leurs principales caractéristiques. Ils se terminent par un tableau récapitulatif.
L’infrastructure L’infrastructure comprend un ensemble de technologies sousjacentes aux services Web offerts par les sites et les applications qui permettent des échanges basés sur des pages HTML et XML. Les grands enjeux de cette infrastructure sont les suivants. Le réseau physique de la « toile » s’appuie sur des liaisons distantes : • par réseau filaire en mode « Wide Area Network » (WAN) ; • par liaison satellite. Il s’appuie aussi sur des liaisons sans fil par protocole WiFi. Le réseau local est également possible avec ou sans fil.
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Le troisième enjeu correspond aux protocoles de communication, en particulier TCP/IP pour Internet. La version 6 du protocole IP, IP V6, est en cours de déploiement sur l’ensemble des réseaux Internet de la planète. Elle est rendue nécessaire par la très forte extension du nombre d’adresses requises par nos besoins. Les récepteurs que sont les terminaux Web ont vu leur nombre augmenter considérablement tant en ce qui concerne leurs formes, avec une tendance et à une grande convergence vers le terminal mobile ; leurs formats, visant de plus en plus la miniaturisation et
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plus particulièrement le téléphone mobile, plébiscité par les utilisateurs pour leur ubiquité ; que leur finalité. En effet, le terminal Web s’adapte de plus en plus à divers types d’équipements – industriels ou grand public comme le GPS (Global Positioning System) – devenant ainsi l’interface homme/machine standard pour tout matériel. Enfin, aux « capteurs » Web que sont déjà les webcams se rajouteront toutes sortes de capteurs (mesures, sons, etc.). Ces capteurs ont pour fonction d’alimenter Internet avec des informations directement mesurables et qui sont utilisées pour des calculs ou par des applications destinées aux utilisateurs particuliers ou aux entreprises.
L’intrastructure Cette couche, qui assure les points d’interconnexion du Web, se fonde sur l’existant, qui, cependant, doit être mis à jour tant par rapport aux usages qu’à la couche d’infrastructure fortement touchée les progrès technologiques. Cette infrastructure, qui s’adapte et se met en place progressivement et qui devra être prête pour pouvoir assurer une complète opérationnalité du futur Web, est la « suprastructure » au niveau des fonctionnalités « sémantiques » du Web 3.0. Il existe deux grands enjeux dans ce processus de mise à jour.
Second enjeu : le déploiement progressif du Web 2.0 à l’échelon national Ce déploiement devra recouvrir d’une manière générale tout l’espace socio-économique. C’est aussi une condition impérative pour que le Web 3.0 puisse être globalement opérationnel. Nous voyons trois étapes dans ce déploiement, qui pourront se superposer.
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Premier enjeu : la bi-univocité des clients et serveurs Web D’une part, avec les usages de blog, de wiki, balado et autres agrégations faciles, les clients (récepteurs) des sites Web (émetteurs) peuvent devenir eux-mêmes des émetteurs dont les clients peuvent être des sites. D’autre part, cet ensemble s’ajoutant aux réseaux des capteurs cités ci-dessus, les indicateurs seront en nombre beaucoup croissant et leur affichage facile en mode Web.
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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Étape 1 Il s’agit du déploiement généralisé des « entreprises 2.0 » dans l’ensemble des grands comptes où le processus a déjà commencé ; et au sein des PME/PMI. Celles-ci déploieront de diverses façons. Ainsi, certaines PME/PMI innovantes sont en avance de phase et s’équipent très vite, tandis que les autres suivent à des vitesses diverses. Enfin, les TPE/TPI présentent les caractéristiques suivantes. Les plus grandes sont assimilables aux PME/PMI. Et pour le plus grand nombre, peu ou pas informatisées, l’offre de SaaS leur permet d’utiliser, à des prix très bas, des applications à des fournisseurs de services Internet, leur évitant ainsi d’avoir à mettre en œuvre une informatique en direct ou en hébergement chez un prestataire. Pour les plus petites, certaines peuvent être assimilées à un usage informatique par un particulier. Étape 2 Elle concerne le déploiement d’Administration 2.0 – la version « entreprise 2.0 » pour le secteur public. Ce processus inclut d’une part la double approche d’une offre entièrement Web aux administrés et d’une adaptation de leur processus de fonctionnement pour assurer cette évolution. Il inclut d’autre part, pour les besoins de l’administration, diverses déclinaisons : • Éducation 2.0 ; • Santé 2.0 ; • Justice 2.0 ;
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• tous les autres organismes et agences de l’État. Étape 3 Elle concerne la Société 2.0 ou la Démocratie 2.0. Cette évolution, qui pourrait paraître utopique, est en fait relativement proche, car un grand nombre d’actions ont déjà été conduites dans cette optique, donnant naissance à des sites totalement opérationnels, par exemple : • les blogs des candidats aux diverses élections ; • l’utilisation de forums avec des outils de sondage ;
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• les sites ou blogs participatifs où les citoyens internautes peuvent se connecter pour échanger ; • la déclaration d’impôts en ligne ; • l’enregistrement et le paiement des cotisations sociales à partir d’un portail centralisateur pour l’ensemble des entreprises de France (www.gip-mds.fr).
La suprastructure Bâtir avec XML • Cette « suprastructure » est une couche d’abstraction Web dans laquelle les grands acteurs de l’Internet Web (éditeurs de produits, fournisseurs de services Internet) bâtissent l’approche sémantique. Cette dernière est totalement fondée sur la technologie XML et organisée en couches, chacune ayant une fonction spécifique : on compte deux couches d’abstraction et des couches logiques. Elles sont décrites ci-après. La couche de métadonnées C’est la couche d’abstraction supérieure de la suprastructure qui permet de décliner de façon structurée les propriétés de l’objet numérique. Prenons des exemples de métadonnées. Pour un fichier, les propriétés sont, classiquement : • date de création ; • auteur ; • domaine d’utilisation ; • niveau de sécurité (public, restreint, interne, confidentiel). Il est possible de définir d’autres propriétés qui s’avéreraient nécessaires à la classification du fichier. Par exemple, si le fichier est une œuvre musicale, on ajoutera :
• le nom du compositeur ; • le genre musical ; • des informations sur l’enregistrement.
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• le nom de l’interprète ;
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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Certains groupes d’utilisateurs de professions ou d’entreprises préféreront utiliser une organisation des métadonnées standardisée par des organismes de normalisation ou interprofessionnels. Cette standardisation s’appuie sur un cœur de structure défini par la W3C : Resource Description Framework (RDF). Parmi ces standards, on peut citer : • le standard Dublin Core, largement adopté par les chercheurs, les bibliothécaires, les universitaires ; • le format SKOS (Simple Knowledge Organization System) qui est une initiative de standardisation des métadonnées pour l’organisation de la connaissance ; • le standard « Friend of a Friend » (FoaF) pour décrire des relations dans le cadre d’un réseau social ; • toute autre structure qu’une communauté professionnelle pourrait définir au-dessus de RDF ; • une structure « propriétaire » définie pour des besoins strictement internes d’une organisation. La couche règles XML C’est la seconde couche d’abstraction de la suprastructure. Les « règles métier », ou Business Rules, sont d’habitude traduites dans le langage informatique utilisé pour développer les applications : COBOL, FORTRAN dans le passé, puis C++ et aujourd’hui en langage Java et C#. Toute règle peut donc être exprimée en XML, puisque c’est un langage informatique. Voici un exemple d’expression de règle. Nous pouvons décliner une règle sous la forme d’un tableau. Tableau 5 : Exemple de règle
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Propriété
Description de la propriété
Commentaire
Cadre d’application
Gestion commerciale
Définir le domaine d’utilisation
Conditions
Si le client achète pour plus de 100 euros
Fixer les conditions d’application de la règle
Type de règle
Remise commerciale
Il y a de nombreux types de règles : organisation, décision, calcul, routage, synchronisation, etc.
200 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
Propriété
Description de la propriété
Commentaire
Donnée entrée
Prix de l’article
Spécifier les données d’entrée de la règle
Expression
Réduire le prix de 10 %
L’expression de la règle peut prendre toute forme : - calcul - comparaison - déclenchement d’un processus, etc.
Données de sortie
Prix remisé
Spécifier les données de la règle de la règle
Flux
Informer la comptabilité client
Les règles permettent également de renseigner la dynamique du document, c’est-à-dire sa circulation, avec ou non demande d’actions de validation.
Validité de la règle
Pendant trois mois, à partir d’aujourd’hui
Renseigner sur la validité (et l’applicabilité) de la règle.
Administration de la règle
Le directeur commercial peut modifier la règle
Renseigner les droits sur la gestion des règles. Certaines règles ont des contraintes légales ou internes.
L’intérêt d’exprimer cette règle en format XML est multiple. Il devient ainsi possible de réutiliser la même règle dans toute autre application sans avoir à la réécrire. Et dans certains domaines, on peut utiliser le standard des Business Rules, par exemple : • RuleML : initiative de standard pour un format de Business Rules en général ; • MathML : standard pour les mathématiciens ; • XBRML : standard pour les règles métier de la finance ; • ebRML : standard proposé pour l’e-Business.
1. Il existe plusieurs standards, par exemple XAML en environnement .Net de Microsoft
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La couche présentation graphique Cette couche définit et génère les fenêtres qui sont présentées à l’utilisateur. Ces IHM sont des fichiers en format XML1 graphique,
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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créées sous forme vectorielle et « encapsulées » dans les échanges XML. La couche application XML De façon classique, la couche « application » est bâtie au-dessous de la couche d’IHM. Elle est également codée en XML. Cependant, d’autres langages de programmation Web sont utilisés et continueront à l’être : HTML, Java, C#, PHP. La couche données XML Arrive ensuite la couche de données, elle aussi structurée en format XML. Désormais, les documents bureautiques ou Web peuvent être accompagnés de leurs données encapsulées dans un flux XML. Les étapes classiques du traitement de ces données sont : • leur publication par Web service ; • leur consommation par une application Web ; • au niveau local, leur transformation en fichier plat ou en format « base de données » cache ; à ce niveau, elles peuvent être utilisées par les ressources locales afin d’accélérer le traitement ; • puis le retour au serveur Web des données modifiées ; • le recommencement du cycle de « publication/consommation ».
Consolider par les usages Bien plus que pour le Web 2.0, le Web 3.0 ne pourra être efficace que si les usages suivants – qui existent déjà largement dans certaines organisations – sont adoptés par trois types de population. Ainsi, les développeurs doivent tenir compte des standards de structuration des Business Rules et prévoir les possibilités de saisies des métadonnées en prévoyant l’obligation de saisie de quelques champs : • pour les aspects sécurité ; © Groupe Eyrolles
• pour les aspects de propriété du document ; • pour renseigner les droits afférents aux documents. Quant aux utilisateurs, ils doivent s’habituer à renseigner un minimum de champs de métadonnées.
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Enfin, les administrateurs et les responsables de services doivent définir les métadonnées pertinentes au contexte de travail de l’entreprise ainsi que les règles utilisées et leur expression.
Nécessité de sécurité La sécurité d’échange doit être assurée, soit par la sécurité des Web services, soit par les échanges HTTPS, c’est-à-dire http sécurisé. La signature est également l’une des fonctionnalités majeures : signature des documents numériques. Synoptique des couches Tableau 6 : Structure du Web 3.0 Caractéristiques
Observations
Infrastructure
Assure la connectivité S’appuie sur les protocoles et les normes Liée à aux infrastructures numériques nationales
Les standards du Web sont stabilisés, performants et reconnus, dont TCP/IP. Jusqu’à quand la version IPV6a sera-t-elle suffisante ? La mise en œuvre d’une infrastructure à très haut débitb (THD) est une nécessité absolue.
Intrastructure
Réseau maillé Déjà existant, constitué par le Web 2.0 actuel
La structuration va se poursuivre sur trois plans. Les capteurs (dont déjà les webcams) seront rejoints par d’autres types de capteurs (mesures, sons, odeurs, etc.). Les « émetteurs » : individuellement, chaque internaute pouvant bloguer et podcaster publie sur le Web. Les serveurs de sites, tout se multipliant, peuvent consommer (devenant récepteurs) les services Web des émetteurs Le maillage va se complexifier par le maillage individualisé des utilisateurs et des entreprises, à travers les technologies de RSS, Rétroliens et Grid Computing (PC calculant en grappes).
Suprastructure
Partie « intelligente » ou haute du Web 3.0 sémantique
Modélisation de la connaissance par la sémantique, la pragmatique et la sémiotique. Modélisation des règles, des organisations et des comportements. Modélisation « bionique ».
a. Cette version permet 3,4 x 1038 adresses Internet. b. Le THD est l’un des thèmes phare des Assises du Numérique (Paris du 30 mai 2008 au 30 juin 2008)
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Couches
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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MATURATION NÉCESSAIRE DES USAGES Cette maturation résultera d’une double interactivité entre des acteurs humains et les fonctions offertes par le Web 3.0 sémantique. D’une part, il faut une maturation des usages des utilisateurs. L’utilisateur, en s’appropriant les informations et les connaissances rendues accessibles, prépare lui-même : • le terrain de l’extension de ses connaissances ; • son intelligence, c’est-à-dire sa compréhension, du domaine d’activité qui fait l’objet de sa recherche ou de sa visite. Il lui faudra pour cela s’assurer d’une maîtrise minimum des outils, dont les plus importants sont les outils de recherche. D’autre part, il est indispensable de disposer de systèmes matures. Le système détecte et reconnaît le contexte et l’environnement de l’utilisateur : cette fonctionnalité, opérationnelle depuis le Web 1.0, deviendra plus performante avec le Web 3.0 sémantique et surtout, donnera des résultats d’un niveau de pertinence largement supérieur à ce que nous connaissons actuellement. Ainsi, l’utilisateur disposera en mode automatique des informations qui lui sont le plus utiles dès l’ouverture d’un site ou d’une application. Prenons des exemples. Nous décrivons ci-dessous deux approches de maturation. La première concerne des usages utilisateur. La seconde concerne la détection de leurs habitudes.
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Processus utilisateur Voici le cas vécu d’un touriste qui veut se rendre à New York. Il peut préparer son séjour en faisant une visite virtuelle. Une première approche est possible : en accédant par la recherche sur www.live.com à Virtual Earth et en choisissant le menu « cartes », en mode photo aérienne, on peut obtenir une représentation en pseudo-3D du site géographique. Ce mode, qui utilise des prises de vue en double oblique permet une visite très réaliste de New York. Une seconde approche consiste à visiter le site avec Google Earth : dans ce cas, il n’y a pas de photos aériennes, mais uniquement une représentation par photos satellite enrichies de prises de vue proposées librement par les internautes. Ces derniers ont la possibilité de noter ces photos.
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Le futur visiteur, dans les deux cas, peut d’ores et déjà bénéficier d’un « apprentissage » préalable du site géographique réel grâce à Internet. Par ailleurs, dans les deux cas, des applications peuvent superposer d’autres données ou contenus aux photos aériennes ou satellite telles que l’état du trafic, les publicités, etc. Ces possibilités seront enrichies avec le Web 3.0 sémantique.
Processus Web La maturation des outils peut être illustrée par la génération automatique des onglets d’iGoogle : un utilisateur peut en effet demander, dans sa page iGoogle la création d’un nouvel onglet en saisissant un mot indiquant ses pôles d’intérêts. Le processus suivant se déclenche automatiquement par son clic de souris. Le système détecte alors les derniers sites visités par l’utilisateur et ses recherches les plus courantes. Il propose un mashup de sites, des blogs et des autres ressources d’Internet appartenant aux mêmes domaines et les place dans le nouvel onglet.
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Figure 56 : Vue de New York en mode Bird’s eyes (version Virtual Earth)
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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Figure 57 : Vue de New York par Google Earth, avec photos d’internautes
INTELLIGENCE ET MANAGEMENT DE LA CONNAISSANCE Le BI 3.0 Les techniques de business intelligence (BI) permettent de détecter des informations donnant des indications sur les évolutions des performances de l’entreprise dans tout domaine : ventes, qualité des produits, remplissage du carnet de commande, etc. Comme dans le Web 3.0, le flux XML encapsule données, informations et connaissances. On peut facilement extrapoler que les techniques de BI permettront : • des remontées beaucoup plus rapides d’indicateurs ;
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• une plus grande précision dans les visions instantanées (« snapshots ») des systèmes surveillés ; • une pratique qui sera beaucoup plus marquée par le temps réel. Mais en contrepartie, la réactivité demandée aux entreprises sera beaucoup plus importante et les temps de décisions devront être plus courts.
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Impact sur les business rules management De même, les business rules étant encapsulées dans l’« univers XML » (c’est-à-dire les codes XML, les pages XML, les contenus et contenants XML), on peut d’ores et déjà prévoir que les règles d’appartenance des objets (documents, applications, œuvres, etc.) seront parties intégrantes de leur propriété. Ainsi seront transportées avec les objets les réponses aux questions suivantes : • qui est l’auteur ? • qui est le propriétaire ? • qui gère les droits ? Par ailleurs, les règles de gestion et d’échange de ces objets (accès aux objets, diffusion, distribution, duplication, autorisation de lecture, de modification, etc.) seront automatiquement prises en compte. Enfin, les règles de conservation seront aussi définies : durée de vie, archivage, destruction ou recyclage.
Le KM 3.0 Qui dit intelligence et connaissance dit nécessité de gestion de la connaissance ou « Knowledge Management Intelligence ». Les grandes ruptures entre la deuxième et la troisième génération du knowledge management (KM) sont les suivantes.
Il rendra aussi possible de pousser les limites de la connaissance vers des éléments non directement mesurables, tels que le comportement des individus ou de la collectivité ; des expressions plus intériorisées face aux événements. Enfin, il permettra de tenter de projeter le comportement de tout système, qu’il soit humain ou non.
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Alors que le KM 2.0 voit la mise en place progressive d’un grand nombre d’usages tels que la participation de tous, l’échange de la connaissance et l’élaboration de contenus communs, le KM 3.0 concernera surtout la faculté pour tout individu, face au contenu du Web 3.0 de décoder, comprendre, exploiter et enrichir les connaissances auxquelles il a accès.
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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La valeur On a assisté au fil des siècles à la dématérialisation de la valeur, sous un double aspect. Le premier est celui de la représentation de la valeur qui est passée de l’objet solide (biens, bijoux, or, argent, monnaie) à sa représentation « papier » ou sous forme de billet de banque ; puis de l’objet papier (billets, actions, titres de propriété) à une représentation numérique (flux électronique de débit/crédit des échanges). Le second est celui de la valeur elle-même. On attachait un maximum de valeur aux biens matériels. Aujourd’hui, un logiciel peut, dans certains cas, représenter une valeur bien plus importante que des objets. Cette situation a amené nos sociétés à ne plus pouvoir évaluer la valeur des objets, et surtout des objets numériques. Aussi, l’un des apports du Web 3.0 sera-t-il de classifier la valeur immatérielle en définissant, par exemple : • sa valeur d’usage ; • sa valorisation monétaire ; • son image de marque ; • son potentiel de confiance.
WEB 3.0, INTELLIGENCE 2.0 Comment fonctionne l’intelligence ?
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Pour simplifier, nous postulons que l’intelligence humaine est liée au raisonnement et peut prendre plusieurs formes. Tout d’abord, elle peut prendre la forme de la logique, qu’elle soit basée sur les mathématiques ou toute autre logique déductive provenant de diverses disciplines littéraires ou scientifiques. Dans les deux cas, la base de cette forme d’intelligence est la connaissance. Une autre forme est celle du raisonnement non déductif qui peut être lié soit à des réactions innées ou acquises, soit à l’intuition, l’humeur, le caractère de l’individu ou les sentiments du moment.
208 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
Enfin, la forme de l’« intelligence de groupes humains » peut être segmentée en deux approches. La première est l’interaction résultant de l’intelligence individuelle de groupe par la dynamique de groupe et la mise en commun des intelligences individuelles. La seconde est l’intelligence individuelle face à cette « intelligence collective », qui est d’une part plus ou moins fortement influencée par les réactions des groupes ; d’autre part, inaliénable de l’individu. Les paragraphes suivants décrivent comment ces formes d’intelligence pourront être formulées par le Web 3.0 sémantique.
Intelligence articielle et robotisation de l’intelligence La vision que nous avons de l’« intelligence artificielle » (IA) est celle d’un échec. Mais cette impression est surtout due à un trop grand espoir déçu. En réalité, au fil du temps, l’IA s’est développée à travers un certain nombre de technologies. Nous en citons quelques-unes ci-après. Ainsi, les moteurs d’inférence sont des processus de déductions logiques. Les réseaux neuronaux, eux, sont des modèles de fonctionnement d’un nombre important de cellules qui interagissent entre elles. Pour sa part, la logique floue introduit la notion de probabilité d’appartenance d’un individu à plusieurs ensembles et permet d’éviter un choix en tout ou rien. Enfin, les techniques statistiques sont globalement à la base d’un grand nombre de modèles dans ce domaine. L’ensemble de ces technologies peut être mis en œuvre dans le Web. Il ne faut surtout pas perdre de vue que l’IA est avant tout une technologie au service de l’aide à la décision humaine avant d’être celle de la robotisation de l’intelligence.
Les espaces communautaires que nous connaissons avec le Web 2.0 (à savoir les blogs, les wikis, la messagerie instantanée) contiennent indéniablement une dimension de connaissance collective. Il est difficile, voire impossible de parler d’intelligence collective. Au mieux pourrait-on parler d’une certaine forme d’intelligence partagée. Mais il faut insister sur les points suivants.
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Connaissance ou intelligence collective ?
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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C’est malheureusement la loi du plus grand nombre qui s’applique, donc la loi du plus fort. À ce titre, on ne peut que constater que ce modèle, pris dans son état brut, est régressif. Les « technologues » – ou plutôt les « Web addicts1 » – nous imposent d’adapter le modèle de la démocratie à un domaine où cela ne saurait en aucun cas s’appliquer, car l’opinion, et encore moins la connaissance du public, ne sont pas la vérité universelle ! Nous pouvons citer beaucoup d’exemples. Ainsi, quand l’avis du public est demandé dans les jeux télévisés faisant appel au savoir général des candidats, cet avis peut être aussi bien faux que vrai. L’exemple historique de l’élection démocratique d’Adolf Hitler et de maints dictateurs montre les limites de l’opinion du groupe le plus nombreux, même en politique ! De plus, l’avis de l’expert est supérieur à celui de « Monsieur Toutle-monde », mais il faut tenir compte du référentiel de l’expert. Si ce référentiel est mauvais, alors tout s’écroule ! De même, le référentiel de « Monsieur Tout-le-monde » est presque systématiquement le même que celui des experts du moment… mais dans sa version dégradée, c’est-à-dire, celle résultant de diverses vulgarisations. L’exemple de plus emblématique est celui de la rotondité de la Terre. Pour le public du XVIIe siècle, la Terre était plate. Ce sont des savants, se démarquant de l’opinion publique et de la loi officielle, en l’occurrence Kepler et Galilée, qui ont su faire l’hypothèse et démontrer la rotondité de la Terre. Si un wiki avait été mis en œuvre à leur époque, l’Humanité en serait restée à son impression de platitude de notre planète…
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Néanmoins, pendant longtemps, les « experts », par exemple, les historiens, se sont intéressés exclusivement aux opinions des grands de ce monde : écrivains, savants, rois, princes, nobles, titulaires de charges, donnant ainsi un éclairage partial du point de la vue de la société. Aujourd’hui, historiens et sociologues s’intéressent et intègrent la dimension de la vie du peuple, recherchant des traces écrites2 des catégories sociales du peuple. L’apport des outils de collabora1. Personne souffrant d’une dépendance au Web. 2. Par exemple, ces traces écrites sont particulièrement nombreuses chez les Romains, véritables « taggers de graffitis ». Cette approche permet une reconstitution de l’histoire de Rome, plus proche de la réalité que de l’histoire « officielle ».
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tion et de contribution collective est donc très important d’un point de vue sociologique et historique.
Des experts parmi le peuple ! Il se passera bien du temps avant qu’un politicien ou un publiciste ne proclame : « Nous sommes tous des Web natives ! » Mais dès à présent, nous pouvons dire, avec un clin d’œil, que le Web (avec Google en première ligne) a fait de nous tous des chercheurs ! Audelà, le Web 3.0 apportera surtout l’abolition des frontières entre le monde des « sachants » et celui du simple citoyen apprenant. Autrement dit, il n’y aura plus de frontière entre experts et internautes. Le côté positif de cette évolution est que tout le monde peut, à sa guise, devenir chercheur : • en utilisant des moteurs de recherche généraux (Google, Live, Yahoo!, Altavista, etc.) ; • en maîtrisant des moteurs de recherche spécifiques pour la publication de recherche, marque-pages, liens, blogs, wikis, etc. De plus, tout le monde peut librement devenir contributeur en intervenant dans les forums, en apportant un éclairage, ou en créant des articles dans les encyclopédies en ligne. Cependant, cette société de libre expression ne pourra en aucune manière être considérée comme porteuse d’une intelligence collective.
Comme nous l’avons exprimé ci-dessus, il ne peut y avoir de sommation d’intelligences individuelles, mais seulement sommation ou juxtaposition de connaissances individuelles pour aboutir à un référentiel Web de connaissances collectives. Les exemples de certaines sociétés animales démontrent cependant que la sommation d’intelligences extrêmement rudimentaires aboutit à une formation sociale dont le comportement exprime une certaine forme d’intelligence. C’est effectivement le cas de certaines sociétés animales comme les fourmis, termites ou encore des sociétés d’animaux plus évolués tels que les loups. Dire que le Web permettra de constituer une intelligence sociale présente beaucoup de danger. On voit en effet que ces sociétés
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Limites et dangers de l’intelligence collective
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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animales qui aboutissent à une intelligence collective sont fondées sur la loi du plus fort, voire sur l’esclavage des plus faibles. C’est justement ce que les sociétés humaines ont essayé depuis des générations de supprimer. Il faudra ainsi se montrer vigilant pour le Web du futur et légiférer, mettre en avant l’éthique et la déontologie, enfin éviter que l’approche collective n’écrase complètement l’individu. C’est là une tâche extrêmement difficile dans un contexte où les frontières géopolitiques ont disparu et où les barrières entre « sachant/apprenant » sont également en train de s’estomper.
La publicisation généralisée Le processus le plus caractéristique de cette approche est le « crowdsourcing », néologisme composé des mots anglais « crowd » (foule) et « sourcing » (production), tout comme les mots « outsourcing » (externalisation) et « insourcing » (internalisation). Le crowdsourcing consiste à faire produire une œuvre, un produit, un logiciel, etc., par le public, dans un mode qui implique : • le bénévolat ; • le versement automatique des droits de conception collaborative à la communauté qui gère l’initiative de publicisation ; • le respect des règles de gouvernance de cette même communauté. Il nous semble approprié de franciser ce mot. Aussi proposons-nous de reprendre le néologisme « publicisation1 », proposé dans l’ouvrage Choisir son Business Model, de Jean-Louis Lequeux et Mélissa Saadoun (Éditions d’Organisation, 2008).
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Dès à présent, un grand nombre d’initiatives ont été lancées, consistant à s’appuyer sur la contribution des internautes pour publier sur Internet par exemple une encyclopédie, avec Wikipédia, un référentiel de photos avec iStock Photo, Emporis Community pour les immeubles dans le monde. Le Web 3.0 sémantique permettra 1. Le mot publicisation est apparu avec des sens différents : D’une part, dans le sens de rendre public, ou accessible au public : « publicisation de la science » ; D’autre part, dans le sens d’ouverture au public, par exemple de l’administration. Ici, il faut entendre dans la racine « public » à la fois le « peuple » et « publier ».
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d’accéder à un fonds de référentiels qui couvrira l’ensemble de l’univers que l’homme aura conquis, en termes : • interplanétaires : les données concernant notre planète seront enrichies de celles collectées sur les autres planètes, voire les autres étoiles (initiatives StarDust@Home de l’Université de Berkeley et Galaxy Zoo) ; • scientifiques : les connaissances scientifiques, domaine par domaine, sont en train d’être répertoriées dans des référentiels ; • historiques : les documents historiques sont progressivement mis à disposition des internautes après numérisation, • artistiques et culturels : l’ensemble des œuvres littéraires, musicales, cinématographiques dont les droits sont passés dans le domaine public seront disponibles sur Internet (initiative Internet Archive) ; • littéraires, avec la numérisation des œuvres écrites par divers grands acteurs de l’Internet. En coordination de ces initiatives, des sites fédérateurs sont créés comme Wikimedia pour l’ensemble des wikis de Wikipédia ou Cambrian House pour le « crowdsourcing tout azimuts ».
WEB 3.0 = WEB 3D Le Web 3.0 sera aussi le Web 3D. La 3D n’est certes pas nouvelle, ni pour l’informatique ni pour la technologie en général. Pour le Web, elle a commencé à devenir l’une de ses composantes dès lors que les performances devenaient acceptables pour l’utilisateur, c’est-àdire avec le Web 2.0. Cette tendance doit se poursuivre avec le Web futur, car les enjeux du Web 3D sont considérables, permettant de faire reculer en grand nombre les limites de nos technologies.
3D pour la simulation
La simulation des univers non modélisables par des algorithmes Dans ces univers, tels que Second Life ou Lively, des réseaux sociaux virtuels sont en cours de constitution. Ils obéissent aux
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Au niveau de la simulation, au-delà des mondes ludiques virtuels en trois dimensions, le Web 3D permettra deux réalisations.
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mêmes lois de la dynamique de groupe et offrent aux entreprises un espace idéal de tests pour leurs produits et services.
La conception de nouvelles structures réelles plus optimisées C’est typiquement le cas pour l’urbanisme, la construction d’immeubles, de voitures, d’avions, de bateaux. L’optimisation porte sur : • une conception plus économe en matériaux et consommation d’énergie ; • une mise en œuvre plus respectueuse de l’environnement et de l’écologie ; • une organisation plus rigoureuse par rapport au respect des règles sociales et à l’homme. Les premiers usages de ce Web 3D ont déjà commencé. L’avenir verra leur généralisation et la mise en œuvre systématique de ces simulations avant la réalisation définitive de projets aussi bien économiques que techniques.
Web 3D temps réel Cette déclinaison du Web 3D est utilisée dans les domaines suivants.
Surveillance Basée sur une infrastructure de webcams, elle est applicable dans divers domaines : surveillance du trafic, météo, simple retransmission vidéo pour la visite guidée de sites.
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Applications scientifiques, techniques et industrielles Citons ici les soins médicaux, par exemple, la téléchirurgie ; la fabrication industrielle ou encore le pilotage des avions, des trains, des bateaux. Accès à des endroits où l’homme ne peut aller Typiquement, il s’agit de certains voyages dans l’espace par robots interposés ou encore la représentation des univers infiniment petits ou infiniment grands.
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VIRTUALISATION DU MONDE RÉEL Espaces réels Comme nous l’avons vu, il est possible de représenter le monde réel à l’aide de reconstitutions virtuelles. Sans aller dans des extrêmes, tels que l’exploration des planètes de notre système solaire, de nombreux domaines remplacent de plus en plus l’apprentissage sur objet réel par la virtualité. Par exemple, certaines facultés de médecine ont partiellement remplacé les enseignements par dissection, par des représentations en Web 3D. Cette virtualisation du monde réel actuel peut intégrer la dimension temps : passé et avenir.
Web 3.0 : retour vers le futur
Figure 58 : Reconstitution de la Rome antique
Ces technologies contribuent à enrichir le fonds de la connaissance humaine sur l’histoire, mais permettent également de projeter les
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Les ruines des villes antiques et les sites archéologiques peuvent désormais être reconstitués, à l’instar de ce site réalisé à l’Université de Caen (www.unicaen.fr/rome/).
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évolutions possibles de nos sociétés actuelles. Ainsi, à terme, nous disposerons sur l’Internet d’un fonds de données et de connaissances représentant le monde au fil de l’histoire. Des représentations analogues existent bien entendu pour la préhistoire et l’histoire géologique et géophysiques de la Terre.
Web 3.0 : usages du passé pour le futur Les médias écrivent souvent qu’Internet fait du monde un village. Si c’est le cas, avec le Web, la France devient de plus en plus un village gaulois. Or à l’époque des Gaules, les tribus gauloises jouissaient de la possibilité de décider par vote pour toute décision. Ce n’était d’ailleurs pas spécifique qu’aux seuls Gaulois : les Germains et les Vikings gouvernaient leurs tribus de cette façon. Avec le temps, la démocratie moderne a évolué vers un système de mandatement où les décisions sont prises par des élus. Rares sont les pays qui ont conservé le mode de prise de décision décrit cidessus – mais, ils existent, par exemple la Suisse avec le système de votation des cantons. Déjà avec le Web 2.0, il est possible d’instaurer un système référendaire pour les collectivités territoriales, qui permettrait aux citoyens de : • noter les décisions de leurs élus ; • participer de façon simple, rapide et efficace à des votes pour les décisions les plus importantes à prendre ; • faire circuler de façon plus rapide des pétitions. Cette forme de « retour vers le passé » peut faire partie du Web futur, à condition que le déploiement du Web 2.0 soit suffisamment effectif au niveau des administrations locales, avec la création de sites Web de proximité.
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Au niveau de la sécurité, si l’État distribue un certificat de sécurité par citoyen et par canton ou par commune ou comté, ce type de vote devrait être largement accepté. Reste, pour la France, l’acceptation du scrutin par Internet, qui n’est pas encore généralisée. Mais le cas du vote par Internet avance puisqu’aux élections prud’homales1 1. Ces élections, qui font partie intégrante de l’expression de la démocratie française, permettent d’élire les conseillers des tribunaux prud’homaux qui jugent les conflits du travail.
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de 2008, le vote par Internet a la préséance sur le vote physique et le vote par correspondance. C’est-à-dire que si une personne a voté par Internet mais vote ensuite physiquement, ce dernier vote sera annulé. Ceci est un précédent, d’autant que la loi prévoit pour ces élections prud’homales la prépondérance du vote physique sur le vote par correspondance (un électeur votant par correspondance peut venir voter physiquement, annulant ainsi son vote par correspondance).
LA CRÉATIVITÉ, MODE 3.0 Créatif, analyste et développeur Jusqu’à présent, dans tout domaine et plus particulièrement dans celui du Web, le « Design Esthétique », la « Conception Fonctionnelle » et le « Développement Technique » semblent appartenir à trois mondes différents, où les intervenants collaborent deux par deux au gré des objectifs de leur client. Quand il s’agit d’un produit qui est plutôt « marketing », le créatif du design esthétique va collaborer avec l’analyste fonctionnel. Quand c’est un produit plutôt « technique », alors analyste fonctionnel et développeur coopèrent. Créatif et développeur se parlent souvent par leur client commun interposé. Il est vrai que chez les grands industriels (par exemple les constructeurs automobiles) la collaboration de ces spécialistes est monnaie courante. Mais chez les acteurs du Web, les exceptions ne sont pas légion. Un seul grand constructeur et éditeur informatique fait exception à la règle : Apple. Bref, même dans le monde Web 2.0, cette séparation en trois univers conduit, la plupart du temps à des sites, des matériels et des applications qui ne donnent pas toujours complète satisfaction aux utilisateurs. En effet, ces derniers peuvent avoir une fibre plutôt orientée vers l’ergonomie, la fonction d’usage ou la technique.
Design Les enrichissements socioculturels et éducatifs des sites Web 2.0 vont s’accentuer avec le Web 3.0, créant le besoin d’une esthétique
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Le Web 3.0 sera un lieu de rencontre de ces trois catégories famille, car les usages et les tendances du Web 2.0, en s’accentuant, vont créer des situations favorables à la coopération.
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tributaire de référentiels de valeurs qualitatives très diversifiées ; ainsi que le besoin de moduler une ergonomie qui utilise des conventions différentes en fonction des communautés ou groupe d’utilisateur.
Fonctionnel Sur le plan fonctionnel, le Web 3.0 marquera l’évanouissement complet des frontières entre d’une part le professionnel et le ludique ; d’autre part la sphère privée et la sphère professionnelle. Cependant, il faudra quand même éviter les chevauchements.
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Technologies Au niveau des technologies, le Web 3.0 verra des développements dans deux axes majeurs et complémentaires. D’une part, les technologies Web se « rapprocheront » de plus en plus de l’individu par le développement et l’intégration de capteurs « biologiques », comme c’est déjà le cas avec les systèmes de sécurité biométriques1 : les capteurs pour la saisie de la perception des individus se développeront pour d’autres usages, tels que l’aide à la conduite automobile. De plus, elles se rapprocheront par le développement des « Web prothèses » : nous pouvons considérer les exosquelettes2 reliés au Web comme la première de ces applications. D’autre part, le Web intégrera des technologies telles que les biotechnologies et micro-biotechnologies ainsi que les nanotechnologies. Ces deux évolutions simultanées permettront une convergence vers une plus grande proximité de l’univers individuel et sensoriel de l’individu.
1. Par reconnaissance d’empreintes digitales ou de l’iris. 2. Les exosquelettes sont des « coquilles robotisées » qui démultiplient les capacités des membres ou d’autres parties du corps. Les premières applications sont les suivantes. Dans le domaine médical, pour les personnels soignants qui soulèvent des malades ou encore, pour des malades à mobilité réduite qui peuvent les utiliser comme prothèses. Dans le domaine militaire pour permettre aux fantassins de porter plus de charges, disposer de plus de motricité, etc. L’année 2008 marque le début de la commercialisation de ces exosquelettes en grande série, donc à des prix abordables.
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Créatifs, fonctionnels et développeurs Le rapprochement de ces communautés de professionnels ne pourra être effectif qu’avec les évolutions suivantes. Tout d’abord, nous aurons une offre d’outils unifiés. Le début d’une telle approche apparaît chez l’éditeur Microsoft avec Visual Studio (outil de développement et de spécification) et Expression Suite (outil de design). De plus, naîtront des standards de fait d’ergonomie et de présentation. Quand les usages sont largement adoptés par les internautes, les principes d’ergonomie et de présentation des interfaces homme/ machine donnent lieu à une cooptation tacite mais massive. Par ailleurs, citons les normes et les standards techniques. À partir du moment où l’ensemble des acteurs doit respecter des normes et des standards techniques communs, il est plus facile d’assurer la collaboration entre développeurs et techniciens d’un côté et fonctionnels, ergonomes et créatifs de l’autre. Par ailleurs, l’usage de ces normes et standards permet de développer des pacquages enveloppant les aspects fonctionnels et techniques ; « d’envelopper » ces pacquages dans un contenant totalement paramétrable par rapport à : • la présentation (positionnement des objets graphiques, couleurs, etc.) ; • la langue (le multilinguisme devient de plus en plus incontournable) ;
Auteur, contenu et audience En examinant la nature du Web 2.0, il est à prévoir que le Web 3.0 soit caractérisé par la relation entre l’auteur et son audience, par contenu interposé.
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• le contenu lui-même, qui peut être dédié à des groupes, des communautés, voire des particuliers. Cependant, nous estimons que le « créatif » prendra beaucoup plus d’importance qu’avec les générations précédentes du Web pour les raisons suivantes : Enfin, les utilisateurs sont devenus plus exigeants et les fonctionnalités et les technologies ayant tendance à s’uniformiser, c’est sur l’ergonomie et l’esthétique qu’il sera possible d’assurer les différentiels avec la concurrence.
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L’auteur Par auteur, il faut entendre tout internaute publiant sur Internet. Ses publications peuvent être individuelles, par exemple des blogs ou des podcasts ; ou des contributions à une publication collective : c’est le cas des wikis. L’auteur sera de plus en plus en relation directe avec son audience. Le contenu Le contenu d’une publication restera comme aujourd’hui individuel ou collectif. Néanmoins, même en cas de contenu individuel, l’audience, pouvant intervenir par des commentaires par exemple, aura un impact sur les publications de tout auteur. L’audience Ce qui caractérise l’audience Web 3.0, c’est que toute personne ou groupe de cette audience est un auteur potentiel. Les relations entre un auteur et son audience perdent leur caractère bilatéral d’une part et deviennent un réseau de relations d’auteur à auteur d’autre part. Par ailleurs, le contenu sera également un nuage de contenus que l’on pourra reconstituer à façon selon la partie du réseau d’auteurs considérés. Il sera en outre plutôt un méta-contenu qu’il faudra gérer via les liens, les labels, les marque-pages, les flux de syndication qui se feront et se déferont au gré du bon vouloir des internautes, tous auteurs et tous lecteurs. Enfin, dans certains cas, un contenu référentiel englobant l’intégralité d’un fonds de données, informations et connaissances dans un domaine particulier. Audessus de ce référentiel viendront des couches de contenus spécifiques précisant certains domaines, sous domaines ou préoccupations précises. C’est ce à quoi nous assistons avec le fond de photos satellite géré par Google Earth, Virtual Earth ou Yahoo!, sur lequel des sites viennent superposer : • tantôt des photos souvenir de particuliers ;
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• tantôt des indications de type touristique ; • tantôt les reconstitutions des villes antiques et des sites archéologiques ; • ou encore les informations professionnelles de systèmes d’informations géographiques.
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LE WEB, RÉPLIQUE DE L’UNIVERS Le Web est le système d’information Le vieux rêve des années 1980, « The computer is the network » (l’ordinateur est le réseau), devient à présent « Mon ordinateur est le Net ». Nous pourrions même élargir cette affirmation et dire que désormais, « Le Web est notre univers ». Et contrairement à l’univers réel, sur celui-ci, l’homme a la maîtrise complète. De même, les affirmations suivantes sont toutes correctes.
Le terminal universel sera le Web 3.0 En effet, si physiquement il existe un nombre important de terminaux de tout type, la tendance à voir le Web 3.0 devenir l’interface unique est bien réelle. Peut-être que l’ubiquité du téléphone cellulaire en fera l’expression la plus commune dans les prochaines années. Le système d’exploitation est le Web 3.0 Alors que dans les âges technologiques antérieurs, il fallait toujours se préoccuper du système que l’on choisissait (Windows, Macintosh ou un autre système), de plus en plus, le seul critère sera la possibilité d’accéder au Web. Les données seront le contenu du Web 3.0 Déjà, toute information, ou presque, peut être trouvée sur Internet. Avec le Web 3.0, la totalité des données, des informations et des connaissances composera le contenu de l’Internet.
Le mode SaaS Dans ce mode de commercialisation, les applications, comme les plates-formes virtuelles de systèmes, sont accessibles en mode Internet. L’accès SaaS devient un nouveau service Internet, au même titre
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Les applications seront dans le Web 3.0 Depuis le Web 1.0, de nombreuses applications sont accessibles par le Web : avec la troisième génération de Web, ce sont toutes les applications qui le seront, en particulier à travers les technologies suivantes.
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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que la messagerie. Dans ce mode de fonctionnement, les données seront bien sûr hébergées chez le fournisseur des services SaaS. Business Intelligence (BI) Toutes les données se trouvant sur le Web et étant accessibles en mode Web, il devient une évidence de dire que le Web 3.0 sera le BI ! Business Process (BP) La couche de suprastructure contenant à la fois les métadonnées et les « règles métiers », inutile de chercher ailleurs le BP : il sera dans le Web 3.0.
Le Web 3.0, miroir du monde Tel que nous l’avons décrit, le Web évolue très sûrement vers un méga-système qui sera l’image de la réalité, à la fois fonds d’archivage de la connaissance de l’Humanité, tant pour les événements actuels que pour le passé reconstitué ou encore pour la projection vers l’avenir, que par les possibilités de simulation du Web 3.0. Mais bien plus qu’un miroir du monde, le Web sera également l’outil privilégié de gouvernance du monde. En effet, avec les facilités d’accéder à la connaissance et de remonter les indicateurs vers les décideurs, le Web devient dès à présent incontournable pour assurer une bonne gouvernance des organisations. En outre, ce sera un outil de projection de l’imaginaire humain. Nous constatons très bien, à travers les prismes que nous offrent les sites tels que Second Life, Cyworld ou encore Active Worlds, que leurs utilisateurs tentent de s’identifier à d’autres personnages que ce qu’ils sont dans la réalité. Dans cette identification, ils projettent également les objets et les biens auxquels ils aspirent.
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Le Web, outil… surtout de recherche Stocker, archiver, référencer des données, des informations et de la connaissance… c’est bien ! Il faut pouvoir ensuite retrouver ce que l’on cherche rapidement, de façon pertinente, enfin en utilisant un langage le plus proche possible de la langue naturelle.
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Figure 59 : Importance stratégique de la fonction « Search » dans les développements de Google
La recherche plein-texte ne suffit plus pour répondre à ces besoins. Comme expliqué dans cet ouvrage, les dimensions contextuelles et exo-textuelles sont devenues indispensables. Aussi, le développement des outils de recherche est-il l’un des axes majeurs pour les grands acteurs du Web. En plus des grands acteurs dans le domaine des moteurs de recherche que sont Google, Live Search et Yahoo!, de nouveaux venus tels qu’Exalead, ATomz Site Search, Synomia ou encore Gigablast proposent qui des moteurs de recherche sur Internet, qui des moteurs intégrables aux sites clients.
Instiller un peu de Web 3.0 sémantique dans un projet Web 2.0 est une bonne chose pour d’une part la pérennisation du projet Web 2.0 et d’autre part rendre à présent les bonnes options pour l’évolution future et inéluctable du système.
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INSTILLER LE WEB 3.0 SÉMANTIQUE DANS UN PROJET WEB 2.0
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Les déclencheurs Un parallélisme est à établir avec les déclencheurs des projets Web 2.0 à l’époque du Web 1.0, qui étaient de favoriser l’accès du Web à tous ; de s’affranchir d’une infrastructure lourde pour permettre à d’autres entités d’accéder aux outils via le Web, sans alourdir l’investissement ; enfin d’obtenir de la performance. Nous constatons que l’on a souvent débuté des projets de type Web 2.0 par une « injection » d’AJAX pour améliorer les temps de réponse sur les postes utilisateurs – dès 2003-2004 ; ou pour remplacer efficacement un mode client serveur antérieur.
Les approches possibles Deux approches sont possibles.
Première approche Il s’agit de choisir un périmètre de projet où les utilisateurs sont pilotes et initiateurs des usages Web 3.0. La contrainte est que les utilisateurs doivent être à la fois acteurs et utilisateurs. Il est indispensable qu’ils soient volontaires et parties prenantes du changement technologique. Mais il faut un accompagnement sérieux incluant : • l’information des décideurs ; • la formation des utilisateurs ; • le passage en « force » des usages du Web 3.0. Puis il faut élargir le champ d’application aux autres équipes de projet : on passe ainsi des utilisateurs pilotes aux utilisateurs champions qui entraîneront le plus grand nombre dans leur sillage. Enfin, il convient de cibler un autre périmètre de l’entreprise.
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Seconde approche Dans un projet Web 2.0, cette seconde approche vise à favoriser dans la mesure du possible l’injection d’outils Web 3.0. Mélange des deux On peut mixer les deux approches. Dans ce cas, la cible idéale est l’équipe de projet Web 2.0, pour qui un petit projet Web 3.0 sera entrepris, permettant l’instillation des composantes 3.0. C’est-à-dire que cette équipe de projet, dans le cadre d’un projet Web 2.0, va utili-
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ser et mettre en œuvre des outils de troisième génération. Il faudra bien choisir les technologies candidates à l’injection, en fonction des habitudes, usages et desiderata de l’équipe de projet Web 2.0.
Domaine fonctionnel
Fonctionnalités de type Web 3.0 sémantique ou non
Exemples de technologies candidates
Recherche -- au sens : retrouver : • Des données • Des documents • Des applications • Tout autre objet : lien, libellé, favori, etc.
Recherche avancée : • Sur favoris • Sur image • En mode « Search Inside » de dossier numérisé • En mode géographique 3D ou pseudo-3D • Sur la « proximité sociale » (expérience, expertise, connaissance, etc.) • Sur blogs
Moteurs des grands éditeurs : Google, Microsoft, Yahoo, Exalead, Altavista, etc.
Méta-balise (metatag) sur tout objet
Classification avancée de dossiers ou documents, sur critère de : • Sécurité • Valorisation du document • Contenu technique, scientifique ou culturel Classification de parties de dossiers, voire de documents sur les critères : • Confidentialité • Criticité • Classification sur critère de conformité
Modèle de taxonomie ou d’organisation : Dublin Core ou autre…
Règles métiers
Contenant de règles en format XML
Modélisation des « règles métier » selon : • Réglementation • Règles commerciales • Règles techniques • Règles de routage • Etc.
Virtualité
3D Simulation de la réalité Terminal en mode vision individualisé : • Lunettes • Maques Terminal en autre mode : • Sensoriel • Olfactif • Audio
Maquettage pour : • Optimiser la conception • Réduire le temps des cycles de réalisation © Groupe Eyrolles
Tableau 7 : Les technologies candidates pour un projet Web 3.0
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
Domaine fonctionnel
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Fonctionnalités de type Web 3.0 sémantique ou non
Exemples de technologies candidates
Simulation avancée de systèmes non techniques, non informatiques
Critère comportemental
Modèle de groupe humain pour tester : • Comportements • Réactions • Choix Modèle de système pour tester : • Acceptation par les utilisateurs • Usages nouveaux
Réseau social
Réseau social adapté à l’entreprise : • Expertise • Compatibilité relationnelle • Domaines d’intervention « Alumni » (« réseaux d’anciens de… » – pas forcément au niveau de l’éducation, cela peut être des projets, des avant-ventes, etc.) • « Polynommage » (habitude de travailler en équipe ayant établi des usages efficaces, répétitifs et réutilisables, par exemple en « Task Force »)
Modèle pour tester des groupes en termes de : • Dynamisme • Performances • Productivité non contrainte • Innovation
Les postes du chantier Web 3.0 sémantique C’est plus un chantier « usages » qu’un chantier technologique. Les principaux postes sont définis ci-après.
Poste 1 Il vise à définir les composantes du Web 3.0 sémantique que l’on veut instiller et à mettre l’accent sur une ou deux composantes et les sélectionner.
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Poste 2 Il s’agit de former et d’accompagner les pilotes dans la première approche puis les super-utilisateurs ou « champions » dans la seconde. Poste 3 Il faut préparer le cadre sémantique, au niveau du fonds documentaire de tout type par la définition de structure des métadonnées en
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utilisant soit SKOS ou Dublin Core, soit en définissant une structure de métadonnées personnalisée à l’entreprise. Il vaut mieux favoriser cette seconde possibilité, car elle est plus facilement généralisable en interne. Au niveau des Business Rules, il faut établir la typologie des règles et la topologie des structures de règles. Le cadre sémantique comprend tout d’abord le champ sémantique : définir le contenu, le contenant, la sécurité, la politique de conservation. Il comprend également le champ d’utilisation. C’est le domaine applicable : cas, contrat d’utilisation. Enfin, il comprend la classification. A minima, on définira une taxonomie.
Poste 4 Il vise à accompagner. Ce poste important comprend : • la conduite du changement ; • l’aide à l’appropriation et à l’acceptation des outils nouveaux ; • l’aide à l’appropriation des modes d’usages et de travail. Certains usages sont automatisables sans difficultés quand ils comportent soit des aspects ludiques, soit quand ils sont propices à l’application d’une méthode très pédagogique. Pour d’autres, il faudra parfois « contraindre » après avoir tenté, sans succès, de persuader. Dans ce cas, il conviendra de comprendre au préalable ce qui bloque et éliminer les freins.
Poste 6 Ce poste consiste à capitaliser. Il faut impérativement capitaliser sur : • le savoir acquis ; • les pratiques ;
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Poste 5 Il s’agit de mettre en œuvre les technologies. Le choix préalable des composantes permet d’éviter l’utilisation de technologies les moins stabilisées. Il faut qu’elles soient faciles à mettre en œuvre et de préférence le moins possible boguées. Il faudra alors éviter les technologies en version « bêta ».
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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• les listes de choses à « Faire/Ne pas faire » ; • les formations internes réutilisables, destinées aux autres « populations » qui seront utilisatrices.
Poste 7 Il vise à restituer l’expérience acquise. Cette restitution déterminera les chances de réussite du projet. Le poste comprend les tâches suivantes : • expliquer de façon simple et compréhensible par toute personne ; • convaincre, surtout les décideurs ; • montrer ou plutôt démonter un cas.
Poste 8 Il s’agit d’estimer le ROI. Ce poste est de loin le plus délicat et pourtant le plus indispensable. Le ROI ne pourra être calculé qu’au cas par cas. Le tableau ci-dessous est une aide pour définir les unités de mesure du ROI. Tableau 8 : Définir le ROI du chantier Web 3.0 Postes
Coûts avec Web 3.0
Coûts sans Web 3.0
Économies sur n ans
Bilan ROI sur n ans
Postes d’études Postes de production Postes directement liés au raccourcissement des cycles métier Postes de collaboration
Il faut définir n en fonction du domaine d’application. Il convient également d’ajouter les autres apports du projet Web 3.0 tel que :
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• l’image de marque apportée à l’entreprise ; • l’efficacité accrue des équipes ; • la productivité ; • la réactivité.
228 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
Généraliser un zeste de Web 3.0 aux autres projets Quand un peu de Web 3.0 a été instillé avec succès dans un projet, il devient alors possible de généraliser cette pratique aux autres projets Web 2.0, ou lancer des petits projets de type Web 3.0. L’essentiel reste cependant de choisir les projets cibles. Les chances de succès sont plus importantes quand on privilégie d’une part un usage du Web 3.0. Voici des exemples de pratique : • certaines recherches avancées ; • l’utilisation avancée des métadonnées. Le succès se vérifie d’autre part quand on préfère une application Web 3.0. Cependant, les usages ne peuvent pas se passer d’applications, aussi devra-t-on également bien définir les applications qui permettent la pratique aisée de ces usages. Prenons un exemple de projet avec du Web 3.0. Nous menons un projet pilote dans un environnement associatif dont les résultats seront exposés sur le blog de support de ce chapitre sur le Web 3.0 sémantique : www.weltram.eu/i-web.aspx.
LE WEB DU FUTUR ET LE FUTUR DU WEB Projeter le Web futur
Par ailleurs, nous resterons connectés au Web futur en permanence, « 24 h/24 x 7 j/7 ». Dans un avenir à court terme, le mode déconnecté ne pourra plus être considéré que comme une utilisation en mode dégradé. En effet, on constate dès à présent que le Web a envahi aussi bien notre espace de travail que notre espace privé, pratique ou ludique : • le Web est indispensable au travail ; • une partie des formalités administrative doit passer par le Web ;
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Si nous devions dégager les ruptures les plus importantes du Web futur, nous dirions tout d’abord qu’il n’y aura plus de Dataming, mais du Webmining. En effet, ce Web futur concentrant la totalité des DIC (données, informations et connaissance) de l’univers sera la base privilégiée pour extraire les données significatives aidant à la compréhension du comportement des systèmes.
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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• nos relevés de consommation sont au format Web. Nous constatons aussi qu’il s’est intégré à nos outils et objets communs : • voiture ; • téléphone portable ; • GPS. Enfin, nous allons entrer dans l’ère de la « webbionique ». Le Web bionique, c’est-à-dire un Web où des modèles de comportement « bio-like » seront mis en œuvre, arrive à grands pas, comme nous l’expliquons ci-après.
Au-delà du Web 3.0 : « webbionique » et homme bionique Dans l’univers Web, l’homme est devenu à la fois un émetteur et un récepteur de DIC. Nous appellerons désormais DIC la donnée/information/connaissance élémentaire véhiculée par le Web, c’est-à-dire le codiel du Web. Il est receveur humain quand il est derrière son écran, que ce soit celui d’un GPS ou d’un ordinateur portable. Il est émetteur humain quand il podcaste, blogue ou contribue à un wiki.
L’interface homme/Web (IHW), Il s’agit de l’humain receveur du Web : en parallèle avec l’interface homme/machine, nous pouvons définir ce qu’est l’interface homme/Web ou le « Web User Interface » (WUI). Ces WUI ont des fonctions : • ludiques ; • professionnelles ; • parfois thérapeutiques ;
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• et aussi utilitaires pour permettre à l’homme d’aller au-delà de ses limites. On en a déjà un aperçu grâce aux jeux comme les simulateurs de mondes reconstitués ou virtuels (par exemple Wii Fitness). Le WUI n’est pas qu’une simple interface graphique, car il peut donner lieu à une double interaction. Ainsi, des terminaux permet-
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tent à l’homme d’utiliser à la fois sa vision naturelle et un écran Web, en affichage par transparence sur un pare-brise. Un pilote pourra alors, par exemple, comparer ce qu’il voit réellement à ce que le Web lui affiche et interpréter ou mieux appréhender la situation. C’est exactement le même processus qui se déroule quand on utilise aujourd’hui Live Search en mode photo aérienne « bird’s eyes » et en affichant la carte en superposition à la photo. Par ailleurs, une ergonomie liée à l’adaptation du terminal au corps humain permet de porter directement le terminal sur lui, par exemple : • des lunettes terminaux Web ; • des lentilles monitrices connectées au Web. Il faudra alors superposer la vision Web à la vision réelle. Les applications sont légions, à commencer par aider pour retrouver son chemin : le GPS personnel.
L’humain, capteur du Web (HCW) Cette étape sera inéluctable et verra des capteurs Web venir s’implanter ou voyager provisoirement sur ou à l’intérieur de l’homme pour l’aider (à mieux voir, mieux marcher, etc.), pour le soigner (micro-caméra interne ou intervention chirurgicale « webcommandée »), enfin pour le surveiller dans tous les sens du terme : au sens positif (en vue de son bien-être) et négatif (pour le contrôler).
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La dernière frontière du Web La « webbionique » aidera l’homme à aller au-delà de ses limites naturelles en lui offrant un champ de perception dépassant ses capacités naturelles et en interfaçant l’ultra-virtuel « World Wide Web » à l’univers intérieur de l’homme. Le tableau ci-après montre les trois étapes de cette évolution qui a d’ores et déjà commencé avec les applications telles que la biométrie appliquée à la sécurité, les bio-consoles pour les jeux (exemple la Wii Fit), etc.
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
231
Tableau 9 : Tableau récapitulatif de la bionicité du Web Étapes
Caractéristiques
Utilisation
Étape 1 : IHW
Vision (lunettes lentille) Webcommande : – Vocale – Sensorielle – Visuelle : guidée par l’œil
Ludique Utilitaire Professionnel
Étape 2 : HCW
– Capteurs externes – Capteurs internes
Thérapeutique Contrôle Prévention
Étape 3 : transmettre les sensations humaines
Tracer un état global de l’individu
Idem
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Les limites extrêmes du Web sont celles de tous les systèmes d'information, c'est-à-dire le domaine des interactions avec les facteurs humains. En virtualisant au maximum l’Internet, l'homme est à même de confronter le « vaste monde de la toile » (« World Wide Web ») à son univers intérieur : là se situe la frontière ultime du Web ! Certes, les « webbiotechnologies » permettront d'interfacer les organes sensoriels humains avec la toile, mais y aura-t-il un « au-delà du miroir » où l'homme pourrait transmettre une partie de son intelligence au Web ?
Figure 60 : Vers le Web bionique
232 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
Les domaines bénéficiaires du Web du futur Le Web du futur bénéficiera aux domaines qui suivent.
Domaine économique Les retombées du Web du futur (simulation, etc.) bénéficieront plus particulièrement à deux domaines. L’« éconogie1 » Ce néologisme est formé des mots « économie » et « énergie ». Nous l’illustrons par la formule : « Économie + ; Énergie - ! » En effet, l’usage du Web permet de diminuer les déplacements physiques des personnes grâce au travail collaboratif, mais aussi de réduire les envois de dossiers et documents matériels. Ce sont là des pratiques, qui, clairement, contribuent à baisser l’empreinte de CO2 des acteurs, tout en favorisant une efficacité accrue et un potentiel de performances économiques largement augmentées. L’« écolomie2 » Ce néologisme est formé des mots « écologie » et « économie ». Par ailleurs, l’usage du Web est synonyme de réduction du besoin en papier, ainsi que de nouvelles économies sur la consommation de matière et matériaux grâce aux perspectives de simulation et de maquettage préalable. Ainsi, une approche écologique de l’amélioration de l’économie apparaît avec la généralisation des usages du Web. L’« ecology/econogy » ou « écolnergie » décline ces deux axes de l’« économie durable » dans les perspectives du Web du futur.
1. De même, nous proposons le néologisme anglais « Econogy » (Economy + Energy saving). 2. Nous osons proposer le néologisme anglais suivant : « Ecolomy » (Ecology + Economy).
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Domaine technologique D’une façon générale, d’une part, le Web a toujours été favorisé par les activités de recherche – les contributions historiques du CERN à la naissance de l’Internet en sont la preuve – d’autre part, l’habitude acquise par les chercheurs de s’appuyer sur les technologies du Web a fait de ce dernier un outil indispensable aux activités de haute technologie. Les segments suivants bénéficieront des retombées des avantages des technologies Web.
Entreprendre avec le Web 3.0 ou Web sémantique
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Les biotechnologies Dans ce domaine, la « bionicité » progressive du Web contribuera à la recherche, dans la mesure où les modèles de comportement bionaturel seront progressivement élaborés et utilisés dans le Web. Les nanotechnologies La recherche en nanotechnologies, ayant un impact direct sur les qualités de la matière, gagnera avec le Web futur en possibilité de simulation.
Domaine social La « traduction » des usages participatifs et d’échanges entre individus, sera la e-démocratie, dont les caractéristiques principales se déclineront ainsi. Tout d’abord, signalons l’achèvement de la numérisation complète de l’univers administratif, aujourd’hui en cours de réalisation. Cette marche vers la Web administration a déjà commencé depuis plusieurs années. Elle se poursuivra en adaptant les nouveaux et futurs usages du Web à l’ensemble des rouages de l’État.
Les grandes puissances du Web du futur
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Nous le disions dans le paragraphe intitulé « Le Web 3.0, miroir du monde », le Web deviendra l’outil de gouvernance privilégié ! Autrement dit, qui maîtrisera le Web 3.0 tiendra entre ses mains sinon le gouvernement du monde, du moins la gouvernance du monde. Or, à la fin de la décennie 1990 et au début des années 2000 (période 1995-2005), alors que les États retiraient leur participation, voire leur contrôle, à juste titre d’ailleurs, des grandes sociétés de communication et de télécommunications, de nouveaux acteurs apparaissaient sur le marché : les « Internet Providers » ou FAI. La France est un exemple emblématique de ce retrait. Ces fournisseurs apparaissaient comme de simples opérateurs tout à fait secondaires et non comme des diffuseurs d’informations ou d’émissions de radiotélévision. Les gouvernants des principales grandes puissances de la planète n’ont pas jugé utile de créer les équivalents de la BBC, de la VOA (Voice of America) ou encore de Radio France et France Télévisions. D’ailleurs les temps des mono-
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poles d’État, y compris sur les opérateurs de télécommunications, étaient bien révolus. Depuis ses débuts, l’évolution majeure non perçue par les gouvernements et les États est la transformation de ces acteurs en « Internet Service Providers ». Ces services se sont étendus à la fourniture de : • divertissements et jeux, WebTV ; • services et produits culturels : encyclopédies, musique, films ; • outils de travail pour les individus et les entreprises et aujourd’hui, outils de gestion. Offrant, tels les César antiques, des jeux et du pain gratuitement à la plèbe – les internautes de nos temps –, ces entreprises devenues des géants économiques vivent de « freemium » : vente de publicité aux entreprises en assurant une audience énorme attirée par la gratuité des services. Or ces entreprises n’ont pas du tout la même structure que les géants du passé qui n’avaient que leurs chiffres d’affaires, leurs bénéfices et leurs centaines de milliers d’employés à montrer. Ces entreprises du Net disposent de groupes sociaux de plusieurs centaines de millions d’adhérents… ; de parcs de serveurs informatiques se comptant en millions d’unités, plus qu’aucun État dans le monde n’est en mesure de posséder. Les places vacantes laissées par les grands États de la planète sont progressivement occupées par ces entreprises, futures grandes puissance de demain : les dossiers médicaux seront conservés par leurs soins et demain, grâce aux technologies d’« Identity Management », ils remplaceront les services nationaux. Les États auront du mal à suivre !
Finalement, pour le nom du futur Web, compte tenu de son universalité, de son ubiquité, et de l’absence de son versionnement, nous préférons lui donner le nom d’« i-Web ». Ceci signifie « i » comme intelligent ou « i » comme « idiot ». Tout dépend de l’usage que l’homme en fera ! C’est pourquoi les pages de support de cette partie sont appelées : www.weltram.eu/iweb.aspx.
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L’i-Web
POSTFACE
Les évolutions de l’ergonomie des interfaces disponibles pour la construction de solutions web sont extrêmement rapides, visibles et mises en œuvre dans des délais très courts. Une autre face des évolutions du web est plus discrète, plus lente et plus ingrate mais elle est tout aussi indispensable ; elle consiste à disposer de références communes entre des systèmes indépendants pour permettre l’interopérabilité des données dans le Web ou les intranets. Une partie importante des services à valeur ajoutée à venir reposeront sur la capacité de pouvoir mobiliser de manière efficace des données dispersées et hétérogènes fournis par des acteurs spécialisés : • vision unifiée des données sur le développement durable gérées par des administrations, centres de recherche et ONG ; • fusion des données individuelles provenant de différentes administrations pour la police ;
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• portails touristiques puisant dans les ressources du territoire, des centrales de réservation, des éditeurs culturels, des bloggeurs et utilisant des serveurs de cartes et de représentation 3D pour représenter le territoire ; • portail de ressources pédagogiques permettant d’accéder aux ressources du Centre National de Documentation Pédagogique, aux ressources de bibliothèques spécialisées mais aussi à celles des enseignants ; • gestion d’un dossier patient unifiée composée de prescriptions, analyses, images radio, compte rendus d’actes provenant de différents hôpitaux, du généraliste et des spécialistes ;
236 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
• unification des bases de données juridiques européennes par les grands groupes d’édition ; etc. Ces services exigent souvent un accès multilingue aux données : dossiers de Police au sein de l’Europe, dossier patient, portail touristique… La mobilisation de données dispersées pour construire de nouveaux services est une source de gains de productivité très importante pour les entreprises et les administrations mais aussi un facteur de mutation pour des professions dont la valeur ajoutée est principalement tournée autour de la manipulation de l’information (agence de tourisme, professions juridiques, enquêteurs, etc.). Les nouveaux services offerts sont tout à la fois : • porteurs de dangers qui commencent à mobiliser les citoyens ; rapprochement des données personnelles, croisement des fichiers de police et de renseignement ; • facteurs de sécurité quand un urgentiste pourra accéder à un dossier médical complet avant de décider d’une intervention sur un citoyen anglais ayant eu un accident de la circulation en Sicile ; •
sources d’émerveillement quand on peut voyager en 3 D dans une ville inconnue en disposant de toutes les informations et conseils pour préparer un voyage.
Les évolutions les plus visibles et ludiques du Web ne doivent pas occulter les investissements techniques, les efforts de standardisation, la mise à disposition des référentiels, les accords contractuels entre acteurs qui permettront des échanges fluides de données qualifiées entre des serveurs gérés par des organisations privées, administrations, ONG, etc.
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Ces nouvelles évolutions du Web sont en cours aujourd’hui, elles émergeront progressivement au fur et à mesure d’un travail délicat et long de constitution de référentiels multilingues pour organiser les données, de mise en correspondance des différents référentiels utilisés dans l’administration, la médecine, la police, le droit, le tourisme, etc. de choix d’identifiants communs pour les données pivot comme les localisations géographiques, les organisations, les événements, les produits, etc.
Postface
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Innovation dans l’ergonomie des interfaces, travail collaboratif dans l’élaboration des contenus, organisation efficace des informations dans les différents métiers, interopérabilité de référentiels multilingues et des informations dans les différentes métiers, délégation aux machines de travaux de filtrage, rapprochement, suggestions d’information sont les chantiers ouverts des Web 2.0, 3.0, X.0 qui mobilisent les entreprises, les administrations et les acteurs spécialisés et dont nous commençons seulement à entrevoir les fruits, les dangers potentiels et les impacts sur de nombreux métiers.
SIGLES
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Les mises en italique sont destinées aux termes étrangers, pour l’essentiel en anglais.
AJAX
Asynchronous JavaScript and XML
BI
Business Intelligence
BP
Business Process
Codiel
Code Informationnel Élémentaire
DHTML
Dynamic HTML
DIC
Donnée Information Connaissance
FAI
Fournisseur d’accès Internet
GUI
Graphic User Interface, ou IHM en Français (voir ce sigle)
HCW
Humain, Capteur du Web
HTML
Hyper Text Mark-up Language, langage hyper-texte à balises conçu pour décrire les pages Web
HTTP
Hyper Text Transfer Protocol, protocole de communication utilisé entre client et serveur
HTTPS
Hyper Text Transfer Protocol Secured, variante sécurisée de HTTP
IA
Intelligence artificielle
IHM
Interface Homme Machine
IHW
Interface Homme Web
IP
Internet Protocol, ou IPV4
IPV6
Internet Protocol Version 6, protocole successeur d’IP
ISP
Internet Service Provider, ou FAI en Français (voir ce sigle)
JSON
JavaScript Object Notation, format de données génériques qui utilise la notation des objets Javascript
LAN
Local Area Network, Réseau Local
RDF
Resource Description Framework, cadre de description de la structure des métadonnées d’une ressource
REST
REpresentational State Transfer, protocole alternatif à SOAP, évitant l’utilisation de RPC, en voie d’obsolescence
RIA
Rich Internet Application, application Web utilisant les possibilités du poste client pour gagner en performance et en temps de réponse
RPC
Remote Procedure Call, protocole d’appel d’application à distance
RSS
Really Simple Syndication, protocole technique de syndication
SaaS
Software as a Service, ou plutôt « Software as an Internet Service » offre l’accès à des applications vues comme des services de l’Internet
SIG
Système d’Information Géographique
SKOS
Simple Knowledge Organization System, standard de structure de métadonnées pour l’organisation de la connaissance
SGBDR
Système de Gestion de Base de Données Relationnelle
SGML
Standard Generalized Markup Language, langage ancêtre de HTML
SOA
Service-Oriented Architecture, Architecture Orientée Service
SOAP
Simple Object Access Protocole, protocole issu de RPC et utilisé par les Web services
TCP/IP
Transmission Control Protocol/Internet Protocole, protocole de communication du Web
THD
Très haut débit
WAN
Wide Area Network, ou réseau distant
WiFi
Wireless Fidelity, liaison sans fil
WUI
Web User Interface
www
World Wide Web, le « vaste monde de la toile »
W3C
World Wide Web Consortium
XHTML
eXtensible Hyper Text Mark-up Language, extension de HTML fondé sur une syntaxe définie par XML
XML
eXtensible Mark-Up Language, Langage de balise configurable de façon extensive
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240 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
GLOSSAIRE
Les définitions qui suivent prennent le parti d’être avant tout orientées vers les usages et non versla technique.
AJAX : Asynchronous JavaScript and XML Cette méthode de développement d'applications Web déplace une partie du site au sein du navigateur (programmée en JavaScript). L’écran n’est plus le lieu d’une succession de pages, mais se compose de plusieurs briques indépendantes qui peuvent échanger des informations (codées en XML) avec le serveur et qui réagissent (de façon asynchrone) à des événements suscités par l’utilisateur ou le serveur. API : Application Programming Interface L’interface de programmation permet à deux sites Web d'échanger des données par programme de façon synchrone (SOAP) ou asynchrone (REST). Elle est destinée à la description des objets et des fonctions exposés par un site pour permettre qu'un autre site Web puisse les utiliser. Atom
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C’est un format XML destiné à la syndication de contenus périodiques provenant de blogs ou de sites d’actualités (news). Balado (en anglais « podcast ») Il s’agit tout simplement d’un flux (RSS ou Atom) auquel est associé un contenu audiovisuel. En plaçant le flux dans un agrégateur, on a le choix entre écouter ou voir et télécharger.
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Buzz Il s’agit du bouche-à-oreille, ou de la rumeur, sur Internet. Crowdsourcing Il s’agit d’un principe mis en œuvre dans certains sites qui attendent de leurs utilisateurs qu’ils créent les contenus, répondent aux questions des autres visiteurs et même parfois participent à la conception en continue du site. C’est un « approvisionnement par la foule ». Flash Cette technologie permet de programmer une animation sur une page Web. Folksonomie C’est un système de classification de toutes sortes de contenus généré automatiquement à partir des tags placés par les utilisateurs. Génération Y Ce terme désigne la génération des jeunes (Y est l’initiale de youth, qui signifie jeunesse en anglais) nés avec ou après le Web. Greffon (en anglais « plugin ») Il s’agit d’un module d’extension. Mashup Ce terme, traduit en français par application composite, désigne des applications construites en combinant des sources (flux de données) et des ressources (services exposant leur API) en ligne. La présentation est intégrée et synthétique au sein d’une interface publiée.
La notion de namespace (« espace de nom » en français) est délicate à appréhender, mais il est indispensable de la comprendre pour qui fait des projets Web. Un espace de nom permet de supprimer toute équivoque entre des termes homonymes. Dans un même espace de nommage, il n'y a pas d'homonymes. Par exemple, si nous parlons de « page », nous serons sûrs de parler de la même chose si l’on précise « livre » ou « chevalerie ».
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Namespace
Glossaire
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Ontologie Les relations sémantiques entre les concepts et les entités d’un domaine donné peuvent être décrites à l’aide de diverses logiques basées sur des langages et du vocabulaire. Ces expressions sont appelées ontologies. OPML L’Outline Processor Markup Language est un format XML. Il sert essentiellement à référencer des listes de flux RSS principalement utilisées dans l’import ou l’export de ces flux entre différents agrégateurs de flux de syndication. Podcast Ce terme vient de la contraction des deux mots : iPod Broadcast. Voir Balado. Rétrolien (en anglais « trackback ») Système de lien permettant de relier entre eux des billets de blog traitant du même sujet. RSS Format RSS : qu’il s’agisse de l’acronyme pour « RDF (Resource Description Framework) Site Summary », « Real Simple Syndication » ou « Rich Site Summary », le RSS est un format basé sur XML destiné à permettre la description du contenu d'un site. Flux RSS : ce fichier structuré XML est mis à jour en temps réel dès qu’une information doit être rendue accessible aux lecteurs du site. Les données qui y sont mémorisées répondent au niveau du standard adopté. Ces flux RSS peuvent alors être inclus et affichés dans un agrégateur de flux ou dans une page Web. Silverlight
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Cette technologie est concurrente de Flash. Taux de conversion C’est la fraction des personnes qui vont au bout d’un processus et en concrétisent l’atteinte par exemple par un achat, une contribution, etc.
COPYRIGHTS
Marques d’Adobe Flash Marques d’Apple iPod Marques de Google Gmail Google Agenda Google Aps Google Docs Google Earth Google Suggest Google Talk iGoogle Lively YouTube Marques de Microsoft .Net Live MSN Messenger Silverlight Visual Studio WebPart Marques de Yahoo! Yahoo! Messenger Yahoo! MyWeb
Autres marques Active Worlds Alcatel Lucent Alexa Amazon ATomz Site Search Babygo BBC Blogmarks CERN CompletePlanet Comscore Copernic Cyworld Del.icio.us Digg Dmoz Exalead Expression Suite Facebook Flickr France Télévisions Furl Géoportail Gigablast Harris Interactive IBM IGN
Intute Jots Le Monde Linkroll Mamma Mediawiki Meetic MIT Netscape Netvibes Orange OTUC Radio France Reddit Second Life Shadows SocialMeter Spurl Synomia Technorati VOA (Voice of America) Wikia Wikipedia Wordpress Yoolink Xfruits Xiti
BIBLIOGRAPHIE
© Groupe Eyrolles
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246 DÉPLOYER UN PROJET WEB 2.0
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Web 3.0/Web sémantique
INDEX
Numerics 3D 209, 218, 230
A actions 189, 203, 206, 213 agrégateur 93 agrégation 40 AJAX 62 ASP 53 Atom 61
B bionique 208, 235 blog 12, 17, 21, 32, 40, 49, 61, 65, 73, 119 blogosphère 41
C
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capteur 236 connaissance 91, 190, 191, 192, 194, 195, 196, 198, 199, 200, 205, 208, 211, 212, 213, 214, 215, 220, 221, 227, 230, 235, 246 crowdsourcing 49, 56
D DasS 53 Digg 46 dynamique 82, 206, 214, 219
E émetteurs 202, 208 ergonomie 29, 41, 96, 99, 102, 104, 109, 138, 148, 160, 222, 224, 236
F Facebook 51 Flash 88 Flickr 63 folksonomie 160, 162, 163, 164, 166
G gap analysis 62 Google App Engine 53
H HTML 82, 188, 189, 192, 196, 201, 207, 245 humain 192, 197, 200, 212, 227, 231, 235, 236
I infrastructure 167 intelligence 211, 212, 213, 214, 227, 245 intelligence collective 57 intelligence des foules 57 interaction 83, 84, 214, 235
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J jeux 215, 235, 236, 240
K knowledge management 57
sémiotique 190, 196, 197, 208 sens 189, 196, 197, 217, 230, 236 SGML 82 signet 160 Silverlight 88 simulateurs 235 SPARQL 60, 61
L longue traîne 45, 71 ludique 237
M mashup 43, 125 métadonnées 204, 207, 208, 227, 231, 232, 234, 246 moteurs de recherche 10
T tag 161 tag cloud 162 thésaurus 163
U univers 191, 194, 212, 217, 218, 219, 222, 223, 226, 234, 235, 236, 237, 239
O
V
OpenID 52, 55, 60 virtuel 199, 236
P
R RDF 61 réalité 199, 214, 215, 227, 230 récepteur 199, 235 référencement 46 réseau social 51 RSS 61
S SaaS 53 savoir 92, 93, 94, 200, 214, 215, 232 Second Life 35, 218, 227
W W3C 60 web profond 7, 10, 11 web sémantique 7 web social 7, 14 webmail 148 widget 51 wiki 38, 113, 114 Wordpress 50
X XML 82, 84, 86, 192, 196, 197, 201, 204, 205, 206, 207, 211, 212, 230, 246 XMLHttpRequest 99
Y Yahoo! 8
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PasS 53 planète 40 portail 41 pragmatique 190, 196, 197, 208 Python 53