BIBLIOTHECA EPHEMERIDUM THEOLOGICARUM LOVANIENSIUM CLXXVI
THE CATHOLIC EPISTLES AND THE TRADITION
EDITED BY
J. SCHLOS...
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BIBLIOTHECA EPHEMERIDUM THEOLOGICARUM LOVANIENSIUM CLXXVI
THE CATHOLIC EPISTLES AND THE TRADITION
EDITED BY
J. SCHLOSSER
LEUVEN UNIVERSITY PRESS
UITGEVERIJ PEETERS LEUVEN
2004
T H E C A T H O L I C EPISTLES A N D T H E TRADITION
BIBLIOTHECA E P H E M E R I D U M T H E O L O G I C A R U M LOVANIENSIUM
EDITED B Y THE BOARD OF EPHEMERIDES THEOLOGICAE LOVANIENSES
J.-M. Auwers, E. Brito, L. De Fleurquin, J. Famerée, É. Gaziaux, J. Haers, A. Haquin, L. Kenis, M. Lamberigts, G. Van Belle, J. Verheyden
E X E C U T I V E EDITORS
J.-M. Auwers, E. Brito, A. Haquin, L. Kenis, G. Van Belle, J. Verheyden
EDITORIAL STAFF
R. Corstjens - P. Van Overbeke
UNIVERSITÉ CATHOLIQUE DE LOUVAIN
KATHOLIEKE UNIVERSITEIT LEUVEN
LOUVAIN-LA-NEUVE
LEUVEN
BIBLIOTHECA EPHEMERIDUM THEOLOGICARUM LOVANIENSIUM CLXXVI
THE CATHOLIC EPISTLES AND THE TRADITION
EDITED B Y
J. SCHLOSSER
UITGEVERIJ PEETERS
LEUVEN
LEUVEN
UNIVERSITY PRESS
2004
ISBN 90 5867 410 X (Leuven University Press) D/2004/1869/60 ISBN 90-429-1477-7 (Peeters Leuven) ISBN 2-87723-798-2 (Peeters France) D/2004/0602/81
Library of Congress Cataloging-in-Publication Data The Catholic Epistles and the tradition / edited by J. Schlosser. p. cm. - (Bibliotheca Ephemeridum theologicarum Lovaniensium; 176) Includes bibliographical references. ISBN 90-429-1477-7 (Peeters Leuven: alk. paper) - ISBN 2-87723-798-2 (Peeters France: alk. paper) 1. Bible. N.T. Catholic Epistles-Criticism, interpretation, etc.-Congresses. I. Schlosser, Jacques. II. Series. BS2777.C38 2004 227' .906~dc22
2004040138
All rights reserved. Except in those cases expressly determined by law, no part of this publication may be multiplied, saved in an automated data file or made public in any way whatsoever without the express prior written consent of the publishers.
Leuven University Press / Presses Universitaires de Louvain Universitaire Pers Leuven Blijde-Inkomststraat 5, B-3000 Leuven (Belgium) © 2004 - Peeters, Bondgenotenlaan 153, B-3000 Leuven (Belgium)
PREFACE
e
Du 23 au 25 juillet 2003 s'est tenu à Leuven le 5 2 Colloquium Biblicum Lovaniense, dont le thème était: The Catholic Epistles and the Tradition. Dans leur histoire déjà longue les Journées Bibliques de Louvain avaient certes abordé parfois, lorsque le thème était englobant, les ou plutôt des épîtres catholiques. Ce fut le cas en 1986 quand figurait au programme la réception du Nouveau Testament dans le christianisme primitif, ou lors de la rencontre commune des vétérotestamentaires et des néotestamentaires, en 2 0 0 1 , quand il s'agissait des canons bibliques. Mais le groupe des épîtres catholiques comme tel n'avait jamais été inscrit au programme. Les deux facultés de théologie de Leuven et de Louvain la Neuve, qui ont en charge le Colloquium, ont bien fait de porter leur choix sur ce corpus, un objet qui pouvait a priori paraître plutôt mineur et marginal dans le Nouveau Testament. Au moment de la mise au point du programme, on s'est demandé s'il fallait retenir le septénaire "catholique" dans son intégralité, y compris donc les épîtres johanniques. Il paraît a priori difficile, en effet, de lire les épîtres johanniques autrement q u ' e n lien avec l'évangile de Jean. Par ailleurs, parmi les écrits qui restent, seules l'épître de Jude et la Deuxième de Pierre ont des affinités réelles et directement perceptibles. Tout en privilégiant l'épître de Jacques et la Première de Pierre, qui ont, de fait, un poids particulier dans le groupe, nous avons pourtant décidé de prendre en compte l'ensemble du corpus. La diversité est certes irréductible et impose de s'occuper d'abord des écrits pris dans leur singularité, mais une nouvelle manière de voir est en train de se développer, qui considère ces petites lettres dans le groupe qu'elles constituent de facto. Comme d'habitude, durant le colloque le rythme du travail était fort soutenu, et comme toujours, les participants ont apprécié beaucoup la convivialité exceptionnelle qui caractérise les Journées Bibliques de Louvain. Le meilleur signe en est que les néophytes et les participants qui se voulaient occasionnels au départ entrent rapidement dans le groupe des fidèles. De toute évidence, l'accueil par la Katholieke Universiteit Leuven qui mit à disposition ses locaux pour les conférences et les séminaires, et par le Paus Adriaan VI-college qui veilla sur le bien être des participants en fournissant gîte et couvert, cet accueil a contribué grandement, une fois de plus, au déroulement harmonieux et
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PREFACE
détendu du colloque. Que les autorités et les personnels de ces institutions veuillent bien trouver ici, encore une fois, l'expression de la gratitude de tous. Dans le présent volume sont recueillis, à quelques exceptions près, les textes revus, et parfois considérablement augmentés, des contributions présentées durant le Colloquium. Il a paru judicieux de les regrouper par secteurs (le corpus en tant que tel, l'épître de Jacques, la Première de Pierre, l'épître de Jude et la Deuxième de Pierre, enfin la Première de Jean) en renonçant à distinguer formellement les conférences principales {main papers) et les contributions présentées de façon plus libre (offered papers). En tant que président de la 5 2 édition du colloque, j ' a i eu la charge et le privilège de lire et de relire tous ces textes. Selon moi ils sont d'un haut niveau scientifique, de sorte que, je le pense, le FWO-V1 et le FNRS (Bruxelles) n'auront pas à regretter leur soutien. Qu'ils soient en tout cas vivement remerciés de nous l'avoir accordé. e
Jacques SCHLOSSER
TABLE OF CONTENTS
PREFACE
vn
INTRODUCTION
xm
T H E CATHOLIC EPISTLES IN G E N E R A L Jacques SCHLOSSER (Strasbourg) Le corpus des Epitres catholiques Robert W. W A L L (Seattle, W A ) A Unifying Theology of the Catholic Epistles. A Canonical Approach
3
43
JAMES Richard J. BAUCKHAM (St Andrews) The Wisdom of James and the Wisdom of Jesus
75
John S. KLOPPENBORG (Toronto) The Reception of the Jesus Traditions in James
93
Wiard POPKES (Hamburg) Traditionen und Traditionsbrüche im Jakobusbrief
143
Matthias KONRADT (Bern) Der Jakobusbrief im frühchristlichen Kontext. Überlegungen zum traditionsgeschichtlichen Verhältnis des Jakobusbriefes zur Jesusüberlieferung, zur paulinischen Tradition und zum 1. Petrus brief
171
Benedict T. VIVIANO (Fribourg) La Loi parfaite de liberté. Jacques 1,25 et la Loi
213
Pierre KEITH (Fribourg) La citation de Lv 19,18b en Je 2,1 -13
227
Pierre-Antoine BERNHEIM (London) La mort de Jacques, l'Épître de Jacques et la dénonciation des riches
249
TABLE OF CONTENTS
X
Corrado MARUCCI (Roma) Sprachliche Merkmale des Jakobusbriefes
263
Jonathan P. YATES (Leuven) The Reception of the Epistle of James in the Latin West. Did Athanasius Play a Role?
273
1 PETER Reinhard FELDMEIER (Göttingen) Seelenheil. Überlegungen zur Soteriologie und Anthropologie des 1. Petrusbriefes
291
François VOUGA (Bethel-Bielefeld) La christologie de la Première de Pierre
307
Enrico NORELLI (Genève) Au sujet de la première réception de 1 Pierre. Trois exemples .
327
Stephen Ayodeji FAGBEMI (Canterbury) The Identity of the "Elect" in 1 Peter. Its "Present" Significance and Implications for Believers
367
Fika J. VAN RENSBURG (Potchefstroom) The Old Testament in the Salvific Metaphors in 1 Peter . . . . Dominic RUDMAN (Eastleigh) 1 Peter 3-4 and the Baptism of Chaos
381 397
2 PETER A N D J U D E Peter H . DAVIDS (Stafford, TX) The Use of Second Temple Traditions in 1 and 2 Peter and Jude
409
Rudolf HOPPE (Bonn) Parusieglaube zwischen dem ersten Thessalonicherbrief und dem zweiten Petrusbrief - ein unerledigtes Problem
433
Lauri THURÉN (Joensuu) The Relationship between 2 Peter and Jude - A Classical Problem Resolved?
451
Veronica KOPERSKI (Miami Shores, FL) Knowledge of Our Lord Jesus Christ. Echoes of Paul in 2 Peter .
461
Michel TRIMAILLE (Paris) Le " D e S e r a . . . " de Plutarque et la patience de Dieu en 2 P 3 . .
473
TABLE OF CONTENTS
XI
1 JOHN Michèle MORGEN (Strasbourg) La mort expiatoire de Jésus d'après 1 Jean
485
Hansjörg SCHMID (Stuttgart) Tradition als Strategie. Zur Pragmatik des Traditionsarguments im 1. Johannesbrief 503 Stephan WITETSCHEK (München) Pappkameraden? Die Auseinandersetzung mit den "Gegnern" im 1. Johannesbrief und die Darstellung des Judas im Johannesevangelium 519 ABBREVIATIONS
531
INDEX OF MODERN AUTHORS
537
INDEX OF ANCIENT SOURCES
543
INTRODUCTION
e
La décision de prendre pour sujet du 5 2 Colloquium Biblicum Lovaniense l'ensemble des lettres qui constituent le corpus des épîtres catholiques, et le souci de percevoir les éventuelles affinités entre des textes marqués par une évidente diversité, entraînaient la nécessité d'une option. Nous avons choisi de laisser quelque peu dans l'ombre les particularités rhétoriques et les aspects sociaux, abondamment traités dans la recherche de ces dernières décennies au moins pour telle ou telle lettre, et de privilégier le phénomène de la tradition. Il importait toutefois de laisser à ce terme toute sa richesse. En effet il recouvre à la fois un objet, un processus et l'action d'un sujet. On s'est intéressé en priorité aux éléments particuliers dont l'auteur de telle épître est l'héritier, aux grands courants traditionnels qui le portent (hellénistiques, juifs, chrétiens), à son enracinement dans tel ou tel milieu, mais aussi au travail qu'il opère en s'appropriant les éléments, en valorisant leurs sources et les agents de la transmission. Dans cette Introduction, seront présentées d'abord les deux contributions qui portent sur l'ensemble du corpus, ensuite celles qui touchent les diverses lettres: Je, 1 P, 2 P et Jude, 1 Jn. Pour éviter d'être trop long on se contentera, pour ce qui concerne les "offered papers", de donner à chaque fois le titre de la contribution. Pour son adresse présidentielle Jacques Schlosser s'est fixé comme objectif d'introduire aux travaux du colloque en choisissant une perspective délibérément large, qui prenne d'emblée en compte le groupe des écrits désignés comme épîtres "catholiques" ou, comme d'aucuns préfèrent dire dans le monde anglo-saxon, "générales". Il a tenté de le faire en prêtant attention au groupe des lettres de deux points de vue. Dans le premier regard, de quelque manière extérieur, il a considéré le corpus dans son devenir, non pas sous l'aspect canonique mais dans sa genèse littéraire. Après avoir présenté quelques essais récents, novateurs, ambitieux et parfois téméraires, en particulier ceux de D. Trobisch et de C.B. Amphoux , selon lesquels le groupement des lettres a commencé très tôt, 1
2
1. Die Endredaktion des Neuen Testaments. Eine Untersuchung zur Entstehung der christlichen Bibel ( N T O A , 31), Fribourg/S, Universitätsverlag; Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1996. 2. Hypothèses sur Vorigine des Épîtres Catholiques, in C.B. AMPHOUX - J.P. BouHAUT (eds.), La lecture liturgique des Epîtres Catholiques dans lEglise ancienne (Histoire du texte biblique, 1), Lausanne, Zèbre, 1996, pp. 308-332.
XIV
INTRODUCTION
il s'est tourné vers des voies plus sûres et plus habituelles en s'appuyant sur la tradition manuscrite et sur les témoignages littéraires disponibles entre la fin du II et la fin du I V siècle. Les données attestent, en même temps que de nombreuses variations dans les réalisations concrètes, une tendance forte, et perceptible bien avant le tournant du I V au V siècle, au regroupement des sept lettres catholiques. Dans un second temps de son enquête, centré directement sur les lettres elles-mêmes, J. Schlosser a relevé d'abord des traits - divers et épars - communs à une partie, parfois mais rarement à l'ensemble, des lettres catholiques et qui leur donnent une allure repérable. Mais, en valorisant l'accent mis sur les origines, la mise en relief des agents de la tradition et une assez forte objectivation de cette dernière à travers la présentation de la foi et de la vérité, il s'attacha surtout à montrer que le septénaire catholique a des caractéristiques qui lui assurent une certaine identité dans le contenu lui-même. On ne peut certes pas considérer cet ensemble comme un corpus aussi consistant que celui de Paul, tant s'en faut, mais il n'est pas non plus réductible à un amalgame hybride et simple fruit du hasard. e
e
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Robert Wall (Seattle) avait l'intention de présenter au colloque une communication brève. Le résumé figurait dans le dossier des participants sous le titre: A Unifying Theology ofthe Catholic Epistles: a Canonical Approach. Empêché au dernier moment, pour des raisons personnelles, notre collègue n ' a pas pu présenter son exposé. À la demande du président, il a par la suite élaboré son texte - particulièrement digne d'intérêt parce qu'il est le fruit d'une démarche neuve et originale - pour publication dans les présents actes. Connu surtout pour ses travaux sur l'épître de Jacques et sur le canon du Nouveau Testament, R. Wall s'est attaqué au corpus des épîtres catholiques en tirant profit de ce que la recherche récente sur le canon a mis en relief, à savoir la place assez ferme de la lettre de Jacques en ouverture de la collection et le regroupement des lettres catholiques avec les Actes des apôtres. Les premières associations repérables dans l'histoire se font entre ce qu'écrit Pierre d'un côté, Jean de l'autre. Avec la diffusion des Actes, la figure de Jacques était valorisée bien au-delà des cercles judéo-chrétiens, et les accents placés par Luc conduisaient à voir en Jacques l'homme de l'entente et de la collaboration, y compris avec Paul. Un collection de lettres non pauliniennes, en quelque sorte encadrée par la lettre de Jacques et par celle de Jude, "frère de Jacques" (Jude 1), pouvait donc trouver sa place à côté du corpus paulinien. Une théologie particulière, différente de celle de Paul mais non opposée à elle, accompagnait la formation du septénaire catholique. On en trouve les marques, plus ou moins appuyées, plus ou moins complètes, dans les diverses compo-
INTRODUCTION
XV
santés de la collection des épîtres catholiques. Mais les traits distinctifs sont exprimés de la manière la plus nette dans la lettre de Jacques qui ouvre le corpus. Wall les récapitule ainsi: les souffrances qui frappent les croyants éprouvent la solidité de leur amour de Dieu; Dieu vient au secours des croyants en leur faisant connaître "la parole de vérité"; obéissant à cette parole les croyants manifestent publiquement leur lien avec Dieu à travers leur conduite irréprochable; sans obéissance, en effet, l'orthodoxie reste stérile; la récompense divine promise à ceux qui auront suivi la parole de vérité consiste dans la vie éternelle en communion avec Dieu. La lettre de Jacques Richard Bauckham (St Andrews) et John Kloppenborg Verbin (Toronto) se sont occupés tous deux de la réception de la tradition venant de Jésus, mais ils l'ont fait avec des préoccupations, des modèles et des méthodes bien différentes. Il sera tout à fait intéressant pour le lecteur de confronter dans le détail ces deux contributions. Pour Bauckham {The Wisdom of James and the Wisdom of Jesus) le point de départ est la présence en Jacques d'une abondante tradition sapientielle, essentiellement exprimée en aphorismes et accusant des convergences avec la tradition sapientielle de Jésus, riche elle aussi en aphorismes. L'étude de la pratique de Ben Sirach dans son utilisation des matériaux sapientiels préexistants est éclairante, car elle permet de constater que la catégorie de l'allusion scripturaire (plus ou moins vraisemblable) n'est pas satisfaisante. Ben Sirach est un modèle "of tradition and creativity" et c'est la fidélité créatrice par rapport à l'existant qui paraît le mieux rendre compte des rapports entre les textes de départ et leur réécriture. Ce modèle se révèle efficace quand on l'applique aux rapports entre Jacques et Jésus. La parenté de leur production sapientielle est patente non seulement du point de vue de la forme, mais aussi en raison du contenu, négativement, c'est-à-dire en considérant les éléments traditionnels de la sagesse d'Israël non repris, et positivement, par le choix d'une sorte de sagesse de l'extrême, de la radicalité. Quelques exemples choisis (Je 2,5b // Le 6,20b et Mt 5,3; Je 2,13 // Le 6,37-38, Mt 7,1-2 et 5,7 etc.) portent à penser que, tout en reprenant la substance et les thèmes de la sagesse propre à Jésus, le disciple ne la cite pas, n ' y fait pas même allusion, mais la réécrit ou la reformule en fonction de la situation des destinataires. Fidélité créatrice en somme. La démarche de John Kloppenborg {The Reception of the Jesus Traditions in James) recoupe celle de Bauckham mais la déborde en même
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INTRODUCTION
temps par son objet plus général (pas seulement les aphorismes) et par la prise en compte plus minutieuse des pratiques littéraires hellénistiques. Sur le sujet d'ensemble des liens de Jacques avec la tradition de Jésus et avec les paroles du maître en particulier, notre auteur propose d'abord une histoire de la recherche et un état de la question fort documentés. L'héritage le plus aisé à reconnaître est constitué par les paroles de Jésus proposées surtout par Q dans le discours inaugural. Mais même pour ces éléments une double caractéristique ne peut manquer de frapper: jamais Jacques ne se réfère explicitement à Jésus, et dans l'ensemble la convergence verbale entre l'original et sa reprise est fort réduite. Pour rendre compte de cette particularité Kloppenborg ne se réclame pas seulement de la pratique experte d'un Ben Sirach, il invoque plus largement (avec exemples à l'appui) les diverses techniques rhétoriques q u ' o n inculquait, en particulier dans la pratique et les manuels scolaires, en recourant fortement aux méthodes actives: on manipulait les sentences de la tradition en s'exerçant à les reformuler, à les recréer de quelque façon en fonction d'une situation donnée. Dans l'éducation supérieure on vantait notamment la paraphrase et Vaemulatio, c'est-à-dire le fait de rivaliser avec son modèle en reprenant ses idées et en les coulant dans une expression nouvelle. C'est sur cet arrière-plan culturel que les particularités de Jacques dans la reprise de la tradition de Jésus s'expliquent le mieux. À l'appui de cette thèse Kloppenborg propose l'analyse de Je 1,2.12 // Q 6,22-23, de Je 1,5 // Q 11,9-10 et de Je 2,5 // Q 6,20b. Wiard Popkes (Hambourg) s'est occupé lui aussi des traditions de Jacques, mais en mettant l'accent sur les "ruptures de tradition": Traditionen und Traditionsbruche im Jakobusbrief. Pour ainsi dire, Jacques joue avec des balles diverses (les traditions), il les lance à ses destinataires pour qu'ils utilisent les meilleures d'entre elles et fassent sortir du jeu les autres. Le problème se pose donc à la fois pour l'auteur de l'épître et pour les destinataires. Un panorama vaste et fort bien documenté, qui s'appuie prioritairement sur des travaux récents particulièrement significatifs, est dressé sur l'enracinement de Jacques dans les Écritures (Lv 19 traité à la manière d'un midrash; des personnages tels Job et le prophètes), dans la tradition juive au sens plus large (Ben Sirach et la sagesse, le nomisme juif), dans la tradition de Jésus (le sermon sur la montagne et la tradition sapientielle), dans la tradition chrétienne naissante (des éléments pauliniens, 1 P et 1 Jn), et enfin, de façon plutôt réduite, dans la culture hellénistique et romaine. Nul ne peut contester l'ampleur du phénomène de la tradition dans l'épître de Jacques, mais l'on reste sur sa faim, faute de données suffisamment précises, dès lors qu'il s'agit de déterminer quelle est la véritable "patrie
INTRODUCTION
XVII
spirituelle" de Jacques, car son rapport à la tradition n ' a pas de vraie profondeur et apparaît en ce sens comme rompu. Quant à la communauté, elle semble de son côté atteinte par certains déficits par rapport à la tradition reçue et l'on peut comprendre la stratégie argumentative de Jacques comme commandée par le souci concret de répondre à une situation précise de ses communautés. Il a dû y détecter quelques déviations qui ont leur source dans l'infidélité par rapport à la tradition vivante: l'attitude à l'égard des pauvres par exemple, et sans doute une certaine incompréhension devant l'utilité des épreuves. Deux séminaires étaient consacrés à Jacques. Sous la conduite de Matthias Konradt (Berne), le séminaire germanophone portait sur Der traditionsgeschichtliche Standort des Jakobusbriefes. Deux questions principales furent étudiées: le rapport de Jacques avec Paul, ses contacts avec la tradition de Jésus. Les positions des exégètes sur le premier point sont plus éloignées que jamais puisque l'hypothèse que Je 2,14-26 n ' a aucun rapport direct avec Paul jouit maintenant d'une assez grande faveur. Le séminaire n ' a pas pu rapprocher les points de vue. Toutefois, il est apparu nettement qu'il fallait désormais tenir davantage compte de la mutation qui s'est opérée récemment dans l'exégèse de l'épître: on ne peut plus considérer Jacques comme un simple assembleur de traditions isolées, et il est tout à fait indiqué de le lire en lien avec les situations concrètes et les besoins de ses destinataires, donc avec les réalités qui percent derrière les textes. Pour apprécier les liens éventuels avec Paul, un troisième champ d'observation doit impérativement être ajouté: les contacts de la lettre de Jacques avec 1 Pierre. Ils semblent supposer un facteur intermédiaire qui complique la comparaison directe, d'autant plus que les affinités des deux épîtres avec l'évangile de Matthieu et le milieu syrien doivent être intégrées dans la discussion. De nombreuses données s'expliquent le mieux si l'on admet que ces milieux sont à l'origine d'un courant traditionnel qui, s'il n'est pas sans lien avec Paul, possède toutefois une consistance particulière. Quant aux contacts de Jacques avec la tradition de Jésus, une grande réserve s'impose parce que Jésus n'est jamais identifié dans l'épître comme source de quelque tradition. La relation existe sans aucun doute, mais elle n'est pas à sens unique. En effet, si la tradition évangélique a ses répercussions dans la parénèse communautaire, cette dernière a de son côté eu de l'influence sur la teneur des sentences venant de la tradition de Jésus, qu'elle aura d'ailleurs enrichie à l'occasion par des productions originales. Le séminaire francophone, animé par Benedict Viviano et Pierre Keith (Fribourg en Suisse tous les deux), portait d'abord sur La Loi par-
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INTRODUCTION
faite de liberté: Jacques 1,25 et la Loi (Viviano). Les expressions "la loi parfaite de liberté" (Je 1,25), "la loi royale" (2,8) et la "loi de la liberté" (2,12), substantiellement synonymes, désignent la Torah mosaïque dans son intégralité, autrement dit y compris les préceptes rituels. Quelle situation historique est supposée par cette explication du donné? L'explication proposée doit tenir compte de l'attribution de l'épître à Jacques, de sa parenté avec Matthieu, de ses affinités avec le judaïsme hellénistique, de sa qualité littéraire et de son utilisation de la Septante, enfin du paulinisme populaire et quelque peu dégradé qu'elle suppose. Le milieu syrien de la fin du siècle se présente alors comme lieu vraisemblable de ce texte qui semble provenir du cercle resté fidèle à Jacques et à son esprit après son martyre. La deuxième question présentée, qui n'est évidemment pas sans lien avec la première, abordait La citation de Lv 19,18b en Je 2,1-13 (Keith). L'étude synthétique de Je 2,1-13 dégage dans les grandes lignes l'argumentation de l'auteur pour justifier son désaccord avec ses lecteurs dans le regard jeté sur les relations avec les pauvres. Sont étudiées ensuite les autres citations de Lv 19,18 dans le NT, essentiellement les diverses versions synoptiques de la péricope du double commandement d'amour et les textes majeurs de Rm 13,8-10 et Ga 5,14. Les contacts entre ces divers textes portent à compter avec l'existence d'une tradition ferme centrée sur Lv 19,18. Jacques s'en sert à son tour en 2,8-11. Mais il ne prend pas à son compte la valeur de quintessence accordée au commandement de l'amour dans la tradition, et qui portait à penser que ce commandement singulier accomplissait à lui seul, par manière de réduction ou récapitulation, toute la requête de la Loi. Selon Jacques le commandement de l'amour est indissociable de l'ensemble des préceptes et en particulier du décalogue. Le choix des thèmes des communications brèves est laissé traditionnellement aux auteurs. En lien avec l'épître de Jacques ce furent: P.A. Bernheim, La mort de Jacques, l'épître de Jacques et la dénonciation des riches; C. Marucci, Sprachliche Merkmale des Jakobusbriefes; J. Yates, The Réception of the Epistle of James in the Latin West: Did Athanasius Play a Rôle? 1 Pierre Qui s'est occupé de l'anthropologie de 1 Pierre connaît la difficulté de trouver un enracinement convaincant. Traitant de Seelenheil. Überlegungen zur Soteriologie und Anthropologie des 1. Petrusbriefes, Reinhard Feldmeier (Göttingen) apporte sur le sujet un éclairage précieux, en par-
INTRODUCTION
XIX
ticulier et aussi du point de vue de la méthodologie. Ainsi, pour comprendre ce que Pierre veut désigner par v|/u%f|, on n'est pas réduit à opter entre la conception holistique de l'anthropologie sémitique et le dualisme platonicien. La philosophie hellénistique, largement médiatisée par le judaïsme de la diaspora, permet de compter avec l'idée d'une âme comme "moi supérieur" de l'homme, en y associant comme caractéristique l'ouverture sur le divin. Il n'est pas indifférent de savoir que les destinataires de l'épître étaient sans doute influencés eux-mêmes par ces conceptions. L'idée de renaissance et son statut dans l'épître posent des questions du même genre. La terminologie éclot et se développe rapidement au premier et deuxième siècle de notre ère, mais la prudence s'impose: d'une part les parallèles externes sont à manier avec précaution, et d'autre part il ne faut pas procéder trop vite à des identifications de la renaissance avec le baptême ou avec la nouvelle création. La densité du motif en 1 P 1,3 - 2,3 invite à s'appuyer directement sur l'exégèse du passage pour donner un contenu plausible à l'idée de renaissance: la métaphore personnalise le message chrétien de l'irruption de l'eschaton, et s'harmonise ainsi avec l'insistance sur la paternité de Dieu et la condition filiale des croyants. On notera toutefois que cette section, où les représentations hellénistiques sont particulièrement fortes, est pourvue d'un cadre (1,1-2 et 2,4-10) dans lequel la métaphore biblique traditionnelle du "peuple de D i e u " tient le premier rôle. Les énoncés de 1 Pierre relatifs à la christologie ne manquent pas. Ils ont souvent une allure quelque peu conventionnelle et semblent provenir de la tradition. Mais quelle est au juste leur force et leur portée? Selon François Vouga (Bethel), qui traita précisément de La christologie de la Première de Pierre, on ne peut répondre à cette question qu'en intégrant les motifs christologiques - très présents en particulier dans 1,17-21; 2,21-25 et 3,18-22 - dans l'argumentation d'ensemble de l'épître, autrement dit en cherchant la cohérence dans la visée de l'auteur et non dans les sources utilisées. Or la visée de l'auteur est de fournir des appuis à des chrétiens affrontés aux " é p r e u v e s " qui proviennent de leurs contemporains et qu'ils subissent dans leur milieu de vie alors qu'ils sont objectivement innocents. En termes d'aujourd'hui on parlerait d'un statut de dissidents. Selon Pierre les chrétiens doivent assumer ce statut en veillant avec soin à ce qu'ils soient inattaquables du point de vue moral, en résistant à la tentation de la violence et en adoptant une attitude missionnaire. Dans cette perspective la dimension proprement salvifique, que le kérygme traditionnel mettait en relief dans son annonce du Christ, en particulier en présentant sa mort comme une "mort pour", importait moins que l'exploitation parénétique qu'on pouvait faire de sa souf-
XX
INTRODUCTION
france et de sa victoire finale. Parce que Pierre tient à suggérer l'idée d'une "communauté de destin" entre Jésus et les chrétiens, il voit dans le Christ l'initiateur d'un mouvement qui mène de la souffrance à la gloire, et dans lequel les chrétiens ont à s'engager en suivant ses traces. Enrico Norelli (Genève) présente des observations factuelles et des réflexions méthodologiques Au sujet de la première réception de 1 Pierre. Il appuie sa démonstration sur trois exemples. En premier lieu il revient sur la question classique de la relation entre 1 Pierre et 1 Clément. Il examine de façon minutieuse les passages individuels qui sont habituellement retenus comme preuves de la dépendance littéraire, en l'occurrence celle de Clément par rapport à Pierre; selon Norelli les textes concernés ne justifient pas cette conclusion qui, pourtant, est généralement présentée comme bien fondée sinon tout à fait sûre. Parce qu'elle remet en cause ce qui semblait acquis, cette prise de position argumentée ne manquera pas de retenir l'attention des spécialistes de l'ancienne littérature chrétienne. Le deuxième exemple, le plus développé, est celui de Polycarpe de Smyrne. Norelli a réexaminé, suivant l'ordre de leur apparition dans Polycarpe, les passages où 1 P et Pol se rencontrent d'après le premier volume de la Biblia Patristica: 1 P 1,8.12; 1,13.21; 4,5-7; 2 , 1 1 ; 5,5; 4,7; 2,22.24; 2,17; 3,8; 2,12. La réalité des contacts, d'une densité variable, ne fait guère de doute dans l'ensemble, Aussi Norelli prête-il une attention particulière aux aspects méthodologiques: sont à considérer non seulement les critères à appliquer pour q u ' o n puisse parler de dépendance, mais surtout les modalités de la réception. Il s'agit de voir comment Polycarpe reçoit 1 Pierre, plus précisément de s'interroger sur les éventuelles et massives réinterprétations que le transfert des textes d'une situation dans une autre peut entraîner. La démarche est instructive d'abord pour l'interprétation de la lettre de Polycarpe elle-même. Il apparaît que Polycarpe reprend bien les éléments de 1 Pierre, avant tout ceux qui relèvent de la parénèse, mais il n'emprunte pas en même temps le système de coordonnées théologique qui les encadrait dans l'original, à savoir le caractère eschatologique du présent et l'attente ardente de la fin. La réception de 1 Pierre par Polycarpe semble répondre au phénomène de la rupture de traditions illustré par W. Popkes dans l'épître de Jacques. Se pose alors la question du bon usage de l'histoire de la réception. Parce que Irénée de Lyon est le premier à citer 1 Pierre en attribuant le texte de façon explicite à l'apôtre Pierre, Norelli retient comme troisième exemple la réception de 1 Pierre chez cet auteur. Trois textes d'Irénée entrent directement en ligne de compte. C o m m e le lecteur s'en apercevra l'examen mené ici est ardu, en raison de la tradition textuelle assez déficiente. Un examen critique soi-
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gné permet d'écarter le passage de Adversus haereses IV, 16,5. En plus des deux autres textes à mention explicite (IV,9,2 et V,7,2), diverses références implicites sont examinées. Pour ce qui regarde la manière de reprendre les textes de Pierre, Irénée se comporte un peu comme Polycarpe: il utilise les citations en les mettant au service de sa visée personnelle commandée par le combat contre les gnostiques et les marcionites et intéressée à mettre en relief le temps et la réalité matérielle de la création. Trois short papers ont été proposés: S. Fagbemi, The Identity of the "Elect" in 1 Peter. Its "Present Significance and Implications for Believers; Fika J. van Rensburg, The Old Testament in the Salvific Metaphors in 1 Peter; D. Rudman, 1 Peter 3-4 and the Baptism of Chaos. 11
2 Pierre et Jude Selon le regretté Roger Le Déaut, "l'exégèse chrétienne doit toujours tenir compte de l'intermédiaire que représente la tradition juive, au sens large, entre l'Ancien et le Nouveau Testament" (RHPR 51 [1971] 31). Naguère Peter Davids (Stafford) avait vérifié la pertinence de ce type d'intertextualité pour les reprises de l'Ancien Testament dans Jacques. Il présente maintenant la suite du dossier, à savoir une étude sur The Use of Second Temple Traditions in 1 and 2 Peter and Jude. Il le fait en se limitant aux traditions narratives qui concernent des personnages et des événements, et en mettant un soin particulier à distinguer autant que possible si l'origine de ces traditions se trouvait dans l'Ancien Testament lui-même ou dans les traditions juives. Dans 1 Pierre, qui pourtant abonde en références scripturaires de tout genre quand il s'agit d'éléments autres que narratifs, la moisson est maigre: le matériau narratif se limite à deux traditions: le personnage de Sara en 3,6, Noé et le déluge en 3,20. Dans le premier cas Pierre dépend probablement du Testament d'Abraham, dans le second il a vraisemblablement combiné de mémoire des détails de provenance diverse. Les données sont plus nombreuses en Jude: les rebelles de la génération de l'exode, les anges déchus et les Sodomites en Jude 5, Caïn, Balaam et Coré en Jude 11, la lutte de Michel avec le diable à propos du corps de Moïse en Jude 9 (non mentionnée dans la Bible mais dans le Testament de Moïse), enfin (Jude 14-15) la citation d'une prophétie de 1 Henoch d'après la version grecque (1 Henoch 1,9); l'auteur de l'épître semble avoir connu directement et largement utilisé la première partie de ce pseudépigraphe. Dans
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2 Pierre les références de Jude aux épisodes bibliques sont reprises (à l'exception notable des deux qui ne sont attestés que dans les pseudépigraphes) et quelques autres s'y ajoutent: le renvoi global aux prophètes en 1,19 et 3,2, au déluge et à Noé, "le prédicateur de justice" en 2,5. Tout indique que les épisodes et personnages indiqués dans les trois écrits proviennent non pas directement de la lettre de l'Écriture mais des amplifications narratives variées du judaïsme ancien, sans doute plus connues dans les communautés destinataires que l'Ancien Testament lui-même. Le thème de la parousie, si important en 2 Pierre, a retenu l'attention de Rudolf Hoppe (Bonn): Parusieglaube zwischen dem ersten Thessalonicherbrief und dem zweiten Petrusbrief - ein unerledigtes Problem. Hoppe retrace d'abord à grands traits l'évolution du thème depuis 1 Th et constate, sur la base de 2 Th, de Je, mais surtout de Jude (sur la position duquel il a publié naguère une étude) que, le délai s'allongeant, la parousie faisait problème. Après avoir présenté la structure argumentative de 2 P, il en vient à la parousie elle-même en prenant en compte, autant que possible, la situation reflétée par la lettre. L'existence m ê m e de la lettre montre que les destinataires ont été sérieusement troublés, dans leur espérance, par les attaques des adversaires. Ce sont d'ailleurs ces destinataires, non les adversaires, qui font l'objet de la sollicitude de l'auteur: il veut les convaincre de se rallier à lui et de refuser les positions des " m o q u e u r s " qui mettent en doute la réalité de la parousie et du jugement pour la raison que rien ne s'est passé depuis l'époque des origines chrétiennes, maintenant bien éloignée dans le temps. Mais Pierre, qui ne dédaigne pas de recourir, dans la polémique, au thème classique de la dégradation morale des opposants, n ' a guère d'arguments précis à produire contre leur thèse. Alors que, selon tout probabilité, les " m o q u e u r s " ne s'appuyaient pas sur la création, Pierre exploite ce thème à l'adresse de ses destinataires, en le mettant en correspondance tacite avec l'eschatologie. Au bénéfice des lecteurs il met en avant sa foi en la toute puissance de Dieu, telle qu'elle s'est manifestée dans le lointain passé (voir 2, 4-8, avec la conclusion en 2,9, et 3,5), mais aussi dans le passé récent (la transfiguration de Jésus), et telle qu'elle se manifestera à nouveau au temps de la fin (3,7-13). Il donne ainsi à ses lecteurs le moyen d'assumer ce qu'ils ressentent comme un manque (le retard de la parousie), mais qu'ils doivent apprendre à reconnaître comme temps de la grâce divine. A la question de savoir si les épîtres catholiques attestent une théologie spécifique de la parousie, l'étude des textes, en particulier dans Jude et dans 2 Pierre convie à donner une réponse négative.
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Le séminaire anglophone, sous la responsabilité de Lauri Thurén (Joensuu), étudia The Relationship between 2 Peter and Jude. De cette question classique quatre explications sont disponibles dans la littérature spécialisée. 1. Les deux écrits ont le même auteur. 2. Les deux auteurs ont utilisé la même source. 3. Jude dépend de 2 Pierre. 4. 2 Pierre dépend de Jude. Thuren expose les arguments avancés par la recherche en faveur de chacune de ces propositions. C'est la dernière solution qui est habituellement retenue et les débats du séminaire confirmèrent ce choix en mettant l'accent sur les indices de composition, de style (moins élaboré en Jude), de langage (plus simple en Jude). Sur tout un ensemble de points les choses s'expliquent mieux si l'on admet que 2 Pierre est l'aboutissement de la trajectoire. Ainsi, la dépendance directe de 2 Pierre par rapport à Jude apparaît pour le moment comme la meilleure des hypothèses. Elle n'est toutefois pas définitivement acquise et la recherche ultérieure devrait approfondir les approches basées sur la critique de la rédaction et sur la dimension rhétorique des textes. Deux communications brèves furent proposées: V. Koperski, "Knowledge of Our Lord Jésus Christ". Echoes of Paul in 2 Peter; M. Trimaille, Le " D e S e r a . . . " de Plutarque et la patience de Dieu en 2 P 3. 1 Jean Pour exprimer leur sotériologie, plus précisément le lien du salut ou du pardon avec la mort du Christ, les chrétiens ont abondamment puisé dans la riche tradition de l'Ancien Testament. Jean lui-même n'est pas en reste, il fournit même un exemple particulièrement frappant de cette tendance: à deux reprises (1 Jn 2,2 et 4,10), il identifie le Christ à l'expiation (iÀ,a<j|iôç). Michèle Morgen (Strasbourg) propose une étude précise de cette question: La mort expiatoire de Jésus d'après 1 Jean. Pour clarifier la problématique et éviter des malentendus, elle présente d'abord une longue remarque sur les acquis de la recherche sémantique relative aux mots et aux catégories du langage sacrificiel, soulignant en particulier la double acception expiation/propitiation attachée à \XaG[iôq. Elle propose ensuite l'analyse des deux textes mentionnés et des contextes, et montre que le texte fondamental de Lv 16 y joue un rôle plus déterminant qu'il n ' y paraît à première vue. Jean y puise, en effet, ses catégories. Mais, à la lecture attentive des textes, on voit bien que le théologien ne fait pas que reprendre les données anciennes, il parvient aussi à exprimer la différence chrétienne. Ainsi, loin d'être une victime expiatoire, le Christ apparaît progressivement à côté du Père
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comme agent de l'expiation et auteur du pardon, au titre de sa justice. De plus, si l'expiation est bien, comme dans l'Ancien Testament, au profit du " n o u s " de la communauté, elle n ' a pas de frontière puisque le bénéficiaire en est également "le m o n d e " . Jean le souligne avec emphase en utilisant la fameuse formule ou |iôvov ... àkXà Kai en 1 Jn 2,2b et le confirme un peu plus loin (4,14) en attribuant à Jésus, fils de Dieu, le titre de "sauveur du m o n d e " . Enfin la parénèse johannique branche la pratique chrétienne sur le geste d'amour et de pardon que pose le Fils, dans la fidélité au Père, en réalisant l'expiation des péchés. Présentèrent des short papers H. Schmid, Tradition als Stratégie. Zur Pragmatik des Traditionsarguments im 1. Johannesbrief\ S. Witetschek, "Pappkameraden" ? Die Auseinandersetzung mit den "Gegnern" im 1. Johannesbrief und die Darstellung des Judas im Johannesevangelium. Tout n'est pas nouveau dans les études que ce volume rassemble, et tout n ' y est pas dit. En matière d'introduction, par exemple, la question des auteurs ne peut pas être considérée comme tranchée dans le cas de la lettre de Jacques et de 1 Pierre, et il faudra encore de nombreuses investigations pour mieux comprendre la tension entre le caractère assez général du contenu de nos épîtres et les situations particulières de leurs destinataires, si difficilement discernables d'ailleurs. Pourtant, le colloque et les travaux qui en sont issus attestent pour ces dernières années la vitalité étonnante des études sur les épîtres catholiques, ce qui n'est peut-être pas sans lien avec l'intérêt grandissant pour le christianisme du deuxième siècle. Pour ce qui concerne le sujet plus particulièrement retenu, le regard posé sur le phénomène de la tradition à partir des présupposés différents des uns et des autres, au moyen d'enquêtes neuves et de modèles inédits, ce regard s'est enrichi et stimulera, tel est mon souhait et même mon pronostic, de nouvelles recherches, par exemple dans une confrontation plus affinée des épîtres catholiques avec les Actes des Apôtres ou bien dans le domaine encore assez vierge de l'approche canonique. 28 rue Gounod F-67000 Strasbourg
Jacques SCHLOSSER
THE CATHOLIC EPISTLES IN GENERAL
LE CORPUS DES ÉPÎTRES C A T H O L I Q U E S
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Au tournant du 4 au 5 siècles, la collection des sept épîtres appelées "générales" selon un usage anglo-saxon bien ancré , ou alors "catholiq u e s " selon une tradition plus large, est manifestement une grandeur tout à fait solide et clairement identifiée. Quelques témoignages, pris dans diverses aires géographiques, le montrent à l'évidence . 1
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Vers 396, dans une de ses lettres à Paulin de Noie, Jérôme entreprend une brève présentation du Nouveau Testament. À propos des épîtres catholiques, qu'il n'appelle d'ailleurs pas ainsi, il dit ceci: "Jacques, Pierre, Jean, Jude ont publié sept lettres aussi mystiques que succinctes, brèves et longues tout ensemble: brèves par le nombre des mots, mais longues en raison de la difficulté des idées, ce qui fait que bien rares sont ceux dont leur lecture ne trouble pas la vision spirituelle" (lettre 53,9, trad. J. Labourt). Il les considère donc comme un ensemble qui a ses caractéristiques. Les détails qu'il avait donnés dans son ouvrage antérieur De viris illustrious attestaient déjà clairement la perception du corpus. Pierre, précisait-il, a écrit "deux épîtres qui sont appelées catholiques", celle de Jacques "est comptée parmi les sept Épîtres Catholiques", de même que la "petite lettre" de Jude; les trois lettres attribuées à Jean viennent l'une de Jean l'apôtre, les deux autres de Jean le Presbytre. 3
À peu près en même temps (vers 396-397), dans le De doctrina Christiana, un livre passionnant qui a pour but d'introduire le lecteur à la juste compréhension des Écritures, Augustin ne manque pas de lui fournir la liste exacte des livres bibliques (II, vm, 13). Ceux du Nouveau Testament sont mentionnés par catégories: après les évangiles, et avant les Actes des Apôtres et l'Apocalypse de Jean qui sont cités en dernier, Augustin présente dans le détail les quatorze lettres de Paul et, sans utiliser aucun qualificatif d'ensemble tel que "catholiques", enchaîne par: 1. Voir pour illustration les titres des commentaires anciens de W.R. Osterley ( 1 9 1 0 ) et de J. Moffat ( 1 9 2 8 ) et l'article récent de D.F. WATSON, Letter, Letter Form, in R.P. MARTIN - P.H. DAVIDS (eds.), Dictionary of the Later New Testament and Its Developments, Downers Grove, IL, InterVarsity Press, 1997, pp. 6 5 0 - 6 5 5 . 2. Pour les dates des auteurs ecclésiastiques et pour d'autres données du même genre, je renvoie une fois pour toutes à l'ouvrage de S. DÖPP - W . GEERLINGS (eds.), Lexikon der antiken christlichen Literatur, Fribourg/B, Herder, 1999. 3. Le texte est cité dans C.B. AMPHOUX - J.P. BOUHAUT, Lecture liturgique et critique textuelle des Épîtres Catholiques, in C.B. AMPHOUX - J.P. BOUHAUT (eds.), La lecture liturgique des Épîtres Catholiques dans l'Église ancienne (Histoire du texte biblique, 1), Lausanne, Zèbre, 1996, pp. 2 8 3 - 3 0 7 , spéc. 2 8 6 .
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"deux épîtres de Pierre, trois de Jean; une de Jude et une de J a c q u e s " (trad. M. Moreau) . On le voit, l'ordre de 1'enumeration est différent de celui q u ' o n observait traditionnellement . Trente ans plus tôt (367), dans sa lettre festale 39 où il donne la liste des vingt sept livres canoniques du Nouveau Testament, Athanase mentionne après les évangiles et avant le corpus paulinien, et en les réunissant, "les Actes des apôtres et les épîtres appelées catholiques, écrites par les apôtres, au nombre de sept que voici: une de Jacques, deux de Pierre, puis trois de Jean et après cela, une de J u d e " . Pour la Grèce et l'Asie Mineure on peut citer c o m m e témoignages à peu près contemporains le canon 60 (ou bien 59, là où les deux canons 59 et 60 sont fondus en un) du concile de Laodicée, qui énumère, après les Actes et dans l'ordre Jacques, Pierre, Jean, Jude, "les sept épîtres catholiques" . Vers 350 Cyrille de Jérusalem avait proposé lui aussi la série complète selon l'ordre le plus c o m m u n mais en adoptant la séquence Actes-épîtres catholiques. À la fin du quatrième siècle, tous les doutes n'avaient pas disparu. Selon Amphiloque d'Iconium (396), "des épîtres catholiques les uns disent que sept doivent être admises, d'autres, trois seulement: une de Jacques, et une de Pierre, et une de Jean; d'autres admettent trois de Jean et de plus les deux de Pierre et celle de Jude comme s e p t i è m e " . En dépit de ce témoignage pas totalement clair , on peut considérer que les 4
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4. C'est sans doute par inadvertance que la lettre de Jude a été omise dans la traduction reproduite dans J.D. KAESTLI - O. WERMELINGER (eds.), Le canon de VAncien Testament. Sa formation et son histoire (Le Monde de la Bible), Genève, Labor et Fides, 1984, p. 200. 5. L'absence de toute caractérisation globale (sept, catholique) n'est pas propre à Augustin, ni la post-position des épîtres catholiques par rapport au corpus paulinien. Voir par exemple la liste de Rufin d'Aquilée vers 400 (traduction dans KAESTLI-WERMELINGER [eds.], Le canon de l'Ancien Testament [n. 4], pp. 197-198), ou celle du concile de Carthage de 397 (ibid., pp. 198-199). Dans l'Église grecque, Grégoire de Nazianze, Poème 1,12, présente aussi les épîtres catholiques à la suite de celles de Paul (ibid., pp. 147-148). 6. Traduction (retouchée) de P.P. Joannou, reproduite dans KAESTLI-WERMELINGER (eds.), Le canon de l'Ancien Testament (n. 4), p. 142. 7. Il subsiste un doute sur cette traduction, qui est retenue par exemple dans M.J. LAGRANGE, Histoire ancienne du Canon du Nouveau Testament (EtB), Paris, Gabalda, 1933, p. 115, et que recommande fortement le texte même du canon en raison de 1'enumeration complète des lettres et de la précision numérique "sept". La traduction rivale "les sept lettres canoniques", proposée par P.P. Joannou et retenue par KAESTLI-WERMELINGER (eds.), Le canon de l'Ancien Testament (n. 4), p. 145, est possible philologiquement (voir G.W.H. LAMPE, A Patristic Greek Lexicon, Oxford, Clarendon, 1968, p. 691) mais paraît moins vraisemblable; en effet le mot KŒVOVIKÔÇ est employé dans le contexte immédiat, ce qui laisse entendre qu'on ne prend pas un terme pour l'autre. 8. Voir le texte dans KAESTLI-WERMELINGER (eds.), Le canon de l'Ancien Testament (n. 4), pp. 140-141. 9. Ibid., p. 150 (traduction de P.P. Joannou retouchée). 10. Dans l'exposé de la troisième opinion le silence sur Jacques est certes explicable mais il entraîne néanmoins de l'ambiguïté.
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LE CORPUS DES ÉPÎTRES CATHOLIQUES
points essentiels sont acquis vers 400 dans la plupart des églises: sept épîtres nommées catholiques. Présentée en ouverture lors du colloque, cette contribution fut conçue comme une introduction et pourra peut-être jouer le m ê m e rôle pour les lecteurs de ce volume. Elle doit donner d'abord un aperçu sur la croissance progressive du corpus et ensuite répondre si possible à la question de savoir s'il s'agit d'un amalgame plutôt aléatoire ou alors si des traits littéraires et surtout théologiques donnent à ce groupe de lettres une identité plus marquée.
L A CONSTITUTION DU CORPUS
Les lettres elles-mêmes fournissent plusieurs indices explicites qui conduisent à les rapprocher: " P i e r r e " , qualifié de "apôtre de Jésus Christ" en 1 P 1,1 et en 2 P 1,1, est crédité de deux lettres, et, selon toute probabilité, il renvoie dans la deuxième à la première (2 P 3,1). Jude se présente lui-même comme "frère de Jacques", et, comme ce dernier (Je 1,1) ainsi que l'auteur de 2 P (1,1), il se qualifie de "serviteur" (Jude 1). Les contacts implicites mais précis de Jude et de 2 P appellent une explication par la dépendance littéraire directe. Pour rendre compte des ressemblances parfois étroites entre 1 P et Jacques, l'exégèse classique recourait volontiers, là aussi, à la dépendance littéraire, dans un sens ou dans l'autre. On croit moins, aujourd'hui, aux possibilités de cette démarche, mais il n ' y a pas à douter de la réalité des contacts eux-mêmes . 11
En prenant en compte ces faits et en élargissant le dossier, on en vient à se demander si le corpus des épîtres catholiques ne s'est pas fixé bien plus tôt qu'on ne le pense habituellement. Je présente rapidement quelques propositions récentes en faveur de cette thèse. e
Un Nouveau Testament dès le 2
siècle?
Aux observations faites à l'instant à propos des liens entre 2 P d'une part, 1 P et Jude de l'autre, il convient d'ajouter, avec P. G r e l o t et, plus récemment avec G. Theissen , la référence de 2 P 1,16-18 au récit sy12
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11. Voir en particulier M. KONRADT, Christliche Existenz nach dem Jakobusbrief. Eine Studie zu seiner soteriologischen und ethischen Konzeption ( S U N T , 22), Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1998, pp. 328-330. 12. P. GRELOT, La deuxième épître de Pierre et la tradition apostolique, in ACan 23 (1979) 63-103, pp. 95-100. L'auteur valorise en particulier le contact entre 2 P 1,19-21 et 1 P 1,10-12 (pp. 93, 95). 13. G. THEISSEN, Die Religion der ersten Christen. Eine Theorie des Urchristentums, Gütersloh, Kaiser - Gütersloher Verlagshaus, 2000, p. 366.
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noptique de la transfiguration, peut-être même aux trois versions de ce récit, en tout cas à celle de Matthieu , mais aussi la mention d'un groupe de lettres pauliniennes (2 P 3,15-16), sans oublier l'allusion vraisemblable de 2 P 1,14 (la mort proche de Pierre garantie par une révélation) à la scène de Jn 21,18-19 . La deuxième lettre de Pierre présuppose donc l'existence de composantes importantes du canon néotestamentaire, et pourrait se situer de ce fait dans la proximité de la constitution de ce canon, peut-être même que l'écrit fut composé précisément par les éditeurs du canon, comme une sorte d' " é d i t o r i a l " . Plusieurs indices montrent en effet que 2 Pierre "reflète...une intention canonique" . En 1996 paraissait une étude originale de David Trobisch sur la rédaction finale du Nouveau Testament . En s'appuyant sur des phénomènes d'édition comme la pratique des nomina sacra, le recours à peu près systématique au codex, l'ordre relativement ferme des livres du Nouveau Testament dans les manuscrits, un choix concerté pour les titres tels que "épître c a t h o l i q u e " , Trobisch défend la thèse qu'il y a eu une véritable décision, à un moment donné et dans un lieu déterminé, d'éditer le Nouveau Testament comme un ensemble littéraire. Au lieu de considérer les divergences et les variations sur la canonicité de tel ou tel livre comme des indices attestant l'absence d'une collection constituée à telle ou telle date, notre auteur propose de voir dans ces variations des réactions suscitées précisément par l'existence d'une telle collection. Cette collection, il est vrai, ne se laisse saisir de façon sûre qu'au cours du 4 siècle, dans 14
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14. GRELOT, Tradition apostolique (n. 12), pp. 95-96; P. DSCHULNIGG, Der theologische Ort des Zweiten Petrusbriefes, in BZ 33 (1989) 161-177, pp. 168-169, 172173. 15. Cette dernière allusion permet de penser que l'auteur connaissait aussi les épîtres johanniques. Selon THEISSEN, Religion (n. 13), p. 363, un corpus johannique existait probablement dès le deuxième siècle. 16. GRELOT, Tradition apostolique (n. 12), relève des contacts significatifs de 2 P 1,21 avec 2 Tm 3,16 (p. 94), de 2 P 3,15 avec 1 Tm 1,15-16 (p. 96), et de 2 P 1,13-15 avec 2 Tm 4,6-8 (p. 99). 17. THEISSEN, Religion (n. 13), pp. 366-367. - Pour une appréciation critique voir A. LINDEMANN, Zur "Religion" des Urchristentums, in 77? 67 (2002) 238-261, pp. 258259. 18. J.N. ALETTI, La seconde épître de Pierre et le canon du Nouveau Testament, in C. THEOBALD (ed.), Le canon des Ecritures. Etudes historiques, exégétiques et systématiques (LeDiv, 140), Paris, Cerf, 1990, pp. 239-253, spéc. 250. 19. D. TROBISCH, Die Endredaktion des Neuen Testaments. Eine Untersuchung zur Entstehung der christlichen Bibel (NTOA, 31), Fribourg/S, Universitätsverlag; Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1996. 20. Les deux derniers traits ont été fort bien exploités par K . W . NIEBUHR, Exegese im kanonischen Zusammenhang. Überlegungen zur theologischen Relevanz der Gestalt des neutestamentlichen Kanons, in J.M. AUWERS - H J . DE JONGE (eds.), The Biblical Canons (BETL, 163), Leuven, Leuven University Press - Peeters, 2003, pp. 557-584.
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LE CORPUS DES ÉPÎTRES CATHOLIQUES
les grands manuscrits. Mais comme il n ' y eut probablement pas de contacts entre les éditeurs de ces manuscrits, la parenté forte qui existe par ailleurs entre eux porte à postuler un ancêtre commun. L'ensemble fut désigné du titre "Nouveau Testament", ce que confirme le témoignage des Pères anciens, par exemple l'anti-montaniste anonyme (Eusèbe, HE V,16,3) qui assure se garder "avec soin de paraître en quelque manière faire des additions ou des surcharges à la parole du Nouveau Testament de l'Évangile" (trad. G. B a r d y ) . Des indices convergents porteraient donc à situer cette rédaction du Nouveau Testament, avec ses grandes composantes assurées, dans le cadre du 2 siècle. En annexe à l'étude déjà citée sur la critique textuelle , C.-B. Amp h o u x a proposé des vues originales qui, pour autant que je suis informé, n'ont guère attiré l'attention du monde critique . Il importe d'autant plus de donner au moins un aperçu de cet essai fort complexe et touffus. L'auteur part de l'épître de Jacques. En s'appuyant sur la critique textuelle et sur quelques éléments particuliers du vocabulaire, il détecte des tensions qui justifient le recours à la critique littéraire. Des variantes textuelles et des expressions ambiguës (par exemple le réfèrent Geôç de Je 1,1, qui peut viser Dieu ou le Christ) le portent à postuler l'existence d'une "forme plus ancienne que le texte courant, qui se distingue de lui par une genre littéraire plus chargé de sens et de recours à l'Ancien Testament" (p. 314). Cet état premier du texte serait marqué par une christologie forte, que l'auteur ancien chercherait à mettre en valeur dès le départ, en proposant une bonne composition orientée par les titres christologiques de " D i e u " (1,1.5), de "gloire du Seigneur" selon une leçon variante (2,1) et de "la fin du Seigneur" (5,11). Sous ces trois titres christologiques se laisse découvrir un ensemble cohérent regroupant des thèmes divers, mais dont la dominante est la christologie. En effet, sous sa forme ancienne le texte de Jacques apparaîtrait " c o m m e un discours christologique organisé autour de trois idées: la divinité de Jésus, son accomplissement des Écritures, à la fois comme homme et comme Dieu, 21
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2 1 . Selon TROBISCH, Endredaktion (n. 19), p. 6 9 , la même utilisation de l'expression "Nouveau Testament" s'observe déjà chez les Pères de la fm du 2? et du début du 3 siècle. 2 2 . Lecture liturgique et critique textuelle des Épîtres Catholiques (n. 3 ) . 2 3 . Voir Hypothèses sur l'origine des Épîtres Catholiques, in AMPHOUX-BOUHOT (eds.), La lecture liturgique des Épîtres Catholiques dans l'Église ancienne (n. 3), pp. 3 0 8 E
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2 4 . Le travail mentionné est cité dans les bibliographies des commentaires récents de J.H. ELLIOTT, 1 Peter. A New Translation with Introduction and Commentary (AncB, 3 7 B ) , Garden City, N Y , Doubleday, 2 0 0 0 , p. 2 3 0 , et de C. BURCHARD, Der Jakobusbrief ( H N T , 15/1), Tubingen, Mohr, 2 0 0 0 , p. 3 6 , mais il n'est pas vraiment pris en compte (voir pourtant ce dernier, à la p. 2 7 ) .
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enfin sa mort rédemptrice qui ouvre au croyant le chemin de la vie éternelle" (p. 322). Dans le deuxième temps de son analyse, Amphoux se tourne vers 1 P et pense y trouver la confirmation de sa thèse sur l'état primitif de la lettre de Jacques. Son argumentation repose sur des convergences indiscutables , mais aussi, et plus souvent sans doute, sur des rapprochements peu convaincants. En conclusion de son développement sur la parenté de Jacques et de 1 P, notre auteur se risque à une explication d'ensemble. L'importance des deux épîtres, qui se manifeste en Orient par leur présence rapide et solide dans le canon, s'explique le mieux si ces deux écrits ont été associés très tôt aux grands ensembles qui sont à l'origine des évangiles, les logia et la tradition marcienne. Le texte de Jacques constituait la "préface d'une édition des paroles de Jésus", pour l'existence de laquelle le témoignage de Papias sur Matthieu fournit un point d'appui. Pour ce qui concerne 1 P, le témoignage de Papias sur Marc, combiné avec des précisions fournies par la fameuse lettre de Clément d'Alexandrie sur "l'évangile secret de M a r c " , porte à penser que la lettre de Pierre a été conçue pour être la préface de Marc. Nous aurions là les racines qui se développeront dans la constitution progressive d'un corpus de lettres une fois que ces "préfaces" seront dissociées des écrits évangéliques et changeront de genre littéraire en devenant des lettres . 25
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Profitant de ses compétences reconnues en critique textuelle, C.B. Amphoux veut éclairer d'un jour nouveau, en ce qui regarde la constitution du corpus des écrits néotestamentaires, la période obscure du deuxième siècle. S'appuyant sur "certaines affinités du texte évangélique avec les Épîtres d'Ignace d'Antioche" et sur la présence, dans le Codex de Bèze (D), de la péricope de la femme adultère et de la finale de M a r c , notre auteur pense pouvoir proposer l'hypothèse suivante. 28
2 5 . Rappelons que les commentaires et les introductions consacrent habituellement un exposé aux rapports Jc-1 P. - On peut par exemple suivre Amphoux quand il range Je 5 , 1 2 - 2 0 et 1 P 4 , 7 - 1 1 parmi les convergences les plus significatives entre les deux écrits (p. 3 2 5 ) . 2 6 . Voir pour information J.D. KAESTLI, in F. BOVON - P. GEOLTRAIN (eds.), Écrits apocryphes chrétiens, I (Bibliothèque de la Pléiade), Paris, Gallimard, 1997, pp. 5 7 - 6 9 . Le débat sur la fiabilité de cette lettre (plusieurs estiment qu'il s'agit d'un faux moderne) a resurgi avec vigueur dans la "troisième quête" historique sur Jésus. - Amphoux ne semble pas douter de l'authenticité du document. 2 7 . Eusèbe déjà affirmait (HE IV, 14,9) que Polycarpe de Smyrne se référait parfois à 1 P, et la recherche moderne partage largement cette opinion (voir la contribution de E. Norelli dans ce volume). Ce serait un indice que cette dissociation postulée par Amphoux s'est faite dès les premières décennies du 2 siècle. 2 8 . Pour l'argumentation détaillée portant sur ces deux textes on doit se reporter à C.B. AMPHOUX, La "Finale longue de Marc" : un épilogue des quatre évangiles, in C. FoCANT (éd.), The Synoptic Gospels. Source Criticism and the New Literary Criticism (BETL, 110), Leuven, Leuven University Press - Peeters, 1993, pp. 5 4 8 - 5 5 5 . E
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Dès avant 140, vers 120 peut-être, a été réalisée à Smyrne une édition comportant les évangiles, les Actes, des lettres et peut-être l'Apocalypse. Plus précisément: " à une date aussi haute, il existe un groupe d'épîtres précédant le livre des Actes, comme il existe un groupe d'épîtres au début de VApocalypse; ces dernières sont sept, comme sont sept les épîtres d'Ignace; peut-être sont-elles également sept avant les Actes.." . Qu'y avait-il plus précisément dans le groupe de ces épîtres en plus de Je et de 1 P ? Notre auteur propose une hypothèse en se fondant sur le Codex de Bèze. Le manuscrit D comporte en effet une lacune entre les évangiles et les Actes; elle s'ouvre avec la finale de Marc et se clôt par 3 Jn. Pour remplir l'ensemble de la lacune une combinaison plausible serait: Je, 1 P, H e , Ep, 1-3 Jn (p. 331). Dans les restitutions que j e viens de présenter, la part de l'hypothèse est grande, en particulier chez Amphoux, et la discussion ne fait que commencer. Il m e paraît dès lors indiqué de ne pas négliger les indications plus sûres de l'ancienne littérature chrétienne auxquelles on renvoie habituellement dans le débat, et de prendre en compte également les données certaines que fournissent les manuscrits du Nouveau Testament. Je précise explicitement que m o n intérêt se porte sur la constitution du corpus littéraire, et non pas sur sa canonicité, bien q u ' o n ne puisse pas facilement dissocier les deux aspects. 29
Le témoignage
des documents
littéraires
Selon Eusèbe de Césarée, Papias déjà - avec lui nous sommes dans le deuxième quart du deuxième siècle - s'appuyait sur l a "première épître" de Jean et sur la "première épître" de Pierre (HE 111,39,17). Toutefois, à la différence de ce qu'il faisait en rapportant les informations de Papias sur Marc et Matthieu, Eusèbe ne cite pas ici les propos mêmes de l'évêque de Hierapolis. Dès lors on ne peut pas conclure sans plus, en explicitant ce que l'expression d'Eusèbe ( T i p ô i e p a è7CiaiOA,f|) suppose logiquement, que Papias lui-même connaissait d'autres lettres de Jean et de Pierre. Il se peut que l'historien utilise tout simplement la nomenclature de son époque à lui. La m ê m e réserve s'impose pour la notice relative à Polycarpe, utilisateur de "témoignages tirés de la première épître de Pierre" (HE IV,14, 9). e
Vers la fin du 2 siècle, un certain Apollonios, qu'Eusèbe lui-même qualifie de "écrivain ecclésiastique" {HE V,18,l) nous fournit ce qui paraît bien constituer le premier emploi du syntagme "épître c a t h o l i q u e " . 30
2 9 . Voir AMPHOUX, Hypothèses (n. 2 3 ) , p. 3 2 9 . 3 0 . D'après G . BARDY (note sur HE V,18,5, in S C volume 4 1 , p. 5 6 ) ; L . M . MCDO-
NALD, Canon, in MARTIN-DAVIDS (eds.), Dictionary (n. 1), p. 3 8 .
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D'après l'historien (HE V,18,5), Apollonios s'en prend énergiquement à un certain Thémison, coupable d'avoir imité " l ' a p ô t r e " en rédigeant " u n e lettre catholique", à l'adresse non d'un particulier mais d'un ensemble de gens qui sont déjà croyants. Quel apôtre? Le moins invraisemblable est qu'il s'agit de Jean et q u ' o n vise la première épître . L'adjectif "catholique" paraît choisi en fonction de la pluralité des destinataires, concrètement: "toutes les églises de P h r y g i e " . Les dernières années du 2 siècle sont probablement l'apogée de la carrière de Clément d'Alexandrie. Dans ses Hypotyposes il a proposé " d e s exposés résumés de toute l'Écriture (néo-)testamentaire , sans omettre celles qui sont controversées, j e veux dire l'épître de Jude et les autres épîtres catholiques ( m i xàç À,our,<xç KOI6OAAK<XÇ è T u a r a X à ç ) " (Eusèbe, HE VI,14,1). Mais la réserve s'impose à nouveau. Il est certain que Clément connaît un groupe d'épîtres du même genre que celle de Jude. Mais les a-t-il qualifiées lui-même de "catholiques"? Ce n'est pas sûr du tout, dans la mesure où Eusèbe réfère seulement à ce que Clément a fait, et non forcément à la façon dont il désignait les choses. Quant à la composition du groupe des lettres, il vaut mieux s'en tenir aux écrits dont on sait par ailleurs qu'ils ont fait l'objet d'un commentaire de la part de Clément, à savoir: 1 P, Jude, 1 et 2 J n . 31
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Pour le tournant du 2 au 3 siècles le Canon de M u r a t o r i nous fournit de précieuses données qui valent probablement pour l'Église romaine. L'importance du chiffre sept est patente dans le C a n o n en ce qui concerne les lettres pauliniennes: les lettres de Paul, affirme-t-on au 36
31. Voir en ce sens A. WIKENHAUSER - J. SCHMID, Einleitung in das Neue Testament, Fribourg/B, Herder, 1973, p. 563; R.E. BROWN, The Epistles of John (AncB, 30), Garden City, NY, Doubleday, 1982, p. 3. 32. Voir le commentaire de G. Bardy (n. 30). 33. LAGRANGE, Canon (n. 7), p. 90, traduit: "l'écriture canonique". 34. Avec M . DIBELIUS, Der Brief des Jakobus (KEK, 15), Gôttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1964, p. 74, n. 1. - J. CHAÎNE, Les épîtres catholiques. La seconde épître de saint Pierre. Les épîtres de saint Jean. L'épître de saint Jude (EtB), Paris, Gabalda, 1939, p. 5, reconnaissait les mêmes données mais, faisant confiance à Eusèbe, il estimait néanmoins "probable que Clément a commenté II Petr". 35. Les quelques propositions récentes de rajeunir considérablement le document en le situant au 4 siècle (voir pour information TROBISCH, Endredaktion [n. 19], p. 7, n. 7, qui manifeste lui-même de la sympathie pour cette position) n'ont pas ébranlé la position classique. Voir en particulier J.D. KAESTLI, Histoire du canon du Nouveau Testament, in D. MARGUERAT (éd.), Introduction au Nouveau Testament, Genève, Labor et Fides, 2001, pp. 449-474, spéc. 452, T.K. HECKEL, Neuere Arbeiten zum Neutestamentlichen Kanon (I), in TR 68 (2003) 286-312, pp. 304-305, et l'étude extrêmement documentée de J. VERHEYDEN, The Canon Muratori. A Matter of Dispute, in AUWERS-DE JONGE (eds.), Canons (n. 20), pp. 487-556. 36. La mauvaise qualité du latin rend le texte parfois difficile à comprendre. On est heureux de pouvoir se référer à la traduction française de KAESTLI, Histoire du canon du Nouveau Testament (n. 35), pp. 471-473. 6
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prix de quelques contorsions, sont adressées à sept églises mais destinées en réalité à l'unique Église, autrement dit elles sont créditées indirectement de la catholicité. En faisant ce choix Paul a imité Jean qui, "bien qu'il écrive à sept églises (cf. Ap 2 - 3 ) s'adresse cependant à toutes" (lignes 56-59). C o m m e Jean, estime l'auteur du Canon, Paul manifeste, par le choix délibéré d'écrire à sept églises, "l'intention de régir toute la communauté c h r é t i e n n e " . Rien d'explicite n'est dit d'un groupe d'épîtres - non pauliniennes et différentes de celles de l'Apocalypse - qui seraient appelées épîtres catholiques et dont le nombre serait sept. En fait le Canon ne mentionne de manière indubitable que la lettre de Jude (ligne 68) et deux, peut-être trois épîtres de Jean, l'auteur de l'évangile (lignes 27-31 + 68-69), mais il n'est pas invraisemblable que 1 P - voire 2 P - , était bel et bien évoquée dans le document primitif, probablement au début du texte, dans la partie manquante qui devait porter sur Marc, disciple de Pierre. On ne pourra donc pas tirer de conclusions f e r m e s sur le statut des épîtres non pauliniennes dans le Canon, du moins avonsnous pu y relever les éléments qui permettront une appréciation ultérieure du septénaire catholique. 37
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L'interprétation universaliste du chiffre sept est confirmée quelques années plus tard par un propos de Hippolyte (mort en 235) rapporté par Denys d'Amida (Denys bar-Salibi): "Hippolyte dit que Jean écrivant à sept églises a écrit comme Paul, écrivant ses treize épîtres, les a écrites à sept églises", une donnée que Victorin de Pettau reprendra, non sans l'expliciter, dans son Commentaire de l'Apocalypse (vers 260) . Origène , dont l'abondante production couvre la première moitié du 3 siècle, peut désigner par "épître catholique" la lettre de Barnabe (Contre Celse 1,63,9); il utilise le terme apparemment comme une désignation déjà bien établie, pour laquelle en tout cas il ne fournit pas la moindre explication à son opposant. Plus d'une fois il attribue le qualificatif "catholique" à telle ou telle lettre du groupe des sept, 1 P et 1 Jn en particulier mais aussi J u d e . Il est particulièrement à remarquer que 40
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37. LAGRANGE, Canon (n. 7), p. 77.
38. Dans le texte relatif à Jude et à Jean (lignes 68-69) le mot catholica se rapporte probablement à l'Église. 39. Voir l'extrême réserve de VERHEYDEN, Canon (n. 35), pp. 528-530. 40. Voir LAGRANGE, Canon (n. 7), pp. 80-81. - Selon Victorin, Paul a tellement conscience de s'adresser à toute l'Église en écrivant à sept églises qu'il ne dépasse pas ce nombre et choisit d'écrire ses autres lettres à des individus (Philémon, Tite, Timothée). 41. Voir à son sujet le développement substantiel de LAGRANGE, Canon (n. 7), pp. 93103. 42. Pour les références voir J. CHAÎNE, L épître de saint Jacques (ÉtB), Paris, Gabalda, 1927, p. xra, n. 1; R.L. WEBB, Epistles, Catholic, in AncBD, II, p. 569. 2
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dans ses Homélies sur Josué VII, 1 il donne la liste presque complète (l'Apocalypse de Jean manque) des écrits du Nouveau Testament. À côté de la mention des quatre évangiles, des Actes des apôtres et des quatorze lettres de Paul, il fournit les indications suivantes sur les épîtres restantes, dont il ne précise ni le nombre ni la qualité de "catholiques": Pierre est l'auteur de deux lettres, Jacques et Jude d ' u n e ; pour Jean il utilise simplement le pluriel epistolas , mais comme il atteste ailleurs la connaissance des trois lettres de Jean, on arrive bien au corpus complet. Les données principales sur le dossier Origène sont conservées dans Eusèbe. Selon l'historien, Origène relève, en parlant de l'évangile, la dépendance de Marc par rapport à Pierre, et cite à ce propos l'expression " M a r c mon fils" (1 P 5,13) qui, dit-il, se lit "dans l'épître catholique" (HE VI,25,5), et cette m ê m e épître est qualifiée un peu plus loin (HE VI,25,8) de " r e c o n n u e " (ôp,OAX)yoi)névr|v); cette qualité la distingue d'une seconde lettre qui, elle, est "controversée" (à^cpiPdAAexai). Quant à Jean, il a laissé une épître pas bien longue, et deux tout à fait courtes (VI,25,10) qui sont moins sûres. 44
Peu de temps après la mort d'Origène (vers 253), son disciple Denys d'Alexandrie, qui mourut quelque dix ans après le maître, apporte une précision intéressante sur les lettres johanniques. Il en parle dans son argumentation célèbre à propos de l'auteur de l'Apocalypse (HE VII,25). Que cet auteur s'appelle Jean, il ne le conteste pas, mais il ne peut pas admettre, notamment pour ce qui regarde la langue, le style et la disposition, qu'il se confonde avec "l'apôtre, le fils de Zébédée, le frère de Jacques, dont sont l'Évangile intitulé Selon Jean et VÉpître catholique" (HE VII,25,7). Dans la suite de la discussion " l ' é p î t r e " va être mentionnée plusieurs fois, à côté de l'évangile (VII,25,8.18.21.24) ou seule (VII,25,10.21.23), comme une grandeur clairement identifiée et l'adjectif "catholique" est repris (VII,25,10). Il ne peut s'agir que de 1 Jn: non seulement Denys cite ici 1 Jn 1,1 , mais aussitôt après (VII,25,11), il évoque "la seconde et la troisième épîtres", en soulignant leur brièveté mais sans les qualifier autrement. Les trois lettres johanniques constituent manifestement un ensemble identifiable. Nous avons donc affaire à un groupe constitué des trois épîtres johanniques dont on peut admettre, m ê m e si le fait n'est affirmé que pour la première, qu'elles sont toutes les trois "catholiques". Aux yeux de Denys elles devaient faire partie 45
43. Dans la critique d'aujourd'hui on admet largement que Rufin n'a pas altéré les données sur ce point. 44. On peut voir le texte dans LAGRANGE, Canon (n. 7), pp. 94-95, ou dans S C volume 71. 45. Voir en outre VII,25,17-19, où la citation s'étend à Jn 1,1-3.
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d'un corpus plus large, existant à côté de "la Loi et les prophètes" et des "Évangiles", sous le nom de "les lettres des apôtres" (VII,24,5), une désignation qui convient pour les épîtres catholiques, mais qui recouvre probablement aussi les lettres de Paul, mentionnées en VII,25.23. En rapportant l'opinion des autres, Eusèbe a déjà pu y mêler, j e l'ai dit, sa propre façon de voir, ou au moins de dire. Il nous faut à présent mentionner ce qu'il dit en son propre nom. Son témoignage est en effet capital pour la situation qui caractérise la fin du 3 et le premier quart du 4 siècles. Après avoir raconté la carrière et la mort de Jacques en puisant largement à ses sources (Josèphe et Hégésippe), Eusèbe ajoute: "Voilà ce qui se rapporte à Jacques de qui est, dit-on, la première des lettres appelées catholiques. Mais il faut savoir qu'elle n'est pas authentique: un petit nombre des anciens en font mention, c o m m e de l'épître dite de Jude qui est, elle aussi, une des sept épîtres catholiques. Cependant nous savons que ces lettres sont lues publiquement avec les autres dans un très grand nombre d'églises" (HE 11,23,24-25). L'autorité reconnue à ces écrits est sans doute plus forte que ne le laisse supposer la traduction de G. Bardy reproduite. En effet, le verbe ôrinoaieoco employé comme transitif ne signifie pas " l i r e " , mais "rendre public, publier", de sorte qu'il faudrait comprendre la dernière phrase ainsi: "nous savons que ces lettres ont été publiées avec les autres dans un très grand nombre d ' é g l i s e s " . L'historien va revenir sur la question dans sa récapitulation générale sur "les écrits du Nouveau Testament" (HE 111,15,13). Nos lettres y figurent nommément, soit parmi les livres reçus (ainsi e
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1 Jn et 1 P), soit parmi les écrits contestés (Je, Jude, 2 P et les "lettres dites deuxième et troisième de J e a n " ) . Nous avons donc dans ces deux passages complémentaires une affirmation claire et nette sur l'existence d'une collection de lettres non-pauliniennes du Nouveau Testament, identifiées dans le détail selon leur auteur, au nombre de sept, et portant l'épithète "catholiques". Mais l'ambiguïté de ce dernier terme n'est pas encore tout à fait levée. Dans un long développement sur les lettres du Nouveau Testament (HE 111,3,1-7), Eusèbe établit une distinction entre 1 P et 2 P d'une part, et d'autres œuvres attribuées à Pierre d'autre part. Il rapporte d'abord la considération incontestée dont jouit 1 P. Il exprime ensuite son avis sur 2 P, non "testamentaire" ( è v ô i à 0 r | K O v ) à ses yeux, tout en mentionnant que beaucoup la considèrent utile et l'assimilent pour cette raison aux "autres écrits". Enfin il rappelle le jugement négatif qui s'est porté una4 6 . Ainsi AMPHOUX, Hypothèses (n. 2 3 ) , p. 3 3 2 n. 14. - Selon LAGRANGE, Canon (n. 7), p. 108, les sept lettres catholiques sont "reconnues par l'autorité publique" et objet de "publicité officielle".
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nimement sur quatre autres œuvres attribuées à Pierre (Actes, Évangile, Kérygme et Apocalypse de Pierre), un jugement qui explique pourquoi elles n'ont jamais figuré parmi "les catholiques", entendons les écrits ou les livres catholiques. Dans ce contexte "catholique" équivaut donc à notre " c a n o n i q u e " . Mais ailleurs Eusèbe utilise l'adjectif "catholique" en un sens différent. On peut renvoyer pour illustration à sa description circonstanciée de l'activité épistolaire de Denys de Corinthe: "il se rendit très utile à tous par les lettres catholiques qu'il composait pour les églises" (HE IV, 23,1-12). Ce sont certes des lettres adressées à des communautés particulières, mais l'une ou l'autre fois un destinataire plus vaste apparaît à côté de la communauté particulière: "les autres Églises de Crète" à côté de la communauté de Gortyne, les "Églises du P o n t " à côté de la communauté d'Amastris. Après la notice générale relative à ces lettres apostoliques ou pastorales (HE IV,23,12), Eusèbe (IV,23,13) mentionne une lettre adressée à une personne privée. Cela suggère que la mention "catholique" est commandée non par le contenu de la lettre mais par l'identité et la qualité des destinataires, représentants potentiels de toute l'Église. C'est ce sens de l'adjectif, clairement défini par lui, que Léonce de Byzance retiendra au 6 siècle , et les critiques modernes, dans leur majorité, comprennent l'épithète ainsi . Plus conforme au sens fondamental du mot lui-même, cette signification est en outre appuyée, on l'a vu, par l'insistance sur les " s e p t " épîtres. Les épîtres "catholiques" sont potentiellement universelles par leurs destinataires. La caractéristique se vérifie effectivement, mais à des degrés divers, dans le texte de nos épîtres catholiques - à l'exception notable de la 3 Jn - , ainsi que pour l'épître de Barnabe, "catholique" selon Origène. 47
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Au terme de cette rapide enquête, qui a délibérément écarté le dépistage des allusions et citations pour se concentrer sur les mentions explicites des lettres elles-mêmes dans l'ancienne littérature chrétienne, il paraît utile de souligner les variations caractérisant leur groupement avant le triomphe du septénaire. 47. Déjà Origène, d'après le texte d'Eusèbe mentionné précédemment (HE VI,25,5), allait dans ce sens en opposant les deux épîtres de Pierre et en qualifiant la première successivement de "catholique" et de "reconnue". Mais cette interprétation de "catholique" ne se laisse pas vérifier pour l'ensemble des pièces du dossier, car les différences plusieurs fois constatées entre 1 P et 2 P, entre 1 Jn et 2,3 Jn, ainsi que les appréciations négatives portées à l'occasion sur les lettres de Jacques et de Jude n'ont pas d'incidences sur la désignation "épître catholique". 48. Texte cité in D. LÛHRMANN, Gai 2,9 und die katholischen Briefe: Bemerkungen zum Kanon und zur régula fidei, in ZNW 72 (1981) 65-87, p. 66 n. 11. 49. Voir par ex. R.E. BROWN, An Introduction to the New Testament (AncBRL), Garden City, N Y , Doubleday, 1997, p. 7; WEBB, Epistles (n. 42), pp. 569-570.
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Nous sommes tombés sur des apparentements divers, commandés par la prise en compte de l'auteur réel ou présumé (1 et 2 P, 1 Jn et 2-3 Jn) ou par le jugement de valeur porté: plutôt négatif pour les toutes petites épîtres, généralement favorable aux trois grandes (Je, 1 P, 1 Jn), encore que Jacques puisse se trouver occasionnellement dans la mauvaise compagnie d'un Jude coupable de citer un écrit apocryphe. Pour illustration il peut être utile de récapituler les points essentiels du développement en faisant abstraction de la situation particulière de l'église syriaque, dans laquelle les épîtres catholiques n'ont acquis droit de cité que tardivement . Les premiers écrits valorisés, du simple fait qu'ils sont seuls mentionnés, furent 1 P et 1 Jn (Papias), ce que confirme Origène de manière plus appuyée (Eusèbe, HE VI,25,5.10). En Orient la lettre de Jacques y fut bientôt ajoutée. Avec la mention de Jude en lien avec les autres épîtres catholiques (mais lesquelles?), mention qui caractérise la liste de Clément d'Alexandrie, le groupe s'est élargi. Pour R o m e nous avons l'équivalent dans le Canon de Muratori et, si nous admettons que 1 P en a disparu accidentellement, nous pouvons compter avec un groupe de cinq (1 P, Jude et 1-3 Jn). Un autre groupe de cinq apparaît dans la liste stichométrique appelée traditionnellement Canon de Mommsen, et qui nous renseigne pour l'Église d'Afrique à une date peut-être assez h a u t e : trois lettres de Jean et deux de Pierre. 50
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Le septénaire apparaît explicitement au cours du 4 siècle, la première expression nette en est celle de Eusèbe lui-même, mais Eusèbe ne donne pas l'impression d'innover. La variation affecte aussi l'ordre dans lequel les livres sont reproduits. Dans sa liste la plus complète (HE 111,25) l'ordre suivi par Eusèbe ne peut guère être restitué avec sûreté , mais il devient ferme, pour ce qui concerne la Palestine et l'Egypte, dès Cyrille de Jérusalem: les auteurs sont mentionnés dans l'ordre suivant: Jacques, Pierre, Jean, Jude, et le groupe est placé après les Actes et les lettres de Paul. Cet ordre, qui est aussi celui d'Athanase se confortera dans l'Église d'Orient. Pour ce qui est du septénaire lui-même, l'Église d'Occident atteste les mêmes com52
5 0 . Je m'inspire de H. LIETZMANN, Wie wurden die Bûcher des Neuen Testaments heilige Schrift?, in ID., Kleine Schriften II, Berlin, Akademie-Verlag, 1958, pp. 15-98, spéc. 8 4 - 9 2 .
5 1 . LAGRANGE, Canon (n. 7 ) , p. 8 7 : "postérieur à Saint-Cyprien, mais peut-être pas de beaucoup". - Selon AMPHOUX-BOUHOT (eds.), Lecture liturgique et critique textuelle (n. 3 ) , p. 2 9 0 , la liste serait à situer vers 2 6 0 . Pour plus de détails sur cette liste voir P. BOGAERT, Aux origines de la fixation du canon. Scriptoria, listes et titres. Le Vaticanus et la stichométrie de Mommsen, in AUWERS-DE JONGE (eds.), Canons (n. 2 0 ) , pp. 1 5 3 - 1 7 6 . 5 2 . Contre LIETZMANN, Bûcher (n. 5 0 ) , p. 8 9 .
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posantes, mais elle se montre plus libre quand il s'agit de l'ordre: Jérôme se conforme à celui des Orientaux, mais Augustin propose: Pierre, Jean, Jude, Jacques, tandis que la liste du Claramontanus commence aussi par Pierre mais enchaîne par Jacques, Jean et J u d e . 53
Le témoignage
des
manuscrits
Du point de vue de l'attestation matérielle des groupements, la tradition manuscrite fournit des indications utiles . Le P (date: 3 7 4 s.) contient Jude et les deux épîtres de Pierre. Ces épîtres sont mêlées à deux psaumes canoniques et à d'autres œuvres, non scripturaires (par exemple l'homélie pascale de Méliton de Sardes). Ce sont les seuls livres néotestamentaires du papyrus; ils ne se suivent pas dans le texte et ne sont pas dans l'ordre habituel: Jude est mentionné en premier, et la lettre n'est pas associée au petit groupe 1+2 P. 54
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Les grands onciaux du quatrième (Sinaiticus et Vaticanus) et du cinquième siècle (Alexandrinus) attestent la consistance du groupe des épîtres catholiques en reproduisant les lettres dans un ordre uniforme (Je, 1-2 P, 1-3 Jn, Jude) et en les associant aux Actes des Apôtres pour former le corpus appelé Praxapostolos et présenté comme une collection bien identifiée par une subscriptio placée dans Y Alexandrinus à la fin de J u d e . La variation entre ces témoins ne concerne que la place respective du corpus paulinien et du Praxapostolos: dans le Vaticanus et dans Y Alexandrinus, le Praxapostolos suit directement les évangiles et précède le corpus paulinien, dans le Sinaiticus il est précédé du corpus paulinien . Dans le P ( 7 siècle) nous avons une bonne attestation du 56
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53. Voir ibid., pp. 90-91. - D. TROBISCH, Die Entstehung der Paulusbrief Sammlung (NTOA, 10), Fribourg/S, Universitätsverlag; Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1989, p. 41, attire l'attention sur le caractère inhabituel de Tordre proposé dans cette liste, un trait qui se vérifie d'ailleurs aussi pour les évangiles (Mt, Jn, Me, Le). 54. Pour les Actes des apôtres voir J. SCHRÖTER, Die Apostelgeschichte und die Entstehung des neutestamentlichen Kanons. Beobachtungen zur Kanonisierung der Apostelgeschichte und ihrer Bedeutung als kanonischer Schrift, in AUWERS-DE JONGE (eds.), Canons (n. 20), pp. 395-429, spéc. 412-414. 55. Voir TROBISCH, Endredaktion (n. 19), p. 49. 56. Selon TROBISCH, Endredaktion (n. 19), p. 39 n. 79, on ne peut guère s'appuyer sur le Codex Ephraemi Rescriptus (C 04) en raison de son mauvais état de conservation. Ce n'est pas l'avis de AMPHOUX-BOUHOT (eds.), Lecture liturgique et critique textuelle (n. 3), pp. 288-289: selon eux la fameuse lacune comportait les épîtres catholiques et quelque chose en plus. Sur la base de leçons particulières qu'on trouve déjà chez des auteurs du deuxième siècle, ils estiment aussi qu'un "modèle grec du Codex de Bèze existait avant 140, date à partir de laquelle il est en usage à Rome". 57. Déjà CHAÎNE, Jacques (n. 42), p. xrv, notait la conformité de cet ordre avec "la nomenclature des 'colonnes'" en Gai 2,9. Voir dans le même sens LÜHRMANN, Gai 2,9 (n. 48), p. 71, et d'autres. 58. Voir TROBISCH, Endredaktion (n. 19), p. 52. 59. Ibid., pp. 38-41.
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LE CORPUS DES ÉPÎTRES CATHOLIQUES
Praxapostolos', les épîtres catholiques y sont toutes présentes dans l'ordre traditionnel et avec une quantité significative de leur texte. Mais l'existence du Praxapostolos peut être établie implicitement dès lors que la succession des Actes des apôtres et de la lettre de Jacques est assur é e . D e s manuscrits en nombre significatif comportent seulement le Praxapostolos , mais le groupe se trouve aussi dans des manuscrits plus riches qui attestent en m ê m e temps la place du Praxapostolos devant le corpus paulinien . En concentrant son attention sur les manuscrits les plus anciens, jusqu'au 7 siècle inclus, dans lesquels la disposition des divers écrits est discernable, D. T r o b i s c h est arrivé à la conclusion que, à quelques exceptions explicables près, le groupement des Actes avec les épîtres catholiques était la règle. C o m m e les manuscrits majeurs du 4 - 5 siècles, qui ont déjà ce groupement, ne dépendent pas l ' u n de l'autre, leur accord renvoie à un archétype probablement bien plus ancien. M ê m e si l'on reste hésitant devant la thèse d'ensemble de Trobisch, à savoir l'existence d'une véritable édition de la Bible chrétienne dès la fin du 2 siècle , le résultat de sa démonstration pour la question particulière qui nous retient ici paraît solide. Il se peut même que les débats qui se font jour dans la tradition à partir de la deuxième moitié du 2 siècle à propos de la canonicité de tel ou tel écrit du groupe des catholiques soient effectivement à comprendre comme u n e réaction devant ce qui existait déjà . 60
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L'HOMOGÉNÉITÉ DU CORPUS
Des hommes nommés Jacques, Pierre et Jude, un auteur identifié par sa fonction de presbytre, un autre qui ne sort pas du flou puisqu'il dit e
60. Tel est le cas du manuscrit 0166, datant du 5 siècle et comportant Ac 28,30-31 au verso et Je 1,11 dans la deuxième colonne du recto. Voir TROBISCH, Endredaktion (n. 19), p. 48. 61. Voir K. ALAND - B. ALAND, Der Text des Neuen Testaments. Einführung in die wissenschaftlichen Ausgaben sowie in Theorie und Praxis der modernen Textgeschichte, Stuttgart, Deutsche Bibelgesellschaft, 1982, p. 91. 62. Voir par exemple les minuscules 5, 1838, 2127 (TROBISCH, Paulusbrief Sammlung [n. 53], pp. 15-16). 63. Endredaktion (n. 19), pp. 43-58. Dans le même sens voir M. REISER, Sprache und literarische Formen des Neuen Testaments. Eine Einführung (UTB für Wissenschaft, 2197), Paderborn, Schöningh, 2001, p. 92, n. 1. 64. Mon jugement personnel coïncide avec celui de T. SÖDING, Der Kanon des Alten und Neuen Testaments. Zur Frage nach seinem theologischen Anspruch, in AUWERS-DE JONGE (eds.), Canons (n. 20), pp. XLvn-LXXXvm, p. LVLLL n. 44: la thèse centrale n'est pas prouvée, mais des arguments et des observations particulières sont d'un grand intérêt. Comme on l'a vu, THEISSEN, Religion (n. 13), pp. 366-367, arrive à une position similaire à celle de Trobisch, mais à partir de l'histoire du canon. 65. TROBISCH, Endredaktion (n. 19), pp. 55, 57.
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tantôt " j e " et tantôt " n o u s " , voilà des indications qui préparent manifestement le lecteur à aborder les épîtres catholiques selon la singularité de chacune d'elles, et telle est assurément la première tâche de l'exégète . À y regarder de plus près, pourtant, on croit pouvoir déceler aussi des éléments communs qui porteraient à penser que le regroupement de ces lettres ne constitue pas un amalgame hybride, un simple fruit du hasard. Prenons d'abord en compte quelques traits de détail, dans la ligne de ce qu'avait constaté Jérôme dans sa lettre à P a u l i n avant de nous arrêter plus longuement à d'éventuels thèmes communs qui mettraient en relief l'importance de la tradition. 66
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Des indices divers et épars A. Jülicher soulignait avec un bel optimisme que l'Église avait manifesté un instinct très sûr en regroupant les sept lettres , et il fournissait un certain nombre d'observations pour justifier ce jugement non conventionnel. D'autres ont enrichi le dossier . Par rapport à Paul qui se préoccupe de la fondation de la maison, les épîtres catholiques sont plus soucieuses d'en organiser l'achèvement et doivent répondre à des communautés soumises déjà à l'épreuve du temps et à de fortes pressions. Du point de vue de la réception, les lettres de Paul sont désignées dans les subscriptiones des manuscrits selon leurs destinataires tandis que les inscriptiones des lettres catholiques nomment l'auteur. C o m m e j e l'ai noté moi-même dans la discussion sur le sens de "catholique" et à propos de " s e p t " les destinataires des épîtres sont potentiellement les membres de l'Église universelle . Bien entendu, cette appréciation est rétrospective et doit être fortement nuancée quand on la confronte à la réalité des textes. La troisième lettre de Jean, qui est une lettre privée, ne doit sa présence dans le groupe q u ' à sa parenté avec 1 et 2 Jn; elle n ' a rien de "catholique" en elle-même. Les destinataires de 1 P sont éventuellement à réduire aux communautés des régions du 68
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66. R. Webb y insiste avec raison dans AncBD II, p. 570. - La vigilance est nécessaire en particulier quand il s'agit de Jude et de 2 P (voir R.J. BAUCKHAM, 2 Peter: An Account of Research, in ANRW II.25.5 [1988], p. 3716). 67. Voir ci-dessus p. 3. 68. A . JÜLICHER - E. FASCHER, Einleitung in das Neue Testament, Tübingen, Mohr, 1931,p. 188. 69. Voir en particulier les notations intéressantes de H. BALZ, Die "katholischen" Briefe, in H. BALZ - W. SCHRÄGE, Die "Katholischen" Briefe. Die Briefe des Jakobus, Petrus, Johannes und Judas (NTD, 10), Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1973, pp. 1-4. 70. En déclarant que Paul "vous a écrit" (2 P 3,16), l'auteur de 2 P transforme pratiquement les lettres pauliniennes elles-mêmes en épîtres catholiques. 7
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nord, non des provinces romaines. En 2 P et Jude on note des tensions entre le caractère assez circonstanciel des développements relatifs aux ennemis de la tradition ou aux négateurs de la parousie et l'imprécision des adresses. Mais, à des degrés divers et avec une intensité variable, les lettres de Jacques, Jude, Pierre et les deux premières des épîtres johanniques se donnent comme destinataires des ensembles vastes et ouverts . Pour les lettres non johanniques, les connexions entre elles que nous avons relevées plus haut (le renvoi de 2 P à 1 P, l'identification de Jude comme "frère de Jacques") invitent à diviser les quatre lettres concernées en deux paires, composées chacune d'un écrit de référence et d'une lettre complémentaire . Par ailleurs la "personnalité" des trois auteurs principaux est à mettre en lien avec les " c o l o n n e s " mentionnées en Ga 2,9 et avec la répartition missionnaire en deux groupes, Paul et Barnabas d'un côté, Jacques, Pierre, et Jean de l'autre. Ce n'est peut-être pas un hasard, on l'a vu, si les six lettres provenant de ce trio apparaissent habituellement dans un ordre conforme à l'énumération des autorités de Jérusalem en Ga 2,9: Jacques, Pierre et Jean, et la " c o m m u n i o n " conjurée dans ce texte est en harmonie avec l'image positive de Paul que divers traits laissent deviner. En est le meilleur signe l'héritage paulinien, certes discuté dans son extension mais non contestable dans son existence même, présent en 1 P. L'image positive de Paul ne peut être évacuée de l'éloge que l'auteur de 2 P fait de lui en l'appelant "notre frère bien-aimé" et comblé de " s a g e s s e " (2 P 3,15-16) . L'épître de Jacques n'est probablement pas à dissocier de ce mouvement dans la mesure où son développement à propos des œuvres (Je 2,14-26) peut être lu non pas comme une contestation du point de vue paulinien, mais comme un complément nécessaire venant d'un "colleague whose new perspective adds and even supplies a necessary balance to what has already been read and accepted from P a u l " . Les quatre auteurs indiqués ou supposés sont des membres éminents de l'Église-mère: les apô71
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7 1 . Voir en particulier P. VIELHAUER, Geschichte der urchristlichen Literatur. Einleitung in das Neue Testament, die Apokryphen und die Apostolischen Väter (de Gruyter Lehrbuch), Berlin, de Gruyter, 1 9 7 5 , pp. 4 6 2 - 4 6 3 , spéc. 4 7 6 , 5 7 0 , 5 8 1 , 5 9 0 , 5 9 5 . 7 2 . Voir J.R. MICHAELS, 1 Peter (WBC, 4 9 ) , Waco, TX, Word Books, 1 9 8 8 , p. XLVII.
7 3 . P. MÜLLER, Der 2. Petrusbrief, in TR 6 6 ( 2 0 0 1 ) 3 1 0 - 3 3 7 , insiste avec raison sur ce point (voir pp. 3 2 2 , 3 2 6 , 3 3 0 , 3 3 1 , 3 3 5 ) . Mais voir déjà A. LINDEMANN, Paulus im ältesten Christentum. Das Bild des Apostels und die Rezeption der paulinischen Theologie in der frühchristlichen Literatur bis Marcion (BHT, 5 8 ) , Tübingen, Mohr, 1979, pp. 9 1 - 9 7 ; R.J. BAUCKHAM, Jude, 2 Peter (WBC, 5 0 ) , Waco, TX, Word Books, 1983, p. 3 3 2 . - E. DASSMANN, Der Stachel im Fleisch. Paulus in der frühchristlichen Literatur bis Irenaus, Münster, Aschendorff, 1979, pp. 1 1 8 - 1 2 5 , est plus réservé sur ce point. 7 4 . R.W. WALL, James, letter of, in MARTIN-DAVIDS (eds.), Dictionary (n. 1), p. 5 5 5 .
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très Pierre et Jean, mis en relief dans les évangiles et dans les Actes des apôtres, Jacques et Jude connus comme frères du Seigneur. J'hésite pourtant à suivre J.R. Michaels quand il tente de dégager à partir de là certaines caractéristiques communes telles que le genre littéraire de "la lettre de diaspora" et les destinataires judéo-chrétiens. Le caractère épistolaire des lettres catholiques, dans la mesure où il s'affiche, paraît assez artificiel. Certes, ces écrits ont tous l'une ou l'autre caractéristique de la lettre: une adresse plus ou moins complète (Je 1,1; 1 P 1,1-2; 2 P 1,1-2; 2 Jn 1-3; 3 Jn 1; Jude 1-2), des traits qui conviennent à la clôture, à savoir: les précisions sur l'écriture et/ou sur l'acheminement de la lettre (1 P 5,12); les indications sur les dispositions de l'auteur (2 Jn 12; 3 Jn 13-14); des salutations rapportées (1 P 5,13); une salutation finale de l'auteur (1 P 5,14b; 2 P 3,18; 2 Jn 13; 3 Jn 15). Mais la plupart d'entre elles ne donnent pas l'impression d'être tout à fait de vraies lettres, adressées à des destinataires concrets sur des questions concrètes. On est en fait plus proche tantôt du testament, tantôt de l'homélie ou du discours parénétique, à en juger par le caractère presque oral de la communication, la passion de convaincre, l'accumulation des mises en garde et des encouragements ainsi que l'usage fréquent de l'Écriture . On peut penser que le genre épistolaire de la lettre n'aurait sans doute pas été choisi par les différents auteurs si le modèle de la correspondance paulinienne n'avait pas servi d'amorce. 75
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Le triomphe de la tradition Dans l'histoire du christianisme primitif, le passage progressif de l'oral à l'écrit, qui s'opère à la fin de la génération apostolique, marque incontestablement une césure importante . En effet, la mise par écrit de la tradition des origines aboutit à des œuvres littéraires qui ne sont plus destinées seulement, comme l'étaient les lettres de Paul, à quelque communauté vivant dans un lieu particulier, mais qui s'ouvrent sur un horizon plus large et, du même coup, entendent proposer une tradition désormais stable . Plus précisément, dans les écrits couramment attribués à la fin du premier siècle, ou au début du deuxième, on observe un mouve77
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MICHAELS, 1 Peter (n. 7 2 ) pp. XLVII-XLIX.
7 6 . A. SACCHI, in A. SACCHI et al., Lettere paoline et altre lettere (Logos. Corso di Studi Biblici, 6 ) , Torino, Elle Di Ci, 1996, p. 2 3 5 . 7 7 . Voir J. BECKER, Das Urchristentum als gegliederte Epoche (SBS, 155), Stuttgart, Katholisches Bibelwerk, 1 9 8 3 , pp. 1 1 1 - 1 1 9 . 7 8 . Selon l'hypothèse de TROBISCH, Paulusbriefsammlung (n. 5 3 ) , pp. 1 2 8 - 1 3 2 , cette visée serait déjà déterminante dans la rédaction et la collection des lettres de Paul, un processus qui aurait commencé du vivant même de l'apôtre et à son initiative.
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ment "vers la fixation d'une 'règle de v é r i t é ' " . La tradition y est moins perçue comme l'acte de transmettre que comme ce qui fait l'objet de cet acte, car l'accent porte sur un contenu garanti et à présent solidement fixé . Encore faut-il ne pas oublier le processus m ê m e de la transmission, tel que l'évoque avec précision 2 T m 2,2 en présentant la chaîne qui commence avec Paul et qui, passant par Timothée et des hommes de confiance sélectionnés par lui, aboutit à l'instruction dont vont bénéficier d'autres. Au terme, il s'agit de recevoir l'enseignement, de l'apprendre et de s'y tenir, comme l'exprime de manière forte 2 T m 3,14: "toi, demeure dans ce que tu as appris et accepté comme c e r t a i n " . Dans un cadre d'ensemble de ce genre on aime bien se référer aux origines de la communauté (Col 1,7) ; par ailleurs les agents et les gardiens de la tradition sont volontiers présentés comme des modèles (xo7COi) qu'il est recommandé d'imiter (1 T m 4,12; Tt 2,7; 2 Th 3,7.9; He 13,7). Vive apparaît la conscience du lien constitutif entre la fidélité à la tradition et la consistance de la communauté. On décèle aussi la tendance à une certaine continuité dans la l a n g u e , une tendance qui, dans les Pastorales, se manifeste aussi bien par la reprise de formulations typiques de Paul, que dans l'emprunt de fragments kérygmatiques ou h y m n i q u e s . Après avoir mesuré l'écart entre la position des anges et celle du Fils, l'auteur de l'épître aux Hébreux souligne l'impérieuse nécessité de s'attacher "aux choses entendues" (2,1), car les croyants se trouvent à l'aboutissement d'un mouvement qui commence par la parole même du Seigneur et qui est doublement garanti: par la confirmation venue des auditeurs directs du Seigneur et par le témoignage conjoint de Dieu luim ê m e (He 2,1-4). L'auteur souligne avec insistance le rôle des dirigeants: ceux du passé, qui "vous ont dit la parole de D i e u " , et dont il faut imiter la foi (He 13,7), mais aussi les responsables actuels, chargés de "veiller sur vos â m e s " et auxquels il convient d'obéir (13,17). Dans le corpus des épîtres catholiques des traits analogues et des accents similaires se laissent découvrir. Inégalement répartis et d'une densité variable dans les divers écrits, dont il faut assurément respecter à 80
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79. E. COTHENET, La tradition selon Jude et 2 Pierre, in NTS 35 (1989) 407-420, p. 408. 80. Voir pour l'ensemble de la question P.G. MÜLLER, Der Traditionsprozess im Neuen Testament, Fribourg/B, Herder, 1982. 81. Voir aussi Rm 16,17; Col 1,7; 2,7; Ep 4,20-21. 82. Constatons toutefois que le motif de Varche n'est pas présent dans les Pastorales. 83. MÜLLER, Traditionsprozess (n. 80), p. 252: "rezeptive Sprachkontinuität". 84. Voir pour illustration J. SCHMITT, Didascalie ecclésiale et tradition apostolique selon les Epîtres pastorales, in ACan 23 (1979) 45-57 (on rendra à l'auteur son prénom: non pas Jean mais Joseph).
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chaque fois la marque originale, ils constituent néanmoins, j ' e s p è r e pouvoir le montrer, une sorte de réseau. Je tente de regrouper ces aspects selon un point de vue thématique.
L'IMPORTANCE DES ORIGINES
Les derniers écrits du Nouveau Testament, je l'ai noté en passant, jettent volontiers un regard en arrière sur les temps des débuts, et y voient une période d'innocence et de paix que la morsure des divisions et des hérésies n ' a pas encore touchée , alors que le présent en est fort affecté. Il est indiqué, dès lors, de suivre le conseil de Polycarpe (Aux Philippiens 7,2): la meilleure façon de ne pas devenir la proie des "fausses doctrines" est de revenir " à l'enseignement qui nous a été transmis dès le commencement", étant entendu que l'hérésie est du côté des nouveautés dont il convient de se méfier . Le motif du commencement fondateur, dont Luc fournit l'exemple sans doute le plus connu (Le 1,1 - 4 ) , revient à plusieurs reprises dans les épîtres catholiques. 85
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Le prologue de 1 Jn s'inspire manifestement de celui de l'évangile. L'auteur a notamment puisé dans ce dernier le terme àpxr|, mais, tout en le reprenant, il en a en même temps transformé le sens. En effet, s'il est difficile de préciser à quoi se réfère exactement le " c o m m e n c e m e n t " en 1 Jn 1,1 - au ministère de Jésus comme en Le 1,2 et en Jn 15,27, ou alors à la prédication de l'évangile par les missionnaires comme en Ph 4,15 - la différence avec le "commencement" absolu de Jn 1,1 n'est pas contestable: il est question maintenant "du commencement de la révélation christologique et non plus du commencement dès avant la fondation du monde; par ailleurs le logos n'est plus une personne mais un mess a g e " . L'expression àn àp%f\q est reprise à l'identique et avec insistance (elle est doublée) en 1 Jn 2 , 2 4 . Elle conserve sa valeur fondamentale et désigne à nouveau "la tradition légitimée par ses o r i g i n e s " , 88
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8 5 . Tel est le constat de départ établi par E. KÄSEMANN, Eine Apologie der urchristlichen Eschatologie, in ID., Theologische Versuche und Besinnungen. Erster und zweiter Band, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1964, pp. 135-157, spec. 1 3 5 - 1 3 6 . 8 6 . Voir pour illustration 1 Clément 30,1 et 4 2 , 5 . 8 7 . Voir G. SCHNEIDER, Tradition, Kontinuität und Sukzession in der Sicht der Apostelgeschichte, in K. BACKHAUS - F.G. UNTERGASSMAIR (eds.), Schrift und Tradition. Festschrift für JosefErnst zum 70. Geburtstag, Paderborn, Schöningh, 1996, pp. 2 9 3 - 3 1 3 . 8 8 . J. ZUMSTEIN, in MARGUERAT (ed.), Introduction au Nouveau Testament (n. 3 5 ) , p. 3 7 6 . 8 9 . Voir aussi 2 , 7 ; 3 , 1 1 et 2 Jn 6. 9 0 . F. VOUGA, La réception de la théologie johannique dans les épîtres, in J.D. KAESTLI - J.M. POFFET - J. ZUMSTEIN (eds.), La communauté johannique et son histoire (Le Monde de la Bible), Genève, Labor et Fides, 1990, pp. 2 8 3 - 3 0 2 , spéc. 2 8 6 .
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mais cette fois la référence à la prédication qui a donné naissance à la communauté est claire. En effet, la monition énoncée ici vise manifestement la fidélité au message reçu "au commencement", autrement dit, nous sommes en plein dans la problématique de la tradition: en devenant chrétien, chacun a reçu l'héritage de la foi, un bien qui est commandé par l'événement du Christ et transmis par les porteurs de la tradition . Du point de vue de son contenu, de ses matériaux, notre épître s'enracine dans une tradition johannique bien ferme, présente dans l'évangile, et partiellement exprimée dans de véritables formules. L'auteur de l'épître s'y appuie pour en opérer en quelque sorte un recadrage, un renforcement de l'orthodoxie face aux interprétations qui ont abouti à des dérives de type schismatique . L'appel à la mémoire joue évidemment un rôle dans ce retour vers les d é b u t s , comme l'attestent de manière nette plusieurs écrits tardifs du Nouveau Testament , en se référant largement au genre testamentaire Les exemples historiques, surtout utilisées quand il s'agit de mettre en garde les gens auxquels on s'adresse, ne servent pas s'ils sont oubliés, et le rappel fait par Jude 5 est à cet égard sans grande portée. Quand l'objet du souvenir est constitué par les paroles prophétiques des apôtres qui annoncent la venue des moqueurs (Jude 17-18) le motif a plus d'importance, même s'il n'est pas encore directement centré sur la tradition. Dans sa reprise de Jude 17, Pierre, l'auteur de "l'épître de l'orthodox i e " , franchit le pas en associant au groupe des apôtres ("vos apôtres") celui des "saints prophètes" (2 P 3 , 2 ) et en généralisant le propos. On reviendra sur ce dernier point. 91
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91. H.J. KLAUCK, Der erste Johannesbrief (EKK, 23/1), Zurich, Benziger; Neukirchen-Vluyn, Neukirchener Verlag, 1991, p. 165. 92. Voir J. ZUMSTEIN, La naissance de la notion d'Écriture dans la littérature johannique, in AUWERS-DE JONGE (eds.), Canons (n. 20), pp. 371-394, spéc. 381-386. 93. Ce trait n'est assurément pas une nouveauté absolue; il faut rappeler en particulier le rôle de la mémoire chez Paul. Voir R. BURNET, L'anamnèse: structure fondamentale de la lettre paulinienne, in NTS 49 (2003) 57-69. 94. Le fait a été noté par les commentateurs, par exemple O. KNOCH, Der Erste und Zweite Petrusbrief. Der Judasbrief (RNT), Regensburg, Pustet, 1990, p. 249; A . VÔGTLE, Der Judasbrief. Der zweite Petrusbrief ( E K K , 22), Zurich, Benziger; Neukirchen-Vluyn, Neukirchener Verlag, 1994, pp. 35-36. Voir aussi J.D. KAESTLI, Mémoire et pseudépigraphie dans le christianisme de l'âge post-apostolique, in RTP 125 (1993) 41-64. 95. Voir par exemple GRELOT, Tradition apostolique (n. 12), pp. 76-78; BAUCKHAM, Jude. 2 Peter (n. 73), pp. 131-134, et surtout l'excursus de KNOCH, 1. und 2. Petrusbrief, Judasbrief (n. 94), pp. 251-254. 96. C. SPICQ, Les épîtres de saint Pierre (SB), Paris, Gabalda, 1966, p. 200. 97. Le rapprochement des deux groupes considérés dans leur globalité est un trait typique de l'ère post-apostolique (voir VÔGTLE, Judasbrief. 2.Petrusbrief [n. 94], p. 215). Voir en particulier la quasi fusion des deux catégories dans la désignation de Polycarpe comme "didascale apostolique et prophétique" (MPol 16,2)!
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Conformément au genre testamentaire qui caractérise le p a s s a g e , Pierre même prend la parole à la première personne en 1,12-15. Ce " j e " embraye évidemment sur la présentation de l'auteur de la lettre (1,1), "Syméon Pierre serviteur et apôtre de Jésus Christ", et inculque aux lecteurs l'idée que le chef des Douze est la source de l'enseignement qui va leur être dispensé dans la lettre. Dans son propos en " j e " l'importance de la mémoire est centrale, tout simplement parce que la vérité a été établie dans le passé et conditionne l'avenir . Le retour vers le passé s'opère soit sous la forme transitive du rappel, dont Pierre, tant qu'il est en vie (vv. 12.13), prend l'initiative, soit sous la forme intransitive du souvenir. Comment l'accès aux origines sera-t-il possible au temps où Pierre ne sera plus là pour rappeler? L'auteur ne pense sans doute pas à la succession apostolique , mais à la mise à disposition définitive et garantie de la tradition à travers l ' é c r i t , plus concrètement: à travers la lettre que les destinataires ont en leur possession (v. 15) comme "permanent reminder of his t e a c h i n g " . L'enjeu déterminant est la vérité (v. 12), et, comme le suggère le démonstratif du v. 12 ("au sujet de ces choses"), la communication première de cette vérité est probablement à mettre en relation avec "l'appel et l'élection" (1,10) liés à l'entrée en christianisme. S'inscrivant dans une culture qui met l'accent sur la supériorité du p a s s é , la réminiscence assure une efficacité durable à la vérité des d é b u t s , elle permet de "la mettre en jeu dans les difficultés actuelles qu'affronte la c o m m u n a u t é " . 99
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Bien qu'il y soit traité plus discrètement et sans référence à des adversaires qui menacent d'altérer la vérité, le retour vers le passé de l'évangélisation n'est pas absent de 1 P et de l'épître de Jacques. À première vue le fait n'est pas significatif puisque Paul lui-même ne manque pas de faire mention des débuts. La situation est pourtant différente, car Paul, 98. Le trait est généralement reconnu. Voir par exemple GRELOT, Tradition apostolique (n. 12), p. 88; BAUCKHAM, Account (n. 66), p. 3734; ID., Jude. 2 Peter (n. 73), pp. 194-203; N . CASALINI, Lettere cattoliche. Apocalisse di Giovanni. Introduzione storica, letteraria, rhetorica (SBFA, 58), Jerusalem, Franciscan Printing Press, 2002, pp. 152-154. 99. Voir les pages très denses consacrées à la théologie de l'épître par H. PAULSEN, Der Zweite Petrusbrief und der Judasbrief (KEK, 12/2), Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1992, pp. 100-103. 100. Voir pourtant en ce sens CASALINI, Letter e cattoliche (n. 98), p. 161. 101. Voir avant tout A. VÖGTLE, Die Schriflwerdung der apostolischen Paradosis nach 2. Petr 1,12-15, in ID., Offenbarungsgeschehen und Wirkungsgeschichte. Neutestamentliche Beiträge, Fribourg/B, Herder, 1985, pp. 297-304. 102. BAUCKHAM, Jude. 2 Peter (n. 73), p. 195 (italiques dans l'original). 103. J.H. NEYREY, 2 Peter, Jude. A New Translation with Introduction and Commentary (AncB, 37C), Garden City, N Y , Doubleday, 1993, pp. 166-167. 104. Avec PAULSEN, 2. Petrusbrief, Judasbrief (n. 99), p. 114. 105. KAESTLI, Mémoire (n. 94), p. 51.
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quelques années seulement après la fondation des communautés, fait état de circonstances précises en fonction des destinataires concrets de ses lettres, tandis que la lettre de Pierre et celle de Jacques, on l'a dit, s'adressent à des destinataires beaucoup plus vagues et généraux. L ' é v o cation des débuts a dès lors une portée plus abstraite et relève pour ainsi dire d'un principe. Pour 1 P le court développement de 1,22-25 apparaît pertinent. Au v. 25 le À,ôyoç ou f)f\\ia de Dieu est identifié formellement à l'évangile, c'est-à-dire au message chrétien portant sur le Christ, plus précisément à la proclamation de ce message effectuée dans le passé des lecteurs et qui a entraîné la "décision f o n d a m e n t a l e " de leur conversion. Quant aux deux participes parfaits, "sanctifiés" et "régénérés" (vv. 22.23), ils précisent non seulement l'efficacité permanente de la parole de Dieu mais aussi son impact originaire dans la vie des destinataires en lien avec la prédication missionnaire et, éventuellement, avec le b a p t ê m e . En ce qui concerne l'épître de Jacques, plusieurs traits invitent à rapprocher du passage pétrinien évoqué à l'instant et d'une large tradition chrétienne le petit développement de Je 1,19-21 sur la parole implantée . À la lumière de ces parallèles, mais aussi du contexte immédiat qui évoque l'engendrement divin par le biais de la "parole de vérité" ( 1 , 1 8 ) , l'expression ô ëncpuxoç Xôyoç (1,21), discutée dans son sens, doit probablement être comprise en référence à la terminologie de la conversion , voire au b a p t ê m e . L'expression désigne donc en dernier ressort, non pas la loi i n n é e mais la prédication apostolique que les destinataires ont accueillie quand ils sont devenus chrétiens . 106
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106. KNOCH, 1. und 2. Petrusbrief, Judasbrief (n. 94), p. 55. 107. La prudence s'impose sur ce dernier point. En effet la réalité de référence peut être la régénération, et dans ce cas il n'y a pas lieu de compter avec une allusion au baptême (ainsi par exemple P.J. ACHTEMEIER, 1 Peter. A Commentary on First Peter [Hermeneia]), Minneapolis, MN, Fortress, 1996, p. 139). Mais il peut s'agir aussi de la renaissance liée au baptême (ainsi, de manière particulièrement appuyée, ELLIOTT, 1 Peter [n. 24], pp. 383, 392-393). - Voir dans ce volume la contribution de R. Feldmeier. 108. Voir en particulier KONRADT, Existenz (n. 11), pp. 74-85. 109. Le passage nous retiendra ci-dessous. 110. Avec W. POPKES, Der Brief des Jakobus (THKNT, 14), Leipzig, Evangelische Verlagsanstalt, 2001, pp. 133-134; BURCHARD, Jakobusbrief (n. 24), pp. 82-83. 111. W. SCHRÄGE, Der Jakobusbrief, in BALZ-SCHRAGE, Die "Katholischen" Briefe (n. 69), p. 21; F. MUSSNER, Der Jakobusbrief (KTKm, 13/1), Fribourg/B, Herder, 1967, pp. 101-102. 112. Ainsi CASALINI, Lettere cattoliche (n. 98), pp. 56-58. 113. MÜLLER, Traditionsprozess (n. 80), p. 256-257. - MUSSNER, Jakobusbrief (n. 111), p. 102 et n. 1, propose de référer cette parole à l'ensemble des "vérités de base" de l'enseignement chrétien, qui recouvre aussi bien les questions éthiques que les réalités christologiques et sotériologiques. 2
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LES GARANTS DE LA TRADITION
L'expression reçue " l a tradition apostolique" n'est pas seulement une étiquette commode pour caractériser du point de vue chronologique la première époque du christianisme. Elle implique un jugement de valeur et dit que les apôtres sont les agents et les garants par excellence de la tradition. Ainsi, par exemple, en E p 2,20 le terme "les apôtres" désigne ceux qui, dans les débuts, ont annoncé l'évangile, et qui, pour cette raison, jouissent d'une autorité reconnue. En vertu de cette priorité et de cette autorité, ils représentent pour les chrétiens de la deuxième génération la "norme de la foi d r o i t e " . Derrière la formule "les apôtres et les prophètes" (Ep 2,20; 3,5 et 4,11), " o n perçoit le problème du rapport entre génération apostolique et post-apostolique: le mystère a été révélé 'aux apôtres et prophètes' et c'est donc en référence à eux (à la révélation qu'ils ont reçue) que le dessein et l'agir salvifîque de Dieu est désormais annoncé; l'annonce est inséparable de l'enseignement et du témoignage des apôtres, en qui elle trouve une n o r m e " . 114
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À la manière de ce qui est la règle dans le corpus paulinien, l'auteur de 1 P se présente comme " a p ô t r e " (1,1) et revendique ainsi une haute autorité. Cette dernière s'exprime à travers les nombreux impératifs utilisés dans l'épître, et plus encore par le " j e " de l'auteur qui se manifeste parfois dans le texte par le verbe rcapaKaÀio (2,11; 5 , 1 ; cf 5,12). Dans son ultime prise de parole (5,12), dont les deux verbes, le deuxième surtout qui est hapax du Nouveau Testament (èTupxtpTupéœ), signalent le caractère tout à fait autorisé, l'auteur semble renvoyer à ce qu'il disait à la fin de son prologue (1,10-12), où il évoquait l'évangile "attesté d ' a v a n c e " (7cpo^apTupô|i6VOv) par les prophètes d'autrefois, et annoncé à présent par les porteurs de l'évangile. En somme, Pierre confirme solennellement la vérité de la tradition reçue. L'importance de la tradition dans 1 P se dégage aussi, d ' u n point de vue différent, de l'abondance des matériaux anciens, de type kérygmatique ou hymnique, q u ' o n recense dans l'écrit . 116
Dans 2 P, des traits similaires sont présents, à savoir l'apostolat revendiqué dès l'adresse, le " j e " de l'auteur mis en fort relief (1,12-15; 3,1). 114. L. OBERLINNER, in A. VÔGTLE - L. OBERLINNER, Anpassung oder Widerspruch.
Von der apostolischen zur nachapostolischen Kirche, Fribourg/B, Herder, 1992, pp. 3334. 115. J.N. ALETTI, Bulletin paulinien, in RSR 91 (2003) 273-300, p. 280. 116. Voir E.G. SELWYN, The First Epistle of St. Peter. The Greek Text with Introduction, Notes and Essays, Londres, Macmillan, 1947, en particulier son Essay II, toujours fort utile. Pour un aperçu récent voir ELLIOTT, 1 Peter (n. 24), pp. 30-37. 2
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Mais des particularités plus remarquables y attirent davantage l'attention. En effet, entre le " j e " individuel de l'auteur et le " n o u s " de l'ensemble des chrétiens émerge un groupe restreint, un " n o u s " qui n'est pas de majesté (1,16-19). Plus large que le " n o u s " des témoins directs de la transfiguration (1,18) et peut être aussi que le groupe de "vos apôtres" (3,2), ce "nous a p o s t o l i q u e " semble viser dans l'optique de l'auteur les apôtres en tant que tels, comme groupe identifié, comme grandeur définie et dont l'unité se manifeste par le message commun qu'ils délivrent . Mais, en raison de la dépendance probable de 2 P par rapport à Jude il est indiqué de rappeler surtout les données de Jude 1718. Dans Jude 17-18 se trouve mise en oeuvre la tradition multiforme selon laquelle la proximité des derniers temps sera marquée par l'irruption de forces hostiles aux fidèles et risquant de les troubler gravement. Le trouble que pourraient susciter ces forces se réduit, pourtant, dès lors que leur venue ne constitue en rien une surprise mais se conforme à des prédictions. On le sait, la tradition évangélique attribue volontiers de telles annonces au Christ l u i - m ê m e . Jude en charge les apôtres et il leur donne du même coup un poids considérable. Leur importance s'exprime aussi et surtout à travers la désignation utilisée pour eux: "les apôtres de notre Seigneur Jésus Christ", par quoi il faut probablement entendre les membres du groupe restreint des d o u z e . D'autres textes néotestamentaires font référence aux apôtres comme à un groupe constitué et presque idéalisé (Ac 2,42.43 etc.; Ep 2,20; 3,5), mais jamais on ne trouve ailleurs l'équivalent de la dénomination solennelle "les apôtres de notre Seigneur Jésus Christ", qui met clairement en valeur "l'aspect collégial de la fonction a p o s t o l i q u e " . Plutôt que de référer notre expression à des personnes concrètes, tels les fondateurs immédiats des communaut é s , on y verra une "grandeur dogmatique" se référant à un passé plus lointain , celui des origines de la tradition: " s e souvenir de la parole 117
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117. E. FUCHS - P. REYMOND, La deuxième épître de saint Pierre. L'épttre de saint Jude (CNT, 13B), Neuchâtel, Delachaux & Niestlé, 1980, p. 67; KNOCH, 1. und 2. Petrusbrief, Judasbrief (n. 94), p. 254. 118. Voir en particulier GRELOT, Tradition apostolique (n. 12), pp. 88-91; T. FORNBERG, An Early Church in a Pluralistic Society. A Study of 2 Peter (CB NT, 9), Lund, Gleerup, 1977, p. 18 ("a collective unit preaching a common doctrine"); BAUCKHAM, Jude. 2 Peter (n. 73), pp. 214-215. 119. Voir Me 13,6; 13,22; Mt7,15; 24,11. 120. FUCHS-REYMOND, 2 Pierre. Jude (n. 117), p. 180 n. 2. 121. COTHENET, La tradition (n. 79), p. 414.
122. Voir en ce sens BAUCKHAM, Jude. 2 Peter (n. 73), pp. 103-104; ID., Jude and the Relatives of Jesus in the Early Church, Edimbourg, T&T Clark, 1990, pp. 170-171. Cette interprétation ne rend pas justice à l'exceptionnelle solennité de la désignation. 123. Avec VÔGTLE, Judasbrief. 2.Petrusbrief (n. 94), p. 88.
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des apôtres, c'est demeurer fondé sur la foi transmise une fois pour tout e s " . La perception des apôtres comme corps constitué se poursuivra et se développera chez les Pères apostoliques , et l'autorité des apôtres sera à plusieurs reprises expressément soulignée . La première moitié de 2 P 3,2 est presque certainement, au vu de l'étroite parenté dans la formulation, une reprise de Jude 17, ce que confirme la réapparition du terme rare è|i7iaÏKiai (Jude 18) en 2 P 3,3. Le problème de Pierre est assurément la contestation de la parousie par les hérétiques, et c'est pour défendre la parousie en disqualifiant ses négateurs qu'il en appelle aux prophètes, non mentionnés en Jude 17. Il y associe les apôtres de Jude 17 en les transformant en "vos a p ô t r e s " . Cette retouche contribue pour sa part à la dimension universelle des apôtres dans la mesure où l'on peut comprendre que "tous les apôtres appartiennent à tous les c r o y a n t s " . Il évoque en outre le commandement du Seigneur, une expression qui, du point de vue formel, accentue le "caractère n o r m a t i f " de la tradition apostolique considérée ici avant tout dans ses exigences é t h i q u e s ; bien que les docteurs hérétiques les foulent aux pieds elles jouissent évidemment de la m ê m e autorité que les annonces apocalyptiques. La visée de la relecture pétrinienne est claire: en mettant en parallèle " v o s a p ô t r e s " et "les saints p r o p h è t e s " , et plus encore en associant les apôtres au "Seigneur et sauveur" de façon si imbriquée que l'expression de 2 P 3,2 en devient à peu près intraduisib l e , on valorise globalement les apôtres et la tradition dont ils furent 1 2 4
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124. FUCHS-REYMOND, 2 Pierre. Jude (n. 117), p. 180. 125. Voir Épître de Barnabe 5,9; 1 Clément 42,1-2; 44,1; Ignace: Éphésiens 11,2; Magnésiens 6,2; 7,1; 13,1.2; Tralliens 2,2; 3,1.3; 7,1; 13,2; Philadelphiens 5,1; 9,1; Smyrniotes 8,1; Polycarpe, Philippiens 6,3; 9,1; Hermas, Pasteur 92,4; 94,1; 102,2. 126. Voir Ignace, Magnésiens 13,1 (les ôôyuxiTa des apôtres); Tralliens 3,3 et 7,1 (ôiaiàaaonai, ôiàiay|ia); Romains 4,3 (ôiaxàaaouxn à propos des apôtres Pierre et Paul). 127. À retenir de préférence à la variante "nos apôtres" 128. Selon une formulation heureuse de K.H. SCHELKLE, Die Petrusbriefe - Der Judasbrief (HTKNT, 13/2), Fribourg/B, Herder, 1970, p. 223. 3
129. KAESTLI, Mémoire (n. 94), p. 51. 130. KÄSEMANN, Apologie (n. 85), p. 139, et MÜLLER, Traditionsprozess
(n. 80),
p. 270, généralisent pourtant en voyant dans le commandement l'expression du caractère normatif de la révélation ou de l'évangile. Selon J. ZMIJEWSKI, Apostolische Paradosis und Pseudepigraphie im Neuen Testament. "Durch Erinnerung wachhalten" (2 Petr 1,13; 3,1), in BZ 23 (1979) 161-171, spéc. 167, suivi par KAESTLI, Mémoire (n. 94), pp. 51-52, le réfèrent du terme est ample, mais se concentre sur les annonces de la parousie. 131. Voir le parallèle de 1 Clément 44,1. 132. Cette mise en parallèle entre "les" prophètes de l'ancienne alliance et "les" apôtres s'observe dans les Pères apostoliques: 2 Clément 14,2 (v/); Ignace, Philadelphiens 5,1-2; 9,1; Polycarpe, Philippiens 6,3; Hermas, Pasteur 92,4. 133. Le substantif commandement est qualifié par deux génitifs: "le commandement de vos apôtres, (commandement) du seigneur et sauveur". L'idée de fond est sans doute
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les porteurs. Dans cette h y p o t h è s e la valorisation touche bien entendu en tout premier lieu P i e r r e , auteur de la lettre et déjà d'une lettre antérieure (2 P 1,1 et 3,1), mais également Paul qui s'est lui aussi adressé aux destinataires (ÔUAV en 2 P 3,15). Même si elle apparaît moins formelle qu'elle ne l'est dans les parallèles de Clément (7 Clément 5) et d'Ignace (Aux Romains 4 , 3 ) , la mention conjointe de Pierre et de Paul comme manifestation de la "fraternité apostolique" (P. Grelot) et comme signe de l'unification de la tradition a une portée considérable . Dans 1 Jn les agents de la tradition ne portent ni titre ni nom. Ils sont présents dans le texte comme sujet implicite des verbes, parfois comme " j e " , parfois comme " n o u s " . La question posée par les pronoms personnels est complexe comme l'illustre déjà le passage de "nous vous écriv o n s " de 1 Jn 1,4 à la série des "je vous écris" et "je vous ai écrit" de 2,12-14. La première personne du singulier va se présenter tout au long du chapitre 2, et reparaître de manière significative dans la récapitulation finale (5,13). L'auteur singulier, sans doute au plan de l'histoire une personnalité autorisée de l'école johannique, tend à se fondre dans un " n o u s " qui embrasse l'ensemble des destinataires, le " n o u s " dit communicatif ou ecclésial. Mais il fait partie aussi d'un " n o u s " plus restreint, celui sur lequel la lettre s'ouvre en 1,1-3, et qui va reparaître au moins une fois, en 4,14, un verset qui doit se lire, sur la base des verbes jumelés O e d o ^ a i (voir 1,1) et laapxupéco (voir 1,2), comme reprise et écho de 1,1-3: "quant à nous, nous avons vu et nous attestons que le Père a envoyé son Fils comme sauveur du m o n d e " . La fonction de ce "nous des témoins" est de souligner ceci: "sans une tradition bien comprise, qui remonte aux premiers témoins, il n ' y a pas moyen d'être en communion avec le C h r i s t " . Bien que le terme "apôtres" au sens tech135
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que le commandement du Seigneur est transmis par les apôtres (voir BAUCKHAM, Jude. 2 Peter [n. 73], p. 287), mais l'expression connote plus que cela. 134. BAUCKHAM (pp. 287-288), propose une explication différente: "vos apôtres" vise les fondateurs des communautés destinataires de 2 Pierre. 135. CASALINI, Lettere cattoliche (n. 98), pp. 142 et 151, fait observer avec justesse que la mise en valeur de Pierre comme garant de la doctrine apostolique est la visée formelle de toute l'épître. 136. Voir GRELOT, Tradition apostolique (n. 12), pp. 99-100; H. KÖSTER, Einßhrung in das Neue Testament im Rahmen der Religionsgeschichte und Kulturgeschichte der hellenistischen und römischen Zeit (de Gruyter Lehrbuch), Berlin, de Gruyter, 1980, pp. 728-729. 137. BAUCKHAM, Account (n. 66), pp. 3737-3738. 138. Avec entre autres K. WENGST, Der erste, zweite und dritte Brief des Johannes (ÖTBK, 16), Gütersloh, Mohn; Würzburg, Echter, 1978, p. 187; P. BONNARD, Les épîtres johanniques ( C N T , 13c), Genève, Labor et Fides, 1983, p. 97; VOUGA, Réception (n. 90), p. 287 ("le nous des témoins") et p. 301; surtout KLAUCK, 1. Johannesbrief (n. 91), pp. 257-258. 139. KLAUCK, 1. Johannesbrief (n. 91), p. 71 (on lira aussi avec profit [pp. 71-72] son aperçu sur la Wirkungsgeschichte).
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nique soit complètement étranger au langage de Jean, ce n'est guère aller trop loin que de qualifier de "apostoliques" les témoins ainsi présentés . En somme, la forte mise en relief des apôtres, témoins des événements originaires et garants de la tradition, n'est pas formellement présente dans toutes les lettres du groupe, mais ses attestations sont suffisamment répandues pour q u ' o n puisse voir là un trait déterminant de l'ère subapostolique , dont les épîtres catholiques font globalement partie. Entre la mort de Jacques, de Pierre et de Paul dans les années soixante et l'émergence des apologètes après 1 3 0 , la tâche principale de l'Église a été d'affermir pour l'avenir la tradition venue des apôtres, et de la préserver en particulier contre les hérésies naissantes tout en l'actualisant et en l'adaptant aux exigences du p r é s e n t . Les apôtres eux-mêmes ou leurs proches étaient évidemment le mieux placés pour rappeler qu'il s'agissait d'une tradition révélée, et pour proposer avec autorité cette nécessaire "actualisation de la voix a p o s t o l i q u e " . C o m m e on le souligne volontiers dans divers t r a v a u x , le recours à la pseudépigraphie était un bon moyen pour mettre en exergue la tradition des origines et son actualisation. 140
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La tradition n'existe pas si elle n ' a pas de formes pour se dire et de contenus à transmettre, et ces caractéristiques sont parfaitement présen140. Avec G. STRECKER, Die Johannesbriefe (KEK, 14), Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1989, p. 60 (à la suite de R. Schnackenburg). 141. Voir sur ce point la forte insistance de U. Luz, Erwägungen zur Entstehung des "Frühkatholizismus". Eine Skizze, in ZNW 65 (1974) 88-111, pp. 106-107. 142. Voir F. HAHN, Exegetische Beiträge zum ökumenischen Gespräch. Gesammelte Aufsätze I, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1986, pp. 82-83. 143. Ibid., pp. 48, 70, 85-86. 144. L'expression est de E. COTHENET, in M. QUESNEL - P. GRUSON (eds.), La Bible et
sa culture. Jésus et le Nouveau Testament, Paris, Desclée de Brouwer, 2000, p. 499 (Cothenet l'applique à 2 Th, Jude et 2 P). 145. COTHENET, La tradition (n. 79), pp. 418-419; BECKER, Urchristentum (n. 77), pp. 117-118; KAESTLI, Mémoire (n. 94), spéc. p. 49; C . LOOKS, Das Anvertraute bewahren. Die Rezeption der Pastor albriefe im 2. Jahrhundert (Münchner Theologische Beiträge), Munich, Utz, 1999, pp. 48-51. 146. Bien que toutes les questions ne soient pas réglées, tant s'en faut, les épîtres de Jacques, de Pierre et de Jude sont couramment considérées comme des pseudépigraphes. Voir pour illustration les positions prises dans les deux introductions récentes de MARGUERAT (ed.), Introduction au Nouveau Testament (n. 35), pp. 411-413, 414-426, 434, 441-442, et de I. BROER, Einleitung in das Neue Testament. Band II: Die Briefliteratur, die Offenbarung des Johannes und die Bildung des Kanons (Die Neue Echter Bibel. Ergänzungsband zum Neuen Testament, 2/2), Würzburg, Echter, 2001, pp. 601-602, 615620, 634-636, 645-648.
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tes dans les lettres de Paul dès la première génération chrétienne. Mais l'on assiste dans la période post-apostolique à un renforcement considérable de la dimension objective, comme on le constate sans peine dans les épîtres pastorales, par exemple quand elles parlent avec insistance du " d é p ô t " (1 T m 6,20; 2 T m 1,12.14) ou de la sûreté du logos (1 T m 1,15; 3 , 1 ; 4,9; 2 T m 2 , 1 1 ; Tt 1,9; 3,8). Un aperçu portant sur d e u x notions essentielles, la foi et la vérité, devrait permettre de montrer que la m ê m e tendance à l'objectivation est largement présente dans les épîtres catholiques. 147
La foi Dans les épîtres catholiques la dimension fondamentale de la foi, à savoir la confiance radicale et l'adhésion personnelle à Dieu et/ou à son Fils, n'est manifestement pas oubliée. En raison de la proximité théologique de 1 P avec Paul, on n'est pas étonné de retrouver cette conception en 1 P 1,21, où se manifeste nettement la note de l'abandon confiant en D i e u , et le même sens domine dans la plupart des emplois du vocabulaire de la foi (et de l'espérance) dans cette épître. Dans Je 2,1 la meilleure solution pour déployer le syntagme " l a foi de notre Seigneur Jésus Christ" semble être de l'aligner sur "croire e n " , à l'analogie de la citation de G n 15,6 faite en Je 2,23 (verbe suivi du datif). V a dans le même sens la conviction deux fois énoncée que la prière a sa source dans la foi (1,6; 5,15); elle est, suggère le contexte respectif, suscitée par la générosité de Dieu qui donne (1,5) et pardonne (5,16). Comment ne pas avoir confiance si Dieu est vraiment " l e seigneur plein de pitié et miséricordieux" (5,11)? Dans le quatrième évangile la foi est vue le plus souvent comme "foi e n " , et le sens de la relation personnelle confiante qui attache le croyant à Dieu et au Christ se maintient fondamentalement dans 1 Jn (voir 1 Jn 3,23; 5,10.13). 148
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Et pourtant une autre perspective s'affirme dans le corpus des épîtres catholiques. Dans le débat complexe sur la relation foi/œuvres, Jacques exprime brusquement l'attitude de son contradicteur par "croire q u e " (2,19), l'objet étant l'unicité de Dieu; en outre il attribue une foi de cette espèce aux démons eux-mêmes. C o m m e la visée de Jacques est de con147. J'y avais associé dans un premier temps la "connaissance", mais comme le terme n'a guère de relief en dehors de 1 Jn et surtout de 2 P, je préfère y renoncer. Voir sur le sujet l'excursus de FUCHS-REYMOND, 2 Pierre. Jude (n. 117), pp. 1 2 7 - 1 3 1 , et la contribution de V. Koperski dans le présent volume. 148. Avec ELLIOTT, 1 Peter (n. 2 4 ) , pp. 3 7 9 - 3 8 0 .
149. Avec POPKES, Jakobus (n. 110), p. 1 5 9 .
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vaincre que la foi doit déboucher sur des œuvres, on n'inscrira pas à son débit une conception étriquée de la f o i . En attribuant la foi au démon, il se donne simplement un argument un peu facile pour justifier sa thèse de la nécessité des œuvres pour le s a l u t . Il reste que le monothéisme est présenté ici comme objet et contenu d'un acte de connaissance et que, d'une certaine manière, la foi apparaît bel et bien c o m m e fides quae. Dans le quatrième évangile la construction "croire q u e " ne manque pas, elle apparaît notamment dans des confessions christologiques en bonne et due forme (Jn 6,69; 11,27; 20,31). 1 Jn se place dans la continuité de l'évangile par les expressions de 5,1 (croire que Jésus est le Christ) et 5,5 (le fils de Dieu), qui apparaissent comme le dédoublement de Jn 20,31 ("le Christ, le fils de D i e u " ) , et l'importance de la formulation "confessionnelle" est encore rehaussée par les emplois de la conjonction c m avec des verbes appartenant au même registre, à savoir "confesser" (4,15), " n i e r " (2,22), "témoigner" (4,14). La christologie orthodoxe s'exprime ici comme un objet, un contenu q u ' o n s'approprie personnellement et q u ' o n proclame de manière officielle. L'objectivation de la foi se manifeste de manière plus intense dans Jude et dans 2 P, car ces lettres insistent toutes deux sur "l'aspect notionnel de la pistis" . Dans Jude nous relevons d'abord la réflexion de l'auteur (vv. 3-4) sur les raisons qui l'ont poussé à écrire. Le double emploi du verbe écrire est le signe le plus net d'une organisation binaire du v. 3, qu'il n'est pourtant pas facile de préciser. L'opposition littéraire entre d'une part la durée de l'acte d'écrire, soulignée au v. 3a par le présent, et d'autre part le moment ponctuel visé en 3b par l'aoriste, exprime-t-elle un changement dans le projet d'écriture imposé par les circonstances qu'évoque le verset 4 , ou bien est-elle seulement l'indice d'une dramatisation rhétorique de l'acte d ' é c r i r e ? Peu importe pour notre propos. Dans les deux cas, en effet, on est amené à bien distinguer deux objets: le salut d'une part, et d'autre part la foi. Le propos positif de Jude est d'exhorter au 150
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150. Voir les rectifications utiles apportées par F. HAHN - P. MÜLLER, Der Jakobusbrief, in TR 6 3 ( 1 9 9 8 ) 1-73, pp. 3 6 - 4 1 , 5 7 - 5 9 .
151. POPKES, Jakobus (n. 110), p. 2 0 1 .
152. CoTHENET, La tradition (n. 7 9 ) , p. 4 1 8 . 153. Ainsi, par exemple, J . N . D . KELLY, A Commentary on the Epistles of Peter and of Jude (BNTC), Londres, Black, 1 9 7 7 ( = 1969), p. 2 4 5 , et BAUCKHAM, Jude. 2 Peter (n. 7 3 ) , pp. 2 9 - 3 0 .
154. Ainsi D . F . WATSON, Invention, Arrangement and Style. Rhetorical Criticism of Jude and 2 Peter (SBL DS, 104), Atlanta, GA, Scholars Press, 1 9 8 8 , p. 3 7 ; PAULSEN, 2. Petrusbrief, Judasbrief (n. 9 9 ) , p. 5 4 ; VÖGTLE, Judasbrief. 2. Petrusbrief (n. 9 4 ) , pp. 2 2 - 2 3 ("ein literarischer Kunstgriff).
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combat "pour la foi transmise une fois pour toutes aux saints". O n ne trouve pas ailleurs dans le Nouveau Testament une formule associant aussi directement l'acte de transmission et 7 c i a x i ç et présentant avec une telle clarté la foi comme un objet transmis, comme fides quae créditer . Mais il n'est pas facile de préciser cet objet. Dans la ligne de Paul il pourrait s'agir tout simplement de l ' é v a n g i l e . Pourtant, la critique justifiée des excès de l'interprétation "proto-catholique" ne doit pas empêcher de prendre en compte la singularité d e la formule de Jude 3 . En plus de l'association déjà signalée entre le terme technique de la transmission et la réalité nommée foi, il faut relever en particulier l'adverbe anaZ,. Utilisé habituellement pour caractériser l'œuvre divine en Christ comme immédiatement efficace et accomplie pour de bon, l'adverbe s'applique ici non plus à l'événement mais à la parole qui l'atteste de manière autorisée, comme donné "unalterable and n o r m a t i v e " . On pensera donc plutôt à une somme d e formules composant un depositum fidei , "l'ensemble des doctrines reçues", le "dépôt général des vérités a c q u i s e s " , le "credo c h r é t i e n " si l'on veut. Tout est donné et il n ' y aura rien de plus: "aucune nouvelle révélation, aucune connaissance supplémentaire, en dehors de ce que les apôtres ont enseigné aux fidèl e s " , ces apôtres dont on rappelle justement au v. 17 le rôle essentiel avant d e reprendre le thème de la foi. Dans son exhortation finale, en effet, Jude vise probablement la m ê m e réalité q u ' a u v. 3 quand il évoque "votre très sainte f o i " comme base sur laquelle les chrétiens doivent 155
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155. PAULSEN, 2. Petrusbrief, Judasbrief (n. 9 9 ) , p. 5 4 . 156. Le sens objectif du substantif rcianç affleure dans Paul lui-même (par ex. Rm 12,6; Ga 1,23) mais se manifeste surtout dans les Pastorales (voir G. BARTH, in EWNT UL, 230). Notons surtout qu'aucun des parallèles thématiques volontiers allégués en faveur du sens objectif de rciaxiç ne comporte une association directe avec le terme technique de la transmission. 157. BAUCKHAM, Jude. 2 Peter (n. 7 3 ) , pp. 3 1 - 3 4 , plaide vigoureusement pour ce sens. Voir aussi ID., Jude and the Relatives (n. 122), pp. 1 5 8 - 1 5 9 . 158. Parmi les auteurs récents on peut voir, en plus de Bauckham, R. HEILIGENTHAL, Zwischen Henoch und Paulus. Studien zum theologischen Ort des Judasbriefes (TANZ, 6), Tübingen, Francke, 1992, pp. 6 8 - 7 0 ; ID., Der Judasbrief. Aspekte der Forschung in den letzten Jahrzehnten, in TR 5 1 ( 1 9 8 6 ) 1 1 7 - 1 2 9 , pp. 1 2 1 - 1 2 9 .
159. Avec VöGTLE, Judasbrief. 2. Petrusbrief (n. 9 4 ) , p. 2 4 . 160. KELLY, Commentary (n. 153), p. 2 4 8 . Voir dans le même sens FUCHS-REYMOND, 2 Pierre. Jude (n. 117), p. 158. 161. SCHRÄGE, Judasbrief, in BALZ-SCHRAGE, Die "Katholischen" Briefe (n. 6 9 ) , p. 2 2 2 ; H . FRANKEMÖLLE, 1. Petrusbrief. 2. Petrusbrief. Judasbrief (NEB, 18-20), Würzburg, Echter, 1 9 9 0 , p. 132. 162. J. CANTINAT, Les épîtres de saint Jacques et de saint Jude (SB), Paris, Gabalda, 1973, p. 2 9 4 . 2
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P. MÜLLER, Der Judasbrief, in TR 6 3 ( 1 9 9 8 ) 2 6 7 - 2 8 9 , p. 2 8 1 .
164. GRELOT, Tradition apostolique (n. 12), p. 8 5 . 165. Un syntagme valorisant du même genre se lit en Tt 1,4; "la foi commune". Voir aussi "la bonne doctrine" de 1 Tm 4 , 6 et la "bonne confession" de 1 Tm 6,13. - Bien que
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"s'édifier" (v. 2 0 ) . Certes, il pourrait s'agir aussi de fidélité ou de l o y a u t é , mais rien n'indique un glissement par rapport au v. 3, avec lequel les vv. 20-23 constituent un cadre pour toute l ' é p î t r e . Les contestataires contre lesquels Jude met en garde les communautés ont des carences éthiques manifestes puisqu'ils transforment en débauche la grâce et la bonté de Dieu. Mais leur attitude est aussi, et peut-être d'abord, une mise en cause de la christologie reçue: "ils nient notre seul maître et Seigneur Jésus Christ" (v. 4 ) . Sans constituer une preuve à lui seul, l'article unique qui commande dans l'original maître et Seigneur est en faveur de l'exégèse qui assimile les deux termes, et invite donc à ne pas compter avec une référence au Seigneur Dieu, m ê m e si le terme ôeG7rôrr|ç lui est habituellement réservé (Le 2,29; Ac 4,24; 2 T m 2 , 2 1 ) . L a manière dont 2 P 2,1 relit le texte de Jude 4 confirme que la dérive des "hérétiques" touche d'abord la christologie. Ces diverses observations invitent ainsi à retenir la référence de " l a foi" à un contenu bien déterminé et auquel on ne touche plus, à " u n savoir sacré", communicable et effectivement c o m m u n i q u é . Mais, et m ê m e l'indiscutable proximité avec les Pastorales n ' y pousse pas, on se gardera de durcir les choses en introduisant dans le texte tous les ingrédients du proto-catholicisme, une réalité que l'on ferait d'ailleurs mieux d'appeler le "catholicisme n a i s s a n t " ; en effet il n ' y a pas encore de symbole de foi élaboré dans le détail, ni de magistère à compétence universelle qui détermine et délimite les articles qu'il faut c r o i r e . 167
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La place du vocabulaire de la foi dans 2 P est fort r é d u i t e , mais la réalité visée s'impose à l'attention du lecteur. Dans l'adresse (1,1) les destinataires sont qualifiés comme ceux "qui ont o b t e n u une foi d'égale valeur que la nôtre". Le pronom à la première personne du plu175
leur signification soit discutée dans le détail, les parallèles thématiques de Col 1,23; 2 , 7 peuvent aussi être invoqués à l'appui du sens objectif. 166. CANTINAT, Les épîtres (n. 1 6 2 ) , pp. 3 2 8 - 3 2 9 y insiste avec raison. 167. Ainsi NEYREY, 2 Peter, Jude (n. 1 0 3 ) , p. 9 0 . 168. Avec MÜLLER, Der Judasbrief (n. 163), pp. 2 7 5 - 2 7 6 . 169. MÜLLER, Traditionsprozess (n. 8 0 ) , p. 2 7 2 .
170. Conformément à sa compréhension d'ensemble de l'épître, R. Bauckham (Jude. 2 Peter [n. 7 3 ] , pp. 3 9 - 4 0 ) , accentue de nouveau l'aspect éthique aux détriments de l'aspect doctrinal, notamment pour l'interprétation de àpvouusvoi. 171. Voir Luz, Frühkatholizismus (n. 1 4 1 ) , p. 9 1 . 172. V. Fusco, La discussione sul protocattolicesimo nel Nuovo Testamento. Un capitolo di storia delVesegesi, in ANRW II.26.2 ( 1 9 9 5 ) 1 6 4 5 - 1 6 9 1 , spéc. 1 6 4 6 n. 3 . 173. Voir avant tout VÖGTLE, Judasbrief. 2. Petrusbrief (n. 9 4 ) , pp. 2 4 - 2 5 , mais aussi BAUCKHAM, Account (n. 6 6 ) , pp. 3 7 3 0 - 3 7 3 1 .
174. Le verbe est tout à fait absent et le substantif n'est utilisé qu'en 1,1.5. 175. Sur le verbe Xayxctvco voir C. SPICQ, Lexique théologique du Nouveau Testament, Fribourg/S, Éditions Universitaires de Fribourg; Paris, Cerf, 1 9 9 1 , pp. 8 7 5 - 8 7 7 .
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riel et la présentation de Pierre comme " a p ô t r e " orientent l'esprit vers la foi apostolique, la foi des origines qui fait référence; qualifiée par le hapax biblique iaôxijioç, la foi des destinataires "les met à égalité d e condition et d'honneur avec les A p ô t r e s " . Il s'agit donc probablement plus d ' u n enseignement, d'une doctrine, d ' u n objet en tout cas, que d'une attitude, comme le confirment les parallèles de Jude 3 ("foi transmise") et Tt 1,4 ("foi c o m m u n e " ) . D'emblée le lecteur est rendu attentif à l'enjeu de la lettre: communiquer " l a foi apostolique à une génération post-apostolique" . D e l'avis général des c o m m e n t a t e u r s , le regard se porte ainsi sur le contenu authentique de la f o i , et la connaissance mentionnée aussitôt après (1,2) confirme cette dimension objective, de sorte que la formule tranchante de K ä s e m a n n - "glauben heisst ...die Tradition der Apostel annehmen" - se justifie ici. Le point de vue sera différent en 1,5 . Là, en effet, la foi est présentée comme la source d'un comportement éthique qui s'épanouit, elle paraît donc désigner, d'un point de vue subjectif cette fois-ci, "l'adhésion loyale à l'enseignement c h r é t i e n " , voire le "lien vital avec Dieu et le C h r i s t " . 176
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Quand on tient compte du sens objectif du mot foi, on passe facilement d e cette fides quae à la vérité. U n bel exemple en est fourni par 1 Tm 4,3. Selon ce texte, en effet, la déviation par rapport à la foi, c'est-àdire par rapport à son contenu, pousse d'aucuns à interdire certains aliments alors que Dieu a créé ces derniers pour le bien "des croyants et de ceux qui ont connu la vérité". L'expression citée est commandée dans le grec par un article unique, ce qui invite à comprendre sa deuxième partie comme une epexégèse d e la p r e m i è r e : les croyants c'est-à-dire ceux qui ont fait connaissance avec la vérité et s'y tiennent (participe parfait). 184
176. Ibid., p. 744. Voir aussi KELLY, Commentary (n. 153), pp. 296-297; PAULSEN, 2. Petrusbrief, Judasbrief (n. 99), p. 104. 177. BAUCKHAM, Jude. 2 Peter (n. 73), p. 167. 178. FUCHS-REYMOND, 2 Pierre. Jude (n. 117), p. 44, s'écartent de la position dominante en marquant une certaine réserve: la dimension objective est incontestable, l'aspect subjectif de l'adhésion n'est pas pour autant absent. Selon BAUCKHAM, Jude. 2 Peter (n. 73), pp. 167-168, l'accent porte sur la dimension subjective de la foi, sans que son fondement objectif soit oublié. Voir aussi M. KARRER, Jesus der Retter (Sôtêr). Zur Aufnahme eines hellenistischen Prädikats im Neuen Testament, in ZNW 93 (2002) 153176, pp. 173-174, qui pense plutôt à la loyauté. 179. VöGTLE, Judasbrief. 2. Petrusbrief (n. 94), p. 133. 180.
KÄSEMANN, Apologie (n. 85), p. 151.
181. On reconnaît généralement la différence, mais il y a des exceptions, par exemple. W. SCHRÄGE, 2 Petr, in BALZ-SCHRAGE, Die "Katholischen" Briefe (n. 69), p. 127. 182.
KELLY, Commentary (n. 153), p. 306.
183. VöGTLE, Judasbrief. 2. Petrusbrief (n. 94), p. 150. Voir BAUCKHAM, Jude. 2 Peter (n. 73), p. 185. 184. Voir C. SPICQ, Saint Paul. Les épîtres pastorales. Tome 1 (ÉtB), Paris, Gabalda, 1969, p. 499. 4
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La vérité La vérité peut être mise en rapport direct avec la foi, qui est devenue réalité comme "foi en la vérité" lors de la réception initiale de l'évangile (2 Th 2,11-14). L'expression participiale de 1 T m 4,3 mentionnée cidessus a son équivalent dans le syntagme "la connaissance de la vérité" (1 T m 2,4; 2 T m 2,25; 3,7; Tt 1,1; He 10,26), où "la vérité" n'est pas de l'ordre de la philosophie mais de la révélation: elle est doctrine révél é e . Le Paul des Pastorales prétend exercer son rôle d'apôtre en tant que "docteur des nations, avec foi et vérité" (1 T m 2,7). L'expression finale n'est pas claire d'emblée. La meilleure solution semble être de ne pas simplement identifier les deux termes, mais de voir dans la foi le message proposé et de considérer que la vérité "ajoute à la possession de la doctrine une note de solidité (1 Tim. 111,15) et de réalisation dans la vie p r a t i q u e " . 185
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La vérité désigne globalement un enseignement, une doctrine reçue et gardée. De son enracinement primitif dans le langage et la situation du kérygme la connaissance de la v é r i t é garde un rapport étroit avec l'accès à la foi et l'entrée dans la vie chrétienne. Elle en est presque synonyme. Vers la fin du siècle apostolique ou au début du deuxième siècle, on l'a vu à propos des Pastorales, la formule "la connaissance de la vérité" prend elle-même consistance, sans doute en réaction aux dérives qui menacent les chrétiens du fait des oppositions venues de l'intérieur. Cette menace amènera une insistance nouvelle et plus forte sur la tradition désormais fixée, mais menacée par des gens qui enseignent le faux et provoquent l'égarement. 187
Vu le poids qu'il a dans l'évangile de Jean, on n'est pas surpris de voir réapparaître le thème de la vérité, avec bien des nuances, dans les lettres johanniques. Dans 1 Jn la vérité et l'égarement (racine nkav-) sont présentés à deux reprises (1,8 et 4,6) comme des forces antagonistes, et la vérité se trouve située du côté de "la parole" (1,10). Mais ce sont surtout deux textes des "petites" épîtres johanniques qu'il faut évoquer ici. Le premier, proche des Pastorales par la diction et le contenu, désigne des chrétiens par une périphrase participiale: o l èyvcoKÔxeç xfiv àÀ,f|9eiav (2 Jn 1); l'auteur précise dans le contexte (v. 9) que la vérité est à identifier à la 8i5a%f) xoC xpiaxoC c'est-à-dire sans doute à "la 185. Le rapprochement s'impose avec le thème de la connaissance développé par 2 P: voir VÔGTLE, Judasbrief. 2. Petrusbrief (n. 94), p. 134, n. 11. 186. SPICQ, Pastorales I (n. 184), p. 371. L'auteur va jusqu'à proposer "religion chrétienne" comme équivalent de "foi" dans ce passage. 187. On trouvera une étude très riche sur le sujet dans I. DE LA POTTEREE, La vérité dans saint Jean. II: Le croyant et la vérité (AnBib, 74), Rome, Pontificio Istituto Biblico, 1977, pp. 539-547.
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vraie doctrine venue du C h r i s t " . D'après 3 Jn 8 l'accueil que les chrétiens font aux missionnaires de l'évangile est une façon de "coopérer avec la vérité". Mais en quel sens? Selon l'interprétation obvie on doit compter avec une sorte de raccourci: en servant les missionnaires, on sert en même temps l'évangile qu'ils portent, de sorte que l'expression est à rapporter à un message destiné à la proclamation. Au travers d'une longue étude, I. de la Porterie , qui exploite fortement le contexte, établit une exégèse différente. Selon lui, la vérité désigne l'évangile tel qu'il est vécu dans la communauté et la coopération avec l'évangile est à considérer sous l'angle plus général de la vie éthique inspirée et suscitée par la vérité presque personnifiée, "la réalité de D i e u " (G. Strecker). On restera donc réservé quant à la portée de ce passage pour la question de l'objectivation de la foi. L'unique emploi du mot vérité dans 1 P se situe dans un contexte qui, nous l'avons vu, évoque la conversion des destinataires, leur naissance à l'existence chrétienne (1,23; 2,2). Ils ont répondu à l'initiative de Dieu "par l'obéissance de la vérité" (1,22). Comment comprendre ce syntagme? Plutôt que de voir dans " v é r i t é " un génitif de qualité ("obéissance véritable"), on préfère laisser au complément toute sa force de génitif objectif; il s'agit bien d'obéir à la vérité. À la fois la référence à un acte du passé et les formules parallèles de "l'obéissance de la foi" en Rm 1,5 et 16,26, portent à penser que la vérité est un autre nom de la foi au sens d'un message reçu et accepté, et qu'elle se confond avec la parole de Dieu (1 P 1,23) ou l'évangile (1,12). Elle est liée à la révélation divine sur laquelle repose le message chrétien et qui assure à ce dernier sa rectitude . 189
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Dans le passage de Je 1,16-18, où il est notamment question de l'engendrement par la "parole de vérité" (1,18), divers indices orientent vers la création, et l'expression "parole de vérité" pourrait bien se trouver elle-même en continuité avec l'Ancien Testament et le judaïsme ancien, et viser en fait la loi ou la sagesse dans la ligne de Ps 118,43; Qo 12,10; Pr 2 2 , 2 1 . Mais, en raison de la thématique de la conversion, qui semble commander tout le p a s s a g e , les parallèles de Col 1,5 et Ep 1,13 191
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188. Ibid., p. 548. 189. Ibid., pp. 873-904. Il est suivi par H.J. KLAUCK, Der zweite und dritte Johannesbrief ( E K K , 23/2), Zurich, Benziger; Neukirchen-Vluyn, Neukirchener Verlag, 1992, pp. 93-94, et STRECKER, Johannesbriefe (n. 140), p. 364 n. 14. 190. SCHELKLE, Petrusbriefe - Judasbrief (n. 128), p. 52; SPICQ, Les épîtres de saint Pierre (n. 96), p. 73; KNOCH, 1. und 2. Petrusbrief, Judasbrief (n. 94), p. 54. 191. Notons que le pluriel utilisé dans les deux passages sapientiels réduit considérablement la portée du parallèle. 192. Voir surtout POPKES, Jakobus, (n. 110), pp. 116-117, mais aussi SCHRAGE, Jakobusbrief (n. 111), p. 20; F. VOUGA, L'épître de saint Jacques (CNT, 13a), Genève, Labor et Fides, 1984, p. 63; BURCHARD, Jakobusbrief (n. 24), p. 77.
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apparaissent plus pertinents. L'identification de la "parole d e vérité" avec l'évangile y est incontestable, et pour Col 1,5 on peut m ê m e penser que l'expression "vise déjà à opposer l'Évangile à l'erreur combattue au chapitre s u i v a n t " . Jacques paraît avoir en vue lui aussi le kérygme chrétien , comme fondement inaliénable de l'existence chrétienne . Il y reviendra de façon plus discrète à l'extrême fin de sa l e t t r e quand il parlera (5,19-20) de Végarement (voir 1,16) par rapport à la vérité (voir 1,18). Cet égarement équivaut certes au péché et c'est sans doute d'abord à un comportement droit et juste qu'il convient de penser à propos de la v é r i t é , et non au souci " d e garder la pureté du bon d é p ô t " . Toutefois, la perspective morale n'épuise pas le sens de ce que l'auteur laisse comme derniers mots. Il faut au moins y entendre un rappel de l'évangile dont l'accueil a ouvert l'accès à une vie nouvelle. Mais l'insistance de notre auteur sur la vérité invite peut-être à penser à un danger doctrinal venant de l'extérieur, m ê m e si le reste de l'épître ne fournit pas d'indications précises en ce s e n s . L'égarement, qui consiste en " l a perte de l'orientation chrétienne f o n d a m e n t a l e " , serait lourd de conséquences s'il n'était pas annihilé dans ses effets par l'intervention d ' u n frère, qui réussit en quelque sorte à réactiver la conversion initiale de l'égaré . 193
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Les données le plus nettes se lisent dans 2 P. Dans le passage d'allure testamentaire présenté rapidement ci-dessus (1,12-15), l'auteur qualifie ses destinataires en leur attribuant la connaissance et un attachement ferme et durable à ce que Jude 3 appelait " l a foi transmise une fois 2 0 2
193. J.N. ALETTI, Saint Paul. Épître aux Colossiens (ÉtB, NS 2 0 ) , Paris, Gabalda, p. 6 1 .
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194. DIBELIUS, Jakobus (n. 3 4 ) , p. 3 7 ; MUSSNER, Jakobusbrief (n. 111), p. 9 5 .
195. Selon H . FRANKEMÖLLE, Der Brief des Jakobus (ÖTBK, 17/1), Gütersloh, Gütersloher Verlagshaus; Würzburg, Echter, 1 9 9 4 , pp. 2 9 7 - 3 0 5 , l'expression et la pensée s'enracinent fondamentalement dans la théologie de la création et dans l'anthropologie qui en découle. 196. Les commentateurs notent avec raison que les contacts littéraires et thématiques les plus significatifs de Je 5 , 1 9 - 2 0 se font moins avec le contexte immédiatement antérieur qu'avec 1,15-21. Voir entre autres BURCHARD, Jakobusbrief (n. 2 4 ) , pp. 2 1 5 - 2 1 6 , et surtout POPKES, Jakobus (n. 1 1 0 ) , pp. 3 5 4 - 3 5 5 . - Je ne m'arrête pas à Je 3 , 1 4 où la "vérité" a un sens plus général. 197.
DIBELIUS, Jakobus (n. 3 4 ) , pp. 3 0 6 - 3 0 7 ; MUSSNER, Jakobusbrief (n. 1 1 1 ) , p. 2 3 1 ;
VOUGA, L'épître de Jacques (n. 192), p. 1 4 5 . 198. VOUGA, L'épître de Jacques (n. 1 9 2 ) , p. 1 4 6 . 199. SCHRÄGE, Jakobusbrief (n. 1 1 1 ) , pp. 5 7 - 5 8 . - Selon VOUGA, L'épître de Jacques (n. 192), p. 1 4 5 , le mot "désigne la puissance salutaire de la parole de Dieu". 2 0 0 . POPKES, Jakobus (n. 110), p. 3 5 5 . 2 0 1 . BURCHARD, Jakobusbrief (n. 2 4 ) , p. 2 1 6 .
2 0 2 . Les allusions de 2 P 1,12-15 à Jude 3 - 5 (vocabulaire de la réminiscence, participe elôôxaç) sont quasiment sûres. Pour des contacts thématiques de portée moins précise, voir Ac 1 4 , 2 2 ; Rm 1 6 , 2 5 .
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pour toutes", et que Pierre (1,12) désigne comme " l a vérité présente". Le participe du verbe Tcàpeini souligne probablement que cette vérité, à l'analogie de "la vérité c'est-à-dire l'évangile" de Col 1,5-6, est à la disposition des croyants, parce qu'elle est désormais "consignée quelque part: dans les Écritures et dans la tradition a p o s t o l i q u e . . . " . Pour la première fois Pierre emploie ici un vocabulaire qui fait partie de ses caractéristiques et dont les éléments sont: le verbe assez courant axr|piÇ(D (1,12), le substantif axr|pvy|iôç (3,17), hapax du Nouveau Testament, et l'adjectif verbal àaTfjpiKxoç qui qualifie deux fois les hérétiques combattus (2,14 et 3,16) et q u ' o n ne retrouve pas ailleurs dans le Nouveau Testament. A la différence des hérétiques instables et mouvants, les fidèles sont solidement ancrés - et doivent le rester - dans la vérité. Faut-il donner à ce dernier terme son extension maximum en le référant pratiquement la religion c h r é t i e n n e ? Il paraît préférable d ' y voir de façon générale l'évangile jadis accueilli , mais plus encore, en faisant droit au verbe savoir (1,12), précisément l'équivalent de "vraie foi, vraie doct r i n e " , avec peut-être un accent particulier sur la théodicée . 203
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En 2,1-3, usant du mode de la prophétie ex eventu, l'auteur annonce pour l'avenir une situation qui, de fait, existe déjà. Il esquisse les méfaits des adversaires et de ceux qui tombent dans leurs griffes. Ils font injure "à la voie de la vérité" (2,2). À la lumière d e ses quelques emplois septuagintaux , on est tenté de réduire cette expression à sa dimension é t h i q u e , et le rapprochement avec " l a voie de la justice" (2 P 2,21) fournit un appui à cette manière d e voir, ainsi que la reprise de la formule biblique en 1 Clément 35,5. Mais le contexte de 2 P 2,2 donne plu208
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203. 204. p. 140. 205. "'early 206. (n.
FUCHS-REYMOND, 2 Pierre. Jude (n. 117), pp. 63-64. Avec R. BULTMANN, in TWNT I, pp. 244-245 et KÀSEMANN, Apologie (n. 85), Ainsi BAUCKHAM, Jude. 2 Peter (n. 73), p. 198, en excluant explicitement les Catholic' overtones". Avec FUCHS-REYMOND, 2 Pierre. Jude (n. 117), p. 63; KELLY, Commentary
153), p. 312; SCHRAGE, 2 Petr (n. 181), p. 130; FRANKEMÔLLE, 1. Petrusbrief.
2. Petrusbrief. Judasbrief (n. 161), pp. 95-96. - KNOCH, 1. und 2. Petrusbrief, Judasbrief (n. 94), p. 249, y inclut les monitions parénétiques, et d'autres auteurs mettent même la conduite de la vie au premier plan, par exemple SCHELKLE, Petrusbriefe - Judasbrief (n. 128), p. 204. 207. Ainsi NEYREY, 2 Peter, Jude (n. 103), p. 166. 208. Gn 24,48; Ps 118,30; Tb 1,3 et Sg 5,6. 209. Selon NEYREY, 2 Peter, Jude (n. 103), p. 192, "la voie de la vérité" désigne ceci: "pure moral life filled with all virtue". Pour BAUCKHAM, Jude. 2 Peter (n. 73), pp. 241242, la dimension morale est dominante sans aucun doute, mais, par contraste avec les faux-docteurs et leur message, la "voie de la justice" comporte aussi un aspect doctrinal, une proclamation, à savoir l'évangile. Notons, à propos de Sg 5,6, que les deux autres emplois de "vérité" dans la Sagesse (3,9; 6,22), permettent de compter avec une dimension cognitive également en Sg 5,6.
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sieurs signaux qui orientent dans un sens différent, sans pour autant exclure la connotation du comportement: les protagonistes sont qualifiés de "faux docteurs", qui introduisent des "hérésies", à coup de "paroles f a b r i q u é e s " , une expression qui rappelle les "mythes sophistiqués" de 1,16. La "voie de la vérité" n'est peut être pas autre chose que "toute la doctrine de la f o i " , voire l'Église elle-même dans son orthodoxie et sa fidélité à la tradition apostolique . Du reste, une des manifestations de la déviation par rapport au vrai est le fait de "renier le maître" (2,1), ce qui suppose une dérive dans les conceptions christologiques des dissidents, à l'analogie de Jude 4 où il s'agissait de "nier notre seul maître et seigneur Jésus Christ". 210
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Dans son épilogue (3,14-18) Pierre évoque encore une fois sa préoccupation majeure, qui est de protéger ses destinataires devant les dérives qui viennent des dissidents, et il récapitule dans ce but sa mise en garde et ses encouragements. Les hérétiques exercent leurs ravages par l'interprétation des textes, ceux de Paul comme "les autres écritures". Le qualificatif "inconstants" qui leur fut donné auparavant (àaxf|piKTOi) est repris ici, mais se trouve enrichi par un deuxième adjectif ( à | i a 6 e ï ç ) encore un hapax du Nouveau Testament - que l'article unique associe étroitement au premier: ils sont ceux qui manquent d'instruction et, pour cette raison, n'ont pas de constance (3,16). Si la référence aux défaillances éthiques n'est certainement pas à e x c l u r e , l'accent principal repose de nouveau sur les dérives par rapport à la tradition authentique . Les destinataires sont invités de leur côté à se garder de Végarement. Ce substantif et le verbe correspondant sont des termes applicables à diverses situations, mais s'emploient en particulier sur le registre de la conn a i s s a n c e . Tel semble être aussi l'horizon des dernières recommandations, notamment quand l'auteur met en avant la connaissance que les croyants ont du Christ (3,18). C'est donc probablement de leur stabilité dans la doctrine vraie qu'il est encore une fois question en 2 P 3 , 1 7 . La finale confirme ainsi que le pseudo-Pierre s'est donné comme mission d'être "la voix de la tradition". Il s'agit pour lui de "rappeler que la tradition tire son origine de Dieu et des prophètes, du Christ et des disci213
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210. Les termes grecs \|/£OÔoôiôàaKaA.oç et rc^aaxôç sont eux aussi des hapax du Nouveau Testament. 211. CASALINI, Lettere cattoliche (n. 98), p. 163. 212. Ainsi SCHRAGE, 2 Petr (n. 181), p. 134. 213. Voir en particulier le qualificatif de &9ea|ioç (v. 17), déjà utilisé en 2,7 à propos des Sodomites. 214. Voir VÔGTLE, Judasbrief. 2. Petrusbrief (n. 94), pp. 263-264. 215. Voir Pr 14,8; Sg 5,6; 3 M 4,16; He 5,2; 1 Jn 1,8; Ap 2,20. 216. SPICQ, Les épîtres de saint Pierre (n. 96), p. 264; SCHRAGE, 2 Petr (n. 181), pp. 148-149.
LE CORPUS DES ÉPÎTRES CATHOLIQUES
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pies, de Pierre et P a u l " et de "souligner que, par-delà la mort des apôtres, elle reste la norme unique de l'Église . . . " , sous la forme d'une doctrine ferme et qui fait autorité . 2 1 7
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Dans cette contribution il s'agissait de rappeler, en exploitant les renseignements fournis par les manuscrits et par une partie de la documentation patristique, le chemin qu'il a fallu parcourir pour que des écrits disparates se constituent peu à peu en collection, un chemin qui apparaît finalement moins ardu et moins long que prévu, dès lors q u ' o n ne se préoccupe pas d'abord du canon mais de la question littéraire. Tout en respectant le principe de l'autonomie de chaque épître, il a paru bon d'attirer aussi l'attention sur les liens existant entre ces œuvres du point de vue formel et du point de vue du contenu. Ces convergences viennent probablement d'abord d'une large tradition où nos lettres ont puisé, mais aussi d ' u n travail de rédaction qui a tissé des liens formels entre les textes. Probablement qu'ont joué aussi les contraintes de l'histoire qui se manifestent quand un mouvement tel que le christianisme s'installe dans la durée, se développe, et se heurte à la résistance du réel. Longtemps négligés, ces écrits retiennent davantage l'attention à l'heure actuelle et leur étude attentive, surtout quand elle est menée en référence aux Actes des apôtres, devrait contribuer à éclairer l'histoire des chrétiens de la fin du premier siècle. Lus dans une perspective moins étroitement historique et plus théologique ils sont de nature à enrichir la réflexion sur le problème, dont l'actualité est patente, posé par la réception de la tradition.
2 8 rue Gounod
Jacques SCHLOSSER
F-67000 Strasbourg France
217. J. SCHMITT, Pierre (seconde épître de), in DBS VII, col. 1455-1463, col. 1462. 218. Voir pour illustration Hermas, Pasteur 14,2 et Polycarpe, Philippiens 3,2.
A UNIFYING T H E O L O G Y O F T H E CATHOLIC EPISTLES A CANONICAL APPROACH
INTRODUCTION
This paper proposes an interpretive strategy by which the Catholic Epistles (CE) are read together as a collection whose seven books are in tegral parts of a coherent theological whole. The perceived theological coherence of the C E is at odds with the modern critical assessment that underscores their literary, rhetorical and theological diversity, and there fore their independence from each other no matter what interpretive strategy is employed . The present paper will incline the angle of ap proach toward the CE collection differently, admitting into evidence new findings from the canonical process when these seven books were formed into a second collection of letters " t o provide a broader and more balanced literary representation of the apostolic witness than the letters of Paul furnished by themselves" . In doing so, I intend to chal lenge the critical consensus regarding the theological incoherence of the CE collection; in fact, m y thesis is that when this epistolary collection is rendered by the hermeneutics of the canonical process both its theologi cal coherence and its canonical role will be more clearly discerned. 1
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At the center of my study are two related observations about the final redaction of the C E collection that are laden with hermeneutical prom ise: First, when the CE became a collection, the Letter of James became its frontpiece to introduce the deep logic - what I call a " g r a m m a r " - of the collection's unifying theology and its anticipated role within the bib lical canon. Second, when the C E became a collection, it did so with Acts which supplies a narrative context that not only vests the entire col lection with religious authority but cues the priority of Jas within it. At this "canonical m o m e n t " when the final redaction of this collection evoked a recognition of its theological wholeness, the one (Jas as frontpiece) was made explicable by the other (Acts as narrative context). 1. The status of this question differs when compared to the scholar's scruples when approaching the Pauline Epistles (PE), which typically presumes its essential theological unity. Whoever the real authors or implied readers of PE are and no matter their final lit erary shape, they are routinely approached as extending the unified theological concep tion of a particular person. 2. H.Y. GAMBLE, The New Testament Canon: Recent Research and the Status Quaestionis, in L. MCDONALD - J.A. SANDERS (eds.), The Canon Debate. Peabody, M A , Hendrickson, 2 0 0 2 , p. 2 8 8 .
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R.W. WALL
A CANONICAL APPROACH TO THE C E AS A COLLECTION
If the angle of one's approach to the theology of the CE is inclined by relevant properties of the canonical process, then what can be assumed about these disparate writings is their theological coherence as a discrete collection within the New Testament, and as such the importance of their collective role in rendering a fully biblical witness to the word of God. In this initial portion of the paper, let me simply catalogue those findings that support this claim: 1. The final redaction of the CE collection stabilized a fluid move ment within the bounds of the canonical process. This may be deduced from Eusebius's initial statements about the CE in Ecclesiastical His tory, by what he did and did not observe about received traditions at the outset of the fourth century. He notes, for example, the widespread ac ceptance and use of 1 Pet and 1 John in the ancient church - at least as early as Polycarp's use of 1 Pet in the early second century (HE 4.14) but observes that other C E are disputed, mainly because of their lack of widespread use by the Fathers of the church . The most important data in consideration of this phenomenon are the variety of canon lists preserved from both the East and the West, and the literature generated by the various theological debates and conciliar gatherings in these regions of the church . Depending upon o n e ' s ac count of the chronology of the canonical process, these data are retrieved from the second through the fourth century. To these data are added the quotations and allusions of the C E found in early Christian writings - or their stunning silence in some cases - which also spans the canonical stage of Scripture's formation. Even a cursory investigation of this evi dence evinces a CE collection that did not stabilize until quite late in the canonical process, and the various internal changes that took place along its way to canonization - especially the placement of Jas as its frontpiece and its initial circulation with Acts as the collection's narrative (= bio3
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3. Eusebius clearly does not think the authority of "disputed" CE, and especially Jas, is because of theological error but rather because of their lack of use - whether "any church writer made use of (a book's) testimony" (HE 3.3). Similarly, Isho'dad of Merv (9 c.) considered only Jas, 1 Pet and 1 John canonical, while the other CE lacked reli gious authority because "style" (by which he surely means their literary idiom - more apocalyptical or mystical) limited their lack of use in the teaching ministry of the ancient church. 4. For a record of these various canon lists see B.M. METZGER, The Canon of the New Testament, Oxford, Clarendon Press, 1987, pp. 299-300, 305-315. Indices of quotations and allusions are found in many sources as well; but now consider also the variety of data (and relevant indices) included in The Canon Debate (n. 2). th
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graphical) introduction - provide important clues to its theological con tribution and continuing role within the biblical canon . 5
2. As a convention of the early catholic church, the canonical process gathered together diverse Christian writings into various collections whose roles and subject matter are consistent with the theological agree ments and purposes of the church's regula fidei . Moreover, since the hermeneutics of the canonical process were of coherence, not disso nance, the relationships between these various collections (e.g., Pauline and C E corpora) were constructed and included as complementary, not adversarial. In this sense, then, this sacred book formed by the church delimits its common ground rather than its irreconcilable differences; and the theological perspicuity of every part, O T and NT, is recognized as such by connection to the theological agreements of the church's ecu menical (and sometimes tacit) regula fidei. 6
Because the biblical canon as a whole was considered a textual analog of this Rule, the church considered the "plain sense" of each part (e.g., Pauline or CE corpus) generally cohered to a "unifying theology of Scripture". While modern critical exegesis has done well to articulate and explain the theological diversity retrieved from the multiple parts of the biblical canon - a diversity that reflects and endorses the theological pluriformity of the church catholic - the canonicity of every part within the whole commends their theological coherence with every other part. I suspect this is exactly what Eusebius meant by the rubric "catholic" allgemeingültig rather than allgemein - a rubric that would then be apro pos in describing every part of the biblical whole! According to these hermeneutical cues supplied by the canonical process, then, we can approach the prospect of a "unifying theology of the C E collection" in good faith; in fact, the presumption of a "unifying theology of Scripture" implies the coherence of every biblical collection to the theological convictions of the regula fidei as one subset of the whole. Moreover, if this a priori is accepted, then one is better able to 5. I acknowledge my debt to David Nienhuis for the observation, made in the context of a stimulating and ongoing private conversation, that the formation of the CE collection as an historical phenomenon has high purchase for understanding its ongoing canonical role and theological contribution for NT theology. In particular, he suggests that the late addition (and composition!) of Jas in some sense "completes" and is constitutive for the CE collection qua collection. This is the central thematic of his University of Aberdeen dissertation due finished in 2004 under the direction of Professor Francis Watson. 6. For the idea that the biblical canon as a whole and each part within is judged as roughly analogous to an ecclesial (and ecumenical) regula fidei, see R.W. WALL, Rule of Faith in Theological Hermeneutics, in J. GREEN - M. TURNER (eds.), Between Two Hori zons, Grand Rapids, MI, Eerdmans, 2000, pp. 88-107.
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compare and assess the peculiar contribution each part makes to the whole, and what this whole would lack if constructed in absence of each peculiar part. Specifically, the theologian is better able to compare the contributions made by the Pauline and CE corpora as they are mutually delimited by the same theological agreements of the church's regula fidei, while at the same time recognizing and assessing the exclusive, distinctive theological adumbrations of each in turn. 3. The CE collection was formed because of its "exclusive, distinctive theological adumbration". In fact, the final redaction of the CE into a discrete collection was the byproduct of an intentional movement that recognized its important contribution to the whole - without which part the whole would not be a whole. That is, its sevenfold shape does not appear to follow a mechanistic pattern of arrangement - for example, according to length , perceived date of composition , or as a matter largely determined by the production of a canonical edition in codex for mat . In fact, I am aware of no scholar who denies that the production of the N T served mostly religious aims, whether epistemic or sacramental. Thus, the different canon lists extant from the different regions of the early church reflect differing theological judgments made by different ecclesial traditions that resulted in different groupings of writings, which were then " r a n k e d " according to their importance when performing a variety of religious tasks (liturgical, educational, missional, etc.). The arrangement of these literary collections, and of individual writings within them, envisages ecclesial value judgments that reference Scrip ture's canonical role in forming a community's theological understand ing of God, and its practical witness based upon those beliefs. 7
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7. Jas has 1749 words/247 stichoi; 1 Pet has 1678 words/237 stichoi; 1 John has 2137 words/269 stichoi. Adding 2 John (245 words/32 stichoi) and 3 John (219/31 stichoi) to 1 John and 2 Pet (166 stichoi) to 1 Pet does not alter this arrangement, especially when throwing Jude (71 stichoi) into the mix. 8. Although dating biblical compositions is tricky business, the early use of both 1 Pet and 1 John would commend an early date of composition, probably sometime during the first century in their final form. By the same token, 2 Pet and Jas are almost certainly much later pseudepigraphy - perhaps even concurrent with and intended for the comple tion of the C E collection. As an important element of his Aberdeen dissertation (see n. 5), Nienhuis promises a new thesis regarding the composition of Jas as it relates to the ca nonical redaction of the C E collection. It is my understanding that he is prepared to argue that Jas is pseudepigraphy that is motivated by canonical concerns - that is, by the consti tutive role the letter would perform in completing a "Pillars" collection for use within an emergent NT canon. 9. Trobisch, for example, seems to posit a great deal of importance in the production of codices in the "final redaction" of the NT canon. See also E.J. EPP, Issues in the Inter relation of New Testament Textual Criticism and Canon, in MCDONALD-SANDERS (eds.), The Canon Debate (n. 2), pp. 503-505.
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In this same manner, the emergent N T was edited over time into a fi nal canonical edition by particular arrangement of its discrete collec tions, set in theologically suggestive relationships with each other, rather than by recognition of the importance of individual writings, one at a time. Individual writings did not circulate as such; rather, during the ca nonical process individual writings were preserved, edited and then re produced, circulated, read and then canonized in combination with other individual writings as canonical collections . Indeed, the earliest history of the two epistolary collections would seem to indicate that they were placed side-by-side within the biblical canon to facilitate a constructive ("self-correcting and mutually-informing") conversation between them . 10
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4. In my recent study of the formation of the Pauline canon, I argue that the theological conception of the canonical Paul, articulated initially in a nine- or ten-letter corpus, was brought to its completion and "fixed" by the late addition of a small and marginal collection of three so-called "Pastoral Epistles", probably toward the end of the second century. The methodological rubric I use in drafting this idea is "the aesthetic princi ple", by which I mean that the final redaction of a biblical collection be came "canonical" precisely at the moment faithful readers/auditors rec ognized the theological integrity or wholeness of a particular literary " s h a p e " - in this case the final grouping of thirteen Pauline letters inclu sive of the Pastoral Epistles . 12
The formation of a biblical collection might be studied as a phenom enon of the canonical process by which a fluid body of writings is stabi lized, completed, and arranged by the addition (or subtraction) of certain "scriptural" writings. For example, Irenaeus said the fourfold Gospel has an inherent integrity much like the "four corners of the earth"; and this Gospel's foundational value in shaping Christian faith is symbolized by its priority as first within the NT, with Matthew's gospel typically 10. D . TROBISCH, Die Endredaktion des Neuen Testaments (NTOA, 3 1 ) , Gottingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1996, pp. 4 0 - 4 3 . 11. For a fuller description of this project, and illustrations of it, see R.W. WALL E.E. LEMCIO, New Testament as Canon (JSNT SS, 7 6 ) , Sheffield, JSOT Press, 1992. 12. R.W. WALL, The Function of the Pastoral Epistles within the Pauline Canon of the New Testament: A Canonical Approach, in S.E. PORTER (ed.), The Pauline Canon, Leiden, Brill (in press). Given the internal threat posed by "heretical" readings of Paul, especially those identified with Marcion, the need for a second collection of letters to bring balance and constraint to his theological trajectory became readily apparent - and similar in emphasis to the concerns voiced already by the James of Acts to Paul in Acts 2 1 , 2 0 - 2 1 (see below). Marcion becomes an important symbol of the canonical process that produced collections of writings as the necessary correctives in order that the church's emergent Scriptures might perform more effectively its role as textual analog of the regula fidei.
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given priority among the four as the most relevant continuation of Tanakh's narrative of G o d ' s salvation . That is, the theological integrity of the final redaction of a biblical collection, its placement with the NT, or even of an individual composition within the collection " s i g n s " a role apropos to the motives of a biblical canon. This same "aesthetic principle" glosses the final shape of the CE col lection, symbolized perhaps by its sevenfold membership (seven = whole ness). That is, a particular grouping of seven CE is stabilized, com pleted, and arranged as canonical upon the community's recognition that this particular literary shape - and not another - embodies a theological wholeness. There are at least five properties inherent to the canonical redaction of the C E collection that reflection such a literary realization, however im plicit: A. Jas 2,22. Without proposing a theory of the book's composition as pseudepigraphy, I suggest that the eventual canonization of Jas accords with a theological judgment made about the canonical function of the CE collection as a whole (see below). Unlike the case for 2 Pet, which was added (and perhaps even composed) to extend the theological con ception of 1 Pet, Jas was added to an emergent collection much later, probably toward the end of the third century, to help delimit its working relationship with a Pauline collection, which was already a fixed prop erty within an otherwise still fluid biblical canon. The catholic tendencies of the canonical redaction, by which an aes thetic of theological wholeness is pursued, are reflected by what is argu ably the controlling text of the book's famous essay on "faith and w o r k s " , Jas 2 , 2 2 . Read canonically, this verse stipulates that "faith alone" (i.e., professed faith without works) - what had become the some what troubling hallmark of the Pauline tradition - cannot stand alone but is rather "brought to completion by the w o r k s " ( £ K T G > V epycov f\ niaxic, £TeA,ei(b0r|) - a phrase that both captures the moral inclination of the entire C E collection and sounds a cautionary note that any reductionistic reading of the Pauline corpus may well degenerate into a sola fideism . 13
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13. D . MOODY SMITH, When Did the Gospels First Become Scripture?, in JBL 1 1 9 (2000) 3-20.
14. For this argument, see R . W . WALL, Community of the Wise: The Letter of James (The New Testament in Context), Valley Forge, PA, Trinity Press [now Edinburgh: T&T Clark], 1997, pp. 1 4 8 - 1 5 2 . Most subsequent comments on Jas are expanded in this commentary. 15. Even though, as many contemporary scholars have opined, Jas 2 , 1 4 - 2 6 does not carry the same hefty weight for its author that it has during its (esp. Protestant) Wirkungsgeschichte, it is probably this text more than any other - precisely because of its "anti-Pauline" correction and not in spite of it - that attracted the canonizing community
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B. 2 Pet 3,1-2. At a relatively early and more fluid stage in the forma tion of the CE collection, 2 Pet was added to 1 Pet in order to complete a Petrine theological conception . Again without proposing a theory of 2 Pet's composition as pseudepigraphy, whether as " 2 J u d e " (as critical orthodoxy would have it) or as 2 Pet (as the church's canonical redaction would have it), 2 Pet itself claims to be a "second letter" written "that you should remember the words spoken in the p a s t . . . " (3,1-2). That is, from the perspective of the canonical process, the purpose for adding 2 Pet to the collection is to complete the " s h a p e " of its Petrine witness for the theological instruction of subsequent readers. C. Coherence of the three John epistles and the church's recognition by the fourth century that the three form a discrete unit . The intertextuality of the three Johannine letters is clear from even a cursory read ing. M y point again is that 2 John and 3 John bring to completion the theological conception introduced by 1 John. J. Painter's recent com mentary is helpful in this regard, not only by reading the three epistles together but then by locating them within the C E collection and by r e sisting the tendency of reading them either as three bits of a N T Johan nine corpus - an exegetical practice as early as Origen - or as a written response to problems created by the Fourth Gospel in a dialectical fash ion that decidedly is not prompted by the final form of the N T canon it self. D. Jude's placement within the CE collection. Painter's reading strat egy agrees with the motive of the canonical redaction that places Jude between, thus separating the three John letters from T h e Apocalypse. That is, as a canonical metaphor, the inference is that John's letters are to be read together and within context of the C E collection and not as members of a N T Johannine corpus. It should be noted that the memorable benedictory that concludes Jude (Jude 24-25), which some contend is reason alone for its preserva tion and canonization, is also a suitable ending to the entire collection, not because of its doxological argot but because of its practical interest in safeguarding those who might " s t u m b l e " into false teaching or im16
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to its importance; Jas 2 , 1 4 - 2 6 captures well the intent of the canonical process if not then of its authorial motive. Re-read within its current NT setting, Jas responds to a prospec tive Pauline canon within the Canon by refocusing the reader's attention on 2 , 2 2 (rather than 2 , 2 1 ) to remind him that the canonical motive is not adversarial but complementary of a closer analogy to the church's regula fidei (see above). 16.
See R.W. WALL, The Canonical Function of 2 Peter, in BI9 ( 2 0 0 1 ) 6 4 - 8 1 .
17. For this point, see J. PAINTER, 1,2, and 3 John (SP), Collegeville, MN, Liturgical Press, 2 0 0 2 , pp. 5 1 - 5 8 , whose interpretive strategy is to read the three letters together; also C.C. BLACK, The First, Second, and Third Letters of John (NIB, 12), Nashville, TN, Abingdon, 1 9 9 8 , pp. 3 6 5 - 3 7 8 , esp. 3 6 6 .
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moral lifestyle (cf. Jude 4). Significantly, Jas concludes with a similar exhortation that to rescue believers who "stray from the truth" is to save their "souls from death" (Jas 5,19-20); and, in fact, this orientation to the congregation's internal spiritual welfare will become an organizing thematic of the entire collection. Accordingly, then, Jude's benediction, when reconsidered in the context of the final redaction of the CE, is ap ropos to the collection's motive and role within the biblical canon. E. Jude along with Jas - books named after brothers of the Lord form the literary brackets of the entire collection, thereby guaranteeing their religious authority and importance for the future of the church catholic. What must be said, then, is that the authority of this collection is due not only to its connection with the Jerusalem pillars, made famous by the Book of Acts, but by its connection to the Holy Family . The importance of this relationship in the sociology of the canonical process has less to do with the hagiography of persons and more to do with the authoritative traditions linked to their names. 18
These properties of a final redaction evince historical moves that in some sense " c o m p l e t e " and make more effective (with respect to the church's intentions for its Scripture) an earlier, thinner rendition of the collection. 2 Pet, 2-3 John, Jude and finally Jas are each added at differ ent moments during an historical phenomenon that may reasonably be explained as evidence of the church's recognition of the importance of this second collection of letters within its biblical canon. 5. The question " W h e n did the sevenfold CE collection become Scripture?" appears related to the broad recognition that a letter from " J a m e s " was necessary in completing the pages of a Peter-John episto lary catalogue. Perhaps the most decisive observation from a canonical perspective, then, is to discern the motive for this late inclusion of Jas, which may be properly assessed by its placement as the frontpiece in the collection's final redaction . While the fourfold Gospel and the thirteen19
18. Bauckham's study of members of Jesus' family, in particular Jas and Jude, makes a compelling case for their lasting influence within the Jewish church in Palestine; R. BAUCKHAM, Jude and the Relatives of Jesus in the Early Church, Edinburgh, T&T Clark, 1990. In particular, they came to symbolize the importance of the Jewish legacy within the church that elevates the church's moral obligations as conditional of its ongo ing life with God. Thus, the final redaction of the CE, now enclosed by Jas and Jude, reifies this point within the canon. 19. This is a principal thematic developed in my unpublished seminar paper Acts and James, presented to the 2002 Durham meeting of the SNTS. My interest is largely rhetori cal rather than historical in continuity with Eusebius who vested theological value in the order of the letters.
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letter Pauline canon were almost certainly fixed by then, and probably Acts had emerged in its two different versions to perform a strategic role within the emergent N T c a n o n , the same cannot be said of the C E col lection (or either Hebrews or John's Apocalypse). That a grouping of non-Pauline letters from the two leading apostolic successors of Jesus, especially when read by the first half of Acts where the story of their triumphant succession from the Lord is narrated, and his two brothers (see above) is formed to add to the biblical canon makes good sense, especially within a community that confesses its identity as a "holy apostolic church" and venerates the memory of the Holy Family. Moreo ver, according to Acts it is Peter who defends Paul's mission - even using Pauline terms in doing so (Acts 15,6-12) - before the leaders of the Jerusa lem church led by James (cf. Acts 15,13-29; 21,19-26). It would seem rea sonable, then, that the canonical process would delimit an epistolary col lection to reflect their close working relationship, especially within a com munity in which the legacy of Paul had evidently triumphed and within the canonical process, then, for which the relevant question had become what literature should be read alongside of Paul to enable the church to hear Paul's word more precisely to prevent its distortion. And a purported letter from James had become the critical means to that end; but why? 20
Given the importance of James whose resume includes founding and pastoring of the Jerusalem church, the brother of Jesus, and an important leadership role in the missions of both Paul and Peter (cf. Gal 2,1-15; Acts 15,4-29; 21,17-25), the addition of a book in his name to the C E collection makes good sense . This very logic is evinced by Eusebius 21
20. C. MOUNT argues that the church's reception of Acts as Scripture is indebted to Irenaeus who uses Acts in Adv.haer. to defend a particular account of Christian origins in response to Marcion; Pauline Christianity: Luke-Acts and the Legacy of Paul (SupplNT, 104) Leiden, Brill, 2002. While Ireaeus does not know Jas, his use of Acts to prove that the Pauline letters agree with the gospels of other "Jerusalem pillars" envisages a logic that may have calibrated a later period of the canonical process when Acts circulated with the CE to demonstrate that the Pillars' letters forge a unified apostolic tradition with the Pauline letters. 21. In this regard, we should note the debates over the apostolicity of James and his "biological" relationship to Jesus, given the church's belief of Mary's perpetual virgin ity; the subtext of both debates was the ongoing authority of the Jacobean legacy within the broader church. In fact, the Book of Acts would seem to legitimize the continuing importance of James on different grounds than his apostolicity or his relationship to Je sus: namely, as the leader of the Jerusalem church. In this regard, in the preface to his early commentary on the CE (c. 700) Bede the Venerable writes, "Although in the list of the apostles Peter and John are accustomed to be ranked as more important, Jas is placed first among these for the reason that he received the government of the church of Jerusa lem, from where the source and beginning of the preaching of the Gospel took place and spread throughout the entire world"; D . HURST (trans.), On the Seven Catholic Epistles (Cistercian Studies Series, 82), Kalamazoo, MI, Cistercian Publications, 1985, p. 3.
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who recalls the narrative of Hegesippus (HE 2.23.3-18) regarding the martyrdom of "James the Just (or 'Righteous O n e ' ) " as testimony to his courageous fidelity and Jewish piety and as the apparent reason why his "disputed" book should be included in the so-called "catholic" collec tion (HE 2.23.25). While the connection between these traditions about the Jewish piety of James and his "catholic" letter appears to underwrite the authority of his "disputed" letter, my suspicion is that the "canoni c a l " portrait of James found in the Book of Acts (rather than those found in other non-canonical Jewish and Gnostic writings) is more decisive for understanding the origins and ultimate canonization of the letter of James . It therefore remains a puzzlement for most scholars, especially given the evident importance of personal traditions about James reflected in canonical Acts, that no second or third century canon list mentions a let ter from James, nor does any Christian writer quote from or clearly al lude to i t . While Origen is the first to mention the letter (ComMatt 19.61) , neither he nor then Eusebius seems familiar with its teaching; and Athanasius is the first to list it a generation later as "canonical" in his famous Easter letter of 367 CE, a verdict then confirmed by the Councils of Rome (382 CE) and Carthage (397 CE). Moreover, tradi tions about the legacy of James are pivotal to several writings outside the mainstream (Jewish Christian, Gnostic), in which he is depicted as the pious pastor of the Jewish church and key strategist of the church's universal mission, in particular as the sometimes opponent of Paul's law-free mission to the nations. These same writings, however, do not 22
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22. Note for example the close linguistic and conceptual relationship between Acts 15,13-29 and 21,17-26, and Jas. I should mention that the addition of the dominical "do unto others" saying to the all important 15,20.29 (but strangely not 21,25) of Codex Bezae may serve a canonical function to draw linguistically the close connection between the teaching of Jesus and of James to underwrite his religious authority for the future of the church. 23. Some scholars continue to argue that Clement of Alexandria who wrote an inter linear commentary on 1 Pet and 1 John (Adumbrationes) included Jas in this work as well. Since his commentary survives only in a much later and highly edited Latin "trans lation" from Cassiodorus, the inclusion of Jas may reasonably be doubted given the si lence about an epistolary James from this same period and region. The first important in terpreter of the CE as a collection, including Jas, appears to be Didymus from the midfourth century, who is noteworthy as a pioneer of the "commentary" genre. It should be noted that Augustine mentions in passing a commentary on Jas (Ret. 58) but unfortunately we no longer possess a copy of it. In any case, the authority and importance of a letter from St. James is almost certainly a fourth century phenomenon. 24. Origen claims that Jas is "Scripture" but evidently this is not then to claim that Jas is also "canonical". Recently, several scholars have demonstrated the differences be tween the two from both historical and systematic perspectives.
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refer to a letter, nor does their portrait of James explain the thematics 25
found in the letter of J a m e s . Most explain this silence of an epistolary James by the sociology of a mainstream church where the negative response to the anti-Pauline bash ing by the second century tradents of James and to their more " c o n servative" Jewish convictions and practices (and in some cases heretical inclinations) led to the letter's suppression. Only later is this letter from James reclaimed, perhaps in edited form, and put back into circulation as suitable reading for the mainstream apostolic church. Yet the same could be said of the Pauline canon, which was also used by marginal and even heretical movements within the church but which was already fixed by the end of the second century. T h e suppression of a letter from James also fails to explain why a similar silence is found among more marginal Jewish and Gnostic writings of the second century for w h o m the legacy 26
of James was valorized . Again, the present paper offers n o alternative theory of the origins and transmission of Jas in earliest Christianity; m y thesis about the performance of James as the frontpiece of a canonical collection of C E does not depend upon a particular theory of its produc 27
tion . 25. Esp. the Pseudo-Clementines, Gospel of the Hebrews, Gospel of Thomas, Apocryphon and the two Apocalypses of James, Eusebius' recollection of Hegesippus in HE, Clement of Alexandria's Hypotyposes portray his personal piety, his reception of special revelation from God, his political importance in Jerusalem, and his martyrdom; however, whether or not fictitious, these personal characteristics do not carry over directly to Jas whose thematics are more "practical", and its Jewish ethos and beliefs are not cast in overtly personal terms. I do find the repeated references to a priestly James - as the Aaron to Jesus' Moses - fascinating, given the letter's emphasis on purity; cf. S. MCKNIGHT, A Parting Within the Way. Jesus and James on Israel and Purity, in B. CHILTON CA. EVANS (eds.), James the Just and Christian Origins (SupplNT, 98), Leiden, Brill, 1999, pp. 83-129. In this same collection (p. 252), Chilton offers the suggestive hypoth esis that the practice of Nazirite vow-keeping within primitive Christianity "has been un derestimated, and that James' deep influence is perhaps best measured by the extent to which other prominent (Christian) teachers fell in with his program (of Nazirite purity)". 26. I myself have argued, with others, that the Ebionites followed such a "canon", which included Jesus traditions found in Matt; in WALL-LEMCIO, NT as Canon (n. 11), pp. 250-271. A more precise articulation of this same point, however, would have distin guished between the second century legacy of St. James and record of an actual letter from him. 27. Most modern constructions of the authorship of Jas fail to distinguish a theory of composition from its canonization. Given its apparent Palestinian sources, which seem to reflect a first century Sitz im Leben and its literary genre as a diaspora letter from the same period, the motive of its composition must include the preservation of the memory of James even if then to underwrite its important role in the final redaction of the NT. These issues have recently been reconsidered in a highly suggestive essay by M. KONRADT, Der Jakobusbrief als Brief des Jakobus, in P. VON GEMÜNDEN - M. KONRADT -
G. THEISSEN (eds.), Der Jakobusbrief. Beiträge zur Rehabilitierung der "strohernen Epistel" (Beiträge zum Verstehen der Bibel, 3), Münster, LIT Verlag, 2003, pp. 16-53, in which he offers a tradition historical theory of the composition. His study compares the
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6. If we assume the CE collection took its final literary shape during the fourth century, then we might also assume that its primary motive would likely have been to forge a more viable reading of the extant Pauline collection. Given the history of heretical currents emanating from the margins of the Pauline tradition during the canonical period, we should not be surprised that a substantial Pauline criticism, an important hallmark of the James tradition within the early church (e.g., the PseudoClementines, Gospel of the Hebrews), would have preserved by the church. The viability of such an intracanonical conversation between these two collections, then, does not rest on its conceptual harmony but on a mutual criticism that insures the Pauline witness coheres to the church' s regula fidei *. By the same token, not only is the theology of the catholic collection transformed by the inclusion of Jas, the former Petrine-Johannine group ing is recalibrated as a more functional Pauline criticism. The difficult relations between the "Pillars" and Paul recalled from Gal 2,1-15 and hinted at elsewhere in his letters and also in Acts are transferred to the two epistolary corpora as textual partners engaged in a self-correcting and mutually-informing conversation according to the hermeneutics of the canonical process. In particular, the reception of Jas cues the church's critical concern about a reductionistic use of Pauline tradition that edits out the church's Jewish legacy, especially an ethos that resists any attempt to divorce a profession of orthodox beliefs from an active obedience to G o d ' s law in a pattern of salvation (see below) . 2
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7. Trobisch's observation that the Book of Acts played a strategic hermeneutical role in the canonical process is certainly correct; howuse of traditions Jas holds in common with 1 Pet, which form a discrete trajectory of ear lier Pauline and Jesus traditions. Among it's other accomplishments, these links between Jas and 1 Pet may prove to have "canonical" implications of the sort cashed out in the final section of this paper. 28. Ironically, Luther's negative appraisal of Jas - that it fails a Pauline test of ortho doxy - illustrates this same methodological interest in reading Jas and Paul together. Luther's failure in my mind was not employing the hermeneutics of the canonical process in doing so. 29. My formulation of the relationship between the Pauline and Catholic witnesses follows the lead of J.A. Sanders who long ago commented that the Pauline witness con centrates upon the "mythos" - or unifying narrative - of God's salvation as articulated/ promised in the Torah and fully articulated/fulfilled in Christ; cf. J.A. SANDERS, Torah and Paul, in J. JERVELL - W.A. MEEKS (eds.), God's Christ and His People. Studies in Honour of Nils Alstrup Dahl, Oslo, Universitetsforlaget, 1977, pp. 132-140. In my opin ion, it is the ethos of the Torah - obedience as loving response to God's saving mercies that the CE collection concentrates upon. The result of reading both corpora together, then, is a fuller presentation of God's gospel. See WALL-LEMCIO, The NT as Canon (n. 11), pp. 232-243.
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ever, to read Acts as an "early catholic" narrative, which is then added to the biblical canon to moderate the conflict between Paul and the " J e rusalem Pillars" articulated in Gal 2,1-15, is mistaken in my view. I re main unconvinced that Acts is "early catholic" in either its theological or sociological sensibility; more critically, this perspective fails to rec ognize the substantial role the James of Acts performs within the narra tive world of Acts in directing the plotline of Paul's mission to the na tions. My growing conviction is that the Acts narrative (rather than Gal 2) best explains the importance of a final redaction of the CE collection, especially the placement of Jas as its frontpiece, if Acts and Jas arrived together at the same canonical moment.
THE ROLE OF ACTS IN THE FINAL REDACTION OF THE CE COLLECTION
The Acts of the Apostles narrates a story whose central characters are the same authors (e.g., Peter, Paul, James) and audiences/sources (e.g., Jerusalem, Timothy, Corinth, Ephesus, Rome) referenced or alluded to in the subsequent N T letters . Biblical readers naturally make associa tions between these common elements, noting as well a common con cern for important topics of Christian existence (e.g., sharing goods, pu rity, suffering, the performance of the word of God, congregational unity). Literary intertexts of this sort suggest a logical relationship as members of the same conceptual universe; from a perspective within the NT, Acts supplies the "authorized" narrative behind its most important epistolary texts. Considered from this angle of vision, then, the critical orthodoxy of reading Acts with only the Pauline collection (Knox, Goodspeed, Bruce, Delatte, and many others) seems misplaced - even though the rehabilita tion of Acts (perhaps even in a " n e w and improved" version) during the second half of the second century and then a renewed interest in Acts criticism during the second half of the twentieth century may well have been prompted by the strategic relationship between the Paul of Acts and certain Pauline letters (e.g., Rom, Eph, Gal, 2 Tim). During the ca nonical process, however, Acts came to supply a narrative introduction for the entire epistolary canon, Pauline and Catholic; in fact, the rela tionship between Acts and CE is elevated in importance because they "came into life" together during the canonical process. 30
30. While the logical relationship between Acts and the NT letters is reflected by the canonical process (see below), the narrator's own claim (Acts 1,1) is that Acts is better related to the preceding gospel probably for christological rather than literary reasons.
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Given the importance of Acts during the canonical process, it would seem reasonable that the portraits of the church's earliest leaders in Acts - retrieved from early traditions of their teaching and ministry roughly concurrent with the earliest stage of the canonical process - envisage a particular account of their religious authority, the nature of their ministry (e.g., prophetic, pastoral, missionary), and the subject matter of their kerygmata that supplied the canonizing community with both an ex planatory context and religious warrant why then these NT writings when considered together as formative of Christian theological under standing . In particular, the portraiture of Christian leaders and their relations with each other within Acts frames a particular strategy for relating the biblical writings linked to their names/traditions within the emergent biblical canon. Similarities and dissimilarities in emphasis and theologi cal conception found when comparing the Catholic and Pauline letters, for example, correspond to the manner in which Acts narrates the nego tiations between different missions and the theological convictions and social conventions required by each (e.g., Acts 2,42-47; 9,15-16; 11,118; 12,17; 15,1-29; 21,17-26). The working relations between Peter and Paul, or Paul and James, or James and Peter, or even Peter and John as depicted within Acts are generally collaborative rather than adversarial, and should frame the interpreter's approach to "their" biblical writings as essentially complementary in meaning and purpose even though cer tainly not uniform and sometimes even in conflict. For example, if Peter and John or James and Paul are enjoined as partners in this narrative world, then we should expect to work with their written traditions in a partnered way that assumes their theological distinctiveness and interde pendence. 31
Because both the narrative world and its central characters are the lit erary constructions of the story-teller, and are shaped by his theological commitments, the interpreter should not expect a more precise connec tion between, for example, the kerygma of the Peter of Acts and a Petrine theology envisaged by 1-2 Pet. Nevertheless, there is evidence that Luke did indeed draw upon important traditions common to the Petrine letters when composing his narrative of the person and work of Peter. In 3 1 . I am mindful of H . RÀISÀNEN'S probing historicist response to his entitled ques tion, Neutestamentliche Théologie? (SBS, 186), Stuttgart, Katholisches Bibelwerk, 2000, which distinguishes more precisely between first and subsequent readers, within faith and academic communities. The canonical approach presumes that biblical theology is a theo logical rather than historical enterprise, whose aims are determined by the church's (rather than the per se academy's) intentions and so religiously formative more than intel lectually informative.
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particular, 1 Pet's interpretation of Jesus as Isaiah's "Servant of G o d " (1 Pet 2,21-25; cf. 1,10-12), the evident core of Petrine christology, is anticipated by four references to Jesus as "servant" in Acts (and only there in the NT), the first two in speeches by Peter (Acts 3,13.26) and the last two in a prayer by the apostles led by him (4,27.30) . Moreover, the God of the Petrine epistles, who is known primarily through Jesus' resurrection (1 Pet 1,3.21; 3,21; cf. Acts 2,22-36) and as a "faithful Creator" (1 Pet 4,19; cf. Acts 4,24), agrees generally with L u k e ' s tradi tions of a Petrine kerygma. Even Peter's claim that the central mark of Gentile conversion is a "purity of heart" (Acts 15,9) is strikingly similar to 1 Pet 1,22. Finally, the central eschatological claim found in Acts, fa mous for its sparseness on this matter, is placed on Peter's lips (Acts 3,20-23), thereby anticipating the keener stress posited on salvation's apocalypse in 1-2 P e t . A second example may be the far thinner por trait of John in Acts, who although depicted as Peter's silent partner uses his one speaking role in Acts 4,19-20 to sound a key note of the Johannine epistles: "...for we cannot but speak of what we have seen and heard" (so 1 John 1,1-3) . 32
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When these thematic and linguistic intertexts are grounded in the text of Acts - a narrative in which these characters have enormous religious authority and purchase for the church's future - the epistolary expres sion and development of these core themes underwrites their importance for the church's future formation. Moreover, the certain impression of kerygmatic continuity between the Lord's apostolic successors (Peter/ John) and Paul, cultivated by Acts, would seem to commend a more constructive relationship between their writings. Acts performs an inter pretive role, not so much to temper the diversity envisaged by the two different collections of letters but to prompt impressions of their rhetori cal relationship within the NT. According to Acts, the church that claims its continuity with the first apostles tolerates a rich pluralism even as the apostles do within Luke's narrative world, although not without contro versy and confusion. What is achieved at the pivotal Jerusalem Council (Acts 15) is confirmation of a kind of theological understanding rather 32. Cf. O. CULLMANN, Peter. Apostle-Disciple-Martyr, London, SCM Press, 1953, pp. 63-69. 33. See WALL, The Canonical Function of 2 Peter (n. 16), pp. 77-79. 34. See P.N. ANDERSON, The Christology of the Fourth Gospel, Harrisburg, PA, Trin ity Press, 1996, pp. 274-277, who suggests that at the one point in Acts where Peter and John speak with one voice (Acts 4,19-20) - Peter alone speaks when they are teamed elsewhere in this narrative world - the narrator has constituted a saying that combines Petrine (4,19) with Johannine (4,20) traditions. Their pairing in Acts in both work and speech may well envisage an emerging consensus within the ancient church that their tra ditions, both personal and theological, are complement parts of an integral whole.
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than a more political theological consensus. The divine revelation given to the apostles according to Acts forms a "pluralizing monotheism" (= J.A. Sanders) which in turn contextualizes Paul's idiom of two discrete missions and appropriate proclamations, Jewish and Gentile, in Gal 2,710. The variety of theological controversies Paul responds to in his let ters, with whatever rhetoric he employs in doing so, is roughly analo gous to the "Cornelius problem" in Acts. Of course, Acts portrays Peter (rather than Paul) as first initiating and then explaining the admission of uncircumcised (= unclean) Gentiles into the church; and the Peter of Acts finally defends Paul's mission and its spiritual results in a speech that is remarkably Pauline in theological sensibility (15,7-11) - perhaps reflective of Luke's familiarity with and perceived unity of the Petrine and Pauline traditions used in Pauline/ Petrine letters, as many modern interpreters have noted . More remark ably, however, the question of whether or not to "Judaize" repentant Gentiles is settled before Paul comes back into the narrative to begin his mission to the nations in Acts 11,1-18. In fact, Peter's second rehearsal of Cornelius' repentance at this " s e c o n d " Jerusalem Council responds to a different problem altogether, posed by the church's Pharisaic contin gent that is concerned (as evidently is James) about a normative halakhah for mixed Christian congregations (15,4-5). Peter's response concentrates - presumably agreeing with Paul's initial proclamation (cf. 13,38-39) - on an internal "purity of the heart" (15,9). 35
James, however, expands this Pharisaic concern for religious purity to include socio-religious practices (15,20); in fact, his halakhah reflects the more "traditional" worry of Jewish religion regarding syncretism the "gentilizing" of repentant Israel (15,20; see also 21,17-26) - and in particular the possible attenuation of the church's Jewish legacy in the Diaspora as Paul's mission to the nations takes the word of God farther from Jerusalem, the epicenter of the sacred universe (15,21). It is in re sponse to J a m e s ' Jewish concerns that the narrative of Paul's mission to the nations is plotted in Acts; and, therefore, he provokes and responds to a different set of theological controversies than does the epistolary Paul who responds to internal opponents who want "to judaize" repent ant Gentiles. According to Acts, this issue is already settled by Peter at an earlier meeting in Jerusalem (11,1-18); for this reason those agitators who raise the question again in Antioch (15,1-2) are summarily dis missed by James as "unauthorized" teachers who do not represent the position of the Judean church (so 15,24). In fact, the entire narrative of 35. Although I think this critical conclusion is typically overstated, since there are fundamental differences between Scripture's Petrine witness and the Pauline kerygma.
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Paul's European mission in Acts (in Philippi, Thessalonica-Athens, Cor inth, Ephesus) is simply not shaped by the same theological controver sies that Paul stakes out in his letters as provoked by his Gentile mission. In general, the Paul of Acts is exemplary of a more Jewish definition of purity (cf. 24,16-21). Thus, he is arrested in Philippi for being a Jew (16,20-21) and earlier circumcises Timothy (16,3; cf. Gal 2,3!), not only to testify to his personal loyalty to the ancestral religion (cf. 21,23-26) but more critically to symbolize the importance of J a m e s ' concern to preserve it in consecrated form. Consider, for example, the role Timothy performs in Acts in contrast to Titus in Gal 2. Timothy is of mixed par entage, Jewish and Gentile; and in prospect of the Diaspora church, Paul circumcises him in order to preserve his mother's Jewish inheritance. He stands as a symbol of Paul's missiological intent in Acts, which is to found Christian congregations in the Diaspora with a mixture of Jewish and Gentile converts but whose faith and practices are deeply rooted in the church's Jewish legacy. From this canonical perspective, then, it may well be argued that a principal concern of the second collection of epistles is to bring bal ance to a Tendenz toward religious syncretism by which the pressures of the surrounding pagan culture may distort if not then subvert the church's substantially Jewish theological and cultural legacy. The repe tition of familiar Pauline themes in the CE, then to problematize them, acquires a thickened meaning when read in context of the antecedent Acts narrative: that is, a prior reading of Acts alerts the reader of C E that an increasingly Gentile church (= Pauline) must consider its reli gious and public purity as G o d ' s people according to the redemptive calculus of their Jewish canonical heritage (Scriptures, practices, pro phetic exemplars, etc.). As such a Christian congregation's profession of faith must be embodied in its public and internal practices in keeping with the ethos of its Jewish legacy . The full experience of G o d ' s right eousness is by performance of works pleasing to God and neighbor, and not merely by sola fide - no matter how orthodox or sincerely con fessed. 36
36. Of course, the Pauline letters would not disagree with this conclusion. I would ar gue, however, that for the canonical Paul these social, moral and religious practices, which mark out a people as belonging to Christ, are the natural yield of being "in him"; and that being in Christ results from professing that "Jesus is Lord". This redemptive cal culus, whether understood politically or personally, is concentrated by the core beliefs of the Pauline gospel rather than by the resurrection practices of the Pauline churches. It is this essential difference in "theo-logic" that fashions - 1 think from the early church for ward - a different spirituality, centered on orthodox confession, than found in those con gregations that embody traditions authorized by the CE.
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A GRAMMAR FOR A UNIFYING THEOLOGY OF THE C E COLLECTION
A PROPOSAL
The surprising priority of Jas, indicated by its placement as the frontpiece in the final form of the C E and explained in relationship to the James of Acts, insinuates its strategic rhetorical purpose upon the entire collection. The typical rhetorical role of a frontpiece within any literary collection is to make introductions; and as a theological introduction, Jas could be read as putting into play a variety of distinctive themes, whose linguistic and conceptual similarity with other C E may reason ably be explained as the sharing of common traditions - albeit from dif ferent regions and for different ends (e.g., K o n r a d t ) ; and these the matic agreements could then be pressed into service as the rubrics for a "unifying theology of the C E " . A more robust "unifying theology" re quires more than linguistic or conceptual similarity; it requires a "gram m a r " that supplies a kind of " l o g i c " by which the collection's thematic agreements cohere together to form a distinctive, decisive whole greater than the sum of its theological bits. The principal rhetorical role of Jas is to provide such a g r a m m a r . First stated in general terms, the "subject" of this C E grammar is ar ticulated succinctly by Jas 2,22 that a congregation's profession of faith in God (2,19a) is " m a d e complete" by its obedience to the biblical Torah (1,22-25; 2,8-12); such acts of obedience are the criterion of friend ship with God (2,24; cf. 2,8) and insure the believer's eternal life with God (1,12; cf. 2,5). The collection's thematic agreements, then, cohere together as the "predicates" of this subject matter in stipulating a "nonPauline" (rather than "anti-Pauline") pattern of salvation that centers a congregation of believers (rather than a " w o r l d " of sinners) upon the performance of those " w o r k s " consistent with G o d ' s law (1,22-27; 4,417). By personifying devotion to God by observance of Torah's com37
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37. Tradition or source critical explanations of the linguistic similarities between Jas and 1 Pet or even Jas and 1 John typically presume a roughly similar date of composition. If Jas is a much later pseudepigraphy, as Nienhuis proposes, then the same linguistic or ideological similarities critics find that link Jas with other CE may well be rather the liter ary elements of a midrash-like composition that offers commentary on earlier, extant texts (namely 1 Pet, 1 John, perhaps Jude). In my opinion, this feature is consistent with the literary makeup of Jas; see WALL, Community of the Wise (n. 14), pp. 2 0 - 2 1 . 38. At least throughout the history of its interpretation, Paul's Letter to the Romans has supplied readers of the Pauline collection with a similar theological grammar. Even though the placement of Romans as the collection's frontpiece may be due to its length, its rhetorical role within the collection parallels that of Jas in the second collection: its puts into play a cache of Pauline convictions, and a logic that relates them together, that orients NT readers to the entire Pauline collection as a theologically coherent whole.
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mands, the theological grammar introduced by the canonical James (James of Acts, Letter of James) is the complement of (rather than the counterpoint to) Paul's more missional subject matter that sinners are initiated into life with God by their public profession of faith ("with their lips") that "Jesus is L o r d " (Rom 10,9). The effective result of their interplay within the biblical canon, Pauline and non-Pauline, aims at a more robust expression of G o d ' s gospel that lies at the heart of the ca nonical process. The shift of rubrics from "Catholic" to "non-Pauline" in the above summary intends to underscore the potential of my earlier observation that when the final redaction of the CE collection occurred, the canoni cal Paul (i.e., the Paul of Acts and the Pauline epistolary corpus) was al ready in place. It is reasonable to presume, then, that the formation of the CE collection had the Pauline collection in view all along - to "make complete" a Pauline understanding of the faith (so Jas 2,22). Understood from this new perspective, the formation of the CE into a collection reflects the catholicizing hermeneutics of the canonical proc ess by which the completion of a "non-Pauline" collection glosses the Pauline to complete the epistolary whole - a whole that instructs biblical readers regarding a pattern of salvation that concerns both the sinner's initiation into life with God and the believer's ongoing friendship with God. In fact, when considered holistically, it should be apparent to the reader that either epistolary grammar, Pauline or Catholic, when appro priated to the exclusion of the other will ultimately subvert the formation of Christian faith and life, which is the principal purpose of the biblical canon. Finally, then, let me first catalogue and then briefly discuss the fol lowing sequence of themes as the constitutive predicates of a unifying theology of the CE collection, which are introduced and logically ren dered by Jas as the framework for a distinctive articulation of the Chris tian faith: 1. Human suffering tests the faith community's love for God. 2. In response to the suffering of G o d ' s people, God discloses a "word of truth" to define the way of salvation. 3. In obedience to this word, the community must practice "pure and undefiled" behavior as the public mark of friendship with God. 4. Theological orthodoxy by itself is inconclusive of friendship with God and is made effective only when embodied in loving works. 5. Finally, the reward of steadfast obedience to G o d ' s word is eternal life with God.
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1. Human suffering tests the faith community's love for God. Accord ing to Jas, the principal threat to Christian existence is the suffering pro voked by "various trials" (Jas 1,2), which are not caused by God (1,1316) but are evidently inherent to a chaotic, demonic " w o r l d " (1,27b; 3,6.15-16). The crisis addressed by Jas is not finally sociological but theological and cosmic. While doubt (1,6-8; 3,9-10; 4,8), deception (1,13-16), broken relationships (2,2-3; 3,9-16; 4,1-2), and even of reli gious disaffection (5,19-20) are occasioned by social conflicts of one kind or another, their principal source is inward and deeply spiritual: human souls inclined toward doubting G o d ' s generosity (1,13-18) and even toward "friendship with the world" rather than with God (4,4-5; cf. 2,21-24; 3,5-6.9-12; 4,6-10.11-12.13-17; 5,1-6). That is, the real problem of suffering is its threat to a community's vital love for God. The most evident mark of the faith community's spiritual failure ac cording to Jas is the interpersonal strife between members (2,14-17; 3,6; 4,1-3) - the neglect of its elders in particular to "love neighbors", which is the essential ethos of G o d ' s people in contretemps with the cosmic order (1,26-27; 2,1-13). While Jas casts the problem of theodicy in terms of G o d ' s relations with faithful neighbors (2,5) who are poor and powerless (2,1-4), rather than with religious Jews as does Paul (cf. Rom 9-11), this theme is developed in Jas not so much in relationship to hu man suffering but rather to the community's response in an ever-faithful God when faced with "various trials" (1,13-18). Jas introduces a highly nuanced conception of Leidenstheologie , then, that defines Christian existence by the spiritual test that suffering occasions. While the com munity's suffering is provoked by a real opposition (2,6-7) and is typi cally expressed by real words (3,7-8), spiritual testing is cast in more cosmic terms whose real opponent is "the devil" (3,6.9-12; 4,4-5) in the midst of it all (4,7-10). 39
Petrine. The vocabulary of 1 Pet employs more "suffering" words than any other N T letter, including Jas. Suffering is the consequence of living faithfully as "strangers and aliens" within a pagan society (2,111 2 ) . And similar to Jas, the immediate cause of the community's suf fering is verbal slander, economic poverty, and political powerlessness (rather than physical abuse). More significantly, human suffering is the setting by which faith in God is tested and by which salvation of the soul 40
39. In an earlier study, I argued that the theological center of the non-Pauline episto lary collection is suffering; R . W . WALL, Introduction: New Testament Ethics, in Hori zons in Biblical Theology 5 (1983) 49-94. 40. See J.H. ELLIOTT, 1 Peter (AncB, 37B), Garden City, N Y , Doubleday, 2000, pp. 97-103.
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is confirmed (1,7-9). On this basis, God judges the community's re sponses to its suffering as the hard evidence of its salvation (1,17; 4,1219). Yet, 1 Pet extends the Leidenstheologie introduced in Jas by empha sizing the innocent suffering of faithful people, whose "good behavior" (i.e., obedience to G o d ' s will) is at odds with an immoral society. In this sense, suffering is not only the result of social circumstance but of moral conduct at odds with an ignorant and profane society (3,13-17; 4,1-6). For this reason, 1 Pet pays more attention than does Jas to the communi ty's relationship with hostile outsiders than with the effects of suffering on relations within the community. The community's pattern for responding to innocent suffering is established by Christ who fulfills the role of G o d ' s "suffering Servant" (2,21-25); he is both medium of G o d ' s salvation (1,18-19; 2,22-24; 3,18; 4,13) and exemplar for the suffering congregation (2,21; 3,17-18). In this way, 1 Pet defines Christian existence as a sharing in Christ's suf fering, which carries both a moral obligation and soteriological outcome. 2 Pet defines G o d ' s will by Petrine tradition. In this way, the "inno cence" of a believer's suffering is measured by compliance to what is taught as a word of righteousness (2,18-21; cf. 1 Pet 3,13-16). When 1 Pet and 2 Pet are studied together as integral parts of the collection's Petrine witness, the biblical reader is reminded that the spiritual failure most often provoked by suffering is to compromise or attenuate the community's core beliefs as a strategy for avoiding the very hostility generative of suffering. Typically, orthodoxy is the first casualty of hardship (see Jas 1,13-16). Johannine. J. Painter is correct when pointing out that " t h e purpose of 1 John is to address the confusion and heal the trauma caused by the de parture of schismatics who were, until recently, members of the Johan nine c o m m u n i t y " . The community's solidarity remains the central aim of these letters, which is threatened not so much by external pressures exerted by outsiders (religious or secular) as by "Christian" opponents "anti-christs" (2,18-22; 2 John 6 - 7 ) - whose conception of gospel truth is at odds with apostolic traditions about Jesus, the "word of life" ( 1 , 1 4). The result is the corollary of the Petrine witness: hardship is the first casualty of heterodoxy. More critically, this intramural conflict has evidently had a perva sively negative (= divisive) effect upon the community's life together and its religious identity in the world. But while this spiritual test con41
41. PAINTER, 1,2, and 3 John (n. 17), p. 85.
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cerns false teaching, its principal effect is moral. That is, the spiritual test concerns how to live a life of loving others; in fact, there is no gap whatsoever between knowing G o d ' s word, disclosed in the life of Jesus (2,6), and obeying G o d ' s command to love one another (2,7). In this fundamental sense, then, to respond rightly a God who is love is to love one another (4,7-21); and to love one another is to abide in God and so in eternal life (2,28-3,18). 2. In response to the suffering of God's people, God discloses a "word of truth" to define the way of salvation. Unlike a proverbial (and international) wisdom that learns productive responses to suffering from humanity's experience of it, Jas claims that a good and generous God (Jas 1,5) reveals a special "word of truth" (1,18) only to those suf fering believers who ask for and then receive it (1,6-8.21). Jas specifies the media of this word of divine wisdom are the community's Torah (1,22-25; 2,8-10; 4,11-12) and Jesus tradition (2,1), implanted and " h u m b l y " received within the faith community - presumably with the aid of "wise and understanding" teachers (3,1.13) - with the power to save suffering believers from death (1,21; cf. 1,13-16; 5,19-20) for life (1,12). Clearly for Jas, however, this redemptive word is practical, not dog matic. Truth claims are less about what to believe or in whom to trust, but regards how to live life together in a milieu fraught with suffering, powerlessness, false teaching, external threats and internal strife that subvert the congregation's solidarity with God and one another. For this reason, friendship with God rather than with the world requires the con gregation to control those internal desires that provoke intramural strife (4,1-3; 3,6-8.9-12) and promote disregard and even the "murder" of the righteous poor (2,2-4; 5,1-6) who are the very ones whom God has elected as heirs of the coming kingdom (2,5). In this sense, then, a rejec tion of the "word of truth", which trains the community how to respond to the testing of its faith in God, will lead to spiritual failure and onward OTTO zf\q yeevvri? (3,6). Petrine. The Petrine response to innocent suffering is also disclosed to the faith community in a divine word; however, for 1 Pet this word does not articulate a practical wisdom but proclaims a gospel (1,22-25); it is kerygmatic, not sapiential. For the Petrine tradition, Jesus is not merely the exemplar of the life-saving word but its very subject matter and me dium. Pushed farther back, the initial articulation of this christological word is prophetic (= Isaian; cf. l,24-25a; 2,22-25); it concerns Jesus' suffering (1,10-12), which is then "preached to y o u " (1,12.25) for the
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salvation of souls (1,9). Accordingly, 8 i a Xoyov t^&VToq GeoO (1,23) is transformed by apostolic proclamation into the Lord's T O (5>fj|ia (1,25); and the convert's "rebirth" into purity/holiness of life is the effective result of accepting this christological word as the ultimate source of the faith community's theological formation and sociological orientation (2,2; cf. 4,11). In this sense, the word actually initiates the community into Christ's suffering, which is a salient feature of "rebirth". While the idiom of the Petrine tradition is different than Jas, then, its logic is made even more explicable by the theological " g r a m m a r " intro duced by Jas. Both agree that there is a connection between the commu nity's reception of the divine word and its righteous response to suffer ing; and both conclude that the character of the community's response to the divine word is purity before God, which is validated by obedience to God's truth and evinced by friendship within the household of faith (1,22; cf. 2,15; 3,17; 4,2.19). 2 Pet adds a dramatic apocalyptic gloss to this redemptive formula, so that whatever and whoever does not embrace the divine word (now reified in 2 Pet as apostolic tradition) is "stored up for the day of judg ment and destruction of the ungodly" (3,7) and thereby excluded from existence in the "new heavens and a new earth in which righteousness dwells" (3,13). In this sense, 2 Pet transforms the motive for the con vert's new life of holiness into which s/he is initiated by the word of God and by which is realized within a community of loving relation ships (1 Pet 1,22-25): no longer is it the generative powers of the divine word but the imminence of G o d ' s coming, cosmic triumph. Johannine. Similarly, the Johannine epistles articulate the importance of the "word (Xoyoq) of life" (1,1), which is also funded by memories from Jesus' life (1,2) and is coextensive with the apostolic proclamation/ traditions of the gospel (1,3-4; 2 John 7 - 8 ) . This word is the truth and exposes what is therefore false; moreover, it is this christological word the community must obey as G o d ' s commandment (2,3-7). As with 1-2 Pet, the subject matter of this divine word, currently transmitted to believers by apostolic traditions, concerns Christ's life (2,6) and stipu lates a moral directive to "love one another" (cf. 1 Pet 1,22-25). In fact, Christ's love for others defines more precisely the character of loving one another as self-sacrificial (4,10) in contrast to the world that orders affections by self-centered preoccupations with "the things in the world" (2,15-17; cf. 3,11-18; 2 John 5-7). To live as Jesus lived is to obey God; and to obey G o d ' s "new commandment" personified by Je sus is to supply the hard evidence of the believer's purity (3,3; cf. 4,10) whose reward is eternal fellowship with God (3,4-10).
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Jude. As with other CE, Jude defines the terms of "our common sal vation" by apostolic traditions (vv. 3.17.20), but then washes them with Israel's story cued by constant references to well-known OT and Jewish " t y p e s " of events and persons (vv. 5-16). The resulting "biblical" con ception is that doctrinal error is morally constructed even as eternal life with God is morally conditioned (vv. 21-23). Likewise, those who per form "ungodly d e e d s " will be judged (vv. 14-16) and punished (v. 7), especially those "ungodly persons who pervert the grace of our God by licentious behavior" (v. 4 ; cf. vv. 8-11). In fact, Jude contends that such behavior constitutes a denial of Jesus (v. 4) and is devoid of the Holy Spirit (v. 19). While no mention is made of human suffering, which probably does not apply to the letter's implied readers (who probably are members of a politically stable middleclass congregation), their suffering nonetheless is prospective of a. future situation, when those who have departed from the moral rigors of the apostolic tradition for the shameful behavior in spired by false teachers (vv. 4.11-13.14-16) will undergo " a punishment of eternal fire" (v. 7). This proffers an apocalyptic rendition of the Petrine tradition's conviction that sometimes suffering is the just des serts of evil behavior. u
3. In obedience to this word, the community must practice pure and undefiled behavior as the public mark of friendship with God. While suffering tests a community's faithfulness, faithfulness remains the crite rion of its end-time salvation according to the CE theological concep tion. Rather than a code of right conduct that demands rigorous compli ance, however, the most important element of the moral universe intro duced by Jas consists primarily of congregational purity practices. While the interior life of the individual believer is surely an important feature of this same moral universe, the "word of truth" for "religion" that stands "pure and undefiled" before a holy God stipulates that the con gregation must resist the moral pollutants of the surrounding "world" (or anti-God) order (1,26) and care for the needy neighbor in accordance with G o d ' s "perfect law of liberty" (1,27; 2,1-13). There is a sense in which the rest of the composition articulates more fully what practices a "pure and undefiled" congregation performs as acceptable to God (cf. 2,24). I note four purity practices in particular, which are - signifi cantly - consistent with the portrait of the church in Acts: 11
a. The legacy of the Jewish piety personified by legendary James is articulated in the letter as a piety of povertyIpowerlessness, of which the Lord Jesus himself is exemplary (Jas 2,1), which may occasion suffering
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that tests the community's devotion to God. In fact, according to Jas the hallmark of religious purity is to protect and care for the poor (1,27; 2,27) in keeping with Torah's stipulation (2,8; cf. 1,25). This practice of a community of goods reflects an asceticism - a world-denying ethos that has replaced the world's preoccupation for material goods with a heartfelt devotion to God (4,1-5,6; 1 John 2,15-17). b. The concern of a community of goods for a radical social purity ex tends also to speech (Jas 3,17) as a principal element of good human re lations, which identifies a collective interest in healthy speech patterns as a fundamental moral property of Christian existence (1 Pet 3,13-17; 2 Pet 2,3; 1 John 3,18; 3 John 10). c. The literary inclusio of Jas (1,1 and 5,19-20) delineates a kind of spiritual Diaspora that frames another practice of the community's ethos: a commitment to the practice of rescuing wayward believers from theological and moral error not only to preserve doctrinal purity but also to insure their end-time salvation (cf. 2 Pet 2; Jude 17-25). d. The thematic of hospitality found in Jas, not only to strangers as in 3 John but also to marginal members of one's own congregation (Jas 1,27; 2,14-17), is central to the CE discourse on Christian community (cf. Jas 2,14-17; 1 Pet 1,22; 4,9-11; 1 John 3,17-20a; 2 John 9 - 1 1 ; 3 John 5-8). What is critical about the development of this theme is that hospitality is never proffered indiscriminate of spiritual status; thus, for example, according to 2 John 9-11 and 3 John 5-8 hospitality is rendered (or not) only to those who have been purified (see 1 John 3,3) by the "doctrine" of the "word of life" (2 John 9 - 1 1 ; cf. 1 John 1,1-4). In this way, then, hospitality toward other believers is an effective means for maintaining a congregation's solidarity against its external threats but also is the concrete demonstration of its separation from the world order (cf. Jas 1,27). 4. Theological orthodoxy by itself is inconclusive of friendship with God and is made effective only when embodied in loving works. Purity and Christian love are inextricably linked in the C E ; in fact, this agree ment, introduced and illustrated by Jas 2,14-26, is pivotal to the collec tion's theological grammar. On the basis of a traditional reading of Abraham's precedent, Jas concludes that " a person is justified by works and not by sola fide" (2,24). Jas does not argue that works replaces faith but that a profession of faith, no matter how orthodox, cannot be incanted as sacred magic and productive of divine approval (2,14-17). Rather the profession of an orthodox faith (2,19a), if not demonized and divinely approved (2,19b-20.21-24), must be embodied in those works
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that bear public witness to the community's friendly relations with God (2,25-26) and neighbor (2,8-13). If the trajectory of the canonical Paul at the time Jas was infolded into the collection as its frontpiece evinced the kind of fideism opposed by this text, then the importance of Jas - and indeed of the collection it in troduces - for regulating the mutual criticism of the N T ' s two epistolary corpora cannot be underestimated. The saving works Jas delineates are those congregational purity practices (see above) that especially secures the spiritual (5,19-20) and physical (2,1-7.14-17) well-being of other be lievers Petrine. The hortatory mood of the Petrine tradition, which equates right conduct with G o d ' s will (3,13-17), is framed by twofold belief that extends and clarifies the core conviction of Jas that the believer is justi fied in G o d ' s sight by good works and not by orthodox confession alone. G o d ' s people have been "reborn" to obey God in a manner predicated by G o d ' s own holiness (1,13-16): a holy "Father" not only begets holy "children" but stipulates their holy conduct as well. G o d ' s measurement of human conduct is not paternalistic but is a function of G o d ' s holy character that renders impartial judgments of all people (1,17), whether or not they have performed good works that accord with G o d ' s will (3,17; cf. 1,25=3,18-22; cf. R o m 2,5-11). The subtext of this Petrine claim is christological: namely, that "Christ suffered for you, leaving for you an example that you should follow in his steps" (2,21). Not only is Jesus the agent of G o d ' s mercy that finds and purifies a people belonging to God; his example stipulates the man ner of obedience in suffering that has a redemptive result now (2,12; cf. 3,18-21) and in the coming age (so 2 Pet 3,10-11) . Johannine. The theological crisis that has generated the succession of "anti-christs" from the faith community is the separation of the faith community's loving works from its traditional beliefs about Christ. The rhetorical " w o r l d " of these epistles is ecclesial, divided along the lines of right and wrong beliefs: what the false teachers - the "anti-christs" believe about Christ and about the nature of the Christian life these be liefs engender reconstitutes another sort of religious " w o r l d " from which a purified people must separate. Confession of traditional beliefs about Christ, which can be known only through the "anointing" of abid ing in him (2,20.27), is only one necessary piece of evidence that a peo ple are now participating in new life with God; the mere profession of faith is insufficient (cf. 3,18) and requires the assurance that only the 42
42. See WALL, The Canonical Function of 2 Peter (n. 16), pp. 72-74.
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" d e e d " of loving one another provides (3,17-24). Confirmation that a people truly abides in the "truth" that belongs to God is right conduct: "the person who does right is righteous...whoever does not do right is not of God, nor is the one who does not love other believers" (3,7). That is, to maintain fellowship with God requires the more holistic evidence of right beliefs and right behaviors; since one without the other is con trary to the truth and will subvert, therefore, the congregation's assur ance of G o d ' s eternal love (3,18-24). 5. Finally, the reward of steadfast obedience to God's word is eternal life with God. According to James, the believer who perseveres through trial and tribulation with love for God and neighbor intact with be blessed by God with the "crown of (eternal) life" (Jas 1,12; cf. 2,5; 4,512). The horizon of the "salvation of the soul", which is the destiny of those who obey the divine word (1,21.22-25), is set in the future when the Lord comes (5,7-9) to restore and complete human existence (1,3-4). At that concluding moment of salvation's history, God promises to grant to those who obey G o d ' s word, especially its principal command to love of the poor and powerless neighbor (2,8-13), whatever they lack (1,34 . 9 - l l ) . Conversely, those who fail God and disobey G o d ' s "law of liberty" will be shown no mercy (2,13), will be judged and then de stroyed (5,4-6). For only God has authority to judge the foolish and bless those who purify themselves and pursue G o d ' s will (4,7-12; 5,5-11). 43
Petrine. Following the lead of Jas, 1 Pet posits the "salvation of the souls" will be fully disclosed at the future "revelation of Jesus Christ" (1,7.13; cf. 4,13; 5,4). While the hope of this future salvation is one out come of faith (1,9) and is made possible by the "precious blood of Christ" (1,19), the authenticity of a faith that saves is validated by the believer who "does right" according to G o d ' s will (3,17). The moral force of this moral contingency is made more urgent because "you may suffer many trials", which occasion a testing of faith (l,6b-7a). The ab sence of holy works, which denotes spiritual failure, will not secure therefore a favorable verdict from the Holy Father, whose impartial judgment is not of the orthodoxy of a sinner's faith but of the holiness of a believer's works (1,13-17). Significantly, the beginning point for 2 Pet's conception of the future is not the resurrection of Jesus but his transfiguration (1,16-17). The pre cise reason for this shift from 1 Pet's emphasis on the resurrection is not clear to me, although perhaps its tacit appeal to the Petrine tradition (Pe43. See WALL, Community of the Wise (n. 14), pp. 49-50.
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ter = eyewitness to Jesus' messianic authority) intends to justify a dis credited account of future (= delayed parousia) that is promoted by apos tolic teaching (cf. 3,1-4). In this sense, Christ's transfigured "majesty" is the prolepsis of "the power and the parousia of the Lord Jesus Christ" (cf. 1 Pet 5,1), and those false teachers who disbelieve that God is capa ble of either creation's destruction or its new beginning (3,3-4) or a judgment of believers' moral actions will themselves be discredited . Johannine. When compared to the fourth gospel, the final form of the Johannine letters emphasizes the faith community's future reward at the parousia of Jesus (1 John 2,28), which will be made "complete" even as it is " w o n " by G o d ' s children who abide in "the doctrine of Christ" (2 John 8-9). The particular distinctive of this future reward is to see God as God is (1 John 3,2), which is a status of intimacy and revelatory insight allowed only the Son to this point (cf. John 1,18). For this, then, the true believer " h o p e s " (1 John 3,3a); however, it is real possibility only for the believer who "makes himself pure just as Christ is p u r e " (3,3b) - a purity whose character agrees with the moral competence of Jesus (cf. 2,6). A future that can realistically envisage God-likeness (3,2) as its reward is logically heralded by a present lifestyle that embodies the morality of Christ. 44
Such is the "eschato-logic" of the Johannine letters that underscores the moral competence of those who abide in doctrinal truth: God's na ture abides in the believer so that the one reborn of God does not commit sin (1 John 3,4-10; cf. Jas 1,13), for "everyone who does right is born of G o d " (2,29) and on this basis " w e may have confidence and not shrink from God in shame at (Jesus') c o m i n g " (2,28). Not only will this event disclose the legitimacy of a cruciform community's response to God in following the lead of G o d ' s Suffering Servant; but the Lord's future re turn purposes to disclose G o d ' s final triumph over hostile forces that continue to provoke the suffering (and martyrdom?) of G o d ' s holy chil dren. Jude. While the particular circumstances of Jude are different than those envisaged in Jas, the structure of the author's recommended re sponse to their eschatological situation follows its theological grammar: believers are to rescue those communicants who have failed spiritually from "the fire" (v. 23a; cf. Jas 5,19-20) while maintaining their own purity (v. 23b; Jas 1,26-27) by engaging in the religious practices of the "most holy faith" (vv. 20-21; cf. Jas 1,12.27). To love God is to obey God (v. 22; cf. 1 John 4,16) and to obey God is have mercy for others (v. 2 3 ; cf. Jas 1,22-2,26). 44. Ibid., pp. 77-79.
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What seems increasingly clear from the CE collection, then, is not only a firm resistance against any divorce of right belief from moral behavior but an equally firm conviction of the eternal consequence of a Christian faith that is not imbued with right conduct. Sharply put, the faith community's participation in G o d ' s coming triumph is conditioned upon its ongoing obedience to God as G o d ' s word is defined by the con gregation's authoritative traditions (biblical, Jesus, apostolic). The doxology of Jude supplies an apt peroratio of the entire CE col lection, concluding by iterating its central subject matter a final time in eschatological garb: the future prospect of a believer's eternal life with God is motivated by the implicit demand to live presently "without (moral) blemish" and preserved "from falling (into sin and death)" not only by "building yourselves up in your most holy faith ... (and) keep ing yourselves in the love of G o d " (vv. 20-21) but also by the actions of a congregation whose vocation it is to save those immature believers "by snatching them out of the fire" (vv. 22-23). Seattle Pacific University School of Theology Seattle, W A 98119 U.S.A.
Robert W. W A L L
JAMES
THE W I S D O M O F JAMES A N D T H E W I S D O M O F JESUS
A COMPENDIUM OF THE WISDOM OF JAMES
1
The prescript of the epistle of James characterizes it as an encyclical from James of Jerusalem, the brother of Jesus, to Jewish believers in Je sus throughout the Jewish diaspora. This epistolary situation is entirely plausible. It corresponds to the central authority of the mother church in Jerusalem, with James at its head, the situation that obtained during James's lifetime. In the light of recent discussion, I see no reason to con sider the epistolary situation fictional or the work to be pseudepigraphal . Like many ancient letters, there is nothing specifically epistolary about the content of the epistle. The letter form merely enables the con tent to be communicated across a distance. With regard to all but the prescript, the genre of this work, as is now widely recognized, is wisdom instruction, broadly in the tradition of such Jewish works as Proverbs, the Wisdom of Ben Sira, Pseudo-Phocylides, and some of the wisdom texts from Qumran. In my view it is a compendium of J a m e s ' wisdom, no more directed to one specific situation than those works were, but rather forming a collection of wise instruction on living in the Christian way, compiled to serve as a permanent resource for Jewish Christian communities to draw on in a variety of ways. Like Ben Sira's work it probably arose partly out of the oral teaching of its author, the Jewish sage James, but at the same time has been carefully composed. Whatever may be the case for earlier periods, in the New Testament period Jewish wisdom literature does not, as such, express a different worldview from other types of Jewish literature. The alliance of wisdom and Torah was at least as old as Ben Sira, while the integration of wis dom and eschatology (including so-called apocalyptic eschatology) is evident both from the wisdom elements in the Enoch literature, of which 2 Enoch is especially interesting for the prominence of wisdom instruc tion within the framework of an apocalypse, and also from the eschatological elements within works of wisdom instruction, especially 2
1. For much of this paper, I draw on material that treats the subject in more detail in my book: James: Wisdom of James, Disciple of Jesus the Sage, London-New York, Routledge, 1999, especially chapter 2. See also R. BAUCKHAM, James and Jesus, in B. CHILTON - J. NEUSNER (eds.), The Brother of Jesus, Louisville, KY, Westminster John Knox, 2001, pp. 100-137. 2. For more detail, see BAUCKHAM, James (n. 1), pp. 12-25.
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R.J. BAUCKHAM
the Qumran wisdom texts. Genres, such as apocalypse and wisdom in struction, do not indicate different Judaisms but different literary func tions. While an apocalypse reveals eschatological and other secrets, wis dom instruction provides wise advice on how to live, which may well, as in James, appeal to Torah as well as to the wise person's insight and re flection, and may well, as James does, invoke eschatological expecta tions to provide sanctions, motives and criteria for right action. The typical literary unit within wisdom instruction is the aphorism, and in this paper we shall give particular attention to the aphorisms within James. The first chapter of James, which functions as an epitome of the whole, is almost entirely an anthology of aphorisms, and, while the rest of the work does employ other forms, such as argumentation in diatribe style and a prophetic judgment oracle, these chapters are also peppered with carefully crafted aphorisms, which often serve to sum up a topical section or to encapsulate a key insight. It is especially the apho risms of James that enable close comparison, in both formal and the matic terms, with other examples of wisdom instruction and with the Synoptic teaching of Jesus, which also comprises for the most part apho risms. It is now widely recognized that Jesus himself taught to a large extent in the manner of a Jewish sage, even if this is not a fully adequate ac count of him as a teacher. Collections of Jesus' sayings, such as those in the Q material or in the Matthean Sermon on the Mount, can be seen as compendia of Jesus' wisdom. But recognizing that both Jesus and his disciple James were wisdom teachers raises the question of how the teaching of the sage Jesus is reflected in that of his disciple James, him self a wisdom teacher. Putting the question of the relationship of James to the sayings of Jesus in these terms enables us to break out of the rather narrow confines in which the subject has mostly been discussed, limited largely to the issue of allusions in James to the traditions of Je sus' sayings. There are, of course, no attributed citations of Jesus' teaching in James, though in one case James does come close to reproducing a say ing of Jesus which occurs in the Synoptic traditions (Jas 5,12; Matt 5,33-37). The extent to which there are also allusions to the sayings of Jesus in James has been much - and rather inconclusively - debated. The most thorough study, by Dean Deppe (unfortunately not easily ac cessible), lists the 184 parallels that were suggested by sixty writers on James up to 1985 . Deppe's own careful and cautious study of the most 3
3. D.B. DEPPE, The Sayings of Jesus in the Epistle of James (Dissertation, Free Uni versity of Amsterdam, 1989), privately published: Chelsea, MI, Bookcrafters, 1989, pp. 231-238.
THE WISDOM OF JAMES AND THE WISDOM OF JESUS
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often cited concludes that there are in James eight "conscious allusions" to Synoptic sayings of Jesus , thus: 4
Jas 1,5 Jas 2,5 Jas 4,2 Jas 4,9 Jas 4,10 Jas 5,1 Jas 5,2-3a Jas 5,12
Matt 7,7; Luke 11,9; Matt 5,3; Luke 6,20b; Matt 7,7; Luke 11:9; Luke 6,21. 25b; Matt 23,12; Luke 14,11; 18,14b; Luke 6,24; Matt 6,19-20; Luke 12,33b; Matt 5,33-37.
Significantly, Deppe also concludes that "the primary parallels are those of common theme or subject matter rather than intended allusion or citation" . His own list of nine "ethical t h e m e s " that "are paralleled emphatically in the Synoptic gospels" is this: 5
joy in tribulation: Jas 1,2; 5,10-1 la; Matt 5,ll-12a; Luke 6,22-23a; faith and doubting: Jas 1,6; Matt 21,21; Mark 11,23; exhortations against anger: Jas 1,19-20; Matt 5,22; hearing and doing: Jas 1,22-25; Matt 7,24-26; Luke 6,46-49; 8,21; and faith and action: Jas 2,14; Matt 7,21; Luke 6,46; the love commandment: Jas 2,8; Matt 22,39; Mark 12,31; Luke 10,27; mercy: Jas 2,13; Matt 5,7; 9,13; 12,7; 18,33-35; serving God versus loving the world: Jas 4,4; Luke 16,13; Matt 6,24; refraining from judging: Jas 4,11-12; 5,9; Matt 7,1; Luke 6,37; those who persevere in trial will receive a blessing: Jas 1,12; 5,10-1 la; Matt 5,1 l-12a; 10,22; Luke 6,22-23a . 6
Deppe has probably taken this method of approach to the relationship between James and the Gospels as far as it can be taken. In the nature of the case, and as is easily seen by comparing the differing results of vari ous scholars, judgments will differ as to what should or should not count as parallels and as to how the parallels should be classified. Deppe's judgments may well be contested case by case. But it is more important to question whether "allusion" is really the most helpful category with which to approach the issue. I myself doubt that even Deppe's eight "conscious allusions" should all count as such, if "conscious allusions" means that implied readers of James are expected to recognize these as allusions to sayings of Jesus, or that such readerly recognition of allu sions is part of the literary strategy of the text. In my view, Deppe's cat egorization of the material as either "intended allusion" or thematic par allel distorts the phenomena. The latter category, while it highlights im pressive parallels that cannot truly be called allusions, downplays the 4. Ibid., pp. 219-223. 5. Ibid., p. 221. 6. Ibid., pp. 222-223.
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role of specific sayings of Jesus in informing James' own formulations of the themes. W e need to consider the parallels in a way that transcends the alternative of allusion and thematic parallel, and that avoids the in conclusive attempt to decide which parallels constitute allusions. Recognizing James as a wisdom teacher who was a disciple of Jesus the wisdom teacher makes available to us a perspective on the relation ship that is both deeper and broader than the category of allusion allows. My proposal is that as a disciple of Jesus, James was deeply informed by the teaching of his master and made it his own, but, as a wisdom teacher in his own right, he re-expressed it and developed it as his own teaching, both profoundly and broadly indebted to Jesus' teaching and also at the same time characteristically his own. His relationship to the teaching of Jesus is not, for the most part, allusive, in the sense that the implied readers are expected to find that specific passages of James recall to their minds specific sayings of Jesus. This may happen, but it is not the main point. Rather James' relationship to the teaching of Jesus is one of creative indebtedness which makes all of James' teaching a wisdom in the style and tradition of his master Jesus.
B E N SIRA AS A M O D E L OF TRADITION AND CREATIVITY IN THE WORK OF A WISDOM TEACHER
Prior to Jesus and James, we have only one substantial body of wis dom teaching attributed authentically to a named wisdom teacher, that of Jeshua (Jesus) ben Eleazar ben Sira. The way in which Ben Sira related to the existing tradition of Jewish wisdom and especially to the book of Proverbs provides an instructive model for the way in which James may have related to the existing tradition of Jewish wisdom and especially to the teaching of Jesus. Ben Sira situated himself at the end of a long line of wisdom teachers: Now I was the last on watch; I was like one who gleans after the grape-gatherers; by the blessing of the Lord I excelled, and like a grape-gatherer I filled my wine press (33,16-17). In the initially modest role of gleaner, gathering up, through his study of the Scriptures and other wisdom traditions, what his predecessors had left behind them, Ben Sira made such progress that he succeeded - as gleaners usually do not - in filling a wine press himself, just as his pred ecessors had done. In other words, from his study of the tradition he was able, by G o d ' s blessing, to produce his own wisdom teaching, indebted
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to the tradition, but very much his own contribution. In a parallel image (24,30-31), he sees his role as a student and teacher of wisdom in the first place as a water channel, irrigating his garden with water chan nelled from the river of traditional wisdom, but his channel then be comes itself a river and finally a sea. The scriptural sources of wisdom, not only in what we know as the wisdom literature of the Hebrew Bible, but also in the Torah and the prophets, Ben Sira studied intensively, as he depicts the ideal scribe do ing: He seeks out the wisdom of all the ancients, and is concerned with prophecies; he preserves the sayings of the famous and penetrates the subtleties of parables.... If the great Lord is willing, he will be filled with the spirit of understanding; he will pour forth words of wisdom of his own... (39,1-2.6). The role therefore involves passing on the accumulated wisdom of the tradition, but also penetrating its meaning, drawing out its insights, de veloping it in new ways. Truth is fundamentally what is inherited, but the student who has entered thoroughly into the tradition and himself become a sage (cf. 6,32-37; 18,29), inspired with the divine gift of un derstanding (cf. 24,33), is a creative exponent of the tradition, interpret ing it in fresh formulations of his own. What Ben Sira did himself on a grand scale is what he says of the wise person: When an intelligent person hears a wise saying, he praises it and adds to it (21,15a). It is in keeping with this conception of his role as a sage that Ben Sira, despite his enormous indebtedness to the book of Proverbs, never quotes a saying (a verse) from it. Only three times does he reproduce word-forword as much as half a verse from Proverbs, leaving himself free to de velop it creatively (Sir 1,14a = Prov 9,10a; Sir 27,26a = Prov 26,27a; Sir 28,8b = Prov 15,18a). Elsewhere sayings clearly inspired by Prov erbs may take over a word or phrase from their source, but, even when they reproduce precisely the idea in the source, they reformulate it in a new way. Sometimes a new saying corresponds in concept quite closely to one in Proverbs without any verbal resemblance. Or a saying of Ben Sira may give a further twist to an idea found in Proverbs. While Prov erbs forms the major repository of wisdom on which he draws, other sources are treated in much the same ways. Some examples will illus trate this pattern of creative relationship to existing formulations of wis dom:
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You shall love the LORD your God with all your heart, and with all your soul, and with all your might (Deut 6,5)
With all your soul fear the LORD, and revere his priests. With all your might love your Maker, and do not neglect his ministers (Sir 7,29-30).
[God] raises the poor from the dust, and lifts the needy from the ash heap, to make them sit with princes, with the princes of his people (Ps 113,7-8; cf. 1 Sam 2,8).
The wisdom of the poor man lifts his head high, and seats him among princes (Sir 11,1).
Whoever sows injustice will reap calamity, and the rod of his anger will fail (Prov 22,8).
My son, do not sow in the furrows of injustice, and you will not reap a sevenfold crop (Sir 7,3)
He who finds a wife finds a good thing, and obtains favour from the LORD (Prov 18,22).
A good wife is a great blessing; she will be granted among the blessings of the man who fears the LORD (Sir 26,3).
Grey hair is a crown of glory, and it is gained in a righteous life (Prov 16,31)
Rich experience is the crown of the aged, and their glory is the fear of the Lord (Sir 25,6).
A stone is heavy, and sand is weighty, but a fool's provocation is heavier than both (Prov 27,3).
Sand, salt, and a piece of iron are easier to bear than a stupid person (Sir 22,15).
Better is a man of humble standing who works for himself than one who plays the great man but lacks bread (Prov 12,9).
Better is a man who works and has an abundance of everything, than one who goes about boasting but lacks bread (Sir 10,27).
Toward the scomers he is scornful, but to the humble he shows favour (Prov 3,34).
The greater you are, the more you must humble yourself; so you will find favour in the sight of the Lord (Sir 3,18).
Other forms of creative relationship to his sources involve more ex tensive passages of Ben Sira's work. Sometimes a number of different passages have come together in Ben Sira's study and contributed to a passage indebted to them all (e.g. Sir 27,32-37; cf. Prov 10,10a; 6,1219; 26,23-28; Eccles 10,9; Ps 9, 15-16; Theognis 93-96). Often a say ing from Proverbs or elsewhere provides a theme which Ben Sira devel-
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ops at greater length (e.g. Prov 3,27-28: Sir 4, 1-5; Prov 14,20: Sir 13,21-23; Prov 14,21: Sir 10,19-24.30-31; Prov 18,24: Sir 6,5-17; Exod 20,12: Sir 3,1-6). In summary, since the appropriate response of a sage to a wise saying is to add to it (21,15a), since a sage's skill is shown in creating apt prov erbs (18,29), since the role of a sage is to express as his own wisdom in his own formulation the wisdom he has gained from his intensive study of the tradition, Ben Sira transmits and develops the tradition without simply repeating it. This reformulation and development of the tradition is, of course, in part contextual. Old wisdom needs to be adapted to new contexts and to be developed in line with fresh developments of thought. But it is important to notice that Ben Sira's avoidance of repetition can not by any means be fully explained by such contextual adaptation and development. Even where the old wisdom would, in his eyes, have been wholly applicable as it stands, still he reformulates the old wisdom, be cause it is the role of the sage to make the old wisdom his own and to express it as his own wisdom. It follows that in most cases where verbal echoes of his scriptural sources occur, we should probably not regard these as allusions to Scrip ture, in the sense of deliberate intertextual pointers, meant to call the scriptural text to the reader's mind. Only in a very few cases should we identify something like a citation of Scripture intended to be recognized as such (notably Sir 1,14a). Informed readers, students of wisdom like Ben Sira himself, would recognize the profound continuity between scriptural wisdom and his work, but not more so when he happens to pick up words from his source than when he does not. The analogy with Ben Sira can now help us to appreciate the similar way in which James relates to the wisdom tradition before him, both Jewish wisdom in general and in particular the sayings of Jesus, which to some extent occupy for James the position which Proverbs occupies for Ben Sira, as the major source of his wisdom. It is true that there are in James some formal citations of Scripture (2,8.11, 2 3 ; 4,6; cf. 4,5), but these occur in argumentative sections in which James is establishing a point in debate. In the parts of his letter that are more typical of tradi tional Jewish wisdom teaching in style he does not quote. Like Ben Sira, James, even at his most traditional, does not repeat; he reformulates. This model provides a more plausible way of understanding J a m e s ' rela tion to the tradition of the sayings of Jesus than the quest for allusions as such. James is a sage who has made the wisdom of Jesus his own. He does not repeat it, but he is inspired by it. He creates his own wise say ings, sometimes as equivalents of specific sayings of Jesus, sometimes
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inspired by several sayings, sometimes encapsulating the theme of many sayings, sometimes based on points of contact between Jesus' sayings and other Jewish wisdom. The creativity and artistry of these aphorisms are missed when they are treated as allusions to sayings of Jesus. But the indebtedness of James's wisdom to Jesus is much greater than verbal re semblances would show. W e shall see that his sayings bear relationships to the teachings of Jesus even when there is not verbal resemblance, that the range of themes his wisdom treats resembles that of Jesus' teaching, and that in broad characteristics his wisdom also resembles that of Jesus.
JAMES AND JESUS: APHORISTIC FORMS
Both the Synoptic sayings of Jesus and the aphorisms of James em ploy a wide range of types of aphorism. Elsewhere I have shown in de tail that all of the various types of aphorism employed by James are also to be found in the sayings of Jesus as well as in Jewish wisdom instruc tion . But the correspondence between the sayings of James and those of Jesus is especially notable in the case of similitudes, that is, relatively short comparisons or parables. While James has no parallels to the long narrative parables of the Gospels, he does use a variety of forms of shorter similitude, most of which also occur in the sayings of Jesus, con siderably fewer in Jewish wisdom instruction . 7
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JAMES AND JESUS: N E W APHORISMS FOR O L D
In examining some selected aphorisms of James to see how they are creatively indebted to traditional sources, especially the sayings of Jesus, it will be helpful to begin with one example that is not related to the say ings of Jesus, before going on to consider examples that are related in a variety of ways to sayings of Jesus: Example
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Be quick to hear, but slow [or: with patience] to answer (Sir 5,11 Hebrew). Be quick to hear (ra%\)q £v dicpodaei GOD),
7. BAUCKHAM, James (n. 1), pp. 35-48. 8. Ibid., pp. 48-56.
ECTTCO 0 8 nac, avBpcorcoq xa^ix; el 7iV£D|!aTi (Matt 5,3) or Matthew's antithetical framing of the prohibition of oaths (Matt 5,33-36) . Nothing in James points to knowledge of Matthaean redaction . 32
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4. There remains a number of scholars who hold that the letter is not pseudepigraphal, a view that leads to a different approach to the three puzzling features listed above. Among these it is common to explain the contacts with the Jesus tradition as a matter of J a m e s ' o w n memories. The lack of attribution of the sayings and of exact correspondence to known Jesus-sayings is made a function of the author's peculiar psychology, having completely internalized his brother's thought and made 3 1 . The International Q Project (IQP) reconstruction of Q 6 , 2 3 is xaipexe Kai läyaXXiäcQsJ, öxi 6 uiaOö«; 6|xa>v noXbq £v xa> oupavar omcoq jap |[£8icö£av] xoix; 7tpo(pr|xä